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  • Hier à 15:44
    Nirlys avait constaté à son arrivée que les personnes peuplant le petit campement était plutôt très hétéroclites sans compter ceux dont l’apparence humaine pouvait cacher des surprises ou des secrets. Elle s’était fait la réflexion qu’il aurait pu être judicieux de connaître les espèces qui composait au moins son groupe afin de ne pas commettre d’erreurs pouvant être fatales.

    Elle comptait se rendre à la tente qui était dédiée aux Forces Médicales Reikoises avant que ses yeux rubis ne se posent sur une silhouette et un visage qu’elle connaissait. Le temps qu’elle arrive, Enira s’était séparé d’une jeune femme avec qui elle marchait et conversait. Dommage, elle aurait pu faire la connaissance de quelqu’un d’autre, mais ça n’était pas très grave, elle en aurait l’occasion plus tard.

    Elle avait salué la louve sans savoir si celle-ci allait la reconnaitre, après tout, cela faisait un moment qu’elles ne s’étaient pas vu malgré la proposition de l’elfe de dispenser des cours à la blonde qui se trouvait en face désormais face à elle.

    Pour son plus grand soulagement, elle sembla la reconnaitre, lui faisant une remarque sur ses vêtements. Nirlys la dévisagea, lors de leur rencontre, celle qui avait passé le plus de temps à moitié nue était la lycanthrope et pour ce qui était de la question de la présence de celle-ci ici, et bien, elle n’avait pas la réponse.

    Elle se fit inviter pour boire un coup et elle eut la sensation de ne pas trop avoir le choix alors, elle avait suivie la seule personne qu’elle connaissait ici. La louve avait déjà l’air désespérée voir presque agacée. De quoi elle s’excusait exactement ? De l’avoir embarqué pour boire.. de l’eau ? L’elfe grimaça en voyant l’eau couler sur les cheveux d’or d’Enira et sur cette tresse qui était.. faite. Elle secoua la tête de gauche à droite.

    -Non merci, c’est gentil.

    Nirlys profita de ce moment pour ne garder de son baluchon que sa poche de matériel médical qu’elle accrocha à sa ceinture, sur sa hanche droite, à l’opposer de celle où était sa dague que son père lui avait offerte il y avait de ça quelques années maintenant. Elle garda aussi deux, trois pommes dans sa poche.

    Elle tourna son visage fin vers la voix qui s’était approchée. La fille qui était avec Enira tout à l’heure. Elle lui sourit, à première vue, celle-ci lui semblait gentille et peut-être un peu timide.

    -Enchantée, je suis Nirlys. Je fais aussi partie des FMR, pour la porte du Soleil.

    Elle poussa son baluchon de pied, elle comptait le laisser là, de toute façon, il n’y avait plus rien de valeurs à l’intérieur, seulement des vêtements. Elle reporta à nouveau son attention sur la blonde aux cheveux courts. Elles étaient censées se connaître ?

    -Oui, je suis née à Melorn, mais je suis désolée, votre visage ne me dit rien.

    L’elfe était vraiment gênée de ne pas pouvoir reconnaitre quelqu’un, en général ça posait un malaise qui n’était pas très agréable surtout pour la personne qui pouvait se tromper.

    Les groupes pour la porte du Soleil et de la Lune semblaient se former, signe qu’ils allaient tous bientôt entrés. Ses yeux se posèrent sur cette main qui s’était posée sur son épaule puis sur le visage d’Enira qui lui demanda de crier en cas de besoin. Ce que Nirlys ne ferait probablement pas. Il y avait d’autres personnes à protéger et qui pesaient bien plus dans la balance qu’une petite elfe. La dénommée Kilaea la quitta aussi pour rejoindre la louve et elle sourit. Elle n’avait aucune idée de ce qu’elles étaient, mais elle était contente pour Eni qu’elle puisse avoir quelqu’un sur qui s’appuyer en cas de besoin, d'avantage si c’était une autre personne capable de pouvoir la soigner au besoin.

    Décidément, il y avait du monde qui paraissait important dans son groupe. Elle, en tant que médecin, s’était retrouvée à l’arrière de peloton, un peu nerveuse par la présence de l’empereur lui-même dans son groupe, mais elle était aussi très excitée de vivre une nouvelle aventure comme elle n’en avait jamais vécu et se promit de n’en tirer que le meilleur.
    ------------------------------


    Sur le chemin de l’entrée, et alors que les premières lignes avaient déjà commencé à poser les pieds dans le temple, elle prononça silencieusement une prière aux astres pour leur demander de leur donner du courage.

    Le temple, qui paraissait déjà imposant de l’extérieur, était évidemment encore plus impressionnant alors qu’elle passait par l’immense porte. Un frisson l'a parcouru quand celle-ci se referma dans son dos. La première salle qui s’offrait à eux était déjà très grande et les murs étaient ornés de vieilles fresques abimées par le temps. Mais la curiosité de Nirlys la poussa à s’avancer un peu plus avec l’envie de glisser ses doigts sur la peinture qui s’écaillait par endroit.

    Elle murmura : « Azchary.. » avant de l’entendre de la bouche d’un homme pas très loin devant elle. Elle l’écouta sans participer à la conversation. Ce qui était sûr, c'était qu’elle en avait envie d’en voir plus, d’en savoir plus, de voir ce qu’elle allait pouvoir apprendre de plus, car elle était là pour ça. L’elfe ne s’attendait pas à voir ce genre de scène directement après son entrée en revanche, elle s’attendait à ce qu’on la pointe elle ou son peuple pour les évènements récents ou passés alors quand les paroles d’une femme qui semblait plus en avant parvinrent jusqu’à elle, elles glissèrent sur elle comme la pluie sur un toit.

    Cette personne ne méritait pas d’en apprendre plus sur le peuple elfique, surtout si c’était pour le dénigrer alors qu’il était un des plus beaux à n’avoir jamais existé. Lequel n’avait jamais commis d’erreurs ? Mais c’était un débat dans lequel elle ne souhaitait pas rentrer, elle n’était pas là pour ça.

    En revanche, la remarque d’une femme bien plus proche était pertinente. L'hypothèse du colosse vert n'était pas idiote non plus, mais elle doutait de la fonction de mise en garde des fresques. Peut-être parce qu'elle avait désormais l'espoir d'en apprendre plus sur les origines des Elfes ? Après tout, même si elle avait des doutes, il avait probablement raison, ce n'était qu'un des portes, qui sait ce que les autres avaient pu trouver. Cet endroit était définitivement plein de mystère et de savoir qu'elle espérait pouvoir découvrir.
    Après celle-ci, Nirlys ajouta d’une voix neutre à l’intention de Kilaea qui restait à ses côtés depuis leur arrivée.

    -Je reconnais seulement deux des personnages dépeints parmi les mages. Ils auraient été conseillés de la souveraineté, il y a longtemps. Avant que l’Empire elfique ne soit réduit à ce qu'il est aujourd'hui.

    Elle avait eu envie de dire « notre empire » par réflexe, mais elle avait prêté allégeance à l’Empire de Reike et trouvait ça inconvenant, d’autant plus devant l’Empereur Tensai lui-même.
    D’une voix un peu plus forte, pour que tous puissent profiter de ses maigres connaissances :

    -Ici se dresse Asmidé, symbole de sagesse et clairvoyance, avec son aigle.

    Nirlys désigna une femme, vêtue d’un grand manteau bleu roi finement décoré, dont les longs cheveux argentés étaient tressés par endroits. Son front était finement orné d’une tiare plutôt simple.

    -Et ici, le symbole de la combativité et de la hargne : Redhael accompagné de son fidèle loup.

    Son doigt avait bougé pour montrer un homme au visage plus fermé, des cheveux beaucoup plus courts que le premier et d’un roux flamboyant. Ses habits étaient bien plus sobres et plus sombre, partant sur du vert sapin.
    Les deux portaient des bijoux, à leur oreille, des colliers et des bracelets sans être dans l’opulence, des petites choses discrètes, mais qui valait le coup d’œil bien que la peinture se soit dégradée.

    -On ne sait pas quand ils sont morts, mais il est dit que ce serait à cause de leurs conseils que les elfes connurent l’Azshary. Pour le reste, je n’en sais pas beaucoup plus. Je suis désolée.

    L’elfe s’était excusée plus pour la forme que pour toute autre chose. Elle avait gravé le visage et les silhouettes des autres membres du groupe peint sur le mur en face d’elle. Le groupe se remit en marche sans pour autant beaucoup avancer, car à peine après y avoir mis les pieds, les membres de l’escouade s’évanouirent pour ne laisser place qu’à la vision d’un dragon blanc et doré dont elle ne pouvait donner la taille tant il était immense.

    La jeune femme cligna plusieurs fois des yeux pour s’assurer de ce qu’elle voyait, mais l’immense créature était bien là : majestueuse et terrifiante par la force et la puissance qu’elle dégageait. Nirlys se sentait insignifiante et indigne de l’intérêt de ce monstre de beauté.

    Elle s’inclina humblement avant de se redresser et même si elle était sûre de n’être d’un grain de poussière pour le dragon, elle était déterminée à continuer sa route, à en apprendre plus.

    -Je me tiens devant vous aujourd’hui car je suis en quête de savoir. J’ai rejoint ce groupe pour sortir de ma zone de confort et avec l’envie d’en apprendre plus sur moi, d’en apprendre plus des autres et sur les choses qui enrichissent notre monde.

    Elle ne se sentit pas non plus légitime de demander quoi que ce soit à une noble créature comme celle-ci. La jeune elfe n’en dit pas plus, laissant au dragon le loisir de l’évaluer ainsi que ses paroles. Désormais, les jeux étaient faits. Son destin était entre les griffes du dragon blanc.
    Résumé:
    Tourbillon de douceur
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  • Hier à 20:31

    Usalka fut peu loquace elle aussi, contrairement à l'ambassadeur doté de bois et de plumes qui se joignit brièvement à la conversation,affichant un  sourire en finissant ma pomme. Je ne m'étais pas attendu à le voir ici, ni qu'il  ne fasse un détour pour nous souhaiter notre réussite dans cette entreprise qui était entièrement recouvert d'un voile de mystère. Un qui me tardait de dissiper,ma curiosité grandissante ne faisant que rendre cette attente plus insupportable,alors que j'étais consciente du danger qui nous attendait derrière ce magnifique monument sorti des eaux:

    -Je vous remercie Noctalys. Que vos ombres vous protègent et que cette expérience nous permet de nous enrichir.

    Dans tous les sens du terme. Je le regarder s'éloigner,croyant entendre au loin quelqu'un chanter sans que je ne puisse trouver la personne en question. Car elle était surement petite et que rapidement, on recevait l'ordre de se rassembler, comprenant en voyant les deux groupes se former, qu'Alaric ne ferait pas malheureusement partie du mien. Je tentais de balayé mon inquiétude en faisant les derniers préparatifs,  vérifiant que la dague que m'avait confectionné Shawn était toujours bien accrochée à ma ceinture ainsi que tout mon nécessaire de FMR.

    -J'ai toute confiance en toi Shawn. Luis dis-je sincèrement en plantant mes orbes dans son unique, rassurée que je puisse l'avoir à mes côtés pour lui venir en aide rapidement s'il lui arrivait quelque chose:-Il en va de même pour vous Usalka.

    J'avais eu tout le loisir de voir cette dernière user de sa magie dans une précédente mission, ne doutant pas de ses capacités. J'espérais que mon frère ne prendrait pas de risque inconsidéré pour nous protéger, ne désirant pas  par ma faute,arracher le père de deux enfants adorables. J'étais toutefois heureuse qu'il soit mon protecteur, retrouvant cette sensation familière et lointaine à la fois. Celle de me sentir entouré par des  proches.

    L'un d'entre se rapprocha de notre groupe,voyant bien que quelque chose tracassait Kila, préférant la laisser tranquille pendant que nous marchions en direction du temple. De cette structure impressionnante, autant par sa grandeur et sa beauté,mêlant respect et crainte. À chaque mètre parcouru qui nous rapprochait de son entrée, mon coeur palpitait plus, jetant un dernier regard par-dessus mon épaule en espérant apercevoir celui à que je n'allais peut-être plus jamais revoir. En en prenant conscience, je lui dis avant de franchir la porte du soleil sans remuer ma bouche:

    *Je t'en supplie ....reviens de cette expedition vivant. J'ai besoin de toi *

    Je me mordis la lèvre,cachant via ma magie de l'illusion les quelques larmes qui s'échappèrent de mes dioptases sans laisser l'opportunité à qui que ce soit de les voir. De deviner mon inquiétude pour cet homme qui persisterait au fond de moi,parvenant à me focaliser sur ce temple en regardant ceux qui m'entouraient et surtout,en endossant mon rôle de Shekhikh. Une fois fait, en entendant l'écho de nos pas rebondir sur le sol fait de minerai peu commun,je laissais ma curiosité s'exprimer à travers mes reflets de l'âme qui avaient fini par sécher.

    Par parcourir cet immense vestibule entouré de colonnes et de fresques qui ne pouvaient échapper à aucun regard. Par leurs tailles,les secrets qu'ils semblaient renfermer, apercevant une elfe faisant partie des FMR qui visiblement, était tout aussi fascinée par ce qui était inscrit sur ces murs qui contenaient bien trop de vides en son centre à mon gout. Ce qui ne fit qu'accentuer cette impression de grandeur, que nous étions si ridicule face à cette immensité,ce temple d'un autre âge qui ne se révélera pas aussi facilement.

    -Pas plus que ce que j'ai appris à dans certains ouvrages qui en parlent vaguement.

    Répondis-je quand la voix de frère m'interpella dans un premier temps,écoutant son avis et celui d'Usalka, qui émettaient tous les deux des hypothèses fort intéressantes. Je me tournais quand Nirlys prit la parole, nous décrivant certaines zones de cette gravure qui illustraient si joliment des scènes qui avaient l'air en lien avec ce qui s'était produit il y a de ça des milliers d'années. Je notais les informations qu'elle avait bien voulu nous donner, lui disant avec un sourire amical:

    -Merci à vous de nous avoir partagé cela. Je regardais tour à tour Kila et l'elfe dont je ne connaissais pas le nom,les questionnant du regard,me demandant si elles s'étaient déjà rencontrés puis j'ajoutais:-C'est fort intéressant.

    Je me tournais,continuant de réfléchir à des théories sur le déclin de cet empire que j'aurais aimé voir à leur apogée,avoir la chance de toucher tout ce savoir qu'ils avaient accumulé et que peut-être,leur fierté avait fini par emporter sous les eaux. Mais quelque chose me perturba. Il était question de la lune et du soleil, des symboles énormément représentés dans la religion Shierak. Pour cause,ils vouaient un culte dédié aux astres. Or, il était connu que ceux de Melorn,dernier vestige de cette civilisation que Shawn avait cité plus tôt,n'étaient pas connu pour avoir la moindre croyance,pas à ma connaissance . Rien que le nom de ce temple,ne concordait pas.  

    -Vous ne trouvez pas ça étrange que l'on voit des elfes sur des fresques,à l'intérieur d'un temple où sont représentés le soleil et la lune ? J'ai l'impression que quelque chose m'échappe...

    C'était peu de le dire, n'entendant aucune réponse ni aucun murmure quand nous avions avancé plus loin,un silence happé par une voix oppressante qui me fit presque tressaillir. Je m'immobilisais en croyant voir une silhouette se dessiner,une si grande qu'elle qui m'empêchait de regarder ailleurs. Je restais bouche bée en voyant dans cette obscurité un dragon surgir de ces abysses,telle une entité qui ne faisait qu'un avec ce qui nous entourait tant il occupait tout l'espace, toute mon attention.

    J'avais instinctivement pris une posture défensive,  sans parvenir à détacher mon regard ailleurs que sur lui, comprenant que quelque chose d'anormal se produisait car si une telle créature se tenait bien devant moi, il y aurait eu des cris par les moins courageux de notre groupe. Que je sois victime d'hallucination ou non,vu l'emprise que cette créature avait sur moi, la puissance qui émanait de son être qui était parcouru d'écailles aux reflets cristallins, je ne pouvais faire que l'aveu qu'il me demandait,en toute transparence :

    -Ce qui anime mon coeur chaque matin,c'est l'envie de découvrir un moyen de sauver des vies. C'est dans cet espoir que j'ai pris ce risque et mis en péril la vie de mon frère,que j'ai osé poser mes pieds dans votre demeure. Je ne sais si je suis digne d'avoir ne serait-ce approché ce temple, ni de tenir une telle conversation avec vous,mais sachez que .... Je m'avançais d'un pas, confiante:-Je souhaite aussi protéger ceux qui ne le peuvent, contre le mal qui peut s'abattre sur nous à tout moment. Je ne prétends pas y parvenir seule, au contraire...mais au moins, aider dans ce sens. Je marquais une pause, pensant à Cyradil, Alaric,  Shawn, Kila, et d'autres, reprenant avec douceur esperant  en apprendre davantage sur lui par cette question s'il décidait bien entendu,d'y répondre avec la même sincérité dont j'avais fait preuve:-Et vous,quelle est la chose qui vous tient le plus à coeur?

    Nul besoin de se présenter quand on était une la petite chose que j'étais, n'étant qu'un grain de sable parmi des centaines de milliers, qui confessait ce qui surement,ferait ricaner le dragon,comme bien d'autres personnes avant lui. C'était pourtant bien ça le levier de ma vie,en plus de vouloir progresser pour pouvoir secourir tous ceux que j'aimais du plus profond de mon être et les autres. J'étais prête à me faire humilier, mais pas à renoncer à cette voie que j'avais emprunté,qu'un dragon se dresse sur mon chemin ou non.

    Résumé:



    Codage par Libella sur Graphiorum


    Qwellaana discute en 009966
    [Event] Le Temple du Dragon - Page 3 1731528495-recad2
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  • Hier à 21:51
    - Magister, tout va bien ?

    Aurélian, se massait les tempes. Quelque chose le perturbait, peut-être était-ce le brouhaha incessant des pensées des uns et des autres qui le plongeait dans une pareille migraine. Même dans le plus grand des silences, le vacarme incessant né des inquiétudes et des théories fomentées, des pensées et des couleurs, chatoyant de la teinte de la curiosité et salies par la peur. Il avait beau réciter des mantras appris par cœur pour s’isoler de ce vacarme, mais la vie d’un campement militaire était bruyante, les esprits s’échauffaient et la présence de l’Empereur en personne plongeait le camp dans une cacophonie d’ambitions teintées d’or et de lumière.

    - Trop de pensées, trop de… Un gémissement douloureux s’échappa de ses lèvres. Bruits… Monseigneur, s’il vous plaît, arrêtez de penser…

    C’est comme si son cerveau se tordait sur lui-même, que ses nerfs rachidiens se pliaient et se pinçaient tant sa tête lui donnait l’impression de vrombir et les infusions de vapeurs de maggi n’avaient eue qu’un effet mineur. Et il y avait cet homme, le luteni devenu gouverneur, qui se tenait trop près de lui et dont les pensées en diphonie agressaient ses sens.

    - L’animus est fluctuant, je le sens jusque dans mes os. Qu’il confia, d’une voix douce, au télépathe. Je peux vous donner un collier en adamantium, le temps que nous pénétrions dans le temple, si ça peut soulager votre peine, magister.

    La paume imprimée contre son front, son visage plissé de douleur, Aurélian hocha la tête vivement en entendant la proposition de l’homme qui avait presque exigé sa présence auprès de l’Empereur. Un collier de fer, serti d’une plaque d’adamantine fut placé à son cou et la cacophonie de pensées et de couleurs s’estompa, c’était comme si on venait de le plonger dans l’eau. Les bruits étaient encore là, mais étouffés, plus difficiles à distinguer et la migraine entama sa retraite. Au moins, pour l’instant, la souffrance d’Aurélian serait atténuée.

    - Parvenez-vous à voir votre frère ? Que demanda Tulkas. Le percevez vous de l’autre côté du temple ?

    Aurélian se redressa, s’appuyant comme un vieillard contre la hampe de son bâton posé dans le sol boueux de ce temple surgi des tréfonds. Il cligna des yeux, serrant la mâchoire en se penchant en avant, comme s’il était capable de voir à travers la matière. Puis, il se redressa.

    - Oui, monseigneur, je vois mon frère. Qu’il affirmât en se passant la main sur le visage, pinçant au passage l’arrête de son nez biscornu. Je reconnaitrais les chatoiements de son âme entre mille.

    Tulkas réajusta sa cape rouge autour de ses épaules, posa sa paume contre l’épaulière droite pour la recaller contre son gambison et se saisit délicatement de la sangle de cuir de son gantelet pour le resserrer. Une dernière vérification en attendant les volontaires qui avaient été placés sous son commandement, en d’autres temps, son cœur aurait débordé d’une fierté frôlant l’arrogance. Mais que restait-il maintenant, de cet homme d’antan dont le nom était chanté avec adoration dans l’arène de Taïsen, pour être ensuite oublié quelques heures après que la soif de sang d’une foule sans visage soit apaisée ? Sentant la sonde mentale d’Aurélian s’effacer de son esprit, Tulkas s’autorisa un instant à penser à qui il était, ce qu’il devenait et à cette chose, logée dans sa poitrine qui ne demandait qu’à se libérer. Il inspira, pour soupirer, mais se retint en voyant arriver ceux dont il avait la charge.

    - Vous voilà enfin. Qu’il dit calmement en observant la cohorte bigarrée qu’il allait commander. Certains d’entre vous me connaissent. Qu’il commença en glissant un regard sur Kassandra, qui avait saigné à ses côtés lors de la marche du vent d’acier. Pour les autres, je suis le Luteni Tulkas, banneret de la Griffe. L’empereur lui-même, à travers son Oreille, vous a rassemblé aujourd’hui pour servir l’Empire, que vous ayez été appelés à servir ou ne soyez que des volontaires, je tiens à saluer votre courage à tous et à toutes.

    Car le mystère du Temple du Dragon était resté imperturbable face aux tentatives des hommes de percer ses secrets, des millénaires durant des cohortes d’aventuriers s’étaient risqué à braver ce sanctuaire ancien. Le granit consacré de cet édifice avait nourri les rêves et les ambitions de générations durant, jusqu’à devenir le symbole de l’impossible. Mais n’avaient-ils pas, ces dernières générations, bravés tout un chacun l’impossible ? La guerre contre les titans, le meurtre de Kazgoth, l’humiliation de Puantrus, la bataille de Sable d’Or, la défense de Melorn… L’histoire du Sekaï avait été écrite dans le sang des héros et des légendes vivantes, et aucune autre période n’en comptait autant. Peut-être en faisait-il partie lui aussi, désormais. Probablement pas, il chassa ces pensées qui n’étaient plus vraiment les siennes pour se focaliser sur l’instant présent.

    - Nous ignorons tout des secrets du Temple, c’est à nous que reviens l’honneur de braver ses épreuves pour nous montrer digne de la bénédiction des dragons. Il marqua un temps d’arrêt. Nous entrons dans un sanctuaire sacré, les stellaires y voient un autel bâti par les ancêtres du Dragon Divin qui protège la dynastie impériale, les Shierak y voient le premier temple de la Lune et du Soleil. Nous ignorons tout de sa nature réelle. Je punirais moi-même tout acte de sacrilège.

    Ensuite, il tourna son attention vers ceux de son groupe, tout-un-chacun prêts à braver l’inconnu avec lui. Tulkas imposa un ordre pour l’entrée dans le temple, préférant mener par l’exemple, il se plaça en tête de groupe, flanqué de Bélial, de Kassandra et de Vir. Ainsi, ils garantiraient la sécurité des autres.

    Ensuite vinrent l’hybride souris, l’ambassadeur et le barde, leurs rôles était simple, scanner l’avancée depuis la sécurité relative de la muraille d’acier qui composait la première ligne. Puis, en fonction des dangers, d’intervenir en fonction de leurs compétences respectives. Enfin, en dernière ligne se trouvaient les mages de combat et les experts du groupe. Ceux disposant de capacité de détection de magie reçurent l’ordre d’utiliser autant que possible leurs compétences, tandis que les autres mages de soutiens avaient pour ordre de soutenir l’avancée de la troupe.

    Et c’est ainsi, dans cette configuration qu’ils passèrent les arches colossales du temple éternel pour plonger dans ses entrailles de granit.

    Puis, dans un simple souffle, le soleil vint à mourir et ne resta qu’aux membres de l’escouade de la Lune de ne faire plus qu’un avec l’eau noire dans laquelle trônait l’œil de Jalan. Ils ne couvrirent qu’une dizaine de mètres avant que l’obscurité ne se fasse trop profonde pour que même les nyctalopes ne puissent voir plus loin que le bout de leurs museaux.

    - Allumez vos torches et vos lanternes.

    Qu’il ordonnât d’une voix calme, retournant sa paume vers le plafond pour faire apparaître une flamme dans le creux de sa main, vive et intense.

    Si intense qu’elle illuminât un instant la pièce dans laquelle ils se trouvaient. Du moins, en partie. Son regard fut capté par le reflet de ses flammes sur une pierre polie dont l’humidité la rendait brillante à la lumière de ses flammes. La fresque, représentait deux êtres, dans un style qu’il ne connaissait pas, ancien et plurimillénaire, mais ce qu’elle dépeignait lui sautait à la figure, comme à celle de tous ceux qui l’accompagnaient.

    Un roi, abandonnant sa couronne à une autre. Non pas dans un geste de conquête, mais d’union. S’approchant de ce spectacle qui n’était pas sans lui rappeler le désert qui l’avais vu naître, il intensifia un peu plus sa flamme pour dévoiler les secrets du temple à la vue de ceux dont il avait la charge.

    - Shekh et Jàlan… Qu’il souffla à mi-voix, avant de secouer la tête. Un serment. Qu’il supposa à voix haute. L’abandon d’une couronne, la passation du pouvoir dans le désert, et là, plus loin, le temple dans lequel nous sommes. Un soleil, une constellation, la lune et un dragon. Qui convergent tous ensemble dans un nexus. Une nuit sans lune, sans étoile…

    Il semble pensif un instant. Contemplant non plus la fresque comme une œuvre d’art, mais comme le témoignage d’une mythologie bien plus ancienne qu’il ne pouvait le concevoir.

    - Un sacrifice, peut-être.

    Qu’il supposa à nouveau à voix haute avant de se tourner vers ses camarades.

    - Magisters, que pensez-vous de la signification de cette murale ?

    Il prit le temps d’écouter les remarques de tout-un-chacun, hochant la tête silencieusement aux dires des uns et des autres. Il faut dire qu’en l’heure, toute théorie était aussi valide que la sienne. Mais le temps passa, et ils ne pouvaient guère rester dans le vestibule à attendre que le temple des dragons ne leurs dévoilent ses secrets sur un plateau d’argent. Aussi, ayant écouté les théories des derniers membres de la troupe, il hocha la tête avec un air solennel.

    - Je vous remercie pour votre sagesse. Qu’il répondit avant de se tourner vers les profondeurs. Dénudez vos têtes et ouvrez vos cœurs, nous sommes sur une terre sainte.

    Tulkas se redressa alors, pour avancer de quelques pas. Puis, sans réellement qu’il ne s’en rende compte, le granit devint de plus en plus lisse sous ses pieds et les ténèbres qui l’entouraient, de plus en plus profonds. Si bien que sa petite lumière de flammes ne parvenait plus qu’à l’illuminer lui. Il s’arrêta alors, pour regarder par-dessus son épaule.

    Seul, plus personne ne l’entourait. C’est comme si le temple l’avait avalé, dévoré jusqu’à son existence, ne lui laissant que sa conscience. La peur aurait du le saisir, la panique aurait dû mordre son cœur et pourtant… Il se sentait en paix, calme, c’était différent de ces visions qu’il avait pu avoir autrefois. C’est comme s’il venait de plonger dans une infinité bien plus grande que lui, une mer calme, noire comme une nuit sans lune et sans étoiles.


    « Ceux qui entrent dans ce temple sans être prêt ne peuvent que mourir. »

    Il marqua un temps d’arrêt, la voix qui venait de l’appeler depuis les ténèbres était si puissante et grave qu’il avait senti jusqu’à ses os trembler. Dans les ténèbres, deux billes d’inferno se dessinèrent alors que la voix repris.

    « Si vous continuez à avancer, votre honneur sera testé. »

    Une langue de feu s’échappa d’une gueule sertie de crocs, aux lèvres faites d’écailles.

    « Votre force. »

    Qu’il siffla, comme un serpent colossal alors que la langue de feu se dressa jusqu’à la cime du temple.

    « Sera éprouvée. »

    Deux énormes pattes frappèrent le sol devant lui, des écailles noires comme de la suie et brillantes comme de l’argent reflétaient à peine la lueur de sa flamme. Des griffes, si grandes qu’elles pourraient éventrer avec aise un navire de guerre républicain labouraient le sol avec l’aisance d’un chat.

    « Et il faudra montrer votre courage face à votre passé. »

    Que tonna la voix, la phrase ponctuée par un grondement si profond que Tulkas avait l’impression de sentir l’air vibrer autour de lui. Une gerbe de flammes s’échappa d’un sourire fait d’un millier d’épées, gerbe qui s’éleva pour couronner et révéler la majesté de son père.

    Un dragon.

    « Dites-moi la raison qui vous pousse à vous lever et à affronter ces murs qui ont vu tant de sang couler. »

    Ce n’était ni plus ni moins que l’injonction d’un monarque, l’exigence d’un dieu qui écorchait de sa simple voix la carapace d’acier du Luteni, sa peau, ses muscles jusqu’à révéler son âme. Ce n’était pas une demande, non, c’était un commandement, rugit de la gueule d’un dieu vengeur fait de flammes et d’écailles.

    Mais Tulkas s’arrêta, observa le dragon et joint ses mains autours de la flamme qu’il avait dans le creux de ses paumes. L’approchant de ses lèvres pour souffler dessus et imiter la gerbe de flammes dont s’était couronné le dragon. Il inspira, se rappelant des vieux rites des dragonniers du Reike, des chants qu’ils entonnaient pour apaiser la fureur des dragons et leurs montrer le respect qui leurs était dû.

    Celui qui l’avait arrêté s’était abaissé à utiliser la langue des mortelles. Pour le remercier de cet honneur, Tulkas laissa son feu intérieur circuler librement dans ses veines. Son animus, pour une fois apaisé, circulant librement de son cœur jusqu’au bout de ses doigts.

    Et il se mit à chanter.



    Drakari pykiros
    Tīkummo jemiros
    Yn lantyz bartossa
    Saelot vāedis

    Il salua d’abord le dragon, le reconnaissant comme un père des flammes et un maître ailé. Se faisant, Tulkas dessina des arabesques dans la langue du désert. Car s’il y avait bien une chose que les dragons comprenaient mieux que les mots, c’était le feu. C’est ainsi qu’ils communiquaient entre eux, qu’ils chassaient, qu’ils tuaient et qu’ils révélaient leurs véritables natures. Aussi, il raconta son histoire en modelant les flammes pour représenter un sabre, articulant la scène de ses doigts pour montrer une vie de servitude, menée dans les arènes du désert. De couronnes partagées et de couronnes gagnées.

    Hen ñuhā elēnī:
    Perzyssy vestretis
    Se gēlȳn irūdaks
    Ānogrose

    Il chanterait son histoire, de sa voix et de ses flammes, s’exprimant dans la geste des dragons, racontant ses faits d’armes, la découverte de son propre pouvoir, de l’appel du devoir, de celui de la loyauté et de l’honneur, planté là par la Griffe, son propre maître et de son serment envers l’Empereur, celui qui portait en lui le sang de ses ancêtres. Se nimbant de flammes, il se drapait non plus d’une armure, mais d’une robe brûlante.

    Perzyro udrȳssi
    Ezīmptos laehossi
    Hārossa letagon
    Aōt vāedan

    C’est avec ces mots de flammes et d’histoire, qu’il révélait sa véritable nature, celle de l’homme qu’il était, de celui qu’il avait été et de celui qu’il souhaitait être. Les liants par un serment fait de langues de feu, ralliant en un les trois qui le composaient. Le soldat, le gladiateur et l’homme. Il chantait, de flammes et de voix, son histoire au dragon.

    Hae mērot gierūli
    Se hāros bartossi
    Prūmȳsa sōvīli
    Gevī dāerī

    Et c’est ensemble, réunis, que l’homme, le soldat et le gladiateur se présentaient au jugement du dragon. Trois têtes, devenues une. Tulkas inspira un grand coup, c’est comme si des ailes venaient de lui pousser.

    - Brōzi nuhā Tulkas, Zaldri-za-eksio. Qu’il se présenta. Obagon ñuhā.

    Ainsi, se présentant comme Tulkas au seigneur-dragon, il dévoila son âme en ployant le genou, tenant dans ses mains jointes une flamme.



    Résumé tour II:


    [Event] Le Temple du Dragon - Page 3 5CwAax9
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  • Aujourd'hui à 1:04


    Bien. J'avais rempli ma dose de courbage d'échine pour la journée. Je n'étais que très peu homme de faux semblants malgré la voie que j'avais décidé d'emprunter. Je restais néanmoins professionnel et conscient de ma place dans cette société, encore plus en voyant les grands de ce monde se suivre un à un à l'entrée de la tente de commandement pour rejoindre celui qui est au cœur de toutes les discussions et des regards curieux. D'aussi loin que je me souvienne, c'était peut-être bien la première fois que je le voyais, lui, Le Conquérant en chair, en os et en cornes. Des carrures impressionnantes, il y en avait dans ce campement, qui, au final, représentait parfaitement l'esprit cosmopolite du Sekai. Il n'y avait qu'à voir le géant qui gardait la porte de la tente, à la peau bien verte et à la longue chevelure rousse.

    J'avais donc pris un peu de recul sur la base de commandement, rejoignant la direction de la Porte de la Lune pour y retrouver l'escouade d'explorateurs que j'allais accompagner au cœur de l'édifice. J'en profitais pour passer en revue une dernière fois mon équipement, vérifiant l'état des cordes et du grappin, avant de compter encore une fois si le nombre de vivres recommandés était bien ici. Je posais mes mains sur Murmure et Silence, les sortant un instant de leur fourreau afin de m'assurer de la qualité de leur tranchant. Ce fut vers cet instant que notre commandant en chef vint ordonner le rassemblement de notre troupe. Un humain à la stature imposante, tant par son physique semblant avoir traversé bons nombres de champs de bataille que pour l'aura qu'il dégageait. Il se présenta à ceux qui m'entouraient ainsi qu'à moi-même, Tulkas, banneret de la Griffe. Effectivement, maintenant, je comprenais bien mieux son air autoritaire et la pression qu'il imposait par sa présence.

    Les ordres étaient clairs et limpides, tout en rappelant l'importance de respecter le lieu sacré dans lequel nous entrions. Cette remarque marqua mon esprit, moi qui pensais que la majorité des généraux en chef de l'Empire se foutait pas mal de casser ou de salir de leurs présences certains édifices. Il fallait dire que celui-ci était lié au Dragon et cela prenait donc sens de le respecter pour eux. Nous nous placions dans l'ordre de formation ordonné par le chef de meute, nous rapprochant des gigantesques arches de la Porte de la Lune. La Porte du Soleil, elle, allait être explorée par l'Empereur lui-même et de nombreux autres grands de ce monde, entre la Sénéchale et les différents nobles, dirigeants et seigneurs, tandis que notre petite escouade d'éclaireurs semblait plus proche de la terre que des cieux.

    Nous nous mettions en route dans la foulée, non pas sans que je respire profondément une dernière fois, qui sait combien de temps nous allions mettre avant de pouvoir gorger nos poumons de l'air extérieur. Si tenté que nous ressortions un jour sans finir comme les autres tentatives avant nous. J'allumais ainsi ma petite torche, sous le commandement du général en tête de file. Un gobelin, une Oni, un hibou cornu religieux, une hybride ressemblant à un rongeur, une poignée d'humains, un géant en armure suivi par son escadron d'élite et moi, à moitié Drakyn et borgne. Tout ceci ressemblait presque au début d'une mauvaise blague de comptoir.

    Les différentes torches ainsi que les flammes produites par les manieurs de feu venaient éclairer de grandes fresques murales. Deux femmes semblaient s'échanger une couronne, un signe d'union, comme le soulignait le chef de meute. Nous pouvions également apercevoir l'édifice que nous venions de pénétrer. Le Temple du Dragon, l'échange d'une couronne, plusieurs entrées menant au même point central du sanctuaire. La Lune puis le Soleil. Bien des questions s'offraient à mon esprit que je gardais pour moi. Pour autant, cela paraissait ressembler à un lieu saint pour les adorateurs du Shierak. Mais quelle était la différence avec le Temple du Soleil et de la Lune, et pourquoi avoir englouti vivant les anciens explorateurs.

    « Oh. »

    Un petit bruit de stupeur lorsque je sortis de mes pensées pour finalement m'apercevoir que l'entièreté du groupe avait disparu. Je continuais légèrement à avancer, lorsque je ne pus retenir ma mâchoire de s'entrouvrir légèrement et une sueur froide gagner la racine de ma nuque.

    « Bordel de merde. »

    Une réaction bien étonnante venant de moi, mais qui ne pouvait pas être étonné de se retrouver face à face avec un véritable Dragon, haut de plusieurs mètres, ses ailes caressant les murs tandis que ses écailles émeraude illuminaient la pièce. Je n'étais qu'un homme ordinaire, un de plus dans l'océan de l'Humanité. Je n'avais pas vécu de grandes batailles, très peu assisté à des phénomènes magiques de grandes ampleurs, encore moins vu les Titans il y a de ça plusieurs années. Alors ma surprise fut grande lorsque les mots de la majestueuse bête semblaient m'être adressés, tout en faisant vibrer l'entièreté de ma cage thoracique.

    Des phrases bien mystiques furent prononcées par le divin. J'étais totalement préparé à ce que mon honneur soit testé et ma force éprouvée, après tout, c'était principalement pour ceci que de nombreux soldats et mages avaient été envoyés. Les anciennes excursions n'avaient pas disparu sans raison. Cependant, mon esprit encore sous le choc de la rencontre, vint se ressaisir à la mention d'affronter son passé. Puis une ultime question fut posée, et j'entendis mon cœur me crier qu'il attendait une réponse à celle-ci. Comment devions-nous nous adresser à un dragon ? Ce n'était pas une des connaissances que j'avais apprises au cours de ma vie.

    « Désolé de perturber votre sommeil. »

    Oui oui. Une phrase d'accroche bien pourrie. Mais bon, je prenais encore mes marques et sortais peu à peu de ma torpeur mentale. Un léger raclement de gorge. L'honnêteté semblait être de mise lors de cette entrevue si particulière.

    « Je n'ai qu'un but : la liberté. Les différents dirigeants de ce monde auront beau crier de leurs gorges déployées qu'ils offrent la liberté, que les esclaves n'existent plus, que chacun peut choisir sa voie dans l'intérêt d'un bien commun. Mais les chaines ne sont pas que matériels. Les liens éthérés qui nous retiennent sont bien plus forts encore. Il n'y a que les personnes possédant du pouvoir qui peuvent se targuer d'être libres. Nous, nous sommes enchainés à notre condition, à la recherche de la survie, à celle de l'approbation des puissants. »

    Une petite pause afin de reprendre mon souffle, fixant maintenant la bête dans l'un de ses gigantesques yeux.

    « Je ne suis qu'un homme. Et cette liberté par l'approbation, c'est ici que je viens la chercher. S'il faut affronter toutes les foutues divinités de ce monde pour que je puisse un jour me sentir enfin libre, alors je le ferais. Je braverais vents et marées pour simplement me libérer des chaines invisibles qui nous retiennent. Mon passé, je suis prêt à l'affronter encore et encore, car j'en suis déjà ressorti une fois, et si je dois encore rebrousser chemin pour briser de nouveau ces obstacles à ma liberté, je suis prêt à le faire mille fois s'il le faut. »

    La voix était un peu tremblante, mais assurément déterminée. J'avais été le plus honnête possible, mais une dernière pensée vint frapper mon esprit.

    « Et vous, aussi puissant et divin que vous êtes, vous sentez-vous réellement libre ? »

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  • Aujourd'hui à 3:19
    [Event]

    Le temple du dragon


    Bien vite, du mouvement se fit proche des tentes appartenant aux têtes pensantes. Il était temps de se mettre en route.

    —Je crois qu’il est l’heure. Bon courage à vous pour la suite des événements, dit-elle à Baalthazar avant de rejoindre l’attroupement. Il était hors de question de se faire remarquer ainsi devant l’empereur en tirant au flanc ou en arrivant parmi les derniers. Le regard porté sur les derniers arrivés est toujours des plus désagréable, de plus, la souris avait appris des hommes de Zéphyr qui l’avaient formé, que pour mener au mieux une mission d’espionnage, il fallait savoir trouver un équilibre entre ne pas trop en faire pour éviter d’attirer l’attention, mais également trouver le temps d’agir et de réagir afin de ne pas attirer trop de suspicions. Rester trop longtemps sur scène équivalait à se faire bien trop remarquer mais refuser d’y mettre le moindre pas attirerait pour sûr nombres de soupçons quant à ses réelles motivations.  Finalement, les arts théâtraux étaient l’un des outils les plus efficaces des espions et bien que la souris n’était pas encore une experte absolue dans le domaine, elle s’efforçait de retenir les enseignements de ses maîtres. Elle se souvenait de son premier échange sur le sujet avec l’espion qui lui enseignait les ficelles du métier.

    —Ainsi, nous ne sommes pas seulement les ombres du Reike ? avait-elle demandé. Il nous arrive parfois de monter sur scène ?

    —Effectivement Rachelle. Mais jamais à visage découvert.

    —Je ne suis pas certaine de comprendre.

    —C’est une métaphore, avait alors expliqué l’espion. Parfois, pour obtenir ce que tu veux, que ce soit des informations ou la vie de ta cible, tu seras obligée de monter sur scène. Il existe deux mondes. La scène et les coulisses. Habituellement, nous agissons depuis les coulisses afin que la pièce se déroule sans le moindre problème. Mais il arrive parfois, qu’un acteur oublie son texte, ou qu’un intrus se soit glissé parmi les membres de la pièce. A ce moment là, comment atteindre les acteurs qui sont directement sur scène, devant les spectateurs ?

    La souris resta pensive quelques instants. Elle commençait à voir ou voulait en venir ce dernier. Elle décida de se prêter au jeu des allégories.

    —Si nous devons agir à tout prix pour sauver la pièce mais que nous ne pouvons pas les atteindre depuis les coulisses… devons nous monter sur scène ? Mais si nous faisons ainsi, devant tous les spectateurs, notre rôle en finirait compromis ? Ou j’ai raté quelque chose ?

    —Non, tu as bien suivi. C’est pour cela que nous avons des masques. Je ne parle pas de véritables masques bien entendu, mais de rôles que nous devons incarner devant les autres afin que chacun pense que nous ne sommes que simples acteurs tout comme eux. La véritable toi ne se montrera jamais sur scène si ce n’est derrière un masque de faux-semblants. Tu devras tâcher de le garder en tout temps. Parfois, tu seras impuissante et obligée de regarder les tiens souffrir. Parfois, tu seras amenée à faire des actions contraires à tes valeurs. Car sur scène, nos forces sont loin d’être équivalentes à celles des véritables acteurs. Et ton masque seras ton seul rempart face à nos ennemis. Si ce dernier venait à tomber, ton rôle parmi nous prendrait fin immédiatement.

    La souris avait baissé la tête. Soucieuse des sacrifices que demandait une telle vocation.

    —Avez vous déjà laissé mourir des alliés sciemment ? avait-elle alors demandé d’une voix hésitante.

    —Des alliés, des amis qui m’étaient proches, un membre de ma famille… avait répondu l’espion d’une voix légèrement brisée avant de se reprendre. Pour protéger ma couverture et éviter une perte de plus, j'ai dû, une fois, ôter moi même la vie à un camarade de longue date. Me dévoiler et tenter de le sauver n’aurait fait que plus de pertes chez notre nation. Je te l’ai déjà dit Rachelle, mais la voie que tu as choisi de suivre, parmi nous, est loin d’être jonchée d’héroïsme et de glorieuses fêtes d'après-guerre. Tôt ou tard, tes mains seront pleines de sang. D’autant plus qu’à force de se tenir proche du précipice, certains finissent par y chuter. C’est pour cela que seuls les membres les plus loyaux de notre nation sont sélectionnés pour ce rôle.

    —Qu’entendez vous par là ? avait questionné la souris qui sentait son cœur se serrer.

    —Nous utilisons les mêmes artifices que les traîtres. Eux aussi portent des masques pour monter sur notre scène afin d’y semer la discorde. Là où nous cherchons à sauver la pièce pour que son dénouement s’opère selon la volonté du couple royal, d’autres tentent de saboter les efforts de nos acteurs. Sur scène, ton rôle sera de débusquer les autres porteurs de masque sans perdre le tien. Et parfois, à force de porter des masques, nous finissons par oublier qui nous sommes véritablement. Alors, jeune recrue, lorsque ce sera à ton tour de monter sur la scène et de porter le masque. Peu importe combien de fois tu te tacheras les mains, peu importe combien de fois tu seras confrontée aux horreurs de nos ennemis, peu importe combien il te sera dure de ne jamais pouvoir tisser d’amitié véritable avec quiconque, tu te tiendras fièrement et fixera les embûches qui te feront face sans faillir. Et quand bien même tu te retrouverais à porter plusieurs masques, tu n’oublieras jamais qui tu es, enfant du Reike. La nation repose sur tes épaules autant que sur celle d’un autre reikois. Aucun de nous ne doit faillir. Aussi difficile soit notre tâche.

    —Je comprends.

    —Non tu ne comprends pas, avait rétorqué l’espion avec un visage dur avant qu’il ne s’adoucisse d’un sourire. Tu ne peux pas comprendre tant que tu ne seras pas monté sur scène en portant un masque. Mais tu finiras par le faire. Et à ce moment là, j’espère que tu repenseras à mes conseils. Zéphyr pense que tu as du potentiel et je veux bien le croire. Alors ne lui fais pas défaut.

    —Il en sera fait selon ses ordres, avait répondu l’hybride en gratifiant son mentor du salut reikois. Je ne lui ferais jamais défaut. Ni à lui, ni au Reike. Je m’acquitterai de toutes les basses besognes si ces dernières permettent à notre empire de s’élever par delà les plus hauts sommets. Et lorsque je trouverai un traître sur scène, je l’emporterai avec moi dans les coulisses pour qu’il ne puisse plus jamais se permettre l’outrecuidance de salir notre divine pièce.

    —Je vois que tu apprends vite. Bien passons à quelques échanges de coups, ça fait un moment que nous n’en avons pas fait et j’ai peur que tu ne commences à rouiller.

    C’était ainsi que l’échange s’était terminé et la souris avait tenu parole en se remémorant de ses mots. Aujourd’hui, elle devait accompagner les acteurs en s’assurant que tout se déroule pour le mieux. Point supplémentaire, Zéphyr lui avait confié deux entités à garder à l'œil. De potentiels traîtres envers la glorieuse nation du désert. Elle devait s’assurer de les observer et de déceler la moindre trace de corruption chez ces derniers sans se faire percer à jour. Bien sûr, ils n’étaient pas forcément de perfides traîtres méritant le couperet de la justice, c’était pour cela qu’elle devait continuer de douter jusqu’à ce que tout soupçon ne soit lavé. Sur scène, elle ne serait que Rachelle, simple soldate prometteuse s’étant portée volontaire pour être une paire de bras supplémentaire.

    Après un discours de l’empereur et les directives du Luténi, la souris s’exécuta pour rejoindre la troisième ligne. Un choix qui ne l’arrangeait guère car elle se retrouvait ainsi loin de ses deux cibles. Demander à changer n’aurait eu, cependant, que des conséquences néfastes quant à son rôle d’espionne ou de soldate. La voix du Luténi faisait preuve d’autorité absolue et elle devrait apprendre à composer avec. Elle comprenait peu à peu à quel point il pouvait s’avérer difficile d’être un espion d’excellence. Pour l’heure, elle se contenta d’opiner avec énergie du chef avant d’offrir un sourire aux autres membres de sa ligne. Un petit gobelin troubadour et un homme d’apparence noble. Tout n’était peut être pas catastrophique après tout. Bien qu’elle ne savait pas grand-chose sur la créature verte, l’ambassadeur reikois était loin de lui être inconnu. Il faisait partie des gens à connaître de l’expédition après tout. Entrer dans ses bonnes grâces pouvait potentiellement s’avérer utile pour la suite. Mais pour l’heure, il n’était guère le temps de se lancer dans diverses flagorneries. Le temple sacré ne demandait qu’à être exploré.

    Son groupe s’enfonça à travers la porte de la lune. Et bien vite, le commandant leur ordonna d’allumer torches et lanternes. La souris attrapa la petite lanterne qu’on lui avait confiée avant de venir avant d’en allumer la bougie intérieur avec les outils nécessaires, ne connaissant pas les secrets arcaniques de la magie. Elle pouvait certes voir dans l’obscurité la plus obscure, mais une lumière de plus servirait au reste de l’assemblée. Ils avançaient ainsi unis, portant la même lueur globale, pour les intérêts du Reike. C’était la première fois que l’hybride voyait le Luténi en action et bien qu’elle avait pu entendre nombre de faits d’armes et d’éloges sur ce dernier, il était encore plus remarquable en chair et en os. Ce serait un honneur de servir temporairement sous ses ordres.

    Bien vite, leur communauté se trouva dans une salle aux immenses fresques préservées du passage du temps. Il était difficile de comprendre clairement ce qu’il en était et chacun pouvait y aller de sa petite supposition. Honnêtement, Rachelle n’était pas plus avancée que ses pairs et elle se gratta la joue pensive.

    —Est-ce que la seconde figure aurait remis le paquet à la première dans l’espoir qu’elle puisse le cacher au sein du temple ? Peut-être d’anciens nobles reikois ou d’anciens religieux voués à la cause des astres ?

    Elle ne pouvait pas réellement en dire plus étant loin d’être une érudite en la matière. Heureusement, beaucoup eurent des commentaires plus savants ou qui apportaient des précisions dont était incapable la souris de part sa méconnaissance de toutes les spécificités de l’histoire reikoise.

    Après que tout le monde ait pu rebondir sur les fresques, Tulkas lança l’ordre de reprendre la marche. Mais bien vite, une étrange magie s’opéra. Le bruit des bottes de cuir et de métal se répercutant sur les dalles du temple s’étouffèrent de manière nette et immédiate. La souris tourna la tête aux alentours pour se rendre compte qu’elle était seule. Un souffle chaud lui parvint et elle leva lentement la tête pour en chercher l’origine. Un immense dragon la toisait de toute sa taille. Un simple geste, un simple coup de patte aurait suffit à la démembrer. Quand était-il apparu ? Ou se trouvaient les autres ? Etait-ce la magie ou bien un piège provenant du temple ? Un dragon ne pouvait pas véritablement se tenir ici, non ?

    Ce dernier s’exprima d’une voix forte, n’invitant à aucun mensonge ou silence. Une mise en garde doublée d’une question d’apparence simple mais aux multiples réponses. La souris sentit son cœur s’emballer et serra sa lance contre elle pour se donner la force mentale de ne pas tressaillir.

    La disparition de ses compères ne pouvait signifier qu’une chose. Le temple semblait posséder sa volonté propre. Elle n’était pas spéciale à côté des autres légendes du reike donc cette apparition ne lui était probablement pas destinée. Les autres étaient sans doute plongés devant une illusion semblable, car un dragon ne pouvait pas réellement se tenir ici. Si le temple était disparu depuis des milliers d’années, peu de choses auraient pu y survivre. De toute évidence, le temple voulait être certain du bien fondé des intentions des intrus.

    Rachelle leva la tête pour soutenir son regard. Elle était reikoise et de ce fait, elle ne plierait le genou devant quiconque si ce n’était ses empereurs. Dépossédée de ses alliés, elle pouvait faire chuter son masque momentanément.

    —Je ne suis qu’un simple rouage du tout complexe qu’est le Reike. J’ai pour mission de m’assurer de la pérennité de notre avancée au sein de ce temple sacré. Ce n’est pas une simple question de courage. La pièce doit arriver à la conclusion souhaitée par mes seigneurs. Quel qu’en soit le prix. Si vous souhaitez vous mettre sur le chemin de la sainte volonté du glorieux empire du Reike, sachez, noble créature, que je vous affronterai sans peur. Mon honneur et ma dévotion envers mes souverains et ma nation guident mes pas ! Tant que je serai vivante, je continuerai de m’user pour le bien de notre peuple ! Notre empereur vient récupérer son saint héritage et nous serons la lame qu’il tend vers quiconque osera se mettre en travers de sa noble avancée ! Je n’ai que faire de la gloire et des richesses, je les laisse volontiers aux autres. Mais je n’arrêterai pas d’avancer tant que je n’en aurai pas reçu l’ordre. Et si vous comptez vous dresser face à nous, sachez que chaque reikois possède en lui la force nécessaire pour vous faire face. Les enfants de la nation conquérante qu’est le Reike sont bien trop fiers pour baisser les bras devant le danger. Nous avons déjà soumis les titans et leurs forces non pas une, mais deux fois. Nous avons tous en nous la flamme sacrée du Reike, nos divins empereurs veillent sur nous ! Nos cœurs battent à l’unisson pour la gloire du Reike ! Sur nos épaules, nous ne portons pas seulement les rêves de nos souverains, mais aussi ceux de tous les habitants de notre nation et ceux à venir ! L'échec ne fait tout simplement pas partie de nos options ! Alors, temple sacré, rendez moi aux miens, ou subissez le courroux du Reike !

    Elle le pointa de sa lance prête à se défendre au besoin. Depuis que l’impératrice lui avait rendu ses yeux, sa dévotion envers le Reike en venait parfois à frôler le fanatisme. Et elle ne laisserait personne, même pas un dragon ou encore les dieux en personne, oser venir entraver les objectifs de ses souverains tant que ces derniers continueraient de faire briller le Reike de mille éclats.

    Elle avait été le plus sincère possible. Et si le dragon n’était pas comme elle le pensait une illusion et que ce dernier se retrouvait à vouloir croiser le fer avec elle pour son impudence, alors elle ferait tout pour tenir le temps que les renforts ne lui parviennent. Car la véritable force du Reike reposait dans son unicité, dans sa vision commune.

    Seul le Reike importait.

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    Le Temple du Dragon


    Comme je me doutais, mon collègue était plutôt avenant. Et si partager ce léger trait d'humour eut le mérite de me détendre, j'en fus presque surpris qu'il me montre autant de... sincérité ? Enfin... il plaisantait, hein ? Oui, oui, probablement. Et si la sincérité pure venant d'un ambassadeur, rompu à l'exercice du badinage surprenait, ce n'était pas désagréable. Partageant son rire, je retournais ce souhait d'un simple "Et bien ma foi pareillement, au moins pour le début de vos dires !", par politesse sans arrière pensé. Ma charge de travail doublerait elle en cas d'un destin funeste le fauchant ? Peut importe, il n'était pas temps d'y penser. Nos groupes d'interventions étaient en phase de se regrouper pour intervenir. J'adressais donc un signe de tête à mon camarade brumeux afin de clore cette petite appâtée.  
    Rejoignant le groupe, laissant probablement à ma consœur oni le loisir de se fondre à mon ombre, j'observais un instant notre équipe. Tout d'abord, ce jeune adepte des ombres que je me permis de saluer d'un signe de tête léger en arrivant à son coté. Nous étions tout de même ici pour explorer un temple issue de légendes du Shierak... saluer de trop un confrère cultiste était... très mauvais ton. Mes penchants sombres étaient acceptés, mais je tachais de les garder discrets.  Il y avait forcément mon collègue, comme prévu. Et son... subordonné ? Garde ? Camarade ? Son Kasha Bataivah, enfin probablement. Définir notre relation était... difficile. Alors le faire pour eux l'était bien plus. Cette dernière était donc du nombre. Et je me perdis dans un instant de surprise à remarquer la jeune mercenaire avec laquelle nous eûmes déjà à lutter. Le reste m'était inconnu... même si la vision de cette rongeur me percuta une seconde. Un léger élan d'instinct, comme primal, me poussa à la dévisager une poignet de secondes à peine. Que m'arrivait il ? Détournant le regard pour le poser vers notre chef d'orchestre, je me maudissait d'autant de faiblesse. Ma méfiance envers Herendil n'avait ainsi plus aucune forme de légitimité... Il était peut être bien plus fort que moi en définitive...
    Mais inutile de ruminer de trop : me concentrer sur la mission à venir me permettrait probablement de balayer cette petite ombre au tableau. Et puis, une simple pensée, fugace, ne pouvait me détourner de ma volonté de contribution. Le discours suivant fut clair, aussi encourageant que... prompt à la méfiance pour ma part. Cet homme, dont je n'avais qu'entendu le nom jusqu'alors, semblait dévoué au Shierak... trop pour ne pas me rappeler certaines dévotions excessives... Mais les prémices du fanatisme se trouve aussi dans les plus fervents croyants. C'est cela qui le rend aussi pernicieux. Ne me formalisant pas de trop, je notais tout de même de taire certaines pensées, et peut être une connaissance présente, par simple prudence.

    Finissant donc par entrer dans la position indiquée, je me permis un léger retrait sur ma ligne, pour une raison déjà visible à dire vrai. Ma troisième jambe de bois, logée au creux de ma serre, me rendait parfois plus lent à réagir. Et si l'agilité était notamment le propre des volatiles, je n'étais plus tout jeune. Ainsi, probablement que mes camarades n'auraient aucun désir de se retrouver gênés par un vieil hibou boiteux, au centre de la formation en cas de problème. Pour ce qui était de l'ordre au sujet de la détection, j'hésitais un instant. Mais je préférais finalement ne pas déployer mes ombres, m'économisant un peu en ce début d'exploration. Cependant, mes yeux prirent une légère lueur, comme le reflet d'une lune indiscernable en intérieur. Ou peut être mes globes reflétaient ils les torches que nous allumions, bien que l'éclat soit un brin plus éthéré, froid. Voir dans les recoins les plus sombres des pièces serait peut être utile après tout.
    C'est ainsi que mes yeux luisants se posèrent sur les représentations. Scrutant le moindre sillon dans la roche, je cherchais à en comprendre les détails. J'étais peut être pris d'une curiosité mal placée : si des êtres aux vies bien plus longues que celle du petit hybride que j'étais sentait tout l'âge de ces fresques, j'étais donc plus qu'insignifiant en face. Songeant à mon audace, je fus presque intrigué face à la question de notre meneur. Et ma consœur hybride me retira tout once de culpabilité à l'idée d'oser penser. Un instant hésitant sur mes propos, je finis par me lancer également :
    "Une union, ou une collaboration peut être ? Pour cacher, ou nicher, quelque chose dance ce temple. Du reste, à supposer que ces silhouettes représentent des femmes, je n'arrive pas à cesser de penser à une chose en voyant ce paquet : peut être un nourrisson emmailloté ? Bien que je concède que mener un nourrisson seul dans une bâtisse du genre puisse faire peu de sens... Navré."
    Peut être avais je passé sous silence une théorie plus... liée à un espoir personnel... Si ces femmes étaient dans une "passation de pouvoir" quelconque, pouvait on espérer une Impératrice décisionnaire devant l'Empereur au cœur de nos croyances ? Ma bonne Maitresse était elle légitime à décider de son destin, et ce temple allait lui en offrir possibilité ? Inutile de crier victoire trop vite... Mais ce doux espoir me donnait envie d'avancer, à coté de mes intentions premières.

    Ecoutant les théories, sans attendre mon reste au sujet de la mienne, je suivis la reprise de la marche. Mais l'obscurité s'épaississait... dans des dimensions peu logiques vis à vis de ma vue perçante... Quels maléfices cachait ces pierres ? Confus, je cherchait à retrouver mes camarades, ma consœur oni en première. Mais inutile. C'était peine perdu. A la place, un colosse d'écailles se tenait. J'avais peiné à le remarquer au début : son armure naturelle était aussi noire qu'une nuit sans lune, celles que j'aime le moins... Sidéré un instant, je me figeais sans réellement avoir idée de comment agir. Mon corps tout entier était plus fin qu'une de ses griffes... c'était à me demander s'il voyait ma canne, tellement elle était petite à ses yeux. Ces derniers, d'ailleurs étaient d'un gris froid... Son regard, ses iris... ils me faisaient étonnement penser à un lointain tortionnaire... Comment était ce possible ?
    Ecoutant ses mots, je frémissait à un certain passage. Non celui de la mort -je m'estimais heureux de vivre encore. Mais sa référence au passé me perdit dans ces yeux biens trop familiers à mon gouts... Ce n'était probablement pas un hasard...
    "Je dois ad...mettre que... il... Maitresse..."
    "Du gâchis, tu comptes vraiment perdre tes moyens maintenant ?"
    Les ombres... elles sont encore là... vraiment... Partout... partout...
    "Comment oses tu te dire digne de ta nouvelle Maitresse avec ça !"
    Je... je ne voudrais pas la décevoir... Vraiment pas... Et les ombres, elles, ne m'ont jamais déçues... Ce regard... peut importe ! Prenant une grande inspiration, je m'imaginait presque un fond de flamme se former dans ma gorge... à l'instar de celles me menaçant...
    "Devenir le prédateur ! Noble créature... un dragon m'a un jour dit, de me lever et de lutter, alors même que ce sont ses griffes, à elles, qui m'ont tiré de la mort cette fois là. Je compte devenir le prédateur qu'elle a vu en moi ce jour là, sortir les griffes, hurler à la nuit. Ne plus avoir peur, mais devenir la terreur de mes ennemis. Ses opposants sont mes opposants, sa volonté et mienne tout comme ma vie. Ainsi, je compte bien contribuer à cette expédition, à mon humble échelle, et lui ramener les secrets que renferme ces murs tout en préservant ma vie. Sauf votre respect, je compte bien défendre les biens de ma Maitresse, et mon souffle est sien. Donc je ne laisserais pas ce temple se l'accaparer."
    Malgré tout, mon regard continuait à dévier, évitant le sien... Mes deux serres crispées sur ma canne, je la frappais au sol pour me donner courage. Tout ne serait que veine paroles en l'air en cas contraire.
    "Et si je ne suis pas capable d'affronter ce regard." Je fichais le mien dans le sien. "Tout ses efforts seraient vains. Si ma volonté en entrant n'était autre que servir ma Maitresse avec ferveur, la Lune m'en soit témoin, je refuse ici de ployer sous ce gris glacial, aussi peur ai je. Il ne mérite plus aucune considération de ma part, plus aucune. Je ne suis plus l'oisillon qu'il a déformé, et porte ses séquelles comme une couronne sublimée par ma Maitresse : la seule ayant jamais mérité ce titre, et tous mes efforts."
    Relâchant ma canne d'une serre, je saisissait l'air entre mes griffes à coté de moi, pliant mon ombre -bien là en fait- pour la faire passer devant mon corps. Son visage devant le mien, le trou des yeux laissant les miens fixer de dragon toujours plus intensément.
    "Mon passé moins comme une béante plaie,
    que comme une armure m'ayant renforcé.
    Mon honneur moins dans l'aveugle résignation,
    que dans mon allégeance lunaire en honneur à ses dons.
    Ma force moins dans l'oisiveté en profitant de ma chance
    que dans ma détermination à peser dans cette grande balance."
    Là dessus, un sourire se dessina sur mon ombre. Ses dents affutées étaient là pour montrer ma volonté. Mais sa souplesse étaient message d'une chose : une peur contrôlée me laissant avancer sans sombrer, pour lutter. M'étant tenté à parler avec cette être dans ces coutumes -les vers- j'espérais juste qu'il prenne ça comme une marque de respect, et rien d'autre.

    Ce regard affronté, l'endroit n'était pas si terrifiant. L'ombre était calme, et la présence devant moi, aussi imposante qu'un bal karmique dont j'avais accepté n'être qu'une marionnette minuscule. Ironiquement... je m'imaginait bien le Royaume du Crépuscule ainsi, et la forme que les Gardiens prendraient en face de mois, écailleuse. Il me manquait plus qu'un monde s'étalant sous mes pieds de temps à autre, et je me sentais étoile, sous le regard doux de ma Maitresse, et la protection forte des Gardiens. Une mort avec ces attraits ne sera pas si difficile à expérimenter, l'air de rien.
    Mais ce sera pour plus tard.


    résumé:
    Codage par Libella sur Graphiorum


    [Event] Le Temple du Dragon - Page 3 Sailor12
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    Alaric Nordan
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    qui suis-je ?:
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  • Aujourd'hui à 11:53
    Une fois qu'il eut terminé de soigner quelques bobos, la préoccupation première d'Alaric ne fut pas de se reposer un peu, mais bien d'achever sa préparation. À tout instant, les composantes des groupes voués à l'exploration du Temple pouvaient être appelées. Et s'il y avait bien une chose qu'il ne voulait pas faire, c'était arriver le dernier. Alors, certes, il était tout en bas de l'échelle, mais ce n'était pas une raison pour agir comme tel. Et puis merde ! Pourquoi cherchait-il à se justifier ? Il serait présent, comme on l'attendait de chacun. Il cessa de maugréer contre lui-même et reprit sa préparation.

    D'une main sûre, il s'assura que son trousseau de soins était complet, que tout était en place, qu'il ne manquait rien. Après quoi, il le remit à sa place à sa ceinture. Puis, il s'assura du reste, comme avant, quand il était Shekhikh. Alors, oui, il ne l'était plus, et tout le refrain qui allait avec... Les voix intérieures moqueuses ou dévalorisantes étaient maintenant trop lointaines pour qu'il les entende. Qu'il ait été FMR, mage d'État, soldat ou rien du tout, il savait qui il était. C'était cela le plus important. Ce n'était pas un titre qui faisait la valeur du cœur et de l'âme.

    Quand il fut certain d'être prêt, il attrapa sa cape, qu'il posa sur ses épaules. Il revêtit sa capuche et posa la main sur le petit pommeau arrondi de la dague qu'il portait à sa ceinture. Quand il avait été déchu, il avait cru l'avoir perdue définitivement. Un de ses vieux amis avait pu la lui faire parvenir avant qu'il ne parte avec sa cohorte vers le Temple du Dragon. Son trousseau, sa dague... Il ne manquait plus que la tenue pour lui rappeler ces moments où les soldats se préparaient à partir en mission... Un peu comme un retour aux sources. Il ne put s'empêcher d'afficher un bien étrange rictus avant de quitter la tente. D'un geste vif, il repoussa la tenture de l'entrée pour en sortir.

    Le temps de rejoindre le point de rassemblement, il fouilla furtivement les environs du campement pour voir s'il reconnaîtrait des visages connus. Avoir la capuche sur la tête lui permettait de passer humblement parmi les plus "grands". Puis, les groupes furent formés. Il aperçut Qwellaana accomplissant ses derniers préparatifs. Il espéra que tout se passerait bien pour elle.

    Puis, le mage rejoignit sa formation et découvrit qui serait à la tête de leur expédition. Il manqua de frémir. Les descriptions qu'il avait entendues suffirent à mettre un nom sur ce visage, avant même qu'il ne se présente. Jamais il n'aurait cru le voir de ses propres yeux. Il déglutit, se sentant étrangement insignifiant. Pour rester concentré, il tourna légèrement la tête pour observer les autres membres de leur formation, qui s'avérait donc être assez hétéroclite.

    *Tiens, mais c'est Kassandra là-bas ?*

    Cela ferait au moins une personne qu'il avait déjà croisée par le passé, même si cela avait été assez... particulier.

    Le Luteni Tulkas donna l'ordre de marche. Alaric ne fut pas choqué d'être en dernière ligne. Cela avait toujours été sa place, tant comme Shekhikh par le passé que comme simple mage de guerre maintenant. Enfin, mage de guerre... Il se retint de ricaner. Juste mage, quoi. Une chose était certaine : Qwellaana, en tant que FMR, aurait au moins une protection assurée par l'avant au sein de son groupe.

    À songer à la Valkyrie, celle-ci aussi avait pensé à lui. L'ancien FMR sentit sa présence télépathique dans son esprit ; il la reconnaîtrait entre mille. Il crut percevoir son inquiétude pour lui. En lui répondant, il espérait lui rassurer.

    Je ferai tout ce qui sera nécessaire pour revenir... Tout se passera bien... Fais également attention à toi, d'accord ?

    Il ne pouvait pas promettre qu'il reviendrait en vie. Toute personne ayant osé pénétrer dans le Temple du Dragon n'en était jamais revenue pour témoigner des mystères qui s'y trouvaient. À y songer, ces simples mortels avaient-ils seulement le droit d'y entrer ? De découvrir ses secrets ? Cette question méritait réflexion. Il était évident qu'il y avait une raison à la présence de cette vénérable infrastructure. Elle ne serait pas remontée des abîmes de la mer sans raison. Seulement, personne n'avait encore été capable d'en percer le secret, ni de comprendre son véritable but. Est-ce que les nouveaux venus y parviendraient ?

    La petite troupe se mit en route vers la Porte de la Lune. Alaric ne put s'empêcher de lever le regard au fur et à mesure que le Temple devenait immense à leur approche. Il était toujours aussi... stupéfiant ! Et quand il posa le pied après les autres, quand sa semelle foula le sol dallé humide, il eut l'impression de... pénétrer en plein cœur du passé. Le Temple du Dragon était lui-même un vestige d'un lointain passé oublié, de cette ère où les elfes dominaient le Sekaï. Ce monument antique était-il vraiment si ancien ? Difficile à dire au premier abord. Et, au fur et à mesure qu'il suivait la cohorte, gardant sa lanterne levée pour contempler l'intérieur, bien des souvenirs de ses études, à ses heures perdues, lui revenaient.

    Les lueurs des torches et des différentes lanternes projetaient un étrange jeu d'ombres sur la fresque qui se dévoilait au retrait des ténèbres. Comme les autres, Alaric la fixait, observant cette scène figée depuis des millénaires. Il était étonné que l'eau de mer n'ait pas érodé les détails.

    *Impressionnant...*

    Le mage déchu étudiait la scène. Deux femmes se faisaient face, l'une tendant quelque chose, un paquet ou un objet indéfinissable à l'autre, tout en se trouvant dans l'immensité du désert. En tournant la tête, Alaric pouvait voir la retranscription peine du Temple et de ses deux portes, menant clairement en son cœur intérieur.

    Chacun y apporta ses propres hypothèses. Alaric les écoutait d'une oreille attentive, tout en gardant ses yeux rivés sur les deux fresques.

    "L'une tend quelque chose à l'autre... C'est quelque chose qui les lie malgré tout... un lien comme l'union éphémère du Soleil et de la Lune pour donner l'éclipse... qui a fait remonter le Temple du Dragon, comme si cette union donnait naissance... Le Temple a deux portes, deux voies, qui se réunissent pour former un tout, qui se trouve au centre du Temple. Un groupe pour chaque porte... devons-nous nous retrouver au cœur de cet endroit, avec quelque chose à nous confier l'un à l'autre ?"

    Il ressassait ses premières idées, qu'il pensait à haute voix.

    "Cette conjonction céleste offrait aussi la vue sur les étoiles, qu'on ne voit qu'en pleine nuit... les étoiles en plein jour, obscurcies le temps de l'éclipse... Nos souverains sont comme la Lune et le Soleil, qui ont engendré les premiers dragons de ce monde... et ces deux femmes qui se passent quelque chose de précieux... les femmes offrent la vie, elles l'engendrent, elle est liée à elles... C'est transmis pour être pérennisé, pour perdurer... ou être protégé ? Hum... pardonnez-moi, je m'égare."

    Chose certaine, tout se liait. Le Temple du Dragon était le centre de tout cela, possiblement. Il aurait pu demeurer ici, à réfléchir longuement à ses deux représentations mystérieuses, qui revêtaient bien des significations possibles, mais la mission d'exploration devait se poursuivre. Il ne s'attarda donc pas plus et suivit le reste du groupe. Puis, ils arrivèrent dans une nouvelle pièce. L'obscurité fut de nouveau refoulée par les lueurs artificielles des explorateurs pour dévoiler les splendeurs intérieures vouées à la Lune.

    Alaric, les yeux écarquillés, se figea, quand il aperçut ce qui se dressait devant lui... La bouche ouverte de stupéfaction, son cœur s'était mis à tambouriner si soudainement qu'il en eut le souffle coupé. Il manqua de lâcher sa lanterne face à l'immense présence reptilienne qui lui faisait face, ses deux orbes luisants dardant sur lui. La créature était si imposante que son corps emplissait toute la pièce.

    *Un dragon !*

    Il avait déjà vu le Fléau des Titans, qui paraissait être d'une taille bien plus supérieure. En même temps, il était difficile d'évaluer la grandeur des deux puissantes créatures, quand on les voit de loin, et là... quand l'une vous fait face de toute sa dangereuse taille.

    Alaric, toujours les yeux ronds, saisi d'une certaine angoisse mais aussi d'une étrange ferveur, tourna la tête à droite et à gauche... Où étaient les autres ? Il était seul, face au dragon. Il braqua son attention sur le saurien, se retenant de frissonner, quand une certaine impression de déjà-vu le saisit dans les tripes. De sa mésaventure avec Lamentation... non, ce n'était pas cette putain d'Entité, même s'il y avait un effet mystérieux et oppressant. Il était bien dans la réalité ! Ce qu'il vivait était exceptionnel, hors norme. C'était un dragon, bordel, pas une de ces reliques malveillantes qui cherchaient par de noirs desseins à repousser l'inéluctable. Un dragon était un enfant de la Lune et du Soleil, et aucun de ces êtres impurs des temps anciens ne pouvaient être aptes à l'imiter, même pour vouvoyer les mortels !

    Convaincu de ce qu'il voyait, les sourcils froncés, il fixa le dragon. Puis, il s'abaissa, mettant un genou à terre. Doucement, comme pour ne pas briser l'instant — ou pour éviter tout geste brusque ? — il déposa la lanterne au sol.

    Le corps féliné du dragon était recouvert d'écailles d'un noir profond, presque indigo, tel un ciel sans lune. À chaque mouvement gracieux, même les plus infimes, ses écailles semblaient scintiller de mille petites lumières, comme si des étoiles s’allumaient et s’éteignaient sur sa peau. Ces éclats lumineux rappelaient l'intensité d'une nuit emplie de diamants célestes, filant en bandes argentées et dorées le long de ses flancs et de sa queue, créant un effet hypnotique.

    Ses yeux, posés sur l'humain devant lui, étaient deux orbes de lumière blanche, presque éthérées. Alaric se retint de trembler. Il avait l'impression d'être transpercé par ce regard perçant. Il respirait même lentement, presque imperceptiblement, pour ne pas perturber celle du grand saurien, qui était lourde et régulière. Chaque aspiration de l'air ambiant enflait son torse carapaçonné.

    Sa respiration, lourde et régulière, faisait onduler les flammes qui veillaient aux coins de sa gueule armée de longues dents tranchantes, n'attendant que l'appel de son souffle pour embraser l'air ambiant. En même temps, au rythme de l'air qu'il inspirait et expirait, les étoiles de son corps brillaient plus vivement.

    Puis, une voix tonitruante se fit entendre, vibrant jusqu'aux tréfonds des os du géomancien. Alaric réussit à ne pas baisser la tête, gardant ses yeux bruns rivés dans ceux immaculés du dragon. Il porta sa main droite à son cœur, ne sachant quoi dire. Bordel, il n'allait pas flancher maintenant ! Si ? Il était face à un dragon, ce n'était pas rien quand même !

    "Il y a tellement de raisons à ma venue en ces lieux, noble gardien. Au début, je pensais que ce n'était que pour redorer mon honneur, que j'ai souillé en ne suivant pas la voie que je pensais être mienne à ce moment-là..."

    Et puis, en posant le pied sur la terre émergée du Temple, il avait compris qu'il n'était pas venu pour cela. Si Zephyr l'avait abordé pour lui suggérer cette raison-là, ce n'était pas celle qui l'avait réellement motivé au plus profond de son être.

    "... avant de réaliser que ce que je souhaitais : savoir pourquoi... pourquoi le Temple du Dragon a fait surface au moment de l'union du Soleil et de la Lune, comme autrefois. Comprendre pourquoi, jusqu'ici, tout être vivant qui a pénétré ces lieux a échoué... Comprendre pourquoi nous n'avons pas droit à l'échec. Comprendre pour protéger des proches personnes qui participent à la découverte de ce que vous protégez... Comprendre son rôle au sein du Sekaï. Vous, ce Temple... c'est lié à la Lune et au Soleil. Ce lien a quelque chose d'important..."

    À savoir s'ils seront dignes de saisir toutes ces énigmes. De saisir ce que le Temple cherchait à dévoiler à celles et ceux qui étaient destinés à découvrir ce qui se cachait ici-même.

    Il retira sa main portée et se releva, pour faire face, debout devant le grand dragon.

    "J'ai déjà affronté mon passé... et je m'en suis relevé avec l'aide d'âmes qui ne visaient qu'à aider mon esprit en perdition. Et si je dois chuter, alors je ferai en sorte de me relever encore, pour soutenir ces mêmes âmes, pour d'autres."

    Il avait tellement d'interrogations à l'esprit, qui appelaient à avoir des réponses. La vie n'était-elle pas ainsi faite ? N'était-elle pas une recherche perpétuelle pour trouver ces réponses, certaines devenant des quêtes de toute une vie ?

    "Bien des réponses qu'on cherche durant des années, voire des décennies, sont souvent si proches de nous... qu'on s'aveugle soi-même à les croire plus lointaines, n'est-ce pas ?"

    Il déglutit.

    "J'ai tellement d'interrogations... mais d'aucune ne sortira de ma bouche, noble gardien. Ma venue, comme celle de mes compagnons d'armes, de mes amis... est possiblement déjà un premier pas vers ce qu'on cherche réellement. La trouver aidera à les garder en vie... Je ne souhaite pas que leur sang se rajoute à celui des précédents..."




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