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  • Jeu 4 Juil - 23:20
    image rp

    Tour 22-2

    À nouveau, le duo de louve avait confié une partie de son histoire. D'abord la solitude, puis la colère. Deux vies menées dans le même corps, mais qui ne trouvait pas leur énergie au même endroit. 

    Elles avaient eu l'impression d'avoir rendu le sacrifice de Ronchon utile. La lance était repartie d'où elle venait, emportant avec elle les derniers souffles de Ronchon. Le silence qui les engloba vola en éclats par le cri horrible de la bête. La réalité s'effondra sur elle-même. Des lézardes s'ouvrant sur des lieux différents. Comme s'ils étaient hors de tout et en même temps au centre de tout. 

    Devant ce spectacle, l'espoir s'invitait dans l'esprit de la louve. Mais le corps d'Eiri As se figea sous la prise de contrôle de Sage. Il annonça la vérité du moment. Le moment des adieux était arrivé. Malheureusement, l'aventure s'arrêtait là pour les compagnons d'esprits de ce groupe de malheureux. C'était étrange de ne plus être maître de son corps, mais sans subir la pression écrasante de la louve, ni l'empreinte devenue chaleureuse de Nora. Les mots s'écoulaient de la bouche de l'ancienne rousse, de la harpie avec une voix autre que la sienne. C'était étrange, Sage annoncé leur fin et pourtant, la naine ne ressentait pas de peur. Il lui rendit le contrôle. 

    C'est Trésor qui prit à nouveau la tête du cortège, traversant le portail les menant à la réalité. La blanche hermine laissa sa place à un elfe. Des yeux bleus qui donnaient l'impression de percé les âmes. Donnant une sensation de déjà vu à la chasseuse. Pourtant, le regard du dénommé Luven ne leur était plus destiné. 

    Chacun restait immobile lors de leurs derniers adieux à ses étranges compagnons. 

     - Merci pour tout Sage.

    - Puissiez, vous enfin reposer en paix. 

    Sage ne répondit pas, enfin pas verbalement. Une sensation se dégagea, comme celle d'un grand frère qui posait sa main sur leur épaule. Enfin, c'est l'impression qu'elle se faisait.

    Résiliente ne pouvait accepter le sort de celle qui lui avait confié sa force. Est-ce que le duo aurait pu y arriver sans la puissance de Sage, cette puissance qui avait fait succombé le chasseur ? Même si ce n'était pas le sien, le vrai l'attendait peut-être quelque part. 

    La naine ne sut quoi dire, elle n'avait jamais était très doué pour ça. Et avant qu'elle ne trouve les mots, la fac se jeta à travers le portail. Le pelage sombre se volatilisa pour laisser à nouveau cette peau blanche sans vêtement. Le nom de Résiliente n'avait plus de raison d'être. C'était redevenu Lune. Et le duo espérait tout retrouver aussi, ne pas être laissé pour compte encore une fois. 

    Elles s'avancèrent d'un pas, passant leur regard sur le reste du groupe. 

    - Myriem, j'espère que vous la retrouverez, elle a besoin de vous. 

    La naine passa son regard sur Vaesidia. Et c'est Fearg qui prit la parole. 

     - De l'autre côté, se dresse le reste des souvenirs de vos compagnons. Mais si l'on as à se recroiser dans l'enceinte de Luxuriance. Je vous envoie curer les gnolls.

     Et enfin, elle se rapprocha d'Alaric. Eiri As commença à parler. 

    - à chaque fois que je suis dans des situations étranges, tu n'es jamais loin. Si tu as besoin, nous serons là. 

    Fearg se mit à rire. 

     - Et cette fois, je n'ai pas essayé de te bouffer, mais on peut quand même aller boire un coup. 

    Il lui tendit la main et les naines l'encadrèrent attrapant chacune un bras. Elles se laisseraient guider pour franchir le portail. Le rire de la louve retentit à nouveau. 

    - Tu me verras peut-être à nouveau nue. Cette fois prend moi dans tes bras. Au moins pour dissimuler mon corps aux autres. 

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    Alaric Nordan
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  • Sam 6 Juil - 14:25
    L'instant de calme après toutes ces épreuves passées n'apparut pas vraiment apaisant pour le mage déchu. Il leva la tête vers le ciel orangeâtre, fade et oppressant. Les zébrures qui déchiraient ce voile apportaient l'espoir croissant qu'ils approchaient enfin de la fin de tout ce calvaire. L'Entité paraissait souffrir à sa façon. Mais il fallait encore un élan d'effort, un moyen d'aboutir une bonne fois pour toutes à la fin de tout cela. De toutes ces souffrances endurées, de leurs souvenirs arrachés, de leur identité morcelée et dénaturée... Il ne fallait pas lâcher. Mais comment ?

    Les suppositions intriguantes apportaient un semblant de réponse à l'identité de leur Geôlier et des dernières options qui leur restaient pour avoir le dessus définitivement sur lui. Ils ne pouvaient pas reculer. Pas après tout cela. Valeureux aida par sa réponse mentale à faire en sorte qu'Alaric continue de s'accrocher. Accepter la raison de ses propres troubles d'angoisse n'avait pas été chose aisée. Donc, il était hors de question de faire un pas en arrière.

    *Tu as raison, Valeureux. Hors de question de courber l'échine par la défaite. Merci mon ami.*

    Pour ce qui est de Vaesidia, il ne sut quoi rajouter... Peut-être qu'il n'y avait justement plus rien à remettre en avant. Bien que son bref échange avec l'elfe ait provoqué plus de mauvais remous émotionnels, tenter de la conforter à continuer de s'accrocher à l'espoir paraissait vain. Ou alors ce serait une bataille orale de longue lutte pour essayer de laisser entrevoir quelque chose dans son voile de doute, de crainte, empli de souvenirs et de démons du passé qu'elle préférait ne pas voir réémerger... En même temps, de ce qu'elle avait accepté de partager de son histoire pouvait être compréhensible... ou presque. Alaric se demandait s'il avait bien fait d'aborder la précédente conversation, quand le fil de leur cohésion avait manqué de rompre tout à l'heure, avec le doute qui s'était montré de plus en plus envahissant. Une chose certaine était qu'elle n'était plus celle qui menaçait de leur tirer dessus quand elle avait débarqué dans le Chant des Ronces. Les choses avaient évolué, quand elle avait énoncé être désireuse d'apporter son aide.

    La discussion s'allongeait, l'Affamée se régénérait. Et la jeune Résiliente apporta plus de lumière sur ce qui pourrait être le dernier acte : le Masque que Trésor avait volé ou trouvé. L'Archer n'en avait plus le souvenir. Mais il ne restait plus que le Masque dans cette plaine stérile. Il n'y avait pas d'autres corps corrompus dans les environs. Ronchon annonça la fatalité pour briser une bonne fois pour toutes l'Entité. Forcément, cela suscita de nouvelles interrogations et indignations. Trésor exprima vivement son désaccord.

    Alaric, silencieux, regarda Ronchon, essayant de voir s'il n'y avait pas une autre solution. Le temps s'écoulait contre eux et leur manquait pour essayer de contrer l'idée du Sanglier borgne. Myriem en eut une. Après que Trésor lui eut tendu, il s'exécuta et n'obtint rien. Il eut comme un goût amer, s'étant déjà douté du résultat. Lui aussi voulait trouver une autre voie que la suggestion faite par Ronchon.

    "Je ne sens rien Myriem... je suis désolé. Mais il ne reste que ce Masque. Elle était donc forcément reliée à notre ennemi."

    Et à nouveau, les prisonniers de l'Entité tentèrent d'autres approches magiques, pendant qu'Eiri As se rapprochait de Ronchon pour se mettre face à lui et énoncer que c'était à elle de faire ce sacrifice. Alaric fut interloqué par une telle prise de décision, sans concertation avec les autres... Mais... Ronchon remercia la louve en face de lui avant de prendre une grave décision. Alaric se figea, comprenant immédiatement ce que le magicien porcin voulait faire. Non ! Il n'y avait pas d'autres solutions ! Si ! Il devait y en avoir une, forcément ! Pas comme cela. Ils étaient arrivés tous ensemble à repousser l'Entité, c'est ensemble qu'ils s'échapperaient et... Il serra les poings en baissant la tête. Tout le monde ne pourrait pas être sauvé. Il ne put empêcher ce sentiment d'impuissance de l'envahir. Bordel ! C'était dur à accepter !

    Cette même impression d'impuissance lui déchira le cœur quand Ronchon usa de ses propres forces magiques pour que la corruption qui le minait depuis si longtemps achève de l'envahir. Les pieux de glace perforèrent sa fourrure de poils drus en bien des endroits, pendant qu'il s'affaissait doucement contre eux, sous le regard éploré de Trésor qui refusait son dernier souhait, se précipitant vers son vieil ami pour espérer encore que cesse cette folie. La scène était poignante, prenante. Alaric l'avait si souvent vue sur le champ de bataille, puis lui-même avec Nimureh. Refuser que la mort emporte l'âme de ceux qu'on aimait ou qu'on appréciait... Une larme coula le long de sa joue.

    Silencieusement, il vit la vie quitter Ronchon, pendant que Trésor s'effondrait de tristesse, après l'avoir enserré du mieux qu'il pouvait, malgré l'imposante corpulence du sanglier.

    Une vie pour sauver les autres. Une vie qui ne pourra pas être sauvée. D'une voix presque murmurante, Alaric adressa une prière.

    "Ronchon... tu ne seras pas oublié. Tu as combattu avec courage et force. Que la lune apaisante guide ton âme vers un repos bien mérité et t'accueille pour une paix méritée. Dans le firmament, tu deviendras une étoile, veillant sur nous, écoutant nos prières. Ta lumière continuera de briller en nous, et ton souvenir vivra à jamais dans nos cœurs..."

    Il retint un sanglot.

    "Repose en paix, cher frère. Que le soleil, la lune et les étoiles te protègent toujours."

    Il ne fut pas le seul à honorer une dernière fois Ronchon et son dernier acte héroïque. Sauvage, qui avait pris le contrôle de Résiliente, parut d'un calme étonnant. La résolution se lisait dans ses traits.

    Des cieux sinistrement orangés, la lance melornoise apparut, revenant encore une fois faire son ultime office. Après quoi, l'une des deux jumelles, qui était proche du corps de Ronchon et de Trésor totalement abattu, entama le récit de leur vie. Alaric l'écoutait, sans détourner son regard de la scène. Une tranche de vie faisait surface, douloureusement pour les deux chasseuses. Après coup, comme pour poursuivre le combat contre l'Entité, Eiri As tenta un acte magique sur le Masque, pendant que Fearg observait les nébulosités des failles... Les Pins Argentés, dit-elle alors.

    Les Pins Argentés ? La réalité était-elle enfin accessible ? Résiliente parut reconnaître un lieu.

    Une soudaine déflagration retentit tout autour d'eux, accompagnée d'un hurlement déchirant et effroyable à la fois. Comme précédemment, le sol trembla avec violence. Les fissures s'élargissaient, repoussées par l'assaut électrique des éclairs naissant de l'effondrement de cet effroyable environnement. Certaines zébrures, en devenant plus grandes et plus larges, laissaient place à la netteté de la réalité. Chacune d'elles dévoilait un lieu différent, des personnes s'affairaient dans leurs activités quotidiennes, une scène citadine... des fragments de souvenirs du passé des âmes dont s'est nourrie l'Entité depuis si longtemps, ou étaient-ce des bribes de la réalité à différentes époques ? La question n'aurait sans doute pas de réponse immédiate dans l'esprit du mage humain quand Résiliente parut reconnaître ce qu'elle nommait être sa maison. Donc, ce qu'ils voyaient tous à travers les déchirures serait ce qu'il avait soupçonné : la réalité, celle d'où ils avaient été arrachés de force ? Il sentit une étrange impatience l'envahir.

    Une soudaine déflagration retentit tout autour d'eux, accompagnée d'un hurlement déchirant et effroyable à la fois. Comme précédemment, le sol trembla avec violence. Les fissures s'élargissaient, repoussées par l'assaut électrique des éclairs naissant de l'effondrement de cet effroyable environnement. Certaines zébrures, en devenant plus grandes et plus larges, laissaient place à la netteté de la réalité. Chacune d'elles dévoilait un lieu différent, des personnes s'affairaient dans leurs activités quotidiennes, une scène citadine... des fragments de souvenirs du passé des âmes dont s'est nourrie l'Entité depuis si longtemps ou étaient-ce des bribes de la réalité à différentes époques ? La question n'aurait sans doute pas de réponse immédiate dans l'esprit du mage humain quand Résiliente parut reconnaître ce qu'elle nommait être sa maison. Donc, ce qu'ils voyaient tous à travers les déchirures serait ce qu'il avait soupçonné : la réalité, celle d'où ils avaient été arrachés de force ? Il sentit une étrange impatience l'envahir.

    Soudain, un nouveau fracas plus assourdissant et tonitruant que tantôt dévoila une nouvelle déchirure dans le voile du Chant des Ronces. Un abîme obscur s'ouvrit devant leurs yeux, avant de laisser entrevoir un paysage vivant, qui respirait... qui appelait à venir se rouler dans l'herbe fraîche, apportée par une véritable brise venteuse rafraîchissante. La meilleure de toutes : celle de la vie, celle de la sortie de ce cauchemar !

    La voix de Sage se fit entendre à travers les lèvres d'Eiri As. Comme pour parachever la longue quête de Ronchon et de ses amis coincés ici depuis si longtemps, il encouragea les survivants à partir sans tarder. Le Chant des Ronces se rétractait sur lui-même, c'était sa fin. Mais ce qui fut une bien triste nouvelle était que cette voie vers la libération de cet enfer ne serait pas pour lui et ses autres frères et sœurs de circonstance qui habitaient le corps de chacun des vivants encore présents. Un bien lourd rappel qu'il ne demeurait plus que leurs esprits. Même la petite Fae refusant une telle destinée pour eux, au point de s'effondrer, en lutte visiblement avec Sauvage. La fillette ne désirait pas cette fin, clairement.

    Sauf Trésor, qui restait le dernier du duo qu'il formait avec Ronchon. En quelques pas, il rejoignit le portail et le franchit. La lumière crépitante et orangée qui auréola son corps quand il traversa la fine frontière qui séparait les deux mondes, laissant place non plus à l'Hermine, mais à un jeune elfe à la longue chevelure de neige. Après un bref moment de stupéfaction à redécouvrir son corps originel, il se retourna, faisant face aux autres.

    "Trésor ! Tu as retrouvé ton corps !" s'exclama alors Alaric. Mais l'elfe ne parut ni voir ni entendre ses paroles. Il ne parut point voir les autres d'ailleurs. Le dernier au revoir que l'archer autrefois hermine put leur offrir fut d'être redevenu lui-même.

    Résiliente, ou plutôt Sauvage, prononça un nom : Luven. Ainsi, le nom de Trésor sortit de l'oubli provoqué par la corruption. C'était là un autre signe qu'ils avaient effectivement réussi. Alaric sentit son cœur battre. Enfin la liberté ! Enfin le retour au Sekaï. Peu importait qu'il vienne à se retrouver aux Pins Argentés et les conséquences de sa possible "disparition" engendrées. Ils avaient réussi ! Ils seront bientôt tous libres !

    Les songes de Valeureux retentirent dans son esprit. L'humain porta une main à sa poitrine, comme lors de la toute première sensation de sa présence en lui.

    *Rien n'aurait été possible sans ta joyeuse détermination, Valeureux. Je regrette que cela se termine ainsi et cela aurait été un véritable honneur de te rencontrer. Je n'aurais pas refusé que nous poursuivions la route ensemble, mon ami. Puisse la lune te guider vers les étoiles...*

    De son vivant, Valeureux avait dû être une personne exceptionnelle, affrontant le danger avec joyeuseté et enthousiasme. Alaric espérait déjà l'honorer en essayant d'être aussi enjoué que lui, peu importe les circonstances à venir.

    Son regard se tourna vers Résiliente quand elle finit par se redresser. Sauvage devait avoir encore le contrôle. L'être était résolu à accomplir son dernier acte pour marquer ses adieux. Le corps de Résiliente se précipita alors vers le portail. Ce fut si rapide que l'humain n'eut pas le temps d'en placer une... Et tout comme Trésor, la petite Fae retrouva son apparence d'origine une fois le portail franchi. Lune était là, présente. Elle tomba à genoux, se mettant à sangloter. Luwen était là, se rapprochant d'elle pour poser une main compatissante sur son épaule. Ses lèvres remuèrent, mais aucun son ne parut audible.

    Alaric hésita à demander qui serait la prochaine à passer. Les deux jumelles se rapprochèrent de lui juste à ce moment, comme pour profiter de son hésitation. Et tout en s'exprimant avec une humeur qui leur était bien reconnaissable.

    "Je me demande si ce n'est pas plutôt l'inverse. Que c'est moi qui me retrouve dans de drôles de situations dès que nous nous croisons."

    Il aurait pu rire, mais la hâte le faisait presque trépigner. Le portail était là, n'attendant plus que le passage des prochains survivants.

    "Va pour boire un truc potable ensemble. Et pas comme la dernière fois. Et surtout sans un foutu jongleur de pommes." termina-t-il en gloussant cette fois.

    Il tendit la main pour inviter les deux chasseuses à franchir ensemble ce portail. Elles l'encadrèrent, une pour chacun de ses bras. Alaric tourna sa tête vers Myriem et Vaesidia.

    "On se retrouve de l'autre côté, hein. Hors de question que l'une de vous deux demeure ici."

    Le portail était là. Ils engagèrent les derniers pas vers lui. Juste avant de le traverser, Fearg se mit à rire. Le mage se retint de rougir.

    "Je le ferai."

    Et ils passèrent le portail.

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  • Dim 7 Juil - 0:48


    Le chant des ronces
    Feat. des fous - Tour 23


    Le temps s'écoule d'une façon étrange, plus rien ne semble bouger durant de longues secondes, une sorte d'immobilisme nous assaille, nous cherchons comment faire, comme avancer. Je rejoins les avis de tous, cela n'est pas terminée mais nous ne voyons pas comment provoquer la suite et forcer la bête à se nourrir de nouveau. Les théories d'Alaric trouvaient echo en moi, je pensais comme lui en un sens, l'entité pouvait être une puissante chose issue d'un des mondes dont on nous parlait sans qu'on puisse certifier ou non de leur existence. Mais nous étions tous en cet ailleurs.

    A ce moment là Ronchon prit de nouveau la parole, ses paroles étaient fortes et tendres en un même temps, il se montrait comme paternel envers les jumelles torturées aux prises avec leurs démons et la perte d'elles même.
    Ses mots étaient forts de sens et plein d'empathie. J'en étais là, Résiliente toujours près de moi à écouter quand je sentis une concentration de mana qui me mit la chair de poule. Qu'est-ce qu'il se passait bordel.

    Mes poils se hérissent le long de mes bras, un frisson me parcourt, il se passe quelque chose, les émotions de Ronchon sont trop intenses d'un coup. Et avant même que je puisse réagir la magie explose sous les sabots de Ronchon. La glace surgit du sol pour venir l'empaler, il vient de se suicider. Sa douleur et son cri transpercent mon âme et mon corps. Déjà affaiblie par les épreuves vécues, alors que nous pensions souffler voilà qu'à nouveau l'horreur nous frappe.

    Et si cela ne suffit, la réaction de Trésor m'achève, sa douleur, sa peine, elles sont miennes en ces moments.

    Je me relève et mes pas chancelants me poussent à m'approcher du corps du vénérable mage de glace au tempérament d'acier. Je ne sens déjà presque plus son empreinte, sa présence ni sa douleur qui s'efface déjà, ce n'est pas bon signe. Mon seul oeil valide est embué de larmes et ma gorge nouée.

    - Je ne .... je ne peux pas Trésor. Il est...

    Je ne parviens même pas à terminer ma phrase mais je sens que son dernier souffle approche et je n'aurais pas le temps.
    Alors que le vaillant sanglier pousse son dernier soupir je me sens défaillante, je tremble comme une feuille morte, je ne m'y attendais pas et j'ai mal, mon coeur saigne encore une fois. Par réflexe je me saisis de la main de Résiliente pour sentir sa présence, sa chaleur, son coeur qui bat.

    Le courage des jumelles me sidère encore une fois, leur abnégation et leur vaillance force le respect et alors que la lance est venue signer la mort de notre fier compagnon voilà que Fearg s'agenouille pour livrer sa propre histoire.

    Le ciel se fissure de nouveau révélant un morceau de ciel orangé. La machine est lancée, le cycle nouveau débute sur la digestion de la bête. Seulement tout s'effondre, cette fois ci il semblerait que nous avons gagné, c'est la fin? Nous allons pouvoir nous libérer de ce cauchemar.

    Sage prend la parole et nous livre son analyse et étrangement alors que nous devrions sauter de joie tout cela nous laisse empli d'une sorte d'effroi et de peur. Il ne peut en être ainsi, nous ne pouvons les perdre, mon esprit s'agite et se perd alors qu'autour de moi tous parlent, que les adieux sont prononcés, je ne veux pas je m'y refuse.

    Trésor est le premier à sortir et la magie semble réagir, le monde réel, le notre, le Sékaï lui rend son apparence. Trésor était un elfe melornois dont Sauvage se souvient. J'ai envie de sourire, d'enfin être soulagée mais rien ne vient et quand résonne en moi la douce voix d'Espiègle, que je perçois sa mutinerie, sa vivacité d'esprit, je me sens abattue. Ses mots coulent sur moi, je les comprends et je suis honorée par ce qu'elle me dit et me livre mais je me refuse à y croire, à l'écouter.

    - Si ça se trouve nous resterons ensemble?

    Stupide et non réalisable j'en ai la conviction mais j'aimerais ne pas la perdre, c'est injuste, après tout ce que nous avons vécu, pourquoi est-ce que cela doit se terminer ainsi?

    - Tu m'as montré la voix, tu es tellement forte mais je n'oublierai pas, je n'oublierai rien je te le promets. Je... je la protègerai, elle aura un toit et ne sera plus jamais seule.

    Mes mots sont hachés même dans mon esprit, la peine d'accable littéralement et je ne réalise pas trop ce qu'il se passe autour. Je ne comprends pas au début ce qu'il se trame mais à mesure que cela avance, je comprends que Sauvage a pris le contrôle de Résiliente et qu'elle la pousse à sortir alors qu'elle le refuse. Je n'interviens pas car je veux qu'elle sorte, je veux la voir redevenir entière quand elle aura franchi ce portail.

    L'adieu de Sauvage en mémoire à Ronchon est déchirant, quand cela va cesser, j'ai l'impression de recevoir des coups de couteau en permanence. Alaric à son tour prend la parole pour honorer ceux qui sont sortis, partis, morts ou peut-être disparus. Cela m'angoisse de ne pas savoir si ils survivent une fois ce portail franchi. Mais de l'autre côté je vois maintenant Lune... Je me souviens d'elle enfin !

    Les mots d'Alaric même si je ne partage pas ses croyances sont d'une rare beauté et d'une justesse impressionnante. Les jumelles sont sorties à ce moment là et comme pour Lune une fois le portail franchi nous les voyons retrouver leurs corps et le souvenir de leurs noms rejaillit dans nos mémoires. C'est ensuite au tour d'Alaric de sortir. Il ne reste que Vaesidia et moi pour le coup.

    Je me tourne vers l'elfe et dit.

    - J'espère que vous ne resterez pas ici et que vous saisirez l'occasion qui nous est offerte de sortir, nous avons trop perdu pour que vous gachiez cette chance, saisissez la.

    Cela étant dit je m'avance vers le portail.

    - Je me sens tellement coupable de franchir ce portail sans savoir si tu seras encore à mes côtés. Je m'en veux, cela me ronge. J'espère que tu ne m'en veux pas, j'ai... je dois... Lune... mon fils...

    Je ne peux terminer ma phrase et je franchis le portail, littéralement rongée par la ... Culpabilité d'abandonner Espiègle.


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  • Dim 14 Juil - 1:22
    Comment pouvions-nous nous dépêtrer de cette situation ? J’avais beau réfléchir sur le sujet, aucune solution ne me sautait aux yeux. Pour être tout à fait franche, j’avais la désagréable sensation d’être, en cet instant, particulièrement inutile. Il n’était pas question ici de combattre un ennemi ou d’échafauder un plan de bataille mais d’identifier, si j’en croyais ce que j’entendais, la véritable nature de cet endroit et ce, en procédant de deux manières : la première, pour laquelle je n’avais aucune qualification et qui consistait à polémiquer sur la composition arcanique de cet endroit. La seconde, en revanche, consistait à trouver un quelconque usage à cet antique masque melornois qui, je devais bien l’admettre, m’intriguait grandement. Jusqu’à présent, nous n’avions su lui trouver un quelconque usage bien que l’hybride à fourrure semblait y tenir comme à la prunelle de ses yeux. Il constituait en soit un trésor…trésor qui, comme je l’appris, appartenait en réalité, au maître des lieux. Mon allié semblait même penser que cet ustensile constituait un atout susceptible de nous faire sortir d’ici.

    Bien que je demeurais circonspecte, je ne pipais mot tant les tenants et aboutissants de toute cette situation m’échappait. J’étais bien en peine d’émettre le moindre postulat quant à l’art et la manière d’utiliser cet objet. En revanche, une part de moi-même ne pouvait s’empêcher de s’interroger. Pourquoi le pseudo-démiurge régissant ces lieux détenait-il ce masque ? Etait-il un elfe ? Je peinais toujours à croire que sa présence en ces lieux fut une coïncidence. Il y avait forcément une explication. Mais laquelle ? Je l’ignorais. Au point où j’en étais, j’étais presque prête à croire que cette entité était, en réalité, l’âme d’un elfe qui du fait du conflit contre les Titans et de la magie employée se serait retrouvée condamnée à une existence aussi sordide…à une existence régie par des sentiments comme la haine et la peur mais aussi par une sensation bien pire encore : une faim dévorante. Ce masque était possiblement le seul artefact qui attestait de son identité passée. Qu’il fût un elfe ou non, ce choix n’était pas anodin. Mais si dans ce cas, ce masque appartenait à notre ennemi…Pourquoi n’avait-il jamais cherché à le récupérer directement ? S’il représentait une menace ou notre seule porte de sortie, pourquoi accepter de nous le laisser ? Certes, nous avions tous dû nous battre contre des ennemis redoutables…mais en l’occurrence, ils n’avaient jamais cherché à s’emparer de ce masque. Bien au contraire. Etait-ce pour nous leurrer ? Etait-ce pour nous pousser à sous-estimer l’importance cruciale que revêtait cet objet ? Peut-être. Mais dans ce cas, il aurait été plus pertinent d’abattre Trésor. Après tout, lui seul semblait avoir un tant soi peu conscience de la dimension de cet objet.

    Non. Un point m’échappait. Mais lequel ? Il était évident qu’il nous était impossible de revêtir ce masque. Le détruire ne semblait pas non plus être la solution. Elle était si basique et si classique que mes alliés avaient forcément dû y songer à un moment donné. Et puis…quel intérêt y’aurait-il à détruire un objet que l’on aurait cherché à dérober et conserver ? Aucun. Il aurait fallu le faire de suite. Peut-être fallait-il purger une quelconque malédiction présente dans cet artefact ? Ou l’insuffler, à l’instar de la lance, d’un quelconque souvenir ? A moins que….J’avais presque oublié ce détail mais….de mémoire, j’avais été transporté dans ce monde à cause d’un fragment d’un masque similaire. Si l’un avait pu m’emmener ici, était-il possible d’envisager que l’autre était capable d’accomplir l’exact inverse ? Cela paraissait tiré par les cheveux. Vraisemblablement le toucher n’avait aucun effet. Etait-ce à cause de notre adversaire ? Possiblement même si je n’avais aucun moyen d’en être sûre. A moins qu’il ne constituait une sorte de point d’ancrage ? Après tout, lorsque j’étais apparue en ces lieux, je m’étais automatiquement retrouvée non loin de cet objet…

    Je ne savais franchement plus quoi en penser. Je n’étais pas une arcaniste de l’université de Melorn. Je m’étais simplement intéressée aux applications pratiques de la magie et non aux diverses théories qui passionnaient certains magistères. Mon champ d’expertise était l’art de la guerre, non la thaumaturgie. Même si tout comme eux, il m’arrivait d’émettre diverses théories, en m’intéressant notamment aux applications pratiques permises par l’utilisation de capacités particulièrement manavores, j’étais bien en peine d’en saisir toutes les subtilités car elles ne revêtaient aucun intérêt à mes yeux. Peu m’importait de savoir que le feu que je conjurais était en fait par exemple une invocation en provenance d’un énième plan d’existence dédié au feu par exemple ! Et encore, de mémoire cette théorie n’était que l’invention d’un mage ayant un peu trop infusé de mana dans son hydromel afin de la rendre plus corsé.

    Quoi qu’il en soit, j’étais perdue et j’avais la désagréable sensation d’’émettre un élément qui aurait dû nous sauter aux yeux. Mais lequel ? Fronçant des sourcils, je ne pus m’empêcher de regarder fixement tour à tour le masque ainsi que les marbrures du ciel qui se refermaient peu à peu. Tout ceci n’avait véritablement aucun sens. Pire encore, la situation nous échappait. L’entité avait saisi la nature de notre stratégie qui, de ce que j’avais compris, avait consisté à la gaver telle une oie par l’entremise de nos souvenirs afin qu’elle saturât. Bien qu’étant quelque peu perplexe devant une telle tactique, je reconnaissais qu’elle semblait avoir marché. Du moins jusque là. Cependant, il était quelque peu logique que ce pseudo-démiurge ait pu contrecarrer nos plans. A vrai dire, je trouvais étrange qu’il n’ait pas réagi plus tôt. Cela présupposait qu’il n’était en aucun cas omniscient, quand bien même semblait-il capable d’invoquer des manifestations de notre passé pour tous nous tourmenter. En un sens, qu’il ait pu, malgré ses prédispositions, se faire duper pendant aussi longtemps tenait du miracle mais, parvenait également à m’amuser quelque peu. Quoi qu’il en soit, notre ennemi avait décidé d’élaborer sa propre solution au problème qui l’accablait et qui, pour ainsi dire, consistait à faire la fine bouche, si du moins l’on pouvait l’exprimer ainsi. Il avait décidé d’aller contre sa nature profonde. Au lieu de nous vampiriser une nouvelle fois, il avait choisi de temporiser la situation le temps de reconstituer ses forces. En un sens, je n’étais pas contre l’idée.

    En effet, disposer de plus de temps était en soi des plus pratiques. Cela nous offrait l’opportunité de nous réfléchir quant à la suite des évènements de manière plus posée et surtout de trouver une utilité à l’artefact que possédait l’hybride. Cependant, cette situation était à double tranchant tant elle permettait à notre ennemi de reconstituer ses forces. Or, plus nous lui octroyons de temps, plus il se montrerait redoutable. Pourtant, il fallait bien trouver une solution à notre problème. La seule qui me venait à l’esprit était particulièrement déplaisante et avait un lien avec la nature des évènements auxquels j’avais assisté. Jusqu’à présent, de ce que j’avais pu en juger, mes alliés abattaient une créature qui se faisait par la suite empalée par une arme melornoise en provenance des cieux. Des lors, ils n’avaient plus qu’à se livrer à une confession auprès de la lance qui, une fois un traumatisme contée, disparaissait dans le ciel. Hélas ! Dans le cas présent, nous n’avions plus d’ennemis à affronter. Aussi, nous ne disposions pas d’un sacrifice…à moins de… Je grimaçais à cette pensée. A moins que l’une des personnes errant au sein de cette réalité ne décidât de mourir pour sauver les autres. Bien évidemment, rien ne saurait affirmer qu’une fois la personne morte, les évènements dont nous avions été les témoins, auraient, malgré tout, lieu. Après tout, si l’entité avait saisi les tenants et aboutissants de notre stratégie, il paraissait logique d’imaginer qu’en se privant ainsi de toute nourriture, elle ne chercherait pas à user de sa lance sous prétexte qu’un énième cadavre jonchait le sol de cette dimension…

    …Bien évidemment, cette pensée partait du postulat que notre adversaire fût encore capable de raisonner tel un être vivant. Or, au regard de sa nature profonde, il aurait été tout aussi logique d’imaginer qu’en dépit de ses dispositions, cette créature cèderait à la tentation que représenterait un nouveau repas et ce, car c’était un réflexe chez elle. Purement et simplement. Bien qu’une telle issue paraissait être autant prometteuse qu’incertaine, je préférais rester muette sur le sujet. J’avais conscience qu’un tel stratagème ne rencontrerait qu’un succès limité chez mes nouveaux compagnons. Ils ne pourraient se résoudre à accepter le sacrifice d’autrui. Pas après toutes ces épreuves. Pas après avoir tissé de tels liens. En cela, je les comprenais. J’avais déjà vécu une situation similaire après tout même si je faisais tout ce qui était en mon pouvoir pour ne pas y penser. Il y avait forcément un autre moyen. Ce masque devait bien avoir une quelconque utilité. Mais laquelle ? Telle était la question.

    Complètement plongée dans mes pensées, je remarquais à peine ce qui se passait tout autour de moi jusqu’à ce qu’un craquement ô combien sinistre et ô combien caractéristique me fît reprendre pied avec la réalité. Dirigeant mon regard vers la source de ce bruit, la vision qui s’offrit à moi me pétrifia sur place. Sous mes yeux ébahis, le corps de Ronchon était transpercé d’une multitude de pieux de glace. Il avait décidé de se sacrifier pour le groupe. Il ne supportait sans doute pas l’idée de demander à l’un d’entre nous de commettre l’impensable. Cependant, qu’il ait pu décider d’agir ainsi me désarçonnait à plus d’un titre. Même si je comprenais les raisons de sa démarche, je ne pouvais m’empêcher, alors que je serrais le poing, de m’interroger quant à son bienfondé. Pourquoi avait-il agi ainsi ? Pourquoi ne nous avait-il pas laissé le temps de mettre sur pied une autre stratégie ? Pourquoi avait-il accepté de commettre l’intolérable ? Je le savais mais en même temps je ne parvenais à l’appréhender tant ces motifs me paraissaient être récusables.

    Alors que l’existence de Ronchon connaissait son triste épilogue, je demeurais immobile. J’avais les yeux rivés sur ce corps brisé et ô combien malmené. Peu m’importait que son compagnon à fourrure ait protesté, que mes alliés eussent été déchirés par sa mort, qu’une autre lance melornoise soit à nouveau apparue ou même que les jumelles se soient approchées de celle-ci pour se confesser. Rien n’avait d’importance si ce n’est le cadavre de cet être que j’avais méprisé à mon arrivée ici. D’aucuns prétendraient que mon apathie était dû à de la stupeur. D’autres souligneraient ma tristesse… mais plus que de la douleur c’était de la colère que je ressentais. J’étais tout simplement furieuse. Contre Ronchon. Contre sa décision. Contre l’Entité qui s’était jouée de nous jusqu’au bout. Contre cette réalité. Et surtout contre moi-même. Contre ma putain d’impuissance qui m’obligeait dans ce cauchemar qu’était devenu ma vie d’assister à un évènement que je ne connaissais, hélas, que trop bien et qui demeurait, à mon sens, inacceptable. Encore une fois, le destin, les dieux ou que savais-je encore, se jouaient de moi. Ils se bornaient à me démontrer de la plus cruelle des manières que je n’étais qu’un être faillible qui était dans l’incapacité la plus totale de protéger les membres de sa compagnie et de porter un coup à son adversaire. Cette énième occurrence ne faisait que souligner qu’en dépit de toutes mes tentatives pour solutionner une situation, je n’étais qu’un figurant au sein d’une pièce de théâtre. Je n’avais aucune prise sur les évènements. Quand bien même, j’essayais d’imposer du sens à cette existence ô combien absurde, rien n’y faisait. Je restais impuissante.

    Pire encore. J’étais, semblait-il, condamnée à revivre jusqu’à la fin de ma vie les mêmes évènements en boucle. Car en effet, alors que je me retrouvais à pleurer de rage, ce n’était pas Ronchon que je visualisais devant moi mais bel et bien une autre personne. En effet, le sanglier s’était momentanément métamorphosé en un être humain portant les couleurs de l’ancien Royaume du Reike. Pendant un bref instant, je me remémorais la vision d’un homme pour lequel j’avais eu de l’affection et que j’avais juré de protéger, qui avait été transpercé par une lance. Je revoyais son sang éclabousser le sol. Je me souvenais de la douleur que j’avais ressenti en cet instant devant un tel spectacle. Du cri que j’avais poussé ce jour-là et qui avait été englouti par le bruit des combats. Je me rappelais même de l’expression de son visage à cet instant. Il avait eu celle d’un homme qui bien qu’attristée par son sort et par la peine qu’il avait causé, éprouvait un zeste de réconfort à l’idée d’avoir pu préserver l’existence d’une personne pour lequel il avait de l’affection. Or, ce phacochère affichait la même apparence. Pire encore, tout comme ce frère d’arme, cet hybride luttait désormais pour respirer dans ce qui semblait être un effort herculéen et ce, alors que Trésor enserrait son corps de ses mains tremblantes.

    J’avais pleinement conscience de l’état dans lequel se trouvait Trésor. Pourtant, à l’inverse de mes compagnons, je ne pipais mot. Comment le pouvais-je ? La vision de ce sacrifice avait rouvert, dans mon cœur, une plaie, qui comme à l’époque, était béante. Mon regard s’était également quelque peu durci du fait de ma colère. Ce décès ainsi que le souvenir de cette mort étaient pour ainsi dire insupportable. Pourquoi avaient-ils choisi de se sacrifier ainsi ? Pourquoi ne m’avaient-ils pas laissé trouver une autre solution ? Pourquoi avoir agi aussi bêtement ? Pourquoi avaient-ils eu une attitude aussi cavalière envers leur propre existence ? Cet acte était similaire, à mon sens, à une trahison. Tout comme ce soldat, ce sanglier avait décidé d’agir sans se concerter avec nous. Il avait préféré nous laisser seuls assumer les conséquences de ses actes. Il nous avait pour ainsi dire maudits en nous faisant comprendre notre impuissance…en nous obligeant à être accablé par la culpabilité et le regret.

    Quand bien même, l’acte de Ronchon avait-il payé comme en attestait le fait que dans un fracas indescriptible notre environnement semblait s’effondrer sur lui-même, après le départ de la lance, au point de générer de multiples fissures au sein desquelles nous pouvions visualiser de multiples paysages dont un qui me brisa le cœur, ainsi qu’une fente bien plus grosse qui ressemblait à s’y méprendre à un portail, je demeurais focalisée sur ma colère et sur ma tristesse. Même si cette mort à l’inverse de celle de mon compagnon d’arme, n’avait pas été vaine, mon âme toute entière ne désirait plus qu’une seule chose : se venger. Je refusais que le souvenir de cet hybride…de cet homme revienne me hanter comme celui de ce soldat. Je ne comptais pas accepter un tel échec. Je ne pouvais pas m’y résoudre. C’était au dessus de mes moyens. Le responsable de cet acte devait être châtié. Pour avoir fait de nos vies un enfer, pour avoir joué avec nos souvenirs, cette entité devait mourir. Il fallait la traquer….elle et chaque créature la servant. Il fallait les détruire jusqu’au dernier pour que plus jamais cette situation ne se reproduisit.

    Hélas ! Que ce fût mes alliés ou ce mystérieux esprit présent au sein de mon âme qui s’était soudainement manifesté pour me remercier, aucun d’entre eux ne semblait décidé à vouloir rester. Au contraire, ils désiraient tous partir. Ils désiraient quitter cet enfer une bonne fois pour toutes. En un sens, ils ne voulaient pas que le sacrifice de Ronchon soit vain. Pourtant, alors que je restais de marbre devant leurs réactions, leurs paroles, leur départ et la métamorphose de Trésor en elfe quand bien même certaines larmes de colère pouvaient encore se voir sur mon visage, je me surpris à penser qu’il m’était impossible de leur en vouloir. Qui, après tout, accepterait de rester dans cet endroit cauchemardesque afin d’abattre une créature dont la nature nous échappait ? En un sens, faire un tel choix constituait une insulte à la mémoire du sanglier. Il était mort afin de s’assurer que nous puisâmes rejoindre notre réalité. Ne pas le faire était prendre un risque. L’entité n’était potentiellement que blessée et non mourante. Elle pouvait très bien se ressaisir auprès d’un certain temps et parvenir à refermer toutes ces fissures ainsi que ce portail. Dès lors, le trépas de cet illustre phacochère eut été vain ce qui était inacceptable. Nous avions une chance et nous ne pouvions pas la gâcher comme me le fît comprendre Myriem avant de disparaitre.

    Sa position se tenait mais de l’autre l’idée que ce pseudo-démiurge pût survivre était à mes yeux des plus détestables. Pouvait-on quitter ces lieux alors que la créature responsable de tous nos maux était encore en vie ? Pouvait-on accepter de décemment partir alors que nous n’avions obtenu aucune réponse à nos questions ? Pouvait-nous évader de cet endroit alors qu’il y avait un risque pour qu’un jour cette créature recommençât ou pire encore nous traquât ? Ne valait-il pas mieux l’achever alors qu’elle était vulnérable ? Ne valait-il pas mieux capitaliser sur le sacrifice de Ronchon pour obtenir réparation ? Je ne savais pas. Je ne savais plus. Une part de mon être mue par ma fureur m’intimait de demeurer en ces lieux et d’abattre ce monstre tel le chien qu’il était. Elle réclamait vengeance. Une autre, en revanche, mue par ma tristesse et ma raison désirait me pousser à quitter cet endroit en mettant en avant le sacrifice de Ronchon mais aussi le fait que cette créature, du fait de ses prédispositions, demeurait potentiellement, malgré son état, hors de ma portée. Après tout, tout comme à l’époque, j’étais seule…seule face à un ennemi qui cette fois-ci dépassait mon entendement. Il eut été plus raisonnable de partir…mais dès lors se posait une question. Comment saurions nous qu’elle a été vaincu ? Et si tel n’était le cas, comment pourrions nous revenir en ces lieux ? Je l’ignorais… Pourtant il me fallait faire un choix. Allais-je décider de partir au combat et d’affronter la mort une fois encore ? Ou bien allais-je accepter de saisir la chance qui s’offrait à moi et choisir la vie et donc de continuer de mener une existence pour ainsi dire absurde au sein de laquelle le souvenir du sacrifice de Ronchon me pèserait ?

    Une autre question vint très vite se superposer à toutes les autres. Si je partais en quête de l’ennemi, comment parviendrais-je à le traquer ? Alors que ce monde s’effondrait et que jusqu’à présent, je n’étais jamais parvenue à la percevoir, comment pouvais-je croire que je parviendrais à mettre la main dessus et à lui ficher une flèche dans son crâne ? Seule cette gamine était parvenue à voir notre ennemi et ce, d’une manière qui m’était pour ainsi dire totalement inconnue. Comment pouvais-je frapper ce que je ne pouvais pas voir ? Cette pensée ô combien détestable eut le mérite de me faire prendre conscience de mon impuissance, certes, mais aussi de me faire saisir pleinement la situation dans laquelle je me trouvais si jamais je venais encore une fois à choisir la mort. Rester ici et ce afin de soulager ma conscience et ma colère ne constituait pas une solution pérenne surtout si cet environnement tout entier s’effondrait sur lui-même. Même si l’idée de traverser ce portail me faisait horreur, il me fallait l’accepter.

    Alors que cette pensée faisait son chemin dans mon esprit, je me surpris à murmurer des paroles que cet homme que j’avais brièvement aperçu en lieu et place de Ronchon m’avait dit un jour.


    « Spes contra spem»

    Peut-être avait-il raison ce jour là. Peut-être avait-il raison de sous-entendre qu’il fallait parfois se contenter d’avoir foi en l’espoir et ce, même si cela semblait totalement dénué de sens… même si cela signifiait pour moi abandonner le combat et surtout s’enfoncer, ne serait-ce que temporairement, dans les affres du désespoir tant toute cette situation me rappelait, par essence, ce que j’avais déjà connu. Soupirant longuement et serrant le poing de frustration, je regardais brièvement les alentours avant de détourner les yeux, et de traverser le portail afin de rejoindre les autres.
    Résumé:


    "La mémoire est une forme d’immortalité. La nuit, quand le vent se tait et que le silence règne sur la plaine de pierre scintillante, je me souviens. Et tous revivent. Les soldats vivent. Et se demandent pourquoi..."
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  • Dim 14 Juil - 2:09


    - Le Chant des Ronces -
    Résiliente - Myriem - Vaesidia - Ersa - Alaric

    TOUR 23 - ENVOL

    [PA] Le Chant des Ronces - Page 10 BANNIERETOUR24






    Lune, puisque tel est bel et bien son nom, s'éveille et fait face à son propre reflet. Déformée par de douces vaguelettes parcourant une étendue d'eau, l'image assombrie se précise alors que la torpeur la quitte. En proie à l'affolement si commun que l'on ressent lorsque l'on s'éveille brusquement d'un cauchemar, elle se redresse brusquement en s'appuyant sur ses paumes pour découvrir les environs.

    Un roucoulement l'accueille et lorsqu'elle pivote pour s'orienter en direction de ce son qu'elle connaît si bien, c'est face à Crow, son Crow, qu'elle se retrouve. L'animal gargantuesque, visiblement inquiet mais bien portant néanmoins, lui adresse un regard plein de sollicitude et d'empressement tout en approchant de la petite Fae son énorme bec crochu. Il est là, pour elle.

    Alaric se redresse brusquement. Ses sens altérés par le sommeil refont surface pour lui rappeler aussitôt l'inconfort de sa position ainsi que du sol sur lequel il s'est assoupi. De la paille et de l'herbe immiscées dans son col le grattent, mais cette désagréable sensation est rendue aujourd'hui comme un cadeau des cieux. Il est en vie, il est chez lui. Petite Baie renifle, courbe les oreilles en arrière et lui adresse un léger coup de museau qui le ramène à lui.

    Les jumelles ouvrent les yeux et reprennent simultanément leur souffle dans une inspiration parfaitement synchronisée. Face à face, elles s'assoient au coin du feu mourant auprès  duquel elles s'étaient abandonnées à un sommeil qui s'était voulu réparateur et qui pourtant s'était conclu par une bien sordide aventure. Ni murmure, ni rugissement strident, plus rien d'autre que des chants de cigales et l'écoulement d'un ruisseau tranquille.  Les louves se perçoivent, se reconnaissent, comprennent qu'elles sont revenues à elles. La meute n'est plus à leurs trousses, chaque chose est revenue à sa place.

    Myriem bondit de la chaise sur laquelle elle a été installée par son éternel bienfaiteur et repousse sans le vouloir une couverture de peau dans laquelle on l'a enveloppée. Elle aussi a eu l'impression d'étouffer et reprend un rythme respiratoire convenable non sans y éprouver de la peine. Elle se trouve dans une pièce sombre dont elle reconnaît peu à peu les contours et quand les gazouillements discrets d'un bambin attirent son attention, elle identifie immédiatement la voix fluette de son propre fils.

    Pour Vaesidia, le réveil n'est pas des plus agréables. Allongée au bord d'une plage qu'elle a jugé bon d'explorer par pure curiosité, l'elfe redoutable sent tout d'abord le goût du sable dans sa bouche. Elle se redresse par réflexe, crache la pincée trop salée et minérale qui assèche sa langue, ce pour être immédiatement retrouvée par deux de ses collègues qui, non sans affolement, s'empressent de vérifier qu'elle se porte bien :

    "Vous êtes tombée, Inviere ?"

    Elle apprend de ses compagnons que son absence n'a duré qu'une poignée de secondes et lorsqu'elle se met à chercher le fragment de masque trouvé au bord de l'eau, elle ne le retrouve plus.

    Il n'y a plus de voix, plus de murmures terrifiants. Le calme, enfin, est revenu. Chacun des survivants a mille questions à poser, cent autres encore dont ils pensent détenir les réponses et dont ils doivent faire part au monde. Ils ont des histoires à conter, des mémoires de vaillants sacrifiés à inscrire dans les ouvrages, des rapports à effectuer ou des proches qu'ils doivent serrer dans leurs bras. Ils ont vécu l'horreur, ils ont été témoins de l'existence de...

    ...de quoi, déjà ?

    Un frisson parcourt leur échine. Ils n'étaient pas . Ils étaient aux Pins Argentés, tous ensemble, ils venaient de dépasser un portail, une brèche ouverte... Où sont les autres ? N'était ce qu'un rêve ? Cela semblait pourtant si réel, si vif. La douleur, les chagrins, la peur... Maintenant que les survivants s'y replongent, ils peinent presque à trouver de la cohérence dans ce cauchemar. Ils sont peut être véritablement fous, à bien y songer.

    Comme lorsqu'on oublie de prendre le temps de noter sur un parchemin le contenu d'un rêve particulièrement atypique, ils ressentent tous que le fil de leurs souvenirs se perd. Les détails de leur arrivée au sein de la Forêt des Murmures se font moins précis, la présence même d'Ellana devient une théorie plus qu'une certitude. Qui est Trésor, où est-il ? Que portait-il sur son épaule ?Tout s'efface, peu à peu. Cela va vite, bien trop vite.

    Et quid de Sauvage, Ronchon, Sage, Espiègle, Audacieuse ou encore Valeureux ? Cette histoire n'est-elle que fabulations, un rêve fiévreux issus d'esprits rendus malades par la guerre, l'atrocité et la noirceur du Sekaï ?

    Non. C'est impossible. Quelqu'un dont vous oubliez peu à peu les traits vous a bien dit que ce qui a été vécu là-bas, où que ce soit, doit conserver son sens. Une telle tragédie ne peut s'achever dans l'oubli.






    OBJECTIFS ET REGLES

    Objectifs :
    -Vous avez cinq minutes. Vos souvenirs des évènements se dégraderont progressivement. Au delà des cinq minutes, vous aurez perdu tout souvenir du Chant des Ronces.
    -Vous êtes à moi.
    -Une fois les cinq minutes passées, décrivez au maximum jusqu'aux quatre heures suivantes. La vie reprend son court.

    Règles générales :
    -3 actions majeures ou utilisation de pouvoir par tour.
    -Vous m'appartenez.
    -Résumé des actions et utilisations de pouvoirs demandés en fin de post.

    Modificateurs :
    Aucun modificateur actif.

    Corruption :
    La corruption ne vous atteint plus.

    Vous avez jusqu'au 21/07 pour ce tour.

    Précisions::
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  • Lun 15 Juil - 9:02
    image rp

    Tour 23

    Un portail, puis tout disparait. Ce monde d'horreur et de torture mentale. 

     Elles reprirent leurs respirations, ensemble, comme si elles faisaient partie du même corps, chacune d'elles étant un poumon d'un même corps. L'or et l'émeraude se rencontrèrent, alors qu'elles se trouvaient maintenant face à face. Le groupe avait disparu, et leur changement de position ne leur avait pas sauté aux yeux. C'était si loin pour le moment. Elles étaient soulagées de se retrouver sans la chasse, sans avoir cette pression constante sur la nuque, sans estimer à devoir protéger tout le monde. Mais tout paraissait si loin désormais.

     - Toi aussi, tu as fait ce rêve étrange ? 

    - Celui dans la forêt où nous sommes devenues des harpies ? Avec Ronchon et... Trésor. 

     Les yeux d'Ersa s'écarquillèrent, elle aussi avait eu ce doute sur l'hermine qui les avait accompagnées. Elle signa pour faire apparaitre son matériel de dessin, jeta un cahier et un fusain à Nora. Elle sentait sa mémoire défaillir, cette aventure lui échapper. Il en était hors de question. Sa main commença à griffonner le papier. 

     - Note tout ce qu'il te reste de... Ce rêve. On ne peut pas l'oublier. 

     Les jumelles s'activèrent. Ersa commenca par rapidement décrire le sort de Ronchon. Pendant que Nora résume l'action du chasseur. Vint ensuite, le cauchemar d'Alaric. Essayant de noter les détails qui lui semblaient importants. La chasseuse griffonnée des esquisses de Ronchon et Trésor à une vitesse trop rapide pour la normale alors que Nora alignés les mots tout aussi vite. Passant leur peur aux fusains, leur compagnon d'infortune. Trésor, Ronchon les duos, enfin trio pour elles. Sage pour elles, Valeureux pour Alaric, cela lui allait bien. Sauvage et Lune, Espiègle pour Myriem, Audacieuse pour Ellana, remplacé par Vaesidia sur un coup du sort. 

     Au fur et à mesure qu'elles résumés leurs aventures, les détails furent de plus en plus compliqué à définir, l'histoire de la petite fée, celle de la baronne. Leur combat contre les serres pourpres était incomplet. Et rapidement, elles pensaient avoir fait le tour de ce qu'elles pouvaient noter, même le souvenir de leur transformation douloureuse. Ce frisson qui parcourut son corps et puis un écho diffèrent dans leur œil et le bras qui avaient été arrachés. 

     Ersa jeta du bois dans le feu avant de se laisser tomber sur le dos, regardant le ciel. Un bruit d'allumette attira son attention, avant de recevoir l'étui à cigare sur le coin du visage. Ce réflexe devenu trop régulier dans cette aventure, mais pourquoi se le refuser. Ersa imita sa sœur et alluma un des derniers cigares de l'étui. 

     Un bruit les tirèrent de leurs contemplations, un bruit de pas. Le ciel disparut de la vision de la chasseuse, remplacé par le museau de Muinin qui venait d'essayer de lui attraper le nez. 

     - Hé ! Arrête, où tu finiras à la retraite plus tôt que prévu. Tu es trop vieille pour faire ta crise d'ado. 

    Nora attrapa une pomme dans un des sacs non loin d'elle, en croqua un bout avant de la jeter au pied de la jument. 

     - Ça te dit d'aller chasser ? Pour se changer les idées. 

    Ersa hésita un instant, tout était retenu normal en apparence. Mais quelque chose dans son esprit n'allait pas. 

    - Je vais attendre un peu. Je frissonne rien qu'à entendre ce mot. 

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  • Mer 17 Juil - 18:58

    À peine eut-il franchi le portail salvateur qu'il eut l'étrange sensation de sombrer, de ne plus avoir de conscience. Cela ne dura qu'une fraction de seconde, le temps d'un battement de cœur sans doute, avant de se réveiller en sursaut, comme pris par un cauchemar si intense qu'il l'a poussé au réveil. Légèrement en sueur, il regarda tout autour de lui, cherchant à retrouver Myriem, Ersa et Nora, Lune et Vaesidia. Ils n'étaient pas dans les Pins Argentées. Il était dans le box de Petite-Baie, étalé sur le foin après s'être mis minable avec une bonne rasade d'alcool.

    Il passa une main pour virer la paille qui le démangeait dans le col de sa chemise, pendant que Petite-Baie lui offrait un léger coup de museau affectif, quelque peu inquiète malgré tout de le voir perturbé. Cela ne ressemblait pas à l'attitude plus posée de son humain, même après avoir bu de cette infâme boisson puante à ses naseaux.

    La jument manqua de bondir de surprise quand le mage lui attrapa la tête avec ses mains, sa tête collée au bas de son museau. Il sanglotait. Ses oreilles se dressèrent en avant. Il n'était pas courant de le voir ainsi. Elle lâcha un léger hennissement amical, comme pour le soutenir dans une détresse qu'elle ne comprenait pas.

    Alaric pleurait, retenant à peine ses larmes. Il était vivant ! Il avait quitté ce putain de monde pourri par cette Entité affamée. Il se détacha de la tête de Petite-Baie, passant le dos de sa main sur ses larmes. Est-ce que ses compagnons étaient saufs au moins ? S'il était revenu à l'écurie, alors les autres... Étaient-ils saufs ? Avait-il seulement vécu tout ce dont il se rappelait ?

    Ça s'efface... comme un rêve.

    Tout ce qu'il avait vécu, est-ce que cela avait été réel ? Il y avait eu trop de détails, trop d'émotions... trop... de quoi ?

    Il se palpa soudainement la poitrine, cherchant son carnet. Même s'il n'était plus mage d'État, il l'avait toujours avec lui. Il le trouva, s'en saisit et l'ouvrit à une page vierge.

    "Petite-Baie ! Si tu me comprenais, tu saurais te rappeler ce que je vais évoquer..."

    Et tout en écrivant sur son carnet, il parla à voix haute, comme pour se rappeler ce qu'il perdait. Il sentait la perdition de ses souvenirs ! Ronchon, Trésor, Valeureux... ces êtres qui avaient été en chacun d'eux... Pourquoi avaient-ils été déjà ? Bordel, il perdait le fil. Habilement, il résumait les mots, les faits, pour prendre des notes qu'il saurait retranscrire en des phrases simples. Du sacrifice de... ces gens ? Il ne voulait pas les oublier ! Leurs actes, leurs paroles... leur sacrifice commun !

    Le temps défilait. Il sentait l'oubli le saisir de plus en plus. Son esprit était en ébullition pendant qu'il grattait le charbon du fusain sur les pages de son carnet. Il notait l'essentiel. En quelques minutes, il avait retranscrit des notes, les éléments les plus importants de sa mésaventure dans... un truc de plante qui piquait ?

    Puis, soudainement, il cessa d'écrire. Pourquoi avait-il écrit déjà ? Le fusain entre son pouce et son index, il regarda, incrédule, ce qu'il avait écrit. Il relut ses notes, comprenant dans ses résumés qu'il avait l'habitude de faire pour des rapports plus détaillés qu'il avait vécu quelque chose d'irréel... était-il devenu fou ? Non ! il y avait une explication à tout cela. Le nom d'Ersa et de Nora était là, sous les mots retranscrits. Il devrait réussir à leur parler. Il n'avait pas marqué le parchemin de leur nom pour rien. Et quand il relut le nom de Nimureh... la fracture qu'il avait subie une fois revint, mais moins intense à son esprit oublieux du premier acte, comme si l'esprit en avait gardé une trace indélébile, malgré la vague de l'oubli qui emportait tout.

    Nimureh ! Son esprit, même s'il ne s'en rappelait point, sut retrouver la voie de l'oubli forcé qu'il s'était infligé. Il manqua de s'effondrer en pleurs dans la paille, sous le regard de sa jument, qui ne comprenait pas ce que son cavalier subissait. Le souvenir de sa bien-aimée refaisait surface, encore. Alaric lâcha son carnet, où était inscrit le récit d'un épisode particulier de son existence, pour porter ses mains à son visage et se laisser aller à de nouveaux sanglots. Étrangement, il ne culpabilisait pas de l'oubli qu'il s'était lui-même infligé. Une larme chuta sur la dernière page de son carnet de notes, l'imbibant de son eau, là où il avait marqué dans un dernier élan de mémoire désormais effacée, qu'il s'était rappelé de Nimureh... Le terme "coupable" était à moitié détrempé par l'humidité de cette larme.

    Le carnet était ouvert devant l'humain éploré, avec ses écrits de souvenirs qui n'étaient plus les siens. Mais ils étaient là, inscrits, résumant les faits, narrant en quelques mots les péripéties vécues, une trace retranscrite d'êtres qui les avaient aidés à fuir ce lieu maudit. Ronchon, Sage, Espiègle, Audacieuse, Valeureux, Sauvage... Myriem, Ersa, Nora, Ellana, Vaesidia, Lune. Leurs noms étaient là, gribouillés en plusieurs dizaines de lignes sur un carnet, un simple pense-bête... Mais qui était la marque que les victoires étaient souvent l'éclat de héros anonymes.
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  • Jeu 18 Juil - 11:49




    Le chant des ronces
    Feat. des fous - Tour 23



    Alors que je m'éveille je sens que je ne suis pas dans mon lit, pourtant Wan m'y a déposé j'en suis certai... Mon esprit embrumé sur les confins du monde du Rêve prévoit les fragrances d'un souvenir dont le fils s'étiole doucement.

    J'ouvre grand mes yeux, je regarde ma jambe, rien et pourtant tout semblait si réel...

    - Ça va chyia?

    - Je... Non enfin si... Wan j'ai besoin de mon journal et de ma mine de graphite, celui où je notais mes souvenirs de Rowena, vite s'il te plaît.


    Devant l'urgence contenue dans ma voix, mon mentor obtempère non sans avoir tenté de comprendre le pourquoi mais je dois écrire et vite. Mon esprit se concentre et mon réflexe premier de mage c'est m'imprégner des signatures magiques que j'ai croisé et étudié à plusieurs reprises. Je parviens à les faire émerger, ce n'était pas qu'un simple rêve j'en ai la certitude cette mémorisation d'empreintes est la clé, la preuve à mes yeux.

    A peine ai je fini que le sens de tout semble vouloir fuir alors je fais au plus vite.
    Pas de phrases non, mais des noms.

    Empreintes mémorisées.
    Ersa et Nora flamboyantes jumelles liées à Sage.
    Alaric mage guérisseur lié à Valeureux.
    Ellana elfe serre pourpre puis Vaesidia janissaire liées à .
    Et surtout Lune ex cieri, ma fille, liée à Sauvage, tour, pins argentés et Crow?
    Trésor elfe/hermine porteur du masque de la Bête, Sentinelle.
    Ronchon, mage de glace, le plus altruiste d'entre tous, a donné sa vie pour qu'on sorte du Chant des Ronces.
    Conte ancien, légende, vraie, mange nos êtres, âmes, manipule, torture mentalement... L'avons nourrie de nos histoires pour la forcer à nous régurgiter.
    Ne pas oublier, les chercher, enterrement Ronchon ensemble!

    Quand j'ai fini d'écrire je prends le temps de relire mais déjà les.volutes du souvenir m'échappent et seuls ces mots sont emplis de sens, et par contre si je cherche en moi à l'évocation des noms écrits je perçois leurs signatures, je ne suis pas folle non... Pas totalement et pourtant, je sens un poids en moi, la culpabilité me coupe le souffle mais pourquoi ?

    CENDRES
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  • Jeu 18 Juil - 17:39



    Elle s’éveille en sursaut, la panique encore présente dans son esprit, à l’inverse de la lupine férale qui l’avait précipité quelques instants plus tôt sur la sortie sans lui demander son reste.

    ”SAUVA…”

    Elle se redresse subitement, confuse au plus haut point par le plotch de sa paume dans l’eau où la regarde son reflet surpris. Lune, Alune, Alune ex Cieri a la bouche entrouverte, elle se sent désorientée et ne comprend rien du tout, un bruit derrière elle la fait se retourner d’un brusque geste. Crow est là, agité, l’animal la regarde avec inquiétude et semble tout aussi confus qu’elle de son soudain affolement. La petite fae sent son souffle court, les reliquats d’émotions étranges qui la tiraillent, comme un après-goût désagréable, et la sueur sur sa peau opaline.

    ”a-... geuh? Crow? CROW!”

    Instinctivement, elle se jette sur Crow pour l’enlacer dans ses bras, serrant bien fort contre elle la présence rassurante de ce bec de géant, elle enfouit son visage contre la sensation froide mais familière de la chitine, pour une raison qui lui échappe, elle sent la tristesse et la peur l’envahir tandis que ses yeux deviennent larmoyants.

    ”Mmdmmm… C-Crow, j’ai cru… j’ai cru que je te reverrai plus jamais…”

    Ses pleurs dévalent de ses joues, s’effondrent contre le marbre noir du bec et finissent leur course le long de la gueule du gardien. Touché par la détresse de sa protégée, le béhémoth sensible remonte ses bras et enlace la petite, partageant un peu de la peine infondée de la gamine bien qu’il n’en comprenne rien. Lune essuie ses yeux rougis et découvre la présence sur sa peau blanche d’une grande tâche hématite. Comme par association elle ressent subitement la douleur de la déchirure sur son flanc, et en se décollant de son compagnon pour baisser les yeux et inspecter son corps, elle découvre qu’elle a encore fait les frais d’avoir dormi par terre. Ses genoux sont tailladés, un de ses mollets est effrité, ses épaules la font souffrir mais le pire est le côté de son ventre qui jure rouge sur blanc. Elle grimace sous la douleur, tout est superficiel mais la gêne est lancinante, c’est dans ces moments que vivre dans son corps lui laisse un goût amer. Elle se calme enfin, la panique cédant la place au questionnement alors qu’elle commence enfin à se demander ce qui vient de se passer.

    ”C’était un rêve bizarre, tout avait l’air… si réel.”

    Pas moin réel que l’aspérité du bec de son Gardien alors qu’elle y passe doucement la fleur de ses doigts. Lune se remémore quelques instants de ce cauchemar, il était si épuisant, si riche… il s’y était passé trop de choses pour se souvenir de tout et elle se sent dépassée. Elle ne parvient à visualiser que quelques moments forts, ses yeux se plissent alors qu’elle essaie de se rappeler de certains passages… mais elle ne parvient pas à tout se remémorer et en réalité, la plupart du songe échappe à sa conscience malgré l’effort. Elle se souvient d’avoir eu mal. Elle se souvient de la tristesse, de l’abandon, elle se souvient d’un nom: Sauvage. Il y avait d’autres personnes avec elle, mais leurs silhouettes s’estompent déjà, il y avait un homme qui était grand et fort, il y avait… des soeurs? Ou était-ce la même personne deux fois? Son rêve lui parait tellement fou, sa logique onirique contraste avec le réalisme des sensations. Lune secoue la tête pour chasser le restant des émotions, mais ça lui colle à la peau et elle ne parvient pas à se débarrasser de son effroi, tout paraissait si réel qu’elle aurait presque pu s’en poser la question.

    Vide.

    Elle écarquille les yeux, réalisant l’absence des tortionnaires murmures qui l’avaient accompagné inlassablement depuis plusieurs jours et semaines, un sourire de consolation vient habiller son visage nuageux que la mélancolie fait orage. Elle est soulagée de pouvoir tendre l’oreille et de n’écouter que la brise hivernale sur les plaines, elle n’en pouvait plus, mais la boule dans le creux de son ventre n’est toutefois pas meilleure compagne que les audibles mirages. Lune se sent vide, et ce n’est pas simplement l’absence des hallucinations qui lui cause un tel néant, elle se souvient surtout d’une scène de son songe, agenouillée dans la boue, le corps brûlant, son coeur brisé par un abandon qui la ronge, elle croyait avoir tout perdu et elle levait des yeux embués pour accueillir le retour d’un être aimé.

    Je suis revenue… POUR TOI!

    La bouche de Lune se tord en se rappelant de ce passage, elle se souvient bien de la femme qui est sortie du maelström à ce moment là. Sa douce chaleur, sa présence tendre, ses cheveux noirs, son parfum de plage. Lune se souvient bien de ce qu’elle avait dit à ce moment là. L’étrange réalité des rêves où parfois certaines personnes ne ressemblent pas aux vraies, mais c’est un sentiment profond qui nous fait dire qu’on sait, et Lune sait très bien qui était cette femme. C’était elle, elle ne lui ressemblait pas mais elle sait que c’était elle. Lune ne s’en souvient plus très bien, chaque fois qu’elle tente de définir un visage, un regard, une bouche, des traits, l’image devient floue et incertaine, mais elle se souvient de qui elle était, elle l’avait appelée. Se tournant vers Crow avec un air dépité, la fae esseulée s’enfouit une fois de plus dans le cocon de vexilles et de plumes, murmurant d’une voix cassée par la tristesse qui étreint sa gorge nouée. Elle avait vu Solare. Elle avait rêvé de sa maman.

    Après plus d’une heure morne à attendre que ne coagulent les plaies de son corps, Lune est tirée de sa contemplation par un Crow affamé qui la dépose doucement au sol. Le béhémoth nettoie ses ailes et Lune regarde le corbeau avec une lassitude certaine, ils avaient déjà chassé hier au soir et il a faim, encore? Elle soupire, n’ayant pas envie de bouger, elle se sent vide d’énergie, ses jambes sont faibles et elle se sent molle, mais devant l’insistance de l’animal elle se résigne à protester, ses objections seront vaines. La fille au teint de neige grimpe sur l’encolure de son compagnon ailé et le laisse décoller dans les airs, cette fois elle ne lui donne aucune injonction, qu’il se débrouille pour la traque, elle est trop fatiguée. Crow survol les terres désolées à la recherche d’un quelconque repas et trouve son bonheur en se dirigeant vers un petit bois au milieu des enfers, le duo bicolor s’engage dans la forêt et le prédateur de jais commence à investiguer. Pendant que Crow circule d’arbre en arbre en suivant des pistes ésotériques, Lune regarde l’état de ses propres blessures. C’est tout de même étrange, qu’à bien y réfléchir le corbeau la laisse s’avachir sur le sol, elle qui ne bouge en plus que rarement dans son sommeil… et puis la plaie sur son ventre est trop grande, elle aurait dû se réveiller pour sûr. D’autant de détails qui creusent dans sa tête un début d’étrangeté, la fae a la désagréable sensation de rater quelque chose, mais elle n’arrive pas à mettre le doigt sur le bémol.

    Son chasseur de jais s’immobilise et elle descend de son dos pour lui laisser une meilleure marge de manoeuvre, elle se demande ce qu’il a trouvé, ça fait plus d’une heure qu’il cherche de quoi manger, la petite commence aussi à avoir faim mais elle attendra bien que Crow ne fasse d’abord son oeuvre. Le prédateur corvidé fond d’un seul coup sur une grande proie cachée dans les forêts, leur victime n’a même pas vu venir le danger, et les couinements rauques et éraillés quittent le corps du gibier en même temps que sa vie. Lune s’avance à travers les arbres esquintés pour voir ce que son ami a attrapé, et quand elle réalise ce que c’est elle se tétanise. Elle a l’habitude de la dure loi de la nature, de tuer pour survivre, de manger ou d’être mangé, la nature est cruelle il en est ainsi, mais sans qu’elle ne parvienne à exactement le cerner, la vue du sanglier embroché par le bec de Crow réveille en elle une détresse immense qui la paralyse.

    ”Nan…” Murmure-t’elle sans savoir vraiment pourquoi.

    Il y a du sang qui coule le long du bec de Crow. Il ne devrait pas y en avoir.

    Ça lui revient.

    Le sanglier.

    Il y en avait un comme ça, exactement pareil dans son rêve, c’était triste, il devait être un ami. Lune sent ses lèvres frémir et sa poitrine étouffe sous la poigne du regret, qu’est-ce qu’il avait dit déjà le sanglier? Il avait dit…

    Promettez-moi... en échange... de ne pas m'oublier.

    Lune se rend compte de l’horreur, du lien entre la disparition subite des voix le jour où elle fait ce rêve, de l’incohérence impossible de son sommeil blessant, elle se souvient de ce serment qu’elle avait fait et qu’elle venait de faillir.

    ”C’était pas un rêve…” Elle murmure toute seule. ”CROW! CROW VIENS LÀ! COUCHÉ! C’ÉTAIT PAS UN RÊVE CROW!”

    Affolée, elle se précipite sur son gardien corvidé qui se plaque au sol sous l’urgence de sa protégée, Lune approche du bec osseux et pose une main par dessus la chitine en faisant appel à sa magie. Sous ses doigts, la forme du corps de Crow se morphe pour graver ses souvenirs en lettres de jais.

    ”Le type il s’appelait A…aaalaric je crois, et les autres, les jumelles là…” La petite dextre opaline se tient à quelques millimètres du bec noir, les larmes de la jeune fille s’échouent dans les noms qu’elle inscrit sur l’os. ”Ebba? E… E-eeee-Erda? Erza. Je crois que c’était Erza… mais l’autre…” L’autre jumelle ne les avait rejoint qu’après et son nom s’est perdu dans sa mémoire. Il y avait aussi l’elfe, qui avait changé de corps à la fin, ou alors ce n’était pas la même personne? Formuler ainsi l’absurdité de son rêve lui fait prendre conscience aussi de l’impossible nature de la femme aux cheveux noirs. Son nom commençait-il vraiment par un ‘M’, ou était-ce simplement…

    ”Maman.” sa voix se brise et Lune tombe à genoux devant Crow.

    Son père avait raison, qu’est-ce qu’elle peut être conne. Croire que sa mère est toujours en vie, croire que son rêve est réel alors qu-

    Je le serai si tu en as besoin. Tu ne seras plus seule.

    C’est ça. C'est ça mais oui! Mais bien sûr! C’était pas sa mère! Elle l’avait confondu avec Solare et tout était vrai, le rêve était vrai! Cette femme l’avait protégée, elle l’avait aimée, c’est parce qu’elle n’est plus là que Lune se sent aussi vide, parce qu’elle avait retrouvé l’amour d’une mère et l’avait perdu aussitôt. Et le nom de cette femme c’était…

    Lune agite ses doigts au dessus du bec de Crow, sa main est tremblante, elle se mord la lèvre jusqu’au sang, mêlant son carmin aux lèvres salées qui dévalent de son menton, elle va y arriver, elle va s’en souvenir. Elle doit s’en souvenir. Son nom c’est…

    Son avant-bras la brûle, une sensation de picotement qu’elle n’arrive pas à replacer, elle le sait, c’est là, c’est sur le bout de sa langue. Ils s’étaient battus ensemble, Il y avait les spectres avec les câbles et ils devaient les couper, ça n’avait pas de sens mais ils savaient ce qu’ils avaient eu à faire. Tout ça pour la libérer elle parce que son nom c’est…

    Les doigts de Lune se referment.

    Elle contemple le bec de Crow où ne figure qu’une lettre.

    M

    Elle éclate en sanglot. Elle avait juré de ne pas oublier. Elle avait juré et c’est pourtant ce qu’elle vient de faire. La douleur est déchirante, elle tord sa poitrine avec une force cruelle, Lune a mal à en hurler, mais aucun son n'émane d'elle. Crow s'affole en témoignant du supplice de sa protégée et il cherche désespérément le responsable, loin de se douter qu'il est là, à pleurer devant lui. La fae crispe sa poitrine étouffée, ses doigts creusent dans sa peau friables et y tracent des sillons de sang dans l'espoir d'attraper ce qui lui fend le coeur.

    Les voix ont disparus, mais Lune se sent encore terriblement seule.
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  • Lun 22 Juil - 16:11
    J’ouvris soudainement les yeux alors que je sentais quelque chose de râpeux et granuleux dans ma bouche et me redressais aussitôt à moitié. Par réflexe, je toussais et crachais aussitôt ce qui, au goût, s’apparentait à du sable humide. Dieu, que c’était immonde. Je portais une main tremblante à ma bouche afin de me débarrasser des derniers grains qui devait parsemer encore mon visage. On avait connu mieux comme réveil. Ne masquant guère mon dégoût, je crachais une nouvelle fois au sol afin de me débarrasser de ce goût de sel et de sable qui persistait dans ma bouche. Puis, je portais aussitôt mon attention vers mon environnement, alors que deux personnes faisaient leur apparition à mes côtés. Leur mine soucieuse à mon égard laissait à présager qu’ils avaient craint pour ma vie ou pour ma santé. Quoi qu’il en soit, l’un des deux arrivants s’enquit de ma situation ce qui me fît hausser un sourcil.

    « Tomber ? »

    Désorientée par sa question, je contemplais mon environnement immédiat. J’étais sur une plage. Mais que faisais-je ici ? Cela n’avait strictement aucun sens. Je me souvenais que je les avais accompagné sur l’un des différents pontons du port et ce, car ils avaient été dans l’obligation de se jeter à l’eau afin de sauver la vie de la noyade un ivrogne. Je me remémorais même que durant leur absence, j’avais remarqué un objet scintillant qui semblait flotter à la surface que je m’étais empressé de ramasser. Sa nature m’avait paru quelque peu étrange étant donné qu’il ne s’agissait que d’un simple ersatz d’un objet que je ne parvenais pas à identifier, au point que j’en étais venue à le caresser du bout des doigts jusqu’à ce que… J’écarquillais soudainement les yeux, me relevais aussitôt et cherchais dans mes poches ainsi que tout autour de moi cet artefact. Hélas, sans grand succès.

    « Je ne crois pas être tombée. Je me souviens très clairement de vous avoir rejoint sur le ponton pendant que vous étiez à l’eau….et de m’être emparer d’un objet qui flottait à l’eau…jusqu’à ce que… »

    Jusqu’à ce que je me retrouvasse ailleurs. Dans une autre réalité en compagnie d’autres personnes au sein de laquelle nous avions du faire face à de multiples menaces ainsi qu’à certains souvenirs douloureux issus de nos passés respectifs afin d’éliminer une pseudo-déité qui se repaissait de nos remembrances. Non. Cela ne pouvait être vrai. Tout ceci était bien trop absurde. Rien de ce que je me rappelais n’avait dû arriver. C’était bien trop surréaliste. Néanmoins, par acquis de conscience, je me retournais vers l’un des mes homologues afin de l’interroger :

    « Me suis-je absentée pendant longtemps ? Tout est un peu confus dans ma tête »

    « Non. Quelques secondes. Une minute au mieux. Le temps de ramener l’autre poivrot à la surface et de constater votre disparition. »

    « Je vois.. »

    Je fronçais des sourcils. Vraisemblablement, comme le supposait mes compagnons, j’avais dû, par je ne sais quel moyen, tomber pour me retrouver ici. Peut-être avais-je glissé ? Je ne saurais le dire mais étant donné la terreur que m’inspiraient les étendues d’eau en général, il n’était pas impossible que je me sois évanouie. Mais…dans ce cas...pourquoi n’étais-je pas trempée ? Cela n’avait strictement aucun sens une fois de plus. Au regard de la position de l’embarcadère par rapport à la plage, pour me retrouver ici, il aurait fallu que je me retrouvasse à l’eau. Or, cela ne semblait guère être le cas. Que s’était-il donc passé ? Je ne pouvais pas décemment m’être retrouvée dans ce qui s’apparentait à une chimère issue d’un cerveau en manque de sommeil. Non. Toutefois, ces quelques souvenirs d’une autre réalité, qui commençaient à s’estomper, me laissaient un goût amer. C’était comme si mon être tout entier avait véritablement vécu ces évènements, auquel je ne parvenais pas à croire. En vérité, je ne savais plus trop quoi penser. Avais-je rêvé ? Avais-je combattu dans une autre réalité des loups et ce en compagnie d’hybride ? Non, vraiment cela n’avait aucun sens même si cela prêtait à confusion. Mon désarroi dût se lire sur mon visage car l’un des deux homologues posa sa main sur mon épaule et scruta mon visage.

    « Inviere, êtes-vous sûre que vous allez bien ? »

    « Oui…c’est juste…que j’ai le sentiment de m’être absentée bien plus longtemps que vous ne le dîtes et que je ne comprends pas comment j’ai pu me retrouver ici, avec mon visage dans le sable sans pour autant être trempée. »

    « Probablement le manque de sommeil, tout simplement ! Ces patrouilles sont tellement casse-couilles et ennuyeuses qu’au bout d’un moment vous vous comportez comme un mort-vivant. Vous arpentez machinalement chaque rue de la capitale sans en avoir véritablement conscience. Ça ajouté au manque de sommeil et vous obtenez ce résultat. » Il en profita d’ailleurs pour faire une pause. « Il serait temps de reprendre notre ronde. Vous allez devoir encore tenir quelques heures avant de pouvoir aller dormir, à moins que vous préfériez écoper d'une semaine supplémentaire de surveillance nocturne pour manquement à notre mission. La nuit est encore longue. Allez, en route !»

    J’opinais du chef. Sans doute avait-il raison. Après trois nuit de patrouille, la routine s’était quelque peu installée, ce qui associé à mon sommeil quelque peu capricieux offrait un mélange détonnant. Alors que je me mettais en marche pour les rejoindre, je ne pus, cependant faire taire cet étrange sentiment qui s’emparait de mon être et qui me poussait à penser que ces évènements étaient importants. Que je ne devais absolument pas les oublier ! Sans doute n’était-ce qu’une chimère. Après tout, je ne pouvais pas décemment croire que je m’étais retrouvée avec plusieurs individus de provenances différentes, dont une baronne shoumeienne, au sein d’un endroit en dehors de ce monde et qui évoluait en fonction des desiderata d’une créature que mon esprit n’avait pas su appréhender. Créature, qui d'ailleurs, était parvenue dans ce rêve à métamorphosée une partie de mon corps... ce qui n'était guère le cas ici, comme me le confirma un rapide coup d’œil sur mes épaules. Je devais vraiment être fatiguée pour imaginer une telle illusion et un tel adversaire. Rien de ce que je me souvenais n’avait ni queue ni tête. Autant se concentrer sur quelque chose de tangible et ne pas perdre plus de temps avec de telles considérations. M’admonestant une gifle pour pleinement reprendre contact avec la réalité, je me débarrassais des quelques grains de sable qui parsemaient mon armure et partit rejoindre mes deux compères au cours d’une patrouille qui s’annonçait des plus pénibles….


    "La mémoire est une forme d’immortalité. La nuit, quand le vent se tait et que le silence règne sur la plaine de pierre scintillante, je me souviens. Et tous revivent. Les soldats vivent. Et se demandent pourquoi..."
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  • Lun 22 Juil - 17:23


    - Le Chant des Ronces -
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    TOUR 24 - ASSOURDISSANT

    [PA] Le Chant des Ronces - Page 10 BANNIERETOUR25






    Les deux jumelles profitent de cet instant de félicité qui leur est accordé. Le calme est revenu, en même temps que l'ordre naturel de la forêt s'est réinstauré. Une pomme vole, amicalement lancée par l'une des sœurs à sa copie conforme, seulement pour être interceptée en plein mouvement. Un bruit violent de verre brisé se fait entendre alors qu'un bec massif vient perforer la toile de la réalité, démolissant le monde comme s'il ne s'agissait que d'un miroir.

    Alaric, face au carnet sur lequel il a noté ses maigres souvenirs des évènements, jette un regard en coin à sa camarade de toujours. Les yeux luisants de la monture semblent s'illuminer au gré de reflets naturels mais, d'un seul coup, le visage de l'animal se strie de massives fissures lorsqu'une aile noire et titanesque vient perforer son petit monde, brisant en milliers de morceaux ce qui paraît pourtant être si réel.

    Myriem, en proie à cette hausse effarante de culpabilité qui l'habite désormais, n'a qu'un maigre moment de réflexion car lorsqu'elle referme son carnet pour jeter un oeil par la fenêtre, la forme de la lune lui paraît fort intrigante. Elle semble manquer de netteté et ses contours pourtant si doux semblent marqués par des lignes taillées au hachoir, comme si elle avait été brisée. Le son du verre qui explose se réverbère partout, faisant trembler la terre et remuer les océans alors que le ciel nocturne se détruit, fragment par fragment, pour ne devenir qu'un océan de noirceur.

    Vaesidia pose un pied devant l'autre, encore vaguement secouée par cette désagréable sensation d'avoir omis quelque chose et d'avoir subi une expérience n'ayant rien d'onirique. Il y avait bien ce fragment d'artefact, son point de chute n'est pas celui qu'elle se remémore. Rien ne semble être à sa place. Le talon de sa botte foule les pavés impériaux et c'est le son d'un craquement qui la pousse à baisser la tête pour découvrir, non sans stupeur, que le sol tout entier se fracture dans un tremblement de terre bien trop silencieux pour être naturel. Des serres gigantesques fissurent le sol et dans un claquement sourd, l'elfe tombe droit dans le vide, disparaissant dans un absolu néant.

    Il y a enfin Lune, celle qui enfin a le loisir de se blottir contre cette âme jumelle dont elle n'a été séparée que pour quelques heures, ce avec la désagréable sensation d'avoir vu le temps de leur séparation se dilater atrocement. L'animal anxieux, empli d'une bestiale sollicitude, mire la petite Fae hurlante avec attention et c'est lorsque Lune relève la tête entre deux sanglots qu'elle réalise que quelque chose cloche. En croisant le regard du Behemoth, elle ne distingue pas cette aura familière mais celle d'autre chose. Tout à fait dissimulée, il y a dans l'œil du géant une infime lueur, un reflet. Une pointe d'orange, étrangère en vue des lumières alentours; qui n'a rien à faire ici.


    Et tout vole en éclats.


    La perception de vos propres corps change. Le haut, le bas, tout est inversé. Vous vous sentez pris dans une intense tempête, un ouragan brûlant. Vos mouvements sont restreints, vous étouffez, la lumière de l'extérieur vous parvient à peine. Vous êtes enfermés, entassés avec d'autres objets dont vous ne percevez que difficilement les formes et contours. C'est poisseux, c'est chaud et humide. Un peu comme des entrailles.

    Vous entendez, à l'extérieur de cette prison informe dans laquelle vous vous trouvez; les bruits insupportables d'une lutte dans laquelle chair et muscles sont avidement déchiquetés. Une fissure s'ouvre dans les ténèbres et un épais jet de sang vous asperge. L'espace d'un instant, vous avez brièvement distingué une lame courbe qui s'aventure dans la carcasse, peut être s'agit-il d'une griffe.

    Par cet orifice, les sons de l'extérieur vous sont enfin accessibles. La lumière fait son entrée, vous octroyant l'horreur de la vision. Votre corps se trouve au beau milieu d'un océan d'ossements agités au gré de mouvements violents. Vous voyez d'autres fissures se dessiner et à mesure qu'elles se multiplient, le tableau dépeint à l'extérieur se précise malgré le tumulte.

    Les Pins Argentés.

    Vous réalisez que des choses vous reviennent. Les souvenirs que vous avez eu tant de mal à conserver, les mémoires abjectes d'une aventure passée au beau milieu d'un infernal domaine, hors du temps et de l'espace, sont de nouveau vôtres. Ce n'est pas une prison, c'est le ventre d'une créature que quelque chose, au dehors, s'évertue à blesser afin sans doute de vous libérer.

    Un craquement sinistre dont l'écho est si puissant qu'il se profile aux confins de vos crânes se fait entendre. La lumière de l'astre lunaire se fait plus forte lorsqu'une fissure plus monumentale que toutes les autres est tracée dans la chair putride de votre tortionnaire. D'un seul coup, c'est un véritable torrent de cadavres décomposés et d'ossements qui se déverse en une vague immonde sur le sol forestier et vous êtes pris dans ce flot mortuaire pour enfin vous retrouver à l'air libre. Ensanglantés, couverts de viscères, en proie à l'horreur la plus totale; mais en vie.

    Reprenant difficilement votre souffle, noyés au milieu d'un monticule de cranes, vous entrevoyez enfin la folie de votre situation. Le corps dont vous avez été libéré est celui d'une créature immense, immaculée et cornue, n'arborant aucun faciès. Elle lutte malgré l'ouverture barbare de son estomac avec une force démentielle, ce contre une autre entité colossale, à savoir un monstrueux corbeau au plumage tâché de sang multicolore.

    Lune, voici venir ton Gardien.

    Crow t'a suivie, tu en as l'intime conviction. Lorsqu'un portail vers le monde extérieur a été ouvert pour te tendre un piège, le volatile que tu as vu et dont tu as senti l'aura n'était pas illusoire. Il est venu pour toi, pour te sauver, traquant sans relâche celui qui te tenait captif jusqu'à enfin le retrouver. La Bête, affaiblie par vos efforts cumulés, s'est vue contrainte de vous verrouiller dans une ultime illusion afin de se régénérer mais le prix d'un tel effort a été, de toute évidence, de se manifester dans le monde réel afin d'économiser ses forces.

    Malheureusement pour elle, l'être à l'âme scindée qu'est Crow ne connaît que l'amour de sa Fae. C'est avec une haine inqualifiable ainsi qu'une sauvagerie bestiale que l'oiseau énorme picore le crâne de son adversaire, le poussant à se défendre du mieux qu'il le peut en agitant ses bras terminés en pattes griffues. D'un coup rageur du plat de la main, la Bête projette Crow au sol dans un assourdissant fracas, le forçant à retomber droit dans le lit de cadavres qui recouvre la terre.




    Subjugués par la vue de cette scène surréaliste, vous apercevez tout de même lorsque vous reprenez vos esprits d'autres silhouettes qui s'extirpent des décombres et ossements. Alaric, Nora, Ersa, Vaesidia, Myriem, Lune et enfin Luven. Vous êtes tous là, vous n'avez jamais été séparés. Maintenus en stase dans un rêve plus vrai que nature, vous étiez simplement mis de côté par la créature qui s'apprêtait, dés qu'elle en aurait l'occasion, à vous replonger une seconde fois dans l'enfer que vous avez connu. Vous aviez, fort heureusement, une bonne étoile planant au dessus de vous.


    Révélation::

    Luven se dresse, à bout de souffle mais en pleine possession de ses moyens. Sa mâchoire se serre de rage et c'est avec une absolue ferveur qu'il vient empoigner son arc si fidèle. Vaesidia le reconnaît enfin, entièrement. Ce qu'il a été, les combats qu'il a mené à ses côtés. Luven Eleophyles, membre de la XVI Legio. La janissaire n'a aucune idée de ce qu'il est devenu après la guerre mais elle s'apprête à le découvrir. Après une grande inspiration, le soldat elfique courroucé hurle à pleins poumons :

    "Je suis Luven Eleophyles, fier et ultime représentant de l'Ordre des Limbes ! Cette créature abjecte est une engeance batârde de Zeï et de X'O-Rath, un immondice né de la Guerre et nourrie par elle ! Mes compagnons et moi-même avions pour ordre de la traquer et de la détruire."

    Il agrippe le masque énorme, porteur de tant de secrets, qu'il arborait jusqu'à présent sur son épaule. L'artefact est levé haut au dessus de sa tête et la Bête sans visage oriente son indescriptible museau en direction de l'objet, comme si elle le reconnaissait, ce en émettant un son grave et profond qui fait vibrer jusqu'à vos tripes. Cette menace n'arrête pas le soldat qui continue sa folle diatribe :

    "Cette odieuse entité, adepte de magie noire; est parvenu à contenir tout ce qui constitue son identité à l'intérieur de son propre visage. Maîtresse des mensonges, du silence et de l'oubli, elle a découvert comment se dissocier de sa propre identité et ainsi s'effacer de l'histoire du Sekaï. Une âme dénuée de toute identité ne peut être détruite, elle n'est ni morte ni vivante. Eternelle, jonglant entre tous les plans et dimensions en échappant aux règles régissant l'univers, elle bafoue tous les principes de l'existence même ! Nous ne connaissons plus ton nom, vile abomination, mais nous savons comment te le rendre !"

    L'elfe prend une posture guerrière, adresse à Vaesida un regard prolongé et empli de courage puis, après un sourire frisant la démence, celui que vous avez connu comme étant Trésor s'élance; bondissant sur la montagne de corps décrépis pour filer vers le géant sans visage. Ses yeux se tournent vers Myriem, puis il rugit :

    "Restreignez ses mouvements, nous devons à tout prix..."

    La Bête a levé ses mains, poussant un hululement sépulcral qui a aussitôt englouti tous les sons, jusqu'au moindre bruissement de la forêt. Ses paumes viennent ensuite se plaquer sur les flancs de sa tête, là où devraient supposément se situer ses oreilles. Elle se cambre, s'agite; comme si un bruit trop fort pour être accueillis par ses tympans la paralysait. Ceux qui tentent de prendre la parole constatent qu'ils n'ont plus de voix et qu'aucun bruit ne leur parvient. Vous n'entendez rien, rien d'autre que les battements de votre propre coeur. Perturbés par ce silence si intégral qu'il en est surréaliste, vous vous faites témoin de l'apparition d'une multitudes de sphères ténébreuses semblables à de véritables trous dans la réalité. La lumière se tord autour de ces manifestations obscures qui, brusquement, projettent d'intenses rayons luminescents en direction de Luven.

    Une explosion inaudible apparaît, créant ainsi une onde de choc qui vient propulser l'elfe en l'air comme une vulgaire poupée de chiffon. Il retombe lourdement dans la pile de crânes et le masque, quant à lui, vole pour atterrir aux pieds de Myriem. Ce masque trop grand pour être porté par un homme, étrangement, concorde si parfaitement avec le trou béant qui orne la tête du tortionnaire. Vous voyez tout s'envoler, partout autour de vous, des cadavres aux racines en passant par les feuillages morts. Ce maître des cauchemars a accumulé assez de puissance pour tordre jusqu'à la réalité du Sekaï. Vous vous sentez trop légers, pris de picotements occasionnés par d'étranges vibrations dans l'air, vos organes peinent à garder leur place au sein de votre  enveloppe. La nausée s'empare de vous.

    Vous savez désormais ce que signifie : faire face à la fin des temps.





    OBJECTIFS ET REGLES

    Objectifs :
    -Vous êtes à moi.
    -Vous êtes à moi.
    -Vous êtes à moi.
    -Vous êtes à moi.
    -Le masque.
    -Vous êtes à moi.
    -Vous êtes à moi.

    Règles générales :
    -3 actions majeures ou utilisation de pouvoir par tour.
    -Vous m'appartenez.
    -Résumé des actions et utilisations de pouvoirs demandés en fin de post.
    -Vous m'appartenez.
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    Modificateurs :
    -...

    Corruption :
    -...

    Vous avez jusqu'au 29/07 pour ce tour.

    Précisions::
    Noble de La République
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    Valefor Sealgair
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  • Ven 26 Juil - 9:36
    image rp

    Tour 24

    Une douce réalité, le retour à la normale. Là où tout n'allait pas bien, mais en même temps, là où ses cauchemars n'étaient que des cauchemars. Et en même temps, est ce que celui la était bien terminé. Ersa avait du mal à le croire. 

    Puis la violence de la réalité les avait rattrapés. Par cette cassure dans leur réalité. Ce corbeau géant qui avait brisé la surface du monde. Un instant, les sœurs se demandèrent si elle n'aurait pas préféré rester dans ce monde.

     Et dans ce nouveau changement de monte, tout fut encore bouleversé. Elles se retrouvaient blotties l'une contre l'autre, bloquées dans cet endroit sordide, d'où leur parvenait des sons d'un combat titanesque. Et puis une liberté. Liberté donnant sur les pins argentés, sur ce lieu où elle avait perdu tant de gens, guidait encore plus que ce soit au combat où à la mort. Celle où elle avait rencontré une elfe qu'elle avait cru capable de changer sa vie. Enfin, un endroit qui ne lui avait pas amené beaucoup de désillusions au fil des années. Leurs corps roulèrent dans les viscères, les ossements des anciennes victimes du chant des ronces. Vision et sensation d'horreur. 

     Trésor qui n'était plus une hermine se lance dans une explication sur la nature de la bête, rejeton affreux des titans. Xo 'Rath, le père ses morts-vivants. Nora se figea, une pensée sombre traversa son esprit. Elle secouait la tête se concentrant à nouveau sur ce qu'elle devait faire. Puis avant qu'il ne termine sa dernière phrase qu'un phénomène étrange se passa. 

     La bête poussa un cri, ressemblant plus à celui d'une chouette qu'à ce qu'on s'attendrait d'une bête avec son physique. Mais ce ne fut pas ça le plus étonnant. Le monde, c'était tut, pour la première fois de leur vie. Les louves découvrirent le silence absolu. Seule le battement de leur cœur, enfin sans vraiment l'entendre. 

    Le monstre créa une explosion qui fit s'envoler l'ancien hybride. Les naines pouvaient presque sentir le souffle de l'explosion silencieuse. Si leurs esprits ne les fonçaient pas à rester concentré sur l'ennemi, elles auraient pu trouver cela si terrifiant. Cette vague de puissance que ce soit pour effacer les sons, pour invoquer cette lumière qui fit frissonner les louves où jouer avec la gravité. Chaunne de ses actions auraient put faire fuir la majorité des soldats, les trois en même temps étaient si improbable. Mais ce moment n'était pas à la réflexion, pas à la peur. 

     Quelque chose les avait prises pour cible, et en tant que chasseuses, elles n'avaient que deux choix. Me prendre le rôle de prédateur où mourir. 

     Il leur fallut quelques secondes pour se soustraire à la nausée naissante, à leur corps pour accepter leur nouvelle condition. Mais n'était ce pas ce à quoi elle s'était entrainée toute leur vie. À réagir, s'adapter a tout ce que le monde pouvais leur envoyer. Elles l'avaient toujours fait... À deux. 

     Le corbeau géant qui ne devait être autre chose que Crow, l'ami tueur de la petite fée se dresse de toute sa hauteur, chaque froissement de plume créait un petit nuage multicolore, avant qu'il dresse son bec, près à hurler, du vent. Spectacle inaudible d'un coassement tonitruant qui n'eut pour effet que de créer un nuage de gaz aux reflets arc-en-ciel. L'ensemble des nuages crée par le volatile se dirigèrent vers les trous noirs crée par la bête. Pour être ensuite ciblée par la lumière. 

     La situation sauta aux yeux de l'archère. Cela faisait partie de son entrainement. La chasse à l'affut, elle se servait du son comme la chasseuse le faisait avec les yeux bandés. Il ne fallait pas qu'ils fassent du bruit. Mais comment attirer l'attention de tout le monde. 

     À nouveau, c'est Ersa qui s'avança au milieu du groupe, signa pour invoquer des sphères de glace qu'elle projeta sur le groupe à portée. Alaric, Myriam, Vaesidia, Lune. Elle espérait ainsi attirer l'attention sur elle. Une fois, cela fait, elle désigna sa bouche, puis les rayons de lumière et comme pour faire une démonstration se mit à hurler. 

     Sans que personne ne sache quoi. Des mots d'amour, des insultes, sa liste de course. 

     Dans la foulée un rayon se dirigea sur elle qu'elle évita d'un bond sur le côté, le rayon frappa l'endroit ou se tenait la naine juste avant. Elle espérait que cela suffirait, que sa prise de risque serrait payante. Nora fulminait intérieurement. Cela ne lui avait pas suffi. 

     Sans réellement prévenir, Myriem s'élança, si vite qu'elle fut difficile à suivre, atteignant le monstre sans que les chasseuses n'eurent le temps de bouger. Le masque fut remis en place comme la pièce manquant d'un puzzle. Et aussitôt, la créature se mit à réagir, les jumelles ressentirent une vague de chaleur. 

    La vision d'horreur continua jusqu'à ce que la créature se mette à hurler. Pas seulement son cri, mais celui de toutes ses victimes passés. Leurs peurs, la sienne, leurs souffrances. 

    Les jumelles se penchèrent en plaquant leur main sur leurs tempes. Surement, protégé par leur résistance, elle fut les premières à se remettre de ce cri. Ersa essuya le sang qui coulait de son nez, pendant que Nora serrait les dents. Elle avait horreur de ce type de magie, qu'on touche à son esprit. Témoin de la chute de la baronne, de la fuite du corbeau géant. Les deux partie de la même pièce se jetèrent un regard, sentant leur impuissance à nouveau, et partir à l'action. Ersa appela sa magie, partant à toute allure pour attraper la jeune femme, qui était plus légère qu'il n'y paraissait pour la ramener en arrière. 

     Nora, elle, appela une autre magie. Concentrant sa force, elle bondit si fort qu'elle se projeta à l'assaut du monstre et lâcha le reste de sa force à travers la tête de son manteau. Frappant aussi fort qu'elle le pouvait. Avant de retomber au sol, s'éloignant pour laisser la mage déchainée sa puissance. La créature tombe sous le choc, se met à remuer comme une créature refusant la mise à mort, ce qu'elle espérait pouvoir faire rapidement. Mais dans un dernier élan de défense, elle joua un peu plus avec la gravité. Les chasseuse décollèrent du sol, se retrouvant en apesanteur au milieu de ossements et des crânes




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    Myriem de Boktor
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  • Ven 26 Juil - 15:25


    Le chant des ronces
    Feat. des fous - Tour 24


    Voir une nouvelle fois apparaître cette maudite lueur orangée dans le regard des êtres aimés est une profonde blessure supplémentaire. La douleur n'a jamais été réellement physique depuis le début mais tout n'est que torture mentale, sans cesse renouvelée sans que jamais nous ne parvenions à en voir le bout. N'est-ce pas vain de sa battre? Comment Trésor et Ronchon ont-ils fait pour continuer encore et toujours leur lutte?

    Plus rien n'a de sens, plus rien ne va, repères perdus, haut, bas, droite gauche. Nous sommes, enfin je suis mais j'imagine ne pas être seule en cet instant, c'est le chaos total. Ce que je touche me rappelle aisément des chairs, des entrailles, poisseuses, imbibées de sucs divers et variées, comme si nous étions vraiment dans un estomac prêts à être digérés... N'est-ce pas le fond de l'histoire depuis le début? Mais il y a un mais, quelqu'un, quelque chose se bat et lutte contre notre oppresseur pour nous faire sortir. Enfin nous la percevons cette belle et douce lumière qui réchauffe nos coeurs comme nos âmes et nous montre peut-être le bout du tunnel sauf si c'est un nième piège mais... Je veux revoir mon fils et lui présenter Lune !

    Tout me revient en tête, je n'avais pas oublié, c'était juste inaccessible un instant mais cela n'en demeure pas pour autant frustrant. Et c'est là qu'un nouveau craquement retentit, une poche percée, un intestin qui se vide et déverse tant ses organes que ce qu'il a ingurgité. Et enfin alors que nous nous relevons péniblement nous la découvrons, nous la voyons enfin dans son entièreté dans sa toute puissance, titanesque c'est le mot qui traverse forcément nos esprits.

    Mais nous ne sommes pas seuls, il y a aussi un Behemoth géant, celui qui nous a ouvert le chemin de l'extérieur, magnifique, noir comme la nuit, un corbeau géant, il ne peut être que Crow celui que Lune cherchait et attendait. C'est le moment où Luven nous conte son histoire car il s'en souvient maintenant que nous sommes sortis et avec elle il nous livre l'histoire de cette chose qu'il a traqué.

    Observatrice je ne fais qu'écouter, j'attends les mots qui nous livreront la solution pour en finir une bonne fois pour toute mais la créature pousse alors un hurlement primal, gigantesque, à sa démesure et elle se protège elle même les oreilles comme si son propre cri était douloureux pour elle. Nous voilà ensuite plongés dans un silence absolu, c'est terrifiant de voir des lèvres bouger d'un coup et de ne plus rien entendre... J'ai déjà perdu une partie de mon champ de vision mais me voilà privée d'un nouveau sens.

    Une explosion sans son se produit et Luvense retrouve projeté en l'air, comme une vulgaire poupée de chiffon. Il s'effondre juste à côté de moi. La nausée s'empare de nous, Luven agonise mais je n'ai pas le temps de le soigner, je dois faire face une dernière fois, c'est notre ultime chance non? A mes pieds se trouve le masque, ce masque gigantesque gardé précieusement par Luven tout ce temps, et ce masque correspond à l'absence de visage de la chose.

    La gravité semble changer à ce moment là, jouant contre nous. Crow soutient notre groupe, attaquant avec force l'entité qui se débat pour sa propre survie face au géant et toujours devant moi le masque. Dans mon esprit j'ai l'impression que tout se passe au ralenti, trop fatiguée peut-être pour réagir? Ou alors... Non c'est autre chose, en moi gronde encore la puissance procurée par la potion que j'ai avalée il y a ... un temps certain... Elle coule encore et inonde mon corps d'une force, d'une vigueur, tout est décuplé.

    Crow se prend des attaques lumineuses d'une rare violence, je ne comprends pas bien ce qu'il se passe mais c'est à ce moment que Ersa se dresse entre nous et la Sentinelle et fait une sorte de numéro... J'ai compris... C'est le son qui attire la magie de Lumière sur nous. Même si nous ne pouvons pas entendre nous produisons des vibrations et cela se retourne contre nous.

    Je me dis alors que je dois déposer le masque sur la chose, Luven nous avait dit qu'on ne pouvait tuer quelque chose qu'on ne connaissait pas et son visage, son manque... Je canalise l'énergie en moi, elle est violente, elle hérisse mes poils alors que je me saisis du masque. Ma pensée est vive mais en général mon corps répond lentement sauf que cette fois-ci c'est différent, la potion me permet d'égaler les guerriers d'exception et d'aller plus vite que le vent et probablement que le son. Cela me dépasse mais à peine ai-je le temps de le penser que je suis parvenue à grimper sur la bête pour reposer le masque sur son visage (SV 4 grâce à la potion de surpuissance 2/2).

    A peine ai-je remis son masque, que je me retrouve de nouveau au sol, prête à réagir sauf qu'avec son masque, la bête retrouve son entièreté, sa vie, son passé, son histoire et son nom : Lamentation... La vérité est trop lourde, trop puissante et je me retrouve au sol totalement sonnée par ce poids. La créature se met à hurler et je suis incapable de réagir mais par chance et avec courage encore une fois, la jeune Ersa m'attrape et m'éloigne de la créature. Je réalise à ce moment là que je ne vois plus ni Crow ni Lune... Ou sont-ils?

    Le sol avait vibré aussi sous la chose et cela l'a faite tomber, cela doit être l'oeuvre d'Alaric. La créature est prise dans un étau de terre, ses genoux coincés par la puissante magie du soigneur. Je dois réagir et vite. Il faut agir avant qu'elle ne puisse à son tour réagir, nous sommes face à la fin des temps, nous le pressentons.

    Ma magie coule encore dans mes veines et je concentre tout pour donner un coup que j'espère mortel. Dépassant un bref instant les odeurs de charniers, celle de l'air marin nous entoure alors qu'une faux se matérialise, une arme de mana pure d'eau. D'un geste ample je la manie pour pourfendre Lamentation, fauchant la créature depuis le sol en remontant vers sa gorge, la découper en deux et la faire disparaitre du Sekaï. Hélas malgré la puissance de ce coup (P4 élémentaire eau) je vois que j'ai échoué. Certes elle s'effondre, tombant en arrière, elle se tord de douleur... Mais elle est encore en vie.

    Autour de nous la gravité change encore et nous perdons nos appuis au sol... Nous décollons, perdant contact avec la terre, notre repère. Et c'est la que je réalise que des rayons lumineux se dirigent vers moi, je n'ai plus le temps ni l'énergie de réagir...

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  • Sam 27 Juil - 12:02
    Son stylet cessa de gratter la surface de son carnet ouvert. Qu'était-il en train de noter déjà ? Et pourquoi avait-il fait cela ? Il tourna sa tête vers Petite-Baie, qui le fixait toujours. Son regard brillant devint étrange. De petits sillons commençaient à strier le fin pelage du chanfrein de sa jument.

    "Qu'est-ce que...."

    Il sursauta en voyant un immense membre ailé, tout couvert de plumes noires, paraître éclater la réalité. Tout se brisa, tout se fragmenta. Alaric n'eut pas le temps de hurler.

    Brutalement, tout devint noir. Le mage était encore conscient, mais il était balloté dans tous les sens, comme pris dans un maelström. Mais ce n'est pas de l'air qui coulait sur sa peau. C'était chaud, trop chaud. Humide, moite. Il peinait à respirer. La première pensée qui arriva à percer cette inondation de sensations et d'incompréhension était qu'il était pris dans une coulée de boue. La panique explosa dans son esprit et le poussa à se débattre. Des objets à la nature incertaine s'entrechoquaient en des bruits creux sous les semelles de ses bottes, avant de capter d'autres bruits. Tout se mêlait, c'était inaudible. Il crut reconnaître le bruit écœurant de chairs déchirées, qu'on tranchait. Des claquements ? Un tendon ou un ligament qui avait rompu sous l'assaut extérieur ?

    Une fissure apparut au-dessus de sa tête, s'ouvrant dans un son écœurant de fibres musculeuses qu'on écartait de force. La lumière chassa l'ombre intérieure. Puis une autre fissure apparut, laissant entrevoir le monde extérieur, avec des cieux et un astre lunaire familiers. Alaric se figea quand tout lui revint d'un bloc. Le chant des Ronces, l'Entité, ses compagnons et... une vague gluante et emplie d'ossements l'emporta comme un simple fétu de paille.

    Quand tout cessa d'être chahuté, Alaric se retrouva sur le dos, les bras en croix, clignant des paupières. Inspirant d'un coup, il toussa à l'agression des effluves de chairs pourrissantes ou à moitié digérées. Il se redressa péniblement, écarquillant les yeux d'horreur face à la nature de l'immondice qui le recouvrait. Il ne put empêcher son corps de réagir à toutes les agressions subites en si peu de temps. Le temps de rendre le contenu de son estomac, il eut le temps de discerner la monstruosité qui se dressait là-bas, dont l'existence était totalement contre-nature. Un corbeau gigantesque, de forme monstrueuse lui aussi, s'acharnait haineusement à l'autre béhémoth ; Ses bras griffus et emplumés continuaient de déchirer les chairs de son adversaire, alors que ce dernier s'évertuait à tenir les bords tranchés de son ventre déglutinant de ses tripes.

    Gémissant à la douleur de son estomac tourmenté par de nouveaux haut-le-cœur, le mage déchu remarqua que d'autres êtres s'extirpaient difficilement de la sordide tripaille répandue sur le sol. Il les reconnut aussitôt. Nora, Ersa, Vaesidia, Myriem, Lune et Luven. Ils étaient en vie ? Ou était-ce encore un jeu de l'Entité ? Est-ce elle là-bas ? Informe, immaculée et sans visage ?

    Encore une horreur à affronter ? Il recula d'un pas, tout en faisant face à l'aberration.

    Fuir.

    FUIR !

    FUIR !

    Fuir ?

    Assez de fuir ! Une étincelle de raison le poussa à se mordre violemment la main. Il retint un cri. Sa frayeur repoussée, il entendit à ce moment Luven s'exprimer. Cette fois, l'Entité avait un nom. Son Masque était la clé. Voilà pourquoi Luven l'avait volé, et gardé précieusement. Comme un trésor à protéger à tout prix.

    L'elfe passa à l'offensive, dans le but de remettre le Masque à sa juste place, pour la rendre mortelle et donc abattable ; une bonne fois pour toutes. Sa cible leva ses mains, lâcha un horrible cri avant de les plaquer sur ce qui devait être ses oreilles tout en s'agitant. Puis d'un coup

    Le Silence. Total.

    La trame de la réalité se vit trouée de sphères obscures. Des raies de lumière y prirent naissance, pour se tendre vers Luven. Le guerrier subit une frappe invisible, le projetant violemment en arrière. Il ne remua plus, le Masque termina sa course au pied de Myriem.

    La panique refit surface. Alaric lutta pour ne pas y céder, contemplant le corbeau géant continuer à se battre, malgré la présence de ces sphères... Quelque chose de multicolore apparut autour de son bec crochu. L'humain était trop accaparé par l'Entité et ses propres luttes intérieures pour réellement voir ce qui se tramait, ou voir la chute du corbeau noir. La panique voulait refaire surface, pour lui ordonner de fuir.

    Pourquoi continuer à se battre contre quelque chose d'impossible à abattre ? Capable de plier la réalité à sa volonté et... et bordel, mais il s'entendait penser ? Il n'était pas un lâche ! Mais cela fluctuait tellement intensément dans son esprit ! Il peinait à prendre des décisions. Penser avec rationalité était plus que difficile. Il était en train de flancher...

    Quelque chose de rond et de glacé le percuta, le sortant de sa transe. Quoi ? Qui ? Ersa captiva son attention. Qu'est-ce qu'elle était en train de foutre ? Pourquoi cherchait-elle à brailler alors qu'il n'y avait que le total silence ? Quand, à nouveau, un nuage multicolore se forma autour de sa bouche et que des rayons naquirent des sphères, Ersa les esquiva avec une brillante agilité. Là, il comprit. Quiconque émettait du bruit, c'était l'assaut lumineux de cette saleté qui leur tombait dessus. Bon sang, pourquoi ne l'avait-il pas compris tantôt ? C'était si évident pourtant ! Il frémit, comprenant l'inévitable qui le prenait lentement. Il ne devait pas céder. Hors de question !

    S'en convaincre suffira-t-il ? Et pour autant que ce n'était pas encore une malversation de l'Entité ?

    Myriem, plus assurée dans sa détermination, se précipita d'un coup vers leur ennemi commun, usant de sa magie pour battre de vitesse le sortilège lumineux. Habilement, la jeune femme bondit de tas osseux en tas osseux, pour gravir le monstre qui se déméniait à la chasser. Trop tard pour lui. Myriem arriva à lui remettre son masque.

    À peine le masque retrouva sa place que l'air s'échauffa tout en prenant une consistance étrange et lourde.

    Ça sent pas bon !

    Dégager ?
    Fuir ?
    Se barrer ?
    Rester ?
    Lutter ?

    Le Béhémoth se tortilla par l'intense souffrance qui l'envahit au contact de son masque. Le sol grondait, tremblait. L'air fut empli d'une atroce cacophonie. Mais ce n'était pas l'agression de ces milliers de voix qui fut la plus intense et la plus déchirante, ce fut le partage d'une mémoire ancestrale qui écrasa l'esprit de l'humain. Son nom... Lamentation, qui a cherché à devenir immortelle par crainte de la mort, de sa propre disparition et de l'oubli, le tout à travers divers mondes ou univers... Le poids écrasant de la peur d'être oublié, de cette affliction primaire de ne plus exister... d'être rien... d'être néant.

    Ce retour extrême de la propre identité de Lamentation était plus que difficile à encaisser. Alaric tituba. Il voulut hurler face à ce tsunami qui labourait tout son être et son esprit. Il crut vomir à nouveau et ce fut un peu de sang qui coula de son nez. D'une main tremblante, il essuya ce qui gouttait de son menton, avant de regarder avec une bien étrange incrédulité le liquide écarlate qui maculait le bout de ses doigts. Réel ? Irréel ? Ses yeux se dardèrent sur l'Entité, qui, il le sentait, était mortelle désormais.

    Haletant, avec l'impression de se fragmenter de l'intérieur, l'humain regardait Lamentation. Les trous noirs à la rotation plus vive depuis tantôt étaient toujours là. Et si... il ne pensa pas à l'idée, il la déploya directement.

    Il appela la terre avec sa magie, pour planter sa cible par le dessus avec des pics telluriques. Le sol gronda, la créature chancela. Mais aucun rayon de lumière ne fit exploser. Elle était consciente de sa place dans la réalité... mais était-ce réellement la réalité où il se trouvait ? Et les autres ? Ils étaient réellement là ? Ersa venait de récupérer une Myriem totalement inerte. Où était Lune ? Où était cette foutue elfe ? Et Trésor ? Non, Luven ?

    Dans sa confusion croissante, il vit Nora fracasser le visage de la monstruosité masquée. Encouragé par cette offensive, une fois encore, il imposa ce qui lui restait de volonté à la terre, pour empaler cette grosse saloperie. Ses jambes furent fracassées par l'attaque tellurique, Lamentation flancha. Mais elle n'était pas encore morte !

    Haletant, tremblant de tous ses membres, Alaric commençait à désespérer de la voir anéantie une bonne fois pour toutes. Ne crèvera-t-elle jamais ? En même temps, pouvait-on avoir la prétention de tuer l'engeance d'une chose dite divine ? Était-elle mortelle ? Ou était-ce encore qu'un de ses sales tours pour s'amuser de leur vain espoir de réchapper à tout ce merdier ? Alaric ne sut plus quoi en penser quand Myriem, qui après être revenue à elle, usa de sa magie aquatique pour faucher Lamentation. Une énorme entaille l'éventra. Du sang étrangement coloré en découla. Lamentation tomba en arrière, sur le dos en convulsant de douleur. Le monde subit encore le jeu de la gravité.

    Lentement, Alaric sentit qu'il quittait le sol. Il ne parut pas plus incrédule que cela. Réalité ou irréalité ? Rêve ou réel ? Cauchemar ou véritable combat. À quoi bon après tout chercher à le savoir ?

    Machinalement, le mage humain invoqua deux mains telluriques qui apparurent de part et d'autre de l'énorme éventration de Lamentation. Les doigts de terre denses s'enfoncèrent pour s'agripper dans le reste des chairs et des organes qui n'avaient pas vomi sur le sol forestier. Puis, d'un coup, les deux "mains" s'écartèrent pour forcer la blessure béante à s'agrandir plus... encore plus ! Toujours plus !

    Et après ? il y aura peut être pas d'après...
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    Lune & Crow
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    qui suis-je ?:
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  • Lun 29 Juil - 19:58



    Lune sur le point d’étouffer avale une bouffée d’air salvateur alors qu’elle s’éveille, mais en se faisant elle ingurgite également un épais liquide chaud, elle crache et tousse et halète et panique quand ses grands yeux écarquillés ne rencontrent que le miroir de ses propres prunelles noires au réveil. La nappe d’obscurité est opaque et des bruits peuvent se faire entendre au dehors, mais elle est plus préoccupée par son corps qui lui envoie d’étranges signaux. La petite fae ne se sent pas bien, sa tête est lourde et elle sent… elle sent… rien? Son corps tout entier est ankylosé par une sensation engourdissante, Lune ne comprend pas ce qui lui arrive, elle tente de bouger en vain, elle est restreinte par quelque chose, et son crâne qui lui fait un mal de chien… D’un seul coup elle ressent enfin une sensation, désagréable, un fourmillement crescendo qui naît dans ses doigts et devient une douleur vive. Lune réalise enfin ce qu’il se passe, la nature de ce liquide chaud qu’elle a avalé tantôt, de ces bruits visqueux quand elle se palpe dans le noir, de ces intenses fourmillements qui ne cessent d’augmenter, des aspérités étranges qui parsèment irrégulièrement sa peau. Elle est coupée, partout, son corps tout entier n’est qu’une charpie rouge et ivoire, sa peau fragile lui fait encore une fois payer le tribu de son raté d’il y a quatre ans. Le stimulis omniprésent croît en un essaim de piqûres, les piqûres deviennent souffrance et la souffrance la fait hurler.

    La lumière surgit malicieusement pour signer une délivrance aigre-douce pour la fae. Lune s’échappe bon gré mal gré du giron de cette vile entité, mais elle n’a malheureusement pas l’opportunité de s’en réjouir. La cascade d’ossements et de restes qui se déverse du ventre du Maître des Lieux dégorge les cinq infortunés dans la réalité, et tout ce remue ménage, ces frottements, l’atterrissage et l’air froid ne font qu’un peu plus la meurtrir. En état de choc, sa voix est coupée par son souffle qui refuse de sortir de sa fragile poitrine, elle entend son gardien volatile à ses côtés mais ses pensées sont obnubilées par le montant de douleur qui l’assaille, et quand le son disparaît totalement de l’existence elle ne sait pas si c’est elle qui se meurt ou si c’est encore un coup de la vermine, mais une chose est sure, sa bouche s’écarte, sa gorge s’ouvre et dans son cri silencieux son coeur défaille. Lune n’est que douleur, partout où elle regarde sur son corps, des filins de sang vermeille s’écoulent d’ouvertures béantes, son teint auparavant d’un opale si pur qu’il ferait jalouser les nuages ne fait plus envie qu’aux vampires et autres créatures hématophages. Chaque mouvement qu’elle ose faire accroit un peu plus les coupures géantes, tandis que d’autres plus petites et vicieuses ceinturent ses articulations. Lune hurle, mais aucun son ne sort, pourquoi ça lui arrive? Pourquoi elle? Pourquoi pourquoi pourquoi??? Elle ne peut pas se relever, le fardeau est trop intense, elle ne peut pas se laisser tomber, ses muscles à nu ne supporteraient pas la friction. La jeune fille suppliciée continue de crier, ne priant plus qu’une chose, que ça s’arrête.

    Et comme si l’ayant entendu, Lamentation vient exaucer son souhait. Une avalanche d’images, de concepts immatériels et incompréhensibles déferle dans sa tête, surpassant brièvement l’hégémonie de la torture charnelle qu’elle subit. Comme si son cerveau ne parvenait plus à formuler la moindre pensée, elle ne peut se raccrocher à quoi que ce soit, elle ne peut plus désirer, ni ressentir, ni exprimer. Lune est dépassée. C’est trop pour son coeur fragile déjà bien malmené, et après un battement raté, elle s’abandonne au noir absolu.

    Quand elle reprend connaissance, le flocon de Shoumeï entend de nouveau les sons, ceux de ses propres gémissements épuisés par la douleur continuelle, ceux des battements de son coeur dans poitrine, ceux des vents qui défilent à l’extérieur, ceux de Crow. Elle est dans son bec, son corps toujours en miettes, elle s’étouffe sur le sang sec, sa voix pousse une complainte muette. Lune tend une main faible vers la chitine et l’effleure de la même délicatesse que sa conscience ne touche la surface de la réalité du bout des doigts. La fille opaline sent l’aspérité d’un objet qu’elle a elle-même figé dans le bec du corvidé. Myriem n’est peut-être pas là, mais Lune n’est pas toute seule n’est-ce pas? Ses doigts s’écharpent sur le disque magique, le peu de peau encore immaculé qui lui reste est plus pâle encore qu’à l’accoutumée, elle se sent faiblir et languir, appelant sa magie dans un ultime effort elle fracture le médaillon d’ombre encastré dans le bec de Crow. Les paroles du mage le plus puissant du Sekaï lui reviennent en tête comme un phare d’espoir au milieu de la douleur insupportable:

    Je sais à quel point la solitude peut déchirer une personne… si jamais tu es en danger, Alune, jette-le sur le sol pour qu’il se brise… je serai capable de venir te retrouver.

    La voix de Lune mourante, reposant exsangue dans le cocon de la gueule de Crow, émet un son à peine audible:

    ”Va...enys... pi...tié, sauve... moi…”

    Mais personne ne vint.

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