Elle avait ajusté son armure et son manteau avant de sortir, elle s'arrêta près de l'abreuvoir pour essayer de capter son reflet sur la surface de l'eau. C'était un geste qu'elle n'avait pas fait depuis quelque temps, son esprit obnubilé par d'autres idées. L'eau lui renvoya une image qui la surprise, lui fit un peu pitié. Son teint pâle, ses yeux creusés et cernés par des nuits trop courtes, ses joues creuse par son régime alimentaire modifié sur une base de liquide.

- Sajenti Vatt'Ghern, je présume.

La voix la ramène à l'instant présent, elle s'était redressée pour se placer face au nouvel arrivant. Il se présente et annonce qu'il vient de la part de Tagar ce qui l'avait étonné au départ. L'homme s'était intéressé à cette mission alors qu'il avait d'autres choses à penser. Elle détailla l'homme qui la dépassé, mais cela n'était pas difficile en réalité. Elle se rapprocha tranquillement quand il lui tendit un paquet en lui précisant que c'était un gâteau au chocolat. Elle sourit timidement en repensant à cette nuit passer avec le contrôleur, à survivre face au fanatique. Elle l'avait l'impression que cela s'était passé il y a une éternité, mais cela ne faisait que quelques mois, aujourd'hui elle ne voulait plus survivre, mais cherchait sa vengeance. Elle saisit le gâteau avec ce sourire triste qui la caractérisé dernièrement.

- Oui, je lui ai promis de lui en offrir un à notre prochaine rencontre, mais le temps fait que nous ne nous sommes pas revu. Vous en voulez un bout ?

Ersa commencé à séparer le gâteau au cas où il en voudrait et croqua dans une des parts. Elle macha lentement se perdant dans ses pensées avant de reprendre conscience que ce n'était pas le moment, elle n'aimait pas trop ses moments ou ses idées était encore claire et n'avait rien de précis à faire.

- Est-ce que vous savez ce que nous allons faire ? Si vous voulez, nous pouvons prendre la route le temps que je vous explique.

Il n'y avait pas grand-chose à dire. Elle avait poussé auprès de sa hiérarchie pour retrouver un nécromancien qui représentait une menace pour les soldats du reike, mais pour elle, cela représenter une excuse pour pouvoir se venger de ce monstre. Son sourire devint un peu plus chaleureux quelques secondes.

- D'ailleurs, appelez-moi Ersa.

Elle avait du mal à se rappeler quand est ce qu'elle avait vu Tagar pendant cette mission. Le problème n'était pas de se rappeler de ce jour, elle avait l'impression que cela faisait des années alors que cela ne faisait que quelques mois. Depuis qu'elle avait appris la disparition de ses compagnons, elle avait tiré toutes les ficelles possibles, tendues toutes les perches imaginable pour en savoir plus sur leur mission, le lieu, la cible qui avait causé leurs pertes. Elle avait clairement passé tout son temps libre à essayer d'avoir des infos, et à attendre un verre à la main, jusqu'à en oublier de manger parfois. Elle ne voulait pas imaginer ce que pourrait lui dire ses compagnons s'il la voyait dans cet état, une loque bien loin de la chasseuse qu'elle était auparavant. Cela ne servait à rien de s'imaginer des choses, aujourd'hui, elle était seule et ne savait pas comment le gérer. Elle espérait que le soir suivant sa peine serait amoindri prête à tourner une page. Elle attrapa les rennes de sa monture pour l'attirer à l'extérieur, ses pas étaient traînants, un mal de tête naissant lui démontrait bien la qualité de la nuit qu'elle venait de passer. Encore quelques jours comme ça et elle serait aussi cerné qu'un raton laveur. Elle attrapa sa gourde qu'elle leva à ses lèvres, l'eau rafraîchit par la nuit lui fit un bien fou, la réveilla un peu mieux. Elle la replaça avant de passer sa main dans ses cheveux, depuis combien de temps ne s'en était-elle pas occuper, ou d'elle tout simplement.

Il y a quelques mois, elle aurait demandé si Tagar surveillait toutes les femmes qu'il avait croisées, mais son cœur n'y était plus.

- Il est bien renseigné. Je ne sais pas si la cible est encore là, et sa protection.

Elle s'arrêta un moment, hésitante.

- Vous pourrez le remercier. Si jamais vous voulez partir, je comprendrai, risquer votre vie pour une inconnue, dans une mission dont on ne connaît rien.

Elle s'interrompit plongeant son regard dans les yeux de l'homme, essayant d'i voir quelque chose, mais elle se détourna rapidement, se sentant un peu coupable de demander cela. Elle s'était sentie insultée quand Konrad lui avait fait la même offre, mais la différence résidait que son offre à elle était qu'elle ne voulait pas forcer quelqu'un à rejoindre ce qu'elle considérait comme sa mission. Elle se hissa d'un bond plus agile que ne le sous-entendait sa démarche, montrant l'habitude de monter sur une jument trop grande pour elle. Elle lui laissa un peu de temps pour sa réflexion avant de faire avancer sa monture. Si jamais il pourrait discuter en chemin.

L'archère fit avancer sa monture, la route ne serait pas très longue. La nuit drapée encore le paysage montagneux, l'air nocturne restait froid et elle resserra le col de son manteau. Le soleil viendrait bientôt inonder les versants de sa lumière. À une époque, elle aimait passer du temps dans les rocheuses, la chasses dans les montagnes avait des teintes de nostalgie, lui rappelant son enfance dans les monts Kazan. Aujourd'hui, la chasse n'avait pas du tout la même teinte. Le temps était clément, enfin, il ne pleuvait pas, il y avait juste un léger vent qui sifflait entre les pierres. La jument avancée d'un pas tranquille, ses sabots claquaient sur la pierre humide. Sa cavalière se laissait porter par la cadence imposée par la démarche de l'animal. Le chemin serait assez large jusqu'aux trois-quarts du chemin, permettant aux deux personnes d'avancer de front. Le sifflement du vent gênait l'ouïe de la naine, qui secouait légèrement la tête pour essayer de trouver une position qui camouflerait ses oreilles, sans succès. Ersa se doutait que plus ils s'enfonçaient dans les montagnes plus des créatures diverse et variés les observaient. En même temps, chaque recoin de cette région dissimulait des monstres plus ou moins hostiles depuis le début de la guerre. La chasseuse avait retiré son arc qui barrait sa poitrine pour le déposer sur le pommeau de sa selle. Son glaive pendait sur le côté gauche de son ceinturon, pendant que ses flèches cliquetais dans son carquois à sa droite. Son épée longue reposait sur l'arrière de sa selle dans un étui de cuir.

Le soleil s'était invité lentement à l'horizon, réchauffant l'air. Ersa essaya de profiter un peu de la chaleur de l'astre pour réchauffé son visage rosi par le vent frais. La monture essayait d'éviter les flaques d déluges des derniers jours qui recouvraient le sol, mais abandonna bien vite. Elle était restée murée dans son silence une bonne partie du trajet, réfléchissant sur sa vie et sur sa vengeance. Elle gardait toujours un espoir irréaliste qu'une fois sa vengeance atteinte, elle irait mieux. Que son esprit pourrait tourner la page et avancer. Arrêter de se tourmenter.

Ils s'approchaient de l'endroit décrit par les éclaireurs, et elle aperçut un passage plus étroit se dégager entre les pierres.

L'archère descendit de sa monture et se dirigea vers les pans de pierre pour examiner l'endroit. Elle renifla l'air essayant de trouver une odeur qui pourrait la guider, il y avait bien une odeur morbide qui traînait dans les airs, mais rien empêcher de douter. Ses doigts effleurèrent la pierre, pendant que sa colère montait, elle avait l'impression de perdre son temps. Elle remarqua alors une petite rune discrète près du sol. Une rune qu'elle avait déjà vue sur les rapports, rune que le nécromancien utilisé pour baliser certains passages.

- C'est par là.

Elle se dirigea vers sa monture pour sauter en selle. Un sursaut de détermination lui permit de mettre de côté ses réflexions. Ils y seraient bientôt.

La petite avait pris la tête en silence, les pas de leurs montures claquaient légèrement sur le sol rocailleux. Chaque pas la rapproché de son but, de sa délivrance. Enfin, elle l’espérait. Le chemin étroit fut passé assez rapidement, l’odeur de décomposition lui emplissait l’esprit et elle faisait tout son possible pour ne pas penser au funeste sort de ses camarades. Ses doigts jouaient sur le bois de son arc pour chercher le réconfort de l’arme. Au détour d’un dernier virage, ils arrivèrent devant une ouverture artificielle, construite et renforcé. La naine essayée de percer la noirceur de cette grotte, mais quelque chose l’en empêchait comme sur un voile noir s’étendait sur l’ouverture. Fabius était descendu de son cheval avec un commentaire sur l’odeur. Elle eut un léger sourire, il y a quelques semaines, elle aurait pu avoir un commentaire sur la décoration peut être un peu trop marqué, mais le cœur n’y était pas encore. L’homme lui proposa qu’elle couvre son avancé avant de le rejoindre. Elle acquiesça en descendant elle aussi de sa monture, elle ne savait pas ce qu’il se cachait dans l’ombre et ne voulait pas perdre son temps à maîtriser la bête. Elle prit une inspiration en faisant un signe de tête en bandant son arc, la pointe diriger vers l’ombre prête à cueillir la moindre cible. L’homme avança rapidement, sans hésitation, montrant son habitude de telle situation. Une fois arrivait devant l’ouverture, elle débanda l’arc, mais le garda près à être utilisé pendant son avancée.

Pour le moment, elle arrivait à maintenir ses pensées sur l’instant, faire taire le torrent d’émotions qui la bouleversait intérieurement. Elle traversa la courte distance avant de se figer devant l’entrée, jusque-là rien n’avait bougé, mais il y avait bien un fin voile d’ombre qui dissimulait ce qu’il se passait à l’intérieur. Ersa ne comprenait pas l’intérêt de dissimuler juste l’intérieur avec un comité d’accueil pareil dans un coin aussi paumé.

Ils franchir le voile ensemble, s’attendant à être accueilli. Mais rien. Juste un couloir s’enfonçant dans les entrailles de la terre, légèrement éclairer par des cristaux infusés de mana. Elle jeta un œil à son compagnon d’armes.

- La voie est assez large pour avancer de front. Ça me permettra de garder mon arc utilisable. Ou je peux ouvrir.

Elle en avait eu l’habitude pendant des années dans son village. Elle aurait aussi pu se transformer, mais elle avait un peu peur que son instinct prenne le dessus et ruine toute approche discrète et elle préférer gérer cela « elle-même ». L’air était empli de l’odeur de la mort et de la magie noire, quelques râles s’élevaient du bout du couloir. Il y aurait sûrement des ennemis pas loin.