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Citoyen de La République
Sixte V. Amala
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crédits : 1494
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Info personnage
Race: Elfe (mi-ange)
Vocation: Guerrier assassin
Alignement: Chaotique Neutre
Rang: D
Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis que Zelevas d’Elusie avait été arrêté et que son chien s’était enfui. L’idée que Mortifère foulait la terre du Sekaï en toute liberté avait tendance à lui faire perdre le sommeil mais elle se rassurait simplement en se disant qu’il ne savait pas qu’elle était présente, ni qu’elle avait participé et été témoin de sa chute. Elle se forçait à se souvenir qu’elle n’était pour lui qu’un moucheron croisé au détour du barrage de la Vès, que son existence n’avait absolument aucune importance à ses yeux. Hélas, la sienne en avait aux siens et bien que le temps avait passé, pour sa mémoire d’elfe ce qu’il lui avait fait subir ne datait que d’hier. Elle entendait encore le crépitement de la foudre, elle sentait sa chaleur qui faisait se révulser ses organes en la traversant de haut en bas, le claquement angoissant de ses articulations mécaniques lui parvenait encore ou l’odeur caractéristique qui émanait de lui. Aussi après l’enquête, elle avait tout bonnement disparue. Rayée des cartes et des radars. Elle avait quitté Justice puis la République pour aller se terrer dans les terres inhospitalières du nord, là où personne n’aurait voulu aller la chercher car personne ne savait où la chercher. Elle avait, de toute façon, toujours apprécié la solitude qui était devenue sa compagne dès sa plus tendre enfance.
Ces derniers mois passés en République portaient aussi en eux la promesse du changement, une raison de plus pour s’enfuir loin d’ici. Sixte était partie sans regarder derrière elle, sans laisser un mot à qui que ce soit. Elle s’était évaporée comme elle était apparue, ses caches avaient été vidées, ses planques laissées à l’abandon et même ses ardoises avaient été en grande partie réglées. D’un jour à l’autre c’était comme si Sixte n’avait jamais existé et dieux! qu’elle était douée pour annihiler sa propre existence. Elle avait ainsi voyagé clandestinement pendant plusieurs jours. L’idée de se rendre au Reike l’avait effleuré mais la peur que les rues de ses villes lui inspiraient était encore trop vivace, alors elle avait obliqué vers le nord. Là où elle avait passé la majorité de son existence. Aucune réminiscence là-bas n’était réellement belle, mais c’était chez elle et au moins avait-elle fait la paix avec ces souvenirs là. Cependant, elle n’avait pas regagné Melorn, rien ne l’y attendait plus. Elle s’était contenté de errer dans ses faubourgs, en vivant de petits boulots qu’elle effectuait sous un nom d’emprunt. De nombreux jours avaient ainsi disparu dans l’ignorance volontaire que Sixte s’était imposée mais malgré cela, une pensée ne cessait de la titiller comme une puce dans le poil d’un chien.
Parfois, lorsqu’elle dépliait ses cartes, elle observait les routes principales menant à la République et elle hésitait, certaines fois longtemps. Les yeux rivés sur la ville portuaire puis elle repliait ses parchemins élimés comme si ne plus l’avoir sous les yeux pouvaient empêcher ses pensées de se muer en envie. C’est d’ailleurs ce qui ne tarda pas à arriver mais Sixte était rodée à cet exercice et continua sa route aux travers des monts et des plaines glacées du septentrion jusqu’à ce que l’envie ne devienne un besoin et une nécessité. Ce fut seulement là qu'elle abandonna son combat perdu d’avance et reprit la route vers la République. Le voyage du retour lui sembla trop rapide et en un clin d'œil elle avait regagné ce territoire qu’elle avait pourtant fuit avec le plus grand soin.
Sixte était adossée contre un pilier qui soutenait la grande bâtisse derrière elle. Elle avait un peu minci mais son visage avait pris la teinte légèrement dorée de ceux qui vivent dans les terres enneigées. Son habituelle cape noire recouvrait ses épaules car même si le printemps était en train de poindre, il ne faisait plus très chaud en fin de journée. D’ailleurs le soleil était en train de descendre à l’horizon et la mer reflétait le camaïeu de jaune, de orange et de rouge qui coloraient le ciel. La jetée donnait l’impression de se perdre dans un incendie, le phare de danser dans les flammes et Sixte se demanda si elle avait fait le bon choix. Au même moment, la porte derrière elle s’ouvrit et elle le reconnut à sa démarche caractéristique. Franche et assurée quoi qu’un brin arrogante. Doucement, elle s’arracha à son dossier.
- Alors c’est vrai ce qu’on dit. Affirma-t-elle en avançant de manière à se placer dans le chemin de l’homme. En quelques enjambées elle franchit la distance qui les séparait et d’une pichenette elle fit tinter son ongle contre le métal de son insigne griffée. - Le capitaine Dosian n’est plus capitaine. J’imagine que la promotion canapé avait ses limites. Dit-elle alors que ses lèvres formaient l’ébauche d’un sourire. Pour ponctuer sa phrase, une rafale puissante vint maltraiter sa tresse et agiter les cheveux qui s’en étaient échappés. - On a quelques trucs à se dire, je crois.
Ces derniers mois passés en République portaient aussi en eux la promesse du changement, une raison de plus pour s’enfuir loin d’ici. Sixte était partie sans regarder derrière elle, sans laisser un mot à qui que ce soit. Elle s’était évaporée comme elle était apparue, ses caches avaient été vidées, ses planques laissées à l’abandon et même ses ardoises avaient été en grande partie réglées. D’un jour à l’autre c’était comme si Sixte n’avait jamais existé et dieux! qu’elle était douée pour annihiler sa propre existence. Elle avait ainsi voyagé clandestinement pendant plusieurs jours. L’idée de se rendre au Reike l’avait effleuré mais la peur que les rues de ses villes lui inspiraient était encore trop vivace, alors elle avait obliqué vers le nord. Là où elle avait passé la majorité de son existence. Aucune réminiscence là-bas n’était réellement belle, mais c’était chez elle et au moins avait-elle fait la paix avec ces souvenirs là. Cependant, elle n’avait pas regagné Melorn, rien ne l’y attendait plus. Elle s’était contenté de errer dans ses faubourgs, en vivant de petits boulots qu’elle effectuait sous un nom d’emprunt. De nombreux jours avaient ainsi disparu dans l’ignorance volontaire que Sixte s’était imposée mais malgré cela, une pensée ne cessait de la titiller comme une puce dans le poil d’un chien.
Parfois, lorsqu’elle dépliait ses cartes, elle observait les routes principales menant à la République et elle hésitait, certaines fois longtemps. Les yeux rivés sur la ville portuaire puis elle repliait ses parchemins élimés comme si ne plus l’avoir sous les yeux pouvaient empêcher ses pensées de se muer en envie. C’est d’ailleurs ce qui ne tarda pas à arriver mais Sixte était rodée à cet exercice et continua sa route aux travers des monts et des plaines glacées du septentrion jusqu’à ce que l’envie ne devienne un besoin et une nécessité. Ce fut seulement là qu'elle abandonna son combat perdu d’avance et reprit la route vers la République. Le voyage du retour lui sembla trop rapide et en un clin d'œil elle avait regagné ce territoire qu’elle avait pourtant fuit avec le plus grand soin.
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Sixte était adossée contre un pilier qui soutenait la grande bâtisse derrière elle. Elle avait un peu minci mais son visage avait pris la teinte légèrement dorée de ceux qui vivent dans les terres enneigées. Son habituelle cape noire recouvrait ses épaules car même si le printemps était en train de poindre, il ne faisait plus très chaud en fin de journée. D’ailleurs le soleil était en train de descendre à l’horizon et la mer reflétait le camaïeu de jaune, de orange et de rouge qui coloraient le ciel. La jetée donnait l’impression de se perdre dans un incendie, le phare de danser dans les flammes et Sixte se demanda si elle avait fait le bon choix. Au même moment, la porte derrière elle s’ouvrit et elle le reconnut à sa démarche caractéristique. Franche et assurée quoi qu’un brin arrogante. Doucement, elle s’arracha à son dossier.
- Alors c’est vrai ce qu’on dit. Affirma-t-elle en avançant de manière à se placer dans le chemin de l’homme. En quelques enjambées elle franchit la distance qui les séparait et d’une pichenette elle fit tinter son ongle contre le métal de son insigne griffée. - Le capitaine Dosian n’est plus capitaine. J’imagine que la promotion canapé avait ses limites. Dit-elle alors que ses lèvres formaient l’ébauche d’un sourire. Pour ponctuer sa phrase, une rafale puissante vint maltraiter sa tresse et agiter les cheveux qui s’en étaient échappés. - On a quelques trucs à se dire, je crois.
Citoyen de La République
Pancrace Dosian
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Les dernières semaines ont été bizarres. Entre l’attaque de Liberty, les funérailles publiques, puis l’enquête sur d’Elusie et Mortifère, j’peux pas vraiment dire que j’aie eu un moment pour moi. Puis, j’ai une boule au creux de l’estomac depuis ce moment, un amas de non-dits qui n’en finissent pas, que j’rejoue en boucle dans ma tête, j’imagine des réponses, des bons mots, des retrrouvailles enflammées, des engueulades phénoménales ou, pire, juste un désert de vide dans lequel on se revoit jamais.
J’ai essayé de passer le temps en charmante compagnie pour me changer les idées, j’suis parti en plein milieu de la soirée, pas motivé.
Par contre, les types qui résistaient un peu aux interpellations, j’leur ai fait passer le goût de l’outrage à l’autorité. Ça m’a défoulé, ça les a calmés, tout le monde y a gagné. J’ai p’tet eu la main un peu lourde une fois ou deux, mais, hé, ils l’avaient bien cherché, et personne est venu m’emmerder pour ça. C’est même quasiment si j’ai pas reçu des félicitations, du commissaire et du maire. Bon, après, lui, c’est particulier, dès qu’il s’agit de cogner les étrangers et les moins qu’humains, il est prêt à tout. Chacun son délire, moi je juge pas, c’est pas mon boulot.
Reste que quand j’vois Sixte à la sortie la boule disparaît, avant de revenir cent fois plus lourde au creux de mes entrailles. Elle a l’air en forme, cette forme des gens qui passent la majeure partie de leur temps en plein air, et la lumière orangée de la fin de journée fait des reflets presque roux dans ses cheveux. La façon qu’elle a de se poser devant moi et d’engager la conversation laisse peu de place au doute sur ce qui nous attend, et ce qui aurait probablement dû avoir lieu dès qu’on a fini l’enquête pour Goldheart et consorts et qui nous guette depuis tout ce temps va enfin pointer le bout de son nez.
P’tet qu’elle avait besoin de temps pour que tout se décante. Moi aussi, quelque part. Même la discussion avec Rêve a permis de vider le sac et de regarder tout ça sous un oeil qui, s’il est pas nouveau, est un peu décillé, ou en tout cas avec un champ de vision plus large.
« Ouais, parfois on vise sur le mauvais cheval, et quand on décide de changer de monture pendant la course, on se casse la gueule. C’est pas dramatique, globalement, ça devrait se tasser assez vite. »
C’est ce que le commissaire Patoche a dit, et s’il ment comme il respire, j’ai vaguement tendance à le croire sur ce coup. Il a fait trop de saloperies dans lesquelles j’ai trempées pour qu’il puisse se permettre de trop me la faire à l’envers, à moins d’y aller à fond, ce qui reste du domaine du possible. Ça foutrait par contre une sale ambiance dans le service, et un gradé qui perd le soutien ou l’assentiment de ses hommes fait rarement long feu, à l’office. C’est qu’avec toutes nos années d’études, on peut quand même pas trop nous la coller.
J’essaie de pas penser au fait que le changement de monture a impliqué de passer de Zelevas à Sixte, et que la comparaison à des canassons manque singulièrement d’élégance, ce qui paraît pas si dépaysant venant de ma part, à la réflexion. Mais c’est pas le moment pour cette conversation, m’est avis.
« Et faut croire que le canapé était pas si confortable. Tu veux aller où ? Chez moi, ça te va ? »
C’est pas que j’veux pas me donner en spectacle si la discussion se passe mal ou qu’elle éclate en sanglots, mais j’préfèrerais éviter de donner cette image. Ça serait gênant. Puis, j’suppose que ça serait mieux aussi pour parler, si on est posé chez moi. C’est pas comme si on risquait de manquer de quoi que ce soit, après tout, genre à boire ou un plumard. Puis c’est toujours plus agréable de jouer à domicile, même si ça m’enlève la possibilité de claquer la porte en tapant du pied. Un échange que j’suis prêt à faire.
Un autre avantage, c’est que j’habite pas très loin, donc on parcourt la distance en une dizaine de minutes en échangeant des mondanités un peu plates. C’est pas ouf pour la pierre logée dans mon bide, mais ça permet de se préparer à la suite, et le p’tit sourire qu’elle m’a adressé au début laisse à penser que les choses devraient quand même plutôt bien se goupiller. Y’a pas de raison, hein, mais si jamais on n’est pas sur la même idée ou quoi... Pour évacuer un peu, j’demande des nouvelles.
« Alors, t’étais partie où après l’enquête ? Une urgence ? »
C’est que j’avais pensé réussir à l’attraper dans la suite directe de l’arrestation de Zelevas, sans même compter la disparition impromptue de Mortifère. J’m’attendais pas forcément à ce qu’elle devienne introuvable. Je dis pas que j’ai remué ciel et terre pour lui mettre la main dessus, mais quand même. Puis c’était plus souvent elle qui venait me trouver quand ça la prenait, en plus, plutôt que l’inverse : c’est plus facile quand on se rappelle que j’ai une adresse régulière, et que j’suis quand même plus simple à contacter qu’une mercenaire à qui on peut laisser des messages que par l’intermédiaire d’aubergistes compréhensifs chez lesquels elle a ses habitudes.
A bien y réfléchir, c’est ce rôle d’être celui qu’est dans l’attente qui destabilise un peu.
J’repense à une métaphore pleine d’élégance sur les clés et les serrures quand j’fais tourner la mienne dans la porte de mon appartement.
« Installe-toi, comme d’hab’. »
Citoyen de La République
Sixte V. Amala
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- Passe devant. Avait-elle dit en désignant d’un geste désinvolte la rue qui s’étendait derrière elle. L’hésitation avait été brève, Sixte n’avait rien d’autre qu’une planque un peu poussiéreuse à offrir à Pancrace pour discuter et s’il n’avait pas les goûts d’un petit seigneur, il valait encore mieux que leur discussion se fasse chez lui. De plus, si elle voulait écouter la conversation, il lui suffirait de tourner les talons sans demander son reste. Une option qui n’était pas négligeable. Ils marchèrent d’un pas tranquille, échangeant quelques banalités sur les derniers sujets de République qu’avait loupé la jeune femme mais qui ne relevait d’aucun intérêt crucial. Quelques minutes plus tard, ils étaient devant le bâtiment qui abritait les appartements du jeune homme. Sixte se souvenait sans peine de la dernière fois qu’elle s’y était rendu. Ses yeux se levèrent et elle observa la volée de marche en songeant qu’elles lui avaient parut mille fois plus pentu. Sans doute car dans son état les franchir avait été un véritable tour de force.
- On peut dire ça… Dit-elle à voix basse sans chercher à se faire entendre de Pancrace, ni à savoir s’il l’avait entendu.
Dans un léger grincement, après un cliquetis caractéristique, la porte s’ouvrit et Sixte entra dès qu’elle y fut invitée.
L’endroit n’avait pas changé, la pièce principale était toujours aussi désordonnée et il y régnait une odeur de braise froide qui laissait supposer que son propriétaire n’y était pas revenu depuis un petit moment. La demi-sang s’avança à l’intérieur tandis que ses doigts jouaient avec les attaches de sa cape pour la défaire. Une fois débarrassée de la couche de tissu, elle la laissa pendre sur une chaise où une chemise avait déjà été abandonnée.
- Tu m’excuseras, je n’ai pas eu le temps de passer par la case lessive. Sans être couvert d’une croûte de crasse, ses vêtements prouvaient qu’elle rentrait tout juste de voyage et si sa peau avait été récurée, ses habits eux ne l’étaient pas. Elle avait toutefois gratté la boue qui s’était accrochée à ses bottes. - J’étais dans le nord. Ajouta-t-elle comme pour justifier son accoutrement ; l’épaisseur de sa pèlerine était un bon indice, puis le silence tomba entre eux. Lourd de non dit, presque palpable. Sixte aurait voulu le briser mais elle ne savait pas quoi dire. Il y avait bien longtemps qu’elle n’avait pas eu une conversation profonde avec qui que ce soit et encore moins une qui la concernait aussi intimement. Néanmoins, son séjour dans le septentrion avait le mérite de lui avoir permis de réfléchir et même mieux de prendre une décision.
Ca n’avait pas été facile car Sixte avait d’abord repoussé le problème aussi loin d’elle que son esprit tricentenaire le lui avait permis. Elle l’avait ignoré purement et simplement avec l’espoir naïf que lorsqu’elle s’y pencherait, la réponse s’imposerait à elle avec évidence. Evidemment, ça n’avait pas été le cas et lorsqu’elle avait à nouveau accordé son attention à cet imbroglio, elle s’était retrouvée face à un véritable sac de nœud. Peu à peu, elle s’était aperçu que ce n’était pas la complexité de la situation qui l’avait forcé à s’en détourner, c’était ce qu’elle représentait mais également ce qu’elle arrivait à faire naître chez elle ; quelque chose qu’elle avait cru mort depuis bien longtemps et qui la terrifiait.
- Pan, ses doigts coururent un instant sur le dossier de la chaise avant qu’elle ne se tourne vers lui. - Toi et moi… Elle s’avança vers lui jusqu’à ce qu’ils ne soient plus séparés que par une longueur de bras. Son regard croisa le sien et sa main se tendit vers sa joue dont elle effleura doucement la pommette, la touchant à peine. - Ça n'existe pas. Son bras retomba le long de sa hanche et elle recula d’un pas. - J’ai pensé… Nous avons passé du bon temps. Suffisamment en tout cas pour qu’elle traverse la moitié du continent pour le lui dire, suffisamment pour qu’elle n’ait aucune envie de le quitter et suffisamment pour qu’elle cherche à se préserver des sentiments qui s'étaient mit à l’assaillirent lorsqu’elle avait songé à l’avenir. Un avenir dont il faisait partie. - Mais un Homme n’a rien à faire avec un elfe. Conclut-elle d’une voix blanche.
Sixte avait retourné le problème de toutes les manières possibles et elle en arrivait toujours à la même conclusion : si elle tombait amoureuse, Pancrace vieillirait et elle ne pourrait rien faire d’autre que le regarder dépérir, années après années tandis qu’elle resterait éternellement inchangée. Immuable face au temps qui passe jusqu’à ce qu’il ne meurt. Mais l’amour qu’elle lui porterait, lui, serait long, douloureux et finalement esseulé. Elle resterait seule face à une éternité de solitude car ceux de son espèce n’aimaient pas à la légère.
- On peut dire ça… Dit-elle à voix basse sans chercher à se faire entendre de Pancrace, ni à savoir s’il l’avait entendu.
Dans un léger grincement, après un cliquetis caractéristique, la porte s’ouvrit et Sixte entra dès qu’elle y fut invitée.
L’endroit n’avait pas changé, la pièce principale était toujours aussi désordonnée et il y régnait une odeur de braise froide qui laissait supposer que son propriétaire n’y était pas revenu depuis un petit moment. La demi-sang s’avança à l’intérieur tandis que ses doigts jouaient avec les attaches de sa cape pour la défaire. Une fois débarrassée de la couche de tissu, elle la laissa pendre sur une chaise où une chemise avait déjà été abandonnée.
- Tu m’excuseras, je n’ai pas eu le temps de passer par la case lessive. Sans être couvert d’une croûte de crasse, ses vêtements prouvaient qu’elle rentrait tout juste de voyage et si sa peau avait été récurée, ses habits eux ne l’étaient pas. Elle avait toutefois gratté la boue qui s’était accrochée à ses bottes. - J’étais dans le nord. Ajouta-t-elle comme pour justifier son accoutrement ; l’épaisseur de sa pèlerine était un bon indice, puis le silence tomba entre eux. Lourd de non dit, presque palpable. Sixte aurait voulu le briser mais elle ne savait pas quoi dire. Il y avait bien longtemps qu’elle n’avait pas eu une conversation profonde avec qui que ce soit et encore moins une qui la concernait aussi intimement. Néanmoins, son séjour dans le septentrion avait le mérite de lui avoir permis de réfléchir et même mieux de prendre une décision.
Ca n’avait pas été facile car Sixte avait d’abord repoussé le problème aussi loin d’elle que son esprit tricentenaire le lui avait permis. Elle l’avait ignoré purement et simplement avec l’espoir naïf que lorsqu’elle s’y pencherait, la réponse s’imposerait à elle avec évidence. Evidemment, ça n’avait pas été le cas et lorsqu’elle avait à nouveau accordé son attention à cet imbroglio, elle s’était retrouvée face à un véritable sac de nœud. Peu à peu, elle s’était aperçu que ce n’était pas la complexité de la situation qui l’avait forcé à s’en détourner, c’était ce qu’elle représentait mais également ce qu’elle arrivait à faire naître chez elle ; quelque chose qu’elle avait cru mort depuis bien longtemps et qui la terrifiait.
- Pan, ses doigts coururent un instant sur le dossier de la chaise avant qu’elle ne se tourne vers lui. - Toi et moi… Elle s’avança vers lui jusqu’à ce qu’ils ne soient plus séparés que par une longueur de bras. Son regard croisa le sien et sa main se tendit vers sa joue dont elle effleura doucement la pommette, la touchant à peine. - Ça n'existe pas. Son bras retomba le long de sa hanche et elle recula d’un pas. - J’ai pensé… Nous avons passé du bon temps. Suffisamment en tout cas pour qu’elle traverse la moitié du continent pour le lui dire, suffisamment pour qu’elle n’ait aucune envie de le quitter et suffisamment pour qu’elle cherche à se préserver des sentiments qui s'étaient mit à l’assaillirent lorsqu’elle avait songé à l’avenir. Un avenir dont il faisait partie. - Mais un Homme n’a rien à faire avec un elfe. Conclut-elle d’une voix blanche.
Sixte avait retourné le problème de toutes les manières possibles et elle en arrivait toujours à la même conclusion : si elle tombait amoureuse, Pancrace vieillirait et elle ne pourrait rien faire d’autre que le regarder dépérir, années après années tandis qu’elle resterait éternellement inchangée. Immuable face au temps qui passe jusqu’à ce qu’il ne meurt. Mais l’amour qu’elle lui porterait, lui, serait long, douloureux et finalement esseulé. Elle resterait seule face à une éternité de solitude car ceux de son espèce n’aimaient pas à la légère.
Citoyen de La République
Pancrace Dosian
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L’ambiance, elle est pesante.
J’me dis qu’on va passer au travers du plus dur quand elle se rapproche, m’effleure la joue, puis c’est la choc, la douche froide. Autant je m’attendais à des embrouilles sur ce qu’on est, comment on se voit, est-ce qu’on veut s’organiser différemment, autant j’avais complètement oublié qu’elle avait dix fois mon âge, les oreilles pointues et l’impression qu’en clignant des yeux, elle se retrouverait face à un vieillard. Si j’dois bien avouer un truc, c’est que j’avais pas réfléchi aussi loin. J’veux dire, j’me préoccupe d’aujourd’hui, de demain, de la semaine prochaine et l’année suivante, mais dans quinze, vingt, trente ans ? En tout cas, tous ceux qu’ont connu des histoires avec des races à durée de vie longue disent que c’est ça, le souci. Et certains qu’ont eu des machins avec des races qui vivent moins longtemps que nous se sont retrouvés dans la position inverse. Mais faut-il réellement écouter l’avis de quelqu’un qui couche avec un hybride rat ou chèvre ?
Reste que p’tet que j’serai gros et dégarni, avec la moitié des ratiches en moins, une patte folle et l’eau du bocal salement croupie.
Pas une perspective très engageante, faut bien l’admettre, et j’peux difficilement en vouloir à qui que ce soit de pas vouloir signer pour. Suffit de voir les demoiselles et autres poules de luxe qui vivent leur meilleure vie avec des vieux riches décatis pour se rendre compte que c’est un état d’esprit particulier, et qu’il faut savoir faire preuve d’une certaine motivation. Sauf que j’suis pas riche, quoi. Et sans vouloir être pessimiste, sans ma belle gueule, il me reste quoi ?
Pas trop envie de m’éterniser là-dessus.
« Ah, euh... »
J’cherche mes mots, j’cherche quoi dire. Ça vient pas naturellement, là, comme ça.
« Je... euh... C’est à cause de ta famille ? »
Pas que j’sache quoi que ce soit sur eux, et foncièrement je pourrais dire que ça m’intéresse pas plus que ça, mais d’un autre côté, si ça concerne Sixte, j’ai aussi une part de curiosité, forcément. J’ai balancé la première piste qui me venait en tête, en espérant que ce soit quelque chose sur lequel j’puisse jouer, j’puisse intervenir et agir, bref, faire quelque chose plutôt que d’assister impuissant à son départ. J’ai aussi envie de lui montrer la porte, de lui dire merci et bonne continuation. Mais c’est la pétulance qui parle, là, et qui me laisserait que des regrets.
« Si c’est juste pasque je vais mourir bientôt... Enfin, pour toi, hein, moi j’espère avoir encore une longue vie, est-ce que c’est vraiment si gênant ? Euh, comment dire... »
J’ai du mal à trouver les mots, mes mains se ferment et s’ouvrent pour essayer de les attraper en l’air, mais y’a rien qui vient de très concluant.
« Enfin, on peut aussi se dire que c’est p’tet que dix ou quinze ans, sans la bague au doigt ni de chaînes dans la cave, hahaha... »
Bon, okay, c’était pas très drôle. Puis j’ai pas de cave. Ma main se lève dans sa direction pour effleurer timidement son épaule. Si c’est vraiment le temps, le problème, y’a un truc qui m’a toujours gêné avec ça. Du coup, on mange pas une pâtisserie pasque c’est que quelques bouchées ? On va pas se prélasser au soleil, sur une pelouse fraîchement tondue, pasque la nuit va tomber ou que y’a quelques nuages à l’horizon ? Est-ce que, finalement, c’est pas aussi ça, la vie, de prendre le bonheur et le plaisir où il se trouve, sans anticiper la pluie ?
Enfin, ça se bouscule mieux dans ma tête que dans mes lèvres.
« Ce que j’veux dire, c’est qu’il faut aussi juste profiter quand c’est sympa, et que, euh, si on a peur de tout, genre de se piquer sur une épine, on peut jamais attraper une rose, hé ? »
L’image est pas si nulle, dans le feu de l’action, j’en suis pas peu fier.
« C’est que... moi j’ai pas envie qu’on s’arrête. Je pensais même que cette discussion... ce serait l’inverse. Qu’on y allait pas assez, que j’achève d’une voix un peu blanche. »
Ouais, bon, j’me suis connu plus éloquent. Mais j’cherche son visage, ses yeux, son langage corporel. J’en suis quasiment à me dire que j’interroge un témoin dans une sombre affaire, et qu’il faut que j’réussisse à comprendre les leviers sur lesquels agir pour lui tirer les vers du nez. Pasqu’il me faut cette matière si j’veux pas me retrrouver tout seul dans le noir dans une heure. Et dans un noir encore plus sombre dans ma boîte crânienne.
Citoyen de La République
Sixte V. Amala
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Sixte s'attendait à beaucoup de choses. De la haine, des éclats de voix, des joues rouges de colère, des portes qui claquent, peut-être même des assiettes qui volent -ce ne sont pas siennes de toute façon-. Elle s’était également attendu à un rire franc suivit d’un commentaire désobligeant sur la nature éphémère de leur relation. Après tout, ils n’avaient jamais définit ni l’un ni l’autre ce qu’ils étaient et peut-être bien que Pancrace n’entendait profiter de sa présence qu’occasionnellement l’espace de quelques mois avant de passer à sa prochaine cible. Ca n’aurait rien eu d’étonnant ; les hommes et plus particulièrement les humains étaient réputés pour leur nature versatile, leur affection des plaisirs charnels et la manière dont leurs sentiments faisaient la girouette. Ils n’étaient pas fiables et Pancrace, plus que les autres, avait tout du coureur de jupon -et du bon amant-. Sixte avait également envisagé la possibilité qu’il acquiesce simplement. Une rupture, si l’on pouvait qualifier cela ainsi, d’un commun accord et même si cette idée lui déplaisait, c’était encore celle qu’elle préférait.
Sa famille ? Sixte n’y avait même pas songé, ils ne faisaient plus partie de sa vie depuis tellement longtemps. Une éternité. Plus d’un siècle en vérité. Elle n’était même pas capable de dire si son frère était encore en vie, ni ses sœurs. La seule chose dont elle était certaine était la mort de Virkas, son beau-père et patriarche des Amala, sa mort avait d’ailleurs entraînée leur chute. Égrainée sur plusieurs décennies jusqu’à ce que seuls les peuples presque immortels soient en mesure de s’en souvenir. Mais c’était une bonne hypothèse qu’elle serait presque tenté d’utiliser contre lui. Un père possessif refusant d’offrir sa fille à un simple officier républicain, encore moins pour qu’il se contente de la baiser. Bien que menteuse, Sixte n’entendait pas le faire avec lui. Pas à ce sujet en tout cas et pas aujourd'hui. Elle ouvrit d’ailleurs la bouche pour le détromper, et la referma dès qu’il découvrit lui-même ses raisons.
Sixte le laissa réfléchir sans chercher à interrompre le fil de ses pensées. Elle pouvait presque deviner les mots qui se formaient dans son esprit : les questions lui venaient, les réponses qui en découlaient aussi, des constatations amères et parfois agaçantes. Pourquoi se priver, même si ce n’est qu’éphémère ? Pourquoi ne pas simplement en profiter et vivre l’instant présent ? Sans se poser de questions, juste en se laissant vivre et porter par ce que le destin, la vie ou qu’importe avait à lui offrir. Toutes ces interrogations s’étaient déjà imposées à elle lorsqu’elle chevauchait au nord et elle avait largement eu le temps de leur trouver des réponses. En vérité, il n’y en avait qu’une et sa seule existence mettait à mal toutes les règles de conduite que l’elfe s’était fixée des décennies auparavant. Pis encore, elle défiait toutes ses prévoyances. Pourtant elle était d’une évidence crue. Terrifiante aussi.
La main qui effleura son épaule la fit tressaillir mais elle ne la repoussa pas.
Sixte s'attendait à beaucoup de choses et Pancrace avait toujours eu une façon bien à lui d’esquiver ses probabilités, autant que de jouer avec ses nerfs et malgré tout ce qu’elle avait pu imaginer, sa réaction fut à mille lieues de tout ce qu’elle avait envisagé.
- Quoi ? S’entendit-elle répondre sur le même ton. Qu’ils continuent ? Pendant dix ou quinze ans ? Ses yeux scrutèrent son visage pour y déceler la supercherie ou le trait d’humour -douteux- qui pourrait faire naître une lueur dans son regard. Mais elle n’y lut qu’une franchise qui la fit reculer d’un pas. - Pancrace, on est pas… On est pas compatible. Y avait-il de meilleur terme que celui-là ? - Dix ans de ton existence, n’est qu’une poignée de mois dans la mienne. Mais ça, il l’avait compris, elle en avait parfaitement conscience. - Qu’adviendra-t-il je veux plus que dix ans ? Demanda-t-elle d’un ton de défi. - Plus que quinze. “Qu’adviendra-t-il si je me mets à t’aimer ?” Siffla-t-elle en son for intérieur et la petite voix dans sa tête, lui souffla que peut-être, il était déjà trop tard. Ses lèvres se pincèrent avant de se détourner de lui pour arpenter le salon de son appartement.
- Et puis tu es un officier républicain et moi… Ses épaules se haussèrent devant l’évidence. - Je suis une mercenaire. Elle fit un pas dans sa direction et posa un doigt sur l’insigne qu’il portait. - Tu devrais avoir retenue la leçon cette fois.
Sa famille ? Sixte n’y avait même pas songé, ils ne faisaient plus partie de sa vie depuis tellement longtemps. Une éternité. Plus d’un siècle en vérité. Elle n’était même pas capable de dire si son frère était encore en vie, ni ses sœurs. La seule chose dont elle était certaine était la mort de Virkas, son beau-père et patriarche des Amala, sa mort avait d’ailleurs entraînée leur chute. Égrainée sur plusieurs décennies jusqu’à ce que seuls les peuples presque immortels soient en mesure de s’en souvenir. Mais c’était une bonne hypothèse qu’elle serait presque tenté d’utiliser contre lui. Un père possessif refusant d’offrir sa fille à un simple officier républicain, encore moins pour qu’il se contente de la baiser. Bien que menteuse, Sixte n’entendait pas le faire avec lui. Pas à ce sujet en tout cas et pas aujourd'hui. Elle ouvrit d’ailleurs la bouche pour le détromper, et la referma dès qu’il découvrit lui-même ses raisons.
Sixte le laissa réfléchir sans chercher à interrompre le fil de ses pensées. Elle pouvait presque deviner les mots qui se formaient dans son esprit : les questions lui venaient, les réponses qui en découlaient aussi, des constatations amères et parfois agaçantes. Pourquoi se priver, même si ce n’est qu’éphémère ? Pourquoi ne pas simplement en profiter et vivre l’instant présent ? Sans se poser de questions, juste en se laissant vivre et porter par ce que le destin, la vie ou qu’importe avait à lui offrir. Toutes ces interrogations s’étaient déjà imposées à elle lorsqu’elle chevauchait au nord et elle avait largement eu le temps de leur trouver des réponses. En vérité, il n’y en avait qu’une et sa seule existence mettait à mal toutes les règles de conduite que l’elfe s’était fixée des décennies auparavant. Pis encore, elle défiait toutes ses prévoyances. Pourtant elle était d’une évidence crue. Terrifiante aussi.
La main qui effleura son épaule la fit tressaillir mais elle ne la repoussa pas.
Sixte s'attendait à beaucoup de choses et Pancrace avait toujours eu une façon bien à lui d’esquiver ses probabilités, autant que de jouer avec ses nerfs et malgré tout ce qu’elle avait pu imaginer, sa réaction fut à mille lieues de tout ce qu’elle avait envisagé.
- Quoi ? S’entendit-elle répondre sur le même ton. Qu’ils continuent ? Pendant dix ou quinze ans ? Ses yeux scrutèrent son visage pour y déceler la supercherie ou le trait d’humour -douteux- qui pourrait faire naître une lueur dans son regard. Mais elle n’y lut qu’une franchise qui la fit reculer d’un pas. - Pancrace, on est pas… On est pas compatible. Y avait-il de meilleur terme que celui-là ? - Dix ans de ton existence, n’est qu’une poignée de mois dans la mienne. Mais ça, il l’avait compris, elle en avait parfaitement conscience. - Qu’adviendra-t-il je veux plus que dix ans ? Demanda-t-elle d’un ton de défi. - Plus que quinze. “Qu’adviendra-t-il si je me mets à t’aimer ?” Siffla-t-elle en son for intérieur et la petite voix dans sa tête, lui souffla que peut-être, il était déjà trop tard. Ses lèvres se pincèrent avant de se détourner de lui pour arpenter le salon de son appartement.
- Et puis tu es un officier républicain et moi… Ses épaules se haussèrent devant l’évidence. - Je suis une mercenaire. Elle fit un pas dans sa direction et posa un doigt sur l’insigne qu’il portait. - Tu devrais avoir retenue la leçon cette fois.
Citoyen de La République
Pancrace Dosian
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Je m’attendais pas à ce que ma proposition de mettre la poussière sous le tapis et qu’on en reparle dans cinq, dix ou quinze ans soit accueillie avec un enthousiasme fou, des pluies de confettis et une danse avec des pompons, mais c’était pas obligé de prendre un air interloqué ou choqué comme ça. J’ai du mal à lire les expressions de Sixte, entre son attitude, sa voix, et le clair-obscur de mon appartement. Pasque oui, finalement, j’propose rien d’autre que de botter en touche, d’attendre de voir ce qui va se passer plus tard.
Ça fait mal au derche, mais ce qui ressort surtout, c’est que j’serais prêt à pas mal de choses pour juste continuer pendant quinze piges, et finir vieux, con, et seul, pasque ça serait toujours ça de gagné.
« Pas compatible, ça veut plus rien dire, à ce stade, que j’murmure, et j’sais plus si c’est à voix haute ou dans ma tête alors qu’elle reprend la parole. »
Vrai que j’ai avancé une perspective hédoniste, qu’il faut prendre le plaisir et le bonheur tant qu’on peut, tant qu’il est à portée, avant qu’il soit trop tard, et ça peut arriver vite. Ça peut être la guerre à Kaizoku, l’insurrection à Liberty, un titan chafouin au Razkaal. Ça peut être une maladie fulgurante. Ça peut être un criminel de bas étage qui m’en veut et me surine dans une ruelle pendant une patrouille. Et ça peut être juste la vie qui s’arrête, à cinquante, soixante ou soixante-dix ans.
Est-ce que si j’avais un millénaire devant moi pour voir venir, j’serais plus précautionneux ? Moins imprudent pour chercher tout ça ? A l’inverse d’un gamin qui approche sa main des flammes en sachant qu’il risque de se brûler mais qui doit en faire l’expérience ? Je hausse mentalement les épaules : il me reste au mieux un demi-siècle à m’accrocher avant de tirer ma révérence, le monde est vaste et la vie est infinie. J’veux pas vivre dans la crainte.
Et pourtant j’suis à pieds joints dedans, que ça se passe mal, que ça se passe pas.
Putain.
Mon coeur loupe un battement, mon esprit se vide brièvement quand Sixte dit qu’elle pourrait vouloir davantage. Moi, j’pensais qu’on était sur le moins-disant. Mais c’est terrible pasque j’ai pas de réponse, pasque y’en a pas, que j’suis humain malgré mes yeux qui tirent sur le doré, et la magie qui m’accompagne de plus en plus. Qu’est-ce qui se passerait si c’était l’inverse, que je vivais trente millénaires contre son seul ? Est-ce que ça serait une perte de temps pour la personne qui aurait l’éternité devant elle ? Est-ce qu’elle aurait l’impression de prendre un animal de compagnie, un chien de berger affectueux et présent une fraction de sa vie ?
Est-ce que je suis un bichon ? Ha.
« Euh, je... »
J’ai pas mieux comme réponse sur le coup. Puis elle se détourne, fait difficilement les cent pas dans mon petit salon. Elle évite les meubles qui traînent, me frôle dans l’espace pas si grand, effleure le chambranle qui mène à la cuisine et celui qui va à la chambre, qu’elle connaît amplement tous les deux maintenant. L’obscurité la gêne plus quand elle s’y déplace la nuit, quand on rentre tard ou qu’elle part tôt, évanouie plus vite que la rosée au soleil et que j’me réveille seul à côté de sa place encore tiède dans une pièce qui n’a plus que l’ombre de son parfum.
J’l’attrape par le bras quand elle passe à côté de moi, j’la force à se tourner dans ma direction, j’fouille son visage, j’essaie de transmettre mes émotions sur le mien.
« Mercenaire veut pas dire criminelle. J’devrais pas donner de leçons là-dessus, t’es pas la seule à avoir trempé dans des histoires pas forcément très glorieuses mais indéniablement profitables, surtout quand c’est un sport national et officiel de l’institution. »
Ça, on peut pas dire qu’on soit les derniers à se jeter dans le grand bain de la corruption, à l’Office. Et j’suis même pas sûr que ce soit notre faute, quand ça nous est soigneusement inculqué par les commissaires, qui le tiennent eux-mêmes des préfets, et autres politiciens et haut-fonctionnaires véreux de notre République. On se coule dans le moule, tout le monde y trouve son compte, et le reste est qu’un gros tas d’hypocrisie à destination de la populace qui se prive d’ailleurs pas de faire la même chose.
« Les histoires avec Zelevas et Mortifère, c’était... Je pouvais pas savoir que ça allait finir comme ça. »
Le sous-entendu, c’est la mort de Mirelda, l’enquête menée tambour battant ensuite par le neveu de sa tatie, le SCAR, Rockraven qui s’en mêle. Mais c’est pas l’entière vérité. C’est aussi l’attaque sur Sixte, qui s’échoue chez moi. C’est Mortifère, allongé sans bras dans la boue sur une montagne dévastée, qui hurle dans mon dos alors que j’clopine pour rentrer chez moi me faire rafistoler.
« C’était trop gros pour moi... et pour toi. C’est ça, la seule leçon à en tirer. Que j’étais trop balloté par le courant pour faire autre chose que le subir. »
Les puissants, ils l’ont tranquille, à décréter que j’mérite une punition. Mais si j’avais bossé pour Goldheart comme Sixte au lieu de d’Elusie, tout le monde m’aurait félicité et se serait battu pour me rendre les honneurs. Juste que le gambit du vieux lion a échoué, et qu’il a fini au Razkaal. J’suppose que si j’avais mouillé davantage, j’aurais pu être son voisin de cellule, et le coffre rempli d’or à la Banque des Chaînes m’aurait fait une belle jambe. La moralité, c’est qu’il faut que j’assure mes arrières pour pas me retrouver à nouveau dans la même situation.
Puis j’laisse retomber mes bras le long de mon corps en baissant la tête.
« La vérité vraie, c’est que j’ai pas grand-chose à offrir à part moi-même pour le temps qu’il y a. »
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Sixte V. Amala
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Race: Elfe (mi-ange)
Vocation: Guerrier assassin
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Quand lui était venu cette fâcheuse tendance à vouloir tout prévoir ? Sixte était depuis bien longtemps un électron libre. Elle avait délaissé ses habitudes militaires plus d’une cinquantaine d’années auparavant. Les mutilations qui lui avaient été infligées avaient suffi à balayer plus d’un siècle d’automatisme et de rigueur. Dès lors l’elfe s’était mué en un spectre qui ne se souciait ni du lendemain, ni même de l’heure suivante, elle existait et c’était tout. La noble épouse qu’elle avait été s’était volatilisée pour devenir la Sixte d’aujourd’hui, celle dont le nom et encore moins le visage ne parlait à personne, celle qui se fondait dans l’ombre sans chercher à ce que l’on retienne sa présence. Depuis, cette vie lui convenait parfaitement. Mais quand cela avait-il commencé à changer ? Quand avait-elle commencé à vouloir que son nom soit sur ses lèvres ? Qu’il se souvienne de son visage autant qu’elle du sien ? Quand avait-elle recommencé à s’inquiéter de ce que demain pourrait lui apporter ? Et surtout, quand avait-elle à nouveau songé à se lier à qui que ce soit. Pancrace avait été une distraction, un confort et une chambre qui assouvissait ses désirs lorsqu’elle en avait besoin. Parfois, il était tard lorsqu’elle se glissait par la fenêtre qu’il avait laissée ouverte à son intention, d’autres fois il était tôt lorsqu’elle venait à sa rencontre après l’une de ses patrouilles. Avec lui, elle avait été oublieuse du temps qui passe, oublieuse d’elle mais consciente de lui. Et c’était sans doute là son erreur.
- Je sais, répondit-elle simplement d’une voix laconique alors que son regard fouillait le visage de Pancrace autant que lui le faisait.
L’inquiétude qu’elle y décela lui cloua le bec.
La mention de Mortifère, elle, eut le mérite de l’arracher à son hébétude. Le frisson familier vint se lover contre sa nuque, rampa le long de sa colonne et lui mordit les reins en lui donnant la nausée. Tant qu’il ne serait pas mort, elle ne serait jamais tranquille, c’était une certitude et si par bonheur les dieux le remettaient sur sa route, Sixte avait juré de le tuer de ses propres mains. Et si ce n’était pas elle, alors ce serait lui. Dans un cas comme dans l’autre, leur prochaine rencontre signerait probablement la fin de toutes ses angoisses.
- Je ne te le reproche pas. Avec ou sans toi, le résultat aurait été le même. Et Sixte le pensait, son choix de se ranger aux côtés d’Azura et d’enquêter sur Zelevas, qui l’avait immanquablement menée Mortifère, était un choix personnel dans lequel Pancrace n’avait rien à voir. Tout comme l’enquête sur la mort de Mirelda, leur deux présences avaient été requises, pas calculées.
La main du jeune homme glissa le long de son bras et elle regretta bientôt la chaleur de sa poigne sur sa peau. Pour autant, elle ne le retint pas.
Qu’il avait l’air misérable, la tête ainsi baissée. Ses derniers mots l’étaient tout autant et Sixte ne savait que faire d’un tel aveux. Ironiquement, il agitait quelque chose dans sa poitrine et dans son estomac. Une sensation douce-amère qui était à la fois un supplice et un délice. Malgré tout, Sixte restait immobile comme figée dans le temps. Son visage de marbre dont seule les paupières s'agitaient à intervalles réguliers ne laissait filtrer aucune émotion. La raison aurait voulu qu’elle le laisse là, planté dans son salon. C’était ce qu’elle avait prévu de faire. Cette entrevue avait d’ailleurs trop duré. Le plan initial était pourtant simple : elle retrouvait Pancrace, mettait un terme à leur relation puis s’en retournait à la vie qu’elle menait depuis un demi siècle. Débarrassée des problèmes que leur relation avait apportés, des risques si l’un se retrouvait sur la tableau de chasse de l'autre, de s’entrainer mutuellement dans une chute vertigineuse où pire encore ; de s’aimer. Mais elle l’avait laissée faire, elle avait écouté ses arguments, elle avait lu dans son regard des émotions qu’elle n’était pas certaine de se réjouir d’y voir. Elle avait entendu son raisonnement et pire encore une part d’elle partageait cet avis. Une partie d’elle qui lui hurlait qu’elle pouvait continuer comme ça encore longtemps, qu’elle pouvait tirer de lui tout ce qu’il avait à lui offrir jusqu’à ce qu’il n’y ait plus une once de quoi que ce soit à récupérer, jusqu’à ce qu’elle ne voit les prémisses de la mort autour de lui.
- Je…
Mais serait-elle seulement capable de le faire ?
- Je… “Putain.” Grinça-t-elle intérieurement. - Les relations entre humains sont-elles si simples ? Elle fit un pas vers lui. - Vous vous contentez de ce que la vie vous offre, ce que l’autre veut bien vous donner, pour la durée ridicule que vous partagez. C’est sans doute plus facile, quand on est préparé à vivre des choses courtes pour le temps que l’on a. Une simple constatation. Sixte commençait à comprendre la nature volage des humains, la manie qu’ils avaient de changer de vie sans s’en émouvoir, d’aimer aussi vite qu’ils étaient capable de détester. Mais en était-elle capable ? De se plier à cette règle précaire, de jouer dans la même cour que Pancrace, d’accepter les risques qu’impliquerait d’être à ses côtés -même pour un temps- ? En temps normal, Sixte aurait répondu que oui. C’était sa vie depuis longtemps. Mais cela n’avait jamais impliqué ses sentiments, ni qui que ce soit d’autre. Durant un instant, son esprit s’égara par delà la République, plusieurs décennies en arrière. A une époque où son ami était devenu son amour. La douleur avait été pansée depuis fort longtemps mais elle était indubitablement marquée au fer rouge dans sa mémoire.
- Pourquoi tu tiens tant à nous ? Sa main glissa, d’abord hésitante, le long de la mâchoire de Pancrace sans chercher à lui relever le menton. - Je ne sais pas quoi faire. Et c’était vrai. Elle ne savait pas ce qu’ils étaient, ni ce qu’elle ressentait réellement à son encontre, encore moins ce qu’elle aurait dû ressentir. Tout ce dont elle était certaine c’est que son choix, celui de mettre un terme à leur relation, lui broyait la poitrine. Son pouce caressa sa pommette. - Pourquoi les choses sont toujours plus compliquées lorsqu’il s’agit de toi ?
- Je sais, répondit-elle simplement d’une voix laconique alors que son regard fouillait le visage de Pancrace autant que lui le faisait.
L’inquiétude qu’elle y décela lui cloua le bec.
La mention de Mortifère, elle, eut le mérite de l’arracher à son hébétude. Le frisson familier vint se lover contre sa nuque, rampa le long de sa colonne et lui mordit les reins en lui donnant la nausée. Tant qu’il ne serait pas mort, elle ne serait jamais tranquille, c’était une certitude et si par bonheur les dieux le remettaient sur sa route, Sixte avait juré de le tuer de ses propres mains. Et si ce n’était pas elle, alors ce serait lui. Dans un cas comme dans l’autre, leur prochaine rencontre signerait probablement la fin de toutes ses angoisses.
- Je ne te le reproche pas. Avec ou sans toi, le résultat aurait été le même. Et Sixte le pensait, son choix de se ranger aux côtés d’Azura et d’enquêter sur Zelevas, qui l’avait immanquablement menée Mortifère, était un choix personnel dans lequel Pancrace n’avait rien à voir. Tout comme l’enquête sur la mort de Mirelda, leur deux présences avaient été requises, pas calculées.
La main du jeune homme glissa le long de son bras et elle regretta bientôt la chaleur de sa poigne sur sa peau. Pour autant, elle ne le retint pas.
Qu’il avait l’air misérable, la tête ainsi baissée. Ses derniers mots l’étaient tout autant et Sixte ne savait que faire d’un tel aveux. Ironiquement, il agitait quelque chose dans sa poitrine et dans son estomac. Une sensation douce-amère qui était à la fois un supplice et un délice. Malgré tout, Sixte restait immobile comme figée dans le temps. Son visage de marbre dont seule les paupières s'agitaient à intervalles réguliers ne laissait filtrer aucune émotion. La raison aurait voulu qu’elle le laisse là, planté dans son salon. C’était ce qu’elle avait prévu de faire. Cette entrevue avait d’ailleurs trop duré. Le plan initial était pourtant simple : elle retrouvait Pancrace, mettait un terme à leur relation puis s’en retournait à la vie qu’elle menait depuis un demi siècle. Débarrassée des problèmes que leur relation avait apportés, des risques si l’un se retrouvait sur la tableau de chasse de l'autre, de s’entrainer mutuellement dans une chute vertigineuse où pire encore ; de s’aimer. Mais elle l’avait laissée faire, elle avait écouté ses arguments, elle avait lu dans son regard des émotions qu’elle n’était pas certaine de se réjouir d’y voir. Elle avait entendu son raisonnement et pire encore une part d’elle partageait cet avis. Une partie d’elle qui lui hurlait qu’elle pouvait continuer comme ça encore longtemps, qu’elle pouvait tirer de lui tout ce qu’il avait à lui offrir jusqu’à ce qu’il n’y ait plus une once de quoi que ce soit à récupérer, jusqu’à ce qu’elle ne voit les prémisses de la mort autour de lui.
- Je…
Mais serait-elle seulement capable de le faire ?
- Je… “Putain.” Grinça-t-elle intérieurement. - Les relations entre humains sont-elles si simples ? Elle fit un pas vers lui. - Vous vous contentez de ce que la vie vous offre, ce que l’autre veut bien vous donner, pour la durée ridicule que vous partagez. C’est sans doute plus facile, quand on est préparé à vivre des choses courtes pour le temps que l’on a. Une simple constatation. Sixte commençait à comprendre la nature volage des humains, la manie qu’ils avaient de changer de vie sans s’en émouvoir, d’aimer aussi vite qu’ils étaient capable de détester. Mais en était-elle capable ? De se plier à cette règle précaire, de jouer dans la même cour que Pancrace, d’accepter les risques qu’impliquerait d’être à ses côtés -même pour un temps- ? En temps normal, Sixte aurait répondu que oui. C’était sa vie depuis longtemps. Mais cela n’avait jamais impliqué ses sentiments, ni qui que ce soit d’autre. Durant un instant, son esprit s’égara par delà la République, plusieurs décennies en arrière. A une époque où son ami était devenu son amour. La douleur avait été pansée depuis fort longtemps mais elle était indubitablement marquée au fer rouge dans sa mémoire.
- Pourquoi tu tiens tant à nous ? Sa main glissa, d’abord hésitante, le long de la mâchoire de Pancrace sans chercher à lui relever le menton. - Je ne sais pas quoi faire. Et c’était vrai. Elle ne savait pas ce qu’ils étaient, ni ce qu’elle ressentait réellement à son encontre, encore moins ce qu’elle aurait dû ressentir. Tout ce dont elle était certaine c’est que son choix, celui de mettre un terme à leur relation, lui broyait la poitrine. Son pouce caressa sa pommette. - Pourquoi les choses sont toujours plus compliquées lorsqu’il s’agit de toi ?
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Pancrace Dosian
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Avec un soupir mental de soulagement, j’note que mes arguments ont l’air de commencer à porter leurs fruits. Une relation basée sur le plaisir comme la notre l’a -trop ?- longtemps été pouvait difficilement être insensible à des arguments en ce sens. Et si dans dix ans, j’suis moche et vieux et qu’elle se barre pour en trouver un qui aurait l’air aussi frais qu’elle, j’pourrais pas dire que j’l’avais pas vu venir. J’me le note pour mon moi du futur. Histoire de pas avoir l’air trop surpris. Quand elle s’approche, j’retiens un petit rire d’exaltation, et l’envie de la prendre dans mes bras pour la faire tourner à travers la pièce.
La victoire est encore fragile, et j’ai l’impression qu’une phrase maladroite, le mauvais mot, un trait d’humour un peu aigre ou cinglant, tout ça pourrait faire basculer Sixte dans l’autre sens, celui qu’elle semble avoir prévu au début quand elle est venue pour me larguer. Hé, avec tout ça, j’maintiens ma série de ruptures en ma faveur, ce qui est toujours plus agréable que l’inverse. C’est un petit plaisir qui se maintient difficilement, quand on sait pas ce que l’avenir nous réserve.
« Ha. Haha. Non, elles sont pas aussi simples que ça. Elles sont aussi compliquées que toutes les autres, même. Plus courtes, à la rigueur, pour des raisons évidentes. Encore que les hybrides ou les gobelins... »
Mais c’est pas le sujet.
La question, c’est pourquoi, et ça fait un moment que je me la pose. Elle était pas là au début, ni même au milieu. Puis y’a eu l’altercation avec Mortifère, ma réaction soudaine, et son corps désossé sur une montagne à côté de Justice. Ça serait trop facile de dire que c’est juste la réaction machiste qu’on a quand quelqu’un touche à quelque chose qui nous appartient. Mais vu que j’ai jamais pensé ça de Sixte, tout comme je la vois pas comme une petite créature à protéger, le voile derrière lequel se cacher a pas tenu bien longtemps.
Bon, enfin, contre Mortifère, peut-être quand même un peu. Puis ne rien faire, c’était prendre le risque que ça se reproduise, en pire.
Puis l’attaque de Liberty, c’était rebelote. Je savais pas qu’elle était là, et ça m’est pas venu à l’idée de chercher sa présence en ville pendant que l’Assemblée nous attaquait. J’avais assez à faire, faut bien le dire. Mais la retrouver au milieu des décombres et des inondations, indemne ou presque, ça m’a levé un poids du coeur que j’savais même pas que j’avais. La disparition qui a suivi a fait qu’empirer les choses, et c’est là que j’me suis mis à cogiter.
Les capitaines de la GAR m’avaient pourtant averti : trop réfléchir, c’est pas bon pour un soldat. Après, ça se pose des questions, ça discute les ordres, et ça finit en cour martiale ou officier. J’ai choisi la seconde option, mais version républicaine. Bref, il a fallu se rendre à l’évidence : elle me manquait. Et pas que le cul.
Son contact sur ma peau est électrique, et j’vois que si je pensais la victoire chèrement acquise, on est plutôt sur la ligne de crête. Je sais pas bien si j’ai d’autres bons arguments en stock, mais l’improvisation me réussit plutôt bien jusque-là, puis... puis si elle hésite, c’est qu’elle a déjà fait un demi-pas dans la bonne direction. Enfin, bonne... celle qui me convient le mieux, quoi. Et si j’ai l’impression, moi, d’avoir fait beaucoup de pas, et d’avoir mis mon coeur à nu, j’ai bien l’impression que c’est là qu’elle a du mal. Des décennies à passer en fantôme dans toutes les villes de République et peut-être d’ailleurs, à tisser des liens que professionnels et commerciaux, j’suppose que ça laisse des traces.
Ça ressemble aussi à un mécanisme de protection contre soi-même. Mais c’est p’tet pas le moment de le dire, si tant est que y’en ait un.
« Je tiens à nous pasque... Pasque... »
C’est pas tant que les mots se bousculent qu’ils viennent pas, puis soudainement c’est l’illumination.
« Ce qui vaut la peine nécessite généralement de se battre pour. Ou, en tout cas, j’ai rarement vu et vécu autre chose, pour ce que ça vaut. »
P’tite tape sur l’épaule dans ma tête. Bien envoyé, ça.
A part si elle se dit qu’elle a pas besoin de lutter bien fort pour m’avoir, et que du coup, ça vaut pas un clou. Mais ça serait retourner salement l’argument, puis on en serait pas là si c’était le cas. Nan, ce que j’ai, j’l’ai arraché à la vie à pleine poigne, et si on m’a repris mon insigne de capitaine, on m’a pas repris le reste : les connaissances, le réseau, la richesse dans mon coffre à la Banque des Chaînes, et la magie. La magie, d’ailleurs... la porte ouverte vers tout. Vers l’impossible. J’range cette pensée dans un coin pour l’instant.
Pasque faut trouver la nouvelle réponse, et j’ai l’impression de construire un mur brique par brique. Ou le détruire, plutôt, pour essayer d’arriver de l’autre côté. C’est juste que d’habitude, c’est plus pratique avec une téléportation ou un projectile magique. Mais à moins de vouloir voir les cotes blanches et les poumons de Sixte, ça va pas trop bien marcher, et l’idée, c’est plutôt l’inverse. Ma main se porte à la sienne, la pousse doucement contre ma joue. Mes yeux trouvent les siens, à nouveau, J’ai un sourire en coin un peu timide.
« J’dirais bien que c’est pasque j’en vaux justement la peine, mais c’est plutôt que rien n’est jamais si simple qu’on croit, ou c’est qu’on veut du simpliste exprès. »
Nan puis bon, au bout d’un moment, faut bien se rendre à l’évidence, alors j’pousse un soupir dans lequel j’ai l’impression de me dégonfler totalement, alors même que, dans une bribe que j’qualifierais pas de courage mais plutôt de désespoir, j’lâche.
« Puis surtout, j’crois bien que je t’aime. »
Allez, au moins, au pire, j’ai de l’alcool dans le placard, pour essayer d’oublier cette soirée...
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Sixte V. Amala
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“Ça tourne mal.” Souffla une petite voix dans l’esprit de Sixte, qu’elle ignora ostensiblement. Elle en avait conscience, presque trop d’ailleurs. Sa volonté ne tenait qu’à un fil, restait à savoir laquelle ; celle qui hurlait à son instinct de tourner les talons ou celle qui lui intimait de rester les pieds bien plantés dans le parquet du petit appartement. Des émotions contradictoires se disputaient la part du lion. Elle avait envie de le repousser, de le gifler, de l’envoyer sur les roses, de lui dire que jamais plus ils ne se verraient, qu’elle y veillerait minutieusement. Mais elle avait aussi envie de le faire taire d’un baiser, de le garder égoïstement pour elle ou de se lover entre ses bras qui l’avaient déjà étreint maintes fois et où elle se sentait parfaitement à sa place. Elle avait envie de haïr le temps qui passe et de détester sa nature humaine et fragile ou la sienne, presque immortelle qui l’empêchait de faner. C’était plutôt en ce sens, d'ailleurs. Sixte avait longtemps envié les Hommes, trouvant l’existence des elfes bien trop longue. Elle n’avait jamais eu l’envie de mourir de sa propre main mais cela ne l’avait jamais empêché de détester les années de vie qu’il lui restait à vivre. L’ironie voulait qu’elle se retrouve, aujourd’hui, à rejeter l’une de ces créatures en lui reprochant cette vulnérabilité. Un rictus déforma, l’espace d’un instant, son joli visage. L’univers se foutait clairement de sa gueule. La vie était une ingrate et Sixte ne l’aimait guère. Elle s’en accommodait tout au plus, en attendant sagement celui -ou celle- dont la lame saurait surpasser la sienne et mettre un terme à cette existence sans fin.
La main de Pancrace sur la sienne avait le mérite d’adoucir l'amertume que cette constatation lui laissait en bouche. Et Sixte se rendit compte qu’elle ne voulait pas qu’il la lâche, ni qu’il cesse de la regarder. Si le temps s’était brusquement arrêté, elle n’aurait rien fait pour le faire redémarrer. Pour cela, elle ne put s’empêcher de se traiter d’imbécile. Et peut-être aurait-elle dû ajouter égoïste et cruelle à la longue liste de ses qualités car c’était lui, finalement, qui avait plus à perdre. Oh évidemment, la jeune femme n’était pas sans savoir les risques qu’elle prenait, les peines qu’elle allait s’infliger. Les amours des Hommes et ceux des Elfes, s’ils étaient similaires pouvaient s’avérer aussi très différents. Pancrace pouvait lui fendre le cœur pour plusieurs décennies s’il s’y prenait bien mais Sixte pouvait lui voler sa vie. Elle pouvait lui dérober ses plus belles années. Lui arracher sa jeunesse, s’en abreuver autant qu’elle le pourait. Elle était libre de s’en aller dès que la vieillesse poindrait pour ne lui laisser que des souvenirs, un avenir terni par la solitude et ses yeux pour pleurer.
C’aurait dû être lui. C’aurait dû être à Pancrace de la rejeter. Pourtant il ne s’y était jamais résolu et même aujourd’hui, mit face à la réalité de leur relation, il persistait et s’entêtait à préserver ce lien fragile qu’ils avaient forgés. Qui était-elle pour lui forcer la main ? Pouvait-elle le forcer à changer d’avis ? Peut-être aurait-elle pu prétexter de l’immaturité. Hélas, leur différence d’âge n’était guère une excuse, Pancrace n’était pas un enfant incapable de saisir la portée de ses choix.
Sur le point d’ouvrir la bouche pour lui répondre, elle resta bouche bée.
- Tu… Quoi ? Sa voix n’était plus qu’un filet d’air dérisoire. Comme si quelqu’un s’était amusé à vider l’air de ses poumons avec une paille. Ses yeux, qui n’avaient pas quitté les siens, les sondèrent encore et encore, prêt à déceler un mensonge ou une quelconque fourberie. Elle le regardait s’attendant presque à ce qu’il éclate de rire et lui donne une tape sur l’épaule suivi d’un “ahah, si tu pouvais voir ta tête”.
- Tu m’aimes ? Répéta-t-elle en cillant, son regard se déroba au sien pour aller balayer le sol et sa main fit machine arrière pour venir se lover contre sa poitrine. Quel autre sentiment aurait pu contraindre un homme comme Pancrace, dont le charme n’était plus à prouver, à s’accrocher à une relation aussi inégale que la leur après tout ? Relevant la tête, la demi-sang se demanda quand est-ce que leur relation avait pris une tournure si différente. Etait-ce lorsqu'elle avait commencé à s’attarder pour le petit déjeuner ? Lorsque ses passages chez lui étaient devenus des rendez-vous réguliers ? Quand elle avait remarqué que ses nuits étaient plus douces lorsqu’elle ne dormait pas seule ?
“Mais tu ne me connais même pas.” Voulu-t-elle répondre. Non pas qu’elle eut grand chose à cacher ; bâtarde difforme, noble parce qu'on n'a pas pu se résoudre à lui réserver le même sort que sa mère. Mariée par amitié, veuve par amour. Devenue, en vieillissant, trop craintive des autres pour leur donner son véritable nom. La raison aurait voulu qu’elle lui avoue, qu’elle lui donne au moins son nom -le vrai-, qu’elle crève immédiatement cet abcès qui, un jour, peut-être, leur causerait du tort. Mais Sixte était couarde, quoi qu’on en dise. Sa vie n’était qu’une succession de fuite, de dissimulation et de mensonges. Alors plus que des mots qui ne feraient que l’enliser gauchement dans un discours sans queue ni tête, elle franchit l’unique pas qui la séparait de lui et leva les yeux vers les siens. Ses mains aux doigts fins mais calleux vinrent encercler ses joues.
- Tu n’as aucun instinct de préservation Pancrace Dosian, murmura-t-elle. De la même manière qu’un peu plus tôt, elle caressa ses pommettes du pouce et l’esquisse d’un sourire courba ses lèvres. Il l’aimait. - Embrasse moi. Supplia-t-elle.
Qu’il l’embrasse jusqu’à la rendre malade, jusqu’à ce qu’elle en oublie son propre prénom pour n’avoir plus que le sien sur la langue. Qu’il lui fasse oublier à quel point elle était menteuse et lâche, qu’il lui fasse oublier qu’elle pouvait changer d’avis, qu’il oublie qu’il le pouvait aussi. Elle n’était pas capable de lui donner la vérité qu’il méritait, encore moins de s’ouvrir à lui de la même manière que lui le faisait. L’aimait-elle ? Se souvenait-elle seulement de ce que cela faisait de tomber amoureux ? L’était-elle ? La réponse était terrifiante.
La main de Pancrace sur la sienne avait le mérite d’adoucir l'amertume que cette constatation lui laissait en bouche. Et Sixte se rendit compte qu’elle ne voulait pas qu’il la lâche, ni qu’il cesse de la regarder. Si le temps s’était brusquement arrêté, elle n’aurait rien fait pour le faire redémarrer. Pour cela, elle ne put s’empêcher de se traiter d’imbécile. Et peut-être aurait-elle dû ajouter égoïste et cruelle à la longue liste de ses qualités car c’était lui, finalement, qui avait plus à perdre. Oh évidemment, la jeune femme n’était pas sans savoir les risques qu’elle prenait, les peines qu’elle allait s’infliger. Les amours des Hommes et ceux des Elfes, s’ils étaient similaires pouvaient s’avérer aussi très différents. Pancrace pouvait lui fendre le cœur pour plusieurs décennies s’il s’y prenait bien mais Sixte pouvait lui voler sa vie. Elle pouvait lui dérober ses plus belles années. Lui arracher sa jeunesse, s’en abreuver autant qu’elle le pourait. Elle était libre de s’en aller dès que la vieillesse poindrait pour ne lui laisser que des souvenirs, un avenir terni par la solitude et ses yeux pour pleurer.
C’aurait dû être lui. C’aurait dû être à Pancrace de la rejeter. Pourtant il ne s’y était jamais résolu et même aujourd’hui, mit face à la réalité de leur relation, il persistait et s’entêtait à préserver ce lien fragile qu’ils avaient forgés. Qui était-elle pour lui forcer la main ? Pouvait-elle le forcer à changer d’avis ? Peut-être aurait-elle pu prétexter de l’immaturité. Hélas, leur différence d’âge n’était guère une excuse, Pancrace n’était pas un enfant incapable de saisir la portée de ses choix.
Sur le point d’ouvrir la bouche pour lui répondre, elle resta bouche bée.
- Tu… Quoi ? Sa voix n’était plus qu’un filet d’air dérisoire. Comme si quelqu’un s’était amusé à vider l’air de ses poumons avec une paille. Ses yeux, qui n’avaient pas quitté les siens, les sondèrent encore et encore, prêt à déceler un mensonge ou une quelconque fourberie. Elle le regardait s’attendant presque à ce qu’il éclate de rire et lui donne une tape sur l’épaule suivi d’un “ahah, si tu pouvais voir ta tête”.
- Tu m’aimes ? Répéta-t-elle en cillant, son regard se déroba au sien pour aller balayer le sol et sa main fit machine arrière pour venir se lover contre sa poitrine. Quel autre sentiment aurait pu contraindre un homme comme Pancrace, dont le charme n’était plus à prouver, à s’accrocher à une relation aussi inégale que la leur après tout ? Relevant la tête, la demi-sang se demanda quand est-ce que leur relation avait pris une tournure si différente. Etait-ce lorsqu'elle avait commencé à s’attarder pour le petit déjeuner ? Lorsque ses passages chez lui étaient devenus des rendez-vous réguliers ? Quand elle avait remarqué que ses nuits étaient plus douces lorsqu’elle ne dormait pas seule ?
“Mais tu ne me connais même pas.” Voulu-t-elle répondre. Non pas qu’elle eut grand chose à cacher ; bâtarde difforme, noble parce qu'on n'a pas pu se résoudre à lui réserver le même sort que sa mère. Mariée par amitié, veuve par amour. Devenue, en vieillissant, trop craintive des autres pour leur donner son véritable nom. La raison aurait voulu qu’elle lui avoue, qu’elle lui donne au moins son nom -le vrai-, qu’elle crève immédiatement cet abcès qui, un jour, peut-être, leur causerait du tort. Mais Sixte était couarde, quoi qu’on en dise. Sa vie n’était qu’une succession de fuite, de dissimulation et de mensonges. Alors plus que des mots qui ne feraient que l’enliser gauchement dans un discours sans queue ni tête, elle franchit l’unique pas qui la séparait de lui et leva les yeux vers les siens. Ses mains aux doigts fins mais calleux vinrent encercler ses joues.
- Tu n’as aucun instinct de préservation Pancrace Dosian, murmura-t-elle. De la même manière qu’un peu plus tôt, elle caressa ses pommettes du pouce et l’esquisse d’un sourire courba ses lèvres. Il l’aimait. - Embrasse moi. Supplia-t-elle.
Qu’il l’embrasse jusqu’à la rendre malade, jusqu’à ce qu’elle en oublie son propre prénom pour n’avoir plus que le sien sur la langue. Qu’il lui fasse oublier à quel point elle était menteuse et lâche, qu’il lui fasse oublier qu’elle pouvait changer d’avis, qu’il oublie qu’il le pouvait aussi. Elle n’était pas capable de lui donner la vérité qu’il méritait, encore moins de s’ouvrir à lui de la même manière que lui le faisait. L’aimait-elle ? Se souvenait-elle seulement de ce que cela faisait de tomber amoureux ? L’était-elle ? La réponse était terrifiante.
Citoyen de La République
Pancrace Dosian
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Finalement, c’est la dernière carte jouée, celle cachée tout au fond de la pioche, qui aura servi à porter l’ultime estocade. Je peux pas dire que j’apprécie le sentiment de vulnérabilité qui a accompagné l’annonce, et j’aurais préféré pouvoir me rouler en boule autour de moi-même, fermer les yeux et espérer que rien de tout ça n’ait eu lieu. Et, pourtant, y’a un côté défoulant à l’avoir lâché, et plus avoir le contrôle de ce qui va se passer ensuite, d’avoir le sentiment qu’on s’est vidé -le coeur et les sentiments- et qu’on a fait tout ce qu’il était possible de faire.
Comme ça tourne bien, j’ai pas envie de creuser un trou de six mètres et me foutre en l’air dedans.
Ses lèvres s’écrasent sur les miennes, avec une avidité qui me surprend un peu, et le soulagement prend le pas sur tout le reste. J’aurais bien dit que mon instinct de préservation marchait au poil, et que c’est juste Sixte qui manque singulièrement de confiance en elle et en nous. Mais j’ai la bouche pleine de sa langue et émettre le moindre son intelligible est difficile. Je la serre dans mes bras, jusqu’à ce qu’elle soit complètement dans mon étreinte, blottie contre ma poitrine. J’ai envie de forcer comme pour l’enfoncer en moi et la garder tout près, mais j’me contrôle encore. C’est pas le but de lui casser les côtes.
Juste les pattes.
Pasqu’il faut bien rigoler un peu, parfois.
Alors qu’on s’embrasse et que ses mains courent sur mes joues, mes épaules, mon torse, une p’tite voix peut pas s’empêcher de remarquer qu’elle a pas répondu à ma déclaration, et un bisou, aussi enflammé soit-il, c’est une esquive facile. Mais j’sais aussi qu’on peut pas forcer ce genre de trucs, et, à choisir, j’préfère qu’elle prenne son temps et le dise quand elle se sent prête. Si ça arrive un jour. Et sinon ? Ben, on aura passé un bon moment, j’suppose. C’est pas comme si j’étais pas déjà ferré, après tout.
J’ai déjà suffisamment répondu la pareille sans la moindre conviction intérieure quand on me l’annonçait ou au plus fort des ébats pour me dire que j’ai pas envie qu’on me fasse la même, après tout. Encore qu’en plein pendant l’acte, c’était p’tet le moment où j’mentais le moins, ou même dans les secondes qui suivaient.
Ma main droite se perd dans son épaisse chevelure blonde, lui caresse la joue, je suce sur sa langue, elle mordille ma lèvre et la tension monte d’un cran, comme si un poids s’envolait petit à petit, loin de ce qui pesait au creux de mon bide depuis que j’l’ai vue à la sortie du commissariat. Mais contrairement à ce que j’ai dit plus tôt, qu’est-ce qui se passe si au bout de six mois, un an ou trois, y’a plus rien, et qu’on se sépare bêtement ?
Enfin, que je me sépare, lassé ou plus intéressé, pour aller courir la gueuse ailleurs.
Tout ça paraîtrait si vain, au final, les embrouilles et les hésitations, les atermoiements et les argumentaires. J’aurais fait signer une elfe prête à l’éternité relative d’un millénaire pour celle relative d’un humain, aussi changeant que toutes les girouettes de sa race. D’un autre côté, on peut pas me demander de me projeter aussi loin. Qu’est-ce que je peux en savoir, après tout ? Y’a deux ans, tout roulait au poil et on était tranquille, puis on a eu coup sur coup l’attaque de Kaizoku, celle de Liberty, et les Titans qui se sont réveillés un peu avant. Nan, vraiment, difficile de savoir de quoi demain sera fait. Puis trop se focaliser là-dessus, c’est une prophétie auto-réalisatrice, le meilleur moyen de tout faire foirer.
Faut juste se laisser vivre.
J’soulève Sixte pour la déposer sur le plumard, m’asseoir à côté d’elle. J’emmêle mes doigts dans les siens.
« Alors c’est bon ? On essaye, pour ce que ça vaut ? Tu vas pas... disparaître à l’improviste ? »
Je dis pas qu’on doit se marier, pondre dix chiards et se couper du reste du monde, mais juste se tenir au courant un peu vaguement et d’avoir l’assurance que ça va revenir.
« J’sais que tu vas pas arrêter de voyager. C’est pas non plus... ce que j’demande. »
Ça serait un coup à ce que j’étouffe, de l’avoir tout le temps fourrée dans mes pattes.
« Juste l’assurance que tu reviendras, une vague idée de ce que tu fais, je veux dire ? »
En général, les gens qu’ont la bougeotte, ça leur passe pas comme ça, surtout après des siècles d’entraînement.
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Sixte V. Amala
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Info personnage
Race: Elfe (mi-ange)
Vocation: Guerrier assassin
Alignement: Chaotique Neutre
Rang: D
Rien n’était jamais moins sûr que l’incertain et rien n’était moins certain que les deux êtres qui se tenaient l’un contre l’autre. Sixte le savait et malgré le choix qu’elle avait consenti à faire, une part d’elle ne pouvait s’empêcher de craindre ce qu’elle avait à perdre. Plus que la perte ; la douleur. Néanmoins et non sans avoir dû lutter contre ses réflexes de fuite les plus primaires, elle ne voulait pas regretter de ne pas avoir essayé. C’était encore une idée qu’elle avait du mal à digérer, celle de laisser ses sentiments entre les mains d’une créature aussi inconstante de par sa nature mais aussi son caractère mais c’était un risque qu’elle pouvait encourir lorsqu’elle mesurait celui que lui prenait. C’était probablement l’une des seule chose qui l’avait empêchée d’aller au bout du choix qu’elle avait fait, le premier. Ca et l’amour qu’il lui portait. Evidemment elle avait songé qu’il pouvait lui mentir lorsqu’elle l’avait embrassé avec le désespoir de celle qui pense ne plus pouvoir être aimée. Elle s’était demandé si ce n’était pas simplement une autre de ces manipulations. Comme cette nuit-là, la première qu’ils avaient partagé et où il lui avait dérobé la pochette. Elle savait à quelles genres de bassesses pouvaient se prêter les hommes -de toutes les races- pour conserver ce qu’ils avaient déjà. Mais elle aimait croire que Pancrace ne lui ferait pas un tel affront. Hélas, il n’existait aucun moyen de le savoir. Seuls ses mots, ses actes et le temps qui passe seraient révélateurs.
Ses bras s’enroulèrent autour de sa nuque pendant que ses mains allèrent se perdre dans la masse de ses cheveux bruns. Délaissant ses lèvres non sans regret, elle embrassa l'angle de sa mâchoire avec une affection qu’elle n'essayait pas de dissimuler. Si les mots peinaient à l’exprimer, pouvait-elle au moins la lui faire ressentir. Enfin, ils trouvèrent les bords du lit qu’elle connaissait désormais trop bien mais dont son odeur s’était estompée des draps. Elle le laissa jouer avec ses doigts en lui prêtant une oreille attentive.
- Je ne vais pas… Disparaître à l’improviste. Une promesse qu’elle n’était toutefois pas certaine de pouvoir tenir mais qu’elle comptait essayer. La fuite était pour elle un mode de vie, la réponse à tous les problèmes de son existence ; elle avait fuit sa famille au profit de l’armée, elle s'était enfuit de son propre mariage, fuit Melorn, fuit Kaizoku, fuit le Reike et ensuite, elle l’avait fuit lui. Sa vie n’était qu’une succession de sauve-qui-peut qui, pour l’heure, lui avaient été profitable. Une habitude qui était ancrée en elle et à laquelle, au moins pour un temps, elle allait devoir renoncer. Cela lui déplaisait mais elle n’était pas sans savoir que si elle voulait donner ne serait-ce qu’une chance à cette relation, elle devrait en passer par là. Gardant ses doigts entrelacés avec ceux de Pancrace, elle se laissa tomber en arrière dans un bruit de frottement et de tissu. - Je suis prête à essayer. Pour nous deux je veux dire et pour mes… Absences. Les yeux rivés au plafond, elle se concentra sur la chaleur qui émanait de sa main. - Balayer des années d’habitudes, je ne te promets pas que ce sera facile. Ca ne le serait pas, encore moins lorsque des temps plus difficiles se profileraient à l’horizon, ni quand leurs fiertés respectives rentreraient en conflits car elles le feraient ça ne faisait aucun doute. Mais Sixte n’était pas prête à se pencher sur la question maintenant, le temps d'y revenir viendrait bien assez tôt. Doucement, elle l'attira vers elle. Lorsqu’il l’a surplomba, elle fit glisser sa jambe le long de sa cuisse et libéra sa main pour que les siennes viennent redessiner les contours de ses épaules. Il lui était étrange de se dire qu’elle avait failli ne jamais plus s’étendre sur ce lit, dans ces draps, sous son poids.
- Quant à toi, ne me trahis pas. Murmura-t-elle du bout des lèvres. - Quitte moi si ça te chante. Mais ne me mens pas et ne me manipule pas. Je peux accepter beaucoup de choses. Pas ça. Et malgré elle, elle songea à l’homme qui l’avait épousé et qu’elle avait ensuite pleuré pendant des décennies pour découvrir il y avait à peine quelques mois qu’il était encore en vie. Elle le méprisait encore pour cela.
Un soupire lui échappa alors qu’elle s’efforçait de chasser l’amertume que ses pensées faisaient remonter et leva les yeux vers Pancrace au-dessus d'elle. Elle scruta son visage aux lignes parfaites, s’attarda sur sa bouche avant de revenir à ses iris dont l’étrange teinte l’émerveillait toujours.
- Je vais partir à Melorn pendant quelque temps, j’ai des affaires qui m’y attendent. Sa voix était basse, presque pensive. - Viens avec moi. Ajouta-t-elle dans un souffle en se redressant sur ses coudes. Ses lèvres trouvèrent naturellement le chemin de son cou et elle l’embrassa avec une lenteur délicieuse. Baiser après baiser, elle descendit langoureusement jusqu’à sa clavicule qu’elle taquina du bout de la langue.
Peut-être, d’ici là trouverait-elle le courage de lui offrir une bribe de ce qu’avait autrefois été son existence et avec elle, une pièce de plus dans le puzzle de son identité.
Ses bras s’enroulèrent autour de sa nuque pendant que ses mains allèrent se perdre dans la masse de ses cheveux bruns. Délaissant ses lèvres non sans regret, elle embrassa l'angle de sa mâchoire avec une affection qu’elle n'essayait pas de dissimuler. Si les mots peinaient à l’exprimer, pouvait-elle au moins la lui faire ressentir. Enfin, ils trouvèrent les bords du lit qu’elle connaissait désormais trop bien mais dont son odeur s’était estompée des draps. Elle le laissa jouer avec ses doigts en lui prêtant une oreille attentive.
- Je ne vais pas… Disparaître à l’improviste. Une promesse qu’elle n’était toutefois pas certaine de pouvoir tenir mais qu’elle comptait essayer. La fuite était pour elle un mode de vie, la réponse à tous les problèmes de son existence ; elle avait fuit sa famille au profit de l’armée, elle s'était enfuit de son propre mariage, fuit Melorn, fuit Kaizoku, fuit le Reike et ensuite, elle l’avait fuit lui. Sa vie n’était qu’une succession de sauve-qui-peut qui, pour l’heure, lui avaient été profitable. Une habitude qui était ancrée en elle et à laquelle, au moins pour un temps, elle allait devoir renoncer. Cela lui déplaisait mais elle n’était pas sans savoir que si elle voulait donner ne serait-ce qu’une chance à cette relation, elle devrait en passer par là. Gardant ses doigts entrelacés avec ceux de Pancrace, elle se laissa tomber en arrière dans un bruit de frottement et de tissu. - Je suis prête à essayer. Pour nous deux je veux dire et pour mes… Absences. Les yeux rivés au plafond, elle se concentra sur la chaleur qui émanait de sa main. - Balayer des années d’habitudes, je ne te promets pas que ce sera facile. Ca ne le serait pas, encore moins lorsque des temps plus difficiles se profileraient à l’horizon, ni quand leurs fiertés respectives rentreraient en conflits car elles le feraient ça ne faisait aucun doute. Mais Sixte n’était pas prête à se pencher sur la question maintenant, le temps d'y revenir viendrait bien assez tôt. Doucement, elle l'attira vers elle. Lorsqu’il l’a surplomba, elle fit glisser sa jambe le long de sa cuisse et libéra sa main pour que les siennes viennent redessiner les contours de ses épaules. Il lui était étrange de se dire qu’elle avait failli ne jamais plus s’étendre sur ce lit, dans ces draps, sous son poids.
- Quant à toi, ne me trahis pas. Murmura-t-elle du bout des lèvres. - Quitte moi si ça te chante. Mais ne me mens pas et ne me manipule pas. Je peux accepter beaucoup de choses. Pas ça. Et malgré elle, elle songea à l’homme qui l’avait épousé et qu’elle avait ensuite pleuré pendant des décennies pour découvrir il y avait à peine quelques mois qu’il était encore en vie. Elle le méprisait encore pour cela.
Un soupire lui échappa alors qu’elle s’efforçait de chasser l’amertume que ses pensées faisaient remonter et leva les yeux vers Pancrace au-dessus d'elle. Elle scruta son visage aux lignes parfaites, s’attarda sur sa bouche avant de revenir à ses iris dont l’étrange teinte l’émerveillait toujours.
- Je vais partir à Melorn pendant quelque temps, j’ai des affaires qui m’y attendent. Sa voix était basse, presque pensive. - Viens avec moi. Ajouta-t-elle dans un souffle en se redressant sur ses coudes. Ses lèvres trouvèrent naturellement le chemin de son cou et elle l’embrassa avec une lenteur délicieuse. Baiser après baiser, elle descendit langoureusement jusqu’à sa clavicule qu’elle taquina du bout de la langue.
Peut-être, d’ici là trouverait-elle le courage de lui offrir une bribe de ce qu’avait autrefois été son existence et avec elle, une pièce de plus dans le puzzle de son identité.
Citoyen de La République
Pancrace Dosian
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Le soulagement, c’est quelque chose. Celui que tout s’arrête pas là. Celui que Sixte annonce pas disparaître à nouveau de façon aléatoire, au gré de là où le vent et ses contrats la mènent. Ou au gré de ses besoins de solitude et de détachement. J’me demande si ça va coincer, à un moment, qu’elle aura la bougeotte ou le besoin de plus voir ma gueule. La réciproque pourrait parfaitement être vraie, vu que c’est le rythme qu’on a depuis des mois maintenant. Et, pourtant, j’me dis qu’on doit pouvoir faire plus, faire mieux. Ou, en tout cas, là, j’en ai une envie si douloureuse que ça pourrait être un besoin.
Quand elle glisse en arrière avec nos doigts toujours entrelacés, j’fais courir mon autre main le long de sa bras, sur le haut de sa cuisse, légèrement, à travers le tissu. Puis j’finis par la surplomber, et c’est son tour de poser ses lignes, ses exigences. J’suppose que c’est que justice. Un collègue dit toujours que le couple, c’est l’art du compromis. Faut bien faire des efforts dans un sens et dans l’autre, mais de plonger mes yeux dans son regard gris, juste sous moi, avec une jambe qui commence à s’enrouler, j’me dis que tout ça vaut la peine.
« C’est promis, que j’réponds en l’embrassant. »
Ça a mal commencé, du coup, avec la pochette du sénateur mort, puis l’histoire avec Ryma dans la montagne, avec la fae qui vit là depuis des siècles. Disons qu’aucun de nous deux est exempt d’une certaine forme de malice et de finesse. Mais on a su aller au-delà de premières impressions un peu douteuses... Ou plutôt que le naturel a pas réussi à chasser une forme d’attirance magnétique qui allait au-delà ?
« On fera tous les deux de notre mieux. »
La promesse est déjà diluée dans la formulation mais c’est pas vraiment ce que j’veux dire. Plutôt qu’on aura a priori tous les deux des efforts à faire. C’est que si elle a l’habitude de fuir les relations et les liens, et les situations, moi, j’ai plutôt celle de papillonner. La perspective de plus pouvoir faire jouer de mon charme pour me détendre et me vider risque de faire tout drôle, à force. Puis c’est p’tet encore le jeu de la séduction qui me manquer davantage que la bagatelle, que j’trouverai auprès de Sixte, à moins qu’elle disparaisse.
Hé, on gagne sur certains points, et on perd sur d’autres, j’dirais.
Au moins, la promesse est rapidement tenue vu qu’elle parle tout de suite de partir à Melorn. La cité-état est le seul vestige de l’empire des elfes, ça semble effectivement pas déconnant qu’elle ait des liens et des affaires là-bas, p’tet même de la famille. La perspective de rencontrer une bande de pointus racistes et hautains me file un peu d’appréhension, mais entre ma bonne humeur, mon humour printanier et ma belle gueule, au pire, ce sera que quelques mauvais jours à passer.
« Je... Oui, avec plaisir. »
Etonnamment, j’le pense vraiment. J’ai finalement si peu voyagé, alors que j’ai toujours discuté avec des gens qui venaient de partout et d’ailleurs. C’est le cas de Sixte, c’est celui des caravaniers dont on contrôle les marchandises aux douanes, c’est la même pour les réfugiés shoumeïens et les rares reikois qui viennent s’aventurer dans les terres hospitalières de la République. Et c’est vrai que quand on est dans le train-train quotidien, on a rarement l’occasion de se poser pour visiter, surtout avec les temps de trajet qu’il faut se coltiner.
Evidemment, j’ai pas la moindre envie d’aller visiter Celestia, Benedictus ou les terres dévastées de Shoumeï, remplies de monstres difformes et de cultistes abrutis.
Mais le voyage au Reike a été intéressant. En plus, on avait un guide, on a vu les attractions locales -des gens qui se tuent entre eux- et les monuments célèbres -du caca séché empilé pour faire des formes dignes d’un enfant de trois ans-, puis on a goûté la cuisine et discuté un peu avec les gens, en tout cas ceux qui étaient suffisamment moins con pour s’intéresser à autre chose qu’astiquer leur épée la bave aux lèvres. Et certains sont bien plus ouverts qu’on le croirait. Comme quoi y’a des cons partout.
« Faut que juste que... j’m’organise... avec l’office. L'affaire d'une poignée de semaine. »
C’est que j’ai des congés, mais faut prévoir avec les chefs et les collègues pour être sûr qu’on se barre pas tous à la plage en même temps. J’voudrais pas mettre les copains dans la merde, après tout, et ma concentration vacille fortement à mesure que les lèvres de Sixte parcourent le haut de mon corps. J’riposte avec ma jambe qui remonte entre ses cuisses, et si la passion est toujours là, qui couve comme les braises jamais vraiment éteintes, j’ai un élan de tendresse qui fait que j’remonte son menton pour perdre à nouveau mon regard dans le sien.
Et j’l’embrasse doucement.
Quand elle glisse en arrière avec nos doigts toujours entrelacés, j’fais courir mon autre main le long de sa bras, sur le haut de sa cuisse, légèrement, à travers le tissu. Puis j’finis par la surplomber, et c’est son tour de poser ses lignes, ses exigences. J’suppose que c’est que justice. Un collègue dit toujours que le couple, c’est l’art du compromis. Faut bien faire des efforts dans un sens et dans l’autre, mais de plonger mes yeux dans son regard gris, juste sous moi, avec une jambe qui commence à s’enrouler, j’me dis que tout ça vaut la peine.
« C’est promis, que j’réponds en l’embrassant. »
Ça a mal commencé, du coup, avec la pochette du sénateur mort, puis l’histoire avec Ryma dans la montagne, avec la fae qui vit là depuis des siècles. Disons qu’aucun de nous deux est exempt d’une certaine forme de malice et de finesse. Mais on a su aller au-delà de premières impressions un peu douteuses... Ou plutôt que le naturel a pas réussi à chasser une forme d’attirance magnétique qui allait au-delà ?
« On fera tous les deux de notre mieux. »
La promesse est déjà diluée dans la formulation mais c’est pas vraiment ce que j’veux dire. Plutôt qu’on aura a priori tous les deux des efforts à faire. C’est que si elle a l’habitude de fuir les relations et les liens, et les situations, moi, j’ai plutôt celle de papillonner. La perspective de plus pouvoir faire jouer de mon charme pour me détendre et me vider risque de faire tout drôle, à force. Puis c’est p’tet encore le jeu de la séduction qui me manquer davantage que la bagatelle, que j’trouverai auprès de Sixte, à moins qu’elle disparaisse.
Hé, on gagne sur certains points, et on perd sur d’autres, j’dirais.
Au moins, la promesse est rapidement tenue vu qu’elle parle tout de suite de partir à Melorn. La cité-état est le seul vestige de l’empire des elfes, ça semble effectivement pas déconnant qu’elle ait des liens et des affaires là-bas, p’tet même de la famille. La perspective de rencontrer une bande de pointus racistes et hautains me file un peu d’appréhension, mais entre ma bonne humeur, mon humour printanier et ma belle gueule, au pire, ce sera que quelques mauvais jours à passer.
« Je... Oui, avec plaisir. »
Etonnamment, j’le pense vraiment. J’ai finalement si peu voyagé, alors que j’ai toujours discuté avec des gens qui venaient de partout et d’ailleurs. C’est le cas de Sixte, c’est celui des caravaniers dont on contrôle les marchandises aux douanes, c’est la même pour les réfugiés shoumeïens et les rares reikois qui viennent s’aventurer dans les terres hospitalières de la République. Et c’est vrai que quand on est dans le train-train quotidien, on a rarement l’occasion de se poser pour visiter, surtout avec les temps de trajet qu’il faut se coltiner.
Evidemment, j’ai pas la moindre envie d’aller visiter Celestia, Benedictus ou les terres dévastées de Shoumeï, remplies de monstres difformes et de cultistes abrutis.
Mais le voyage au Reike a été intéressant. En plus, on avait un guide, on a vu les attractions locales -des gens qui se tuent entre eux- et les monuments célèbres -du caca séché empilé pour faire des formes dignes d’un enfant de trois ans-, puis on a goûté la cuisine et discuté un peu avec les gens, en tout cas ceux qui étaient suffisamment moins con pour s’intéresser à autre chose qu’astiquer leur épée la bave aux lèvres. Et certains sont bien plus ouverts qu’on le croirait. Comme quoi y’a des cons partout.
« Faut que juste que... j’m’organise... avec l’office. L'affaire d'une poignée de semaine. »
C’est que j’ai des congés, mais faut prévoir avec les chefs et les collègues pour être sûr qu’on se barre pas tous à la plage en même temps. J’voudrais pas mettre les copains dans la merde, après tout, et ma concentration vacille fortement à mesure que les lèvres de Sixte parcourent le haut de mon corps. J’riposte avec ma jambe qui remonte entre ses cuisses, et si la passion est toujours là, qui couve comme les braises jamais vraiment éteintes, j’ai un élan de tendresse qui fait que j’remonte son menton pour perdre à nouveau mon regard dans le sien.
Et j’l’embrasse doucement.
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