Au passage d’un duo d’hybride ; l’une mi-poule, l’autre mi-cheval ; Cactus leur jette un regard partagé entre la surprise, la colère et le dégoût. Surprise car ce duo est l’incarnation de ce que cet Octavius Mercurialis avait promis dans sa lettre que les ratons-laveurs ont lu plusieurs fois chacun, essayant de percevoir à travers les lignes la moindre information qui serait sous-entendu. Mais non. Peut-être que tout cela était réel, loin d’être un piège et de plus une invitation intéressante à bien des égards. Pour la colère et le dégoût, Cactus ne se refait pas. Voir ces hybrides s’épanouir dans cette bulle à leur avantage, mimant les humains honnis et mettant de côté les horreurs de leur conception, ça n’incite guère le raton-laveur à la bienveillance. Mais il a promis qu’il se tiendrait tranquille, même s’il n’est pas le plus turbulent de la bande. Depuis leur retour de Kaizoku, Crocus semble encore plus déchaîné et Ciguë a bien du mal à le canaliser. Privilège de l'aîné oblige, on lui pardonne. Parait que ce qu’il s’est passé n’a pas été très joyeux et la perte d’un œil chez l’un de ses frères a le don de mettre en rogne Cactus.

Oui, il n’était pas là. Sa présence ne semblait pas requise. Traquer un individu, ça rentrait dans les cordes de Crocus et Ciguë et puis, il n’est pas l'aîné. Il n’a pas le rôle de devoir protéger les autres. En principe. Sauf qu’on ne pouvait pas savoir à l’avance que l’enfer allait s’abattre sur ce bout d'île inutile au milieu de la mer. Cactus aurait su, il aurait été là. Sauf que c’est du passé et la mutilation de son frère est bien là. Alors, quand il y a eu cette lettre et une velléité générale de répondre positivement à l’invitation, Cactus ne comptait pas rester une nouvelle fois en arrière malgré ces suspicions. Faut dire qu’il est tout le temps suspicieux de tout, surtout en sachant que cet Octavius Mercurialis n’est pas un hybride. Il ne s’agit pas d’une peur, mais d’expérience, Cactus sait qu’il vaut autant se méfier de ceux qui haïssent les hybrides et ceux qui les aiment un peu trop. Leurs conditions à toutes a commencé avec de l’amour mal placé.

Excepté sa nature cent pour cent humaine, les ratons-laveurs n’en ont appris rien de plus, malgré les différents canaux d’informations à disposition que ce soit du côté de Capucine ou de Camélia. Dans ce domaine, Cactus est un poids mort. Sa méfiance naturelle à l’égard des humains le tient facilement éloigné de bien des sources d’informations. La découverte de l'île est dans tous les cas une surprise des plus étonnantes. Lors de la procédure d’approche de l'île, elle a semblé vaste, dotée de plusieurs plages accueillantes autant que de plusieurs falaises abruptes. Depuis la mer, on a pu observer une sorte de ville centrale dans le plus pur style architectural de la République, constatation accessoire puisque l’art architectural n’est pas digne de l’intérêt du raton-laveur moustachu. En tout cas, l'île semble doté de suffisamment d’espaces pour une population vaste, ou bien pour cacher nombres de surprises que tout le monde espère agréables.

Cactus jette un œil par-dessus son épaule, avisant plusieurs membres de la famille en pleine discussion avec un représentant d’Octavius, une hybride antilope tétracère, a priori, Cactus n’est pas expert dans la désignation de toutes les espèces. Pas bien grande et se présentant sous le nom de Rikke, elle travaille avec Octavius à gérer les arrivées, les demandes et les interrogations des nouveaux arrivants. Il faut faire preuve de diplomatie, alors Cactus laisse ça aux autres, gardant son attention focalisée sur le moindre détail qui pourrait trahir un signe avant-coureur de danger.

-Tu devrais te détendre, Cactus.

Celui-ci grogne dans sa moustache. Si certains espèrent des sortes de vacances dans ce voyage, ce n’est pas le cas du révolutionnaire. Qui dit hybrides dit peut-être des alliés prêt à rejoindre leur cause, voire même à participer activement à des actions coups de poings pour faire entendre leur revendication. Toute aide ne doit pas être refusée d’office et Cactus sait faire preuve de retenu à la différence de leur ainé ; il est même étonnant qu’il n’ait pas encore sauté sur cette Rikke pour lui faire la peau. Dans un monde idéal, il espère ressortir de cette île avec un peu plus d’aides, mais dans la dure réalité de la vraie vie véritable, le moustachu se doute que ça va mal finir. Il jette un œil à chaque membre de la fratrie et a un petit sourire. Il ne fait pas exception.

Une belle bande de cas à problèmes.