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Le soleil laissait ses derniers rayons se balader sur la terre, chauffer les brins d’herbe et les têtes découvertes. Bientôt, il baillerait de toutes ses forces et s’en irait lentement se coucher, laissant son amie la lune prendre sa place, éclairant alors faiblement les âmes perdues dans les rues des villes, les forêts, les déserts. Il ne ferait plus aussi chaud, l’on aurait besoin d’une petite laine pour ne pas claquer des dents.
Hodur venait de terminer sa journée. De travail, de détente, il ne savait pas trop. Un mélange des deux, cela était certain. Un événement se tenait, rare et précieux, il rassemblait les esprits les plus aiguisés, les plumes les plus fécondes, les doigts les plus agiles. L’invitation lui avait sobrement été glissée par une de ses apprenties. Elle n’avait rien dit, elle ne savait pas d’où ces mots provenaient. Hodur avait laissé ses yeux vagabonder entre les phrases. Il déplorait une écriture manquant de charme, presque grossière, mais ce n’était point le plus important. Il était invité pour partager ses connaissances et son art. L’adresse n’était pas claire, mais on lui promettait un charmant endroit pour exhiber ses armes et – éventuellement – ses bijoux. Un stand, somme toute. L’élémentaire a levé les yeux au ciel. Ce n’était pas la première fois qu’il était ainsi convié, mais le dernier événement de ce type remontait quelque peu. Cela ne le tuerait pas de sortir de sa cachette, s’ouvrir au monde et découvrir ce que d’autres savent faire de leurs dix doigts. N’est-ce pas ? Il l’avoue, les deux filles ont dû sacrément le secouer pour qu’il réponde positivement à l’invitation. Quelques vers jetés sur un papier parfumé, la lettre soigneusement envoyée, et la préparation qui le mènera vers la nouveauté. Il n’aura pas de quoi forger, cela est sûr, alors il fouille dans les stocks d’armes et de bijoux, recherche ce qui pourrait intéresser et faire sourire. Cela n’est pas fort différent de ses sorties au marché. Toutefois, il aurait préféré travailler de ses mains à la vue des visiteurs. Ne sont-ils pas là pour ça ? Peu importe. Le matin approche, les apprenties voient leur maître partir en calèche. Elles espèrent qu’il ne lui arrivera rien. Maître Hodur sait se battre, mais il chérit la douceur et la passivité. Sauf lorsqu’il est question de punir un élève récalcitrant et menteur. Petite grimace. La poussière retombe, l’homme est parti. Trois jours, pas un de plus, peut-être un de moins.
Comme promis, un emplacement lui avait été réservé. Lentement, ses mains ont dénoué les nombreuses protections et autres tissus qui cachent des affres de la vie, de la dureté du voyage. Lentement, les bras ont porté, les doigts ont disposé, savamment. Hodur sait comment mettre sa marchandise en valeur. Cela n’a pas pris énormément de temps. Autour de lui, ça jacassait déjà. Les différents vendeurs parfois se connaissaient. Hodur a haussé les épaules. Ce n’étaient pas les âmes artistes qui l’intéressaient. Et pourtant, une pause bien méritée lui a permis de quitter ses quartiers quelques instants, les pieds qui se baladent entre les ruelles remplies d’artisans, de clients. Hodur s’est acheté à manger, à boire. Il a dégusté un énorme beignet en jetant un œil. Il n’a rien dit, aucun mot n’est sorti de sa bouche trop souvent muette. Il a admiré en silence, hop une gorgée d’un liquide ambré légèrement alcoolisé. Parfois, les sourcils se fronçaient. On le connaissait, de loin, de très loin. Parfois était-il même un parfait inconnu à la plastique particulière. L’homme n’aime point se faire remarquer, invisible fantôme qui glisse ses chaînes parmi les vivants. Timidement, ses pieds l’ont mené vers les armes. Une dame tenait le stand, mais lorsqu’elle s’est retournée vers lui, l’élémentaire a pali terriblement – ce qui signifie, compte tenu de sa peau bleutée, qu’il ne s’est pas passé grand-chose. Toutefois, une sensation étrange et désagréable s’est moquée de son palpitant. Il n’a plus avancé, il a fait comme s’il n’avait rien vu, rien entendu, qu’il s’était égaré et qu’il reprenait sagement son chemin. Hodur l’homme ridicule qui a peur d’une simple mortelle. Le papier du beignet finit tout chiffonné et le pied bute volontairement dans une pierre. La douleur lui rappelle à quel point il est sot.
Ce n’est que de l’admiration purement professionnelle. Hodur aime son travail, mais il apprécie aussi celui des autres s’il est bien fait. Il se souvient de sa visite dans la forge de Cyradil. Il n’y est pas resté longtemps, il n’a pas prononcé un mot, ses yeux ont simplement apprécié. L’a-t-on reconnu, lui, Grand Maître ? Il a rabattu sa large capuche sur ses cheveux noirs, les yeux rouges ont été masqués. Troublé, il a été. Mais il n’a pas compris pourquoi. La suite, tous deux la connaissent. Ou peut-être est-il le seul dans la confidence. Hodur qui envoie des lettres, sobres et douces, des mots tendres pour prouver l’effet que lui ont fait ces armes savamment sculptées. Purement professionnel, rien de plus, rien de moins, même si la fille était jolie. Il a appris à oublier les physiques, à se défaire de la superficialité de l’âme. Seuls les doigts trahissent la vérité, le véritable « moi ». Il ne l’a pas harcelée, cela est certain, mais s’est certainement fait remarquer. Allons, ce n’est pas bien grave. Jamais ne se parleront-ils, ses vers n’atteindront jamais ses oreilles. Ses lettres sont sûrement déchirées, elles ne sont pas signées. Parfois en reçoit-il aussi. De femmes, d’hommes, qu’en faire ? Il s’en moque, et les apprenties rangent en rigolant.
Il a retrouvé son stand, l’esprit troublé. Quelques heures pour se ressaisir, vendre ses dernières pièces. Venez venez, elles ne sont pas bien chères. Au fil de la journée, les passants ont vu, patiemment, les prix diminuer. Hodur ne veut repartir avec rien. La bourse remplie, qu’il aurait pu combler ailleurs, chez un artiste de talent. Non. Il n’a point été convaincu ce jour, il s’est juste laissé porter sans rien acheter. Le soleil disparaît pour de bon, il est temps de ranger. Deux torques, une épée, la plus chère de toutes, gentiment rangés dans la cariole qui le ramènera chez lui. Il s’apprête à partir, mais c’est l’heure de manger. On le tire presque dans cette auberge dont il ne sait rien. La nourriture est-elle appréciable ? Il pourrait survivre sans se sustenter. Ce n’est qu’un soir, ce n’est pas grave. Les artisans se regroupent en riant. Chacun est installé, et Hodur reste debout, la capuche masquant encore la chevelure sombre. Une table restée vide, il ne veut pas être l’élément perturbateur et gênant. Les pieds l’y mènent, il prend place. La carte lui est apportée, il remercie d’un sympathique signe de tête – enfin pense-t-il être sympathique. Les yeux survolent, le choix se fait, et il s’appuie durement contre le dossier de la chaise. Journée éreintante, et bien des heures avant de rentrer à la maison.
Hodur venait de terminer sa journée. De travail, de détente, il ne savait pas trop. Un mélange des deux, cela était certain. Un événement se tenait, rare et précieux, il rassemblait les esprits les plus aiguisés, les plumes les plus fécondes, les doigts les plus agiles. L’invitation lui avait sobrement été glissée par une de ses apprenties. Elle n’avait rien dit, elle ne savait pas d’où ces mots provenaient. Hodur avait laissé ses yeux vagabonder entre les phrases. Il déplorait une écriture manquant de charme, presque grossière, mais ce n’était point le plus important. Il était invité pour partager ses connaissances et son art. L’adresse n’était pas claire, mais on lui promettait un charmant endroit pour exhiber ses armes et – éventuellement – ses bijoux. Un stand, somme toute. L’élémentaire a levé les yeux au ciel. Ce n’était pas la première fois qu’il était ainsi convié, mais le dernier événement de ce type remontait quelque peu. Cela ne le tuerait pas de sortir de sa cachette, s’ouvrir au monde et découvrir ce que d’autres savent faire de leurs dix doigts. N’est-ce pas ? Il l’avoue, les deux filles ont dû sacrément le secouer pour qu’il réponde positivement à l’invitation. Quelques vers jetés sur un papier parfumé, la lettre soigneusement envoyée, et la préparation qui le mènera vers la nouveauté. Il n’aura pas de quoi forger, cela est sûr, alors il fouille dans les stocks d’armes et de bijoux, recherche ce qui pourrait intéresser et faire sourire. Cela n’est pas fort différent de ses sorties au marché. Toutefois, il aurait préféré travailler de ses mains à la vue des visiteurs. Ne sont-ils pas là pour ça ? Peu importe. Le matin approche, les apprenties voient leur maître partir en calèche. Elles espèrent qu’il ne lui arrivera rien. Maître Hodur sait se battre, mais il chérit la douceur et la passivité. Sauf lorsqu’il est question de punir un élève récalcitrant et menteur. Petite grimace. La poussière retombe, l’homme est parti. Trois jours, pas un de plus, peut-être un de moins.
Comme promis, un emplacement lui avait été réservé. Lentement, ses mains ont dénoué les nombreuses protections et autres tissus qui cachent des affres de la vie, de la dureté du voyage. Lentement, les bras ont porté, les doigts ont disposé, savamment. Hodur sait comment mettre sa marchandise en valeur. Cela n’a pas pris énormément de temps. Autour de lui, ça jacassait déjà. Les différents vendeurs parfois se connaissaient. Hodur a haussé les épaules. Ce n’étaient pas les âmes artistes qui l’intéressaient. Et pourtant, une pause bien méritée lui a permis de quitter ses quartiers quelques instants, les pieds qui se baladent entre les ruelles remplies d’artisans, de clients. Hodur s’est acheté à manger, à boire. Il a dégusté un énorme beignet en jetant un œil. Il n’a rien dit, aucun mot n’est sorti de sa bouche trop souvent muette. Il a admiré en silence, hop une gorgée d’un liquide ambré légèrement alcoolisé. Parfois, les sourcils se fronçaient. On le connaissait, de loin, de très loin. Parfois était-il même un parfait inconnu à la plastique particulière. L’homme n’aime point se faire remarquer, invisible fantôme qui glisse ses chaînes parmi les vivants. Timidement, ses pieds l’ont mené vers les armes. Une dame tenait le stand, mais lorsqu’elle s’est retournée vers lui, l’élémentaire a pali terriblement – ce qui signifie, compte tenu de sa peau bleutée, qu’il ne s’est pas passé grand-chose. Toutefois, une sensation étrange et désagréable s’est moquée de son palpitant. Il n’a plus avancé, il a fait comme s’il n’avait rien vu, rien entendu, qu’il s’était égaré et qu’il reprenait sagement son chemin. Hodur l’homme ridicule qui a peur d’une simple mortelle. Le papier du beignet finit tout chiffonné et le pied bute volontairement dans une pierre. La douleur lui rappelle à quel point il est sot.
Ce n’est que de l’admiration purement professionnelle. Hodur aime son travail, mais il apprécie aussi celui des autres s’il est bien fait. Il se souvient de sa visite dans la forge de Cyradil. Il n’y est pas resté longtemps, il n’a pas prononcé un mot, ses yeux ont simplement apprécié. L’a-t-on reconnu, lui, Grand Maître ? Il a rabattu sa large capuche sur ses cheveux noirs, les yeux rouges ont été masqués. Troublé, il a été. Mais il n’a pas compris pourquoi. La suite, tous deux la connaissent. Ou peut-être est-il le seul dans la confidence. Hodur qui envoie des lettres, sobres et douces, des mots tendres pour prouver l’effet que lui ont fait ces armes savamment sculptées. Purement professionnel, rien de plus, rien de moins, même si la fille était jolie. Il a appris à oublier les physiques, à se défaire de la superficialité de l’âme. Seuls les doigts trahissent la vérité, le véritable « moi ». Il ne l’a pas harcelée, cela est certain, mais s’est certainement fait remarquer. Allons, ce n’est pas bien grave. Jamais ne se parleront-ils, ses vers n’atteindront jamais ses oreilles. Ses lettres sont sûrement déchirées, elles ne sont pas signées. Parfois en reçoit-il aussi. De femmes, d’hommes, qu’en faire ? Il s’en moque, et les apprenties rangent en rigolant.
Il a retrouvé son stand, l’esprit troublé. Quelques heures pour se ressaisir, vendre ses dernières pièces. Venez venez, elles ne sont pas bien chères. Au fil de la journée, les passants ont vu, patiemment, les prix diminuer. Hodur ne veut repartir avec rien. La bourse remplie, qu’il aurait pu combler ailleurs, chez un artiste de talent. Non. Il n’a point été convaincu ce jour, il s’est juste laissé porter sans rien acheter. Le soleil disparaît pour de bon, il est temps de ranger. Deux torques, une épée, la plus chère de toutes, gentiment rangés dans la cariole qui le ramènera chez lui. Il s’apprête à partir, mais c’est l’heure de manger. On le tire presque dans cette auberge dont il ne sait rien. La nourriture est-elle appréciable ? Il pourrait survivre sans se sustenter. Ce n’est qu’un soir, ce n’est pas grave. Les artisans se regroupent en riant. Chacun est installé, et Hodur reste debout, la capuche masquant encore la chevelure sombre. Une table restée vide, il ne veut pas être l’élément perturbateur et gênant. Les pieds l’y mènent, il prend place. La carte lui est apportée, il remercie d’un sympathique signe de tête – enfin pense-t-il être sympathique. Les yeux survolent, le choix se fait, et il s’appuie durement contre le dossier de la chaise. Journée éreintante, et bien des heures avant de rentrer à la maison.
Sagesse Réincarnée
Cyradil Ariesvyra
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Ces derniers jours, Cyradil avait passé pas mal de temps à la capitale. Elle avait eu de péripéties pour étancher sa soif d’aventures pour les prochaines semaines. Son commerce fonctionnait bien et les bénéfices de la jeune blonde étaient au beau fixe. Sa condition de liche faisait que la forgeronne pouvait aisément cumuler son travail à la forge avec ses tâches aux FMR mais elle suivait tout de même les recommandations d’Elia qui consistait à décrocher un peu du boulot de temps en temps pour laisser son esprit se reposer. Depuis l’étonnante aventure avec son camarade nain, Cyradil n’avait plus eu de commande spéciale et c’était sans doute pour le mieux. Elle ne se voyait pas entreprendre une autre aventure risquée pour le moment et aspirait simplement à quelques jours de calme.
En parlant de paisibilité, la jeune blonde avait commencé à recevoir une série de lettres, toute écrites dans un même style mais dont l’auteur semblait visiblement trop timide pour les signer. En général, ces lettres auraient vite fait de finir au feu tant la jeune femme en recevait. Il s’agissait souvent d’hommes souhaitant lui faire des avances et parfois même de femmes qui désiraient passer un moment agréable en sa compagnie. A priori, aucune n’avait su la ravir au point de vouloir en rencontrer leurs auteurs qui finissaient bien souvent par juste abandonner la manœuvre en voyant que la jeune femme était imperturbable sur le sujet.
Pourtant, cette fois-ci, les lettres semblaient s’intéresser à un aspect tout autre de Cyradil. En effet, plutôt que de vanter son physique ou son statut de noble, ces lettres-ci décrivaient surtout la qualité de son travail en tant que forgeronne. C’était assez inédit et surtout très flatteur au point où la jeune blonde décida de garder ces missives anonymes. Elles continuèrent à affluer régulièrement, sans en être invasives, comme si leur auteur craignait qu’un flot trop abondant ne finisse par agacer la lectrice. Au fil des lettres, Cyradil avait réussi à comprendre que l’auteur devait au moins avoir des notions en matière de forgeage, voire carrément maitriser le sujet.
Il s’agirait alors de sa distraction quotidienne. Cyradil s’amusa alors à chercher à savoir d’où provenait ces lettres. Parfois, ils étaient juste données par des intermédiaires qui juraient qu’ils ne connaissaient absolument par leur auteur et qu’ils agissaient simplement en messager contre une petite somme d’argent. Si Cyradil avait un admirateur secret, ce dernier devrait bien finir par se manifester un jour ou se trahir ? En tout cas, la jeune forgeronne était patiente et ce n’était pas le temps qui lui manquait. C’est alors qu’après une longue journée de travail où elle n’avait pas décidé de s’enfermer dans son bureau pour faire des heures supplémentaires, la jeune blonde avait simplement décidé d’aller se détendre en s’installant dans une auberge.
Comme à l’accoutumée, celle-ci était emplie de gens. C’était toujours très drôle d’accueillir une figure aussi atypique dans un tel milieu et il est vrai que Cyradil ne se rendait pas souvent dans ce genre d’endroits. Pourtant, la jeune liche aimait bien se mêler un peu au peuple de temps à autre. Son rang et sa richesse ne l’avait jamais rendue hautaine et elle était toujours prête à tendre la main vers son prochain. De manière tout à fait naturelle, la jeune blonde se dirigea vers une table qui était déjà occupée en jugeant par les mouvements qu’elle percevait sur celle-ci.
« Excusez-moi, est-ce que cette place est libre ? Il me semble qu’il soit difficile de trouver un endroit où s’asseoir aujourd’hui » Ajouta-t-elle en souriant.
Une fois la permission accordée, la jeune blonde s’installa tandis que quelques regards se tournaient vers elle. C’est vrai que Cyradil suscitait assez vite l’attention mais elle avait appris à vivre avec depuis le temps. Elle se fit servir assez rapidement. Contre toute attente, la jeune blonde avait simplement commandé un jus de fruit au lieu d’une boisson alcoolisée. En effet, Cyradil n’en avait jamais consommé pour la simple raison qu’elle pensait que les boissons spiritueuses ne faisaient qu’altérer son esprit.
« Ca vous arrive souvent de venir ici ? Je n’ai pas l’habitude de fréquenter les lieux mais c’est un endroit sympathique pour venir se relaxer après une journée de boulot vous ne trouvez pas. » Dit-elle en toute simplicité pour engager la conversation.
En parlant de paisibilité, la jeune blonde avait commencé à recevoir une série de lettres, toute écrites dans un même style mais dont l’auteur semblait visiblement trop timide pour les signer. En général, ces lettres auraient vite fait de finir au feu tant la jeune femme en recevait. Il s’agissait souvent d’hommes souhaitant lui faire des avances et parfois même de femmes qui désiraient passer un moment agréable en sa compagnie. A priori, aucune n’avait su la ravir au point de vouloir en rencontrer leurs auteurs qui finissaient bien souvent par juste abandonner la manœuvre en voyant que la jeune femme était imperturbable sur le sujet.
Pourtant, cette fois-ci, les lettres semblaient s’intéresser à un aspect tout autre de Cyradil. En effet, plutôt que de vanter son physique ou son statut de noble, ces lettres-ci décrivaient surtout la qualité de son travail en tant que forgeronne. C’était assez inédit et surtout très flatteur au point où la jeune blonde décida de garder ces missives anonymes. Elles continuèrent à affluer régulièrement, sans en être invasives, comme si leur auteur craignait qu’un flot trop abondant ne finisse par agacer la lectrice. Au fil des lettres, Cyradil avait réussi à comprendre que l’auteur devait au moins avoir des notions en matière de forgeage, voire carrément maitriser le sujet.
Il s’agirait alors de sa distraction quotidienne. Cyradil s’amusa alors à chercher à savoir d’où provenait ces lettres. Parfois, ils étaient juste données par des intermédiaires qui juraient qu’ils ne connaissaient absolument par leur auteur et qu’ils agissaient simplement en messager contre une petite somme d’argent. Si Cyradil avait un admirateur secret, ce dernier devrait bien finir par se manifester un jour ou se trahir ? En tout cas, la jeune forgeronne était patiente et ce n’était pas le temps qui lui manquait. C’est alors qu’après une longue journée de travail où elle n’avait pas décidé de s’enfermer dans son bureau pour faire des heures supplémentaires, la jeune blonde avait simplement décidé d’aller se détendre en s’installant dans une auberge.
Comme à l’accoutumée, celle-ci était emplie de gens. C’était toujours très drôle d’accueillir une figure aussi atypique dans un tel milieu et il est vrai que Cyradil ne se rendait pas souvent dans ce genre d’endroits. Pourtant, la jeune liche aimait bien se mêler un peu au peuple de temps à autre. Son rang et sa richesse ne l’avait jamais rendue hautaine et elle était toujours prête à tendre la main vers son prochain. De manière tout à fait naturelle, la jeune blonde se dirigea vers une table qui était déjà occupée en jugeant par les mouvements qu’elle percevait sur celle-ci.
« Excusez-moi, est-ce que cette place est libre ? Il me semble qu’il soit difficile de trouver un endroit où s’asseoir aujourd’hui » Ajouta-t-elle en souriant.
Une fois la permission accordée, la jeune blonde s’installa tandis que quelques regards se tournaient vers elle. C’est vrai que Cyradil suscitait assez vite l’attention mais elle avait appris à vivre avec depuis le temps. Elle se fit servir assez rapidement. Contre toute attente, la jeune blonde avait simplement commandé un jus de fruit au lieu d’une boisson alcoolisée. En effet, Cyradil n’en avait jamais consommé pour la simple raison qu’elle pensait que les boissons spiritueuses ne faisaient qu’altérer son esprit.
« Ca vous arrive souvent de venir ici ? Je n’ai pas l’habitude de fréquenter les lieux mais c’est un endroit sympathique pour venir se relaxer après une journée de boulot vous ne trouvez pas. » Dit-elle en toute simplicité pour engager la conversation.
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Hodur observe. Il n’a pas les yeux dans le vague, les pensées qui volètent ailleurs, pas encore. Sûrement laissera-t-il bientôt son esprit s’échapper, flotter au-dessus de son crâne. Car souvent, il n’est pas factuel. Il imagine une existence à tous ces gens qui vivent et crient dans l’auberge, seul endroit où le bruit ne lui fait – pas trop – mal à la tête. Il leur imagine un compagnon, une compagne, des enfants peut-être, des animaux, une maison, des passions. Ont-ils vaillamment combattu contre quelque bandit récemment ? Leur femme n’aurait-elle pas accouché récemment ? Oh, cela n’est pas raisonnable de se complaire au bar plutôt qu’être à ses côtés… Et la construction de leur maison, comment avance-t-elle ? Hmm, il semblerait que les ouvriers ne sont que des bons à rien, enfermés dans une auberge loin de leurs outils… Bref, Hodur pense. Et ça lui inspire des poésies. Les vers pleuvent dans son cerveau, mais le papier manque à l’appel. Quelle idée de s’encombrer ainsi à la sortie de ce charmant événement qui lui a pris la journée ! Pour être honnête, il ne pensait pas finir ses jours en cet endroit. Il comptait, initialement, reprendre la charrette qui l’a amené jusqu’ici bien des heures plus tôt, et là, peut-être, laisser les rimes glisser sur le papier à l’aide de sa plume préférée – enfin, l’une de ses préférées, parce que Hodur les collectionne, et d’ailleurs, en ce festival d’artisans, il en a acquis quelques-unes, tout à fait charmantes. Il devrait déjà être sur le chemin du retour, appuyé contre un coussin, les yeux clos, une chanson dans la tête, la voix qui fredonne timidement, à l’abri des oreilles indiscrètes. Mais il s’est laissé entraîner par la foule de professionnels papotant, comme pris par une vague gigantesque – que cela ramène de mauvais souvenirs ! – qui l’a échoué, haletant, dans la chaleur de cette auberge. Voilà qui est bien dommage, le voilà obligé de commander à boire, commander à manger, rester une heure, ou deux, seul et méditant. Ce n’est pas bien grave, l’homme est habitué à la solitude, aux minutes qui passent lentement, parfois très vite, comme si les secondes se moquaient de lui, de l’infinie tristesse qui crispe ses traits qu’il voudrait détendus.
Parfois, Hodur déteste son éducation. Il n’a pas manqué d’amour de la part de sa mère, mais il a été élevé pour être différent. Un garçon tout à fait anormal, à part. Les larmes cependant jamais ne s’échappent de ses paupières closes. Mais le commun des mortels ne pense-t-il pas lui-même être unique ? Voilà qui mérite une réflexion tout à fait intéressante. Mais Hodur est certain d’une chose : ses paroles laissent les sourcils froncés, attirent les silences gênés, bref, mettent mal à l’aise, ou font rire. Et comment réagir, dans sa verve bien à lui, lorsque l’on se moque de celle-ci ? Un exercice tout à fait impossible à réaliser, et l’élémentaire de glace prend des couleurs plus chaudes et quitte les lieux, il voudrait la tête haute. Parler en rimes, quelle idée ! Mais c’est ainsi que sa sœur et lui ont été éduqués. Par maman, tout d’abord, puis par papa, qui a acquis peu à peu les manies de son épouse. Ils ne savent faire autrement, ils ne sortaient que très rarement. D’ailleurs, sa sœur partie, disparue, comment s’exprime-t-elle, à présent ? A-t-elle retrouvé un brin de « normalité » ? Il n’en serait point étonné. Et lui s’y essaie, parfois, pour se confondre dans la foule, s’intégrer timidement, mais l’échec n’est jamais loin, lui pète en plein visage. Hodur n’y arrive pas, et pourtant, il a progressé. Des longues tirades interminables remplies de mots terriblement compliqués, maintenant il a bien changé. Allons, fournissons un effort, mais il ne parlera pas ce soir. La boisson d’abord lui est apportée, toujours ce signe de la tête, et là il se laisse rêver.
Une silhouette approche, les pensées s’agitent, et Hodur lève le nez du liquide ambré. Une jeune femme, une belle femme, qu’il reconnaît sans peine pour l’avoir vue une seule fois. Lentement il avale sa gorgée de bière, calcule le mouvement pour éviter un incontrôlable mouvement. Enfer, damnation, que fait-elle là, pourquoi à ses côtés, pourquoi pourquoi pourquoi ? Les questions le tourmentent, et il se sent encore plus sot que plus tôt dans la journée. Hodur l’homme ridicule devant cette âme qu’il ne connaît pas, qu’il n’a croisé qu’une seule fois – et sûrement ne s’en souvient-elle pas, il est passé comme un fantôme, n’a prononcé aucun mot. Elle semble avenante, un sourire sincère sur les lèvres, et l’homme qui se voudrait fort est tout à fait chamboulé. La peau change-t-elle de couleur sous l’effet de l’alcool – sous l’effet de sa présence ? Il espère que non. Cela est rare, gênant, mais ça peut arriver. Répondre, désormais, aligner les mots, ne rien laisser paraître, sembler « normal » dans sa bizarrerie, parce que Hodur se croit bizarre dans ce monde immense dont il ne sort que peu.
Et il montre la direction précise vers laquelle il se dirigera bientôt, lorsque son verre sera terminé, le suivant également, et le plat bien évidemment.
L’habilité incroyable à faire fuir les gens qui voudraient l’approcher – les malheureux, les courageux ! – au bout de quelques mots seulement. Cela est bien triste.
Parfois, Hodur déteste son éducation. Il n’a pas manqué d’amour de la part de sa mère, mais il a été élevé pour être différent. Un garçon tout à fait anormal, à part. Les larmes cependant jamais ne s’échappent de ses paupières closes. Mais le commun des mortels ne pense-t-il pas lui-même être unique ? Voilà qui mérite une réflexion tout à fait intéressante. Mais Hodur est certain d’une chose : ses paroles laissent les sourcils froncés, attirent les silences gênés, bref, mettent mal à l’aise, ou font rire. Et comment réagir, dans sa verve bien à lui, lorsque l’on se moque de celle-ci ? Un exercice tout à fait impossible à réaliser, et l’élémentaire de glace prend des couleurs plus chaudes et quitte les lieux, il voudrait la tête haute. Parler en rimes, quelle idée ! Mais c’est ainsi que sa sœur et lui ont été éduqués. Par maman, tout d’abord, puis par papa, qui a acquis peu à peu les manies de son épouse. Ils ne savent faire autrement, ils ne sortaient que très rarement. D’ailleurs, sa sœur partie, disparue, comment s’exprime-t-elle, à présent ? A-t-elle retrouvé un brin de « normalité » ? Il n’en serait point étonné. Et lui s’y essaie, parfois, pour se confondre dans la foule, s’intégrer timidement, mais l’échec n’est jamais loin, lui pète en plein visage. Hodur n’y arrive pas, et pourtant, il a progressé. Des longues tirades interminables remplies de mots terriblement compliqués, maintenant il a bien changé. Allons, fournissons un effort, mais il ne parlera pas ce soir. La boisson d’abord lui est apportée, toujours ce signe de la tête, et là il se laisse rêver.
Une silhouette approche, les pensées s’agitent, et Hodur lève le nez du liquide ambré. Une jeune femme, une belle femme, qu’il reconnaît sans peine pour l’avoir vue une seule fois. Lentement il avale sa gorgée de bière, calcule le mouvement pour éviter un incontrôlable mouvement. Enfer, damnation, que fait-elle là, pourquoi à ses côtés, pourquoi pourquoi pourquoi ? Les questions le tourmentent, et il se sent encore plus sot que plus tôt dans la journée. Hodur l’homme ridicule devant cette âme qu’il ne connaît pas, qu’il n’a croisé qu’une seule fois – et sûrement ne s’en souvient-elle pas, il est passé comme un fantôme, n’a prononcé aucun mot. Elle semble avenante, un sourire sincère sur les lèvres, et l’homme qui se voudrait fort est tout à fait chamboulé. La peau change-t-elle de couleur sous l’effet de l’alcool – sous l’effet de sa présence ? Il espère que non. Cela est rare, gênant, mais ça peut arriver. Répondre, désormais, aligner les mots, ne rien laisser paraître, sembler « normal » dans sa bizarrerie, parce que Hodur se croit bizarre dans ce monde immense dont il ne sort que peu.
Vous n’avez pas tort, les places libres sont rares.
Pardonnez-moi, l’esprit ailleurs, j’étais dans le brouillard.
Je vous avoue venir ici pour la première fois.
Je ne suis pas d’ici, je viens de tout là-bas, après ce bois.
Pardonnez-moi, l’esprit ailleurs, j’étais dans le brouillard.
Je vous avoue venir ici pour la première fois.
Je ne suis pas d’ici, je viens de tout là-bas, après ce bois.
Et il montre la direction précise vers laquelle il se dirigera bientôt, lorsque son verre sera terminé, le suivant également, et le plat bien évidemment.
Installez-vous, faites à votre aise.
Je semble froid, mais mon cœur n’est point fait de mélèze.
Je semble froid, mais mon cœur n’est point fait de mélèze.
L’habilité incroyable à faire fuir les gens qui voudraient l’approcher – les malheureux, les courageux ! – au bout de quelques mots seulement. Cela est bien triste.
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