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  • Mer 15 Fév - 1:38
    Grommelant, Deydreus observait silencieusement la carte qui était étendue sur la table stratégique devant lui. Glissant son doigt cristallin le long des différentes lignes qui avaient été dessinées sur le parchemin, l'être aux yeux vairons semblait perplexe. Relevant finalement la tête, le guerrier dévisagea les hommes qui étaient présents avec lui dans la tente. Deux dunarks, chargés de l'assister continuaient de rapporter à la Griffe ce que les éclaireurs prétendaient avoir vu. L'un d'eux était un demi-elfe à la mine efféminée et aux cheveux gris, nommé Ilvinar, plutôt sûr de lui et parlant bien. L'autre était un gobelin qui se désignait lui même par le nom de Fulbert de Varilia de la voix nasillarde. D'ailleurs et malgré sa petite taille, ce dernier affichait une assurance étonnante et n'hésitait pas à reprendre son camarade aux oreilles pointues lorsque celui-ci déviait visiblement de la véracité des faits énoncés. Pourtant, le reikois restait dubitatif. Depuis son passage à la tête des armées reikoises, il s'agissait de la première véritable mission à laquelle le général participait réellement. Il n'était pas là question de discussions diplomatiques, de visites à des officiers ou bien d'entraînement de troupes. Non. Il s'était déplacé directement depuis la capitale pour venir co-diriger une opération de nettoyage. D'après les dires des autorités de Kyouji, des opérations suspectes avaient eu lieu dans les alentours de la jungle et, après diverses enquêtes préliminaires, on avait rapporté aux locaux qu'il ne s'agissait pas simplement de malfrats mais de rebelles luttant contre le système impérial. Ces derniers, encore une fois selon ce que les gardes avaient déclaré, se cachaient dans l'épaisse végétation du sud est de Taisen afin d'échapper aux forces loyalistes. Alors... Il avait été décidé d'envoyer quelques patrouilles. Pour être sûr. Ces dernières n'étaient jamais revenues. En temps normal, Deydreus aurait très probablement envoyé un luteni ou un officier de rang similaire afin de s'occuper d'une mission de reconnaissance ou d'assistance potentielle. Mais... Il avait été contacté, par une autre branche de la main de l'Empereur. Alors, ce qui était au préalable de la récolte d'informations potentielles se transforma rapidement en quelque chose à la dimension plus.. Importante. C'est pourquoi le général était présent en ce jour. Il aurait été impoli pour lui de ne pas venir assister son futur collaborateur.

    Congédiant finalement les sous-officiers après leur avoir donner leurs prochaines manœuvres, le guerrier aux yeux vairons sorti finalement de la tente de commandement. Rapidement, l'humidité et la chaleur de la jungle vinrent saisir le sombre chevalier qui grimaça quelques instants. Décidemment, il ne savait vraiment pas s'il détestait plus la jungle ou le désert. Ce qui était amusant, quand on savait qu'il dirigeait à présent les forces armées d'un empire pourtant natif de ces climats. Observant le reste du campement de ses yeux vairons, le reikois fut satisfait de constater que les deux sous-officiers avaient bien respectés ses consignes. Les périmètres de sécurité avaient été établis, les troupes étaient vigilantes et les cercles de remplacement pour les tours de garde semblaient eux aussi bien respectés. Les tentes avaient été placées de telle sorte qu'aucune sortie rapide ne venait entrainer une gêne de déplacement pour les soldats et on pouvait facilement se déplacer à deux personnes dans les allées. Plus rapprochées de la tente du général, les Serres Pourpres s'étaient installées avec tout le professionnalisme qui les caractérisait. Ikaryon et Léonard avaient dirigé la montée du camp pendant qu'Esyleij s'assurait que d'autres fantassins assurent bien la "sécurité" de leur dirigeant. Puis, une fois le camp monté, les fantassins noir et sang avaient entamé diverses rondes et autres travaux de reconnaissance aux abords du camp. Tout d'abord pour se familiariser avec les environs, mais aussi pour déjà commencer à repérer quoi que ce soit qui pourrait être utile au reikois et à ses troupes. Car c'était là aussi un véritable problème. On leur avait parlé d'une potentielle présence de rebelles cachés, mais pas d'une possible localisation pour ces derniers. Et la jungle n'était pas véritablement un territoire facile à ratisser.

    C'est pourquoi cette opération était une mission conjointe entre différents services. Il allait falloir de l'intelligence et ne pas foncer "bêtement" sur diverses positions potentielles. Et, bien qu'il était adepte de ce genre d'opérations difficiles et nécessitant de la discrétion, le général savait que ce n'était pas le cas pour les deux bataillons l'accompagnant en ce jour. D'ailleurs, le nombre de guerriers l'accompagnant n'avait pas été choisi au hasard. Les attaques avaient été brutales près de la ville et plusieurs petits villages avaient été rasés. Outre la menace potentielle que pouvait représenter ces rebelles, il fallait être honnête. Il s'agissait également d'un moyen de marquer les esprits des différents nobles et seigneurs de l'Empire. Tout comme celui des rebelles et autres menaces cherchant à nuire au Reike. Les problèmes ne seraient plus ignorés, et les menaces ne seraient pas sous estimées. Et puis, au delà de toutes les raisons stratégiques ou politiques, Deydreus était à vrai dire également heureux de simplement pouvoir faire autre chose que de l'administratif. Pour cela, il était même prêt à crapahuter dans cette jungle détestable.

    Un soldat vint alors se présenter devant l'armure d'ébène et ses hommes. De taille moyenne, le jeune fantassin salua respectueusement son supérieur, une étrange lueur dans les yeux. Comme s'il venait s'adresser à une figure qu'il aurait admiré toute sa vie. Ignorant cette engouement à son égard, l'homme aux yeux vairons écouta les paroles du jeune guerrier avant de le remercier. Bien, les choses bougeaient un peu et, à présent, il allait pouvoir obtenir les informations dont il avait tant besoin et en même temps établir une stratégie autre que celle que les deux sous officiers avaient proposé. Car, de nouveau, l'idée de ratisser toute la jungle pour trouver des rebelles potentielles ne l'enchantait pas du tout. Il fallait tout d'abord étudier le terrain, savoir s'il ne s'agissait que d'un groupe isolé ou d'une tribu dissidente. Et une fois les informations obtenues, les actions pourraient enfin être choisi en toute connaissance de cause.

    Marchant donc doucement vers l'entrée du camp, Deydreus s'apprêtait silencieusement à accueillir les nouveaux arrivants.


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  • Dim 19 Fév - 20:58
    Entre le désert et la jungle, qui oserait prétendre que les terres du Reike étaient clémentes ? Seul un fou, ou des purs abrutis, pouvaient proférer une bêtise pareille. Mais, malgré la chaleur étouffante du désert, malgré l’hostilité de cette forêt sauvage, l’homme n’en démordait pas. Quand il voulait s’installer, il trouvait tôt ou tard un moyen de s’adapter et d’imposer sa loi. De la même manière, chaque mission pouvait être une réussite, si on avait suffisamment de patience et d’adresse pour poser ses pions et atteindre ses objectifs. Parfois, utiliser la manière forte n’était pas suffisant et il fallait faire preuve de flexibilité pour recueillir des informations, mâter une révolte, ou réimposer l’ordre. Parfois encore, agir dans l’ombre n’était pas assez, et il fallait justement des forces vives pour éteindre les braises d’un incendie qui couvait dans les cœurs.

    En temps normal, Zéphyr aurait pu laisser la Griffe agir tout seul. Il avait confiance en ses capacités, qu’il avait d’ailleurs habilement démontrées lors de son combat contre Tensai. L’Oreille n’avait pas manqué l’événement, bien sûr, et quoiqu’il avait dépêché des espions dans la foule pour agir en cas de mauvaise surprise, l’homme aux yeux ambrés avait pu regarder tout le spectacle. Les clones qu’il avait déployés lui permettaient de ne pas devoir être totalement alerte, et positionné non loin des gradins royaux, Zéphyr avait constaté avec plaisir que Deydreus Fictilem était toujours cet homme doté d’une volonté de fer. Il aurait les moyens et le caractère pour s’imposer aux armées reikoises et il avait bon espoir que leur collaboration serait fructueuse et efficace.

    En tant que maître-espion, le duelliste gardait un œil sur l’ensemble du territoire. Comme le guerrier, il avait appris que qu’une bande sévissait dans la jungle près de Kyouji. Pas de quoi s’inquiéter au départ, puisque le seigneur de la ville n’était pas un incapable et savait prendre les choses aux mains. Mais quand il était apparu que c’était davantage une bande de rebelles, qui avait su de surcroît annihiler quelques patrouilles, l’histoire s’était propagée parmi les locaux, jusqu’à se répandre dans la métropole, pour arriver finalement à la capitale. Les deux membres de la Main avaient été prévenus et on ne pouvait laisser les choses aller sans rien faire. Non seulement le sérieux de l’armée royale et de la Couronne serait remis en question si aucune disposition n’était prise, mais en plus la rébellion pourrait également grandir, se répandre, et déposer ses miasmes de corruption dans les cœurs reikois. Cachée dans la jungle, on ne pouvait savoir à quels ennemis on avait affaire, mais on ne pouvait pas savoir non plus comment cette révolte progressait. Il fallait donc l’anéantir définitivement et rapidement.

    L’envoi de quelques bataillons ou d’un luteni aurait pu suffire, certes, à condition de savoir où frapper. Ce qui n’était pas si simple. La forêt tropicale était vaste, sinon immense et les soldats n’étaient pas forcément initiés à se faire un chemin dans cette végétation luxuriante. A contrario, les rebelles, eux, étaient dans leurs éléments. La rapidité de leurs attaques sur les villages environnants, leur camouflage dans la jungle,  la neutralisation et l’annihilation des patrouilles montrait qu’on avait affaire non seulement à des locaux de Kyouji, mais aussi à une organisation bien structurée qui savait comment abattre les hommes qu’on leur envoyait. Il y avait une intelligence bien structurée derrière cette rébellion, que Zéphyr voulait l’abattre le plus tôt possible. Ses soupçons et ses craintes était qu’on avait affaire à un noble ou à un général de la région qui avait pris le parti de se liguer contre l’Empire. Les raisons pouvaient être multiples. L’abolition de l’esclavage, l’ascension d’un barbare sur le trône, la naissance d’un enfant-dragon, tout et n’importe quoi pouvait servir de prétexte pour justifier une désobéissance grave. Le but premier de Zéphyr était donc de recueillir des indices sur la tête pensante de ce complot. Ensuite, de voir jusqu’où s’étendait la rébellion, pour mieux la circonscrire, l’étouffer, jusqu’à ne plus lui laisser aucune chance. Et enfin, sa présence et celle de ses agents servaient avant tout à simplifier la progression de Deydreus. Celui-ci ne pouvait s’aventurer à l’aveugle dans la jungle, sous peine de se faire piéger facilement par les rebelles. Pis, la jungle elle-même pourrait se charger de démoraliser ses troupes et de les mettre en danger.

    Si les bataillons de la Griffe sauraient éliminer les rebelles quand on aurait mis la main sur eux, les espions de l’Oreille, eux, sauraient localiser les zones susceptibles d’être des planques. Et pour ce faire, Zéphyr avait choisi des hommes de main qui avaient grandi dans les environs de la jungle. Il avait constitué un petit groupuscule en leur confiant à chacun une part de la forêt. Sous couverture, évidemment, celle qui n’attirerait pas le soupçon des rebelles tant la présence de ses espions leur semblerait naturelle. Lyora était ainsi une chasseuse hors pair, là où Katar était un chercheur qui s’intéressait à la flore si particulière de la forêt sauvage. Il y avait encore Flavius qui s’occupait d’être un garde du corps et un guide pour les locaux qui devaient s’aventurer dans la jungle. Enfin, il restait deux jumeaux, qui avaient pour charge « simple » de patrouiller entre la forêt et le lac Rebith afin de s’assurer que des monstres ne s’approchent pas trop de la ville. Des éclaireurs en somme. Qui étaient là depuis tellement longtemps qu’on ne se douterait pas qu’il soient des espions à sa solde.

    Zéphyr leur avait laissé la liberté de partir avec d’autres espions de Kyouji, c’était même conseillé de ne pas s’aventurer tout seul dans la jungle en de telles circonstances. Ils couvriraient non seulement plus de terrain, mais pourraient aussi s’épauler s’ils étaient par malchance pris en chasse par les rebelles. Il avait convenu avec ses subordonnés qu’il se verrait aujourd’hui même après l’heure de sexte, mais le maître-espion souhaitait en premier lieu rencontrer Deydreus. Par le passé, ils avaient déjà eu des missions ensemble, mais c’était la première fois qu’ils allaient collaborer en tant que membres de la Main. C’était même la première fois qu’ils se retrouveraient depuis un bon moment.

    Aussi, lorsque le Reikois aperçoit le campement, et bien sûr la silhouette si caractéristique de son vieil ami, un sourire apparait sur le visage de l’assassin. Un sourire sincère, pour une fois, loin du masque qu’il porte habituellement au palais. Là-bas, il ne laisse passer aucune de ses vraies émotions lorsqu’il est en contact avec la plèbe ou la noblesse du Reike, mais ici, c'est différent. Délaissant ses compagnons de voyage, il presse les flancs de son étalon pour accélérer atteindre plus rapidement la Griffe, et l’Oreille finit par s’arrêter au niveau de son compère. Descendant souplement de sa monture, il atterrit au sol et ne tarde pas à offrir un regard franc, mais fondamentalement bon, à son frère d’arme.

    - Ca fait longtemps, Dey. C’est bon de te revoir.

    Même si ce n’était pas dans des circonstances plus paisibles, certes. Mais c’était aussi dans l’adversité qu’on forgeait des amitiés solides et durables.

    En tous les cas, il laisse la possibilité à son comparse de s’échanger une solide poignée de mains, puis le regard de Zéphyr dérive vers le campement.

    - Comment vont tes troupes ? Tu as vu des traces des rebelles depuis que vous êtes arrivés ?

    C’est que l’espion ne tergiverse pas trop longtemps, mais il estime qu’ils vont passer les prochaines heures, voire les prochains jours, en terrain hostile, ils auront donc largement l’occasion de prendre des nouvelles de l’un et de l’autre à un moment donné. Puis, il est quasiment sûr que l’arrivée de Deydreus a déjà été remarquée par les insurgés. Deux bataillons, ça se remarque. Et on doit s’attendre à des répercussions lorsqu’on anéantit des patrouilles de soldats de l’Empire.

    Zéphyr attend en tout cas la réponse de son ami et c’est à ce moment que le reste de sa propre troupe arrive. Elle n’est pas très grande comparées aux bataillons du guerrier, il s’agit simplement de dix espions vifs, aguerris, précis et rapides. Tous ont le pouvoir d’exacerber leurs sens, ce qui leur sera bien utile en pleine forêt. Ils seront les bienvenues pour servir d’éclaireurs ou pour poursuivre d’éventuels fuyards rebelles.

    - Je te présente mes propres hommes de mains. Ils ont suivi un entrainement rigoureux et même si la jungle est hostile, ils nous accompagneront dans la jungle pour nous servir d’éclaireurs et partir davantage en avant. Nous avons chacun nos provisions dans nos sacs. Même si j’espère que nous agirons vite et bien.

    Cela dit, la mission risque d’être ardue. Si elles l’étaient moins, la Griffe et l’Oreille ne se seraient pas déplacés en personne.

    - Je dois rencontrer des agents qui ont enquêté pour moi ces dernières semaines. Le rendez-vous est un peu plus en amont, dans un endroit plus discret afin de ne pas attirer l’attention. Tu m’accompagnes ?

    C’est aussi un moyen comme un autre de parler à cœur ouvert sans oreilles indiscrètes dans les environs.
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  • Lun 20 Fév - 12:17
    Observant le nouvel arrivant, Deydreus laissa un léger sourire glisser sur ses lèvres serrées. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu Zéphyr et malgré le contexte de leur mission, le reikois était heureux de retrouver un vieil ami. Serrant la main de l'Oreille, l'homme aux yeux vairons se retourna ensuite à son tour vers le campement.

    - Ravi de te revoir également. Mes troupes vont bien, bien que la jungle ne soit pas spécifiquement leur terrain préféré. Il marqua une pause tandis que quelques hommes passaient devant eux. Pas vraiment. Les éclaireurs ont remarqué des traces suspectes mais visiblement, il ne s'agit que de serpents géants et autres curiosités que cet environnement nous réserve. Les rebelles semblent trop professionnels ou intelligents pour venir s'approcher du campement. Cependant, l'un de mes luteni m'affirme que des ombres se déplaçaient un peu plus à l'est. Sans doute des espions.

    Il s'arrêta ensuite en observant les nouveaux arrivants. La troupe de Zéphyr n'était pas aussi imposante que les Serres ni aussi "visible" parmi la foule. Il s'agissait là d'espions et autres marcheurs de l'ombre qui ne se spécialisaient pas dans l'art de la guerre. Pourtant, Deydreus voyait en chacun d'eux le professionnalisme et la dangerosité potentielle de ces personnes. Leur posture, leurs attitudes. Tant de témoins d'une dévotion à l'Empire et à leur supérieur transpiraient de leurs mouvements. Hochant de la tête pour les saluer, Deydreus invita Zéphyr à la suivre au travers du camp tandis que ce dernier lui présentait ses hommes et leurs spécialités. Agir vite et bien. Voila une idée qui plaisait à la Griffe, bien qu'il savait que cela ne serait probablement pas le cas, notamment pour la vitesse d'exécution. Après tout, ils n'étaient pas là pour une simple opération de routine. Alors, la complexité serait sans doute au rendez-vous, et avec elle une prudence nécessaire. En revanche, le reikois n'avait aucun doute sur le fait qu'ils mèneraient leur mission à bien. Il avait déjà coopéré par le passé avec le maître espion et il savait comment ce dernier opérait et à quel point l'échec ne figurait pas dans son lexique. Les rebelles de cette jungle allaient être écrasé par la colère impériale, cela ne faisait aucun doute. Sortant de ses pensées tandis que l'Oreille évoquait un rendez-vous futur, le sombre chevalier acquiesça d'un signe de tête léger.

    - Bien sûr. Les Serres Pourpres resteront au camp afin d'assurer la sécurité de ce dernier et surtout le maintien de la discipline qui y règne actuellement. Y aller avec eux risquerait justement de trop attirer l'attention étant donné leur équipement. Laisse moi le temps de repasser à ma tente pour récupérer quelques affaires et je te rejoins.

    Quittant donc rapidement la compagnie de son ami, le reikois passa rapidement dans ses quartiers pour se préparer. Lorsqu'il ressortit, il interpela Ikaryon qui achevait une patrouille en compagnie de Léonard et Vivien. Donnant ses ordres, le sombre chevalier tapota l'épaule du fantassin, conscient que sa demande signifiait un retardement de l'action pour les guerriers d'élite. Mais c'était là aussi la difficulté de leur mission et sa pénibilité. Devoir se renseigner avant d'agir. Devoir se préparer à un affrontement prochain. Et subir cette appréhension désagréable. Cette interminable attente où le moindre craquement de bois en dehors du camp pouvait potentiellement signifier une attaque ennemie. Rester toujours sur ses gardes, à l'affût, et se retrouver au final plus épuisé que si on avait véritablement combattu. Mais le fantassin comprenait la logique de son commandant et fit un simple "entendu" en réponse avant de se mettre en route. Satisfait, l'homme aux yeux vairons se dirigea donc vers les bordures du camp afin de retrouver le maître espion. Une fois au niveau de ce dernier, il commença à le suivre, silencieux.

    La progression en dehors du camp fut... Particulière. Pas véritablement compliqués, les mouvements du groupe demeuraient cependant lents et attentifs. A plusieurs reprises, ils aperçurent un ou deux lanconda qui évoluaient parmi la végétation. Si ces derniers ne représentaient pas un réel danger, perturber leur progression aurait forcer un combat inutile et aurait ruiner toute tentative de discrétion. Alors, ils s'étaient contentés de les laisser passer, reprenant leur route une fois tout danger écarté. Il y avait également les plantes dont il fallait se méfier. Outre le manque de visibilité, la jungle disposait de nombreuses plantes pouvant être mortelles. Plantes Pirhanas et autres voraces n'attendaient qu'un faux pas des reikois pour venir les piéger ou tenter d'anéantir leur existence. Il fallait aussi faire attention aux arbres toxiques comme les mancenilliers. Les lianes, pendant depuis les hauteurs pouvaient également abriter une créature quelconque ou tout simplement venir étrangler les potentiels intrus. La jungle était un endroit indompté. Hostile. La vie "civilisée" n'y était pas la bienvenue et tout semblait s'y opposé. Mais pourtant, il s'agissait d'un lieu important que les mortels voulaient dominer. Et, des fois, certains groupes parvenaient à s'y installer, comme c'était le cas pour les potentiels rebelles. Alors, le groupe reikois avançait dans cette zone humide, évitant les pièges naturels qui les attendaient.

    Marchant aux côtés de l'Oreille, le sombre chevalier observait les alentours tout autant qu'il n'écoutait son ami et analysait ses mouvements. Il n'y avait pas dans cette observation une rivalité quelconque ou le moindre doute. Seulement une curiosité, provoquée par une collaboration lointaine et une volonté de voir si son confrère avait progressé sur sa voie, tout comme lui s'était efforcé d'avancer sur la sienne. Repoussant du gantelet une liane qui venait obstruer son champ de vision, l'homme aux yeux vairons sentit une vague de chaleur humide venir saisir sa peau sous son heaume. Soupirant doucement, le reikois tenta d'ignorer la désagréable sensation que la jungle et son humidité lui provoquaient.

    - Au fait Zéphyr, ce n'est pas trop le chaos dans les ombres depuis la fin de la guerre?

    La question était simple, de prime abord innocente. Pourtant, à travers ses mots, le reikois voulait savoir une chose évidente. Leurs ennemis étaient-ils toujours présents? Il y avait des rebelles, bien sûr, mais il souhaitait surtout savoir à quel point la menace avait évolué au sein de l'empire. A quel point les liens tentaculaires de la pègre et ses réseaux étaient remontés dans la noblesse. Et si les ennemis extérieurs étaient, comme il le pensait, déjà à l'œuvre.
    Depuis qu'il était devenu Griffe après tout, Deydreus n'avait pas encore eu le temps de vraiment analyser la situation exacte de l'Empire. Il avait échangé avec des officiers, visité des casernes mais... Il n'avait même pas encore réellement lancé les différents programmes qu'il avait prévu pour l'armée. Donc naturellement, le chevalier sombre n'avait pas put discuter réellement de l'état global de sa nation. Il y avait les rapports du conseil, évidemment, mais ces derniers étaient souvent pompeux et ne représentaient pas totalement la réalité du terrain. Zéphyr avait probablement sa propre vision des choses. Un regard plus objectif, froid, sur ce qui se tramait véritablement dans les ombres. Couplées à la force militaire dont il s'occupait, les informations que l'Oreille pouvait lui transmettre donneraient un avantage certain à l'Empire vis à vis de leurs ennemis, quels qu'ils soient. Et puis... Cette phrase était aussi un moyen d'entamer la conversation, d'en savoir un peu plus sur ce qui avait composé la vie de son camarade depuis leur dernière rencontre. Deydreus écouta donc les mots de l'Oreille, continuant de progresser à ses côtés. C'est alors qu'ils s'arrêtèrent subitement, de nouveaux bruissements et mots s'échangeant un peu plus loin.

    Ils approchaient du point de rendez-vous.


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  • Sam 25 Fév - 18:25
    Zéphyr n’est pas surpris quand la Griffe lui déclare que la jungle n’est pas l’environnement préféré de ses troupes. A dire vrai, ce n’est pas non plus l’environnement favori des espions et des assassins, quoique la forêt tropicale est un excellent endroit pour se dissimuler et agir en toute discrétion. La végétation est tellement dense qu’on peut s’y cacher partout, cela risque donc de plaire à ces hommes puisqu’ils pourront se déployer autour des troupes de Deydreus. D’autre part, il ne faut pas oublier que cet empire végétal est aussi un sacré labyrinthe. Un instant d’inattention, une errance un peu trop marquée, et on ne sait plus par où aller. C’est aussi la raison pour laquelle l’Oreille n’a pas choisi n’importe qui pour l’accompagner. Les hommes qui le suivent ont derrière eux des années d’expérience et un entrainement rigoureux qui leur permettra de s’adapter aux conditions difficiles de leur voyage. Quant aux locaux qu’il a envoyés enquêter, ils pallieront à leur manque de connaissance du terrain et ils leur éviteront de chercher une aiguille dans une botte de foin.

    Leur assistance sera d’ailleurs bien nécessaire, car ils risquent de tomber sur de sacrées bestioles en chemin. Zéphyr ne bronche pas quand son ami lui énonce la présence d’animaux en bordure de la jungle, mais s’ils peuvent éviter de croiser des serpents géants, des araignées au venin mortel, ou d’autres prédateurs qui les prendrait en chasse, ils vivraient sans doute un peu mieux cette mission. Autant se faciliter la vie quand on en a les moyens. L’homme retient quand même que des espions ont été aperçus un peu plus à l’est, puis, il suit le chef des armées reikoises à travers le campement. Le maître-espion hoche la tête quand Deydreus lui explique que les Serres pourpres resteront ici pour protéger leur base. Ils seront effectivement plus utiles ici que dans la jungle. A l’intérieur de celle-ci, leur équipement risque de détoner avec le milieu végétal, peut-être même que leurs armures leur porteront préjudice à cause de la chaleur et de l’humidité ambiantes. Ils pourraient certainement passer outre ces difficultés – ce ne sont pas des soldats d’élite pour rien – mais laisser leur camp en des mains sûres est aussi un souci en moins pour le commandant, qui pourra totalement se concentrer sur les rebelles et les insurgés. De toute façon, peut-être que viendra un moment où la Griffe aura besoin de son escouade et Zéphyr se doute déjà qu’ils répondront présents à l’appel de leur chef dès qu’il le leur demandera.

    Lorsque Deydreus l’abandonne quelques instants pour aller chercher ses affaires, Zéphyr en profite pour inspecter davantage son environnement. Il est certain que les Serres pourpres ont établi une nette discipline dans leur campement, mais cela n’étonne pas particulièrement le chef des réseaux d’espionnage. Cette troupe est connue pour son excellence, son professionnalisme et sa force : il n’est donc pas question de se laisser-aller, surtout quand on a des ennemis qui peuvent mener une charge à tout moment. Enfin, si les rebelles ne sont pas complètement fous, ils devineront facilement que faire une attaque éclair contre ce groupe serait quelques peu suicidaire. Les insurgés ont l’avantage du terrain là où les Serres savent s’adapter à n’importe quel champ de bataille. Il est donc beaucoup plus logique que les fauteurs de trouble les attendent dans leur terrain de jeu. C’est d’ailleurs vers la jungle que Deydreus et Zéphyr finissent par aller une fois que le guerrier a fini de se préparer.  A quelque pas d’eux, les espions du Reikois les suivent, mais lorsqu’ils arrivent à la lisière de la forêt, ils rompent leur rang pour se déployer un peu en avant des deux Membres de la Main. D’autres se déploient davantage sur les côtés, avant tout pour combler les angles morts par lesquels on pourrait les attaquer.

    Leur progression est malgré tout lente et l’environnement hostile de la jungle se fait déjà sentir. S’ils laissent passer des lacondas, il leur faut également couper des lianes, se frayer un chemin parmi les arbustes, franchir parfois des petits ruisseaux éphémères remplies de sangsues. Et puis, ils doivent également se méfier de la flore qui paraît calme, tranquille, et qui pourtant peut s’avérer bien redoutable. Mais mine de rien, ils avancent, et l’homme aux yeux ambrés finit par écouter la question de son frère d’arme. Il prend quelques secondes pour y réfléchir, parce que les choses sont souvent plus complexes qu’il n’y paraît.

    - Notre victoire a assurément permis au Reike d’augmenter sa force et son prestige dans le Sekai. Nul ne peut douter de nos capacités militaires ni de la détermination de nos dirigeants. Ca, c’est ce que dirait également le conseil à Deydreus, mais Zéphyr va évidemment être plus pragmatique, et il rentre d’ailleurs dans le vif du sujet directement. A dire que le monde de l’ombre est calme, non, pas du tout. Il faut toujours partir du principe que nous sommes entourés de bêtes sauvages prêtes à nous dévorer si on baisse notre garde. Certains diront que vivre ainsi est impossible et qu’on se pourrit l’existence. Moi, je considère que douter de tout le monde n’est pas trop mal, si on ne veut pas qu’on nous plante un couteau dans le dos.

    Zéphyr s’interrompt le temps d’enjamber un grand tronc d’arbre qui leur barre le chemin et il se tourne vers la Griffe.

    - La noblesse de l’Empire grogne sur l’Impératrice à cause de ses édits sur l’esclavage. Certains murmurent aussi que le prince héritier ne peut pas être un dragon. Cela a impressionné le bas-peuple, mais tu comprends bien que ceux qui veulent grapiller le pouvoir… ne savent pas sur quel pied danser avec le premier-né de leurs Majestés. Alors je les tiens attentivement à l’œil – même s’ils ne le savent pas – pour qu’ils n’aient pas des idées déplacées et saugrenues.

    L’Oreille s’arrête subitement lorsqu’un bruit suspect fait tressaillir quelques branchages, mais il s’agit d’un simple animal qui détale de toute la vitesse de ses petites pattes.

    - Je surveille également un nouveau culte récent, les Stellaires. Ils vénèrent Tensai et Ayshara comme des dieux et vouent une haine viscérale contre les Titans. A priori, on pourrait croire que ça nous sert, mais il ne faut pas que ça devienne un mouvement incontrôlable. J’ai mis une de mes espionnes particulièrement douée sur le coup pour bien suivre leur développement.

    D’ailleurs, Elia s’en sortira certainement très bien, quoiqu’il devra écouter prochainement son rapport.

    - Il faudra probablement aussi qu’on se concerte, toi, moi, et l’Empereur, pour ce qui concerne le Nouvel Ordre. J’ai entendu dire qu’ils ont envoyé des leurs pour se réapproprier Sancta. Pour l’heure, ce n’est qu’un petit mouvement… Mais il est mené par Seagan. Et s’ils récupèrent les forges de la ville maudite, ils auront certainement envie de partir en croisade.

    Une braise pouvait devenir un incendie, si on n’y prenait pas garde. Du moins, c’était le point de vue de Zéphyr. Et si les Shoumeïens n’avait pas la disciple de l’Empire, il fallait quand même se méfier de l’eau qui dort.

    De toute façon, mobiliser les troupes du Reike pourrait avoir du bon pour calmer les Ryssen frustrés par le comportement de leur chef de guerre. La vie « civilisée » ne convenait pas à ces barbares, qui aimait le chant des armes. Les faire de nouveau suivre Tensai pourrait apaiser leur rébellion latente et, s’ils voyaient l’Impératrice à ses côtés, peut-être se ferait-ils une meilleure opinion de la Voosdrak. Quoique la guerre sur les Titans aurait dû suffire, en vérité.

    - Quant à la pègre reikoise et la République… Honnêtement, ce sont des saletés, fait Zéphyr en accordant un sourire à son compatriote. Mais toi, tu as aussi fait des expéditions ces derniers temps ? Avant ta nomination en tant que Griffe ? Tu y as vu ou rencontré des personnes intéressantes ?

    C’est qu’il y a une sacrée différence entre la théorie et la pratique, entre les rumeurs qui arrivent à son bureau et le vécu des soldats de l’Empire.

    La conversation coupe court quand ils arrivent finalement sur les lieux du rendez-vous et que les deux hommes entendent subitement des bruits de voix. Imperceptiblement, Zéphyr se tend davantage et il se permet de prendre les devants en profitant de son agilité pour faire étonnamment peu de bruit dans les broussailles. Ses hommes aussi, ne sont pas en reste, mais bientôt, la menace est levée, puisqu’il s’agit bien de ses agents, dissimulés à l’ombre de quelques grands arbres de la jungle.

    Katar, Flavius, et les deux jumeaux sont présents lorsque leur chef s’avance et celui-ci ne tarde pas à laisser échapper un grognement.

    - Vous faites trop de bruit.

    Ca pourrait être assez froid, comme salutation, mais ses agents ne semblent pas le prendre mal le moins du monde, et ont, de toute façon, déjà la main près de leurs armes, comme s’ils étaient prêts à combattre ou à fuir à tout instant. C’est Katar, un homme à la peau mâte et à la tête totalement chauve, qui le salue avec bonhomie.

    - Il y a pas de mal, chef, les rebelles sont pas dans cette partie de la forêt, on a repéré les lieux avant.

    Une lueur intéressée jaillit dans les prunelles de Zéphyr alors qu’il prend le temps de voir si ses agents vont bien. Mais ils ont l’air en forme et si l’Oreille relève aussitôt l’absence d’une des espions, il va quand même à l’essentiel :

    - Vous les avez pistés ?
    - Ouais. Ils sont pas dans la partie nord, elle est trop infestée par les léopards et d’autres prédateurs. C’est jamais un bon plan de faire une planque trop près d’autres félins et grosses bêtes qui peuvent vous bouffer. Le coin ouest est aussi vachement marécageux et dangereux, avec les voraces, les reptiles et les plantes pirannah. Ou alors, ils ont pas voulu faire la guerre aux moustiques. Du coup, il nous reste le coin sud-est. C’était la partie de Lyora et des jumeaux.

    Ces derniers semblent particulièrement inquiets et embêtés alors que les yeux de Zéphyr se posent sur lui.

    - C’est Lyora qui a repéré un de leur campement, fait l’un d’eux, un adulte de la trentaine, à la peau courbaturée de cicatrices. On lui a dit de vous attendre, mais elle est la plus jeune du groupe et voulait déjà découvrir leur mode de fonctionnement. Elle est plus revenue après une mission de reconnaissance. On sait pas si elle s’est fait chopper, si elle est prisonnière, si elle a été tuée, ou si encore, elle a réussi à s’intégrer aux rebelles en leur faisant croire qu’elle rejoignait leur cause…

    Les possibilités sont en effet vastes, et le maître-espion prend le temps de considérer les déclarations de ses hommes de main.

    - On ne saura pas ce qu’il s’est passé en restant ici et il nous faut avancer tant qu’il fait jour. L’Oreille se retourne vers la Griffe et l’interroge du regard. Je suppose que tu n’as pas d’objections à aller jusqu’à leur base de nos chers insurgés ?

    Sachant, bien sûr, que le voyage n’allait pas se faire en quelques minutes non plus, loin de là...
    Le Chevalier Noir
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    Deydreus Fictilem
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  • Lun 27 Fév - 13:08
    Marchant aux côtés de Zephyr, Deydreus écoutait attentivement les mots de son collègue et ami. Il était toujours bon d'obtenir des informations, surtout vu le nouveau poste du guerrier. Il le savait, la coopération entre les services de l'Oreille et de la Griffe permettrait une grande amélioration de la vie au sein du Reike tout en assurant un renforcement des troupes et de leur efficacité. Il s'agissait de deux services complémentaires qui apportaient chacun des données supplémentaires à l'autre. S'arrêtant pour laisser passer quelques animaux venant perturber leur progression, le chevalier à l'armure noire tiqua sur quelques mots et sujets.

    - Les Stellaires... J'ai déjà croisé un groupe de mercenaires qui s'avéraient être des fanatiques du Shierak. Je ne sais pas s'ils faisaient spécifiquement parti de ce mouvement, mais ils s'étaient radicalisés au point de me forcer à tous les tuer. Il marqua une pause, enchainant. Tu fais bien de les surveiller, le fanatisme n'est jamais bon.

    Ils continuèrent ensuite leur marche aux travers de la jungle, quand Zephyr aborda le sujet du nouvel ordre. Instinctivement, les pensées de Deydreus allèrent à Luvïel avant de revenir à la situation tendue de Shoumeï.

    - Concernant le Nouvel Ordre.. Je sais que plusieurs fortins ont déjà subi quelques attaques venant des religieux. Je sais aussi que notre ancien prince aurait rendu visite à leur dirigeant... Pour le reste, le groupe m'a l'air aussi hétéroclite que ne l'était Shoumeï autrefois. Certains y sont pour se réfugier, ne sachant où aller. D'autres font serment de vengeance et de croisade, comme si nous étions les responsables de la destruction engendrée par leurs dieux. Il faudra effectivement en discuter, et jauger de leur menace véritable à l'égard de notre peuple. Je pense également qu'il nous faudra, à terme, mener une expédition à Bénedictus. Reprendre l'ancienne capitale de Shoumeï nous permettrait d'obtenir un symbole. Une preuve de notre bienfondé. Quitte à y instaurer une intendance comme à Mael, qui travaillerait main dans la main avec l'Empire. Le fanatisme aura toujours du mal à percer face à des mains tendues. Ce qu'ils cherchent, en vérité, c'est aussi l'affrontement. Quitte à partir en martyr, afin de fédérer plus de recrues.

    Deydreus aurait voulu aborder plus en détail le sujet avec son homologue, pouvoir échanger leurs pensées et mettre en place un plan permettant de pacifier la région dévastée tout en évitant de faire couler le sang inutilement. Bien sûr, il y allait avoir des affrontements, des conflits nécessaires. Mais cela était inévitable et en vérité se produisait déjà de manière disparate aux travers de ce territoire en ruines. Si l'être ailé se trouvait chez les croyants et apportait une vision modérée et tolérante au monde, le reikois savait également que des êtres avilies par leurs dogmes et radicalité siégeaient au sein de cet ordre religieux et n'aspiraient qu'à la destruction du Reike et son peuple. Et cela, la Griffe ne le permettrait jamais. Ecoutant la dernière question de son ami, Deydreus étira un sourire léger sur ses lèvres serrées.

    - J'ai effectivement pas mal voyagé, qu'il s'agisse de missions officielles ou simplement par curiosité. J'ai nettoyé avec mes hommes une ville infestée par la magie de X'O-rath, bourlingué à travers le désert à la recherche d'amis perdus... Et recruté pour notre armée. J'ai même déjà participé à une mission avec Tagar, notre Coeur. Je dois avouer être encore surpris que ce dernier se soit déplacée pour une opération militaire, étant donné sa position au sein du ministère. Je ne sais pas si tu l'as déjà rencontré mais, c'est un sacré personnage. Talentueux dans son domaine. Imprévisible dans le reste. Un léger rire s'échappa de sa gorge. En parlant de la République, j'ai un de leurs anciens captifs qui se bat à présent pour nous. Un membre des Serres qui n'est pas présent ce jour, déjà en mission avec Alasker, mon lieutenant. Visiblement, la situation de la nation bleue est toujours la même. Je me demande quand ils agiront contre nous.

    Un bruissement mit alors fin à la discussion des deux membres de la main. Quelques hommes de Zephyr sortirent alors de l'ombre, faisant leurs rapports tandis que Deydreus laissait ses yeux vairons glisser sur chacun d'entre eux puis sur les environs. La situation n'était pas excellente, sans pour autant être dramatique. Potentiellement, une espionne avait été attrapée et tuée. Dans le pire des cas. Sinon, elle serait simplement en train de faire son travail. D'œuvrer à obtenir le maximum d'information pour pouvoir par la suite parasiter les mouvements rebelles. Dans tous les cas, il fallait qu'ils en aient le cœur net. La question de Zephyr, bien que ne nécessitant pas réellement de réponse, étira un nouveau sourire sur le visage de la Griffe.

    - Bien sûr que non. Allons voir ce qu'il se passe là bas. Peut-être qu'en chemin, Lyora nous contactera.    

    Ils se remirent donc en route, balayant les feuilles et autres lianes qui entravaient leur marche. Le camp supposé ne se trouvait pas à côté. A vrai dire, il leur faudrait encore quelques heures de marche. Afin de tenir ses hommes informés de la situation et prêt à agir, au besoin, Deydreus demanda à l'un des espions de l'Oreille de retourner au camp pour faire un rapport et annoncer la suite des opérations à Léonard, qui transmettrait par la suite la chose aux autres Serres, ainsi qu'aux deux luteni l'accompagnant. Il fallait que les forces d'armées soient sur le qui-vive, prête à combattre. Car s'ils allaient observer le camp et peut-être sauver une espionne, le reikois ne s'imaginait pas se jeter bêtement à l'assaut d'une base rebelle à seulement quelques individus. Ils ne connaissaient pas encore le nombre, ni la composition exacte des forces ennemies et se jeter aveuglément dessus ne serait que pur suicide.

    Plusieurs heures passèrent donc. Progressant dans l'épaisse végétation, Deydreus commençait à éprouver une étrange lassitude. Non pas à cause du manque d'action, mais plutôt de la répétition de l'environnement. Lianes, plantes exotiques, chaleur humide. Tout un mélange fatiguant autant l'esprit que le corps. Il n'avait jamais été aisé d'avancer dans la jungle mais, le guerrier devait bien l'admettre, la marche de ce jour était plus éprouvante que d'habitude. Pour cause: une chaleur plus forte que d'habitude, et une faune particulièrement présente. Aux aguets, le groupe progressait les nerfs à vif. A force, cela pouvait s'avérer éprouvant pour l'esprit qui commençait à avoir du mal à analyser toutes les formes, tous les bruits qui pouvaient s'avérer mortels. Alors, l'homme aux yeux vairons s'efforçait à rester d'autant plus prudent. Chaque fois, pour pas grand chose. Ils rencontrèrent à plusieurs reprises des serpents géants et quelques géomis. Jusqu'à lors, les impériaux étaient parvenus à éviter l'affrontement, à prendre un autre chemin ou bien à attendre simplement que les animaux sauvages ne continuent leur route. Mais, à force, ils risquaient de rencontrer une créature plus belliqueuse que les autres. Plus féroce, ou affamé. Et plus ils approchaient de la position des rebelles, plus cette hypothèse s'avérait dangereuse.  

    Ils parvinrent finalement jusqu'à la dernière position connue de l'espionne. Contrairement au reste de la jungle, de nombreuses lianes avaient été tranchées, permettant une vue plus "simple" lors des déplacements. Cela était sans doute une manœuvre des insurgés, qui pouvaient ainsi mieux voir venir de potentiels adversaires. Choisissant de contourner les environs pour ne pas prendre le chemin "direct" vers le campement, le groupe de loyalistes progressait parmi les plantes, avec discrétion. Il était facile de penser que leurs ennemis ne les apercevaient pas mais, en vérité, rien ne leur indiquait que leurs ennemis ne possédaient pas un ou deux guerriers aux sens affûtés. Si tel était le cas, alors ils étaient déjà repérés, et se jetaient tout droit vers un piège. Seulement, rien ne vint s'opposer à eux. Pire encore, lorsqu'ils aperçurent le campement, ce dernier s'avéra vide. Enfin, presque.

    Parmi la végétation et l'humidité, plusieurs tentes et cases se dégageaient doucement, révélant une installation précaire de troupes armées. Après rapide analyse, on pouvait facilement se rendre compte que le nombre "d'habitation" n'était pas suffisant pour abriter un véritable groupe rebelle. Il ne s'agissait là que d'un camp d'éclaireur. Tout du moins, c'était là la première hypothèse. Progressant un peu plus en avant, Zephyr et Deydreus menaient la marche par rapport aux autres espions qui contournaient le camp pour pouvoir attaquer par d'autres angles, au cas où. Fixant la "base" de ses yeux vairons, le bretteur n'aperçut tout au plus qu'une dizaine de rebelles potentiels. Ces derniers portaient des protections faites de peau et de cuir tacheté, probablement issues de la faune locale. Les nombreux tatouages et autres marques de scarifications présentes sur leurs corps rappelaient aisément leur nature barbare et leur sauvagerie. Il ne s'agissait pas de simples brigands. Pourtant, encore une fois, le nombre de guerriers ne correspondait pas à ce qu'ils avaient eu comme information. L'option d'un camp éclaireur, évoquée plus tôt, ne tenait plus depuis qu'ils s'étaient approchés. Autour des quelques cases présentes, de nombreuses plantes se trouvaient encore couchées, vestiges d'anciennes tentes et autres lieux de repos installés auparavant. Quelque chose, ou quelqu'un, avait forcé une partie du groupe rebelle à se déplacer. Il restait à savoir pourquoi.

    S'approchant de Zephyr, Deydreus pointa du doigt les quelques guerriers présents ainsi que les traces d'anciennes tentes. Il était évident que son homologue avait déjà remarqué ces dernières mais, en vérité, il s'agissait là d'un moyen de se faire comprendre tout en demeurant silencieux. Etant donné la proximité des deux membres de la main vis à vis des insurgés, mieux valait-il communiquer de manière non verbale afin de s'assurer une discrétion maximale. Le but des gestes de Deydreus étaient simple. Fondre rapidement sur leurs ennemis, en neutraliser le plus possible, et interroger le reste. Il leur fallait des informations, et vite.

    Et ces guerriers allaient leur en fournir.    


    Quaerere et perdere [PV Zephyr] 7bdNafm

    Apparence des épées de Deydreus:


    Noble du Reike
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    Zéphyr Zoldyck
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  • Mar 28 Fév - 17:41
    C’est au tour de Zéphyr d’écouter Deydreus. Le duelliste est curieux de savoir ce que son compagnon d’arme a vécu et c’est d’un air attentif qu’il l’entend évoquer les Stellaires. Son ami lui raconte alors qu’il a rencontré un groupe de mercenaire durant son périple, suffisamment fanatisés pour que le guerrier doive les tuer. Impossible de savoir s’ils appartenaient au culte des Enfants Célestes, mais ils ont dû être incontrôlables pour que la Griffe en arrive à de telles extrémités. Sur ce point, les deux hommes sont bien d’accord, la foi portée à son paroxysme n’est jamais bon. C’est bien pour cela qu’une cellule entière d’espionnage est réservée aux hérétiques et aux déviances de la foi. Si cette branche s’intéresse particulièrement aux Titans, qui sont les ennemis du Reike, il ne faut pas non plus oublier les adversaires qui peuvent nous gangréner de l’intérieur. C'est pourquoi le maître-espion est particulièrement vigilant envers ce mouvement dirigé par la "Prima Stella" dit-on. Mais on verra bien ce que cela donnera.

    Quand Deydreus mentionne le Nouvel Ordre, son compagnon continue d’écouter. Lui aussi a entendu parler de la visite de Vaenys à Celestia. Impossible que cela lui échappe, lui qui est quand même censé surveiller la rébellion qui soutient le prince déchu. Quand au reste de ce groupe religieux, l’Oreille a bien conscience qu’il est essentiellement composé de petites gens, qui ont d’ailleurs tout perdu. Il a sincèrement du mal à comprendre pourquoi les Shoumeïens portent encore un culte envers les Titans alors que ceux-ci leur ont fait horriblement du mal. Malgré tout, oui, certains vont à Célestia pour trouver un refuge. D’autres fomentent des plans de croisade et de vengeance… Pourtant, Zéphyr est persuadé qu’ils pourront se protéger du fanatisme religieux avec des gens comme Tensai ou Deydreus. L’Esprit, autre membre de la Main, n’est pas non plus à négliger, puisque ce mage réputé peut trouver des solutions autres qu’à travers les forces militaires. Tant qu’ils auront des chefs ingénieux qui se dédieront à leur nation, ainsi que des soldats qui croiront à la nécessité de luter contre ce mal religieux, ils pourront faire face à cette menace venue de l’Est.

    Reprendre Bénédictus n’est également pas une mauvaise idée, songe Zéphyr. L’homme n’y avait pas particulièrement songé, car son but est d’avant tout de s’informer, pas de prévoir leur expansion militaire. Cela dit, cette proposition n’est pas si incongrue. Cela renforcerait leur présence dans les terres du Shoumei. Cela donnerait un coup au Nouvel Ordre. Cela assoirait la légitimité reikoise, aussi. Qui plus est, la capitale doit avoir bon nombre de secrets : elle est notamment réputée pour son savoir et ses somptueuses bibliothèques. Le Reike ne pourrait donc que s’enrichir de ces nouvelles connaissances.

    Pour peu, le maître-espion en viendrait à regretter qu’ils ne soient pas dans une tente de commandement, à planifier leur future progression. Voir les faiblesses et les avantages du terrain, prévoir les résistances populaires, ainsi que les menaces qui peuvent se cacher dans la ville. Regarder si l’armée reikoise est prête pour devenir à nouveau le fer de lance de son pays. Ce genre d’expansion ne se prépare pas sur un coup de tête, mais l’Empire trouverait beaucoup davantage à s’emparer effectivement de Bénédictus.

    - Nous pourrons toujours préparer un projet commun, à présenter à Tensai. Car en définitive, ce sera le roi qui aura le dernier mot. Mais ça me semble un bon plan. Je pourrais toujours envoyer mes propres hommes en éclaireurs. Des voyageurs par-ci par-là, on ne les remarque pas. Ca permettrait de prendre la température de la capitale. Il faudrait aussi analyser quels sont les environs directs de Bénédictus pour voir si on doit craindre des groupuscules rebelles ou même d’autres créatures qui pourraient s’en prendre à nos soldats ou aux petites gens. Un bref silence alors que Zéphyr se penche pour éviter une branche un peu trop basse. Mais une telle action ne se fera pas sans réaction de la part de Shoumeï et même de Célestia. Il faudra prévoir les choses sur le long terme.  Le maître-espion songe déjà à quelles personnes il pourrait envoyer sur place pour leur ramener un maximum d’informations, et finalement, il accorde un sourire à Deydreus. Parlons-en à notre retour. Cela demandera peut-être beaucoup de préparation en amont, mais comme tu dis, ça nous ferait un symbole. Et je ne pense pas que nos souverains le verraient d’un mauvais œil, à condition qu’on s’y prenne bien.

    Le Reikois laisse ensuite le guerrier reprendre la parole. Apparemment, il ne s’est pas ennuyé entre ses missions officielles et ses voyages dans le Sekai. Zéphyr hausse un sourcil quand il évoque un village infesté par la magie de X’Orath : voilà bien un contexte particulier qui n’a pas dû être facile à gérer. Qu’il recrute pour son armée n’a rien d’étonnant, du reste, et ce serait même étonnant qu’il s’en prive, étant le chef militaire du pays. Par contre, un léger sourire vient orner les lèvres de l’espion quand Deydreus mentionne Tagar.

    - Cet homme a de la ressource. Il semble doux comme un agneau, mais il est sacrément investi pour notre pays. Je lui ai d’ailleurs proposé d’aller montrer ses pouvoirs de mage à l’Université de Drakstrang. Il contrôle une magie complexe, ce n’est pas courant, et nos recrues pourraient s’entrainer face à lui. Pas forcément tous les jours, ce n’est pas possible. Mais pourquoi pas une fois par semaine si ça lui plait. Ou une fois par mois. Je pense qu’il peut nous apporter beaucoup, et qu’il n’hésite pas à mettre la main à la pâte si c’est nécessaire. Mais je n’échangerai nos domaines d’expertise pour rien au monde, termine l’homme en faisant une boutade. Les finances et lui, ce n’est pas son truc, alors autant que Zéphyr garde sa spécialité, c’est-à-dire l’espionnage. Quant à la République… Les élections présidentielles, qui arriveront dans quelques mois, vont à nouveau faire bouger les choses. Je pense que cela va créer des plus grandes périodes de tension à ce moment-là. Aucun candidat ne voudra perdre la face face à son peuple, alors ils pourraient se montrer plus belliqueux ou plus traîtres à ce moment-là. Quant à agir contre nous… L’Oreille hausse les épaules. Ils sont des opportunistes, donc ils le frapperont dès qu’ils trouveront une de nos faiblesses. C’est à nous d’être plus malin et plus retors qu’eux.

    La conversation se termine lorsque Zéphyr écoute le rapport de ses espions en place. Soyons honnêtes, le duelliste n’est pas vraiment heureux que l’une de ses subordonnées manque à l’appel, mais il n’est pas du genre à ressasser des idées noires dès qu’il y a un imprévu. Le combattant est un homme d’action, qui envisage toutes les hypothèses et qui agit ensuite pour savoir ce qu’il s’est réellement passé. Il ne dit pas qu’il sera tendre si on a fait du mal à Lyora, mais il sait également qu’être pris sur le fait et être tué sont les risques du métier. De toute façon, la demoiselle pourrait très bien être en vie, au milieu des rebelles, afin de tout savoir concernant leurs plans. Les Reikois doivent encore investiguer pour en savoir plus.

    Le principal, pour le moment, c’est de bouger, d’autant qu’ils savent approximativement où est leur campement. Aussi, quand la Griffe émet son accord, ils se séparent juste d’un messager qui va transmettre un rapport aux Serres pourpres. Cela permet à leur armée de se tenir prêt et aux aguets.

    Cela étant dit, leurs nerfs vont être mis à rude épreuve. Autant ceux qui sont sur le camp, en marge de la jungle, que ceux qui sont à l’intérieur de celles-ci. Il ne faut pas quelques minutes pour atteindre la planque des rebelles. Non, il faut quelques heures, et tout au long du chemin, les soldats guettent le moindre signe, le moindre bruit qui trahisse un animal hostile, une plante dangereuse, ou la présence des insurgés. Au fil du temps, les sujets de conversation s’épuisent ; et puis, plus ils se rapprochent de l’emplacement des rebelles, moins ils veulent être surpris. Le silence est donc de mise. De temps en temps, en accord avec Deydreus, Zéphyr impose des courtes pauses, pour que chacun puisse s’abreuver correctement ou récupérer de leur marche forcée. Au bout du compte, le Reikois espère qu’il n’y a qu’une seul « village » des rebelles, tout comme il espère que, s’il y en a plusieurs, ils ne sont pas espacés par quelques heures de marche chacun. Sinon leur expédition va être longue. Très très longue.

    Ils arrivent finalement à la dernière position de Lyora. A partir de ce moment, les jumeaux espions se permettent de donner davantage de conseils. C’est qu’ils connaissent bien les lieux, faute de l’avoir fréquenté pour Zéphyr, et ils apprennent donc à leur chef tout ce qu’ils ont appris sur cet endroit. A l’avant, les rebelles ont positionné des postes de contrôles, mais l’arrière est un peu moins bien défendu, parce qu’il a été compliqué d’imposer la présence humaine à la flore de la jungle. C’est par là qu’ils auront intérêt à pénétrer dans le campement, et le groupe de loyalistes opte dès lors pour la prudence.

    Pourtant, il fait redoutablement calme.
    Tellement calme que Deydreus et ses compagnons ne trouvent qu’un campement vide.
    En tout cas c’est ce qu’ils pensent, jusqu’à ce qu’ils repèrent quelques tentes, qui ne sont pas suffisamment nombreuses pour le groupe rebelles qu’ils représentent. S’ils étaient si peu, il n’aurait pas été nécessaire d’envoyer Zéphyr et Deydreus sur cette mission. De la même manière, ils n’auraient pas été capables de neutraliser les hommes de main envoyés par la Griffe.
    Pourtant, même s’il s’agit de sous-fifres, le maître-espion est prêt à mettre la main sur eux s’il s’agit d’en savoir plus sur leur organisation. Evidemment, puisque ce sont des rebelles, ils voudront certainement combattre avant de se rendre. La fierté des guerriers reikois est même telle que certains préfèrent rejoindre les Astres plutôt que d’avouer leurs plans à leurs ennemis. Les membres de la Main ont cependant l’avantage de ne pas encore avoir été repérés, et quand Deydreus l’interpelle par geste, l’Oreille hoche la tête pour dire qu’il a compris. Si certains de ses espions se sont déployés pour couvrir le reste du camp, il lui reste néanmoins quatre, et le chef de assassins leur fait signe de se mettre en binôme pour se concentrer sur deux tentes. Les autres hommes de Deydreus en prendront deux autres. Quant à Zéphyr, il suggère silencieusement au guerrier de faire équipe avec lui et, après avoir sorti sa lame s’en faire un bruit, l’Oreille entre le premier dans l’abri fait de lin et de toile.

    C’est alors qu’il comprend pourquoi il y a si peu de monde dans ce camp.
    Il s’agit là d’hommes blessés.
    Zéphyr en a la certitude dès qu’il pénètre dans la tente. Il y règne une atmosphère maladive, étouffante, celle qui montrent qu’on empeste et qu’on est mal en point. D’ailleurs, le malade doit certainement être fiévreux, car il met un instant à se rendre compte de la présence des guerriers. Le convalescent croise le regard de Zéphyr qui a instinctivement pointé son sabre vers sa gorge et il émet d’abord un grognement. Mais c’est avant tout parce que sa gorge est sèche, il est manifestement trop faible pour se défendre.

    Loin de se détendre pour autant, Zéphyr prend les devants et vérifie qu’il n’y a ni arme, ni piège qui pourraient les prendre de revers. Il y a bien une masse d’arme pas loin du lit – le guerrier a d’ailleurs tendu la main vers celle-ci, mais ses forces sont moindres, si moindre qu’il ne serait pas capable de lever le manche.

    Quand Zéphyr est sûr qu’il n’y a pas de danger ni pour Dey, ni pour lui, il finit par inspecter davantage le convalescent qui essaie bien de dire quelque chose, il le voit. Le maître-espion s’agenouille à hauteur de sa poitrine et finit par comprendre d’où vient son mal. Le combattant a été salement mordu à la jambe. Le genre de blessure qui entraine une claudication à vie, si elle est bien traitée. Mais on est dans la jungle, pas dans les belles rues d’Ikusa, et la plaie s’est infectée.

    - Ils ont abandonné les blessés qu’ils ne pouvaient pas transporter.

    D’ailleurs, c’est ce que vient leur dire un de ses hommes de mains. Les guerriers dans les autres tentes sont soit des invalides, soit des gens trop faibles pour continuer leurs pérégrinations dans la jungle. Plutôt que d’emporter des poids morts, les insurgés ont préféré laisser ici leurs hommes. Sauf que, sans soutien extérieur, c’est les condamner à une agonie lente.

    Après que le maître-espion ait commandé à leurs subordonnés qu’il n’y avait ni piège, ni armes cachées, Zéphyr échange un regard avec la Griffe et commence à interroger l’inconnu.

    - Ohé. Tu m’entends, soldat ?

    Epave aurait été un meilleur terme, mais Zéphyr n’est pas du genre à mépriser ses ennemis pour autant. D’ailleurs, même si son interlocuteur semble avoir du mal à le suivre, un râle s’échappe de sa bouche et Zéphyr comprend in extremis ce qu’il veut.

    - … eau.

    Le maître-espion est peu disposé à donner sa gourde à un inconnu qui est malade et févrieux, mais heureusement, il trouve bien vite la besace de du convalescent. Dans son sac se trouve ses réserves d’eau et heureusement, elle ne sont pas encore vides, même si l’eau ne doit pas être de première fraîcheur.

    Zéphyr se tourne vers le combattant, presse le précieux liquide à ses lèvres, et heureusement, l’insurgé a encore suffisamment de force pour avaler.

    L’Oreille n’est cependant pas là pour jouer les infirmières. Il sait désormais que l’homme est parfaitement conscient, que même, il le comprend, alors il ouvre la bouche à son tour.

    - Où sont partis tes frères ? Qui t’a fait cette blessure ? Pourquoi avez-vous abandonné ce campement ? Quel est votre chef et qui vous guide dans al jungle ?

    Chaque question, Zéphyr l’agrémente d’une longue pause pour laisser au guerrier l’occasion de répondre. Si celui-ci veut bien lui dire quelque chose. Car il peut très bien lui cracher au visage ou, d’un geste de désespoir, essayer de se faire du mal.

    Le fait est qu’il faudra peut-être les tuer après, tant leur mal semblent trop avancés et définitivement incurables.
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  • Mer 1 Mar - 13:03
    Ainsi, les rebelles avaient abandonné leurs blessés. Enfin... Pas que. Des quelques tentes qu'il voyait, le chevalier estima rapidement le nombre de malades qui se trouvaient ici. S'il n'approuvait pas particulièrement l'attitude des rebelles et leur volonté d'abandonner leurs frères d'armes à la mort, le guerrier la comprenait. Ils se savaient traqués, menacés, et transporter les malades représentait un risque trop important. Il y avait aussi la notion de propagation des maladies, qui pourrait emporter bien plus de combattants qu'il n'y avait de blessés au départ. C'était là un aspect que les grands récits de campagnes militaires taisaient volontairement. Quelque chose que même les grandes écoles comme Drakstraang n'abordaient pas. Une maladie, propagée dans un campement, était bien plus dangereuse et létale que les grandes batailles. Et ça, c'était déjà le cas lorsque l'organisation du camp était organisée. Quand il s'agissait de petits groupes, de barbares œuvrant dans l'ombre et au style archaïque Et bien... Cela pouvait souvent représenter la fin de leur pitoyable rébellion.  

    Observant son homologue qui tendait de l'eau à l'un des blessés, Deydreus écouta l'Oreille qui commençait son interrogatoire. Là, dans cette tente, le sombre chevalier ne servait pas à grand chose alors, il quitta la compagnie de son ami pour quitter la tente. Il y avait d'autres blessés. D'autres rebelles à interroger. Puis, ils abrègeraient leur souffrance. Il était inutile de tenter de les sauver, de vouloir les mettre en prison. Ces hommes étaient condamnés. Qu'il s'agisse de la maladie ou bien de futurs jeux d'arènes où on les opposerait à des adversaires vifs et en pleine forme. Au final, mourir ici dans la jungle pour une cause en laquelle ils croyaient, emportés par un ennemi juré plutôt que par la maladie, c'était là une fin bien plus désirable que les autres.

    Une fois dehors, le sombre chevalier observa le camp plus en détail. Sa structure était globalement bonne, surtout depuis que les tentes et cases avaient été déplacées. Pour le reste, les quelques guerriers qui n'avaient pas été touchés par la maladie se trouvaient étendus sur le sol, tués ou assomés. De nouveau, Deydreus estima qu'il faudrait mettre fin à leur vie. Ils étaient loin du camp impérial, et ils ne comptaient pas s'encombrer de prisonniers hostiles. Cela représentait une organisation trop complexe. Alors, la plupart des rebelles avaient été interrogés. Sans succès. Trop fiers qu'ils étaient. Trop têtus. Même face à la mort. Se détournant de ce triste spectacle, l'homme aux yeux vairons entra dans différentes tentes, principalement pour analyser le niveau "d'éveil" des malades et blessés qui s'y trouvaient. Chaque fois, rien n'éveillait particulièrement son intérêt, jusqu'à ce qu'il n'entre dans une case un peu plus éloignée des autres. Où se trouvait un homme au visage couturé de cicatrices et dont une plaie béante suintait tout le long de son thorax. Avançant silencieusement, le reikois vint se placer au dessus du pauvre bougre afin de regarder plus en détails la blessure. Infectée et puante, la plaie s'étendait douloureusement de la hanche et remontait en diagonale jusqu'à s'achever au niveau du pectoral. Ce n'était pas une plaie infligée par une morsure ou créature. Mais par une lame. S'agenouillant près du rebelle, le chevalier sorti une potion de soin de la sacoche qui siégeait à sa ceinture. Son regard vairon se fixa dans les yeux noirs du barbare, cherchant à créer un "lien" avec ce dernier.

    - Cette plaie n'est pas belle à voir. Il te reste quelques heures. Au mieux. Il marqua une pause, pointant du doigt le bas de la plaie. L'infection s'est propagée dans ton organisme. La fièvre te ronge et de ce que je vois, la septicémie n'est plus très loin.

    Le barbare grogna, tentant lamentablement de se redresser. Déposant la fiole de soin sur le côté, Deydreus aida ce dernier à se placer en position assise, sans aucune forme de violence avant de reprendre la fiole une fois le guerrier en place.

    - Je sais que tu peux parler. Alors, je vais rapidement te poser une question simple. Tu es le chef de ce campement, n'est-ce pas?

    Le rebelle grogna de nouveau, laissant la douleur qui tiraillait ses traits se changer en une mine attristée, déçue. Visiblement, le sombre chevalier avait fait mouche.

    - Je l'étais.
    - Ils t'ont abandonné, n'est-ce pas? Dès qu'ils ont vu que tu n'étais plus capable de les diriger. Ou bien... Cette plaie est le fruit d'une insurrection?
    - Ironique... Une rébellion dans un clan de rebelles... J'ai voulu cesser le combat. Mon fils lui. Voulait le poursuivre.

    Ses yeux quittèrent le visage de la Griffe pour venir se perdre dans le fond de la case. Outre la plaie qui courrait sur son corps, la blessure infligée dans son cœur était la plus vive.

    - Où sont-ils allés?
    - Je ne peux répondre.
    - La fierté ne les sauvera pas, tu le sais comme moi.
    - J'ai tout de même mon honneur à préserver.
    - L'honneur? Le reikois marqua une pause, soupirant de lassitude. Tu penses que l'honneur aura de l'importance lorsque nos lames traverserons la chair de ton engeance? Que cela importera si nous le capturons vivant et qu'il passera sous les griffes de nos tortionnaires? Au fait, quel est ton nom?
    - Gurrak de l'eau noire.
    - Et bien, Gurrak. Laisse moi t'énoncer quelques vérités. Ton fils va mourir. Sois en certains. La question reste cependant de savoir comment. Il peut tomber sous nos coups, trépassant dans une bataille glorieuse pour ses propres valeurs car nos troupes seront venus le chercher. Ou bien tu peux te taire. Auquel cas nous finirons tout de même par le retrouver. Peut-être demain. Peut-être dans un an. Mais nous le retrouverons. Et à ce moment là, ma patience se sera épuisée. Ma bonté également. Il n'y aura nul combat. Nul duel glorieux. Seulement une exécution. Lente. Minutieuse. J'écarterais ses chairs de mes lames lentement. Je prendrais soin qu'il souffre à chaque instant, qu'il regrette chacune de ses décisions. Qu'il regrette s'être opposé à nous. Ce n'est pas une menace. Pas quelque chose que je te dis pour te faire peur. Seulement une promesse. Il ne reste qu'à toi de choisir quel destin tu préfères pour ta progéniture.

    Il secoua doucement la fiole de soin qui se trouvait dans sa main gantée, faisant tournoyer doucement le liquide carmin à l'intérieur.

    - Je pourrais également te donner ceci. Sauver ta vie. Faire jouer la raison et permettre une cessation de vos actes. Tu serais naturellement arrêté, mis en geôles, mais ta vie serait épargnée. Ton clan serait redirigé vers votre domaine natal. Ou bien prêtera de nouveau serment d'allégeance à notre Empire. Je ferais en sorte de les envoyer au front. Qu'ils puissent se nourrir de combats et de récits à raconter une fois rentrés chez eux.
    - Mon fils a entaillé ma propre chair, avec ma propre lame. A ses yeux, et aux yeux de mon clan, je suis déjà mort. Me soigner n'y changerais rien.
    - Quel dommage. Il rangea la potion, considérant tout de même le barbare. Je suppose que tu camperas sur tes positions, attendant que la mort ne vienne te chercher, à l'agonie dans une case miteuse?    
    - Je l'ai déjà dit. J'ai mon honneur.

    Soupirant, Deydreus se releva doucement, observant une dernière fois le chef barbare. Il eut envie de le faire souffrir, l'espace d'un instant. De prolonger sa lente agonie en ouvrant quelques plaies ici et là, pour s'assurer que ses lames vicieuses viennent mordre son âme tout comme sa peau. Mais... La mélancolie de cet homme n'évoquait en réalité rien d'autre que de la pitié. Non pas vis à vis de son état, mais de sa triste existence. De la trahison subie. L'homme avait dédié sa vie à son clan. Avait pris les armes contre le reike, probablement à cause de ses camarades et avait simplement souhaité la fin des hostilités une fois qu'il s'était rendu compte de l'impossible victoire.

    - Une dernière question Gurrak. Qu'est-ce qui a blessé tes autres hommes?
    - Des bêtes... Mon fils voulait dompter des créatures pour vous affronter... Comme vos régiments spéciaux... Certaines se sont défendues...
    - Je vois.

    Il n'y eut alors aucun mot. Aucun au revoir. Deydreus trancha simplement la tête du blessé sans plus de cérémonie. Il avait abrégé ses souffrances. Purement et simplement. Il lui avait offert une mort digne, assis au lieu d'être allongé. Passé par le fer plutôt qu'emporté par la maladie. L'homme était mort avec son honneur, sa fierté. Même si le reikois détestait cela. Se détournant du corps inerte, l'homme aux yeux vairons rengaina son arme et sortit de la case pour retrouver l'Oreille et les espions de ce dernier.

    - Je sais qui dirige leur camp. Et ce qui a causé tant de blessés. Mais rien concernant leur possible destination. Il s'arrêta quelques instants, écoutant le vent qui passait dans l'épaisse végétation. As-tu eu plus de chances de ton côté?


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    Apparence des épées de Deydreus:


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  • Sam 11 Mar - 12:12
    Quand Deydreus sort de la tente pour aller interroger d’autres blessés, ou inspecter le campement, Zéphyr ne tourne pas la tête dans sa direction. Tout son attention est actuellement concentrée sur l’infirme qui est en proie à la fièvre et à l’agonie. L’homme est faible : son souffle est saccadé, son regard est vague. Parfois même, un râle le prend quand une toux un peu trop forte saisit ses bronches. L’homme n’en a plus pour longtemps, et c’est pourquoi l’Oreille préfère se concentrer sur les rares paroles que le rebelle pourrait lui donner. Du reste, son comparse ne va pas bien loin, et il a raison de sortir de l’abri en lin : à quoi bon être à deux sur un interrogatoire si l’un d’eux ne peut rien dire ? Autant aller chercher des informations ailleurs. Il y a de quoi faire, après tout, le refuge abandonné n’est pas énorme, mais il reste grand pour le groupe qu’ils représentent. Le ratisser efficacement sera sans doute la prochaine étape. Pour l’heure, Zéphyr attend des réponses, et contre-toute attente, l’insurgé semble revenir à lui quelques instants. Mais ce n’est pas pour lui donner ce qu’il attend.

    - Achevez-moi…

    Son ton est presque inaudible, mais le maître-espion l’a entendu. Cela ne veut pas pour autant pas dire qu’il va respecter ses volontés, et l’assassin secoue légèrement la tête.

    - Pas encore. Pas tout de suite. Réponds à mes questions avant de rejoindre les Astres. Où sont partis les rebelles ?

    Cette fois, c’est un rire épuisé qui lui répond.

    - Vous les rattraperez pas. Ou si vous les rattrapez, vous vous ferez tuer. On a déjà eu vos patrouilles. Vous finirez comme eux.
    - Peut-être bien, peut-être pas. Où sont-ils allés ?
    - Je le dirai pas.

    Ah, le foutu orgueil et honneur reikois. Zéphyr ne peut pas désapprouver fondamentalement la loyauté qu’il porte à ses camarades, pourtant, il souligne un point qui lui vient spontanément à l’esprit.

    - Tes frères t’ont abandonné dans une jungle hostile et dangereuse. Il aurait été plus miséricordieux de t’accorder une mort digne plutôt que de te laisser agoniser comme un misérable.

    Une grimace apparaît fugacement sur le visage du soldat.

    - Myra l’a pas voulu. Les traîtres doivent avoir aucune miséricorde, qu’elle a dit. Comme si Gurrak avait pas de raisons de vouloir…

    Une toux l’interrompt et l’empêche de finir sa phrase. Cette fois, un crachat sort de ses lèvres, et il ne faut pas être malvoyant pour deviner qu’il crache du sang. Impassible, Zéphyr le regarde faire et embraie directement sur le sujet qui l’interpelle.

    - Qui est Myra ?
    - Une garce.
    Merci, ça l’avance bien.
    - Mais encore ?
    - Elle a rejoint la rébellion il y a quelques semaines. Ca a été suffisant pour retourner la tête du fils de Gurrak. C’est un bon guerrier, mais avec elle, il s’est cru invin…

    Il est de nouveau interrompu par une quinte de toux et cette fois l‘homme a du mal à reprendre sa respiration. D’un geste, il esquisse une supplication pour lui dire de l’achever mais Zéphyr essaie de mettre ces tout nouveaux éléments sur son échiquier. Il a fichtrement aucune idée de qui est Gurrak et son gamin, mais ces questions seront pour plus tard.

    - Combien êtes-vous ? Pourquoi cette femme est dangereuse ?

    Il faut du temps à son homologue de répondre, cette fois, mais il finit par dire :

    - Vous le saurez quand vous la verrez. C’est plus une sorcière qu’une femme si vous voulez mon avis, et…

    L’homme semble tressaillir sous un effort brusque et rapidement, Zéphyr comprend pourquoi. Tout concentré sur les propos de l’homme, qui sont du reste plus un murmure qu’une véritable flux de paroles, le chef des espions n’a pas remarqué que le rebelle a finalement réussi à mettre la main une de ses dagues, cachées dans les replis de ses vêtements. Il doit réunir toutes ses forces pour accomplir cet exploit. Maintenant, la lame vient droit vers l'Oreille, mais le blessé est trop faible pour être une vraie menace envers son ennemi. D’un geste vif, et anormalement rapide, le membre de la Main dégaine à son tour sa propre dague et dévie facilement l’attaque à son encontre. De son autre main, il vient placer son arme contre sa jugulaire et la tranche d’un geste rapide. L’insurgé n’allait que lui faire perdre du temps, et n’était manifestement pas décidé à lui dire grand-chose de pertinent. Inutile de le retenir ici alors qu’ils ont un groupe d’insurgés à traquer.

    Indifférent au sort du pauvre bougre, qui n’est désormais plus qu’un cadavre à ses pieds, le duelliste se redresse et s’intéresse davantage aux biens du blessé. La tente est rudimentaire, et on ne peut vivre garder grand-chose, dans un abri si petit, pourtant, il a quelques possessions qui pourraient bien donner des indices à Deydreus et à lui-même. Délaissant les vivres périmées, les quelques bouts d’armures mal entretenues, ou les armes qui ne lui sont d’aucun intérêt, le maître-espion ne trouve rien de prime abord. Alors il s’intéresse à la couchette et à la silhouette du guerrier. Le combattant n’est pas beau à voir, il a même un aspect repoussant à cause de l’odeur qui se dégage de sa plaie et de son corps malade et presque cadavérique. Peut-être que ses anciens camarades ont veillé à ce qu’il ne reste aucun indice dans sa tente, mais peut-être aussi n’ont-ils pas approché de son lit de fortune. La chance est avec lui, puisque Zéphyr finit par découvrir un journal de mauvaise qualité, ravagé par la chaleur, l’humidité, et puis aussi, par l’écriture peu délicate de son propriétaire. Mais le rebelle y a forcément noté des informations. C’est tout ce qui l’intéresse.

    Les premières pages du journal sont enthousiastes. Pourquoi douter de leur cause ? Gurrak est un homme grand, sage, lucide, qui sait mener une guerre longtemps s’il le souhaite. La jungle est hostile, mais ils peuvent y survivre, ils connaissent le coin. Et ils ont le temps de se préparer avant qu’on ne soupçonne des premiers élans de rébellion. Alors ils profitent des premières semaines pour établir déjà un premier campement. Evidemment, le seigneur de Kyouji n’est pas totalement stupide, les autorités en place commencent à remarquer qu’il y a beaucoup de va-et-vient dans la jungle. Mais quand on se décide à intervenir, le groupe de rebelles est déjà bien installé. Ils savent riposter et résister.

    L’euphorie, avec des hauts et des bas, continue encore quelques semaines. L’homme écrit de manière sporadique et irrégulière, quand il n’est pas trop fatigué par la vie du camp, les combats ou les activités de la résistance.  Parfois, il prend des notes toutes les deux semaines, parfois, il écrit de façon beaucoup plus prononcée, par exemple quand les insurgés vainquent les patrouilles envoyées par l’Empire. C’est dû non seulement à la vaillance de leurs guerriers et à leur connaissance de la jungle, mais aussi de nouvelles recrues au sang neuf, dont une certaine Myra, une jolie magicienne qui a ramené d’autres recrues avec elle. Au début, le blessé ne semble pas la voir comme une menace, l’admiration semble percer dans sa voix. Mais les choses dévient quand Gurrak exprime des réserves sur leur mouvement, semble-t-il. Le chef, croit comprendre le maître-espion, perd alors l’autorité sur ses hommes. A partir de ce moment, les notes sont plus espacées, moins longues, plus difficiles à comprendre aussi. Ca doit être à partir de ce moment-là que l’homme a été blessé. Son écriture, qui est déjà une patte de mouche au départ, devient encore plus tremblante, instable, illisible et au lieu de parler de la résistance, il parle davantage de son état qui se dégrade.

    D’un air songeur, Zéphyr sort de la tente. Deydreus semble encore occupé avec l’un des blessés, alors l’Oreille en profite pour prendre des nouvelles de ses espions. Ceux-ci sont suffisamment indépendants pour savoir qu’ils doivent fouiller le camp et interroger les autres blessés. Alors ils vont bientôt voir leur chef avec les informations qu’ils ont recueillies. Au bout du camp, il y a vraisemblablement eu des cages destinées à enfermées des bêtes : on soupçonne des lancondas, des jaguars, ainsi que géomis, cages dans lesquelles on a d’ailleurs retrouvé des morceaux de squelettes humains. Leurs hommes, peut-être ? Le regard de Zéphyr s’assombrit légèrement, mais il continue d’écouter le rapport de ses hommes. Outre une sorte de « garde-manger » qui a été totalement mis à sac, il semble que les rebelles aient préféré brûler toute trace compromettantes de leur passages avant leur départ. Mais ils n’ont pas été assez vigilants, semble-t-il, puisqu’un des espions a pu récupérer un bout de parchemin calciné. Une carte avec des annotations semble-t-il. Une grande partie du croquis est calcinée, mais, par bonheur, le campement dans lequel ils se trouvent actuellement est bien visible et différentes croix montrent leurs possibles retraites dans la forêt tropicale. Une flèche part notamment du campement pour désigner un point dans le nord. C’est vraisemblablement par là que les rebelles sont partis, peut-être parce qu’ils ont un point d’eau à proximité, qui pourrait les aider dans leur survie.

    Deydreus sort sur ses entrefaites et vient à sa rencontre. Les espions de Zéphyr laissent aussitôt les deux hommes pour repartir à la recherche d’indice et le sabreur se tourne vers la Griffe. Son ami a apparemment appris des choses, et l’assassin acquiesce d’un air appréciateur.

    - J’ai découvert l’existence d’une Myra, qui a foutu le bordel dans la résistance. Au point de retourner l’esprit du fils d’un certain Gurrak apparemment. Ca te dit quelque chose ?

    Ca semblait une mage redoutée, mais il ne connaissait pas encore ses compétences.

    - Ce journal retrace pas mal ce qu’il s’est passé. Je pense que les rebelles lui auraient mis le feu s’ils avaient eu connaissance de son existence mais… le blessé avec qui j’étais tout à l’heure l’avait caché dans un repli de sa couchette. Ils ont été négligents, ce dont je ne vais pas me plaindre. Vu ce qu’il y est écrit, j’estime qu’ils étaient une cinquantaine, tout confondu. Avec la maladie et les blessés, leur nombre a peut-être pu diminuer. Mais ça ne les rend pas moins dangereux.

    D’autant qu’il ne faut pas sous-estimer de potentielles recrues qui viennent agrandir leurs rangs.

    En tous les cas, Zéphyr raconte globalement ce qu’il a découvert dans ce cahier, puis, il lui tend la carte à demi-calcinée trouvée par ses espions.

    - Tout indique qu’ils sont allés vers le Nord, peut-être pour s’enfoncer encore davantage dans la jungle et se rapprocher de point d’eaux qui faciliteraient leur survie. Si on trouve ce fameux cours d’eau au milieu de la jungle, on les retrouvera facilement.

    Un silence, puis :

    - Le fils de ce Gurrak semble avoir une aura toute particulière, qui s’est renforcée avec cette dénommée Myra. Si on arrive à les annéantir, peut-être que leurs hommes se rendront plus facilement. Mais il semble qu’ils utilisent les bêtes à leur avantage, et ils pourraient très bien avoir mis des pièges derrière eux pour ralentir notre progression ou les prévenir d’une éventuelle traque. Il va falloir être vigilant.

    Zéphyr regarde son ami, puis ajoute :

    - Nous pouvons continuer maintenant, ou décider de nous offrir une halte, après les quelques heures de marche qu’on a eu dans la jungle. Une fois que la nuit tombera, il faudra vite trouver un abri, et je ne sais pas si on peut rejoindre leur campement avant ce soir. Que préfères-tu qu'on fasse ?

    L’idée n’était pas d’arriver épuisés devant leurs ennemis, surtout que d’autres surprises pourraient bien leur arriver en cours de route. Et d'autre part, ils pouraient bien utiliser l'obscurité à leur avantage.
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  • Mar 14 Mar - 14:17
    Laissant écouta son ami lui faire le récit de ce qu'il avait découvert en questionnant le rebelle. Quelques secondes passèrent alors, le reikois plaçant les différents éléments du puzzle dans son esprit.

    - Cette Myra.. Tu penses que c'est possible que ce soit ton espionne? Perturber le camp au point de forcer un affrontement entre le père et le fils est un bon moyen de mettre fin au mouvement. Créer des dissensions entre eux, semer le chaos... On a déjà vu et fait ça. Seulement... Il marqua une pause, réfléchissant. Le père semblait vouloir mettre fin aux hostilités. Il voulait se rendre. Alors, si l'hypothèse que j'émets est juste, cela ne ferait pas de sens. Sauf si cette dernière manquait d'informations ce qui tu en conviendras serait quand même dommage.

    Il se déplaça alors doucement, inspectant le camp et les corps sans vie des rebelles qui avaient été abattus, soit par pitié soit à la suite d'interrogations. L'odeur pestilentiel de la maladie régnait dans le campement et plus ils passaient de temps ici, plus ils risquaient d'attraper quelque chose.

    - Rester ici serait à notre désavantage. Je n'ai pas trop envie de voir tes hommes tomber malade ou même prendre le risque d'attraper quelque chose. Continuer ne me semble pas une idée brillante non plus. Ils ont surement parsemé le chemin jusqu'à leur campement de piège, encore plus s'ils savaient qu'ici les hommes étaient vivants. Et qu'ils étaient hostiles.

    Deydreus laissa quelques secondes de silence flotter dans l'air, plongé dans ses réflexions. Il visualisait dans son esprit la topographie du terrain, la gestion de ses troupes et l'avantage qu'offrait Zephyr et ses hommes. Ils avaient à la fois de la force brute, et une grande capacité d'infiltration. L'enclume, et le marteau. Les rebelles n'étaient que l'acier chauffé à blanc.

    - Retournons au camp. Nous avons une position approximative de leur installation, et un moyen de repérer la route y menant. Nous nous reposerons là bas, et à l'aube, nous pourrons contourner par le nord, attraper le ruisseau et redescendre sur les rebelles qui s'attendent probablement à une attaque directe depuis le sud ou l'ouest. De plus, si nous nous attardons trop, l'ennemi se rendra compte que quelque chose ne va pas. Ils ont une garnison de soldats reikois qui se trouve sur leur territoire, si cette dernière ne lance pas de manœuvre, ils seront d'autant plus vigilants. Et préparés. J'ai également une autre idée en tête, mais nous en parlerons une fois en zone sûre. Allons.

    Le groupe se remit alors en route, suivant le même chemin qu'à l'aller. Le but était simple, ne pas tomber dans un piège qu'ils n'avaient pas déclencher lors de leur premier passage, et se repérer facilement. Le soleil entamait sa course à une vitesse folle, accélérée par la nombreuse végétation qui, de base, empêchait bon nombres de ses rayons de percer au travers de la canopée. Les bêtes, sentant l'heure de la chasse approcher devinrent également plus nombreuses ou, tout du moins, plus visibles. Les serpents géants glissaient rapidement, forçant bien souvent les reikois à s'arrêter pour ne pas - encore - déclencher des combats inutiles. L'humidité s'intensifia également, transformant la chaleur ambiante en une prison de gel et de moiteur.  

    Lorsqu'ils arrivèrent au campement, Deydreus fut heureux de constater que l'ordre y régnait toujours. Si l'impatience se lisait évidemment sur le visage de tous les soldats présents, les Serres étaient parvenues à maintenir un calme relatif. Qui n'attendait qu'une directive du chef des armées pour éclater en une rage guerrière maitrisée. Invitant l'Oreille à le suivre vers sa tente de commandement, l'homme aux yeux vairons demanda également à Léonard et Ikaryon d'aller chercher les deux officiers qui dirigeaient les réguliers. Une fois dans la tente, le chevalier déploya la carte de la jungle sur la table qui était prévue à cet effet. Rapidement, il y plaça une statuette de dragon pour représenter la position du campement reikois, puis un cheval brisé pour le camp des rebelles malades. Ilvinar et Fulbert arrivèrent un peu après, le regard dévoilant clairement l'attente qu'ils avaient vis à vis des informations collectées par les deux membres de la main. S'installant autour de la table, le gobelin mit quelques secondes de plus, forcé de placer un petit marchepied afin d'atteindre la hauteur de la table.

    - Nous avons trouvé l'ancien campement des rebelles. Des êtres malades et abandonnés par leurs camarades. Suite à une dispute entre eux. Les rebelles utilisent également des bêtes de la jungle, à l'instar du RSAF. Nous avons la confirmation que leur groupe est dirigé par le fils du précédent leader ainsi que d'une certaine Myra. Il s'agit là de nos cibles prioritaires. Elles doivent être neutralisées. Et concernant le reste...

    Il marqua une pause, faisant glisser son doigt cristallin le long de la carte, suivant la position du campement abandonné pour courir sur le zone, marquant un cercle qui représentait les positions potentielles du nouveau campement.

    - Ils doivent à présent se trouver dans cette zone. Très probablement près d'un point d'eau. Ou au moins d'arbres du voyageur. Ces derniers pourraient se supplanter aux rivières ou cours d'eau qui leur seraient utiles. Nous allons donc progresser, demain matin, en contournant par le nord. Fulbert, votre groupe cherchera au nord-ouest, Ilvinar, vous serez déployé vers le nord-est. Zephyr, je pense qu'il serait judicieux d'utiliser la capacité d'infiltration de tes hommes pour se servir de la distraction qu'offriront les mouvements de troupes et ainsi repérer leur position sans se faire repérer. Avec de la chance, ils lâcheront leurs bêtes sur nous. Je me teindrais plein nord, avec les Serres. S'ils se jettent sur l'est ou l'ouest, les autres troupes viendront flanquer pour les prendre en étau. S'ils attaquent les Serres et moi même, ils seront attaqués de deux côtés. Et s'ils se terrent, nous serons alors libre de les encercler pour les décimer.

    Les deux officiers acquiescèrent d'un hochement de tête tandis que Deydreus prenait le temps d'écouter les remarques potentielles de son camarade. Ils étaient deux membres de la Main et ils avaient chacun leur propre domaine d'expertise. Si Zephyr voulait venir complémenter son plan, il n'en prendrait absolument pas ombrage. Une fois le plan établi, les différentes personnes quittèrent la tente pour voguer à leurs différentes occupations. Le chevalier, lui, se contenta simplement de boire et de se reposer, écoutant au passage les rapports de ses hommes sur la tenue du campement militaire. Les abords avaient été renforcés. Les nombreuses plantes qui tombaient sur eux avaient été tranchées et écartées afin de renforcer encore plus la visibilité qu'ils possédaient déjà grâce aux premières coupes. Pour la nuit, des torches avaient été placées et les tours de garde s'étaient organisés de telle sorte qu'au moins deux membres des Serres Pourpres étaient toujours éveillés et pouvaient surveiller les autres soldats. Puis, Deydreus alla s'allonger, toujours en armure. Toujours prêt à l'affrontement. Et l'affrontement arriva.

    Ce n'est pas un signal d'alerte qui tira le reikois de son sommeil. Mais le bruissement léger de la toile de sa tente. Puis l'éclat vicieux d'une lame qui tentait de venir s'abattre sur lui. Un assassin. Roulant sur le côté, l'être aux yeux vairons se redressa tandis que son adversaire laissait un grognement quitter sa gorge. La réponse fut rapide. Un mouvement sec, sans hésitation. La tête du tueur rebelle vola aux travers de la tente, laissant une giclée écarlate se répandre sur la toile blanche de cette dernière. Pestant, Deydreus sortit immédiatement de son lieu de repos pour observer les alentours. Le calme régnait. Les soldats patrouillaient et seuls les fantassins des Serres Pourpres semblaient s'agiter. Tiquant, le reikois s'empressa de se diriger vers la tente de ses deux officiers. Ces derniers, grognant, semblaient également avoir vaincu leurs assaillant même si le gobelin peinait encore à se dégager de la carcasse de l'assassin. Observant Léonard, le sombre chevalier lui demanda de réveiller tous les fantassins afin de s'assurer qu'ils n'étaient pas en danger.

    Puis il se dirigea vers la tente de Zephyr, afin de voir si on avait là aussi tenté de mettre fin à son existence. Les rebelles avaient envoyé leurs assassins, et rien ne disait que ce n'était pas dans la préparation d'un assaut de plus grande envergure.    


    Quaerere et perdere [PV Zephyr] 7bdNafm

    Apparence des épées de Deydreus:


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    Zéphyr Zoldyck
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  • Lun 20 Mar - 19:29
    Quand Deydreus lui suggère que cette Myra soit son espionne, Zéphyr secoue la tête dans un geste de dénégation. Non, il y a trop peu de chances que ce soit elle. Si Lyora avait intégré le camp, elle aurait davantage soutenu le père de ce Gurrak. La reddition aurait bien fait ses affaires, et aurait aussi évité d’inutiles bains de sang.  

    - Si ça avait été l’œuvre de mes hommes, et spécialement de Lyora, elle aurait essayé qu’ils s’entretuent tout seul. Elle aurait donc suscité le chaos, et au bon moment, elle se serait éclipsée pour nous guider, nous ou tes hommes, afin d’éliminer le reste de la menace. Ici, le père voulait se rendre… Alors peut-être a-t-elle pris son parti et qu’elle a été décimée par les bêtes. Ou alors, elle a préféré suivre l’autre camp au dernier moment, pour ne pas qu’on les perde encore une fois dans la jungle. Mais si c’est le cas, elle aurait profité du rendez-vous avec moi pour nous mener directement aux rebelles. Il y a sans doute des choses qui nous échappent encore, ou alors, il faut la considérer comme morte. Toutes les possibilités sont encore ouvertes, ils en savent trop peu pour tirer des conclusions hâtives.

    Lorsque son frère d’arme lui confie qu’il ne vaut mieux pas rester ici, essentiellement à cause de la maladie et de la pestilence qui y règne, Zéphyr se contente d’hocher la tête et de rejoindre son avis. Il est certain que tomber malade n’est pas le bon moment pour leurs troupes. Bien que les rebelles se sont divisés en deux unités bien distinctes, ils ont néanmoins toujours l’avantage du terrain et il ne faut pas négliger cet état de fait. La décision est donc prise de retourner au camp et de remonter le ruisseau le lendemain pour tomber sur les rebelles. Ses espions n’auront aucun mal à prendre de l’avance et à repérer toute activité humaine. Surtout à l’approche d’une berge. Il est impossible de dissimuler toutes ses traces, l’eau est trop importante pour l’homme qui doit survive en ces terres hostiles. Un sentier trop prononcé, une personne qui vient puiser de l’eau, des traces de pas dans le sol meuble, tout cela seront des indices que ses hommes pourront glaner. Sans compter leurs sens qui sont décuplés et qui pourront déceler d’éventuelles voix humaines.

    Le retour ne cause guère de problèmes aux Reikois. La fatigue se fait bien sûr sentir – un périple de quelques heures dans la jungle, à l’affût de la moindre attaque, n’est pas de tout repos – mais aucune bête sauvage ne les prend en chasse et surtout, ils ne déclenchent aucun piège qui alerterait les rebelles. Zéphyr doit bien admettre qu’il n’est pas mécontent de retrouver le campement des Serres Pourpres, non seulement parce qu’on y retrouve l’ordre et la discipline de ces guerriers d’élite, mais aussi, et surtout, parce qu’ils pourront parler de la suite des événements. Avant de suivre Deydreus dans la tente de commandement, l’Oreille congédie ses propres espions et leur enjoint notamment de méditer pour récupérer plus rapidement leurs forces. Ils se reposeront tour à tour et renforceront la sécurité du camp en mettant les ténèbres et à l’obscurité à leur profit. La plupart d’entre eux, sinon tous, sont nyctalopes, et ces agents de l’ombre peuvent être donc un soutien considérable pour les soldats de la Griffe. Ses ordres donnés, Zéphyr rejoint le commandant en chef et il laisse celui-ci faire le résumé de leurs découvertes. Ses yeux fixés sur la carte, le duelliste le laisse également présenter sa stratégie, qui consiste essentiellement à prendre les rebelles en étau. Après un temps de silence, l’homme aux yeux ambrés prend la parole à son tour et expose son point de vue.

    - Les rebelles se sont déjà rendus compte de notre présence, si on considère les espions que tes hommes ont repéré à la lisière, ce matin. Ils ne manqueront pas le déplacement de nos troupes. Quand tes guerriers et toi seront au Nord, vous serez un formidable appât qui les fera rêver. Surtout toi, Deydreus. Qui ne désire pas vaincre la nouvelle Griffe tout juste nommée ? Ca leur donnerait du crédit, de la force, de l’envergure. Ils ne résisteront pas à la tentation d’aller dans ta direction et dès qu’ils se manifesteront, mes hommes vous avertiront de leurs positions. Non seulement cela, mais avec suffisamment d’adresse et de vitesse, on localisera leur camp et on le détruira. Cela leur enlèvera tout point de chute : leur repère ne sera plus et le sud ne leur sera d’aucun secours, puisqu’ils l’ont certainement piégé en abandonnant leur premier campement. Tes hommes les empêcheront alors de s’évanouir dans la jungle en les prenant à revers par l’est et par l’ouest et moi, je les prendrai en tenaille en arrivant du côté opposé. Zéphyr marque une pause le temps de réfléchir, puis il continue. Gurrak est un guerrier, il voudra certainement ta tête. Reste cette Myra dont on ne connait pas les compétences. Peut-être sera-t-elle davantage en retrait. Je m’occuperai de la trouver et de l’anéantir pour de bon.

    A son tour, l’Oreille écoute les remarques potentielles de son ami ou de ses officiers. Puis, quand leur plan fut établi, il prit congé à son tour, essentiellement pour laisser Deydreus se reposer et le laisser écouter le rapport de ses hommes. Le maître-espion avait aussi besoin de repos, de toute façon, mais avant tout, il désirait parler à ses hommes de main pour que chacun sache quelle serait leurs missions et leurs priorités le lendemain. Certains espions devraient informer la Griffe de la progression rebelle, quand d’autres devront avant tout suivre le chef de services secrets reikois pour mieux annihiler le campement des insurgés et trouver cette fameuse Myra.  

    Ses directives données, il s’informe des binômes qui aideront à sonder et à protéger le camp, puis Zéphyr s’en va dans sa propre tente pour se reposer un peu. Il est néanmoins toujours difficile pour un espion de se relâcher tout à fait. Encore plus quand on est en terrain hostile et en zone ennemie. Alors si l’Oreille ferme bien l’œil, c’est presque tout naturellement qu’il se réveille dès qu’on pénètre dans sa tente. Au bruit de pas, ils ne sont pas un, mais deux. Pas que ça pose véritablement problème s’il est assez vif et adroit. Mais Zéphyr a à peine le temps de saisir sa dague, qu’il entend subitement un cri étouffé, un grognement de douleur, comme si l’un des assassins était pris par surprise. Il n’en faut pas plus pour que le Reikois se retourne et ne s’apprête à enlever une vie, mais la surprise et une grande maîtrise de soi l’empêche de commettre l’irréparable. Son arme s’arrête à quelques millimètres de la gorge de sa cible, qui se tend involontairement alors qu’un sourire forcé et presqu’impertinent naît sur ses lèvres. Une jolie blonde aux grands yeux saphirs se tient devant lui, et si elle semble totalement indifférente au cadavre qui se trouve à ses pieds, elle doit quand même comprendre que sa vie ne tient qu’à un fil.

    - Salut chef. Je me suis dit que ce serait sympa de venir vous dire bonjour.

    D’un air impassible, Zéphyr dévisage Lyora de haut en bas, toujours alerte et toujours sur le qui-vive. Ce n’est pas parce qu’elle a une attitude amicale qu’il a une confiance aveugle envers elle. Malgré tout, il va droit au but et reprend la parole.

    - Combien ?
    - Ils ont envoyé trois unités. Une pour vous, une pour le chef des troupes armées et une troisième pour prendre une partie votre ravitaillement et empoisonner le reste si vous étiez suffisamment endormis. Je leur ai dit que pour vous buter, il en fallait au moins cinq fois plus d’hommes, mais ça n’a pas l’air de les avoir convaincus.

    Un ricanement s’échappe des lèvres de Zéphyr, mais il ne baisse toujours pas sa garde et jette un œil à l’assassin qui est mort, foudroyé par la trahison de sa complice.

    - Leur campement ?
    - Au Nord. Myra sait déjà que vous avez trouvé le premier campement. Cette femme sait parler aux animaux et elle a envoyé des volatiles le surveiller régulièrement.

    La jeune femme s’arrête de parler quand Deydreus entre dans le campement, et il doit avoir un étrange spectacle sous les yeux, puisqu’il a un cadavre, une fille qui est prête à être embrochée par Zéphyr, et l’Oreille lui-même qui finit néanmoins par rengainer son arme d’un geste lent et précis.

    - Deydreus, je te présente Lyora. Je suis sûr qu’elle a beaucoup de choses à nous dire, mais avant ça, il faut sécuriser notre ravitaillement. Lyora restera devant nous pendant qu’on va là-bas.

    Histoire de ne pas la perdre de vue tant qu’elle ne s’est pas expliquée. Mais leurs réserves est toutefois entre de bonnes mains. C’est que le troisième groupe d’assassin n’a pas eu le temps de pénétrer dans la tente allouée à leurs vivres. Il faut dire que, dans le cas d’un siège ou de n’importe quel déploiement armé, la nourriture est vitale, et ce n’est pas quelque chose qui a échappé aux Serres Pourpres. Ces dernières ont particulièrement veillé à leur sécurité, et leur vigilance a payé.

    Ou presque, parce que à défaut de voler des vivres ou de les empoisonner, les assassins se sont retirés aussitôt pour filer vers la lisière de la jungle. Il n’y a pas de morts, cette fois, mais ce n’est du goût de Zéphyr de laisser ces assassins disparaître dans la nuit. Aussi, il se retourne vers Elias et Deklan, deux espions à sa solde connus avant tout pour leur rapidité hors du commun. Il leur un ordre aussi court qu’efficace :

    - Prenez-le en chasse.

    Il n’en faut pas plus pour que ces deux hommes disparaissent et c’est seulement à cet moment-là que Zéphyr accorde davantage d’intérêt à sa subordonnée, qui s’est contentée de suivre les ordres. Il propose à Deydreus de s’isoler dans une tente pour ne pas être à la vue de tous, et l’Oreille croise les bras en regardant Lyora. Il n’est pas spécialement contre elle, mais il n’est pas naïf et attend quand même quelques explications.

    - Maintenant, parle.

    Lyora opine du chef et s’exécute. Il y a là des choses que les deux membres de la Main ont déjà envisagé. La jeune femme avait bien repéré le camp des rebelles en compagnie des deux jumeaux qui formait son équipe. Il était cependant impossible de savoir quelles étaient concrètement leurs forces, ce qui la frustrait considérablement compte-tenu de leurs victoires sur les patrouilles reikoises. Alors elle avait pénétré le camp rebelle et réussi à infiltrer les insurgés. Gagner leur confiance ne s’était pas fait en un jour, mais la demoiselle avait gagné des points grâce à ses connaissances poussées de la jungle et son dynamisme convaincu. Son agilité, sa bonne volonté et son éternelle bonne humeur lui avaient valu d’être appréciée par ses confrères. Même le chef du camp, Gurrak, avait fini par la remarquer. Son objectif premier était de le tuer pour disperser les rebelles, mais elle avait revu ses plans quand l’homme avait commencé à douter de la faisabilité de son projet. Quand elle avait compris ses doutes, elle avait habilement réussi à les faire grandir en l’écoutant et en le conseillant de manière détournée. Quoi de mieux qu’une reddition pour en finir au plus vite ? Certes, cela faisait quelques mécontents et Lyora jouait dangereusement sur les deux tableaux, en écoutant les doléances des uns et des autres. Mais les choses se poursuivaient bien jusqu’à ce que le guerrier en chef ne fasse sa première erreur. Communiquer sa décision à tous ses alliés alors que son fils et un groupe important de Reikois voulait continuer cette insurrection.

    - La plupart ont votre âge, Commandant, fait-elle en s’adressant à Deydreus, mais il y a aussi un sacré paquet de jeunes écervelés qui croient en leurs causes. Encore plus depuis que Myra, une mage elfe de plusieurs centaines d’années a rejoint la rébellion.
    - En quoi est-elle redoutable ?
    - C’est une mage qui contrôle la magie de la nature, alors dans la jungle, elle est particulièrement dans son élément. C’est pour ça qu’ils ont attendu que les patrouilles entrent dans cet empire végétal. Parce qu’elle pourrait les piéger facilement ; les rebelles feraient le reste ensuite. Et leurs victoires leur ont donné des ailes.
    Zéphyr accueille sa déclaration en silence alors qu'il réfléchit, mais il reprend bientôt son interrogatoire.
    - Et ensuite ?
    - Gurrak a cru qu’il pourrait raisonner tout le monde. C’était là sa première erreur, car cette femme et tous ceux qui le suivent ont une haine intense pour le gouvernement et le couple royal. J’en ignore la raison, elle est très secrète, même si j’ai cherché à gagner sa confiance. J’ai compris tout de suite que les dés étaient jetés quand Gurrak a fait sa déclaration. C’était bafouiller son honneur et leur cause. J’ai pu survivre car j’étais appréciée par tout le monde et j’ai fait aussitôt semblant d’être dans le camp de Myra et de Brann évidemment. Mon erreur a été de cibler le chef de la rébellion, alors que j’aurais dû viser les plus extrémistes directement.

    Lyora secoue la tête puis reprend :

    - Après les avoir blessés dans un affrontement sanglant, ils ont décidé de s'enfoncer dans la jungle. Me rétracter ou essayer de vous rejoindre aurait paru trop suspect, et de toute façon, ça n'aurait pas échappé à Myra. Elle aurait eu tôt fait de mettre la main sur moi, alors j'ai préféré continuer le jeu en me faisant passer pour une alliée. J'ai essayé de trouver une de ses faiblesses mais elle est constamment sur ses gardes. Je crains de ne pas savoir l'abattre avec mes capacités actuelles.

    Zéphyr ne fait aucun commentaire mais passe directement à l’essentiel :

    - Tu sais où sont leur campement ?

    Cette fois, un sourire un peu fier apparaît sur le visage de Lyora.

    - Je peux vous y amener de jour comme de nuit. Actuellement, ils se reposent et espèrent abattre le moral de vos troupes par la mort de ses deux commandants.[/color]

    Le maître-espion se tait un instant puis croise le regard de Deydreus. Les connaissances de Lyora peuvent présenter un grand avantage tactique, même si Zéphyr est d’un naturel prudent et sceptique. Il a bien un plan à proposer mais il préfère d’abord laisser s’exprimer la Griffe sur tout ceci.
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    Deydreus Fictilem
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  • Mar 21 Mar - 14:57
    Lorsque Deydreus retrouva Zephyr, il laissa son regard glisser sur la blonde qui se trouvait à l'autre bout de sa dague. Quand les présentations furent faites, le reikois garda tout de même ses lames en mains, suivant le duo d'espions au travers du campement, toujours silencieux. Il s'agissait d'un membre de la cellule de l'Oreille, et cette dernière gérait ses troupes à sa façon. Il était toujours délicat de traiter avec des espions, même lorsqu'ils étaient sous votre commandement. Il n'était jamais sûr à cent pour cent que ces derniers soient toujours fidèles à votre cause, ou bien s'en allaient préparer quelques doubles jeux. Mais, Deydreus faisait confiance à Zephyr et, lorsque ce dernier rangea sa lame puis interrogea l'espionne lorsqu'ils furent enfin dans un endroit "au calme", le chevalier rengaina finalement ses deux lames dentelées. Il écouta ensuite l'échange, concentré sur ce qui se disait et sur ce que cela impliquait vis à vis de leur plan préalablement établi. L'espionne avait glâné beaucoup d'informations, et leur offrait de nouvelles possibilités que la Griffe comptait bien exploiter. Quand ils eurent terminé leur échange, le reikois prit finalement la parole.

    - Nous pourrions faire comme au fort de Brimmark. Un sourire se dessina sur les lèvres du chevalier, se rappelant une opération passée. Nous servir de l'apparence de Lyora pour entrer dans le campement et ouvrir les portes de ce dernier. Permettre un accès facile pour mes hommes et moi. En parallèle, le camp restera plus ou moins silencieux dans la nuit. Leurs potentiels espions ne doivent pas se douter que nous nous mettons en route. Une fois dans leur camp, nous sèmerons le chaos. Cela permettra à nos soldats de se jeter sur le campement si nous n'en avons pas fini au levé du soleil. Il y a seulement le problème de cette mage élémentaire. Entourés de ces plantes, nous sommes en désavantage, sur son terrain...

    Il siffla alors, faisant entrer l'un des Serres qui se trouvait devant la tente. Une fois ses ordres donnés, ce dernier quitta sa position pour revenir quelques minutes plus tard, accompagné par le gobelin officier.

    - Prends tes archers les plus discrets et suis nous de loin. Lorsque nous entrerons dans le cas, incendiez tout ce qui se trouve autour, sauf la porte principale. Il faut que la nature ne soit plus une solution pour eux. De plus, le feu terrorisera même les bêtes apprivoisées. Cela renforcera le chaos ambiant. Et leur laisser une porte de sortie nous permettra de capturer les plus lâches, et d'éviter tout baroud d'honneur. Je ne sais que trop bien le comportement d'hommes et femmes se sachant condamnés. Il fit craquer sa nuque, puis fixa les personnalités présentes. Allons-y, profitons de l'initiative. Fulbert, transmets mes ordres à Ilvinar je te prie. Il devra rester au camp et ne bouger qu'au matin.

    Le groupe se mit donc en route. Leur objectif était clair, précis. Les Serres, rassemblées dans l'obscurité de la nuit, se tenaient dans les ombres et avançaient en silence. Si le bruit de leurs armures n'était pas des plus discret, ils demeuraient étouffés par la faune nocturne. Et puis... Lorsqu'ils parviendraient finalement au niveau du camp rebelle, il n'y aura de toutes façons plus besoin d'être discret. Afin de faciliter leur progression, Deydreus avait tout de même demandé à Zephyr de laisser un de ses hommes devant la troupe noir et sang afin de les avertir de patrouilles ou dangers potentiels. Les hommes de l'Oreille étaient nyctalopes, pas les Serres. Enfin, pas tous. De plus, il fallait laisser le temps au maître espion de prendre de l'avance et d'entrer dans le campement afin de leur offrir une entrée digne de ce nom. A quelques mètres derrière eux, les archers de Fulbert se déplaçaient dans un silence impressionnant. Entièrement composée de gobelins et d'elfes, la troupe était spécialisée dans les assauts à distance et s'était habituée à progresser dans la jungle. Pour cause, ils avaient été les premiers à s'installer ici parmi les troupes régulières. Deydreus comptait aussi sur eux lorsque les choses deviendraient chaotiques.

    Au bout d'une bonne heure de marche supplémentaire, l'espion leur fit finalement signe de s'arrêter. Ils arrivaient près du campement. Quittant la position de ses hommes pour rejoindre celle de l'espion, la Griffe plissa les yeux afin de laisser sa nyctalopie œuvrer et lui permettre d'analyser le repère des rebelles plus en détail. A l'instar de celui qu'ils avaient découvert plus tôt dans la journée, le campement se composait d'une multitude de tentes et de petites cabanes disposées en cercle autour d'une tente plus large et imposante. Cependant, cette fois, de nombreuses cages étaient observables à divers endroits du camp et le périmètre de ce dernier était renforcé d'une barrière de pieux permettant de bloquer ou limiter la progression de troupes ennemies. Enfin, deux entrées apparaissaient distinctement à l'avant et l'arrière du camp, composées de grandes portes de bois. C'était par l'une d'elles que les Serres et la Griffe entreraient. L'espion de Zephyr s'en alla alors, silencieux, afin d'entrer en contact avec son supérieur. Deydreus, quant à lui, attendit sagement le signal pour s'avancer.

    Ce dernier arriva dans un léger sifflement. Un appel discret qui lui était destiné et qui s'accompagnait de deux portes ouvertes. Ordonnant donc à ses troupes de se mettre en marche et d'aller à l'assaut du camp, le reikois s'amusa à voir les hommes de Flubert qui se mettaient en position, ainsi que les corps sans vie des gardes postés à la porte du camp. Le chaos allait pleuvoir sur le camp, et montrer aux rebelles l'ire impériale. Les cris d'alertes et autres hurlement d'agonie résonnèrent rapidement. Ce n'était pas des signaux organisés, précis. Mais une terreur généralisée. Tout autour du camp, un torrent de flammes s'était répandu avec force et bloquait la plupart des sorties potentielles. De plus, les archers du gobelin continuaient de faire pleuvoir des traits mortels sur les pauvrets qui osaient quitter leurs tentes sans protection. Et... Lorsqu'ils parvenaient tout de même à sortir, les rebelles tombaient sur les fantassins d'élite, ainsi que les membres de la main.

    Deydreus frappait, encore et encore. Ses lames déchiraient la chair de ses ennemis tandis que les Serres se répartissaient autour d'eux, bloquant et abattant les différents assaillants assez intelligent pour tenter de contourner le sombre chevalier. Ce dernier avançait d'ailleurs presque en ligne droite, non pas pour terrasser spécifiquement chacun des rebelles qu'il croisait - même si c'était le cas - mais plutôt pour s'approcher suffisamment de la tente de Gurrak pour qu'il ose venir le provoquer en duel. A ses côtés, le maître espion semblait évoluer avec aisance, pas réellement concerné par les différentes menaces qui pouvaient se présenter. Dans un sourire, Deydreus laissa un ricanement s'échapper de sa gorge tandis qu'il se débarrassait d'un énième adversaire.

    - Comme au fort Brimmarck! Sauf que cette fois, on a deux têtes à couper, et pas seulement une!

    Un nouveau rire s'échappa de sa gorge. Au final, et malgré sa nouvelle position, les choses ne changeaient pas trop. Il était toujours lui. Un guerrier qui combattait avec rage et force. Entouré d'alliés tout aussi puissants et déterminés. C'était peut être ça aussi la force de l'Empire. Galvaniser les meilleurs éléments et leur permettre de contribuer à la suprématie impériale et au confort de ses habitants. Ils arrivèrent enfin au centre du campement, sortant le reikois de ses pensées alors que deux silhouettes semblaient se dégager du chaos ambiant. Le chef rebelle, grand, fier, accompagné d'une silhouette féminine plus svelte. Ils venaient de trouver la tête du serpent. Naturellement, Deydreus s'écarta de Zephyr et de ses troupes, faisant tournoyer doucement ses deux lames par pure provocation. Gurrak fit de même, laissant la jeune femme qui l'accompagnait. Un sourire se dessina sur les lèvres du chevalier. Il s'arrêta dans sa marche, faisant face au jeune rebelle tandis que les flammes s'étendaient maintenant au campement, plongeant ce dernier dans une scène apocalyptique où rebelles fuyaient ou se battaient de manière désordonnée et que de nombreux monstres hurlaient et s'en prenaient à tout ce qui passait près d'eux.

    - Ton amie ne semble pas apprécier ton choix de m'affronter en combat singulier.
    - Elle ne sait rien de l'honneur et de la rage qui m'anime. Si je te tue, je montrerai au monde à quel point l'Empire est faible.
    - Si tu me tues.

    Le rebelle s'élança alors sur Deydreus. Il était vif, précis, et sa frappe aurait pu défaire bon nombre de guerriers inattentifs ou inexpérimentés. Mais ce n'était pas ce qu'était le reikois. Il avait traversé les batailles, s'était amélioré après chacune d'entre elles. Ses lames dévièrent donc le coup avec aisance, tandis qu'il venait à son tour frapper son adversaire d'un violent coup de genou qui résonna contre la protection de torse du rebelle. Ce dernier pesta, crachant un filet de bave sous la violence de l'impact. Il se repositionna ensuite, esquivant de peu une estocade de l'homme aux yeux vairons. Puis une frappe de tranche. Puis une autre. Le flot du combat était accentué d'un côté plus que de l'autre et, malgré les tentatives du rebelle pour reprendre l'initiative, Deydreus ne lâchait rien. Il faisait honneur au jeune guerrier par ce duel, mais il voulait aussi montrer aux rebelles à quel point leur combat était futile. C'était aussi pour cela qu'il ne devait pas simplement battre Gurrak. Il devait l'humilier.

    Accentuant ses mouvements, le chevalier aux sombres armoiries faisait résonner dans l'air les tintements métalliques des lames et des armures. Il jouait avec sa proie. A plusieurs reprises, le guerrier pouvait mettre fin au combat. Il pouvait abattre Gurrak mais préférait le frapper au casque, au plastron. Il sonnait son adversaire peu à peu. Les mouvements du rebelle perdaient alors progressivement leur force et leur vivacité. Il pataugeait dans la terre plus qu'il ne reculait et à plusieurs reprises ce dernier tombait par terre pour se relever difficilement dans un long grognement. Et chaque fois, Deydreus venait lacérer un peu plus sa peau, le faisant grogner de douleur. Ce sordide spectacle n'avait en réalité que le but mentionné précédemment et Deydreus n'en tirait aucun réel plaisir. Son adversaire était, de toutes façons, condamné. Alors autant faire de sa mort un moyen pour sauver la triste vie de rebelles trop jeunes pour comprendre l'étendue de leur stupidité. Il fallait marquer les esprits, ici et maintenant, pour prouver que l'Empire ne saurait être défié. Et qu'on ne massacrait pas impunément les civils, ni ses propres frères. Et que, peut-être, la reddition qu'avait proposé leur ancien chef aurait été préférable à ce qui leur arrivait actuellement. Détournant quelques instants les yeux de sa démonstration, Deydreus observa les Serres qui évoluaient avec aisance dans le campement, neutralisant ou tuant les différents guerriers qu'ils rencontraient. Les archers de Flubert continuaient quant à eux de faire pleuvoir la mort et, au loin, le reikois pouvait voir le gros des forces armées qui s'approchaient pour "cueillir" les fuyards. Le piège s'était non seulement renfermé sur les rebelles, mais il était aussi parfaitement huilé. Une nouvelle tentative de frappe força le guerrier à quitter ses réflexions. Gurrak, bien qu'au sol, faisait preuve d'une ténacité respectable. Mais futile.

    Dans un mouvement sec, l'homme aux yeux vairons trancha la dextre de son adversaire avant d'enfoncer Silence dans sa gorge, passant outre le gorgerin de son armure et ses autres protections. Un gargouillis sanglant s'échappa du jeune combattant qui perdit le peu de force qu'il lui restait, transformant son corps musclé en une espèce de poupée de chiffon désarticulée qui gisait dans la boue. Secouant ses lames pour disperser le liquide carmin qui glissait le long des gouttières, Deydreus laissa son regard glisser doucement vers la position de Zephyr. Il avait tout de même pris le temps d'échanger de nombreux coups avec Gurrak et, à présent, il souhaitait voir comment s'en tirait son ami mais, quoiqu'il en était en réalité...

    Cette rébellion touchait à sa fin.


    Quaerere et perdere [PV Zephyr] 7bdNafm

    Apparence des épées de Deydreus:


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    Zéphyr Zoldyck
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  • Dim 2 Avr - 21:46
    [HRP : J'étais pas censée écrire autant, donc s'il y a des lecteurs qui passent par ici, prenez un café, un chocolat chaud, ou tout ce que vous voulez et installez-vous confortablement, c'est un peu long =D]

    Agir comme au Fort Brimmark ? Zéphyr resta un instant pensif face à la suggestion de son ami, puis, un sourire vint finalement éclairer ses lèvres. Il y a moyen qu’ils utilisent la même stratégie, oui. Quant à se servir de l’apparence de Lyora, c’était exactement ce qu’il avait en tête pour s’infiltrer facilement dans le camp ennemi, l’affaiblir de l’intérieur, et surtout ouvrir les portes aux hommes de Deydreus. Pourquoi se prendre la tête si on peut se jouer de l’ennemi ? Certes, la métamorphose demande une concentration conséquente et a une durée limitée mais, lorsqu’elle est utilisée à bon escient, elle peut faire des ravages. Quant à la mage élémentaire… Le feu est effectivement la meilleure arme contre elle. S’il y a moins de végétation autour de leur campement, ou si l’élémentaliste ne peut pas l’utiliser parce que la moindre plante est ravagée par les flammes, la magicienne sera moins dangereuse et sera donc plus facile à approcher.

    - Dans ce cas, nous avons notre plan d’action. Mes hommes et moi allons prendre les vêtements des espions que nous avons abattus. Ils se revêtiront de leur cape, nous ferons croire que la mission est réussie et que l’Oreille et la Griffe ont bien été abattues. Entrer à l’intérieur ne devrait guère nous poser de problèmes. Nous supprimerons en premier les vigiles, et nous vous ouvrirons les portes. Ensuite, le carnage commencera.

    D’un commun accord, Zéphyr laisse l’un de ses agents pour aider la progression des Serres Pourpres. Lui ne s’attarde pas davantage dans le camp reikois. Il convoque simplement ses hommes et leur demande d’analyser qui ont été les victimes abattues par les hommes de l’Empire. Pour ceux qui sont dotés de la métamorphose, ça leur permettra éventuellement de prendre leur apparence pour mieux voguer dans le camp rebelle et pour confirmer leurs identités aux sentinelles. Un tel subterfuge ne sera peut-être pas nécessaire – se couvrir des capes des assassins donne déjà une illusion très vraisemblable – mais on n’est jamais trop prudent et le maître-espion préfère mettre toutes les chances de leur côté.

    Zéphyr reçoit entretemps le rapport de ses agents, qui ont bien tué les insurgés en fuite alors qu’ils allaient s’aventurer définitivement dans la jungle. L’Oreille acquiesce à cette nouvelle d’un air satisfait et attend simplement que son équipe soit prête. Lyora connaît son rôle, puisqu’elle les guidera efficacement dans cette prison végétale. Sa connaissance du terrain est d’ailleurs précieuse aux espions, car elle leur permet de progresser avec une confortable avance dans la jungle. Après un certain temps, le groupe d’espion arrive près du dernier rempart des insurgés. Zéphyr prend le temps d’écouter la jolie blonde lui décrire l’organisation rebelle, et surtout, il la laisse esquisser un dessin du campement en lui-même. La terre est meuble avec l’humidité, il n’est donc pas difficile de faire quelques esquisses en indiquant les cibles à éliminer. S’il va de soi que les Serres joueront un rôle déterminant dans la reddition des rebelles, il va de soi aussi que les espions ne vont pas se contenter d’ouvrir les portes aux guerriers. Ils ont pour eux la vitesse et la discrétion. Autant frapper directement là où cela fait mal. L’idéal serait même d’assassiner Myra dans son sommeil. C’est simple et déloyal, mais redoutablement efficace.

    Quand Lyora a fini d’expliquer où son les tentes des guerriers, elle finit par se taire et à regarder son chef.

    - Et donc ? Comment procède-t-on ?
    - C’est simple, répond tranquillement Zéphyr alors que ses yeux ambrés observent le camp rebelle. A partir de maintenant, c’est moi qui prends la main.

    ***

    Quand un bâillement s’échappe de sa bouche, Albert laisse échapper une énième malédiction à destination de ses camarades. Putain, pourquoi c’est lui qui a tiré la courte paille déjà ? Personne n’a envie de se taper la garde de nuit, surtout s’il s’agit d’être mangé par les moustiques. L’homme fait bien sûr partie de ceux qui sont convaincus par la puissance de leurs deux chefs, mais il n’en reste pas moins qu’il rêve d’une bonne nuit de sommeil : ce n’est pas en plein jour, dans l’humidité de la chaleur tropicale, qu’on arrive véritablement à récupérer ici. Mais bon. Au moins, il n’a pas d’autres tâches ingrates, comme s’occuper des bêtes, hein. Il n’empêche, il y a certains jours où c’est vraiment la merde. Mais il s’agit ici de frapper un gros croup, qu’y ont dit. Alors il est peut-être pas trop intelligent, Albert, mais il pense bien que assassiner deux lieutenants de l’Empereur machin chose, ça leur donnera une bonne visibilité, p’être même qu’on chantera leur courage dans les tavernes. Un sourire un peu niais apparaît sur ses lèvres à cette pensée, alors que, tout pris à ses rêveries, il n’entend pas directement le cri qu’on lui adresse. Mais un rappel, puis un second le prend à revenir sur terre, et le combattant à la vingtaine sursaute sur ses pieds en voyant qu’il y a du monde aux portes de leur campement.

    - On rentre de la mission que nous a donné Gurrak et Myra ! leur crie une voix fluette.

    D’abord soupçonneux, la vigile se détend, surtout que son binôme qui fait deux fois son âge le rejoint. C’est un guerrier beaucoup plus baraqué que lui, et surtout beaucoup moins influençable, il faut le dire.

    - Z’êtes tous là ? beugle son aîné d’une voix forte. J’ouvre pas les portes tant que j’suis pas sûr que c’est vous !

    A ses paroles, l’une des silhouettes enlève sa capuche et une jolie blonde aux yeux saphirs rencontre le mastodonte à l’armure rafistolée.

    - Ca te va comme ça ? Allez dépêche, ou je dirai que c’est toi qui m’as empêché de faire mon rapport à Gurrak ! Un sourire, fier, cette fois, naît sur ses lèvres. On les a eus et l’chef voudra le savoir !

    La nouvelle a de quoi ragaillardir le dénommé Albert, qui écoute d’une oreille distraite les indications qu’on lui donne. La moindre des choses, c’est qu’il aille féliciter leurs hommes, non ? Puis, ça le réchauffera un peu, on s’les gèle, malgré l’humidité constante de la jungle ! Alors les portes s’ouvrent, mais, contrairement à ce que le jeune s’attend, le temps qu’il descende sur place, il n’y a déjà quasiment plus personne. Son regard devient momentanément surpris alors qu’il rencontre les pupilles étrangement satisfaites de la belle jeune femme qui caresse déjà ses dagues comme si elle avait envie de les utiliser. A sa hanche, se trouve une vaste besace qui contient manifestement quelque chose de rond, et de l’autre côté de sa taille, se trouve une rapière ou un sabre. Une autre silhouette encapuchonnée demeure à ses côtés et lui semble lui murmurer quelque chose.

    L’homme est désarçonné et écarquille légèrement les yeux en s’adressant à la belle.

    - Où sont les… ?
    Il croise les yeux anormalement sérieux de la jolie blonde qui se contente de lui adresser un sourire un presque sournois.
    - Oh, ils savent ce qu’ils ont à faire. Lyora, je te le laisse. Lionel, après avoir tué l’autre sentinelle et les autres gardes, envoie le signal à Deydreus.

    Le pauvre Albert n’a que le réflexe d’écarquiller les yeux alors qu’il voit que la silhouette encapuchonnée n’est autre que la réplique exacte de la jeune femme. Où est le fameux Lionel, il ne le sait, mais il jurerait qu’on vient à l’instant de passer à côté de lui, alors que ses yeux ne voient pourtant que du vide. Le pauvre homme n’en même pas large, c’est manifeste. Mais il n’a pas le temps de murmurer un son que l’une des deux Lyora a déjà disparu et s’est déjà aventuré dans l’allée centrale. Pour aller où, il l'ignore, et de toute façon, son double s’approche de lui avec la démarche d’un félin prêt à fondre sur sa proie. Une expression presque peinée naît même sur son visage alors qu’elle voit son air ahuri.

    - T’es un peu lent, tu sais ? Mais ce n’est pas grave. Tu te rattraperas dans ta prochaine vie.

    La lame qui fonce alors sur lui ne lui laisse même pas le temps de faire une prière au Soleil et à la Lune.

    ***

    La mort est en train de s’abattre sur le camp. La mort mais aussi le feu et les flammes. C’est peut-être ce qui alerte Myra en premier. Quand on maîtrise une magie complexe, comme celle de la nature, on devient peut-être plus sensible à cause de notre mana qui contrôle les plantes ambiantes. En l’état, c’est l’odeur de la fumée qui attire l’attention de l’elfe. Gurrak aussi risque de le sentir évidemment : il est dans la tente d’à côté et ce genre de détails ne peut lui échapper. L’un comme l’autre attendent fébrilement des nouvelles de leur assassins, mais aucun des deux dirigeants rebelles ne s’attend à avoir une odeur de cramé dans les environs. D’un geste, l’elfe se lève et s’apprête à se diriger vers la sortie, quand on prend les devants et qu’une silhouette fine et élancée ne pénètre respectueusement dans la tente. Myra la reconnait tout de suite évidemment. C’est l’une des femmes qu’ils ont envoyé pour tuer les commandants ennemis, et elle l’apostrophe directement, au point même que l’étrange odeur qu’elle ressent passe au second plan :

    - Alors ?
    - Nous en avons eu un des deux. Malheureusement, l’autre dirigeant est furieux et a réussi à remonter notre trace. Il veut affronter Gurrak en duel.

    Un ricanement s’échappe des lèvres de la demoiselle, qui répond en retour.

    - Dans ce cas, il est un mort en sursis, et je l’aiderai au besoin. Que fais-tu ? demande-t-elle à la jeune blonde alors qu’elle défait manifestement la besace qu’elle porte en bandoulière.
    - Je vous montre la preuve de notre succès, lance Lyora avec un sourire ironique, alors qu’elle lui lance le sac, qui tombe au pied de l’elfe.

    Cette dernière n’a d’autres choix que de se pencher pour ramasser le morceau de lin, mais son regard satisfait se fige subitement quand elle voit la tête d’un de ses espions rouler sur le tapis de sa tente. Une seconde passe, pendant laquelle le temps se fige, puis, mu comme par un second instinct, elle relève les yeux et voit la lame qui s’apprête à se planter dans sa gorge. L’acier brille, plonge, semble chanter une promesse de mort… jusqu’à ce qu’il soit dévié par une des racines qui est venue miraculeusement s’interposer entre l’arme et sa maîtresse. La lame dévie et vient seulement créer une estafilade au bras droit de l’elfe qui grogne de douleur et de rage. Un « oh » déçu s’échappe des lèvres de Lyora, qui se voit ensuite propulsée violemment en dehors de la tente à cause de la branche souterraine que la mage a eu le temps de déloger avec force. L’entrée de l’abri en toile ne ressemble plus à rien, et l’espionne semble un instant voler dans les airs. Mais la silhouette de la jeune femme devient trouble et ses traits changent alors que son corps devient plus musclé, plus grand, et plus souple. Ses vêtements aussi deviennent noirs comme la nuit, et finalement, c’est bien l’Oreille qui réapparaît, alors qu’il profite de son agilité surhumaine pour se redresser dans les airs et atterrir sur ses deux pieds dans le camp rebelle. Une trainée de poussière le suit alors qu’il freine son élan et se stabilise, et un bref coup d’œil en arrière lui permet de voir l’arrivée des Serres Pourpres. Pour la première fois depuis son arrivée dans le camp, l’homme s’autorise à un vrai sourire. Les rebelles sont fini maintenant qu’ils ont établi une percé, et ni lui ni Deydreus ne leur permettront d’en rééchapper.

    En attendant que son frère d’arme le rejoigne, et puisque Myra est bien trop éloignée de lui, désormais, le maître-espion s’occupe d’en finir avec quelques rebelles qui le prennent pour cible. Eviter leurs coups est simple avec sa vitesse, et trouver leurs points faibles, avec l’entraînement qu’il a suivi, n’est guère difficile. Le chaos ambiant empêche également les insurgés d’établir une stratégie, et il est donc plus facile d’entamer une danse mortelle qui terrorise et intimide les rebelles.

    Le but, évidemment, c’est d’attirer Gurrak et sa complice, mais c’est une question de minutes, voire une question de secondes. Zéphyr sourit quand son ami mentionne le Fort de Birmark et, sur un ton presque espiègle, il ajoute :  

    - Au moins, nous aurons chacun notre part, cette fois.

    Evidemment, c’est une boutade. Quand il s’agit de renverser un ennemi de l’Empire, les deux guerriers se moquent éperdument de savoir qui a eu le mérite de verser le premier sang, tant que leurs objectifs sont accomplis. Il n’empêche que les deux chefs rebelles viennent dans leur direction et le duelliste laisse la Griffe prendre les devants avec Gurrak. Myra veut s’en mêler, apparemment, mais elle a aussi une dent contre Zéphyr, semblerait-il, qui lui accorde un sourire ô combien sarcastique. De quoi renfrogner la mage élémentaliste, qui accorde néanmoins une œillade critique envers les plantes en feu. L’intervention de la fausse Lyora a détourné son attention de la fumée, et évidemment, cela lui porte préjudice.

    - Peu importe. Ma magie sera suffisante pour t’annihiler et après, j’en finirai avec l’autre guerrier.
    - Eh bien, je t’attends, lui répond son adversaire en faisant tournoyer une de ses dagues avant de les rattraper par leur manche.

    L’espace d’un instant, seule une brise nocturne vient déranger les combattants, puis, c’est le maître-espion qui entame la danse alors qu’il se précipite vers la magicienne. Peu importe combien une élémentaliste est puissante, si un guerrier en face frappe en premier, c’est bien celui-ci qui peut gagner. Alors l’homme se précipite, tandis que l’herbe refleurit déjà autour de l’elfe aux cheveux blonds. Celle-ci esquisse un geste vers la droite avec son bras, et cela semble suffisant pour allonger la racine qui l’a déjà propulsé auparavant.

    - Vous n’avez pas pu brûler les arbustes de ma tente, et il ne me faudra que quelques instants pour créer d’autres végétaux qui me permettra d’avoir l’avantage, vermines !

    Zéphyr ne jette qu’un coup d’œil aux racines qui jaillissent du sol dans sa direction. S’il s’y prend bien, il est trop rapide pour qu’elles l’attrapent, mais leurs fonctions défensives est handicapante. On dirait des tentacules enroulés autour de leur maîtresse qui se meuvent en fonction du bon vouloir de celle-ci, et elles sont suffisamment vives pour bloquer ses lames. Il est même contraint de lâcher une de ses dagues dans l’un des angles morts de la demoiselle pour éviter un coup de racine. Alors, à un instant, l’Oreille reprend une certaine distance pour mieux établir où il peut prendre l’avantage. Quand il s’apprête à bouger à nouveau, une résistance au sol attire son attention et il hausse un sourcil.

    - Des sables mouvants… ?

    C’est que ces mages, c’est vraiment une plaie. Il comprend mieux pourquoi le poste d’Esprit ne l’a jamais intéressé. Quoi qu’il en soit, l’Oreille n’est pas disposée à être enterré vivant, mais son ennemie non plus ne veut pas en finir si vite. Une propulsion rapide suffit à le sortir de là, mais Myra, en contrepartie, profite de son manque de vitesse pour venir enrouler une de ses racines autour de sa cheville. Une brusque traction est nécessaire pour que Zéphyr se retrouve les pieds vers le haut et la tête en bas. L’intéressé laisse échapper un grognement désabusé alors que la mage s’esclaffe et croit que sa victoire est à portée de main.

    - Tu ne sembles pas te rendre compte de ta situation, pauvre imbécile.
    Le duelliste pose son regard sur elle alors qu’un fin sourire vient éclairer ses traits.
    - C’est étrange, j’allais te dire exactement la même chose.
    - Dit celui qui pend la tête en bas, comme un cochon qu’on s’apprête à envoyer à l’abattoir.
    Le maître-espion lance un regard au combat de Deydreus, qu’il aperçoit de biais. Visiblement, la Griffe n’en a pas encore terminé. Alors il doit faire durer les choses encore un peu.
    - Eh bien, je dois dire que pour une mage qui contrôle la magie complexe, je suis un peu déçu, déclare-t-il d’un ton badin.
    - Tu n’as pas réussi à me toucher.
    - Cela ne valait pas la peine que je me donne à fond. Tu as tellement d’ouvertures que même une gamine de six ans s’y prendrait mieux.
    Son interlocutrice se renfrogne alors qu’elle lui répond et qu’elle abaisse inconsciemment ses racines.
    - Tu n’es qu’un jeunot de trente ans alors que j’ai le centuple de ton âge. Tu me dois le respect, saleté. Tu as compris ?
    Une voix moqueuse lui répond aussitôt par derrière.
    - Que tu as 300 ans ? Oui, le calcul n’était pas difficile !

    La lame qui perce le dos de l’elfe arrache à la concernée un cri de pure douleur, cette fois, et elle écarquille les yeux lorsque ses yeux se posent sur un clone de Zéphyr. Ce dernier a ramassé la dague que l’Oreille a précédemment laissé tomber à terre, et il sourit à la jolie elfe qui pensait avoir gagné. L’homme esquive sans difficulté d’autres branches qui se précipitent brusquement vers le clone, mais, quand elle ramène son attention vers son tout premier adversaire, qu’elle a emprisonné à la cheville, elle écarquille les yeux. Sa racine est toujours là, mais plus aucun prisonnier n’est devant elle.

    - Tu te fies trop à tes sens et à ta vue.

    Cette fois, c’est un troisième clone qui lui murmure cette phrase à l’oreille, et l’intéressée sursaute comme si une mouche l’avait piquée. Elle ne l’a pas vu approcher faute à sa discrétion, sa vitesse et son invisibilité. Dans un élan de rage, elle s’entoure brusquement de végétaux et de racines pour forcer ses ennemis à s’écarter. Désormais, un mur végétal l'entoure, on entrevoit tout juste son visage. Ses yeux ont beau briller de colère, faire croître des plantes consomment quand même réellement son mana, alors qu’elle n’a pas pu réellement se reposer pendant une journée entière.

    Un instant, son regard se pose sur la racine qui se tient inutilement dans les airs pas loin d'elle, puis, un éclair de lucidité traverse son esprit.

    - Attends. Si les deux premiers clones étaient invisibles… Alors… Celui que j'ai attrapé est en fait toujours devant m...

    La racine qu’elle maintenait dans les airs pour emprisonner l’Oreille est brusquement brisée en deux, et semblent apporter des réponses à ses questions. Le membre de la Main était toujours bien pendu en l’air, mais il semble qu’il n’a pas eu de mal à se contorsionner pour venir couper le lien végétal qui l’emprisonnait.

    Zéphyr réapparaît d’ailleurs en atterrissant souplement au sol, alors que ses deux autres clones sont quelque part à guetter la moindre faille de leur adversaire.

    - Dey semble en avoir fini avec ton Gurrak. Alors je ne vais plus trop le faire attendre.
    - Comme si j’allais vous laisser…

    Un brusque crachat rempli de sang vint soudainement plier la mage en deux.

    - On dirait que le poison que j’avais enduit sur ma lame a commencé à agir. La prochaine fois, j’en prendrai un plus rapide.
    - Le poison… ?

    La voix de la magicienne n’est plus qu’un murmure terrifié, mais cela n’émeut guère le maître-espion.

    - Le poison qui t’a atteint dès que je t’ai touché dans la tente. J’aurais préféré t’octroyer une mort rapide, mais tu as préféré une agonie plus lente semblerait-il. Je t’ai bien blessée au bras, tantôt, n’est-ce pas ? Et tu ne sais plus le bouger maintenant, parce que la paralysie commence à t’atteindre de plus en plus.

    D’un air calme et mesuré, Zéphyr s’approche alors qu’il dégaine cette fois son katana.

    - Je ne savais pas à quel ennemi m’attendre avant de venir, alors j’ai pris quelques précautions. Quand j’ai su qu’on avait affaire à une mage, j’ai préféré utiliser le poison si tu arrivais à bien te défendre. C’est plus lent, mais ça n’en reste pas moins efficace tu en conviendras.

    La mage voudrait s’enfuir, trouver une échappatoire, des recrues qui pourraient l’aider et assurer sa fuite. Inconsciemment, elle regarde à droite et à gauche, mais partout, c’est le chaos et la débandade. Elle ne trouve personne, si ce n’est l’Oreille qui continue son avancée vers la rebelle qui s’est retournée contre la Couronne.

    - Une fois que les premiers symptômes apparaissent, c’est terminé. Je pourrais te laisser étouffer lentement pour te donner en exemple. Mais les Serres et mes hommes en ont pratiquement terminé et il n’y a guère plus de spectateurs alors… je préfère t’achever.

    C’est aussi une mesure de prudence, si jamais la mage arrive à recouvrer dans ses dernières forces pour causer un massacre et s’en prendre aux hommes de la Griffe et de l’Oreille. Contrairement à d’autres adversaires qu’il a déjà affronté, Zéphyr ne cherche pas à lui offrir une mort honorable : elle mourra dans la boue et le désespoir, et demain, plus personne ne se souviendra de cette rébellion qui a voulu se lever contre le couple royal.

    Un geste lui suffit pour en finir, et c’est la lame toujours dégainée qu’il se tourne vers Deydreus. Maintenant que la tête du serpent est coupée, il est temps de chasser tous ceux qui cherchent à fuir. Loin de rappeler ses clones, ces derniers se permettent d’aller à l’entrée et à l’arrière du camp pour mieux aller soutenir leurs hommes.

    Zéphyr jette un coup d’œil à Gurrak, et il finit par sourire à son compagnon d’arme.

    - Tu féliciteras Flubert pour moi, il m’a sacrément facilité la tâche. J’espère que je ne t’ai pas trop fait attendre.

    Un temps de silence alors que le Reikois inspecte du regard le campement.

    - Il va falloir faire le ménage dans tout cela, mais on peut dire que leur rébellion est officiellement terminée et qu'on pourra amener des bonnes nouvelles à la capitale.
    Le Chevalier Noir
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    Deydreus Fictilem
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  • Lun 3 Avr - 22:36
    De la honte. De la rage. De l'inquiétude. Voila tout ce que Deydreus pouvait percevoir dans le regard des hommes et des femmes attachés devant lui. Des rebelles, défaits et humiliés. Des restes minables d'une folie guerrière incontrôlée. Lorsque les chefs rebelles avaient rendu l'âme, leurs sbires s'étaient jetés bêtement contre les guerriers reikois ou avaient tenté de fuir à travers la jungle. C'est là qu'Ilvinar était intervenu, formant une nasse féroce sur les fuyards. Aucun d'entre eux n'avaient tenté de combattre. Le moral brisé, ils s'étaient soumis lamentablement. Ils avaient accepté leur funeste destin, laissant leur sort reposer dans les mains de ceux les ayant vaincus. Attrapant le visage d'un des rebelles, la Griffe analysa les traits du captif en silence puis, dans un soupir, lâcha son crâne dans un mouvement sec. Un gamin. Un jeune homme ayant à peine dépassé la majorité et qui s'était lancé dans un combat perdu d'avance. Peut-être par soif d'aventures. Peut-être par stupidité. A présent, son avenir ne comportait plus que des options peu jouasses. Une mise en esclavage potentielle, de la prison peut-être. Ou une exécution sommaire, en arène ou sur une place publique. Quel potentiel gâché.

    Se détournant des prisonniers tandis qu'il faisait signe à son officier d'emporter les prisonniers, Deydreus laissa ses yeux glisser sur les corps empalés qui dominaient les restes cendreux de quelques tentes. Les chefs rebelles. Exposés tels des porcs éventrés. Un symbole brutal. Sale. Suffisamment simple pour refroidir les ardeurs potentielles de potentiels rebelles voulant "reprendre le flambeau". Un peu plus loin, les tentes et cabanons encore intacts étaient minutieusement fouillés. S'il ne s'attendait pas à ce que les soldats trouvent quoique ce soit d'intéressant au niveau des informations sur le financement de la rebellion qui relierait cette dernière à la république ou à la pègre, le reikois était assez confiant sur les ressources qu'ils pourraient récupérer. Après tout, ces guerriers œuvraient depuis quelques temps déjà et aux vues des nombreuses patrouilles éliminées et des convois récupérés, il était fort possible que le camp détienne quelques richesses. Enfin, ce n'était plus vraiment ce qui importait et puis... Deydreus se satisfaisait déjà bien assez de la suppression de cette révolte pitoyable.

    Arrivant au niveau de Zephyr, l'homme aux yeux vairons fit un signe de tête à son ami, retirant son heaume tandis qu'il replaçait ses cheveux d'ébène. Au passage, il déplaça un tabouret de fortune, composé d'une bûche découpée à la va-vite. Un léger ricanement s'échappa de sa gorge tandis qu'il observait au loin les hommes qui fouillaient les tentes.

    - Vous avez trouvé des trucs intéressants? Je dois bien avouer que si tu me dis que c'est la République qui est derrière tout ça, je vais moi même voir l'Empereur pour lui annoncer la nouvelle. Il étira un large sourire, observant les flammes qui s'éteignaient peu à peu à l'orée du camp. C'est un véritable plaisir de pouvoir de nouveau travailler avec toi Zephyr, de manière "officielle", j'entends. En toute honnêteté, j'ai parfois encore du mal à réaliser que je suis devenu Griffe. Et puis je regarde mon bras.

    Un nouveau rire s'échappa de sa gorge, tandis qu'il défaisait son gantelet pour montrer au maître-espion ses doigts griffus et la fine couche de sang cristalline qui recouvrait sa peau. Passant sa dextre devant son visage, Deydreus s'amusa à fermer et ouvrir le poing, comme s'il voulait vérifier qu'il avait bel et bien le contrôle sur son propre bras.

    - Je suis maudit, Zephyr. Un mal qui sommeillait en moi depuis des années s'est éveillé et il va falloir que je trouve des pistes rapidement si je ne veux pas devenir fou et finir comme un imbécile, suspendu au bout d'une pique. Il soupira. Pourquoi est-ce que c'est toujours dans ces moments là, que le pire arrive? Enfin. Je trouverais bien une solution, même si je dois sacrifier des choses précieuses pour cela. Je ne compte pas abandonner aussi facilement. D'autant que ce post m'a, littéralement, couté un bras.

    Il se releva alors doucement, remettant son gantelet et jouant avec les différentes jointures. Une fois satisfait, le reikois s'approcha de son camarade, afin que les mots échangés entre eux ne dépassent pas le crépitement des flammes rongeant les restes de cadavres empilés.

    - Dis moi. J'aimerais te parler de quelque chose de plus... Personnel. Enfin. Considérant ce que je viens de te dire sur ma propre malédiction, ma formulation n'est peut-être pas la bonne. Il secoua la tête, chassant un rire qui serait venu moquer la gravité de ses prochains mots. J'ai rencontré quelqu'un. Une femme exceptionnelle. Avec qui j'ai frôlé la mort et combattu les pires horreurs lors d'une mission à Alfregium. Une ange.

    Il s'arrêta quelques instants, laissant le temps au maître espion d'analyser la situation, et de potentiellement faire le lien avec ce qu'il voulait lui faire comprendre. Ses yeux glissèrent alors naturellement dans l'incandescence, lui rappelant vaguement le chaos de la ville maudite et les horreurs de la crypte.

    - Je ne sais pas si je la revérais un jour mais, si tel est le cas, il est fort probable que je la laisse m'accompagner un temps, voir qu'elle combatte même pour nous. Je ne sais pas quels seront ses plans mais, je la sais forte, intelligente, honorable, loyale. Je sais aussi qu'elle n'a jamais fait le moindre mal à un membre de notre nation. Tout comme je sais comme lui permettre d'évoluer chez nous ou, le cas échéant, parmi nous pourrait être compliqué. Mais elle mérite une chance. Une place. Et malgré la raison qui l'a mise au monde, je lui fait tout aussi confiance qu'à toi, ou Alasker. Ce n'est actuellement qu'une chimère dont je te parle. Quelque chose de lointain, peut être même d'impossible étant donné le mal qui me ronge mais...

    Il quitta les flammes des yeux pour venir ancrer son regard dans celui de son vieil ami.

    - Pourrais-je compter sur toi pour m'épauler un jour si jamais je dois défendre sa cause auprès de notre peuple ou du couple impérial? Je l'avoue, ma demande est dans mon intérêt direct mais, de toi à moi... Avoir une ange combattant pour l'armée du Reike, en plus de personnalités telles que Keerius, nous offrirait un symbole à mon sens très important. Un être crée à la base par les titans, portant la bannière du peuple les ayant défiés et vaincus. Un léger rire s'échappa de sa gorge. Enfin. Encore une fois, ce n'est qu'une idée lointaine, un peu folle. Mais j'aimerais savoir ce que tu en penses, en tant que maître-espion, mais aussi en tant qu'ami. Si tu émets un refus, ou même que tu souhaites m'opposer quelques réticences, je les prendrais en considération, car tu es l'une des rares personnes en qui je place ma confiance.

    Deydreus écouta silencieusement la réponse de l'Oreille puis, dans un sourire, remit son heaume en place alors que Léonard et Esyleij approchaient. Les deux membres des Serres saluèrent respectueusement Zephyr puis se tournèrent vers la Griffe.

    - Les derniers captifs semblent avoir été évacués et le camp a quasiment été fouillé à cent pour cent. Les animaux que les rebelles avaient capturés sont actuellement en fuite dans la jungle. Flubert se propose d'aller les traquer mais il fera selon vos directives chef.
    - Merci messieurs, retournez auprès des Serres et dites leur d'attendre près de l'entrée principale.

    Dans un hochement de tête, les fantassins quittèrent le duo de la Main pour transmettre les ordres de leur supérieur. Se retournant vers Zephyr, Deydreus étira un large sourire à son ami.

    - Alors chère Oreille, parée pour une petite chasse au monstre rebelle?


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    Noble du Reike
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    Zéphyr Zoldyck
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  • Mar 4 Avr - 19:53
    La rébellion était finie, ou en tout cas, elle était en train de mourir. Le reste des insurgés menait soit un combat inutile contre les Serres et ses espions, soit ils essayaient de s’échapper, mais l’organisation qu’avaient mises en place la Griffe et l’Oreille les avaient d’ores et déjà condamné. Est-ce que Zéphyr les plaignait ? Pas vraiment. Quand on prenait une décision, il fallait l’assumer jusqu’au bout, et surtout en supporter les conséquences. Dans leurs cas, les locaux savaient ce que signifiait leur insurrection, et ils savaient parfaitement dans quoi ils s’engageaient en neutralisant les patrouilles de l’Empire. Les voir désespérés ne provoquait en l’état aucun émoi au guerrier, et si tôt que leur camp prit suffisamment le dessus, il ne fut pas spécialement difficile d’emporter les rescapés. Ceux-ci étaient évidemment prisonniers et devraient payer tôt ou tard de leurs crimes, mais ce n’était pas ici qu’ils devraient faire amende honorable aux yeux de la Couronne. Dans l’immédiat, ce qui intéressait surtout le maître-espion, c’était ce que les rebelles avaient laissé derrière eux. Leur attaque surprise les avaient empêchés d’emporter leurs réserves vers un autre lieu de retraite, il était donc probable que leur campement contiennent des vivres, des armes et des protections, mais aussi d’autres denrées fournies par des soutiens extérieurs. Trouver des documents compromettants lui permettrait de remonter un réseau de dissidents éventuels, même si rien n’était garanti non plus. La rébellion pouvait encore uniquement se limiter à la jungle, sans qu’il n’y ait d’agents reikois ou étrangers qui l’aient soutenu.

    Lorsque Deydreus le rejoint, Zéphyr parcourt un inventaire qui retrace la vie du camp et ses déboires dans cette jungle hostile. Tantôt il s’agit avant tout de consolider leurs réserves de bois, tantôt il s’agit de chasser et de trouver de quoi nourrir les bêtes qu’ils veulent domestiquer. Le plus intéressant concerne évidemment les armures militaires de la rébellion : quelqu’un doit bien les avoir payées et c’est en tournant l’une des pages que le maître-espion finit par tomber sur un nom. Karfang. Un forgeron peut-être ? Son nom est en tout cas écrit à côté d’une commande et l’homme se promet d’interroger Lyora à ce sujet. Soit il s’agit d’un des rebelles du camp, soit il s’agit d’un artisan de Kyouji ou des environs. Dans tous les cas, il vaut mieux effectuer quelques clarifications.

    Un « hum » songeur s’échappe de ses lèvres quand son ami évoque la République. En l’état, tout est possible, mais le guerrier ne peut rien confirmer dans l’immédiat.

    - J’ai des pistes, fait-il sérieusement en refermant l’inventaire. J’en saurai plus à l’aube. Plus tôt je trouverai l’origine des noms écrits dans ce carnet, plus vite je serai content. Il est possible que ce soit le vieux Gurrak qui ait tout financé au début, puis que ce soit Myra qui ait pris la relève quand justement la rébellion commençait à manquer de ressources. Ca aurait grandement aidé son intégration à la rébellion. Je me suis permis d’interroger les prisonniers avant que tu ne les embarques, et il semble qu’elle vouait une haine farouche au Reike depuis la mort de ses enfants lors de la Guerre des Titans. Un fait malheureux, mais qui peut être suffisant pour  créer un complot quand la colère et la rage nous habite. Je ne laisserai quand même rien au hasard et je vérifierai qu’il n’y a pas eu de soutiens extérieurs. Pas que je m’ennuie à tes côtés, c’est sympa de me rappeler le fort de Brimmarck, mais on a d’autres projets que de calmer des insurrections les unes après les autres, fait-il avec l’ombre d’un sourire.

    L’homme hoche la tête quand Deydreus exprime son plaisir de travailler avec le maître-espion. Il va de soi que c’est réciproque, mais une expression intriguée apparaît sur son visage quand son camarade lui montre son bras. Une malédiction ? Ca ? C’est génial. Ca fait bien leurs affaires, et Zéphyr pose ses prunelles ambrées sur ce mystérieux membre cristallin.

    - Tu as intérêt à trouver une solution. Ce n’est même pas qu’il lui laisse le choix, en vérité. Tu n’es pas devenu la Griffe pour passer à trépas en quelques mois à peine, grogne-t-il. Et il est encore plus hors de question que tu deviennes fou. Quels sont les symptômes de ta malédiction ? Ca a atteint ton bras, certes, mais vu la manière dont tu as combattu, il me semble que cela ne t’empêche pas de te défendre correctement. Est-ce que cette… chose corrompt ton corps ? Et ton esprit, qu’en est-il ?

    Zéphyr marque une pause pour le laisser répondre. Puis la conversation continue, et c’est encore une fois Deydreus qui prend la parole. Pas que ça le dérange, en vérité. Leurs subalternes respectifs ont chacun leurs occupations, alors c’est l’occasion parfaite pour échanger ensemble sans être dérangés. D’ailleurs, au début, l’Oreille ne voit rien à redire aux propos de son ami. Il a rencontré une femme d’exception ? Ma foi, c’est très bien, surtout s’il a frôlé la mort en sa compagnie. Ca forge toujours des liens particuliers, dans de telles circonstances. Mais évidemment, ses gênes reikoises obligent, le membre de la Main ne peut s’empêcher d’hausser un sourcil à la mention de sa race. Une ange. Une créature des Titans, donc, créée personnellement par les déités il y a de cela des millénaires. L’Oreille apprécie que Deydreus n’enchaine pas trop vite son discours, le temps qu’il assimile la nouvelle. Car soyons honnête, le maître-espion aurait préféré qu’il lui dise : « J’ai rencontré une reikoise elfe plutôt » plutôt qu’une de ces entités si rares et particulières, qui sont en plus immortelles.

    Zéphyr ne sait pas si cette nouvelle donnée l’irrite ou l’inquiète, mais dans l’immédiat, tout cela lui semble… incompréhensible. Alors il laisse son ami continuer. L’assassin n’est pas foncièrement d’accord, non. Dès qu’il a mentionné sa race, le maître-espion n’a pu s’empêcher de se dire que cette histoire ne sentait pas bon, mais il invite silencieusement son frère d’arme à continuer. Et il découvre les projets de la Griffe. Apparemment, il est disposé à ce que cette femme l’accompagne, à ce qu’elle combatte à ses côtés. Une contradiction surgit aussitôt dans l’esprit de Zéphyr, mais il a assez de sagesse pour la retenir encore un temps. Ce n’est pas l’heure de parler. Plutôt, plus le chef des Serres continue, plus l’Oreille se rend compte que son compagnon croit fermement en ce qu'il dit. Il n’y a pas que l’assurance dans les propos de Deydreus : son corps ne trahit aussi aucune hésitation, et la fermeté de son regard montre, a priori, qu’il n’est pas manipulé par une quelconque magie. En un sens, c’est une bonne chose. Et dans l’autre… Ca les complique aussi considérablement.

    Lorsque le commandant des armées impériales lui demande s’il soutiendra sa cause devant le peuple et le couple impérial, l’Oreille reste silencieuse un moment, le temps qu’il réorganise toutes les informations qu’il vient de recevoir. Son regard est plongé dans les flammes, puis un soupir s’échappe de ses lèvres.

    - Dey.

    Pour une fois, l’ami et le maître-espion sont d’accord.

    - Cette femme va ne nous attirer que des emmerdes.

    Difficile de dire si Deydreus va être surpris par sa réaction qui, il faut le dire, ne peut pas être plus reikoise que ça. Mais si Zéphyr lui fait une telle déclaration, c’est qu’il le pense vraiment, et il se redresse pour plonger son regard dans celui que son ami.

    - Tu m’as dit que c’est une ange. Fondamentalement, je m’en fous de sa race. Tu peux être une oni, comme un elfe, ou un demi-titan – regarde Genryusai – et appartenir au Reike ou à ses valeurs. Mais dans son cas, on ne peut ignorer ses origines. Elle a été créée par les monstres-mêmes qu’on veut tuer. Alors vient mes premières questions. Dans quelle mesure a-t-elle été plongée dans le divinisme ? Comment considère-t-elle ses pères ? Serait prêt à les combattre ? A les renier ? Tu me parles de ton souhait de la voir t’accompagner. Mais qui te dit qu’elle n’est pas envoyée par le Nouvel Ordre même pour essayer de te détourner de ses devoirs ? Il ne remettait pas en cause la loyauté de son ami, évidemment. Mais les Astres seuls savaient à quel point il pouvait y avoir des manipulateurs dans le Sekai et le rôle de Zéphyr, au fond, c’était de poser les questions qui fâchent, et de douter de tout le monde.

    Evidemment, le guerrier n’en a pas fini, et il continue son analyse d’un air inexorable.

    - Tu sembles lui accorder beaucoup de crédit. Je ne te reproche pas cela, surtout si vous avez vécu des épreuves qui vous ont fait frôler la mort. D’ailleurs, il faudra que tu m’en parles, fait Zéphyr en fronçant les sourcils. En long et en large, autour d’une bière, quand on sera rentré à Ikusa. Mais même si tu me dis qu’elle est loyale, forte et intelligente… Qui te dit qu’elle sera capable de suivre les Serres Pourpres ? Ce sont des soldats d’élite. Tout le monde ne sait pas suivre votre entrainement extrême et rigoureux. Ensuite, qu’est-ce qui t’assure qu’elle adhérera à nos valeurs, à la justice du Reike et au caractère militaire de notre nation ? Si tu dois supprimer un clan entier, parce qu’ils se sont rebellés contre la Couronne, comment réagira-t-elle s’il s’agit d’emprisonner pour l’exemple des femmes et des enfants qui ont participé à la révolte ? Nous sommes durs, Dey. Durs et souvent cruels. L'honneur nous habite, mais il peut autant être un bouclier qu'une épée qui nous blesse. Serait-elle prête à accepter ce que nous sommes, sans remettre en question ton rôle au sein de l'Empire ? 

    Toutes des questions montrent évidemment que Zéphyr n’a jamais vu Luvïel, qu’il ne connait rien de sa personnalité ni de ce qu’elle a vécu dans le Sekai. Pour l’heure, cette « ange » est une silhouette informe dans son esprit, qui n’a pas de visage, qui n’a pas de nom. Elle représente juste un danger immédiat pour l’intégrité de son ami, qui pourrait même déteindre sur son poste de Griffe.

    - Tu dis qu’elle mérite une place. Cette fois, le maître-espion pince les lèvres, tant cette entreprise risque à elle seule d’être compliquée. Tu sais déjà que ce n’est pas à moi d’en décider. C’est le couple impérial qui aura le dernier mot. Et il n’appréciera sans doute pas de te voir en compagnie d’une créature des Titans. L’Oreille marque une légère pause alors qu’il réfléchit. En l’état, son jugement reposera certainement sur deux choses. Premièrement, a t-e-elle déjà agi contre les intérêts du Reike ? Et deuxièmement, est-elle liée de près ou de loin à ses créateurs ? Il faudra qu’elle réponde à ses questions… Et qu’elle ne cherche même pas à mentir, d’ailleurs. En tous les cas, je dirais qu’elle ne pourra pas t’accompagner sans l’accord du couple royal. Tu as trop d’importance pour l’armée, pour le peuple, pour qu’ils te laissent traverser la nation avec n’importe qui. Evidemment, il entend bien que cette ange pourrait être un symbole, un signe pour les Shoumeïens et pour les Reikois. Même pour la République, bien sûr. Mais elle devra faire ses preuves, c’est plus qu’évident. Si elle a réalisé quoi que ce soit qui déplaise à Ayshara ou à Tensai… Un marmonnement s’échappe de sa bouche. Elle devra, au minimum, faire amende honorable. Et si elle fait le moindre faux pas, c’est potentiellement la mort qui l’attend. Tu en as conscience ?

    Autant poser les questions franc-jeu. Que ça déplaise à son ami ou non. D’ailleurs, voilà que Zéphyr en pose une nouvelle, après avoir évidemment laisser l’opportunité à Deydreus de réagir.

    - Alasker est au courant, je présume. Qu’est-ce qu’il pense ? Qu’est-ce qu’il t’a dit à l’égard de cette ange ?

    Le lycanthrope était après tout le bras droit de la Griffe, et avoir son avis ne pouvait que leur être bénéfique pour porter un meilleur jugement sur la situation actuelle.

    - Pour ce qui est de te soutenir auprès du peuple et du couple impérial. Zéphyr marque un temps avant de lui répondre. Le peuple, tu devras l’affronter tout seul. Je ne serai pas à tes côtés pour faire face aux préjugés reikois, car comme tu le sais, je reste beaucoup plus à Ikusa en temps normal. Cela dit, tu as suffisamment de force de caractère, donc en ce qui te concerne, je ne m’inquiète pas. Pour la femme, ça dépendait de sa motivation, de son courage, de sa détermination, aussi. Mais l’Oreille n’avait aucun pouvoir là-dessus. En ce qui concerne le couple impérial. Point beaucoup plus délicat que la populace de l’Empire. Il va falloir que  tu mettes vites ça sur le tapis, Dey. Ta malédiction est une urgence absolue dans l’immédiat, mais si tôt que tu as trouvé un remède, il faut que tu ailles parler à Ayshara et à Tensai. Demande une audience royale. J’appuyerai celle-ci pour faire accélérer les choses au besoin. Un léger silence. En l’état, je ne sais pas si je peux te soutenir. Il faudrait que je la rencontre. Que je me fasse une idée de qui elle est. Excuse-moi, mais je n’écarte pas encore la piste qu’elle soit une manipulatrice qui veulent conquérir ton cœur. Mon métier de maître-espion déteint trop sur moi, on dirait bien. Et puis, honnêteùent. Une ange qui  t’accompagne et combatte même potentiellement les Titans… Je ne sais pas. Il faudrait que j’en sache plus sur elle, sur son vécu, sur son passé, pour rendre un jugement équitable. En l’état, je suis sceptique et je n'ai aucune confiance en elle. D’ailleurs tu sais où elle est ? Ou ce qu’elle fait ? Quel est son objectif, pour le moment ? Et à quoi ressemble-t-elle ?

    La retrouver, envoyer ses espions pour la localiser serait compliqué, voire impossible dans l’immédiat, mais Zéphyr pouvait faire jouer son réseau pour trouver des échos de la trace de l’ange… Encore qu’il lui faudrait infiniment plus de détails pour mettre la main sur une entité anonyme, qu’il n’avait jamais vu de sa vie.

    L’échange entre la Griffe est momentanément interrompu par Léonard et Esyleij, et le maître-espion attend que son ami renvoie ses hommes avant de lui faire une proposition.

    - Partons chasser. Tu peux bien répondre à toutes mes questions quand on aura fini. Juste, dis-moi. Cette fille. Comment s’appelle-t-elle ?

    Histoire qu’il arrête de l’appeler « l’ange » à tout bout de champ.
    [/justify]
    Le Chevalier Noir
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    Deydreus Fictilem
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  • Mer 5 Avr - 12:45
    Deydreus écouta son ami avec intérêt. Il avait été sérieux, dans ses mots, sa manière de penser. Il considérait véritablement l'opinion de son ami et sa réaction fut aussi attendue que surprenante. Une dualité qui laissa un sourire apparaître sur les lèvres du reikois, malgré le problème qui pouvait se manifester à l'horizon. Quand Zephyr eut finalement fini, la Griffe invita son ami à le suivre, commençant à marcher en direction de la jungle. Le reste des Serres, et des soldats globalement, marchait bien en avant, laissant les deux collègues suffisamment seuls pour que leurs mots ne soient entendus que par eux. Comme plus tôt dans la journée, comme lorsqu'ils progressaient vers le lieu de rendez-vous.

    - Concernant ma malédiction, les symptômes me poussent vers une rage incontrôlée. Une férocité qui grandit de manière violente, accentuée par les combats et mes propres blessures. Globalement, elle corrompt les deux. L'origine se trouve dans mon sang, et fait répondre ce dernier à ma rage et mes pulsions sanguinaires. Et aux fils des jours, elle devient plus forte, cette rage. En dehors de cela, je reste moi. Et puis, c'est assez ironique au final, d'avoir un bras dont les doigts forment des serres pourpres. Le destin semble moqueur.

    Il laissa un léger rire s'échapper de sa gorge, tandis qu'il passait par dessus une souche d'arbre écrasée par le passage d'un lanconda particulièrement pressé. Les bêtes n'étaient plus véritablement loin. Mais ils avaient encore le temps d'échanger.

    - Pour l'ange... Elle considère ses pères comme ce qu'ils sont. Des êtres l'ayant abandonnée. Et dont la cruauté est responsable des malheurs frappant notre sol. Elle n'est pas versée dans le fanatisme, elle ne souhaite en réalité qu'une chose, protéger les mortels. Pour ce qui est de mon devoir. Il marqua une pause, fixant l'Oreille froidement, piqué à vif. Jamais je ne le renierai. Je suis le chef de ces armées. Je suis la Griffe. La guerre est mon quotidien et la Mort ma plus fidèle amie. Il est hors de question qu'on puisse penser que je sois capable de me détourner de ma route. Pas avec la vie que j'ai mené jusqu'à présent et que je continue de mener. Et peu importe les sentiments que je pourrais avoir, le Nouvel ordre serait bien incapable de me faire quitter mon poste aussi simplement.

    Il s'arrêta quelques instants, écoutant l'écho lointain de la jungle nocturne. Ses yeux vairons, nyctalopes, lui permettaient de mieux appréhender ce qui se cachait dans l'obscurité. Les lianes pendaient doucement, bercées par quelques brises lointaines tandis que leurs hommes continuaient de progresser.

    - Elle est forte, Zephyr. Bien plus que la plupart des membres de notre armée. Son potentiel est là, qu'il soit magique ou martial. Elle m'a sauvé la vie, tu sais. Grâce à sa magie. Et même si j'ai également sauvé la sienne, je sais ce qui réside dans son coeur. L'entrainement sera dur. Violent. Douloureux. Je ne suis pas un devin tu sais, je ne suis pas capable de dire qu'elle adhérera à tous nos principes, ni à nos méthodes, mais je sais aussi qu'en faire une ennemie serait stupide. Je sais que si les choses se font et qu'elle nous rejoint, ce sera après un processus long et fastidieux. Qu'elle devra faire ses preuves. Je la veux à mes côtés, Zephyr, mais ce ne sera pas sans la preuve de sa propre volonté. Et encore une fois, il serait impossible de me détourner de mon devoir, même si elle le voulait. A vrai dire, la seule chose qui me ferait tiquer, serait un manque de considération à mon égard par le couple impérial. Ou qu'on la détruise, réduisant son esprit à l'état de purée. J'ai délié une janissaire de la léthargie qui la composait il y a quelques mois, l'affectant à de nouvelles missions avec les Serres. J'ai vu ce que les janissaires restant sont devenus. Et je refuse de voir cela chez qui que ce soit. Et paradoxalement, je ne comprend même pas pourquoi la chose est encore en place quand on connait les origines de notre empereur. Enfin. Ce n'est ni la question, ni l'endroit pour philosopher sur nos propres convictions.

    Un nouveau bruit plus loin, le groupe se fige. Attendant de voir de quoi il s'agissait. Puis, un bruissement plus proche. Laissant entrevoir l'intrus. Une pauvre bête, inutile et sans danger, qui prit ses pattes à son cou lorsqu'elle remarqua le contingent de guerriers. Soupirant, Deydreus reprit.

    - Bien sûr que son intégration dépendra de l'autorité du couple impérial. Ca me semble évident. Pour le reste, il est évident qu'elle devra répondre aux questions, et réparer potentiellement des tords commis. Même si je doute qu'elle en ait réalisé. Et pour ce qui est de traverser la nation avec n'importe qui, j'ose au moins espérer que cette règle s'applique sur tous les membres de la main, pas juste ma personne. Il serait mal avisé qu'un ministre fricote avec l'ennemi, qu'il soit membre de la république, ou d'un groupe de fanatique, bien sûr. Il laissa un peu de temps à son ami avant d'enchainer. J'ai conscience de tout cela. Tout comme je sais aussi que nous disposons de mages et de magie permettant de lire l'esprit et de détourner les mensonges potentiels. J'ai confiance en elle Zephyr. Vraiment. Pour ce qui est d'Alasker, je crois qu'il m'a dit quelque chose du genre "elle va nous attirer des emmerdes". Il ricana doucement. Mais il respecte aussi mon choix. Il veut juste être certain que je suis sûr de moi, tout comme toi. Et ses arguments étaient similaires aux tiens, d'ailleurs. C'est pourquoi j'apprécie votre amitié, vous n'avez pas peur de dire les choses qui fâchent, mais vous êtes compréhensifs.

    Ses yeux vairons glissèrent alors sur les nombreuses plantes toxiques qui les entouraient. Comme il était amusant de penser qu'ils échangeaient sur des sujets tels que ceux-ci alors qu'ils évoluaient parmi un environnement hostile. Les reikois étaient véritablement des êtres à part, à la force de caractère et à l'esprit particulier. Deydreus était fier de ses origines, même s'il ne partageait pas toujours les idéaux du reste de son peuple.

    - Je pense aussi qu'il faudra que j'en parle à l'impératrice et à l'empereur. Cela me semble évident. Encore une fois, tout ceci n'est qu'une chimère qui n'a pas encore pris forme. Mais lorsque les choses me paraitront plus concrètes, il est évident qu'il faudra que je leur en touche un mot, que j'expose mes arguments, et que je puisse voir si la chose sera considérée ou non. Et que je me prépare à un refus potentiel. Que je prépare mes options. Je pense également qu'il est important que tu la rencontres. Que vous puissiez échanger tous les deux. Quitte à ce que tu fouilles son passé au besoin. Je ne m'y opposerai pas. Car j'ai tout aussi confiance en toi mon ami. Pour ce qui est de ce qu'elle fait en chemin, je sais qu'elle devait explorer le monde, le découvrir. Et je sais qu'elle parcourt actuellement nos terres, à la recherche d'une amie que des esclavagistes ont enlevée. Et pour son apparence... Il la décrivit rapidement. J'espère que ça t'aidera à retrouver potentiellement sa trace. A te faire une idée, quitte à échanger avec elle, encore une fois. Et elle se nomme Luvïel.

    Il laissa un léger soupir s'échapper de sa gorge, tandis qu'il revoyait dans son esprit les traits de la figure angélique. Puis son esprit vogua quelques instants, glissant doucement vers un abysse sans fond où la rage qui l'habitait brûlait éternellement. La priorité était la malédiction, Zephyr avait bien raison. Et pour le reste, tout n'était que ce qu'avait dit Deydreus. Une chimère qui n'avait pas encore pris forme. Le chevalier sortit alors de ses pensées, interpellé par les Serres qui venaient de retrouver la trace des animaux fuyards. D'après les marques sur les arbres et sur la terre, deux lancondas étaient passés par là, ainsi que quelques cerberus. Un attroupement particulier, mais pas non plus terrible. A vrai dire, la chose la plus inquiétante se trouvait surtout dans les quelques plumes glacées qui siégeaient ici et là, révélant potentiellement la présence d'une proie bien plus dangereuse.

    - Dis moi Zephyr. Tu as déjà eu l'occasion d'observer un oiseau élémentaire?


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