Étant enfant, je ne compris jamais la peur que j’inspirais aux autres habitants de mon petit village près d’un oasis dans le désert du Reike. Ni la peur des autres enfants, qui me pointaient du doigt, autant que celle de mes parents adoptifs, mes souvenirs avant ma dixième année de vie semblant comme flous, conscrits ou effacés sciemment. Il n’y avait pas de miroir dans notre maison, je me disais que l’être humain était méchant, gratuitement, que je devais me méfier, tout cela car je ne comprenais pas comment une fillette aussi adorable que moi puisse être effrayante au point qu’on ne veuille pas me donner d’amour, ni me faire participer aux jeux enfantins des autres jeunes. Hormones en ébullitions, je faisais fuir les hommes et les femmes comme si j’étais un brasier prêt à les brûler, et ce n’est que par excès de coquetterie que je découvris mon aspect racial atypique et la raison de leur frayeur.

Des cornes en arabesques sur le crâne, une peau rouge sang, comme le sable ocre ayant bu  l’hémoglobine après une rude bataille de guerrier nomades sur son  dos. Je pensais et voyais le désert vivant malgré qu’il semble vide, la vie pullulait en son sein, surtout la nuit… Mon moment préféré de la journée. Sans doute parce qu’une fois le voile nocturne tombé, l’expression voulait que tout les chats soient gris. J’avais plus l’air d’un dragon qu’un félin, mais c’était une autre histoire. Moi je me trouvais mignonne, atypique, mais plutôt belle gosse, je ne comprenais pas qu’on puisse juger quelqu’un sur son physique, un truc que je ne comprendrais sans doute jamais.

En tout cas je compris vite que mes parents, n’étaient pas les miens de manière biologique, arrivé à un âge ou l’on fait des bêtises, je me fis réprimander. C’est la que j’appris la colère, la rage bouillonnante de mon sang se transformant en feu primordial, ce liquide en fusion frappant à ma tempe comme un tambour de la guerre à la fois en moi, et contre eux. Eux, c’était ces humains et leur mode de pensée étriquée. Je ne voulais plus vivre ici, et je m’enfuirais alors direction la ville la plus proche, je m’engageais dans l’armée et reçut mon tatouage, que je fis dans ma nuque, sous mes cheveux noirs sur le dessus et rouges par touche et surtout très rebelles.

Je découvris le tabac, j’accrochais à son addiction, et encore aujourd’hui j’aime fumer, ça me calme et j’aime bien me dire qu’il n’y a jamais de fumée sans feu. Je suis sa personnification, son avatar, tête de pioche pouvant tout dévaster, détruire et consumer ma colère primaire et enracinée dans mon psychisme de brute épaisse, selon les rumeurs, qui me permit de m’élever dans l’art de la guerre frontale et dont la forme me semblait la plus pure possible. Mes instructeurs disaient souvent de moi que j’étais un diamant brut, mais si solide que personne ne pourrait jamais me tailler pour sublimer mes qualités, sauf moi-même peut être.  

Les années passèrent, les promotions aussi, certaines me filèrent sous le nez, sans doute parce que mes compétences sociales sont quasiment négatives. Je parle peu, et quand je le fais, ma voix grave et rocailleuse accroche les lettres et égratignent les oreilles les plus délicates. Je’ sors plus de juron en une minute que je ne connais de vocabulaire soutenu, enfin, ça, c’était avant qu’on m’envoie ici.

Le berceau des anciens, la prison du Reike. Ma résistance psychique et mes compétences martiales hors du commun étant une évidence pour les autres, je me résignais, et je filais alors vers la prison qui saurait me faire changer, évoluer, et peut être enfin me permettre de prendre mon envol dans ce monde qui semblait alors gris, vide, et pas fait pour moi. Je passerais des années là bas à garder des êtres surnaturels, et les pires dangers du Sekai seraient mon lot quotidien mais peu importait ...

Que ma vie servent … C’était tout ce que je demandais… Alors toujours comme une flamme dans la nuit, j’éclairerais les vies sombres et tristes du Sekai par mon panache, et ma tête de brique.