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Citoyen du monde
Phèdre
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Les nuits en république n’avaient rien à voir avec les nuits Reikoises. Si Eris les avaient toujours trouvées froides, ce n’était rien en comparaison à cet endroit qui arrivait presque à faire geler son sang dans ses veines. L’humidité était omniprésente et lorsqu’il ne pleuvait pas c’était la neige qui rendait le sol boueux. Seule la ville offrait le luxe de marcher sur un sol pavé et non dans un mélange de vase et de crottin de cheval. Dissimulée sous la capuche sale d’une cape d'un noir d’encre qui se fondait parfaitement dans les zones d’ombres que les lanternes n’éclairaient pas, la bibliothécaire tentait de se frayer un chemin avec toute la discrétion dont elle était dotée.
Ces derniers jours avaient été un songe pour Eris et c’était par moment encore le cas. Comme inconsciente, elle se trouvait brusquement spectatrice de son existence sans pouvoir agir sur son corps. Elle se contentait de regarder, d’analyser et d’approuver ou pas ce qui était fait. Les émotions continuaient de la traverser, la colère, la joie ou la peur mais les pensées parasites étaient plus présentes que jamais, tant et si bien qu’elle se demandait par moment s’il s’agissait bien des siennes. Eris était tout bonnement épuisée et terrifiée. Elle avait peur d’elle-même, peur de ce que Phèdre pouvait faire. Elle en avait eu un avant goût. Elle savait également que sa psyché était plus féroce que la sienne et que chaque jour qui passait était un jour où son autre prenait le dessus. En arrivant en république Eris était persuadée que sa fin était venue mais contre toute attente, c’était elle qui avait fini par reprendre les commandes et si elle ne savait pas comment, elle savait pourquoi.
C’était une lettre dont elle avait immédiatement reconnu l’écriture cursive et appliquée. Avant même l’ouverture, elle avait reconnu le papier et si aucun sceau officiel n’était venu garnir la cire qui scellait l’enveloppe, Eris avait deviné l’expéditeur. Phèdre aussi et elle avait senti sa colère alors que sa détermination reprenait le dessus. Ce qui était encore plus étonnant, fut que cette lettre était arrivée chez elle bien avant son départ en République mais qu’en partant, elle s’était bien gardée de l’oublier.
“Me feras-tu le plaisir de ta compagnie lors du retour des héros de la marche du vent d’acier ?”
Phèdre n’avait pas compris, ni vu venir. Elle savait pourtant la flamme qu’Eris entretenait pour cet humain insipide, elle le savait mieux que personne puisque c’était son propre cœur qui s’agitait en sa présence, c’était également ses ardeurs qu’elle devait réfréner car si Eris aimait Zéphyr, Phèdre le méprisait autant qu’elles le désiraient. Pourtant elle n’avait su prévoir le moment où elle tomba à son tour dans l'oubli. Elle qui avait toujours considéré le jeune homme comme une faiblesse, constata à quel point elle avait raison puis sa conscience se réduisit à une flammèche corrompue dans l’esprit doucereux d’une bibliothécaire Ikusienne qui n’a guère sa place en république.
Ainsi et pour la seconde fois de ce mois, Eris s’était retrouvée à fuir un pays qui la terrifiait. Au-delà du fait qu’elle n’était aucunement en règle avec les autorités républicaines, cet endroit lui semblait hostile. Sans nul doute car elle n’avait rien connu d’autre que le Reike. Alors elle s’était tapis dans sa chambre d’auberge, avait rassemblé les maigres affaires qui lui restait puis avait chipé un pantalon et une chemise et avait attendu la faveur de la nuit pour filer dans les rues sombres.
On entendait toutes sortes de choses à Ikusa, surtout en deux cents ans d’existence et heureusement la mémoire de la fae était plutôt bonne. Il y avait de cela une petite vingtaine d'années, avait été évoqué des camps de réfugiés ou de passeurs, elle ne savait plus très bien, mais toujours était-il que ces gens avaient vocation à voyager de République vers le Reike et c’était exactement ce dont elle avait besoin. Sans le sous, ni qui que ce soit vers qui se tourner, il lui était impossible de regagner Ikusa par ses propres moyens. Neera, peut-être, aurait-elle pu l’aider mais Eris craignait que la Tornade ne déterre plus de secrets qu’elle ne l’avait déjà fait.
Eris voyagea deux jours et une nuit en longeant les routes principales par les chemins de bas-côté pour ne jamais se retrouver à découvert, ni se perdre. Elle qui n’avait jamais porté de pantalon, découvrit ô combien ces vêtements étaient inconfortables mais elle devait leur concéder une certaine praticité. Au terme du second jour, elle arriva enfin à ce qui semblait être un camp. Hélas le destin n’en avait pas finit avec elle et lorsqu’elle comprit en quelle compagnie elle se trouvait, il était déjà trop tard et le rire cristallin de Phèdre raisonna dans un coin de son esprit. Même muselée, elle était maîtresse dans l’art de la manipulation.
Sale et éreintée mais également affamée, Eris n’avait pas eu la force de s’enfuir une fois de plus. Elle n’était pas une combattante. Pas plus qu’une nomade. Le mieux qu’il lui restait à faire était de dissimuler son tatouage, reprendre des forces et le moment venu reprendre la route de son côté.
Ces derniers jours avaient été un songe pour Eris et c’était par moment encore le cas. Comme inconsciente, elle se trouvait brusquement spectatrice de son existence sans pouvoir agir sur son corps. Elle se contentait de regarder, d’analyser et d’approuver ou pas ce qui était fait. Les émotions continuaient de la traverser, la colère, la joie ou la peur mais les pensées parasites étaient plus présentes que jamais, tant et si bien qu’elle se demandait par moment s’il s’agissait bien des siennes. Eris était tout bonnement épuisée et terrifiée. Elle avait peur d’elle-même, peur de ce que Phèdre pouvait faire. Elle en avait eu un avant goût. Elle savait également que sa psyché était plus féroce que la sienne et que chaque jour qui passait était un jour où son autre prenait le dessus. En arrivant en république Eris était persuadée que sa fin était venue mais contre toute attente, c’était elle qui avait fini par reprendre les commandes et si elle ne savait pas comment, elle savait pourquoi.
C’était une lettre dont elle avait immédiatement reconnu l’écriture cursive et appliquée. Avant même l’ouverture, elle avait reconnu le papier et si aucun sceau officiel n’était venu garnir la cire qui scellait l’enveloppe, Eris avait deviné l’expéditeur. Phèdre aussi et elle avait senti sa colère alors que sa détermination reprenait le dessus. Ce qui était encore plus étonnant, fut que cette lettre était arrivée chez elle bien avant son départ en République mais qu’en partant, elle s’était bien gardée de l’oublier.
“Me feras-tu le plaisir de ta compagnie lors du retour des héros de la marche du vent d’acier ?”
Phèdre n’avait pas compris, ni vu venir. Elle savait pourtant la flamme qu’Eris entretenait pour cet humain insipide, elle le savait mieux que personne puisque c’était son propre cœur qui s’agitait en sa présence, c’était également ses ardeurs qu’elle devait réfréner car si Eris aimait Zéphyr, Phèdre le méprisait autant qu’elles le désiraient. Pourtant elle n’avait su prévoir le moment où elle tomba à son tour dans l'oubli. Elle qui avait toujours considéré le jeune homme comme une faiblesse, constata à quel point elle avait raison puis sa conscience se réduisit à une flammèche corrompue dans l’esprit doucereux d’une bibliothécaire Ikusienne qui n’a guère sa place en république.
Ainsi et pour la seconde fois de ce mois, Eris s’était retrouvée à fuir un pays qui la terrifiait. Au-delà du fait qu’elle n’était aucunement en règle avec les autorités républicaines, cet endroit lui semblait hostile. Sans nul doute car elle n’avait rien connu d’autre que le Reike. Alors elle s’était tapis dans sa chambre d’auberge, avait rassemblé les maigres affaires qui lui restait puis avait chipé un pantalon et une chemise et avait attendu la faveur de la nuit pour filer dans les rues sombres.
On entendait toutes sortes de choses à Ikusa, surtout en deux cents ans d’existence et heureusement la mémoire de la fae était plutôt bonne. Il y avait de cela une petite vingtaine d'années, avait été évoqué des camps de réfugiés ou de passeurs, elle ne savait plus très bien, mais toujours était-il que ces gens avaient vocation à voyager de République vers le Reike et c’était exactement ce dont elle avait besoin. Sans le sous, ni qui que ce soit vers qui se tourner, il lui était impossible de regagner Ikusa par ses propres moyens. Neera, peut-être, aurait-elle pu l’aider mais Eris craignait que la Tornade ne déterre plus de secrets qu’elle ne l’avait déjà fait.
Eris voyagea deux jours et une nuit en longeant les routes principales par les chemins de bas-côté pour ne jamais se retrouver à découvert, ni se perdre. Elle qui n’avait jamais porté de pantalon, découvrit ô combien ces vêtements étaient inconfortables mais elle devait leur concéder une certaine praticité. Au terme du second jour, elle arriva enfin à ce qui semblait être un camp. Hélas le destin n’en avait pas finit avec elle et lorsqu’elle comprit en quelle compagnie elle se trouvait, il était déjà trop tard et le rire cristallin de Phèdre raisonna dans un coin de son esprit. Même muselée, elle était maîtresse dans l’art de la manipulation.
Sale et éreintée mais également affamée, Eris n’avait pas eu la force de s’enfuir une fois de plus. Elle n’était pas une combattante. Pas plus qu’une nomade. Le mieux qu’il lui restait à faire était de dissimuler son tatouage, reprendre des forces et le moment venu reprendre la route de son côté.
Citoyen du monde
Cendre
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Info personnage
Race: Humaine et ???
Vocation: Guerrier assassin
Alignement: Chaotique Neutre
Rang: D
La fuite
Feat. Siame et phèdre - Message 1
Le froid, la neige, le corps qui frissonne pour remonter sa température corporelle, cela me rappelait un peu Célestia mais en bien moins intense. Ici cela me paraissait surtout très humide plus qu'autre chose et ce n'était pas agréable. En somme tout me disait que rien n'était aussi bien que ma maison, celle que mon coeur chérissait, celle que le Nouvel Ordre avait brûlé et détruite en même temps que les habitants du village, ma famille, ma meute...
Je passais donc depuis ce jour mon temps à chasser mais je ne chassais plus des proies animales, bestiales ou autres, non je chassais les réfugiés de Shoumeï mais pas n'importe lesquels, mes proies de prédilection avaient toutes en commun un défaut : elles étaient divinistes.
Certains pourraient croire que c'est une obsession et dans le fond ils n'auraient pas tord mais en République c'était devenu mon quotidien et ma quête. J'avais étudié des mouvements de réfugiés, écouté leurs récits, tapi dans l'ombre de mon employeur dans l'enceinte de son bureau protégé à Liberty : l'accueil des réfugiés c'était son devoir et ma chance.
A force d'étudier des cartes et des récits j'avais conclu qu'il devait y avoir un camp de réfugiés à deux jours de la ville, un lieu ou ils se regroupaient, s'alimentaient probablement, payaient une fortune un guide à la con avant de pouvoir entrer à Liberty avec des papiers en règle pour demander l'asile... C'était ainsi qu'allait le monde ici, dans cette nation où l'argent régnait en maître tout se payait, rien n'était impossible tant qu'on mettait la main à la poche ou ailleurs selon les envies des monnayeurs.
J'avais donc cherché durant quelques jours la localisation de ce camp et j'avais fini par le trouver, isolé, mais avec une bonne vingtaine d'âmes en permanence, bien sûr on y trouvait des Républicains désireux de se remplir les poches et ensuite il y avait des Reikois et anciens de Shoumeï qui cherchaient le moyen d'entrer dans la Nation Bleue de manière discrète mais presque dans la légalité. J'avais troqué mes vêtements de qualité payés par mon employeur généreux pour de vieilles frusques, celles que j'avais en quittant Célestia, élimées, qui avaient vécues mais que je ne parvenais pas à jeter. Bien sûr ma stature et ma bonne santé contrastaient avec certains pauvres erres mais le monde allait ainsi , nous n'étions pas tous nés égaux ni physiquement ni au niveau de nos ressources.
J'étais dans ce camp depuis deux jours, j'aidais aux diverses tâches après avoir donné des informations factices pour obtenir des documents pseudos légaux pour entrer en République (ou j'étais déjà bien installé); Naturellement on m'avait affecté une tâche simpliste mais qui me convenait parfaitement en attendant... pourvoir le camp en bois pour alimenter les feux et foyers et chasser quand je le pouvais. Rien de compliqué en somme pour quelqu'un ayant grandi dans les montagnes rudes de Shoumei, près du sommet de Célestia. Trouver un lapin dans une étendue de glace je savais le faire.
Je revenais de ma journée en forêt, je portais deux lapins et deux écureuils comme butin ce soir là, j'avais coupé du bois en quantité le matin. Je m'approchais des feux de camps et déposais le fruit de ma chasse.
- Voilà ma paye du jour.
C'était au responsable du camp un dénommé Ishamael un homme d'une quarantaine d'années, imbu de son importance, petit et malingre mais respirant le mal en un sens, un manipulateur né qui ne cherchait que le profit en toutes circonstances. J'étais en train de dépecer un des lapins, le premier étant prêt à passer sur le feu quand j'aperçus une femme dissimulée sous sa capuche.
- Hey... Tu peux m'aider? Faudrait vider le lapin et mettre sur une branche pour le mettre à cuire, j'ai presque fini de dépecer le second.
Pour le moment qui elle était je n'en savais encore rien mais fallait bien ouvrir le dialogue d'une manière ou d'une autre non?
CENDRES
Prophétesse
Siame
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Info personnage
Race: Ange
Vocation: Mage soutien
Alignement: Loyal mauvais
Rang: B - Cardinal
Siame ne se sentait chez elle nulle part. Pas plus dans les ruines de Shoumei que dans le désert Reikois. Tout comme elle ne se sentait pas plus à sa place entre les divinistes ou au milieu des athées. Sa sœur perdue, sa maîtresse partie, son bourreau disparu, elle était parfaitement seule sur ces terres. Cependant, elle ne se permettait aucun apitoiement. Ses mésaventures, sa solitude n'était qu'une part d'elle, et loin d'être celles qu'elle considérait les plus intéressantes. Non, les épanchements lui avaient toujours donné un sentiment pénible, désagréable, qu'il s'agisse de ceux d'autrui, et ô plus grand malheur—les siens.
Les seuls éclats d'émotions qu'elle tolérait étaient celles des femmes donnant la vie. Et la jeune demoiselle qui se tenait devant elle hurlait à la mort, le front et la gorge luisante de sueur. L'épreuve était abominable, c'était son premier enfant, et la pauvre croyait mourir. Ishamael – en bon petit chef – avait cru opportun de venir superviser cet événement qui ne le concernait pourtant nullement. Il ne portait néanmoins pas suffisamment ses couilles pour avoir le courage de venir aider à l'intérieur de la tente, et tant mieux. Cependant, il eut l'indélicatesse de croire qu'il pouvait se permettre de pousser le rideau, pour demander :
— Peut-elle faire moins de bruit ? On l'entend dans tout le camp.
La demande avait été accueillie par la voix tranchante, assassine de Siame – seule accoucheuse présente dans le campement, les manches présentement relevées pour s'atteler à la tâche qui lui incombait. Et les Titans merci que cette femme se soit arrêtée au campement au bon moment. Ni la guerre, ni la faim n'avait jamais arrêté les naissances. Et encore moins les petites prétentions d'un homme mal dégrossi.
— Je vais venir te retourner tes entrailles de con de l'intérieur, on verra si tu ne vas pas beugler comme une truie qu'on égorge. Dégage de là et laisse nous travailler, Ishamael.
Il était devenu tout rouge, comme le petit bonhomme coléreux qu'il était. Il ressemblait à une gerbille – inoffensif et très animé – et Siame songea qu'il avait plus sa place dans une cage qu'à la tête de ce campement. Conscient que la demande était parfaitement idiote, ravalant son stupide complexe d'infériorité, il détala sans réclamer les restes de sa dignité. Ça ne surprit aucunement l'accoucheuse, qui se gardait bien de dire ce qu'elle pensait du personnage, mais elle s'étonnait tout de même de ressentir une pointe de déception : qu'il soit aussi prévisible, peut-être. Elle avait élu refuge dans ce camp quelques jours plus tôt seulement, le temps de préparer son départ pour sa traversée du désert reikois. Ishamael lui avait offert le couvert pour quelques jours en échange de ses services : pour peu qu'elle promettait de rester jusqu'à l'accouchement de la jeune demoiselle.
Enfin, les plaintes douloureuses furent remplacées par les pleurs d'un nourrisson et le corps las d'une mère remplie de souffrances et de bonheur. Siame considère l'enfant d'une grimace sévère, avant de déclarer :
— C'est une fille, félicitations.
Ses félicitations n'étaient jamais réellement adressées au bambin, mais plutôt à la mère, pour ne pas avoir dérivé paisiblement vers la mort après avoir donné naissance à leur progéniture. Les accouchements difficiles étaient si courants. Combien de fois avait-elle dû arracher des bras froid d'une mère, les ongles encroûtés de sang et les yeux vides, un nourrisson hurlant à la vie, à la mort. C'était l'ordre des choses : la cruauté et la peine ; les futurs tués dans l’œuf et les destins malheureux ; les maris maladroits et les mères absentes. La jeune femme la regarde, l'air reconnaissante et Siame ne peut s'empêcher d'y voir le visage de sa sœur qui s'était, un jour, tenue à cette place. Phèdre avait toujours refusé de mourir. La nouvelle mère la remercie, et l'Ange quitte la tente pour la laisser profiter de son nouveau-né et d'un repos bien mérité.
En dehors, la vie avait repris son cours : chacun attelé à sa tâche, car c'était ainsi qu'allait la vie en communauté. Elle trouva un feu, fit chauffer une marmite d'eau bouillante pour se désinfecter les mains encore poisseuses. C'est à ce même instant que son attention se posa sur l'homme et son butin : deux lapins bien gras, et deux écureuils. Elle l'avait déjà aperçu à plusieurs reprises, ces deux derniers jours. Les réfugiés venaient y aller, aussi, Siame ne se montrait pas farouche lorsqu'il s'agissait d'approcher ceux à qui elle n'avait encore jamais parlé. Ce garçon-là, sans être capable de remettre son nom, s'était illustré en peu de temps : il s'agissait là d'un des chasseurs les plus efficaces qu'avait vu le groupement ces derniers mois. Il venait de demander l'aide d'une autre apatride que l'Ange n'avait pas encore vue dans le campement. Un étrange sentiment s'insinue en elle, et quelque part, dans le fond de son cœur, dans sa mémoire quelque chose se met à pulser. Il lui semble apercevoir son propre reflet sous la capuche. Un instinct lointain, l'envie de protéger, tiré par un fil invisible. Elle l'ignore encore, mais c'est ici que le monde se recoud.
— Je vais le faire, proposa-t-elle la voix rauque, comme si elle était restée trop longtemps au-dessus de l’eau bouillante, devinant le mouvement de recul qui venait d'échapper à la nouvelle arrivante.
Elle s’était approchée sereinement, les mains propres, sa jupe froissée et des épingles à cheveux manquant à leurs devoirs. Préparer un lapin, ce n'était pas bien plus compliqué que d'assister un accouchement : ce n'était que de la chair, des organes et du sang. Elle passait de l’un à l’autre sans le moindre chichi. D'une main, elle s'empara de la bête tendue et de l'autre, d'un couperet. Se retroussant les manches jusqu'aux coudes, et sans plus de cérémonie, elle trancha la tête du lapin à sa base d'un coup ferme et précis. Il lui semblait être devenu insensible à la vue du sang, tout comme à son odeur prégnante. Il y eut le gargouillement d'une artère tranchée, et la sensation brûlante du sang encore chaud sur ses mains. Sentant le regard de la jeune femme dans son dos, l'Ange pointa la panière de légumes du bout du menton.
— Si tu veux t'occuper les mains, tu peux éplucher les légumes. Lui suggéra-t-elle, pour qu'elle n'ait pas à se sentir potiche.
Ici, tout le monde savait ce qu'il avait à faire, mais un coup de pouce n'était jamais malvenu.
— Deux lapins et deux écureuils, nous sommes gâtés ce soir. Tu chasses comme un loup. Ishamael est ravi de sa nouvelle recrue. C'est une peste, mais il a du flair lorsqu'il s'agit de reconnaître le véritable talent de quelqu'un.
Elle attrapa le second lièvre qu'il lui tendait désormais, le premier se vidant de son sang dans un seau. Rien ne devait être gâché : ni la fourrure, ni le sang, ni les os.
— Et toi ? Son regard coula sur la jeune femme. C'est quoi le tient, de talent ?
Siame n'était pas du genre social, en temps normal, mais il y avait quelque chose chez cette fille qui la démangeait, sans qu'elle ne parvienne encore à mettre le doigt dessus.
Les seuls éclats d'émotions qu'elle tolérait étaient celles des femmes donnant la vie. Et la jeune demoiselle qui se tenait devant elle hurlait à la mort, le front et la gorge luisante de sueur. L'épreuve était abominable, c'était son premier enfant, et la pauvre croyait mourir. Ishamael – en bon petit chef – avait cru opportun de venir superviser cet événement qui ne le concernait pourtant nullement. Il ne portait néanmoins pas suffisamment ses couilles pour avoir le courage de venir aider à l'intérieur de la tente, et tant mieux. Cependant, il eut l'indélicatesse de croire qu'il pouvait se permettre de pousser le rideau, pour demander :
— Peut-elle faire moins de bruit ? On l'entend dans tout le camp.
La demande avait été accueillie par la voix tranchante, assassine de Siame – seule accoucheuse présente dans le campement, les manches présentement relevées pour s'atteler à la tâche qui lui incombait. Et les Titans merci que cette femme se soit arrêtée au campement au bon moment. Ni la guerre, ni la faim n'avait jamais arrêté les naissances. Et encore moins les petites prétentions d'un homme mal dégrossi.
— Je vais venir te retourner tes entrailles de con de l'intérieur, on verra si tu ne vas pas beugler comme une truie qu'on égorge. Dégage de là et laisse nous travailler, Ishamael.
Il était devenu tout rouge, comme le petit bonhomme coléreux qu'il était. Il ressemblait à une gerbille – inoffensif et très animé – et Siame songea qu'il avait plus sa place dans une cage qu'à la tête de ce campement. Conscient que la demande était parfaitement idiote, ravalant son stupide complexe d'infériorité, il détala sans réclamer les restes de sa dignité. Ça ne surprit aucunement l'accoucheuse, qui se gardait bien de dire ce qu'elle pensait du personnage, mais elle s'étonnait tout de même de ressentir une pointe de déception : qu'il soit aussi prévisible, peut-être. Elle avait élu refuge dans ce camp quelques jours plus tôt seulement, le temps de préparer son départ pour sa traversée du désert reikois. Ishamael lui avait offert le couvert pour quelques jours en échange de ses services : pour peu qu'elle promettait de rester jusqu'à l'accouchement de la jeune demoiselle.
Enfin, les plaintes douloureuses furent remplacées par les pleurs d'un nourrisson et le corps las d'une mère remplie de souffrances et de bonheur. Siame considère l'enfant d'une grimace sévère, avant de déclarer :
— C'est une fille, félicitations.
Ses félicitations n'étaient jamais réellement adressées au bambin, mais plutôt à la mère, pour ne pas avoir dérivé paisiblement vers la mort après avoir donné naissance à leur progéniture. Les accouchements difficiles étaient si courants. Combien de fois avait-elle dû arracher des bras froid d'une mère, les ongles encroûtés de sang et les yeux vides, un nourrisson hurlant à la vie, à la mort. C'était l'ordre des choses : la cruauté et la peine ; les futurs tués dans l’œuf et les destins malheureux ; les maris maladroits et les mères absentes. La jeune femme la regarde, l'air reconnaissante et Siame ne peut s'empêcher d'y voir le visage de sa sœur qui s'était, un jour, tenue à cette place. Phèdre avait toujours refusé de mourir. La nouvelle mère la remercie, et l'Ange quitte la tente pour la laisser profiter de son nouveau-né et d'un repos bien mérité.
En dehors, la vie avait repris son cours : chacun attelé à sa tâche, car c'était ainsi qu'allait la vie en communauté. Elle trouva un feu, fit chauffer une marmite d'eau bouillante pour se désinfecter les mains encore poisseuses. C'est à ce même instant que son attention se posa sur l'homme et son butin : deux lapins bien gras, et deux écureuils. Elle l'avait déjà aperçu à plusieurs reprises, ces deux derniers jours. Les réfugiés venaient y aller, aussi, Siame ne se montrait pas farouche lorsqu'il s'agissait d'approcher ceux à qui elle n'avait encore jamais parlé. Ce garçon-là, sans être capable de remettre son nom, s'était illustré en peu de temps : il s'agissait là d'un des chasseurs les plus efficaces qu'avait vu le groupement ces derniers mois. Il venait de demander l'aide d'une autre apatride que l'Ange n'avait pas encore vue dans le campement. Un étrange sentiment s'insinue en elle, et quelque part, dans le fond de son cœur, dans sa mémoire quelque chose se met à pulser. Il lui semble apercevoir son propre reflet sous la capuche. Un instinct lointain, l'envie de protéger, tiré par un fil invisible. Elle l'ignore encore, mais c'est ici que le monde se recoud.
— Je vais le faire, proposa-t-elle la voix rauque, comme si elle était restée trop longtemps au-dessus de l’eau bouillante, devinant le mouvement de recul qui venait d'échapper à la nouvelle arrivante.
Elle s’était approchée sereinement, les mains propres, sa jupe froissée et des épingles à cheveux manquant à leurs devoirs. Préparer un lapin, ce n'était pas bien plus compliqué que d'assister un accouchement : ce n'était que de la chair, des organes et du sang. Elle passait de l’un à l’autre sans le moindre chichi. D'une main, elle s'empara de la bête tendue et de l'autre, d'un couperet. Se retroussant les manches jusqu'aux coudes, et sans plus de cérémonie, elle trancha la tête du lapin à sa base d'un coup ferme et précis. Il lui semblait être devenu insensible à la vue du sang, tout comme à son odeur prégnante. Il y eut le gargouillement d'une artère tranchée, et la sensation brûlante du sang encore chaud sur ses mains. Sentant le regard de la jeune femme dans son dos, l'Ange pointa la panière de légumes du bout du menton.
— Si tu veux t'occuper les mains, tu peux éplucher les légumes. Lui suggéra-t-elle, pour qu'elle n'ait pas à se sentir potiche.
Ici, tout le monde savait ce qu'il avait à faire, mais un coup de pouce n'était jamais malvenu.
— Deux lapins et deux écureuils, nous sommes gâtés ce soir. Tu chasses comme un loup. Ishamael est ravi de sa nouvelle recrue. C'est une peste, mais il a du flair lorsqu'il s'agit de reconnaître le véritable talent de quelqu'un.
Elle attrapa le second lièvre qu'il lui tendait désormais, le premier se vidant de son sang dans un seau. Rien ne devait être gâché : ni la fourrure, ni le sang, ni les os.
— Et toi ? Son regard coula sur la jeune femme. C'est quoi le tient, de talent ?
Siame n'était pas du genre social, en temps normal, mais il y avait quelque chose chez cette fille qui la démangeait, sans qu'elle ne parvienne encore à mettre le doigt dessus.
CENDRES
Citoyen du monde
Phèdre
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Eris aurait voulu devenir une souris pour pouvoir disparaître dans un trou aussi petit qu’elle et qu’on ne la vit plus jamais. Hélas la vie l’avait doté d’une taille non négligeable et s’était abstenue de lui donner un quelconque don de métamorphose. Elle avait donc dû affronter Ishamael avec pour seul argument, la mine déconfite d’une petite noble qui ne sait guère ce qu’elle fabrique ici. Il s’en était fallu de peu pour que l’homme ne la renvoie d’où elle venait mais, à défaut d’avoir une quelconque utilité, Eris lui avait promis une somme d’argent rondelette. Largement de quoi s’acheter une place dans cette caravane qui la ramènerait au Reike. Toutefois, il avait été convenue qu’elle n’échapperait pas aux tâches diverses et variées du camp. Bien qu’elle avait hésité à protester, elle avait deviné sans peine qu’il valait encore mieux se taire et obtempérer. C’était ce qu’elle avait fait. Puis dès qu’il l’avait chassé d’un geste désinvolte en marmonnant un vague : “Eh bien ne reste pas planté là, va-t-en. Il y a du travail.” Elle avait tout simplement disparu.
Le camp était vaste et on y trouvait pléthore de créatures venues de République. Il ne lui avait pas fallu très longtemps pour comprendre qu’elle se trouvait au sein même d’un groupe hétéroclite de divinistes et cette constatation lui avait glacé le sang. Elle qui n’avait rien connu d’autre que le Reike n’avait qu’une seule impression : avoir mis les pieds dans une fourmilière ennemie. Par chance, sa chemise aux manches bouffantes cachait efficacement le petit dragon qui ornait l’arrière de son bras et elle avait rabattu sa capuche sur ses cheveux. Elle déambula ainsi durant des minutes qui lui parurent être des heures, cherchant du regard de quoi s’occuper les mains ou au moins de quoi se réchauffer car le froid n’avait cessé de s’insinuer sous ces vêtements ces deux derniers jours. Eris ne rêvait que d’un peu de chaleur, d’un bon repas et d’une vraie nuit de sommeil. Ce furent sans doute un mélange de toutes ces envies qui la menèrent près d’un feu vif dont la lueur rougeoyante des flammes faisait danser les ombres qui obscurcissaient la forêt.
Un homme large d’épaule était assis juste à côté du brasier. Ses mains étaient couvertes de sang tandis qu’il dépeçait un petit animal qu’elle devina être un lapin malgré son aspect de chaussette retournée. Les yeux d’Eris étaient fixés sur ce spectacle macabre qui, sans en comprendre la raison, la fascinait. Ce ne fut que lorsqu’il s’adressa directement à elle qu’elle put s’arracher à ses pensées dans un léger sursaut.
- Je… Balbutia-t-elle tout en regardant le cadavre du lapin dont la peau avait complètement fini d’être retirée. D’ascendance noble, Eris n’avait jamais eut à faire la cuisine. Pas plus qu’elle n’avait eu à écorcher ou vider un lapin en deux cents ans d’existence. Même si elle l’avait voulu, elle n’aurait su comment s’y prendre. “Ce n’est pas plus compliqué que d’éviscérer un homme…” souffla son esprit et elle se figea, les lèvres pincées. - Euh… N-... Lui apprendrait-il si elle avouait ne rien y connaitre ? Vu sa mine renfrognée, elle n’en était guère convaincue. Elle ouvrit la bouche pour refuser poliment lorsqu’une voix s’insinua en elle comme de l’eau dans une fissure. C’était une jeune femme dont l’aura éthérée contrastait avec les tâches de sang qui parsemaient ses vêtements.
“Je la connais.” songea Phèdre. Mais elle était incapable de remettre un nom sur ce visage. Sur son visage ? Sans même s’en rendre compte elle avait fait un pas dans sa direction, observant avec un intérêt non fin les mouvements chirurgicaux de ses doigts minces. La nouvelle venue coupa et évida l’animal sans sembler éprouver la moindre once de dégoût, comme si elle avait fait ça toute sa vie. Eris recula lentement, prête à s'éclipser lorsqu’elle fut à nouveau retenue par le timbre de cette voix qui la faisait vibrer de l’intérieur.
- D’accord. Sans plus de cérémonie, elle prit place entre les deux voyageurs, tira un seau de pommes de terre, attrapa un canif et pinça les lèvres. Elle avait vu mille fois la gouvernante de sa maison d’enfance le faire mais cela ne voulait pas dire qu’elle l’avait déjà fait. Ce n’était rien et pourtant, pendant un bref instant, elle eut l’impression que c’était une épreuve insurmontable. Ses yeux fusillèrent la patate comme si c’était elle, l’unique fautive de sa position délicate, puis elle s’attela maladroitement à la tâche en silence. Seuls ses yeux faisaient de discret allers et retours entre l’homme et la femme dont les cheveux blancs lui firent supposer quelconque filiation.
- Moi ? Hoqueta Eris comme si on lui avait posé une question saugrenue. Ses mains maladroites arrachèrent un bout de chair à la place de la fine peau et elle grimaça. - Je n’ai pas de talent particulier. “Mais j’ai beaucoup d’argent.” Un secret qu’elle comptait bien ne pas divulguer ici. Pour ce qui était des aptitudes, Eris était douée pour tout ce qui n’était pas utile dans un camp tel que celui-là. Elle n’avait pas son pareil pour calmer les grimoires coléreux, elle savait trouver un livre en moins de trois minutes parmi la multitude que contenait la bibliothèque d’Ikusa, elle pouvait également recoudre les tranches brisées des ouvrages les plus volumineux en à peine quelques heures et elle était une excellente scribe. Mais tout ceci, ne servirait à rien ici et elle en avait bien conscience. - Je suis douée pour la magie. Cela aussi c’était vrai. Que ce soit de par sa race ou de par sa nature profonde, Eris avait toujours maîtriser ses pouvoirs avec une dextérité prometteuse qui avait eut le don de ravir ses précepteurs. - Et j'apprends vite. Ceci était un peu moins vrai. Eris était incapable de s’intéresser à un sujet qui n’attirait pas son attention. Aussi il lui était possible d’apprendre une nouvelle forme de magie en un tour de main mais éplucher des pommes de terre… D’un geste du poignet, elle retira sa capuche.
- Je m’appelle Eris. Bien qu’elle craignait ceux qui l’entouraient, elle songea qu’il valait encore mieux faire d’eux des alliés et ce n’était pas en se cachant sous une capuche d’ébène qu’elle y parviendrait. - Vous vous rendez tous les deux au Reike ? Elle reprit son épluchage laborieux. - Il paraît que la route est…longue. Fastidieuse ? Dangereuse ? Éreintante ? Tous ces adjectifs auraient pu qualifier le chemin qui l’attendait mais pour l’heure, elle n’avait plus envie d’y penser. Le moment de s’en inquiéter viendrait bien assez tôt, pour l’heure elle voulait souffler rien qu’un peu. - Et Ishamael n'est pas très commode... Admit-elle à voix basse.
Le camp était vaste et on y trouvait pléthore de créatures venues de République. Il ne lui avait pas fallu très longtemps pour comprendre qu’elle se trouvait au sein même d’un groupe hétéroclite de divinistes et cette constatation lui avait glacé le sang. Elle qui n’avait rien connu d’autre que le Reike n’avait qu’une seule impression : avoir mis les pieds dans une fourmilière ennemie. Par chance, sa chemise aux manches bouffantes cachait efficacement le petit dragon qui ornait l’arrière de son bras et elle avait rabattu sa capuche sur ses cheveux. Elle déambula ainsi durant des minutes qui lui parurent être des heures, cherchant du regard de quoi s’occuper les mains ou au moins de quoi se réchauffer car le froid n’avait cessé de s’insinuer sous ces vêtements ces deux derniers jours. Eris ne rêvait que d’un peu de chaleur, d’un bon repas et d’une vraie nuit de sommeil. Ce furent sans doute un mélange de toutes ces envies qui la menèrent près d’un feu vif dont la lueur rougeoyante des flammes faisait danser les ombres qui obscurcissaient la forêt.
Un homme large d’épaule était assis juste à côté du brasier. Ses mains étaient couvertes de sang tandis qu’il dépeçait un petit animal qu’elle devina être un lapin malgré son aspect de chaussette retournée. Les yeux d’Eris étaient fixés sur ce spectacle macabre qui, sans en comprendre la raison, la fascinait. Ce ne fut que lorsqu’il s’adressa directement à elle qu’elle put s’arracher à ses pensées dans un léger sursaut.
- Je… Balbutia-t-elle tout en regardant le cadavre du lapin dont la peau avait complètement fini d’être retirée. D’ascendance noble, Eris n’avait jamais eut à faire la cuisine. Pas plus qu’elle n’avait eu à écorcher ou vider un lapin en deux cents ans d’existence. Même si elle l’avait voulu, elle n’aurait su comment s’y prendre. “Ce n’est pas plus compliqué que d’éviscérer un homme…” souffla son esprit et elle se figea, les lèvres pincées. - Euh… N-... Lui apprendrait-il si elle avouait ne rien y connaitre ? Vu sa mine renfrognée, elle n’en était guère convaincue. Elle ouvrit la bouche pour refuser poliment lorsqu’une voix s’insinua en elle comme de l’eau dans une fissure. C’était une jeune femme dont l’aura éthérée contrastait avec les tâches de sang qui parsemaient ses vêtements.
“Je la connais.” songea Phèdre. Mais elle était incapable de remettre un nom sur ce visage. Sur son visage ? Sans même s’en rendre compte elle avait fait un pas dans sa direction, observant avec un intérêt non fin les mouvements chirurgicaux de ses doigts minces. La nouvelle venue coupa et évida l’animal sans sembler éprouver la moindre once de dégoût, comme si elle avait fait ça toute sa vie. Eris recula lentement, prête à s'éclipser lorsqu’elle fut à nouveau retenue par le timbre de cette voix qui la faisait vibrer de l’intérieur.
- D’accord. Sans plus de cérémonie, elle prit place entre les deux voyageurs, tira un seau de pommes de terre, attrapa un canif et pinça les lèvres. Elle avait vu mille fois la gouvernante de sa maison d’enfance le faire mais cela ne voulait pas dire qu’elle l’avait déjà fait. Ce n’était rien et pourtant, pendant un bref instant, elle eut l’impression que c’était une épreuve insurmontable. Ses yeux fusillèrent la patate comme si c’était elle, l’unique fautive de sa position délicate, puis elle s’attela maladroitement à la tâche en silence. Seuls ses yeux faisaient de discret allers et retours entre l’homme et la femme dont les cheveux blancs lui firent supposer quelconque filiation.
- Moi ? Hoqueta Eris comme si on lui avait posé une question saugrenue. Ses mains maladroites arrachèrent un bout de chair à la place de la fine peau et elle grimaça. - Je n’ai pas de talent particulier. “Mais j’ai beaucoup d’argent.” Un secret qu’elle comptait bien ne pas divulguer ici. Pour ce qui était des aptitudes, Eris était douée pour tout ce qui n’était pas utile dans un camp tel que celui-là. Elle n’avait pas son pareil pour calmer les grimoires coléreux, elle savait trouver un livre en moins de trois minutes parmi la multitude que contenait la bibliothèque d’Ikusa, elle pouvait également recoudre les tranches brisées des ouvrages les plus volumineux en à peine quelques heures et elle était une excellente scribe. Mais tout ceci, ne servirait à rien ici et elle en avait bien conscience. - Je suis douée pour la magie. Cela aussi c’était vrai. Que ce soit de par sa race ou de par sa nature profonde, Eris avait toujours maîtriser ses pouvoirs avec une dextérité prometteuse qui avait eut le don de ravir ses précepteurs. - Et j'apprends vite. Ceci était un peu moins vrai. Eris était incapable de s’intéresser à un sujet qui n’attirait pas son attention. Aussi il lui était possible d’apprendre une nouvelle forme de magie en un tour de main mais éplucher des pommes de terre… D’un geste du poignet, elle retira sa capuche.
- Je m’appelle Eris. Bien qu’elle craignait ceux qui l’entouraient, elle songea qu’il valait encore mieux faire d’eux des alliés et ce n’était pas en se cachant sous une capuche d’ébène qu’elle y parviendrait. - Vous vous rendez tous les deux au Reike ? Elle reprit son épluchage laborieux. - Il paraît que la route est…longue. Fastidieuse ? Dangereuse ? Éreintante ? Tous ces adjectifs auraient pu qualifier le chemin qui l’attendait mais pour l’heure, elle n’avait plus envie d’y penser. Le moment de s’en inquiéter viendrait bien assez tôt, pour l’heure elle voulait souffler rien qu’un peu. - Et Ishamael n'est pas très commode... Admit-elle à voix basse.
Citoyen du monde
Cendre
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La fuite
Feat. Siame et phèdre - Message 2
J'étais persuadé que j'avais eu le nez creux en cherchant ces passeurs illégaux, ces faiseurs de miracles pour ceux qui cherchaient un havre de paix en République sans avoir à passer par les chemins officiels et fastidieux. Et avait-il était compliqué pour me faire passer pour un réfugié de Shoumeï? Pas le moins du monde car j'en étais un, la seule chose qui me différenciait de certaines de ces personnes c'était que ma raison d'être ici était eux et pas le choix de fuir les terres de Célestia. Je les détestais pour leur seule foi, ils avaient perdus beaucoup mais cela ne comptait pas dans la balance du jugement car nous avions tous perdu quelque chose en réalité.
J'avais entendu la venue au monde d'un bébé dans ce chaos, la nature était ainsi faite que rien ne l'empêchait de suivre son cours, tant que le cycle de la vie était assuré le monde continuerait de tourner. J'avais entendu la sage femme insulter Ishamael et je m'étais surpris à sourire, elle avait du caractère la bougresse.
Elle avait rejoint le feu et s'était installée non loin de moi et elle a proposé son aide derechef, prenant les choses en main, c'était une femme forte à n'en pas douter. Et surtout sans être très intelligent je voyais qu'elle tentait d'aider celle à qui j'avais demandé de l'aide. Dans le fond je m'en cognais de qui allait dépecer ce foutu lapin, j'avais les crocs, je m'étais nourri en chassant mais je ne pouvais y rester des heures sous peine d'être découvert en tant que lycan et si je n'en avais pas honte je préférais garder pour moi cette petite spécificité.
Celle aux cheveux blancs s'adressa à moi et je pris donc le temps de l'observer pour lui répondre.
- Chacun ses compétences tout simplement, je suis un fin chasseur et un excellent pisteur. Et je paye Ishamael comme tout le monde pour trouver un nouvel havre de paix. Pour le coup c'est vous autres qui avez de la chance de m'avoir non?
Vantard comme toujours, même si dans le fond je n'en pensais rien, jouer le connard de service était amusant et cela évitait d'avoir à se prendre la tête tout simplement. Je continuais avec mon propre lapin, bientôt il serait nu comme un ver, libéré de sa peau épaisse et prêt à être cuit. J'avais vu que la sage femme était une pragmatique finalement, elle travaillait avec méthode, application et la peau allait être sortie entière, pas du genre à gaspiller.
La seconde femme, celle que j'avais interpellé me semblait pas à sa place ici, rien n'allait, elle était trop... précieuse pour être en ce lieu? Elle aurait du avoir ses papier sans souci j'en aurais mis ma main à couper, son port, son maintien, non elle n'était pas une âme en peine de Shoumeï , en peine peut-être mais elle puait la classe, enfin selon mes critères de cul terreux bien sûr mais quand même.
Elle sembla tenter de répondre sans succès, des mots sortaient ou plutôt des syllabes isolées, avait-elle un souci d'élocution? Pour ça qu'elle se cachait ici? Possible. Après j'allais pas enquêter, ce genre de chose ça épuise son homme voyez vous et je suis quelqu'un de simple dans l'âme. Elle prit place et se mit à éplucher les légumes.Elle livra quelques informations bien sommaires sur elle et dans sa voix perçait le doute, elle avait une fragilité certaine et plutôt surprenante dans le fond.
- Eris, magicienne prête à apprendre, c'est un bon début dans ce monde chaotique ma foi. Fais attention avec le couteau tu enlèves bien trop de peau à cette pauvre pomme de terre, il va rien rester à manger si tu continues ainsi.
J'avais souri, à moitié moqueur mais comme j'en avais fini avec mon lapin j'avais attrapé un légume et pris une lame courte pour lui montrer le geste.
- Pas besoin d'appuyer fort, elle va pas s'enfuir et la peau de la pomme de terre n'est pas résistante, vas-y tranquille et ça se fera tout seul.
J'avais donné le second lapin à l'autre femme pour m'occuper maintenant de l'écureuil. Cela ne serait pas beaucoup plus long ni difficile pour ma part, le feu était déjà bien pris, intense, une fois les animaux mis en broche ils cuiraient rapidement et les légumes serviraient à une soupe qui servirait de vraie base à ce repas, mes prises n'étaient que des gourmandises pour les papilles, un moyen d'oublier où ils se trouvaient en cet instant tout ces gens perdus, égarés.
- Moi c'est Leif, je viens de Célestia, d'un petit village près du sommet. Et je pars rejoindre la République pas le Reike.
Je m'arrêtais là car il fallait ne livrer que la vérité, je ne pouvais pas parler de foi ou quoi que ce soit d'autre, je n'y croyais pas le moins du monde. J'entrepris du coup d'enlever ma cape de fourrure et certaines parties de mon armure de cuir, a priori je ne risquais rien dans ce camp, pas de troupes reikoises ou de garnison républicaine en vue, je n'avais pas senti de trace humaine à des kilomètres à la ronde quand j'étais parti chasser. Une fois délestée du superflu je me retrouvais en chemise de laine épaisse et avec un gilet de cuir sans manche, je réalisais bien sur que cela semblait trop peu vu les températures du moment mais bon... Cela pouvait passer sur mes origines montagnardes, en réalité c'était au cas extrême ou je devrais me transformer en urgence, abimer une armure de bonne facture ça avait un coût certain et je ne roulais pas sur l'or.
- Et toi grande sage femme qui es tu ?
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Siame
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Tout ça sonnait mal. Il y avait quelque chose dans l’air qui ne s’accordait pas tout à fait justement, mais Siame, aussi perspicace eut-elle été, fut parfaitement incapable de mettre le doigt dessus. Était-ce l’ambiance sur le campement dans laquelle s'opposaient désormais les conversations légères à côté des pleurs d’un nouveau-né—situation qui exigeait un peu d’intimité que la vie en communauté persistait à lui refuser ? Ou bien, la résonance du prénom de la jeune femme dans ses lèvres ? “Eris”. Sans qu’elle ne puisse l’expliquer, elle s’était attendue à autre chose. N’importe quoi (n’importe quoi ?) mais pas “Eris”. Pourquoi ? Pourquoi avait-elle voulu qu’il soit différent ? Elle fronça les sourcils, chassa le sentiment et sa curiosité désormais piquée. Cette mortelle-là, elle n’était pas comme les autres. Ou bien, si tout ça ne reposait que sur la nonchalance insolente avec laquelle l’homme avait signifié venir de Célestia, sans s’encombrer du moindre salut pour les Titans ? Curieux, mais à en considérer l’époque actuelle et ses propres convictions, l’Ange n’allait pas lui jeter la première pierre. Et puis de toute manière, tout ça, ce n’était pas ses affaires et elle non plus n’avait pas l’intention de passer pour une fanatique, même en étant entourée de toute une flopée. Elle avait donc continué le plus sereinement du monde sa besogne.
Elle s’était emparée du second lapin qu’il lui avait fourni sans la moindre expression, comme si tout ça lui était très naturel. Malgré ses traits de jouvencelle, elle portait comme une femme mûre, si bien qu’il n’était pas si difficile d’imaginer que cela faisait un bon moment qu’elle arpentait ce monde. L’Ange s’était prise à sourire quand Leif (puisque c’était ainsi qu’il se nommait) l’avait affublé de “grande” quand il la dépassait d'au moins deux têtes, jugea-t-elle, bien qu’il soit assis. C’était attendrissant. Bien évidemment, elle comprit où il venait en venir – ça n’avait aucun rapport avec sa taille – et elle accueillit le compliment comme il se doit : d’un sobre sourire.
— Siame. J’ai bien connu Célestia… Elle marqua une courte pause, tandis que sa dague séparait avec soin la fourrure et la chair. J'y ai vécu un temps avec ma sœur. Il y a fort longtemps néanmoins, je doute qu’il y ait encore qui que ce soit dans ton village pour se souvenir de cette époque. Et clac! ce qu’il restait de la peau du second lapin venait d’être arraché d’un seul geste. Tu as décidé de partir seul ? Personne pour t’accompagner ?
Il fallait croire qu’elle pouvait se montrer tout à fait agréable, lorsque la situation s’y prêtait et, malgré la manière dont on l’avait entendu menacer Ishamael quelques minutes plus tôt, elle se prenait à sourire devant Leif et Eris. Sa méfiance naturelle semblait s’effacer un peu, bien qu’elle maintenait une certaine distance.
— Ne te tracasse pas pour Ishamael, elle s’adressait désormais à la jeune femme, il aboie fort, mais il ne mord pas beaucoup. Tant que tu ne lui donnes pas d’excuses pour venir t’assommer de ses infernales leçons de moral – si guider ceux dans le besoin était tout à son honneur, il fallait croire que le type avait décidé de laver tous ses efforts en passant pour un connard paternaliste –, tu devrais t’en tirer. Il ne crache jamais sur de nouvelles petites mains pour aider dans le camp, il te trouvera certainement quelque chose à faire.
Dans le ciel, un aigle passa.
Siame releva le museau en sa direction.
— Un aigle. C’est bon présage, paraît-il.
Elle chassa les lointains souvenirs que lui évoquait l’oiseau, avant de poursuivre.
— Je pars également en direction du Reike. Il était encore un peu tôt pour proposer à une inconnue de faire un bout de voyage avec elle, et pourtant… C’est un long voyage, mais nous pourrons faire une partie du trajet ensemble, si tu le souhaites, Eris.
Le nom sonnait mal.
Il y avait définitivement quelque chose à propos de cette fille ; mais tout chez elle avait été changé, brouillé. Un étrange petit bout de femme.
— Je ne compte pas m’attarder éternellement ici, et maintenant que ma “mission” est terminée… Elle parlait de la jeune femme qu’elle avait fait accouché un peu plus tôt. Je reste encore quelques jours le temps de m’assurer que le bébé et la mère sont tout deux en bonne santé.
Son regard passa d’Eris pour venir se poser sur le gaillard à côté.
— Et toi, Leif ? Qu’espères-tu trouver du côté républicain ?
Elle jeta un coup d'œil aux légumes qui venaient d’être “épluchés” – elle ne fit pas le moindre commentaire, cette fille était définitivement des beaux quartiers, peu importe d’où elle venait –, et aligna les lapins désormais prêts à être cuits. Autour d’eux, on pouvait déjà entendre les ventres gargouiller.
— Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, j’aimerais apporter le morceau le plus tendre à notre nouvelle maman. Elle l’a mérité.
Si Siame avait cette manière d’être dure avec les hommes, elle faisait preuve d’une compassion et d’une attention toute particulière lorsqu’il s’agissait des femmes. De là à dire qu’elle les appréciait, il y avait un monde – elles restaient des mortels parmi tant d’autres –, mais elle s’adoucissait curieusement en leur présence.
Sans faire plus de manières, elle essuya ses mains sur son tablier et retroussa à nouveau ses manches tombées, et s’empara de la marmite dans laquelle Eris avait déposé les légumes. Il s’agissait désormais de la remplir d’eau, et de faire cuire le potage. En somme, rien de bien compliqué. La vie dans ce campement était réduite à sa plus évidente simplicité : chasser, construire, rénover, manger. Boire aussi. Le soir venu. Ce n’était pas parce qu’ici tout le monde avait perdu son “chez-soi” qu’on ne pouvait pas prendre la peine de décompresser un petit peu ? Un homme, qui avait lui déjà bien entamé sa boisson – et peut-être sa deuxième ou troisième tournée –, s’approcha pour leur déposer trois chopes d’hydromel servies généreusement.
Elle s’était emparée du second lapin qu’il lui avait fourni sans la moindre expression, comme si tout ça lui était très naturel. Malgré ses traits de jouvencelle, elle portait comme une femme mûre, si bien qu’il n’était pas si difficile d’imaginer que cela faisait un bon moment qu’elle arpentait ce monde. L’Ange s’était prise à sourire quand Leif (puisque c’était ainsi qu’il se nommait) l’avait affublé de “grande” quand il la dépassait d'au moins deux têtes, jugea-t-elle, bien qu’il soit assis. C’était attendrissant. Bien évidemment, elle comprit où il venait en venir – ça n’avait aucun rapport avec sa taille – et elle accueillit le compliment comme il se doit : d’un sobre sourire.
— Siame. J’ai bien connu Célestia… Elle marqua une courte pause, tandis que sa dague séparait avec soin la fourrure et la chair. J'y ai vécu un temps avec ma sœur. Il y a fort longtemps néanmoins, je doute qu’il y ait encore qui que ce soit dans ton village pour se souvenir de cette époque. Et clac! ce qu’il restait de la peau du second lapin venait d’être arraché d’un seul geste. Tu as décidé de partir seul ? Personne pour t’accompagner ?
Il fallait croire qu’elle pouvait se montrer tout à fait agréable, lorsque la situation s’y prêtait et, malgré la manière dont on l’avait entendu menacer Ishamael quelques minutes plus tôt, elle se prenait à sourire devant Leif et Eris. Sa méfiance naturelle semblait s’effacer un peu, bien qu’elle maintenait une certaine distance.
— Ne te tracasse pas pour Ishamael, elle s’adressait désormais à la jeune femme, il aboie fort, mais il ne mord pas beaucoup. Tant que tu ne lui donnes pas d’excuses pour venir t’assommer de ses infernales leçons de moral – si guider ceux dans le besoin était tout à son honneur, il fallait croire que le type avait décidé de laver tous ses efforts en passant pour un connard paternaliste –, tu devrais t’en tirer. Il ne crache jamais sur de nouvelles petites mains pour aider dans le camp, il te trouvera certainement quelque chose à faire.
Dans le ciel, un aigle passa.
Siame releva le museau en sa direction.
— Un aigle. C’est bon présage, paraît-il.
Elle chassa les lointains souvenirs que lui évoquait l’oiseau, avant de poursuivre.
— Je pars également en direction du Reike. Il était encore un peu tôt pour proposer à une inconnue de faire un bout de voyage avec elle, et pourtant… C’est un long voyage, mais nous pourrons faire une partie du trajet ensemble, si tu le souhaites, Eris.
Le nom sonnait mal.
Il y avait définitivement quelque chose à propos de cette fille ; mais tout chez elle avait été changé, brouillé. Un étrange petit bout de femme.
— Je ne compte pas m’attarder éternellement ici, et maintenant que ma “mission” est terminée… Elle parlait de la jeune femme qu’elle avait fait accouché un peu plus tôt. Je reste encore quelques jours le temps de m’assurer que le bébé et la mère sont tout deux en bonne santé.
Son regard passa d’Eris pour venir se poser sur le gaillard à côté.
— Et toi, Leif ? Qu’espères-tu trouver du côté républicain ?
Elle jeta un coup d'œil aux légumes qui venaient d’être “épluchés” – elle ne fit pas le moindre commentaire, cette fille était définitivement des beaux quartiers, peu importe d’où elle venait –, et aligna les lapins désormais prêts à être cuits. Autour d’eux, on pouvait déjà entendre les ventres gargouiller.
— Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, j’aimerais apporter le morceau le plus tendre à notre nouvelle maman. Elle l’a mérité.
Si Siame avait cette manière d’être dure avec les hommes, elle faisait preuve d’une compassion et d’une attention toute particulière lorsqu’il s’agissait des femmes. De là à dire qu’elle les appréciait, il y avait un monde – elles restaient des mortels parmi tant d’autres –, mais elle s’adoucissait curieusement en leur présence.
Sans faire plus de manières, elle essuya ses mains sur son tablier et retroussa à nouveau ses manches tombées, et s’empara de la marmite dans laquelle Eris avait déposé les légumes. Il s’agissait désormais de la remplir d’eau, et de faire cuire le potage. En somme, rien de bien compliqué. La vie dans ce campement était réduite à sa plus évidente simplicité : chasser, construire, rénover, manger. Boire aussi. Le soir venu. Ce n’était pas parce qu’ici tout le monde avait perdu son “chez-soi” qu’on ne pouvait pas prendre la peine de décompresser un petit peu ? Un homme, qui avait lui déjà bien entamé sa boisson – et peut-être sa deuxième ou troisième tournée –, s’approcha pour leur déposer trois chopes d’hydromel servies généreusement.
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Phèdre
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“C’est toi que j’éplucherais tranquillement si tu ne la ferme pas bientôt.” Siffla avec véhémence Phèdre dans l’esprit d’Eris qui sembla vaciller un instant sur son siège. Elle était agitée depuis qu’elle s’était assise ici quelques minutes auparavant, comme si la présence de ses deux compagnons éveillait quelque chose. Mais elle était bien incapable de savoir quoi. Eris était certaine de ne connaître ni l’un, ni l’autre mais il était indéniable que sa conscience -celle de Phèdre- se cabrait et s’arqueboutait comme si quelque chose essayait de s’échapper de ses entrailles. Mais quoi ? Cette pensée terrifia Eris.
Cela faisait maintenant plusieurs mois que son Autre avait élu domicile dans un recoin obscur de son esprit et Eris avait constaté que chaque jour qui passait était un jour où Phèdre gagnait du terrain tandis qu’elle en perdait. Et même lorsque la demi-fae pensait avoir le dessus sur cette intruse, qu’elle décidait de la faire taire pour la reléguer loin dans les tréfonds de son esprit, il lui fallait toute son énergie. Alors que Phèdre l’avait muselé avec une facilité déconcertante. Elle avait éteint son existence pendant des jours comme on soufflerait une bougie, la réduisant simplement à une flamme crachotante dans un océan de ténèbres. Quand Eris avait repris conscience, elle était déjà très loin de chez elle. Alors la manière qu’avait Phèdre de s’agiter aujourd’hui, n’augurait rien de bon.
- Je… Oui… Pardon… Marmonna-t-elle tout en résistant à l’envie -qui n’était probablement pas la sienne- de retourner son petit couteau émaillé vers son professeur d’épluchage. Il avait beau être assis, il semblait aussi haut que large et son visage n’était pas si laid pour un homme du Shoumei. Surtout ses grands yeux bleus, plus clairs que ceux d’Eris. “Ils feraient un magnifique ornement dans un bocal.” Continua la voix de velours de Phèdre. Eris tressaillit et suspendit son geste alors que des images dont elle se serait bien passées étaient en train de se former dans sa tête. Il en allait ainsi depuis plusieurs semaines maintenant. Cela avait commencé lorsque la demi-fae avait pris le dessus sur l’Autre. Si elle ne pouvait parler, rien ne l’empêchait de penser et elle -Phèdre- s’était mise à penser à beaucoup de choses. Surtout lorsqu’elle avait constaté ô combien cela pouvait éprouver Eris. Ainsi, elle eut une image claire et d’une précision époustouflante de Leif dont on aurait ôté les globes oculaires à la petite cuillère. La bouche pâteuse, elle avala péniblement sa salive.
“Siame ?” Ce fut un étrange mélange de leurs deux timbres qui s’éleva silencieusement dans le tombeau de leur conscience commune. Se connaissaient-elles ? Machinalement, Eris tourna la tête dans sa direction, pour la fixer, détailler les traits anguleux de son visage. Elle était belle, mince et dégageait une aura éthérée qui pouvait à la fois terrifier et fédérer. Il y avait quelque chose en cette femme qui attiraient leurs curiosités. Pourtant il était rare de capter les deux consciences de cette même âme tant elles étaient différentes.
- Je vais me contenter de ne pas me faire remarquer… Coassa Eris dont la voix était rauque puis leva le nez vers le ciel, exactement comme Siame pour apercevoir la silhouette d’un aigle. - C’est un faucon. Cette fois, c’était Phèdre qui avait parlé de son timbre doucereux. Elle garda ses yeux bleus rivés vers la canopée comme si en le regardant assez longtemps, les secrets qui lui étaient dissimulés allaient se révéler. Évidemment il n’en fut rien et Eris hocha finalement la tête à l’invitation de Siame à faire le reste de leur route ensemble. C’était toujours mieux que seule.
Après quoi, elle n’ouvrit plus la bouche et concentra sur l’épluchage de ses pommes de terre. D’une certaine façon, cela lui apportait du réconfort et réussissait à apaiser un peu son esprit. Même si elle ne pouvait s’empêcher de tourner et retourner ses interrogations dans tous les sens. Elle était curieuse, également, de ses compagnons de route. De Leif qui semblait aussi morose qu’un jour de pluie mais dont les conseils étaient toujours bienveillants et de Siame dont le simple nom sur sa langue avait un goût de cendres. Eris ne sortit de sa torpeur que lorsqu’on posa avec force une chope, manquant de la faire sursauter.
- Euh… Merci. Baragouina-t-elle en jetant les derniers vestiges d’une pomme de terre oubliée dans la marmite où l’eau était loin d’avoir commencé à frémir malgré le feu qui prenait de l’ampleur en dessous. Sans se faire prier, elle avala une longue gorgée. Boire lui ferait du bien au moral et au corps ; les jours comme les nuits étaient plus froids en République qu’au Reike et Eris ne s’y était toujours pas faite. D’ailleurs, elle remonta le col de sa cape pour faire barrière au froid. - Tu ne nous as pas dit d'où tu venais, Siame. Lâcha-t-elle finalement après que Leif eut répondu à la question de cette dernière. Une pensée formulée à haute voix ou poussée par Phèdre peut-être ? En tout cas la surprise se lut dans son haussement de sourcil.
Cela faisait maintenant plusieurs mois que son Autre avait élu domicile dans un recoin obscur de son esprit et Eris avait constaté que chaque jour qui passait était un jour où Phèdre gagnait du terrain tandis qu’elle en perdait. Et même lorsque la demi-fae pensait avoir le dessus sur cette intruse, qu’elle décidait de la faire taire pour la reléguer loin dans les tréfonds de son esprit, il lui fallait toute son énergie. Alors que Phèdre l’avait muselé avec une facilité déconcertante. Elle avait éteint son existence pendant des jours comme on soufflerait une bougie, la réduisant simplement à une flamme crachotante dans un océan de ténèbres. Quand Eris avait repris conscience, elle était déjà très loin de chez elle. Alors la manière qu’avait Phèdre de s’agiter aujourd’hui, n’augurait rien de bon.
- Je… Oui… Pardon… Marmonna-t-elle tout en résistant à l’envie -qui n’était probablement pas la sienne- de retourner son petit couteau émaillé vers son professeur d’épluchage. Il avait beau être assis, il semblait aussi haut que large et son visage n’était pas si laid pour un homme du Shoumei. Surtout ses grands yeux bleus, plus clairs que ceux d’Eris. “Ils feraient un magnifique ornement dans un bocal.” Continua la voix de velours de Phèdre. Eris tressaillit et suspendit son geste alors que des images dont elle se serait bien passées étaient en train de se former dans sa tête. Il en allait ainsi depuis plusieurs semaines maintenant. Cela avait commencé lorsque la demi-fae avait pris le dessus sur l’Autre. Si elle ne pouvait parler, rien ne l’empêchait de penser et elle -Phèdre- s’était mise à penser à beaucoup de choses. Surtout lorsqu’elle avait constaté ô combien cela pouvait éprouver Eris. Ainsi, elle eut une image claire et d’une précision époustouflante de Leif dont on aurait ôté les globes oculaires à la petite cuillère. La bouche pâteuse, elle avala péniblement sa salive.
“Siame ?” Ce fut un étrange mélange de leurs deux timbres qui s’éleva silencieusement dans le tombeau de leur conscience commune. Se connaissaient-elles ? Machinalement, Eris tourna la tête dans sa direction, pour la fixer, détailler les traits anguleux de son visage. Elle était belle, mince et dégageait une aura éthérée qui pouvait à la fois terrifier et fédérer. Il y avait quelque chose en cette femme qui attiraient leurs curiosités. Pourtant il était rare de capter les deux consciences de cette même âme tant elles étaient différentes.
- Je vais me contenter de ne pas me faire remarquer… Coassa Eris dont la voix était rauque puis leva le nez vers le ciel, exactement comme Siame pour apercevoir la silhouette d’un aigle. - C’est un faucon. Cette fois, c’était Phèdre qui avait parlé de son timbre doucereux. Elle garda ses yeux bleus rivés vers la canopée comme si en le regardant assez longtemps, les secrets qui lui étaient dissimulés allaient se révéler. Évidemment il n’en fut rien et Eris hocha finalement la tête à l’invitation de Siame à faire le reste de leur route ensemble. C’était toujours mieux que seule.
Après quoi, elle n’ouvrit plus la bouche et concentra sur l’épluchage de ses pommes de terre. D’une certaine façon, cela lui apportait du réconfort et réussissait à apaiser un peu son esprit. Même si elle ne pouvait s’empêcher de tourner et retourner ses interrogations dans tous les sens. Elle était curieuse, également, de ses compagnons de route. De Leif qui semblait aussi morose qu’un jour de pluie mais dont les conseils étaient toujours bienveillants et de Siame dont le simple nom sur sa langue avait un goût de cendres. Eris ne sortit de sa torpeur que lorsqu’on posa avec force une chope, manquant de la faire sursauter.
- Euh… Merci. Baragouina-t-elle en jetant les derniers vestiges d’une pomme de terre oubliée dans la marmite où l’eau était loin d’avoir commencé à frémir malgré le feu qui prenait de l’ampleur en dessous. Sans se faire prier, elle avala une longue gorgée. Boire lui ferait du bien au moral et au corps ; les jours comme les nuits étaient plus froids en République qu’au Reike et Eris ne s’y était toujours pas faite. D’ailleurs, elle remonta le col de sa cape pour faire barrière au froid. - Tu ne nous as pas dit d'où tu venais, Siame. Lâcha-t-elle finalement après que Leif eut répondu à la question de cette dernière. Une pensée formulée à haute voix ou poussée par Phèdre peut-être ? En tout cas la surprise se lut dans son haussement de sourcil.
Citoyen du monde
Cendre
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La fuite
Feat. Siame et phèdre - Message 3
La belle femme aux cheveux clairs comme la lune me dit alors connaître Célestia et je peine à cacher mon intérêt, je suis un bien piètre comédien ou menteur au demeurant, trop direct pour ça.
- Tu es donc plus vieille que tu n'en as l'air? Mais pour tout avouer je n'ai pas entendu parler d'une sage femme correspondant à ta description quand j'y vivais. Quand à mon départ...
Merde, merde, merde, pourquoi elle rentre dans le vif du sujet? Je sais pas mentir moi et rien qu'à sa question, je sens en moi monter une colère sourde et profonde, impérieuse, celle-là même qui me pousse et me guide depuis la fin de cette foutue guerre à poursuivre ces divinistes à la con qui prient des destructeurs, ils se foutent le doigt bien profondément dans l'oeil quand ils pensent qu'ils écoutent leurs vénérations.
- Je suis parti parce qu'il n'y avait plus personne dans mon village, on m'y a laissé pour mort mais... j'ai la peau plus dure qu'il n'y parait vois tu et je pouvais pas crever dans mon village en feu, détruit par des foutus fanatiques.
J'avais réussi à répondre en ne prononçant uniquement que le vérité, il manquait des informations bien entendu mais pour le coup... Que des mots entièrement vrais et qui laissaient la place à tout type d'interprétation.
- J'ai plus personne, ils sont tous... morts.
C'était plus fort que moi, je répétais ces mots comme un mantra important, pour ne jamais oublier que le Nouvel Ordre avait tué tous ceux que j'aimais, qu'ils avaient brûlé mon village et m'avaient laissé pour mort parmi les corps entassés de mes proches. Seagan puisses tu crever la bouche ouverte.
Par chance elle se concentra ensuite sur l'autre jeune femme. J'en avais terminé de mon côté et les bêtes furent mises sur le feu pour cuire, vu le peu de viande qu'elles présentaient cependant, elles ne mettraient pas des heures à cuire. Après j'avais mangé quand j'avais chassé sous ma forme lupine.
Elle parla ensuite d'un bon présage, moi je n'y voyais qu'un rapace dans les airs et donc du gibier à proximité, plus pragmatique comme vision non?
- Oui bon présage de petit gibier dans le coin.
J'avais souri en disant cela, pour tenter de retrouver ma bonhommie.
- Le Reike? Franchement ils sont trop obtus même pour moi. En république... Je sais qu'ils accueillent les réfugiés même si ils aiment la paperasserie... Après je sais pas écrire donc ils pourront noter ce qu'ils veulent j'en saurais foutre rien mais je m'en moque, je pense que ce pays est plus... accessible pour repartir sur de nouvelles bases. Vous pensez trouver quoi au Reike? Moi encore... j'imagine qu'ils pourraient être intéressés par euh... ma condition physique dirons nous mais ils sont plutôt fermés et sectaires pour l'accueil des étrangers et étrangères.
J'ai haussé les épaules quand elle demanda le morceau pour la mère, je m'en fichais un peu et je trouvais pas ça déconnant en effet.
- La mère doit manger oui.
La seconde semblait de son côté totalement perdue dans ses pensées, ailleurs, et pas dégourdie pour deux sous, comment elle pouvait espérer s'en sortir sérieusement? Elle devait avoir été noble, aucun doute la dessus non? Noble et inutile comme beaucoup de ces gens friqués qui n'avaient pour mérite que leur naissance. Les légumes coupés je les ai pris pour les mettre dans la marmite, mon regard se posa de nouveau sur Eris.
- Tu faisais quoi avant de vous retrouver au milieu de nulle part. Je suis navré de dire ça mais t'as l'air aussi à ton aise qu'un poisson hors de l'eau vraiment. Les chopes arrivées à bon point, j'en gouttais leur saveur.
J'avais repéré deux divinistes, ils parlaient souvent en louant leurs foutus divins, est-ce que ces deux là aussi en étaient? Pas que tuer une femme me dérange plus que ça, ils n'avaient pas hésité à le faire eux aussi mais je préférais affronter des gens capables de se battre, il me fallait du risque, je n'étais pas un assassin agissant avec sang froid, j'étais un chasseur empli de colère et de ressentiment. Je levais ma choppe du coup.
- Dans tous les cas, buvons aux bons services d'Ishamael qui s'enrichit sur les pauvres réfugiés qui cherchent à entrer dans deux nations différentes de manière discrète ! Loués soient les divins de l'avoir mis sur notre bouche.
Oh bon sang, ces mensonges m'écorchaient littéralement la gueule, j'ai bu directement pour cacher le simple dégoût que ces mots provoquaient en moi.
CENDRES
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Siame
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Siame s’était prise à sourire, doucement.
— Ne sommes-nous pas tous plus vieux que nous en avons l’air ici ? Nous cachons tous nos petits secrets, il faut croire.
Son sourire s’élargit, tandis que le gaillard poursuit, parle librement, à peine lancé. Ce garçon est une véritable pipelette, ce qui contraste largement avec la mystérieuse jeune femme à leur côté.
“C’est un faucon”. Son sourire s’estompa aussitôt. Quelque chose venait de vriller en elle. Cette voix, elle l’avait déjà entendue. Cette voix, elle la connaissait, elle en était désormais persuadée. “Qu’est-ce que tu as dit ?” s’était-elle surprise à demander, avant que Leif n'embraye sur son histoire. Siame l’écoutait désormais qu’à moitié, perdue dans ses propres pensées : elles sont faites de liberté, d’oiseaux, de promesses murmurées avec tendresse, contre le front d’une petite sœur… Elle n’avait eu qu’un petit hochement de menton respectueux quand le jeune homme leur annonça la mort de son clan. Tout le monde ici avait sa propre petite tragédie… Elle n’avait juste, à cet instant, pas encore la moindre idée que celle-ci se retournerait contre elle.
Dans la marmite, la viande commençait à brûler, et l’odeur avait attiré les plus affamés du campement. L’Ange avait entrepris de servir quelques assiettes—une première pour Leif, après tout, c’était lui qui avait ramené le gibier, une pour sa… une pour la jeune femme, et une qu’elle réserva pour la nouvelle mère.
— Je viens de la République. Ils sont plus accueillants, à ne point douter… Mais ce n’est pas une vie pour moi, conclut-elle sans s’attarder plus longuement à ce sujet. Visiblement, les deux femmes avaient déjà un point commun : les deux préféraient éviter de se faire remarquer, éviter de trop en dire... Cependant, je ne compte pas non plus m’attarder au Reike. C’est seulement histoire de régler quelques affaires… Suivre la piste de ses ailes. Il ne reste plus grand chose au Shoumei, mais c’est là que se trouve ma place. Elle annonçait clairement que ses convictions n’avaient pas été ébranlées par la guerre, ou du moins, c’est ainsi que l’on pouvait l’interpréter. Puisque ses convictions n’avaient absolument rien à voir avec celles des Mortels. Siame croit aux Titans parce qu’ils sont ses Créateurs. Elle aime Aurya comme on aime une mère : la méprise plus encore. On dit que Maël accueille de nouveau les divinistes, malgré la prise de la cité par l’armée reikoise, alors je suppose que c’est vers là-bas qu’il faut que je me dirige.
Ce sont peu de mots, mais des mots idiots. Elle ne le sait pas encore. Après tout, l’Ange ne connaît pas les véritables desseins du garçon : tous ici étaient supposés vénérer les Divins, c’était la condition pour être accueilli par Ishamael. Celle-ci, et être capable de se rendre utile. Mais Siame ne sait pas que Leif est ici pour se venger—devrait pourtant le savoir. Ils étaient tous ici-bas pour se venger de quelque chose, pas vrai ? Il se met alors à questionner à nouveau Eris, et elle se trouve à être un peu plus curieuse, un peu plus attentive. Il y a quelque chose chez cette fille, elle en est persuadée. Un nouveau nuage de pensées l’enveloppe. Qu’elle parle encore : elle veut entendre sa voix, elle a besoin d’être sûre de… Son regard cherche le sien…
— “Loués soient les divins de l'avoir mis sur notre bouche.”
Il y a un silence congestionné, l’espace d’une seconde. Puis Siame éclate de rire. C’est plus fort qu’elle. Tout ça était si sérieux, toutes ces mines grisâtres, tandis qu’on refusait de sourire, comme si le faire aurait été cracher copieusement sur toutes les Âmes tombées lors de la guerre. Comme s’ils étaient tous à deux doigts de se défenestrer. Merde hein, au bout d’un moment, il fallait bien vivre.
— Loués soient les divins de l’avoir mis sur notre bouche ! répète-t-elle mot pour mot, en levant son verre, imitant la diction du jeune homme, dans une franche camaraderie—un peu moqueuse, un peu étonnante dans son cas. Elle crut deviner les traits du garçon en train de se décomposer, ce qui ne fit qu’aggraver son hilarité.
— Ma foi. Vous savez comment captiver une audience, dit-elle en attrapant l'assiette mise de côté. Je vous abandonne un instant, je vais apporter ça à la jeune maman.
L’Ange s’était levé, le rire au bord des lèvres et avait tourné les talons en direction de la tente où logeaient la mère et son enfant.
— Ne sommes-nous pas tous plus vieux que nous en avons l’air ici ? Nous cachons tous nos petits secrets, il faut croire.
Son sourire s’élargit, tandis que le gaillard poursuit, parle librement, à peine lancé. Ce garçon est une véritable pipelette, ce qui contraste largement avec la mystérieuse jeune femme à leur côté.
“C’est un faucon”. Son sourire s’estompa aussitôt. Quelque chose venait de vriller en elle. Cette voix, elle l’avait déjà entendue. Cette voix, elle la connaissait, elle en était désormais persuadée. “Qu’est-ce que tu as dit ?” s’était-elle surprise à demander, avant que Leif n'embraye sur son histoire. Siame l’écoutait désormais qu’à moitié, perdue dans ses propres pensées : elles sont faites de liberté, d’oiseaux, de promesses murmurées avec tendresse, contre le front d’une petite sœur… Elle n’avait eu qu’un petit hochement de menton respectueux quand le jeune homme leur annonça la mort de son clan. Tout le monde ici avait sa propre petite tragédie… Elle n’avait juste, à cet instant, pas encore la moindre idée que celle-ci se retournerait contre elle.
Dans la marmite, la viande commençait à brûler, et l’odeur avait attiré les plus affamés du campement. L’Ange avait entrepris de servir quelques assiettes—une première pour Leif, après tout, c’était lui qui avait ramené le gibier, une pour sa… une pour la jeune femme, et une qu’elle réserva pour la nouvelle mère.
— Je viens de la République. Ils sont plus accueillants, à ne point douter… Mais ce n’est pas une vie pour moi, conclut-elle sans s’attarder plus longuement à ce sujet. Visiblement, les deux femmes avaient déjà un point commun : les deux préféraient éviter de se faire remarquer, éviter de trop en dire... Cependant, je ne compte pas non plus m’attarder au Reike. C’est seulement histoire de régler quelques affaires… Suivre la piste de ses ailes. Il ne reste plus grand chose au Shoumei, mais c’est là que se trouve ma place. Elle annonçait clairement que ses convictions n’avaient pas été ébranlées par la guerre, ou du moins, c’est ainsi que l’on pouvait l’interpréter. Puisque ses convictions n’avaient absolument rien à voir avec celles des Mortels. Siame croit aux Titans parce qu’ils sont ses Créateurs. Elle aime Aurya comme on aime une mère : la méprise plus encore. On dit que Maël accueille de nouveau les divinistes, malgré la prise de la cité par l’armée reikoise, alors je suppose que c’est vers là-bas qu’il faut que je me dirige.
Ce sont peu de mots, mais des mots idiots. Elle ne le sait pas encore. Après tout, l’Ange ne connaît pas les véritables desseins du garçon : tous ici étaient supposés vénérer les Divins, c’était la condition pour être accueilli par Ishamael. Celle-ci, et être capable de se rendre utile. Mais Siame ne sait pas que Leif est ici pour se venger—devrait pourtant le savoir. Ils étaient tous ici-bas pour se venger de quelque chose, pas vrai ? Il se met alors à questionner à nouveau Eris, et elle se trouve à être un peu plus curieuse, un peu plus attentive. Il y a quelque chose chez cette fille, elle en est persuadée. Un nouveau nuage de pensées l’enveloppe. Qu’elle parle encore : elle veut entendre sa voix, elle a besoin d’être sûre de… Son regard cherche le sien…
— “Loués soient les divins de l'avoir mis sur notre bouche.”
Il y a un silence congestionné, l’espace d’une seconde. Puis Siame éclate de rire. C’est plus fort qu’elle. Tout ça était si sérieux, toutes ces mines grisâtres, tandis qu’on refusait de sourire, comme si le faire aurait été cracher copieusement sur toutes les Âmes tombées lors de la guerre. Comme s’ils étaient tous à deux doigts de se défenestrer. Merde hein, au bout d’un moment, il fallait bien vivre.
— Loués soient les divins de l’avoir mis sur notre bouche ! répète-t-elle mot pour mot, en levant son verre, imitant la diction du jeune homme, dans une franche camaraderie—un peu moqueuse, un peu étonnante dans son cas. Elle crut deviner les traits du garçon en train de se décomposer, ce qui ne fit qu’aggraver son hilarité.
— Ma foi. Vous savez comment captiver une audience, dit-elle en attrapant l'assiette mise de côté. Je vous abandonne un instant, je vais apporter ça à la jeune maman.
L’Ange s’était levé, le rire au bord des lèvres et avait tourné les talons en direction de la tente où logeaient la mère et son enfant.
CENDRES
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Phèdre
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Leif n’avait même pas besoin de le lui dire pour qu’Eris se rende compte qu’elle l’agaçait. Ses yeux parlaient pour lui. Ils allaient d’elle aux légumes et des légumes à elle en passant par ses mains à la peau lisse mais salie par plusieurs jours de voyage. Des mains de noble, des mains qui ne travaillent pas. Du moins pas comme un homme du peuple pourrait l’imaginer. C’était vrai après tout, elle n’était pas dans les champs toute la sainte journée, ne s’épuisait pas à forger, à laver ou à coudre. Eris était un véritable rat de bibliothèque qui aimait plus les livres que ses congénères. Elle aimait les ranger, les trier, les lire et parfois même en écrire. Elle aimait user de sa magie pour canaliser les livres parfois magique qui s’agitaient sur les étagères. Et puis il y avait la solitude, l’odeur de l’encre et le bruit râpeux de la plume sur le papier. Toutes ces choses étaient son monde, un monde délicat, monotone et un peu solitaire mais qu’elle adorait. Se retrouver ici à devoir éplucher des légumes en compagnie de deux créatures aussi belles que létales, c’était une première. Et aussi sympathique soient-ils, elle avait extrêmement hâte de les quitter au profit de sa maison dans la petite couronne d’Ikuza, de retrouver ses jardins intérieurs, son Riad et surtout, par-dessus tout, Zéphyr.
- Je suis bibliothécaire. A la Grande Bibliothèque d’Ikusa. Avoua-t-elle après s’être tus quelques secondes. - Je n’ai jamais quitté le Reike et je n’aurais pas dû le quitter. Sa voix avait baissé lorsqu’elle prononça ces derniers mots tandis que ses mains agitaient nerveusement le liquide ambré dans sa choppe. “ Tu ne devrais pas y retourner, surtout.” Pesta Phèdre qui n’avait jamais cessé de s’agiter comme un lion en cage. Avant d’avoir pu ajouter quoi que ce soit, Leif prit à nouveau la parole, levant son verre à leur hôte mais aussi… Aux divins ? Eris releva la tête en entendant ses louanges mais le rire de Siame l’arracha aussitôt à sa contemplation. Elle riait, d’un rire franc et se moquait aussi, ce qui avait le mérite de trancher franchement avec l’ambiance qu’il y avait entre eux depuis le début. Avec l’ambiance de tout le camp en vérité ; conversation à voix basse, regards en chien de faïence, méfiance. Plusieurs paires d’yeux convergèrent d’ailleurs dans leur direction.
Siame se leva ensuite, prête à partir apporter un bout de leur préparation pour cette femme qui avait mit au monde un enfant. Un sentiment de nostalgie envahit Eris à cette pensée et elle hésita à se lever pour l’accompagner. Mais elle savait que sa place n’était pas là-bas. Alors elle se força à rester assise et tourner la tête en direction de Leif, quitte à être en tête à tête d’une seconde à l'autre, autant ne pas laisser un silence gênant s’installer. Mais ce qui aurait dû être une conversation bateau, des mots sans intérêt seulement là pour la politesse, se trouvèrent bien différent. Tout comme le regard azur que Phèdre posa sur cet homme et qui était loin, très loin de celui doux et timide d’Eris. Un sourire mesquin étira ses lèvres rougies par le froid et elle demanda d’une voix suffisamment forte pour être entendu par d’autre :
- Etais-tu suffisamment fidèles à tes dieux ? Harponnant le regard de glace de Leif, elle le scruta. Sa voix avait la froideur de la glace et la mélodie de la vilénie - J’imagine que non. Trancha-t-elle sans lui laisser le temps de répliquer. - Sinon les huit vous aurez protégés, toi et ton village, de vos ennemis. A moins que vos ennemis ne soient les fidèles des Divins. Son menton vint se poser dans la paume de sa main sereinement, comme s’ils discutaient de la pluie et du beau temps. - Les Titans savent récompenser ceux qui leur sont dévoués, si tu es ici, c’est que tu ne dois pas être bien fameux. Les mortels le sont rarement et dans ce cas, il vaut mieux couper le mal à la racine. Puis elle partie d’un petit rire moqueur qui s’étrangla brusquement dans sa gorge quand Eris refit son apparition. En un instant elle avait retrouvé cette candeur qui lui était propre, cette crainte qui l’habillait toujours et son regard, abasourdie scruta le visage du jeune homme avec au moins autant d’effarement que ce qu’il devait ressentir. - Je… Ce n’est pas… Je voulais dire… Le Reike n’est pas… Nous ne détruisons pas des villages de… de… Je suis désolée. Bredouilla-t-elle, l’air désormais parfaitement innocent.
- Je suis bibliothécaire. A la Grande Bibliothèque d’Ikusa. Avoua-t-elle après s’être tus quelques secondes. - Je n’ai jamais quitté le Reike et je n’aurais pas dû le quitter. Sa voix avait baissé lorsqu’elle prononça ces derniers mots tandis que ses mains agitaient nerveusement le liquide ambré dans sa choppe. “ Tu ne devrais pas y retourner, surtout.” Pesta Phèdre qui n’avait jamais cessé de s’agiter comme un lion en cage. Avant d’avoir pu ajouter quoi que ce soit, Leif prit à nouveau la parole, levant son verre à leur hôte mais aussi… Aux divins ? Eris releva la tête en entendant ses louanges mais le rire de Siame l’arracha aussitôt à sa contemplation. Elle riait, d’un rire franc et se moquait aussi, ce qui avait le mérite de trancher franchement avec l’ambiance qu’il y avait entre eux depuis le début. Avec l’ambiance de tout le camp en vérité ; conversation à voix basse, regards en chien de faïence, méfiance. Plusieurs paires d’yeux convergèrent d’ailleurs dans leur direction.
Siame se leva ensuite, prête à partir apporter un bout de leur préparation pour cette femme qui avait mit au monde un enfant. Un sentiment de nostalgie envahit Eris à cette pensée et elle hésita à se lever pour l’accompagner. Mais elle savait que sa place n’était pas là-bas. Alors elle se força à rester assise et tourner la tête en direction de Leif, quitte à être en tête à tête d’une seconde à l'autre, autant ne pas laisser un silence gênant s’installer. Mais ce qui aurait dû être une conversation bateau, des mots sans intérêt seulement là pour la politesse, se trouvèrent bien différent. Tout comme le regard azur que Phèdre posa sur cet homme et qui était loin, très loin de celui doux et timide d’Eris. Un sourire mesquin étira ses lèvres rougies par le froid et elle demanda d’une voix suffisamment forte pour être entendu par d’autre :
- Etais-tu suffisamment fidèles à tes dieux ? Harponnant le regard de glace de Leif, elle le scruta. Sa voix avait la froideur de la glace et la mélodie de la vilénie - J’imagine que non. Trancha-t-elle sans lui laisser le temps de répliquer. - Sinon les huit vous aurez protégés, toi et ton village, de vos ennemis. A moins que vos ennemis ne soient les fidèles des Divins. Son menton vint se poser dans la paume de sa main sereinement, comme s’ils discutaient de la pluie et du beau temps. - Les Titans savent récompenser ceux qui leur sont dévoués, si tu es ici, c’est que tu ne dois pas être bien fameux. Les mortels le sont rarement et dans ce cas, il vaut mieux couper le mal à la racine. Puis elle partie d’un petit rire moqueur qui s’étrangla brusquement dans sa gorge quand Eris refit son apparition. En un instant elle avait retrouvé cette candeur qui lui était propre, cette crainte qui l’habillait toujours et son regard, abasourdie scruta le visage du jeune homme avec au moins autant d’effarement que ce qu’il devait ressentir. - Je… Ce n’est pas… Je voulais dire… Le Reike n’est pas… Nous ne détruisons pas des villages de… de… Je suis désolée. Bredouilla-t-elle, l’air désormais parfaitement innocent.
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La fuite
Feat. Siame et phèdre - Message 5
J'avais souri à pleines dents aux paroles de la sage femme énifmatique.
- Des secrets probablement mais plus vieux qu'on en a l'air pour le coup, pas chez moi. Je suis jeune et con, à peine mature diront certaines mauvaises langues même mais bref dans mon village nul récit sur quelqu'un qui pourrait te ressembler mais j'avoue que cela attise ma curiosité de me dire que tu es porteuse d'une histoire qui pourrait circuler à Célestia.
Je peinais à garder ou dissimuler mon intérêt que les paroles qu'elle venait de prononcer, était elle une zélote diviniste qui prêchait de par le monde? Représentait elle donc un met précieux et fin que j'allais savourer? Sentir sa chair se déchirer sous mes crocs et puissantes mâchoires, goûter le sang d'une diviniste ancienne? Je m'emballais comme toujours, calme toi mon grand...
J'ai bien levé les yeux au ciel à la suite de l'histoire de l'aigle et du faucon, qu'en avais-je à cirer? Rien mais ça sonnait comme si c'était important mais j'avais beau cogiter je ne voyais pas en quoi. J'avais accepté mon assiette avec plaisir, j'avais toujours un grand appétit même si on était bien d'accord j'avais mangé quand je chassais pour nourrir la bête en moi et éviter d'avoir les crocs ensuite.
J'ai regardé Siame en m'interrogeant sur ce qu'elle voulait faire.
- Retourner sur les ruines d'une civilisation? Pour reconstruire? Mais faut du monde pour ça et les réfugiés ici en République semblent pas beaucoup regretter leur ancienne nation, ils ont trop souffert ces dernières années. A mon avis c'est bien trop tôt pour espérer réussir quoi que ce soit là-bas. J'dis pas que la République c'est le pied pour vivre mais au moins ils tolèrent tout le monde.
Trop de monde même mais ceci est un autre sujet non? Enfin c'est le même mais je vais pas argumenter à voix haute.
- Je connais pas Maël, jamais mis les pieds là-bas, Célestia et les Pins Argentés, je ne connaissais que ces régions, j'étais pas un grand voyageur, un gars simple vivant dans son coin avec les siens comme beaucoup d'autres. Mais ça m'étonne que les reikois tolèrent les divinistes, ils sont pas franchement ouverts de ce point vue dès qu'on loue pas leurs étoiles et surtout le couple impérial, ils aiment pas trop trop.
Par contre j'ai pas bien compris leur histoire de bouche sauf que... j'ai encore du dire une connerie, en général je maitrise mais parfois ça sort sans que je réalise vraiment ce que je raconte, ou alors je mélange les propos et j'ai voulu jouer au nase et bref les divins m'écorchent tellement que j'ai pas réussi ce que je voulais enfin pas totalement... Mais quel abruti mon grand ! Et elle se fout de moi, en temps normal je me serai emporté direct mais c'est pas le but je trouver la bonne proie, le plus cul béni diviniste de ce camp pour me délecter de ses chairs, les offrir à ma bête, celle née de la malédiction des titans.
La seconde était tellement plus renfermée et quand elle avoua qu'elle était bibliothécaire je me suis bien demandé ce qu'elle foutait ici pour le coup.
- Bibliothécaire à Ikusa? Mais bon sang qu'est-ce que tu fous ici?
Et puis y a eu un truc non? Comme si elle se révélait, si elle osait parler plus librement peut-être? Etrange mais bon parfois ça arrivait. Sa question d'un coup sembla tellement aux antipodes de ce qu'elle disait avant que ça m'a laissé un peu interdit quelques secondes et du coup elle a commencé à cracher son venin. Bordel elle en avait sous le coude en fait, derrière son air apeuré, ses manières nobles et d'érudit qui sait rien faire, elle avait de la répartie la bougresse.
Et pour le coup elle avait le verbe incisif, la voix assassine et elle touchait au but... Elle lisait dans ma tête? Je grognais malgré moi quand elle parla des miens, c'étaient pour eux que j'étais là, pour leur souvenir, pour ne pas oublier que les fidèles des titans les avaient tués. J'avais un bout de viande en bouche et je brisais l'os d'un coup de dent sans m'en rendre compte, le bruit me fit réaliser ça et je crachais au sol l'os et la viande attachée.
- Fidèle à mes dieux? As-tu seulement vu ce que les titans ont fait à Sancta ou Benedictus? Fidèle ou pas ils sont tous morts et je parle même pas des terres rendues stériles et des créatures qui arpentent maintenant le monde et détruisent ce qu'il reste?
Mon regard changea, mes pupilles s'étrécissant et devenant celles du loup, de la Bête que j'étais, maudit par les titans par mon sang.
- Mais tu as vu juste, mes ennemis sont les fidèles des divins, ceux qui osent vénérer ces aberrations, ces entités immorales et destructrices qui ne portent que le chaos de par le Sekaï. Les pires sont les zélotes qui les suivent aveuglés par leur foi croyants qu'ils seront récompensés un jour.
Je posais ma gamelle au sol et le reste de nourriture qui s'y trouvait ne m'intéressait plus. Je penchais la tête en l'observant, mes pupilles toujours brillantes et changées. Mes poings crispés j'inspirais un instant et dans un craquement sinistre perceptible par mon interlocutrice mais pas ceux plus loin, je laissais l'emprise de la Bête sur moi venir. Mes os de la main droite s'étaient brisés, la douleur coutumière ne m'arracha pas mon sourire, mes doigts grandirent, et s'épaissirent alors qu'à la place des ongles apparurent des griffes acérées.
- Le Nouvel Ordre a détruit mon village et les miens, parce que nous avons refusé de combattre avec eux aux côtés des titans... Alors maintenant moi je rétablis la balance, pour chaque innocent tué, j'envois un diviniste rejoindre ses créateurs. Je vais te proposer un jeu, tu me sembles spéciale toi... Je te laisse un peu de temps, je vais compter jusqu'à 60... Fais ce que tu veux, comme tu veux, appelle à l'aide... quand je serai à 60 tu seras ma proie, mon gibier, mon Loup a faim du sang de fidèle des titans... 1.... 2.... 3....
Je n'avais pas bougé mais le comptage avait débuté.
CENDRES
Prophétesse
Siame
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Info personnage
Race: Ange
Vocation: Mage soutien
Alignement: Loyal mauvais
Rang: B - Cardinal
Un, deux, trois…
L’avait-elle perçu ? Deviné ? L’avait-elle seulement senti ? Siame s’était éclipsée avant la catastrophe, avait évité la conversation qui s’était tenue entre les deux. Pourtant, une vague glaciale lui avait parcouru la nuque, et elle l’avait certainement – bêtement – ignorée.
Quatre, cinq, six…
Elle avait déposé l’assiette au chevet de la nouvelle maman et s’était assurée de sa condition. Dans la pénombre de la tente, Siame épongea le visage de l’enfant, encore rougi par l’effort de vivre. Ici, le silence n’était brisé que par les pleurs et les gazouillements du nourrisson, qui prenait place dans ce Monde, après le tumulte de l’accouchement de sa mère.
Siame le connaît bien, ce remue-ménage dans le corps, qui vous laisse un vide des mois durant. Parfois, la chose lui manque—bien qu’elle n’est plus émue devant les cris et le sang, ni devant ce spectacle que les Hommes s'entêtaient à appeler “miracle”. Pour elle, il n’est que souvenir douloureux, fléau et déception. Rêves et contes de fées s’accordaient très mal avec la désillusion cruelle de la réalité.
Sept, huit, neuf…
“Ça va aller”, se prend-elle à rassurer la jeune mère, d’une voix douce, réconfortante. Elle le dit comme on distribue des bonbons, sans véritablement y croire. Elle regarde la femme, ses yeux encore embués d’émotion, persuadée que le petit corps fragile qui repose entre ses mains est la promesse d’un avenir radieux, malgré les souvenirs de la guerre encore présents dans les esprits. Bien qu’elle n’est plus aucun endroit qu’elle puisse appeler “maison”. Mais les pensées de l’Ange sont ailleurs. Probablement déjà tournée vers le prochain drame.
Siame le connaît bien, ce silence avant l’orage, ces petits moments de quiétude où on a envie de croire au bonheur. Parfois, elle aussi a envie d’y croire—bien qu’elle ne se laisse plus avoir par ce Monde trompeur, où l’on célèbre la vie tout en occultant ce qu’il en coûte pour la donner, et tout ce qui nous attend après.
Dix, onze, douze…
Alors, quand elle quitte la tente, un sourire distant vient cueillir ses lèvres. Un sourire amer, que seule une longue expérience confère. Elle sait que ce qu’on appelle “miracle” n’est souvent qu’une étape de plus sur une longue chaîne de souffrances. Que l’enfant entre les bras de la mère n’est qu’un autre voyageur sur cette route, condamné à affronter les mêmes illusions—les mêmes désillusions que tous les autres. La vie commence comme elle se termine : dans le sang et les larmes.
Siame le connaît bien, cet inexorable chemin, de l’innocence à la déception, de l’amour à la douleur. Elle laisse derrière elle la mère et l’enfant, tout en sachant que leur avenir est déjà écrit, sur une page que nul autre ne peut lire à l’avance, mais dont elle devine déjà les tâches noires qui en dessinent les contours.
Rien qu’un autre jour. Rien qu’un autre enfant. Rien qu’une autre vie à la dérive.
Rien de plus, rien de moins que la même sale histoire ayant un jour arraché un enfant à son clan, une sœur à sa jumelle.
Cinquante huit, cinquante neuf, soixante.
Siame n’a que le temps d'apercevoir une silhouette épaisse, disparaître derrière un arbre, dans la nuit noire. Elle frotte pensivement ses mains contre son tablier. Le campement entier s’est éclipsé dans un silence de mort, et seul le feu continue de crépiter. Un bruissement attire son attention, et un silence pesant ; sinistre, résonne sous son crâne.
Elle avait avancé, prudemment, ses pas étouffés par le tapis de feuilles mortes, ou peut-être bien par l’immensité de la nuit. Son cœur s’accéléra, une peur primitive remplaçant son habituelle apathie. L’air s’était figé tout autour d’elle, chargé d’une menace sourde, comme si la nuit en personne retenait son souffle, guettant l’instant où le Monde exploserait, cédant à la panique. Siame fouilla l'obscurité du regard, cherchant un indice, une piste, n’importe quoi qui fasse un peu plus de sens que l’abîme silencieux de la nuit. Quelques minutes auparavant, tout allait bien. Et elle se dit qu’il s’agit certainement là d’une blague du destin. Que tout ce qu’on croit être la vérité du moment peut s’évaporer en un instant.
L’Ange resta là, figée, seule face à la forêt noire, à cette nuit qui s’annonçait alors sans fin, réduite au silence par absence.
— Quelqu’un ?
Une brise glaciale lui répond.
Puis un cri, lointain.
Un cri qui déchire la nuit comme le prélude d’un film d’horreur.
L’avait-elle perçu ? Deviné ? L’avait-elle seulement senti ? Siame s’était éclipsée avant la catastrophe, avait évité la conversation qui s’était tenue entre les deux. Pourtant, une vague glaciale lui avait parcouru la nuque, et elle l’avait certainement – bêtement – ignorée.
Quatre, cinq, six…
Elle avait déposé l’assiette au chevet de la nouvelle maman et s’était assurée de sa condition. Dans la pénombre de la tente, Siame épongea le visage de l’enfant, encore rougi par l’effort de vivre. Ici, le silence n’était brisé que par les pleurs et les gazouillements du nourrisson, qui prenait place dans ce Monde, après le tumulte de l’accouchement de sa mère.
Siame le connaît bien, ce remue-ménage dans le corps, qui vous laisse un vide des mois durant. Parfois, la chose lui manque—bien qu’elle n’est plus émue devant les cris et le sang, ni devant ce spectacle que les Hommes s'entêtaient à appeler “miracle”. Pour elle, il n’est que souvenir douloureux, fléau et déception. Rêves et contes de fées s’accordaient très mal avec la désillusion cruelle de la réalité.
Sept, huit, neuf…
“Ça va aller”, se prend-elle à rassurer la jeune mère, d’une voix douce, réconfortante. Elle le dit comme on distribue des bonbons, sans véritablement y croire. Elle regarde la femme, ses yeux encore embués d’émotion, persuadée que le petit corps fragile qui repose entre ses mains est la promesse d’un avenir radieux, malgré les souvenirs de la guerre encore présents dans les esprits. Bien qu’elle n’est plus aucun endroit qu’elle puisse appeler “maison”. Mais les pensées de l’Ange sont ailleurs. Probablement déjà tournée vers le prochain drame.
Siame le connaît bien, ce silence avant l’orage, ces petits moments de quiétude où on a envie de croire au bonheur. Parfois, elle aussi a envie d’y croire—bien qu’elle ne se laisse plus avoir par ce Monde trompeur, où l’on célèbre la vie tout en occultant ce qu’il en coûte pour la donner, et tout ce qui nous attend après.
Dix, onze, douze…
Alors, quand elle quitte la tente, un sourire distant vient cueillir ses lèvres. Un sourire amer, que seule une longue expérience confère. Elle sait que ce qu’on appelle “miracle” n’est souvent qu’une étape de plus sur une longue chaîne de souffrances. Que l’enfant entre les bras de la mère n’est qu’un autre voyageur sur cette route, condamné à affronter les mêmes illusions—les mêmes désillusions que tous les autres. La vie commence comme elle se termine : dans le sang et les larmes.
Siame le connaît bien, cet inexorable chemin, de l’innocence à la déception, de l’amour à la douleur. Elle laisse derrière elle la mère et l’enfant, tout en sachant que leur avenir est déjà écrit, sur une page que nul autre ne peut lire à l’avance, mais dont elle devine déjà les tâches noires qui en dessinent les contours.
Rien qu’un autre jour. Rien qu’un autre enfant. Rien qu’une autre vie à la dérive.
Rien de plus, rien de moins que la même sale histoire ayant un jour arraché un enfant à son clan, une sœur à sa jumelle.
Cinquante huit, cinquante neuf, soixante.
Siame n’a que le temps d'apercevoir une silhouette épaisse, disparaître derrière un arbre, dans la nuit noire. Elle frotte pensivement ses mains contre son tablier. Le campement entier s’est éclipsé dans un silence de mort, et seul le feu continue de crépiter. Un bruissement attire son attention, et un silence pesant ; sinistre, résonne sous son crâne.
Elle avait avancé, prudemment, ses pas étouffés par le tapis de feuilles mortes, ou peut-être bien par l’immensité de la nuit. Son cœur s’accéléra, une peur primitive remplaçant son habituelle apathie. L’air s’était figé tout autour d’elle, chargé d’une menace sourde, comme si la nuit en personne retenait son souffle, guettant l’instant où le Monde exploserait, cédant à la panique. Siame fouilla l'obscurité du regard, cherchant un indice, une piste, n’importe quoi qui fasse un peu plus de sens que l’abîme silencieux de la nuit. Quelques minutes auparavant, tout allait bien. Et elle se dit qu’il s’agit certainement là d’une blague du destin. Que tout ce qu’on croit être la vérité du moment peut s’évaporer en un instant.
L’Ange resta là, figée, seule face à la forêt noire, à cette nuit qui s’annonçait alors sans fin, réduite au silence par absence.
— Quelqu’un ?
Une brise glaciale lui répond.
Puis un cri, lointain.
Un cri qui déchire la nuit comme le prélude d’un film d’horreur.
CENDRES
Citoyen du monde
Phèdre
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Au cours de sa longue existence, Eris était certaine d’avoir vu toutes les horreurs que le monde portait en son sein. Ce ne fut que lorsqu’elle vu l’angle immonde du poignet de Leif qu’elle comprit qu’elle s’était fourvoyé. Sa choppe tomba dans un bruit mat sur le sol alors qu’elle se levait maladroitement de son assise de fortune puis qu’elle reculait, incapable de détacher ses yeux de la silhouette distordue de l’homme qui n’en serait bientôt plus un. Et elle n’avait pas besoin de fouiller bien loin dans sa mémoire pour savoir de quel genre de créature il s’agissait. Ni plus, ni moins qu’un loup. Un grand loup. Les yeux ronds comme des billes, il ne cessait de grossir à mesure qu’elle reculait, sa peau se déchirant par endroit pour laisser apparaître la fourrure de l’animal. Sa respiration se fit brusquement erratique, la peur lui tordit l’estomac. Elle devait courir, elle le savait mais elle en était purement incapable. Il lui était impossible de regarder ailleurs ou même d’entendre autre chose que les grognements gutturaux qui émanaient de lui.
- Je ne suis pas un serviteur des titans. Se récria-t-elle. - Je suis Reikoise, ma religion… Ma religion… “Est le Shierack” aurait-elle dû ajouter. Mais elle ne le fit pas. Les mots étaient comme coincés dans sa gorge, imprononçable. - S’il te plait. S’entendit-elle supplier. - Je ne sais pas ce qui m’a pris, je ne voulais pas dire ça. Et une part d’elle, celle qui appartenait à Phèdre, rit.
“Je crois qu’il est temps de courir” Souffla cette dernière dans son esprit. Eris sut qu’il s’agissait ni plus ni moins d’un ordre autant qu’un conseil. La peur au ventre, elle détala comme un lapin sans se rendre compte qu’elle n’était pas la seule à s’enfuir en toute hâte vers les bois. D’autres comme elle, terrifiés par l’énorme loup qui avait surgi dans le camp, avaient prit leurs jambes à leurs cous. Derrière elle, alors qu’elle franchissait la lisière des arbres, elle entendit le rugissement d’un animal ; le décompte était terminé.
Eris se déplaçait aussi vite que ses jambes frêles le lui permettaient. Elle courait sans véritablement savoir dans quelle direction elle allait, tout ce qui comptait c’était de mettre autant de distance que possible entre elle et le camp. Entre elle et le loup. Le sol gelé étouffait à peine les sons de sa course et les oiseaux d’habitude si bavards s’étaient désormais tue comme si tous attendaient de voir comment cette course poursuite allait se terminer. Elle-même en connaissait la finalité ; elle ne s’était jamais battu même au cours de ses études, avait une condition physique digne de la bibliothécaire solitaire qu’elle était et sa magie n’avait pas pour vocation de la protéger. En vérité, à part en de rares occasions, elle ne l’avait jamais utilisé sur un autre être vivant. Et à choisir, elle aurait voulu que ça ne change jamais. Alors elle continuait de courir et de bondir par-dessus les obstacles qui se dressaient sur son passage. Jusqu’à ce que ses jambes flageolantes et ses poumons en feu ne la forcent à s’arrêter au pied d’un arbre gigantesque dont le tronc était au moins deux fois plus large qu’elle. Ce fut seulement à cet instant qu’elle s’autorisa à respirer à nouveau.
“Je ne veux pas mourir, je ne veux pas mourir, je ne veux pas mourir, je ne veux pas mourir.” Supplia Eris en réprimant un sanglot. “Tu ne mourras pas.” Susurra Phèdre au moment où, au-delà de sa cachette, elle entendit le pas traînant de quatre pattes et le reniflement caractéristique d’une truffe qui hume l’air. Son sang se figea, la bile lui envahit la bouche et elle cessa à nouveau de respirer. Il l’avait retrouvé en un claquement de doigt et il n’avait plus qu’à suivre l’effluve caractéristique qu’elle laissait derrière elle pour la retrouver. Huit mètres les séparaient désormais. En un bon, il pouvait la rejoindre. Lentement, mue par l’instinct millénaire de la créature avec qui elle partageait son esprit, elle enjamba une racine et commença à contourner le tronc à mesure que Leif suivait son odeur dans l’air.
“J’ai toujours adoré les parties de cache-cache avec les idiots dans son genre.” Sa peur était trop grande pour qu’elle ne prenne le temps d’insulter Phèdre, mais la volonté y était.
Quand le museau de Leif arriva au niveau de l’endroit où elle se trouvait à peine cinq minutes auparavant, elle crut s’évanouir de terreur. Ses lèvres pincées retenaient à grand peine les larmes qui venaient ourler ses paupières. Mais il lui fallait tenir bon, encore un instant, encore un pas de plus et elle pourrait s’enfuir à nouveau à travers l’épais feuillage d’un buisson d’aubépine.
Un pas. Puis un second. Une branche qui craque. Un loup qui relève la tête et une jeune créature terrifiée qui s’enfuit en toute hâte.
Il allait la tuer, voilà la seule certitude qui accompagnait Eris alors qu’elle reprenait sa course désespérée pour s’éviter une mort atroce. Hélas, elle n’était pas aussi rapide qu’un loup, loin s’en faut, et il ne tarda pas à la rattraper. Eris roula dans la neige, incapable d’intimer à la gravité d’arrêter de la maltraiter et son corps vint s’arrêter lorsqu’elle heurta un rocher dans un gémissement douloureux. Aussi vite que possible, elle se releva, chancelante.
- Arrête, je te promets que je ne suis pas diviniste ! Essaya-t-elle encore de se défendre. Mais elle devina au regard assassin qu’il lui lança qu’il n’en croyait pas un traître mot. “Laisse le moi.” Exigea Phèdre alors qu’Eris était au bord de l’évanouissement. Sans se faire prier, elle abandonna son esprit à la créature qui y vivait. Et alors qu’il était sur le point de se jeter sur elle, elle sentit sa magie filer droit sur le loup puis heurter son esprit avec toute la férocité de ses attaques mentales. - Tu souffres ? Chien. Cracha Phèdre par la bouche d’Eris. - Comme il est regrettable que ceux qui ont tué les tiens t'aient épargnés. A moins que ça ne soit ta sanction à toi et rien qu’à toi. Tu voulais jouer au loup ? Alors vient me chercher. Puis dans un sourire, elle s’éclipsa en maintenant sa magie aussi longtemps que possible.
Citoyen du monde
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La fuite
Feat. Siame et phèdre - Message 6
Etonnamment la peur des autres ne me rend pas joyeux, ne m'excite pas non plus. Non, lire la peur dans leurs yeux c'est juste la preuve de la compréhension de l'inéluctable fin que je souhaite leur offrir. En y réfléchissant bien, je n'ai rien de personnel contre cette jeune femme, son seul tord à mes yeux c'est sa croyance. Cette croyance envers des dieux impies et mauvais qui me révulse. Ces titans qui ont fait de moi un homme maudit, par ma naissance, par mon sang. Et le pire de leur malédiction reste que si un jour je souhaite avoir un enfant, je risque de lui transmettre ce fardeau. Avec une lycanthrope c'est assuré, avec une humaine c'est une probabilité. Et je ne souhaite cela à personne.
Sentir la bête en soit qui frappe aux portes de notre esprit en permanence dès qu'elle s'éveille à l'adolescence et passer ensuite sa vie à lutter contre sa présence, la contrôler, ne pas devenir elle, ne pas se consumer dans sa bestialité permanente. Nous sommes des humains mais parfois nous nous emportons.
Alors que ma transformation touche à sa fin, je vois sa peur, elle est physique et olfactive.
- Les titans n'ont pas que des serviteurs dans l'ancien Shoumeï, l'endroit de ta naissance n'influence pas tes croyances.
Peut-être aurais-je du accepter que la voix changeait et que cela ne ressemblait pas à un effet de la peur mais j'avais accepté de lacher du lest à la Bête. J'avais toujours sa laisse en main, bien fermement ancrée, pour ne pas succomber et faire un massacre dont je n'aurais pas le moindre souvenir, non c'était une tension permanente que ce contrôler la bête et se servir de ses capacités.
- La vérité sort souvent de la bouche des plus innocents. Sans arrière pensée justement, sans maitrise, sans contrôle. Tu as parlé et tu disais vrai.
Je n'ai pas envie de m'apitoyer sur elle, sur son regard aux grands yeux.
Et finalement elle s'est mise à courir, consciente que rien de ce qu'elle pourrait dire ne changerait mes intentions. Je commençais le compte à rebours. J'entendais les craquements des branchages morts sur lesquels elle passait. Son souffle qui devenait plus court, ses respirations saccadées, son coeur qui battait plus fort, plus vite.
Elle courait pour sauver sa vie, et une délicieuse odeur de peur emplissait les narines de ma Bête qui se régalait à l'idée de partir chasser. Parfois elle glissait, la faute de cette glace qui recouvrait le sol par endroit. Par moments elle pleurait ou du moins cela y ressemblait mais que sont soixante petites secondes dans une vie?
Elle avait fini par s'arrêter alors que je la traquais, ce n'était pas fair play, ni juste, j'avais juste besoin de ma nature pour trouver. Nul utilité à suivre la piste des branchages brisés ou des marques qui parfois étaient dans le sol, non, juste mon flair suffisait. Tapie dans l'ombre, elle allait céder à la panique j'en avais la certitude.
J'approchais maintenant en marchant, ma respiration, calme, profonde, ne laissait rien transparaître de mon amusement.
Elle s'était relevée, je l'avais entendu, aussi discrète fut elle et pourtant quelque chose avait changé, j'en étais presque certain, son odeur n'était plus tout à fait la même, pourquoi? Comment surtout. L'odeur de chacun nous est propre et on ne la change pas.
Et d'un coup elle reprend sa course, à quelques mètres de moi. Focalisé sur elle, j'ai été stupidement imprudent.
Et la voila qui trébuche et se retrouve au sol, près du rocher fautif. Son regard est empli de terreur et je ne vois plus que cela, de la terreur de diviniste, la Bête gronde et se délecte de cela, mais elle veut jouer. Si elle n'était pas si prompte à cela j'aurais surement pu faire mieux mais la Bête avait prédominance durant les chasses.
Elle me supplia et d'un coup son regard changea, elle n'était plus... elle-même? Son odeur, de nouveau avait évolué. Elle usa d'un sort, je sentis qu'on m'attaquait mais ce fut comme si on cognait aux portes de mon esprit, rien de plus... Une attaque mentale surement, elle ne savait pas que dans notre malheur nous avions un esprit plus résistant à cela? A ce genre d'attaques seulement.
Et la voilà qui fanfaronne... Cette garce pense m'avoir blessé, vraiment. Fini de jouer, cela suffit. Je veux en finir, sentir son sang chaud couler le long de mes canines et maculer ma peau de neige. Je veux percevoir les battements de son coeur exploser avant de s'affaiblir et de s'éteindre. Je veux...
Je m'élance, je cours, je bondis sur elle. En trois enjambées je l'ai rattrapée et mise au sol, face contre terre. Non elle doit voir la mort en face, je peux au moins lui offrir cela. Au dessus de son corps frêle, je me baisse, m'agenouille, et la retourne. Ma gueule s'approche de son visage et ma langue lupine vient glisser sur sa joue, rapeuse, désagréable. Le souffle de mon museau réchauffe son visage un instant tandis que mon regard se glisse dans le sien.
- C'est la fin.
A ce moment-là je perçois une autre présence, merde, comment ça? Je relève la tête et me tourne dans la direction de l'odeur. J'aperçois dans les fourrés une silhouette humanoïde, l'odeur m'est connue, c'est Ishamael. Il concentre sa mana alors je me relève et bondis vers lui, elle ne bougera pas elle, elle est tétanisée. Je dois l'abattre, j'ai bien compris qu'il était un guerrier.
Mais ce que je n'avais pas prévu c'est que la magie qui me frappe est faite de lumière. Elle glisse sur moi, s'immisce en moi, il vient de m'enchaîner avec sa magie de lumière. Il hurle alors à la jeune femme de fuir, que c'est sa chance. Je me débats, je veux partir mais il renforce son emprise sur moi, les chaines de lumière se resserrent et déchirent ma peau comme si elle était fragile et c'est le cas en un sens.
Elle court, elle court vers sa liberté et moi je rugis, le loup dans la nuit hurle de colère et de frustration, Ishamael sait que ces liens ne me retiendront pas éternellement, je vais le déchiqueter même si mon corps est en lambeaux à cause de sa magie, il le sait mais sourit doucement alors qu'il parle.
- C'est pas ta faute, tu es maudit, pas plus qu'elle n'est coupable d'avoir des croyances. Tu nous as bien aidé depuis des semaines alors je vais te laisser vivre mais n'approche plus de ma caravane, jamais, sinon je te transpercerai le coeur, baigné de ma lumière, tu périras, utilise ta vie plus intelligemment gamin.
Et alors que je lutte, enragé, je me prend un violent coup à l'arrière de la tête, tout devient noir, je m'écroule inconscient. Je vais le rester quelques heures. Une plaie profonde causée par une attaque de lumière dans mon dos, une attaque de lâche à mes yeux. Je me relève alors que le jour est bien présent, la bête folle furieuse. Je pars vers le camp en courant et je trouve les restes d'une fuite nocturne précipitée. La bête veut les traquer, mais parfois, parfois j'accepte de renoncer.
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