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Citoyen du Reike
Parwan Sahriki
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Info personnage
Race: Humaine
Vocation: Combattant assassin
Alignement: Neutre bon
Rang: C
On l’avait vue traîner sa cape brune entre les rues de l’Académie et celles des casernes. A son apparence unique, l’étrangère émergeait tout droit de longues semaines passées dans les terres sauvages. Justice n’avait rien d’une ville-frontière, pourtant sa tunique révélait les plis étranges de vêtements ayant gelé plusieurs fois, leurs couleurs chaudes délavées par la terre s’infiltrant entre les mailles et qu’un rapide bain d’eau vive ne suffisait pas à déloger. En fait, le bleu de sa robe tournait au brun à mesure que celle-ci descendait sur ses genoux.
L’humidité de la neige fondue semblait ne jamais avoir vraiment quitté les pans (pourtant bien secs) de ses larges vêtements, alourdissant la silhouette de celle dont les textiles, ordinairement, flottaient au vent.
Sa démarche aussi témoignait des fatigues d’un long voyage, bien à l’écart des routes ; à travers les plaines de congères épaisses, par-dessus les enchaînements de falaises escarpées, sous un vent mordant et des températures négatives. Sa peau du centre-sekai avait perdu de sa saine pigmentation et elle s'appuyait visiblement sur son bâton de bergère pour marcher le long des rues de Justice. Par moment, elle tendait le cou et sondait la foule avec l’espoir naïf de reconnaître quelqu’un.
Pourtant, derrière ses yeux aux paupières assombries, son âme criait victoire. Un triomphe modeste, entendons nous, car c’est à ses dieux qu’elle avait offert son épreuve. Ce périple, durant lequel elle s’était jurée de n'interagir avec quiconque et de ne suivre aucun chemin existant.
Deux années de combats sanglants dans les replis des montagnes Shoumeïennes… Après des mois de félicité à guider sa disciple sous le regard des Astres, la guerrière croyait son heure venue. Elle mourrait au combat. Elle accepterait en souriant la lame du zélote qui la trancherait, la fin trop glorieuse d’un âme perdue comme la sienne.
Mais son retour saine et sauve au Reike l’avait plongée dans un profond désarroi existentiel.
Pourquoi vivre, à présent ? Comment et pour qui, si ce n’était pour sa famille et ce père qui ne voulait plus d’elle, sa fille veuve et infertile ?
Les Astres étaient restés muets à ses questions et seul son cœur criait: “Athénaïs, Athénaïs, Athénaïs…” Inlassablement.
Sa brillante et solaire disciple, son amie, celle qui ne quittait plus ses pensées. Elle voulait la retrouver, lui parler, partager du temps avec elle. Mais méritait-elle le bonheur de sa présence après cette vie d’égarement ?
N’était-ce pas justement son cœur qui l’avait dérobée à son destin glorieux en choisissant de survivre aux combats ? Ne manquait-il pas à nouveau de l’égarer hors des chemins de la foi ?
Incertaine de la volonté des Astres, elle s’était offerte à eux, entreprenant ce voyage mortel par les monts enneigés du nord de Taisen, puis à travers la toundra désolée des terres elfiques... avant d’enfin franchir les frontières de la République, coiffant le haut du lac Rebirth.
Une fois de plus, les Astres s’étaient retenus de la rappeler parmi eux. Le Soleil Tout-Puissant ne lui refusait pas sa force, et la Lune Mère éclairait encore son passage. L’esprit de Parwan était libre d’aller sous leur regard éternel, toujours errant mais libre enfin. Elle pouvait retrouver sa disciple.
___
Au cœur du quartier Reikois, dans le ciel du soir encadré des toits en tuiles rouges, Parwan parvient sur la Place au Saloir. Appuyée sur son bâton kerikh, elle sourit faiblement en voyant la petite fontaine toujours dressée au centre de l’esplanade, souvenir de leur première rencontre. Reprenant sa marche, elle réprime une grimace. Cette fatigue, chaque muscle l’appelant à se laisser choir sur le pavé et à n’en plus bouger, la nomade la connaissait intimement. La limite du corps trahissait la limite de l’âme, car le premier était vassal de la seconde. Endurer, c’était faire preuve de foi, rendre grâce au don de vie, et la Lune ne bénissait que le repos des efforts accomplis.
Alors, toute la journée, elle avait arpenté la ville avec une seule question aux lèvres: “Où se trouve Athénaïs de Noirvitrail ?”. Les couloirs de l’'Académie de Magie, où la nomade savait qu'elle avait passé plusieurs années, ne lui furent d’aucun secours. Elle plaida auprès de nombreux élèves et professeurs qui, bien que son nom leur soit connu, ne purent la renseigner et se montrèrent indifférents à sa quête.
Quant aux casernes de l’armée, dont Parwan savait qu’Athénaïs était une mage, la question fut accueillie avec la froideur et la suspicion d’une herse qu’on vous abat sur le visage.
L’armée connaissait l’affectation d’Athénaïs. Parwan le voyait dans leurs yeux. Mais ils choisissaient de se taire, l'accusant d'espionnage pour le compte de l'Empire. Quoi qu’il en soit, l’uniforme Républicain n’avait jamais été pour Parwan qu’une source de frustration et de mépris.
Bredouille, elle s’était enfin résolue à frapper au domaine Noirvitrail.
Pourquoi n’avait-elle pas commencé par là, me direz vous ? Peut-être pensait-elle qu’Athénaïs aurait fort à faire en journée, comme du temps précédant leur pèlerinage, et serait absente de la demeure ? Peut-être même serait-elle loin de Justice ? Peut-être aussi que Parwan n’était pas entièrement prête à revoir Athénaïs ?
On lui informe à la porte que la jeune femme est absente. Mais devant son insistance, on la laisse entrer pour convenir d’une entrevue avec les illustres représentants de la lignée Noirvitrail ; les géniteurs d’Athénaïs, Justinia et Constantin Noirvitrail.
Après plus d’une heure d’attente, on l’introduit dans une grande bibliothèque. L’échange est cordial mais sans chaleur.
Durant la discussion d’usage, Parwan résume très brièvement les événements survenus durant la campagne de Shoumeï et les combats auxquels elle a participé. La nomade reste vague, consciente de faire face à deux têtes influentes d’une nation concurrente et le couple ne pose pas de question supplémentaire. Décidant que l’aimable vagabonde ne leur inspire pas d’opinion déplaisante, le couple délivre sans réticence la position de leur fille: Fort Scupios.
La jeune femme en est le lieutenant. Justinia de Noirvitrail pointe même le lieu sur une carte ornant une table en verre. Une fortification au nord de Justice. Son index écrase le fort avec aplomb, comme si les couleurs familiales flottaient sur ses murailles maintenant que leur fille s’y trouvait.
La Sahriki mémorise en silence les riches informations qu’offre la carte puis prend congé, non sans avoir fait part de sa profonde gratitude à ses hôtes.
C’est l’odeur de la nuit fraîchement tombée qui l’accueille, une fois dans la rue. Parwan pourrait quitter l’enceinte de ces murs et dormir à l’abri des sous-bois, hors de cette cité éreintante. Mais à cet instant précis, son âme est un mélange de fatigue, d’impatience et de reconnaissance.
Justice, l’inamicale, la retorse, lui avait offert d’entre ses pierres la personne la plus chère à ses yeux, et une fois encore, la cité lui était bienveillante en la guidant vers elle.
Pour cela, la nomade descend jusqu’aux canaux animés et s'agenouille pour prier. Au dessus de l’onde, elle rend grâce à la Bergère Céleste. Sous ses rayons, par dessus son reflet et au milieu des passants. La nomade priant souvent seule à l’étranger, elle se sent effleurée de tous ces regards et de ces commentaires échangés sur elle. Mais sa concentration ne vacille pas. Elle se rappelle une phrase pour fortifier sa pensée : Nul regard n’est plus intense que celui des Astres.
Alors qu’elle se relève, quelques jeunes assis par terre autour d’un brasero s’approchent et lui offrent des brochettes de poisson, ajoutant même qu’elle avait “la classe”. Parwan accepte chaleureusement et s’éloigne avec son dîner, laissant les jeunes avec sa bénédiction, ce qui semble les réjouir.
Elle disparaît sous un pont plus à l’est, là où les parapets s'agrandissent autour des canaux, et où il faut s’y pencher pour voir qui s’y trouve. Ni rat, ni rôdeur ne vient la troubler pour la nuit.
Aux aurores, on la voit se rendre jusqu’aux quais pour prier le Soleil avant de se mettre en marche vers le nord.
Laissant les remparts de la ville dans son dos, Parwan s’enfonce dans la campagne avec une certitude retrouvée. Elle sourit, même. Elle se rendait voir un officier, elle avait hâte de la féliciter !
Au zénith, elle trouve un groupe de métayers abrités sous un verger afin d'identifier les baies qu’elle a ramassé en chemin. Il se trouve que seuls les petits fruits oblongs à la teinte laiteuse et violâtre sont comestibles. Elle n’a pas le loisir de partager la fraicheur du verger car un lanconda titanesque déroule brusquement sa masse tordue à la lisière du bois, causant la fuite du groupe en direction du hameau.
Depuis le retour des Titans, la forêt est moins sûre que jamais pour les habitants hors des villes et les créatures de grandes tailles sont régulièrement signalées proches des grands axes. La vagabonde des sables n’était pas taillée pour cette végétation claustrophobique et les rassemblements d’arbres ne lui avaient jamais inspiré que suspicion.
Avec une vigilance redoublée, elle rallie Fort Scupios en début d’après-midi sans autre mauvaise rencontre.
La caserne repose, naturelle, au centre d’une large avancée terrestre sur le lac Rebirth, et dont on devine au loin les côtes ouest, nord et est.
Les abords des murs sont vierges de la moindre broussaille dans un périmètre de cent cinquante pieds ; les souches d’arbres dans différents états de décomposition témoignent de l’appétit en bois de la vieille fortification.
Fort Scupios est un palimpseste de pierre grise, exhibant à sa surface, le témoignage de multiples démantèlements, reconstructions, incendies et éboulements. Ses murailles hautes et inégales, toutes en subtiles avancées et creusements, montrent ici les traces d’anciennes arches couvertes, indiquant un usage civil dans un lointain passé. Là, le mur intérieur d’un pigeonnier dont les briques arrachée servaient maintenant au corps d’une haute barbacane au-dessus de l’entrée. La taille de certaines pierres remontait à si loin que leur surface retournait à l’état de rocaille et que les appliques de fer destinées à leur maintien pleuraient leur oxydation brune sur plusieurs mètres en dessous d’elles.
La nomade déglutit à l'approche du fort. Elle avait presque oublié que pour atteindre Athénaïs, elle devrait d’abord composer avec ses soldats. Que faire si l’entrée lui était refusée ? Si sa demande n’atteignait jamais les oreilles de son amie ? S’ils la rejettaient comme aux casernes de Justice ? Elle entretenait l’espoir d’une différente mentalité en pleine campagne mais l’incertitude lui labourait progressivement l’estomac.
Il serait si simple de forger un mensonge, une urgence factice qui pousse les gardes à la mener devant leur maître. Mais Parwan est une Sahriki de sang, craignant les dieux et le regard des ancêtres, préférant la mort que de voir un mensonge quitter sa bouche. Face à la tragique tentation de la duperie, Parwan se rappelle à quel point il était ardu de garder son honneur intact.
Son regard se durcit et sa prise se raffermit sur son bâton de marche. C’est l’âme pure qu’elle se tiendrait devant Athénaïs.
Les herses levées sont tenues par trois sentinelles en uniforme. Les énormes panneaux de bois servant à refermer les portes semblent ne pas avoir bougé sur leurs gonds depuis une décennie.
Le passage est assez large pour faire circuler une charrette de grande taille et la haute voûte abimée sur la longueur témoigne du haut dégagement de certains chargements.
Dès qu’elle franchit le seuil, les trois soldats se mettent dans le passage de l’étrangère. Elle s’arrête.
“Qu’est ce qu’on a là ? Z’êtes perdue, madame ?” Demande une garde au visage rougeaud sous son casque.
Parwan plante ses yeux dans les siens et lui répond. L’intensité de son regard incommode visiblement la troupière qui ne parvient à le soutenir plus d’un quart de seconde à la fois, se grattant le nez et se mordant nonchalamment l'intérieur des lèvres pour se donner une contenance.
“Je m’appelle Parwan Sahriki, ma sœur. Je viens de loin pour rencontrer le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail.”
Le deuxième soldat, un jeune à à la barbe impertinente et clairsemée, considérablement voûté sur son arbalète, pousse un petit “Hah !” silencieux, raillant sans doute son accent et la substance de sa requête. La troisième, leur supérieure sans doute, est une mage. Parwan le devine à son absence apparente d’arme blanche et aux amulettes qui ornent son cou. Ses cheveux blonds pendent de sa tête, tels les rideaux d’un théâtre de marionnettes, et ses yeux… Lorsque les deux femmes se tournent l’une vers l’autre, Parwan fait immédiatement le deuil d’un échange raisonnable. La magicienne ressemble à Athénaïs dans ses expressions, la confiance de celles qui lisent beaucoup de grands livres, le port droit d’une fille de bonne famille… à la différence d’un sourire dépourvu de toute bienveillance. Cette femme lorgne Parwan comme si son esprit était incapable de pensées complexes.
“Et quelles… affaires as-tu avec elle ?”
“Athénaïs est mon amie. Je veux simplement la voir."
“C’est le prétexte le minable que j’ai jamais entendu. Tu veux pas directement nous dire où tu comptes la planter entre les côtes, par hasard ?” rétorque le jeune arbalétrier.
“Mais… Je ne suis pas un assassin ! AthénaÏs était ma disciple, je l’ai initiée à la vérité du Shierak et… ” Antithéiste bas du front, le jeunot éclate de rire, vite rejoint par sa collègue au casque, avide de participer aux brimades.
“Le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail (la blonde met de l’emphase dans sa prononciation), archimage renommée, deux fois diplômée de Magic, écouterait passionnément les divagations d’une barbare poussiéreuse et ses dieux de conte pour enfant ? J’en. Doute.”
L’éclat orangé dans les yeux de Parwan se refroidit d’une teinte mortelle.
“L’ignorance ne pardonne pas le blasphème, ma sœur.” prévient-elle entre ses dents. “Excuse toi et laisse moi passer.”
“Mmh, non.” lâche la mage d’un air provocateur, s’approchant de son visage en souriant. Les deux gardes qui la flanquent affichent un sourire réjouit, voyant que la situation s’apprête à s’envenimer et qu’ils pourraient volontiers prendre part à l’action. “Tu n’iras nul part. Tu vas retourner vendre des tapis dans ton empire d’arriérés avaleurs de sable, et ta “disciple” ne saura jamais que tu étais ici, pleurnichant à sa port...”
Parwan crache au visage de la magicienne.
La salive transparente s’étale sur son nez et en travers de ses lèvres, provoquant un mouvement de recul et un glapissement étouffé.
Les deux gardes sont trop estomaqués pour réagir. Ils se tournent vers la magicienne furieuse. Elle veut leur dire de se saisir de la contrevenante mais se rappelle qu’elle ne peut ouvrir la bouche. Muette mais hors d’elle, la blonde foudroie Parwan du regard à l’instant où celle-ci renchérit sur un ton affectueux:
“Traînée.”
L’insulte obtient le résultat escompté.
Les pupilles de la blonde s’embrasent littéralement alors que son bras gauche canalise une flamme prête à surgir au creux de sa main. Le sourire de la Sahriki s’agrandit alors qu’elle adopte une posture de combat qui fait gonfler sa cape.
Une “Feu”, Parwan n’aurait pu rêver mieux. Pourtant, ses vêtements imploraient à une flamme de venir s’y loger pour la transformer en torche humaine. Mais inviter l’attaque pour mieux la contrer était une méthode privilégiée des femmes Sahrikis. Et la pyromancienne répond à l’invitation.
Aveuglée par la rage, elle oublie toute discipline et frappe sauvagement pour relâcher son jet de flammes directement sur la poitrine de la nomade.
Au lieu de reculer, Parwan comble l’écart et agrippe son poignet, l’attirant à elle en enfonçant son genou dans son bas-ventre. Derrière sa cape, la main vomit un cône de chaleur ardente qui s’échappe de la gueule du bâtiment.
Toujours maître de son adversaire, Parwan déroute le jet de flammes sur la lancière qui bascule contre le mur en gesticulant désespérément. Avant qu’elle n’atteigne l’arbalétrier, la magicienne, toujours contrainte en équerre, déroute son mana vers son bras droit et sauve son camarade.
Mais Parwan, voyant que sa captive s’apprête à enflammer ses jambes de sa main libre, la projette vers l’arbalétrier pour le déstabiliser. Celui-ci s’écarte par réflexe pour dégainer son glaive, ce qui cause à la pyromancienne de perdre l’équilibre et de réceptionner son crâne contre la paroi de briques, produisant un son mat et sinistre.
La réalisation de son erreur cause la perte du jeune soldat. Il baisse les yeux un court instant et calcule mal sa parade, manquant la trajectoire du long bâton qui vient percuter son casque de plein fouet. Son corps fait un tour complet sur lui-même avant de s’étaler au sol en plein milieu du passage.
Le fracas de l’armure contre le pavé et les hurlements paniqués de la lancière essayant de s’éteindre en se roulant par terre arrêtent un groupe de soldats manutentionnaires à l'autre bout du passage.
“Eh mais il se passe quoi là bas ?! Eh ! Vous ! Arrêtez-vous !”
Mais la Sahriki est déjà sur eux. Son expression est fermée et pleine d’une détermination funeste alors que les coups s’abattent. Plus moyen de reculer à présent. Elle s’est faite l’ennemie de tous ceux qui habitaient ces murs. Athénaïs compris. Dès son affront au visage de la pyromancienne, elle s’y était résolue et les vaincrait un par un, si cela lui permettait de la revoir une dernière fois.
Même si cela signifiait se battre contre elle, même si elle la haïssait, même si elle la rejetait, même si elle l’exécutait ou la jetait aux fers pour toujours.
Les dieux le lui avaient autorisé; elle écouterait son cœur parler. Et il lui criait des folies qu’elle n’avait jamais entendu auparavant:
“Ta vie, ton honneur et ta liberté, tout cela ne vaut rien à côté d’une dernière image d’elle. Bats-toi et trouve la !”
La nomade n'en revient pas d’acquiescer de plein gré à cette passion, de voir que la raison l’a abandonnée.
Mais elle l’aimait.
Elle le comprenait à présent.
Athénaïs était l’âme sœur qu’elle avait cherché toute sa vie.
Au milieu d’un parterre de soldats gémissant au sol, Parwan évalue son environnement. La galerie couverte où elle se tient encadre une cour large à un étage. Dans les galeries, des soldats. Dans la cour, des soldats. Une forêt de tonneaux empilés, d’armes défiant le ciel sur leurs râteliers, de sacs de jute entassés, de matériel, d’engins de siège sous des toiles de tentes… et la rumeur d’un combat à l’entrée qui se répand.
Parwan doit se rendre à l’étage. C’est là qu’elle trouvera son officier. En face d’elle, trop d’adversaires. A sa gauche, la galerie longe une seconde cour et au bout, un escalier de pierre.
D’autres soldats, peinant encore à saisir la situation, s’approchent et interpellent Parwan à leur tour.
La nomade saisit une torche sur son applique et la jette sur un tas de fourrage, puis d’un coup de bâton, affale la toile de tente qui couvrait l’ensemble avant de s’enfuir.
La troupe qui arrive sur les lieux ne sait que faire entre éteindre le départ de feu, assister les blessés, garder l’entrée et poursuivre l'intrus. Rapidement, pourtant, on crie de sonner l’alerte.
Parwan surgit dans le cloître de la seconde cour. Une demi-douzaine de troupiers républicains se tiennent sur son chemin, abasourdis. Sekai n’est plus en guerre et aucun habitant du fort, niché au cœur du territoire, ne s’attendait à une attaque, d’autant moins menée par une seule personne en pleine journée.
En dépit du nombre, les chances sont en sa faveur, estime Parwan. C’est une troupe en pleine dissonance cognitive qu’elle affronte. Beaucoup n’ont pas un rôle combattant, leur posture de combat fait défaut et leurs frappes sortent tout droit d’un manuel, les exposant systématiquement à une contre-attaque dévastatrice.
Ses adversaires se font plus nombreux. Elle enfonce des casques, déboite des mâchoires, brise des nez, casse des dents, éborgne des paupières et fend des côtes. Alors même que les renforts cherchent son dos, elle les tient à distance avec l’aisance d’une véritable guerrière du Reike.
Combattre dans un escalier est éreintant et lui réclame des réserves qui ne se reconstituent pas en une nuit. Elle traite chaque humain, elfe ou nain comme un contretemps à neutraliser rapidement.
Le chaos ambiant et l’impréparation empêche aux soldats descendant le large escalier et à ceux qui le montent de coordonner leurs attaques sur la dangereuse nomade. Les officiers en arrière aboient des ordres contradictoires rajoutant à la confusion. Ceux qui rassemblent le courage pour s’approcher et porter un coup dévalent généralement les marches l’instant d’après dans un cri de douleur. Petit à petit, la panique s'installe parmi ceux qui tentent de lui bloquer le passage, oubliant leur entrainement et agitant leur arme en tout sens, comme pour intimider une bête sauvage.
Parwan atteint pourtant l’étage et reprend sa course. Désavantagée en intérieur, ses coups se font plus violents. Les adversaires qu’elle rencontre sont maintenant tout à fait équipés.
Son rythme ralentit, confrontée à des boucliers tentant de la bloquer plutôt que de la vaincre.
La nomade respire bruyamment, elle s'essouffle, vérifiant les pièces une par une, enfonçant des portes sans trouver l’objet de sa quête. Plus bas dans la cour, la cloche d’alarme sonne sans répit, .
Parvenue à un croisement, elle pile. Derrière elle et a sa gauche, le gros de la troupe. D’autres gardes espérant la devancer au carrefour. Devant elle dans le couloir, deux mages étendent leur bras et Parwan est immédiatement prise d’un violent mal de tête qui lui brouille la vue. La seconde, une gobeline pensant bien faire, prévient: “Attention les yeux !” laissant à Parwan le temps de se protéger sous sa cape alors que l’espace est brusquement inondé d’un rayon de lumière pure, aveuglant tous les combattants malgré leurs paupières closes.
Parwan, à moitié sonnée, s’extirpe à droite et déboule dans une salle circulaire, au premier étage de la tour centrale. Elle ferme la porte derrière elle et abat le minuscule verrou qui ne devait jamais servir.
Au même moment, trois épéistes en armure intégrale apparaissent à l’autre bout de la pièce et, à l’unisson, mettent la lame au clair.
La nomade serre les dents, leur posture est excellente.
Elle s’approche et assaille le premier qui recule et manque de perdre l’équilibre face à son enchaînement. Une attaque en vrille repousse les deux autres arrivant dans son dos. Elle détourne un estoc et frappe le troisième en pleine visière. Sortant de l’encerclement, Parwan se jette en salto arrière par dessus une table, provoquant l’envol d’une pile de parchemins.
Le combat se poursuit pied à pied avec les trois épéistes. Les échanges sont intenses et la Sahriki affaiblie est sur la défensive. Les rares fentes qu’elle produit n’atteignent que leur plastron. Ses trois opposants n’ont rien de prodiges mais ils s’entendent parfaitement, ne lui laissant que très peu d’ouvertures.
Sa mana épaule chacune de ses esquives, elle est un tourbillon, agile, insaisissable.
Soudain, le verrou de la porte explose. La porte cède sous la charge de ses poursuivants et le gros de la troupe surgit dans ce chaos qui lui était propre.
Un capitaine, un oni dominant l’assemblée de plusieurs têtes, grogne et s’avance en faisant tournoyer une chaîne dentée de bas en haut.
Il n’a que faire de ce duel et, alors qu’un nouveau groupe d’officiers en armure fait irruption d’une autre porte, l’oni bouscule ses hommes pour se donner le champ libre et libère la chaîne. Le fouet d’acier trouve la cheville de la nomade et referme ses dents sur elle.
Parwan tente de s’en défaire mais le capitaine la ramène à lui comme un pêcheur. Elle doit redoubler d’adresse pour repousser les trois épéistes qui tentent de transpercer sa jambe libre. Lorsqu’elle sera à portée, elle fera volte-face et frappera l’oni au visage pour le faire lâcher prise.
Parwan tourne le regard pour juger la distance qui lui reste...
...et c’est là qu’elle les voit.
Au milieu des officiers, encadrés d’une rivière sombre de cheveux bouclés, régnant sur les reliefs de son visage au teint châtaigne, les yeux d’Athénaïs, aux couleurs du ciel d’été.
L’image de sa républicaine brûle dans sa rétine et dérobe toute son attention. Plus rien n’importe pour Parwan car son coeur est en paix. Le visage de la nomade s’illumine d’un sourire de joie pure et elle s’exclame dans un souffle:
“Athénaïs !”
…avant qu'un coup de matraque assené par le capitaine ne lui fasse perdre connaissance. Parwan s’écroule inanimée sur le plancher.
…
Un temps indéterminé s’écoule.
Aveuglée par un bandeau, menottée, on la traîne sur les genoux dans des sous-sols aux pavés humides.
Une fois arrivés, on la jette contre des barreaux, on l’immobilise, puis on afflige son visage d'une série de gifles et de violents revers de main. Ses geôliers, certains avides de rétribution, l’agonisent d’injures.
Elle est poussée au fond d’un cachot. Les fers à ses poignets sont accrochés à une chaîne qui les soulèvent au-dessus de sa tête et suspendent la captive à quelques centimètres du sol.
Un inconnu à la respiration forte la dépouille de sa cape et de son écharpe. Il lui arrache son voile et son chapeau plat, dévoilant sa longue tresse à la vue de tous avant de la frapper une dernière fois au visage.
Alors, le tortionnaire la prive de ses bottes et dépouille ses jambes de leur pantalon. Ses mains viennent vicieusement pincer l'intérieur de ses cuisses en remontant sous sa robe.
Parwan pousse un cri paniqué et se débat, son talon rencontrant à pleine vitesse le nez du déviant qui mugit de douleur. Une voix sérieuse, provenant de derrière la grille l’interpelle, fatiguée des actions de son collègue.
“Hé, arrête tes conneries et sort de là, on a autre chose à foutre !”
Le tortionnaire tire rageusement la tresse de Parwan en arrière, la laissant échapper un gémissement, et susurre dans son oreille:
“Tu vas recevoir beeeaucoup de visites, la sauvage. Profite bien…”
La grille de la cellule se claque avec fracas, on entend un tour de clé et plusieurs personnes s’éloigner, laissant Parwan seule avec le bruit des gouttes d’eau sur le sol et le léger balancement de sa chaîne au-dessus du vide.
Elle garde la tête en arrière quelques instants, craignant pour sa nuque.
Contraintes de soutenir tout son poids, Parwan sent le fer des menottes s'enfoncer dans ses poignets. Elle s'étire sur la pointe des pieds, mais ses extrémités ne parviennent qu'à effleurer le sol inégal au hasard de ses balancements.
Lentement, elle bascule sa tête en avant. Son crâne la lançe à l’endroit du coup de matraque et ses joues la brûlent après les gifles répétées. La nomade se sent sale et humiliée, indécente de savoir ses cheveux exposés à la vue de tous, de sentir ses jambes pendre à l’air libre sous sa robe. Elle se sent nue sans son écharpe, sans sa cape sur ses épaules.
“C’est le lot des vaincus.” Se répète-elle sans parvenir à contenir son angoisse grandissante. "C'est le lot des vaincus..."
Car ils allaient revenir. Ils reviendraient et ils...
Pour la première fois depuis des années, la peur submerge Parwan. Son visage se crispe. Elle se mord la lèvre pour se reprendre.
Alors, l’image nouvelle d’Athénaïs lui apparait
Son visage, son expression déconcertée, s’imprime dans l'obscurité et apaise doucement son cœur.
" Son regard est plus beau que jamais." pense-t-elle en souriant faiblement.
Et sa poitrine se gonfle d'un soulagement inexplicable.
Un soupir. La nomade avait donc bien sacrifié sa liberté et son honneur pour une dernière image d’elle.
C'était ainsi, Parwan n’aurait jamais connu le repos avant de la revoir.
Car la paix de son âme valait mille fois les tourments de son corps.
Il n'existait pas d’autre issue, elle le savait.
Alors que, dans le silence de sa cellule, Parwan accepte progressivement son sort, son seul regret est de réaliser qu’aucune de ses prières n'atteindrait plus ses dieux d'ici.
Elle aurait aimé entendre sa voix.
L’humidité de la neige fondue semblait ne jamais avoir vraiment quitté les pans (pourtant bien secs) de ses larges vêtements, alourdissant la silhouette de celle dont les textiles, ordinairement, flottaient au vent.
Sa démarche aussi témoignait des fatigues d’un long voyage, bien à l’écart des routes ; à travers les plaines de congères épaisses, par-dessus les enchaînements de falaises escarpées, sous un vent mordant et des températures négatives. Sa peau du centre-sekai avait perdu de sa saine pigmentation et elle s'appuyait visiblement sur son bâton de bergère pour marcher le long des rues de Justice. Par moment, elle tendait le cou et sondait la foule avec l’espoir naïf de reconnaître quelqu’un.
Pourtant, derrière ses yeux aux paupières assombries, son âme criait victoire. Un triomphe modeste, entendons nous, car c’est à ses dieux qu’elle avait offert son épreuve. Ce périple, durant lequel elle s’était jurée de n'interagir avec quiconque et de ne suivre aucun chemin existant.
Deux années de combats sanglants dans les replis des montagnes Shoumeïennes… Après des mois de félicité à guider sa disciple sous le regard des Astres, la guerrière croyait son heure venue. Elle mourrait au combat. Elle accepterait en souriant la lame du zélote qui la trancherait, la fin trop glorieuse d’un âme perdue comme la sienne.
Mais son retour saine et sauve au Reike l’avait plongée dans un profond désarroi existentiel.
Pourquoi vivre, à présent ? Comment et pour qui, si ce n’était pour sa famille et ce père qui ne voulait plus d’elle, sa fille veuve et infertile ?
Les Astres étaient restés muets à ses questions et seul son cœur criait: “Athénaïs, Athénaïs, Athénaïs…” Inlassablement.
Sa brillante et solaire disciple, son amie, celle qui ne quittait plus ses pensées. Elle voulait la retrouver, lui parler, partager du temps avec elle. Mais méritait-elle le bonheur de sa présence après cette vie d’égarement ?
N’était-ce pas justement son cœur qui l’avait dérobée à son destin glorieux en choisissant de survivre aux combats ? Ne manquait-il pas à nouveau de l’égarer hors des chemins de la foi ?
Incertaine de la volonté des Astres, elle s’était offerte à eux, entreprenant ce voyage mortel par les monts enneigés du nord de Taisen, puis à travers la toundra désolée des terres elfiques... avant d’enfin franchir les frontières de la République, coiffant le haut du lac Rebirth.
Une fois de plus, les Astres s’étaient retenus de la rappeler parmi eux. Le Soleil Tout-Puissant ne lui refusait pas sa force, et la Lune Mère éclairait encore son passage. L’esprit de Parwan était libre d’aller sous leur regard éternel, toujours errant mais libre enfin. Elle pouvait retrouver sa disciple.
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Au cœur du quartier Reikois, dans le ciel du soir encadré des toits en tuiles rouges, Parwan parvient sur la Place au Saloir. Appuyée sur son bâton kerikh, elle sourit faiblement en voyant la petite fontaine toujours dressée au centre de l’esplanade, souvenir de leur première rencontre. Reprenant sa marche, elle réprime une grimace. Cette fatigue, chaque muscle l’appelant à se laisser choir sur le pavé et à n’en plus bouger, la nomade la connaissait intimement. La limite du corps trahissait la limite de l’âme, car le premier était vassal de la seconde. Endurer, c’était faire preuve de foi, rendre grâce au don de vie, et la Lune ne bénissait que le repos des efforts accomplis.
Alors, toute la journée, elle avait arpenté la ville avec une seule question aux lèvres: “Où se trouve Athénaïs de Noirvitrail ?”. Les couloirs de l’'Académie de Magie, où la nomade savait qu'elle avait passé plusieurs années, ne lui furent d’aucun secours. Elle plaida auprès de nombreux élèves et professeurs qui, bien que son nom leur soit connu, ne purent la renseigner et se montrèrent indifférents à sa quête.
Quant aux casernes de l’armée, dont Parwan savait qu’Athénaïs était une mage, la question fut accueillie avec la froideur et la suspicion d’une herse qu’on vous abat sur le visage.
L’armée connaissait l’affectation d’Athénaïs. Parwan le voyait dans leurs yeux. Mais ils choisissaient de se taire, l'accusant d'espionnage pour le compte de l'Empire. Quoi qu’il en soit, l’uniforme Républicain n’avait jamais été pour Parwan qu’une source de frustration et de mépris.
Bredouille, elle s’était enfin résolue à frapper au domaine Noirvitrail.
Pourquoi n’avait-elle pas commencé par là, me direz vous ? Peut-être pensait-elle qu’Athénaïs aurait fort à faire en journée, comme du temps précédant leur pèlerinage, et serait absente de la demeure ? Peut-être même serait-elle loin de Justice ? Peut-être aussi que Parwan n’était pas entièrement prête à revoir Athénaïs ?
On lui informe à la porte que la jeune femme est absente. Mais devant son insistance, on la laisse entrer pour convenir d’une entrevue avec les illustres représentants de la lignée Noirvitrail ; les géniteurs d’Athénaïs, Justinia et Constantin Noirvitrail.
Après plus d’une heure d’attente, on l’introduit dans une grande bibliothèque. L’échange est cordial mais sans chaleur.
Durant la discussion d’usage, Parwan résume très brièvement les événements survenus durant la campagne de Shoumeï et les combats auxquels elle a participé. La nomade reste vague, consciente de faire face à deux têtes influentes d’une nation concurrente et le couple ne pose pas de question supplémentaire. Décidant que l’aimable vagabonde ne leur inspire pas d’opinion déplaisante, le couple délivre sans réticence la position de leur fille: Fort Scupios.
La jeune femme en est le lieutenant. Justinia de Noirvitrail pointe même le lieu sur une carte ornant une table en verre. Une fortification au nord de Justice. Son index écrase le fort avec aplomb, comme si les couleurs familiales flottaient sur ses murailles maintenant que leur fille s’y trouvait.
La Sahriki mémorise en silence les riches informations qu’offre la carte puis prend congé, non sans avoir fait part de sa profonde gratitude à ses hôtes.
C’est l’odeur de la nuit fraîchement tombée qui l’accueille, une fois dans la rue. Parwan pourrait quitter l’enceinte de ces murs et dormir à l’abri des sous-bois, hors de cette cité éreintante. Mais à cet instant précis, son âme est un mélange de fatigue, d’impatience et de reconnaissance.
Justice, l’inamicale, la retorse, lui avait offert d’entre ses pierres la personne la plus chère à ses yeux, et une fois encore, la cité lui était bienveillante en la guidant vers elle.
Pour cela, la nomade descend jusqu’aux canaux animés et s'agenouille pour prier. Au dessus de l’onde, elle rend grâce à la Bergère Céleste. Sous ses rayons, par dessus son reflet et au milieu des passants. La nomade priant souvent seule à l’étranger, elle se sent effleurée de tous ces regards et de ces commentaires échangés sur elle. Mais sa concentration ne vacille pas. Elle se rappelle une phrase pour fortifier sa pensée : Nul regard n’est plus intense que celui des Astres.
Alors qu’elle se relève, quelques jeunes assis par terre autour d’un brasero s’approchent et lui offrent des brochettes de poisson, ajoutant même qu’elle avait “la classe”. Parwan accepte chaleureusement et s’éloigne avec son dîner, laissant les jeunes avec sa bénédiction, ce qui semble les réjouir.
Elle disparaît sous un pont plus à l’est, là où les parapets s'agrandissent autour des canaux, et où il faut s’y pencher pour voir qui s’y trouve. Ni rat, ni rôdeur ne vient la troubler pour la nuit.
Aux aurores, on la voit se rendre jusqu’aux quais pour prier le Soleil avant de se mettre en marche vers le nord.
Laissant les remparts de la ville dans son dos, Parwan s’enfonce dans la campagne avec une certitude retrouvée. Elle sourit, même. Elle se rendait voir un officier, elle avait hâte de la féliciter !
Au zénith, elle trouve un groupe de métayers abrités sous un verger afin d'identifier les baies qu’elle a ramassé en chemin. Il se trouve que seuls les petits fruits oblongs à la teinte laiteuse et violâtre sont comestibles. Elle n’a pas le loisir de partager la fraicheur du verger car un lanconda titanesque déroule brusquement sa masse tordue à la lisière du bois, causant la fuite du groupe en direction du hameau.
Depuis le retour des Titans, la forêt est moins sûre que jamais pour les habitants hors des villes et les créatures de grandes tailles sont régulièrement signalées proches des grands axes. La vagabonde des sables n’était pas taillée pour cette végétation claustrophobique et les rassemblements d’arbres ne lui avaient jamais inspiré que suspicion.
Avec une vigilance redoublée, elle rallie Fort Scupios en début d’après-midi sans autre mauvaise rencontre.
La caserne repose, naturelle, au centre d’une large avancée terrestre sur le lac Rebirth, et dont on devine au loin les côtes ouest, nord et est.
Les abords des murs sont vierges de la moindre broussaille dans un périmètre de cent cinquante pieds ; les souches d’arbres dans différents états de décomposition témoignent de l’appétit en bois de la vieille fortification.
Fort Scupios est un palimpseste de pierre grise, exhibant à sa surface, le témoignage de multiples démantèlements, reconstructions, incendies et éboulements. Ses murailles hautes et inégales, toutes en subtiles avancées et creusements, montrent ici les traces d’anciennes arches couvertes, indiquant un usage civil dans un lointain passé. Là, le mur intérieur d’un pigeonnier dont les briques arrachée servaient maintenant au corps d’une haute barbacane au-dessus de l’entrée. La taille de certaines pierres remontait à si loin que leur surface retournait à l’état de rocaille et que les appliques de fer destinées à leur maintien pleuraient leur oxydation brune sur plusieurs mètres en dessous d’elles.
La nomade déglutit à l'approche du fort. Elle avait presque oublié que pour atteindre Athénaïs, elle devrait d’abord composer avec ses soldats. Que faire si l’entrée lui était refusée ? Si sa demande n’atteignait jamais les oreilles de son amie ? S’ils la rejettaient comme aux casernes de Justice ? Elle entretenait l’espoir d’une différente mentalité en pleine campagne mais l’incertitude lui labourait progressivement l’estomac.
Il serait si simple de forger un mensonge, une urgence factice qui pousse les gardes à la mener devant leur maître. Mais Parwan est une Sahriki de sang, craignant les dieux et le regard des ancêtres, préférant la mort que de voir un mensonge quitter sa bouche. Face à la tragique tentation de la duperie, Parwan se rappelle à quel point il était ardu de garder son honneur intact.
Son regard se durcit et sa prise se raffermit sur son bâton de marche. C’est l’âme pure qu’elle se tiendrait devant Athénaïs.
Les herses levées sont tenues par trois sentinelles en uniforme. Les énormes panneaux de bois servant à refermer les portes semblent ne pas avoir bougé sur leurs gonds depuis une décennie.
Le passage est assez large pour faire circuler une charrette de grande taille et la haute voûte abimée sur la longueur témoigne du haut dégagement de certains chargements.
Dès qu’elle franchit le seuil, les trois soldats se mettent dans le passage de l’étrangère. Elle s’arrête.
“Qu’est ce qu’on a là ? Z’êtes perdue, madame ?” Demande une garde au visage rougeaud sous son casque.
Parwan plante ses yeux dans les siens et lui répond. L’intensité de son regard incommode visiblement la troupière qui ne parvient à le soutenir plus d’un quart de seconde à la fois, se grattant le nez et se mordant nonchalamment l'intérieur des lèvres pour se donner une contenance.
“Je m’appelle Parwan Sahriki, ma sœur. Je viens de loin pour rencontrer le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail.”
Le deuxième soldat, un jeune à à la barbe impertinente et clairsemée, considérablement voûté sur son arbalète, pousse un petit “Hah !” silencieux, raillant sans doute son accent et la substance de sa requête. La troisième, leur supérieure sans doute, est une mage. Parwan le devine à son absence apparente d’arme blanche et aux amulettes qui ornent son cou. Ses cheveux blonds pendent de sa tête, tels les rideaux d’un théâtre de marionnettes, et ses yeux… Lorsque les deux femmes se tournent l’une vers l’autre, Parwan fait immédiatement le deuil d’un échange raisonnable. La magicienne ressemble à Athénaïs dans ses expressions, la confiance de celles qui lisent beaucoup de grands livres, le port droit d’une fille de bonne famille… à la différence d’un sourire dépourvu de toute bienveillance. Cette femme lorgne Parwan comme si son esprit était incapable de pensées complexes.
“Et quelles… affaires as-tu avec elle ?”
“Athénaïs est mon amie. Je veux simplement la voir."
“C’est le prétexte le minable que j’ai jamais entendu. Tu veux pas directement nous dire où tu comptes la planter entre les côtes, par hasard ?” rétorque le jeune arbalétrier.
“Mais… Je ne suis pas un assassin ! AthénaÏs était ma disciple, je l’ai initiée à la vérité du Shierak et… ” Antithéiste bas du front, le jeunot éclate de rire, vite rejoint par sa collègue au casque, avide de participer aux brimades.
“Le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail (la blonde met de l’emphase dans sa prononciation), archimage renommée, deux fois diplômée de Magic, écouterait passionnément les divagations d’une barbare poussiéreuse et ses dieux de conte pour enfant ? J’en. Doute.”
L’éclat orangé dans les yeux de Parwan se refroidit d’une teinte mortelle.
“L’ignorance ne pardonne pas le blasphème, ma sœur.” prévient-elle entre ses dents. “Excuse toi et laisse moi passer.”
“Mmh, non.” lâche la mage d’un air provocateur, s’approchant de son visage en souriant. Les deux gardes qui la flanquent affichent un sourire réjouit, voyant que la situation s’apprête à s’envenimer et qu’ils pourraient volontiers prendre part à l’action. “Tu n’iras nul part. Tu vas retourner vendre des tapis dans ton empire d’arriérés avaleurs de sable, et ta “disciple” ne saura jamais que tu étais ici, pleurnichant à sa port...”
Parwan crache au visage de la magicienne.
La salive transparente s’étale sur son nez et en travers de ses lèvres, provoquant un mouvement de recul et un glapissement étouffé.
Les deux gardes sont trop estomaqués pour réagir. Ils se tournent vers la magicienne furieuse. Elle veut leur dire de se saisir de la contrevenante mais se rappelle qu’elle ne peut ouvrir la bouche. Muette mais hors d’elle, la blonde foudroie Parwan du regard à l’instant où celle-ci renchérit sur un ton affectueux:
“Traînée.”
L’insulte obtient le résultat escompté.
Les pupilles de la blonde s’embrasent littéralement alors que son bras gauche canalise une flamme prête à surgir au creux de sa main. Le sourire de la Sahriki s’agrandit alors qu’elle adopte une posture de combat qui fait gonfler sa cape.
Une “Feu”, Parwan n’aurait pu rêver mieux. Pourtant, ses vêtements imploraient à une flamme de venir s’y loger pour la transformer en torche humaine. Mais inviter l’attaque pour mieux la contrer était une méthode privilégiée des femmes Sahrikis. Et la pyromancienne répond à l’invitation.
Aveuglée par la rage, elle oublie toute discipline et frappe sauvagement pour relâcher son jet de flammes directement sur la poitrine de la nomade.
Au lieu de reculer, Parwan comble l’écart et agrippe son poignet, l’attirant à elle en enfonçant son genou dans son bas-ventre. Derrière sa cape, la main vomit un cône de chaleur ardente qui s’échappe de la gueule du bâtiment.
Toujours maître de son adversaire, Parwan déroute le jet de flammes sur la lancière qui bascule contre le mur en gesticulant désespérément. Avant qu’elle n’atteigne l’arbalétrier, la magicienne, toujours contrainte en équerre, déroute son mana vers son bras droit et sauve son camarade.
Mais Parwan, voyant que sa captive s’apprête à enflammer ses jambes de sa main libre, la projette vers l’arbalétrier pour le déstabiliser. Celui-ci s’écarte par réflexe pour dégainer son glaive, ce qui cause à la pyromancienne de perdre l’équilibre et de réceptionner son crâne contre la paroi de briques, produisant un son mat et sinistre.
La réalisation de son erreur cause la perte du jeune soldat. Il baisse les yeux un court instant et calcule mal sa parade, manquant la trajectoire du long bâton qui vient percuter son casque de plein fouet. Son corps fait un tour complet sur lui-même avant de s’étaler au sol en plein milieu du passage.
Le fracas de l’armure contre le pavé et les hurlements paniqués de la lancière essayant de s’éteindre en se roulant par terre arrêtent un groupe de soldats manutentionnaires à l'autre bout du passage.
“Eh mais il se passe quoi là bas ?! Eh ! Vous ! Arrêtez-vous !”
Mais la Sahriki est déjà sur eux. Son expression est fermée et pleine d’une détermination funeste alors que les coups s’abattent. Plus moyen de reculer à présent. Elle s’est faite l’ennemie de tous ceux qui habitaient ces murs. Athénaïs compris. Dès son affront au visage de la pyromancienne, elle s’y était résolue et les vaincrait un par un, si cela lui permettait de la revoir une dernière fois.
Même si cela signifiait se battre contre elle, même si elle la haïssait, même si elle la rejetait, même si elle l’exécutait ou la jetait aux fers pour toujours.
Les dieux le lui avaient autorisé; elle écouterait son cœur parler. Et il lui criait des folies qu’elle n’avait jamais entendu auparavant:
“Ta vie, ton honneur et ta liberté, tout cela ne vaut rien à côté d’une dernière image d’elle. Bats-toi et trouve la !”
La nomade n'en revient pas d’acquiescer de plein gré à cette passion, de voir que la raison l’a abandonnée.
Mais elle l’aimait.
Elle le comprenait à présent.
Athénaïs était l’âme sœur qu’elle avait cherché toute sa vie.
Au milieu d’un parterre de soldats gémissant au sol, Parwan évalue son environnement. La galerie couverte où elle se tient encadre une cour large à un étage. Dans les galeries, des soldats. Dans la cour, des soldats. Une forêt de tonneaux empilés, d’armes défiant le ciel sur leurs râteliers, de sacs de jute entassés, de matériel, d’engins de siège sous des toiles de tentes… et la rumeur d’un combat à l’entrée qui se répand.
Parwan doit se rendre à l’étage. C’est là qu’elle trouvera son officier. En face d’elle, trop d’adversaires. A sa gauche, la galerie longe une seconde cour et au bout, un escalier de pierre.
D’autres soldats, peinant encore à saisir la situation, s’approchent et interpellent Parwan à leur tour.
La nomade saisit une torche sur son applique et la jette sur un tas de fourrage, puis d’un coup de bâton, affale la toile de tente qui couvrait l’ensemble avant de s’enfuir.
La troupe qui arrive sur les lieux ne sait que faire entre éteindre le départ de feu, assister les blessés, garder l’entrée et poursuivre l'intrus. Rapidement, pourtant, on crie de sonner l’alerte.
Parwan surgit dans le cloître de la seconde cour. Une demi-douzaine de troupiers républicains se tiennent sur son chemin, abasourdis. Sekai n’est plus en guerre et aucun habitant du fort, niché au cœur du territoire, ne s’attendait à une attaque, d’autant moins menée par une seule personne en pleine journée.
En dépit du nombre, les chances sont en sa faveur, estime Parwan. C’est une troupe en pleine dissonance cognitive qu’elle affronte. Beaucoup n’ont pas un rôle combattant, leur posture de combat fait défaut et leurs frappes sortent tout droit d’un manuel, les exposant systématiquement à une contre-attaque dévastatrice.
Ses adversaires se font plus nombreux. Elle enfonce des casques, déboite des mâchoires, brise des nez, casse des dents, éborgne des paupières et fend des côtes. Alors même que les renforts cherchent son dos, elle les tient à distance avec l’aisance d’une véritable guerrière du Reike.
Combattre dans un escalier est éreintant et lui réclame des réserves qui ne se reconstituent pas en une nuit. Elle traite chaque humain, elfe ou nain comme un contretemps à neutraliser rapidement.
Le chaos ambiant et l’impréparation empêche aux soldats descendant le large escalier et à ceux qui le montent de coordonner leurs attaques sur la dangereuse nomade. Les officiers en arrière aboient des ordres contradictoires rajoutant à la confusion. Ceux qui rassemblent le courage pour s’approcher et porter un coup dévalent généralement les marches l’instant d’après dans un cri de douleur. Petit à petit, la panique s'installe parmi ceux qui tentent de lui bloquer le passage, oubliant leur entrainement et agitant leur arme en tout sens, comme pour intimider une bête sauvage.
Parwan atteint pourtant l’étage et reprend sa course. Désavantagée en intérieur, ses coups se font plus violents. Les adversaires qu’elle rencontre sont maintenant tout à fait équipés.
Son rythme ralentit, confrontée à des boucliers tentant de la bloquer plutôt que de la vaincre.
La nomade respire bruyamment, elle s'essouffle, vérifiant les pièces une par une, enfonçant des portes sans trouver l’objet de sa quête. Plus bas dans la cour, la cloche d’alarme sonne sans répit, .
Parvenue à un croisement, elle pile. Derrière elle et a sa gauche, le gros de la troupe. D’autres gardes espérant la devancer au carrefour. Devant elle dans le couloir, deux mages étendent leur bras et Parwan est immédiatement prise d’un violent mal de tête qui lui brouille la vue. La seconde, une gobeline pensant bien faire, prévient: “Attention les yeux !” laissant à Parwan le temps de se protéger sous sa cape alors que l’espace est brusquement inondé d’un rayon de lumière pure, aveuglant tous les combattants malgré leurs paupières closes.
Parwan, à moitié sonnée, s’extirpe à droite et déboule dans une salle circulaire, au premier étage de la tour centrale. Elle ferme la porte derrière elle et abat le minuscule verrou qui ne devait jamais servir.
Au même moment, trois épéistes en armure intégrale apparaissent à l’autre bout de la pièce et, à l’unisson, mettent la lame au clair.
La nomade serre les dents, leur posture est excellente.
Elle s’approche et assaille le premier qui recule et manque de perdre l’équilibre face à son enchaînement. Une attaque en vrille repousse les deux autres arrivant dans son dos. Elle détourne un estoc et frappe le troisième en pleine visière. Sortant de l’encerclement, Parwan se jette en salto arrière par dessus une table, provoquant l’envol d’une pile de parchemins.
Le combat se poursuit pied à pied avec les trois épéistes. Les échanges sont intenses et la Sahriki affaiblie est sur la défensive. Les rares fentes qu’elle produit n’atteignent que leur plastron. Ses trois opposants n’ont rien de prodiges mais ils s’entendent parfaitement, ne lui laissant que très peu d’ouvertures.
Sa mana épaule chacune de ses esquives, elle est un tourbillon, agile, insaisissable.
Soudain, le verrou de la porte explose. La porte cède sous la charge de ses poursuivants et le gros de la troupe surgit dans ce chaos qui lui était propre.
Un capitaine, un oni dominant l’assemblée de plusieurs têtes, grogne et s’avance en faisant tournoyer une chaîne dentée de bas en haut.
Il n’a que faire de ce duel et, alors qu’un nouveau groupe d’officiers en armure fait irruption d’une autre porte, l’oni bouscule ses hommes pour se donner le champ libre et libère la chaîne. Le fouet d’acier trouve la cheville de la nomade et referme ses dents sur elle.
Parwan tente de s’en défaire mais le capitaine la ramène à lui comme un pêcheur. Elle doit redoubler d’adresse pour repousser les trois épéistes qui tentent de transpercer sa jambe libre. Lorsqu’elle sera à portée, elle fera volte-face et frappera l’oni au visage pour le faire lâcher prise.
Parwan tourne le regard pour juger la distance qui lui reste...
...et c’est là qu’elle les voit.
Au milieu des officiers, encadrés d’une rivière sombre de cheveux bouclés, régnant sur les reliefs de son visage au teint châtaigne, les yeux d’Athénaïs, aux couleurs du ciel d’été.
L’image de sa républicaine brûle dans sa rétine et dérobe toute son attention. Plus rien n’importe pour Parwan car son coeur est en paix. Le visage de la nomade s’illumine d’un sourire de joie pure et elle s’exclame dans un souffle:
“Athénaïs !”
…avant qu'un coup de matraque assené par le capitaine ne lui fasse perdre connaissance. Parwan s’écroule inanimée sur le plancher.
…
Un temps indéterminé s’écoule.
Aveuglée par un bandeau, menottée, on la traîne sur les genoux dans des sous-sols aux pavés humides.
Une fois arrivés, on la jette contre des barreaux, on l’immobilise, puis on afflige son visage d'une série de gifles et de violents revers de main. Ses geôliers, certains avides de rétribution, l’agonisent d’injures.
Elle est poussée au fond d’un cachot. Les fers à ses poignets sont accrochés à une chaîne qui les soulèvent au-dessus de sa tête et suspendent la captive à quelques centimètres du sol.
Un inconnu à la respiration forte la dépouille de sa cape et de son écharpe. Il lui arrache son voile et son chapeau plat, dévoilant sa longue tresse à la vue de tous avant de la frapper une dernière fois au visage.
Alors, le tortionnaire la prive de ses bottes et dépouille ses jambes de leur pantalon. Ses mains viennent vicieusement pincer l'intérieur de ses cuisses en remontant sous sa robe.
Parwan pousse un cri paniqué et se débat, son talon rencontrant à pleine vitesse le nez du déviant qui mugit de douleur. Une voix sérieuse, provenant de derrière la grille l’interpelle, fatiguée des actions de son collègue.
“Hé, arrête tes conneries et sort de là, on a autre chose à foutre !”
Le tortionnaire tire rageusement la tresse de Parwan en arrière, la laissant échapper un gémissement, et susurre dans son oreille:
“Tu vas recevoir beeeaucoup de visites, la sauvage. Profite bien…”
La grille de la cellule se claque avec fracas, on entend un tour de clé et plusieurs personnes s’éloigner, laissant Parwan seule avec le bruit des gouttes d’eau sur le sol et le léger balancement de sa chaîne au-dessus du vide.
Elle garde la tête en arrière quelques instants, craignant pour sa nuque.
Contraintes de soutenir tout son poids, Parwan sent le fer des menottes s'enfoncer dans ses poignets. Elle s'étire sur la pointe des pieds, mais ses extrémités ne parviennent qu'à effleurer le sol inégal au hasard de ses balancements.
Lentement, elle bascule sa tête en avant. Son crâne la lançe à l’endroit du coup de matraque et ses joues la brûlent après les gifles répétées. La nomade se sent sale et humiliée, indécente de savoir ses cheveux exposés à la vue de tous, de sentir ses jambes pendre à l’air libre sous sa robe. Elle se sent nue sans son écharpe, sans sa cape sur ses épaules.
“C’est le lot des vaincus.” Se répète-elle sans parvenir à contenir son angoisse grandissante. "C'est le lot des vaincus..."
Car ils allaient revenir. Ils reviendraient et ils...
Pour la première fois depuis des années, la peur submerge Parwan. Son visage se crispe. Elle se mord la lèvre pour se reprendre.
Alors, l’image nouvelle d’Athénaïs lui apparait
Son visage, son expression déconcertée, s’imprime dans l'obscurité et apaise doucement son cœur.
" Son regard est plus beau que jamais." pense-t-elle en souriant faiblement.
Et sa poitrine se gonfle d'un soulagement inexplicable.
Un soupir. La nomade avait donc bien sacrifié sa liberté et son honneur pour une dernière image d’elle.
C'était ainsi, Parwan n’aurait jamais connu le repos avant de la revoir.
Car la paix de son âme valait mille fois les tourments de son corps.
Il n'existait pas d’autre issue, elle le savait.
Alors que, dans le silence de sa cellule, Parwan accepte progressivement son sort, son seul regret est de réaliser qu’aucune de ses prières n'atteindrait plus ses dieux d'ici.
Elle aurait aimé entendre sa voix.
- Parwan parle Shierak qiya en italique et Commun en bold color=#ffcc00 -
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Athénaïs de Noirvitrail
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Un cliquetis et la porte de la cellule s’ouvrit, grinçant sur ses gonds.
Une légère brise se met à souffler dans la pièce où seul une maigre lumière subsiste, apportant dans son sillage l’odeur d’un tournesol. La prisonnière n’était enfermée que depuis une heure et déjà, elle recevait de la visite. Trop aimable de la part des soldats républicains, qui avaient certainement hâte de l’interroger. Pourtant, aucun murmure, aucun ricanement, ne vint accompagner cette visite impromptue. Seulement un silence pesant.
Il y eut un craquement sinistre, comme si l’on broyait du métal à la pince et soudain, la nomade tomba sur le sol, ses chaines s’écrasant lourdement autour d’elle sur le sol dallé. L’invité à l’odeur de tournesol souleva le corps endolori de la nomade et la pressa contre elle.
L’étreinte dura plusieurs minutes. Dans ces ténèbres, seul le silence accompagna les deux femmes. Les mots étaient inutiles à cet instant. Des années de séparation ne pouvaient faire oublier au maître l’étreinte de son apprentie. Ses bras enveloppant le corps meurtri de son maître, le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail tentait de transmettre en une étreinte l’ensemble de ses émotions.
La perte … La voir partir pour honorer son devoir envers le royaume
L’espoir … Celui de la voir un jour réapparaître sur les berges du lac
Le soulagement … Celui de l’apercevoir enfin, après toutes ces années, aux portes de la caserne.
La honte … Celle de n’avoir pas pu retenir ses hommes à temps et de devoir attendre que leur attention soit détournée pour pouvoir agir.
Des larmes coulèrent le long de ses joues, mélangeant dans une confusion sans nom la honte et le soulagement. Soulagement de la savoir en vie … Honte que ses soldats l’aient mise dans cet état. Elle la serra de plus belle contre elle, ne voulant en aucun cas rompre le contact. Elle l’avait tant attendue et tant espérée … Il était hors de question qu’on la lui enlève à nouveau. Et quiconque se mettrait en travers de son chemin finirait au fond d’un puits.
La demoiselle à la robe bleu relacha son étreinte et posa ses mains sur les épaules de la nomade. Délicatement, son front se posa contre le sien, sa chevelure s’entremêlant à la sienne tandis que le bout de son nez se mettait à frotter le sien. Il n’y avait pas besoin de mots. Tous les sentiments d’Athénaïs étaient condensés dans ce simple geste.
D’une pensée, elle fit sauter les dernières entraves qui retenaient Parwan. Le métal craqua et chuinta, avant de rendre l’âme, éparpillé sur le sol dans des gerbes d’étincelles éclairant la pénombre. Les mains de la magicienne quittèrent alors les épaules de Parwan et saisirent ses joues. Les larmes qui coulaient de ses joues faisaient briller des prunelles azur à la lueur de la torche blafarde tandis que ses lèvres se posèrent sur celle de sa compagne.
La demoiselle à l’odeur de tournesol serra à nouveau la nomade contre elle. Elle était revenue vers elle, après toutes ces années. Elle était en vie … Et c’était tout ce qui comptait à cet instant.
Une légère brise se met à souffler dans la pièce où seul une maigre lumière subsiste, apportant dans son sillage l’odeur d’un tournesol. La prisonnière n’était enfermée que depuis une heure et déjà, elle recevait de la visite. Trop aimable de la part des soldats républicains, qui avaient certainement hâte de l’interroger. Pourtant, aucun murmure, aucun ricanement, ne vint accompagner cette visite impromptue. Seulement un silence pesant.
Il y eut un craquement sinistre, comme si l’on broyait du métal à la pince et soudain, la nomade tomba sur le sol, ses chaines s’écrasant lourdement autour d’elle sur le sol dallé. L’invité à l’odeur de tournesol souleva le corps endolori de la nomade et la pressa contre elle.
L’étreinte dura plusieurs minutes. Dans ces ténèbres, seul le silence accompagna les deux femmes. Les mots étaient inutiles à cet instant. Des années de séparation ne pouvaient faire oublier au maître l’étreinte de son apprentie. Ses bras enveloppant le corps meurtri de son maître, le lieutenant Athénaïs de Noirvitrail tentait de transmettre en une étreinte l’ensemble de ses émotions.
La perte … La voir partir pour honorer son devoir envers le royaume
L’espoir … Celui de la voir un jour réapparaître sur les berges du lac
Le soulagement … Celui de l’apercevoir enfin, après toutes ces années, aux portes de la caserne.
La honte … Celle de n’avoir pas pu retenir ses hommes à temps et de devoir attendre que leur attention soit détournée pour pouvoir agir.
Des larmes coulèrent le long de ses joues, mélangeant dans une confusion sans nom la honte et le soulagement. Soulagement de la savoir en vie … Honte que ses soldats l’aient mise dans cet état. Elle la serra de plus belle contre elle, ne voulant en aucun cas rompre le contact. Elle l’avait tant attendue et tant espérée … Il était hors de question qu’on la lui enlève à nouveau. Et quiconque se mettrait en travers de son chemin finirait au fond d’un puits.
La demoiselle à la robe bleu relacha son étreinte et posa ses mains sur les épaules de la nomade. Délicatement, son front se posa contre le sien, sa chevelure s’entremêlant à la sienne tandis que le bout de son nez se mettait à frotter le sien. Il n’y avait pas besoin de mots. Tous les sentiments d’Athénaïs étaient condensés dans ce simple geste.
D’une pensée, elle fit sauter les dernières entraves qui retenaient Parwan. Le métal craqua et chuinta, avant de rendre l’âme, éparpillé sur le sol dans des gerbes d’étincelles éclairant la pénombre. Les mains de la magicienne quittèrent alors les épaules de Parwan et saisirent ses joues. Les larmes qui coulaient de ses joues faisaient briller des prunelles azur à la lueur de la torche blafarde tandis que ses lèvres se posèrent sur celle de sa compagne.
La demoiselle à l’odeur de tournesol serra à nouveau la nomade contre elle. Elle était revenue vers elle, après toutes ces années. Elle était en vie … Et c’était tout ce qui comptait à cet instant.
Citoyen du Reike
Parwan Sahriki
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Info personnage
Race: Humaine
Vocation: Combattant assassin
Alignement: Neutre bon
Rang: C
Parwan se crispe au bout de sa chaîne en entendant revenir des pas. Elle a du mal à respirer, suspendue par les mains, les bras tendus écartelés sous son poids.
Sa détresse lui revient. Elle veut revisser son traditionnel chapeau, resserrer son écharpe fidèle, réajuster son voile tant imposé. Mais ils ont tous disparus loin d'elle, la condamnant à être vue. Elle veut s'excuser à son père, à feu ses époux ; les yeux d'autres hommes violaient le sanctuaire de ce corps qui leur était réservé et s'apprêtaient à le profaner davantage.
Le silence de l'inconnue attise sa détresse secrète alors que la porte s'ouvre en grincant.
Ses chaînes lâchent brutalement et Parwan s'écroule sur le flanc.
L'inconnue s'approche. Désorientée par son bandeau, Parwan devient rigide quand elle la touche et la relève contre elle. Mais soudain, elle sent son odeur, reconnaît ses mains comme nulle autre et reste muette de surprise.
Athénaïs.
Elle était descendue la voir ! Malgré ce qu'elle avait fait, elle avait pris le risque de descendre ! A l'insu de ses hommes ?
....
Ce câlin était plus de tendresse que Parwan n'en avait droit. Elle est muette de honte face à ce soulagement angélique qu'elle ne mérite pas.
Elle n'a pas le droit de prononcer le moindre mot. Pas en première.
Elle voudrait qu'Athénaïs se mette en colère, qu'elle pleure de rage, qu'elle la gifle à son tour et promette de la punir pour ce qu'elle a fait.
Bercée contre son buste, Parwan se trouve avide de repentir. Elle se jetterait sous les coups violents mais si impersonnels de ses geôliers plutôt que de subir cette honte intime qui lui brûlait le cœur.
Mais rien. Plutôt qu'un châtiment, le silence.
Aveugle entre ses bras, la joue contre sa poitrine, les lèvres de Parwan tremblent entrouvertes, coincées sur le A muet d'Athénaïs. Elle n'ose pas même prononcer son nom. Alors pour supporter le silence, la nomade se blottit et serre plus fort le buste de son amie. Sa tête rentre entre ses épaules crispée pour supporter l'attente.
Dis quelque chose, n'importe quoi...
Mais toujours rien.
Elle risque un doigt sous le bandeau qui l'aveugle et le tire vers le bas. Judicieux. L'eut-elle levé sur son front, sa main n'aurait pu couvrir l'inspiration de surprise à la vue du visage si proche de celle qu'elle aimait... Parwan rougit.
Bouleversée d'être à nouveau témoin de cette vision angélique, puis de voir des larmes rouler sur les douces joues de son apprentie, la nomade pleure aussi, blottie dans son étreinte serrée.
Les larmes d'Athénaïs tombent et se mêlent aux siennes, passant sa mâchoire, coulant sur le visage du dragon impérial tatoué dans son cou. Et la créature noire d'encre, immuable et fière, se joint au flot de peine et de soulagement glissant le long de cette jugulaire, traversant la porte entre ses clavicules et disparaissant sous sa chemise, sur sa poitrine, à l'endroit de son cœur.
Sa brillante disciple pleurait pour elle. Nul autre sur Sekai n'avait jamais versé de larmes à son endroit et sa peine la touche profondément.
C'était pourtant au maître de consoler l'élève, à l'aînée de prendre dans ses bras sa cadette, à la sage de d'apaiser l'âme de l'aspirante. Mais c'était Parwan qui se retrouvait blottie contre elle.
Athénaïs, comme au premier jour de leur rencontre, parlait si bien avec son corps, par le contact de ses mains... La Sahriki avait appris à les lire. Elle entendait dans son étreinte toute la peine et le soulagement qu'elles partageaient. Les mêmes remords ? La honte qu'elle ressentait ne semblait pas à l'endroit de son maître impulsif et irrationnel mais envers elle-même... Pourquoi ?
Parwan meurt encore davantage de ne pouvoir lui poser la question. Mais sa disciple reste silencieuse. La demoiselle la relève, la tient face à elle par les épaules. Parwan rougit d'être ainsi à cheval, à cru sur la jupe bleue d'Athénaïs. Son pantalon lui manquait. Et qu'importe sa propre robe ; une seule épaisseur de vêtement avait presque valeur de nudité pour une femme de son clan.
Mais elle abandonne son impudeur à Athénaïs, se console au contact de leurs nez qui se touchent et se frottent doucement l'un contre l'autre. Le contact est électrique, bien au delà de la tendresse infinie que signifiait ce geste entre les deux femmes. Les chaînes de la nomade en gémissent, en tressaillent et sautent de ses poignets dans le dos de la façonneuse, éclairant un instant sa silhouette d'un éclat d'étincelles.
Parwan appuie son front contre le sien et sourit. Ses mains sont libres. Elle sent les bouclettes sauvages friser tout autour d'elle, s'éparpiller sur son crâne nu et ses cheveux serrés vers sa longue queue de cheval.
Le lien qui l'attirait à son cœur se faisait plus tangible que jamais. Leurs souvenirs communs et les délicieuses aventures partagées ensemble l'avait rendu immortel. La distance et le temps avait testé son élasticité à la plus extrême de sa capacité. Et maintenant qu'elles étaient plus proches que jamais, ce lien, cette cordelette invisible entre leurs cœurs semblait plus rigide que l'airain. Et elle tirait encore, en réclamait plus. Toujours plus.
Répondant à ce besoin, la main gauche de Parwan épouse la naissance de sa nuque, remonte son cou. Sa droite embrasse l'arrondi de sa joue puis le plat de sa tempe avec le dos de ses doigts. Elle file ses bouclettes entre son pouce, son index et le reste de ses doigts.
Puis les mains d'Athénaïs masquent les joues de la nomade à leur tour.
Elle sent leurs souffles tièdes se mélanger. Parwan le sent comme pour la première fois. Son âme sœur... Plus près...
Son nez glisse d'un millimètre du bout de celui de son amie et Parwan doit se pétrifier pour que ses lèvres sombres ne ferment pas la distance. Maîtrise toi, pense-t-elle pour elle-même. Maîtrise-t...
La bouche d'Athénaïs ferme la distance et s'unit à celle de Parwan.
La Sahriki court-circuite, se perd dans le baiser, dans la folle douceur des lèvres de son amante. Et lorsque leurs visages se séparent, elle n'arrive pas à saisir s'il était réel ou si elle l'avait rêvé.
Alors la nomade s'avance, l'embrasse encore, quelque secondes, puis une nouvelle fois. Elle se rapproche, se serre contre elle. Elle sent sa poitrine contre son corps, les battements de son cœur. Parwan cueille l'arrière de sa tête dans ses mains, des boucles sombres jaillissant d'entre ses doigts. Leurs bouches se scellent à nouveau pour ne plus se séparer.
Son cœur se liquéfie de bonheur, il n'en peut plus de tendresse. Il déborde dans sa poitrine et remonte dans sa gorge, infusant d'amour ses lèvres qui se pressent contre celles d'Athénaïs.
Leurs langues se découvrent, font connaissance dans cette intimité secrète. Elles s'enroulent passionnément l'une contre l'autre pour célébrer cette éclosion d'amour.
Dans la pénombre, le bruit de leurs baisers s'harmonise au rythme des gouttes d'eau tombant ici et là sur le pavé de la cellule. Les caresses de Parwan dans son dos drapé de bleu ne sont plus celles d'un maître pour sa disciple, d'une femme à son amie.
Trop légères, trop précises, trop intimes. Ses doigts, sa langue, disent avec lenteur tout le désir et l'amour de la vagabonde pour sa Républicaine, ce fardeau qu'elle transportait depuis si longtemps. Il voyagent au creux de ses vertèbres, dans le secret de sa bouche, ils racontent l'absence, le manque, le regret, l'espoir enfin comblé.
Après une éternité, leurs lèvres se séparent. Toutes deux reprennent haleine et Parwan ne quitte plus ses brillants yeux bleus. D'une caresse, elle chasse les bouclettes tombant sur son front, son pouce efface tendrement les larmes restées sur ses joues.
« Je t'aime, Athénaïs... »
Dit-elle en souriant, à voix basse dans sa langue maternelle. Son souffle est chaud, parfumé. Elle ne peut retenir un nouveau baiser, à peine effleuré.
« Plus tendrement qu'un maître aime sa disciple... »
Puis un autre...
« Plus fort qu'une femme aime son amie... »
Et un autre...
« Follement. C'en est mal, presque un blasphème... »
Encore un autre. Plus long.
« Mais je t'aime. Nos âmes étaient sœurs dès le premier regard. Tu es si belle...»
Son nez touche encore le sien et elle doit se retenir pour ne pas l'embrasser à nouveau.
« J'ai fauté cent fois pour te revoir rien qu'un instant, Athénaïs...
Mais je dois être punie.
Servir d'exemple.
Tes hommes réclament justice. Ils doivent me voir châtiée. »
Elle caresse sa joue, peinée d'infliger cela à son amie. La nomade, dans son égoïsme guerrier, avait placé son doux lieutenant dans une position tragique qui la forçait à sévir, faire preuve d'intransigeance, de crainte que son autorité en soit remise en question.
« Pardonne moi. »
Sa détresse lui revient. Elle veut revisser son traditionnel chapeau, resserrer son écharpe fidèle, réajuster son voile tant imposé. Mais ils ont tous disparus loin d'elle, la condamnant à être vue. Elle veut s'excuser à son père, à feu ses époux ; les yeux d'autres hommes violaient le sanctuaire de ce corps qui leur était réservé et s'apprêtaient à le profaner davantage.
Le silence de l'inconnue attise sa détresse secrète alors que la porte s'ouvre en grincant.
Ses chaînes lâchent brutalement et Parwan s'écroule sur le flanc.
L'inconnue s'approche. Désorientée par son bandeau, Parwan devient rigide quand elle la touche et la relève contre elle. Mais soudain, elle sent son odeur, reconnaît ses mains comme nulle autre et reste muette de surprise.
Athénaïs.
Elle était descendue la voir ! Malgré ce qu'elle avait fait, elle avait pris le risque de descendre ! A l'insu de ses hommes ?
....
Ce câlin était plus de tendresse que Parwan n'en avait droit. Elle est muette de honte face à ce soulagement angélique qu'elle ne mérite pas.
Elle n'a pas le droit de prononcer le moindre mot. Pas en première.
Elle voudrait qu'Athénaïs se mette en colère, qu'elle pleure de rage, qu'elle la gifle à son tour et promette de la punir pour ce qu'elle a fait.
Bercée contre son buste, Parwan se trouve avide de repentir. Elle se jetterait sous les coups violents mais si impersonnels de ses geôliers plutôt que de subir cette honte intime qui lui brûlait le cœur.
Mais rien. Plutôt qu'un châtiment, le silence.
Aveugle entre ses bras, la joue contre sa poitrine, les lèvres de Parwan tremblent entrouvertes, coincées sur le A muet d'Athénaïs. Elle n'ose pas même prononcer son nom. Alors pour supporter le silence, la nomade se blottit et serre plus fort le buste de son amie. Sa tête rentre entre ses épaules crispée pour supporter l'attente.
Dis quelque chose, n'importe quoi...
Mais toujours rien.
Elle risque un doigt sous le bandeau qui l'aveugle et le tire vers le bas. Judicieux. L'eut-elle levé sur son front, sa main n'aurait pu couvrir l'inspiration de surprise à la vue du visage si proche de celle qu'elle aimait... Parwan rougit.
Bouleversée d'être à nouveau témoin de cette vision angélique, puis de voir des larmes rouler sur les douces joues de son apprentie, la nomade pleure aussi, blottie dans son étreinte serrée.
Les larmes d'Athénaïs tombent et se mêlent aux siennes, passant sa mâchoire, coulant sur le visage du dragon impérial tatoué dans son cou. Et la créature noire d'encre, immuable et fière, se joint au flot de peine et de soulagement glissant le long de cette jugulaire, traversant la porte entre ses clavicules et disparaissant sous sa chemise, sur sa poitrine, à l'endroit de son cœur.
Sa brillante disciple pleurait pour elle. Nul autre sur Sekai n'avait jamais versé de larmes à son endroit et sa peine la touche profondément.
C'était pourtant au maître de consoler l'élève, à l'aînée de prendre dans ses bras sa cadette, à la sage de d'apaiser l'âme de l'aspirante. Mais c'était Parwan qui se retrouvait blottie contre elle.
Athénaïs, comme au premier jour de leur rencontre, parlait si bien avec son corps, par le contact de ses mains... La Sahriki avait appris à les lire. Elle entendait dans son étreinte toute la peine et le soulagement qu'elles partageaient. Les mêmes remords ? La honte qu'elle ressentait ne semblait pas à l'endroit de son maître impulsif et irrationnel mais envers elle-même... Pourquoi ?
Parwan meurt encore davantage de ne pouvoir lui poser la question. Mais sa disciple reste silencieuse. La demoiselle la relève, la tient face à elle par les épaules. Parwan rougit d'être ainsi à cheval, à cru sur la jupe bleue d'Athénaïs. Son pantalon lui manquait. Et qu'importe sa propre robe ; une seule épaisseur de vêtement avait presque valeur de nudité pour une femme de son clan.
Mais elle abandonne son impudeur à Athénaïs, se console au contact de leurs nez qui se touchent et se frottent doucement l'un contre l'autre. Le contact est électrique, bien au delà de la tendresse infinie que signifiait ce geste entre les deux femmes. Les chaînes de la nomade en gémissent, en tressaillent et sautent de ses poignets dans le dos de la façonneuse, éclairant un instant sa silhouette d'un éclat d'étincelles.
Parwan appuie son front contre le sien et sourit. Ses mains sont libres. Elle sent les bouclettes sauvages friser tout autour d'elle, s'éparpiller sur son crâne nu et ses cheveux serrés vers sa longue queue de cheval.
Le lien qui l'attirait à son cœur se faisait plus tangible que jamais. Leurs souvenirs communs et les délicieuses aventures partagées ensemble l'avait rendu immortel. La distance et le temps avait testé son élasticité à la plus extrême de sa capacité. Et maintenant qu'elles étaient plus proches que jamais, ce lien, cette cordelette invisible entre leurs cœurs semblait plus rigide que l'airain. Et elle tirait encore, en réclamait plus. Toujours plus.
Répondant à ce besoin, la main gauche de Parwan épouse la naissance de sa nuque, remonte son cou. Sa droite embrasse l'arrondi de sa joue puis le plat de sa tempe avec le dos de ses doigts. Elle file ses bouclettes entre son pouce, son index et le reste de ses doigts.
Puis les mains d'Athénaïs masquent les joues de la nomade à leur tour.
Elle sent leurs souffles tièdes se mélanger. Parwan le sent comme pour la première fois. Son âme sœur... Plus près...
Son nez glisse d'un millimètre du bout de celui de son amie et Parwan doit se pétrifier pour que ses lèvres sombres ne ferment pas la distance. Maîtrise toi, pense-t-elle pour elle-même. Maîtrise-t...
La bouche d'Athénaïs ferme la distance et s'unit à celle de Parwan.
La Sahriki court-circuite, se perd dans le baiser, dans la folle douceur des lèvres de son amante. Et lorsque leurs visages se séparent, elle n'arrive pas à saisir s'il était réel ou si elle l'avait rêvé.
Alors la nomade s'avance, l'embrasse encore, quelque secondes, puis une nouvelle fois. Elle se rapproche, se serre contre elle. Elle sent sa poitrine contre son corps, les battements de son cœur. Parwan cueille l'arrière de sa tête dans ses mains, des boucles sombres jaillissant d'entre ses doigts. Leurs bouches se scellent à nouveau pour ne plus se séparer.
Son cœur se liquéfie de bonheur, il n'en peut plus de tendresse. Il déborde dans sa poitrine et remonte dans sa gorge, infusant d'amour ses lèvres qui se pressent contre celles d'Athénaïs.
Leurs langues se découvrent, font connaissance dans cette intimité secrète. Elles s'enroulent passionnément l'une contre l'autre pour célébrer cette éclosion d'amour.
Dans la pénombre, le bruit de leurs baisers s'harmonise au rythme des gouttes d'eau tombant ici et là sur le pavé de la cellule. Les caresses de Parwan dans son dos drapé de bleu ne sont plus celles d'un maître pour sa disciple, d'une femme à son amie.
Trop légères, trop précises, trop intimes. Ses doigts, sa langue, disent avec lenteur tout le désir et l'amour de la vagabonde pour sa Républicaine, ce fardeau qu'elle transportait depuis si longtemps. Il voyagent au creux de ses vertèbres, dans le secret de sa bouche, ils racontent l'absence, le manque, le regret, l'espoir enfin comblé.
Après une éternité, leurs lèvres se séparent. Toutes deux reprennent haleine et Parwan ne quitte plus ses brillants yeux bleus. D'une caresse, elle chasse les bouclettes tombant sur son front, son pouce efface tendrement les larmes restées sur ses joues.
« Je t'aime, Athénaïs... »
Dit-elle en souriant, à voix basse dans sa langue maternelle. Son souffle est chaud, parfumé. Elle ne peut retenir un nouveau baiser, à peine effleuré.
« Plus tendrement qu'un maître aime sa disciple... »
Puis un autre...
« Plus fort qu'une femme aime son amie... »
Et un autre...
« Follement. C'en est mal, presque un blasphème... »
Encore un autre. Plus long.
« Mais je t'aime. Nos âmes étaient sœurs dès le premier regard. Tu es si belle...»
Son nez touche encore le sien et elle doit se retenir pour ne pas l'embrasser à nouveau.
« J'ai fauté cent fois pour te revoir rien qu'un instant, Athénaïs...
Mais je dois être punie.
Servir d'exemple.
Tes hommes réclament justice. Ils doivent me voir châtiée. »
Elle caresse sa joue, peinée d'infliger cela à son amie. La nomade, dans son égoïsme guerrier, avait placé son doux lieutenant dans une position tragique qui la forçait à sévir, faire preuve d'intransigeance, de crainte que son autorité en soit remise en question.
« Pardonne moi. »
- Parwan parle Shierak qiya en italique et Commun en bold color=#ffcc00 -
Citoyen de La République
Athénaïs de Noirvitrail
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A peine essuie-t-elle ses larmes que de nouvelles viennent s’ajouter au torrent qu’elle déverse. Les mots, alliés aux gestes, viennent s’emparer de son cœur, se frayant un chemin au travers de sa carapace jusqu’à extraire chaque larme dont elle est capable. Elle enserre cette femme dont chaque absence lui déchire le cœur et dont chaque sourire discret l’emplit d’une joie profonde, tant et si bien que son amante peut ressentir les pulsations de son cœur. Alors que les mains de la nomade s’attardent sur ses cheveux et ses joues, la jeune femme n’en finit plus de se presser contre elle, recherchant le contact qui lui avait tant manqué.
Ses mots sont comme du miel. Ils apaisent son cœur meurtri et se mélangent à la joie et à la peine pour former un cocon chaud et accueillant, duquel elle ne peut partir. Refusant de lâcher sa compagne, ses doigts appuient avec douceur sur son dos, exprimant par les gestes ce que les mots ne pourraient retranscrire que dans une version amoindrie. Son parfum d’encens froid et de sable chaud lui a tant manqué qu’elle ne peut se résoudre à la lâcher, de peur qu’il ne s’efface et ne la laisse à nouveau seule.
« Parwan … »
Son nez touche le sien à nouveau et elle joint ses pensées et des gestes à ceux de sa compagne. Autour d’elles, six silhouettes se mettent alors à émerger du corps d’Athénaïs. Six sœurs se joignirent à l’étreinte, apportant tout le bien-être et l’amour dont elles étaient capables à cet instant. Dans cette cellule sombre, elles auraient pu rester une éternité, loin des responsabilités et loin du monde. Seules, dans la pénombre, lovées entre les plis de leurs tuniques et de leurs robes.
Les six sœurs finirent par disparaître … laissant Athénaïs et Parwan seules dans la prison. Ce fut Athénaïs qui rompit une dernière fois le silence.
« Il n’y a rien à pardonner … »
La jeune femme se leva et prit la main de sa compagne dans la sienne pour l’aider à se relever. Le rayon de lumière qui illuminait la cellule était leur témoin en cet instant.
« Par le Soleil et la Lune et ayant le Soleil pour témoin, moi, Athénaïs de Noirvitrail, absout Parwan Sahriki de toutes les fautes imaginaires ou réelles qu’elle aurait pu commettre à mon égard. »
Elle l’aida à se relever et bien vite, les deux femmes sortirent à la lumière du soleil. Quittant la fraicheur des geôles, elles remontèrent les marches de la caserne pour atteindre la grande cour et respirer un peu d’air frais.
Il ne fallut pas longtemps pour que les troupes de Fort Scupios fussent rassemblées dans la grande cour et soient mises au garde-à-vous, dans un silence seulement brisé par des murmures inquiets. Athénaïs et Parwan apparurent au milieu des troupes, la première, parfaitement sereine au milieu des soudards équipés. N’ayant pas prévu d’installation particulière, elle monta sur une grande caisse de bois disposée au milieu des escouades et aida sa compagne à la rejoindre.
« Soldats de la Huitième Légion, c’est votre lieutenante qui vous parle. Entendez bien mes paroles car je ne les répèterai pas. A compter de ce jour, moi, Athénaïs de Noirvitrail, lieutenante de la Huitième Légion, prend sous ma protection dame Parwan Sahriki ici présente. Quiconque tente de lui faire du mal aura à faire avec moi ! Est-ce que c’est bien compris ?! »
Les soldats répondirent à l’unisson par un « oui lieutenant ! » assumé et respectueux. Certains comprirent ce qu’il se passait réellement en voyant le visage radieux de la lieutenante, elle, qui d’ordinaire, restait impassible dans l’exercice de ses missions. La jeune femme avait le respect de ses troupes, mais il était vrai qu’elle était rarement vue en train de sourire ou d’exprimer un sentiment de joie.
Elle rayonnait de bonheur.
Les soldats finirent par se disperser et regagnèrent leurs postes. Athénaïs aida Parwan à descendre du piédestal en l’attrapant par la taille et en la posant délicatement sur le sol. Elle se pencha alors à son oreille et lui murmura :
« Viens ... Nous avons beaucoup à rattraper … »
Ses mots sont comme du miel. Ils apaisent son cœur meurtri et se mélangent à la joie et à la peine pour former un cocon chaud et accueillant, duquel elle ne peut partir. Refusant de lâcher sa compagne, ses doigts appuient avec douceur sur son dos, exprimant par les gestes ce que les mots ne pourraient retranscrire que dans une version amoindrie. Son parfum d’encens froid et de sable chaud lui a tant manqué qu’elle ne peut se résoudre à la lâcher, de peur qu’il ne s’efface et ne la laisse à nouveau seule.
« Parwan … »
Son nez touche le sien à nouveau et elle joint ses pensées et des gestes à ceux de sa compagne. Autour d’elles, six silhouettes se mettent alors à émerger du corps d’Athénaïs. Six sœurs se joignirent à l’étreinte, apportant tout le bien-être et l’amour dont elles étaient capables à cet instant. Dans cette cellule sombre, elles auraient pu rester une éternité, loin des responsabilités et loin du monde. Seules, dans la pénombre, lovées entre les plis de leurs tuniques et de leurs robes.
Les six sœurs finirent par disparaître … laissant Athénaïs et Parwan seules dans la prison. Ce fut Athénaïs qui rompit une dernière fois le silence.
« Il n’y a rien à pardonner … »
La jeune femme se leva et prit la main de sa compagne dans la sienne pour l’aider à se relever. Le rayon de lumière qui illuminait la cellule était leur témoin en cet instant.
« Par le Soleil et la Lune et ayant le Soleil pour témoin, moi, Athénaïs de Noirvitrail, absout Parwan Sahriki de toutes les fautes imaginaires ou réelles qu’elle aurait pu commettre à mon égard. »
Elle l’aida à se relever et bien vite, les deux femmes sortirent à la lumière du soleil. Quittant la fraicheur des geôles, elles remontèrent les marches de la caserne pour atteindre la grande cour et respirer un peu d’air frais.
Il ne fallut pas longtemps pour que les troupes de Fort Scupios fussent rassemblées dans la grande cour et soient mises au garde-à-vous, dans un silence seulement brisé par des murmures inquiets. Athénaïs et Parwan apparurent au milieu des troupes, la première, parfaitement sereine au milieu des soudards équipés. N’ayant pas prévu d’installation particulière, elle monta sur une grande caisse de bois disposée au milieu des escouades et aida sa compagne à la rejoindre.
« Soldats de la Huitième Légion, c’est votre lieutenante qui vous parle. Entendez bien mes paroles car je ne les répèterai pas. A compter de ce jour, moi, Athénaïs de Noirvitrail, lieutenante de la Huitième Légion, prend sous ma protection dame Parwan Sahriki ici présente. Quiconque tente de lui faire du mal aura à faire avec moi ! Est-ce que c’est bien compris ?! »
Les soldats répondirent à l’unisson par un « oui lieutenant ! » assumé et respectueux. Certains comprirent ce qu’il se passait réellement en voyant le visage radieux de la lieutenante, elle, qui d’ordinaire, restait impassible dans l’exercice de ses missions. La jeune femme avait le respect de ses troupes, mais il était vrai qu’elle était rarement vue en train de sourire ou d’exprimer un sentiment de joie.
Elle rayonnait de bonheur.
Les soldats finirent par se disperser et regagnèrent leurs postes. Athénaïs aida Parwan à descendre du piédestal en l’attrapant par la taille et en la posant délicatement sur le sol. Elle se pencha alors à son oreille et lui murmura :
« Viens ... Nous avons beaucoup à rattraper … »
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Parwan Sahriki
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crédits : 2585
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Info personnage
Race: Humaine
Vocation: Combattant assassin
Alignement: Neutre bon
Rang: C
Parwan se pensait aux plus hauts sommets du confort que son corps et son âme pouvaient un jour ressentir... jusqu'à ce que six autres présences apparaissent tout contre elle et l'entourent de leurs bras aimants.
Une audible inspiration de surprise lui échappe. « Les filles ! » s'exclame-t-elle d'un souffle.
Elle rit et plonge un franc baiser sincère dans la tignasse de la copie à gauche d'Athénaïs, puis dans celle de droite.
« Vous m'avez tellement manquée. » murmure-t-elle en élargissant son étreinte pour les inclure toutes les trois.
Puis le plat de sa main glisse sur les joues des filles blotties sur ses flancs avant de venir serrer tendrement le poignet des sœurs accrochées à son dos..
Elle est embarrassée de leur apparaître ainsi, elle, leur aînée, si vulnérable et immodestement vêtue, assise sur les genoux de leur copie originelle. Mais la chaleur de l'étreinte dépasse toutes ses gênes. L'adorable magicienne dans ses bras l'agrippe avec une détresse si touchante...
Dans cet anneau serré de quatorze manches bleues, Parwan ne s'est jamais sentie aussi aimée.
A droite d'Athénaïs, elle reconnaît immédiatement le sourcil soucieux de Chrisabelle qui, même dans cette situation, semblait se tracasser de mille choses. Parwan se penche et dépose un baiser à la commissure de ses lèvres.
« Je vous aime aussi. » assure-t-elle, appuyant son front contre le sien.
La femme du désert venait de déclarer son amour à six jeunes femmes en même temps sans même que le rose lui monte aux joues.
Le confortable câlin s'estompe avec les autre sœurs, laissant seules disciple et maître dans les bras l'une de l'autre.
Puis la première se lève, et aux excuses de Parwan, répond par l'absolution.
La Sahriki veut protester en se redressant, mais le regard-témoin de son dieu la réduit au silence. La voix de sa prêtresse lui fait baisser les yeux d'instinct, hocher la tête de gratitude.
Elles quittent la cellule en silence. Parwan retrouve avec soulagement la pudeur de son voile et de son chapeau, la dignité de son pantalon, la protection de ses bottes et de sa longue cape. Ses bras meurtris doivent toujours la lancer car elle s'habille avec peine.
Elle remonte à la suite d'Athénaïs vers la surface, et une crainte soudaine descend sur elle.
Les voilà bientôt dans la cour principale. La Sahriki s'apprête à se faire discrète le temps de rejoindre ses quartiers mais Athénaïs n'emprunte pas les allées en marge de l'agitation générale, non, elle se dirige droit vers le centre, à la vue de tous !
Le souvenir de son intrusion est encore frais dans l'air. On sent encore le feu de paille qu'elle avait provoqué.
Une angoisse sourde lui tombe sur les épaules. Elle venait à peine d'être prise que, déjà, elle marchait libre à ses côtés. Allait-elle l'annoncer à tous ? Ses hommes comprendraient-ils sa bonté envers elle ?
Au grand dam de Parwan, Athénaïs ordonne le rassemblement.
Parwan n'a qu'une crainte à cet instant : Que ses actions égoïstes causent le moindre tord à l'image de sa magicienne. Et si elle provoquait l'ire de ceux qui lui devaient obéissance ?
Elle ralentit le pas pour éviter de marcher à ses côtés. Elle voudrait être en chaînes, à ce moment.
A contrecœur, elle grimpe sur l'estrade à sa suite.
Parmi la troupe elle reconnaît des visages parmi ceux qu'elle a défait, des arcades ouvertes, des lèvres tuméfiées,des bras en écharpe.
Parwan les vaincrait cent fois à nouveau si le chemin du combat menait à Athénaïs.
La Sahriki entretient l'espoir secret que le lieutenant se ravise, la fasse expier dès maintenant, sur cette scène.
Elle subirait toutes les humiliations plutôt que de salir le nom de sa disciple.
Mais Athénaïs n'a que faire qu'on sache l'intrus châtiée. Sans perdre de salive à se justifier, elle place la nomade sous la protection de son nom et les pouvoirs de son rang.
Parwan entend le sourire dans sa voix et redresse sa posture navrée. Elle doit se montrer à la hauteur son enthousiasme. Alors elle la regarde fidèlement s'adresser aux troupes pour montrer à tous qu'elle était digne de ses faveurs. Athénaïs rayonne sur le piédéstal.
Parwan la revoit prêcher dans le désert entourés de jeunes disciples d'un soir et une vague de félicité la submerge. Elle avait fait tant de chemin. Elle lui paraissait si solide, incontestable de ses hommes comme d'elle même.
La troupe se sépare sans un murmure de réprobation.
La nomade est sonnée. Et comme si elle ne s'éprenait pas assez vite de l'Athénaïs qu'elle redécouvrait sous ses yeux, celle ci l'attrape par la taille pour l'aider à redescendre.
Parwan rougit. D'être portée avec une telle facilité, de sentir la force dans ses bras la déposer sur le pavé, elle, son maître, sa guide !
Parvenue au sol plus amoureuse qu'elle ne l'avait quitté, elle se laisse prendre la main et s'entrelacer leurs doigts.
« Viens ... Nous avons beaucoup à rattraper … »
« Oui, c'est vrai. » dit-elle d'une voix bien trop basse à son goût.
C'était la fin, pense-elle en s'éloignant. Eulalie ne la laisserait jamais oublier ce moment de fragilité.
En silence, elles disparaissent dans les fortifications et pénètrent une des tour en ruine dont la position ne méritait pas d'être occupée malgré sa hauteur. Elles gravissent un escalier en colimaçon épousant l'arrondi de sa façade et débouchent au sommet, sous le toit pointu et délabré. Parwan s'installe sur une large pierre écroulée face au soleil couchant. Elle tire Athénaïs contre elle, la fait asseoir sur ses genoux en amazone.
Ensemble, elles profitent seules de la vue et de l'atmosphère sereine, habitée des sons de la caserne qui s'élevaient de la cour centrale. La nomade enlace sa taille, profitant de son poids confortable sur ses cuisses.
« Je n'ai pas changé, tu sais. » dit-elle après un instant, levant les yeux, presque désolée, coupable. « Je suis restée la même vagabonde qui t'a laissée aux portes de Taisen. Pour répondre à l'appel, partir vers l'Ouest. »
« J'y suis allée pour mourir. » avoue la nomade. « Pour me racheter. Je pensais que les dieux m'offraient une dernière chance de tomber auprès des miens, d'être guidée aux étoiles par leurs prières. Que notre histoire était qu'un bel épilogue. »
Parwan portait toujours ses vieux démons. L'intense culpabilité de n'avoir jamais donné d'hériter à son deuxième époux et la hantise de mourir seule, l'âme égarée, de se perdre en chemin vers les étoiles, faute de frères et sœurs pour la guider.
« Mais je n'ai pas réussi. A mourir. Chaque fois que la mort s'approchait, je pensais à toi. Tu étais partout. Et quand je me tenais debout au dessus de mes adversaires, tu n'étais plus là. Et tu me manquais très fort. Et je voulais te revoir.
Tu m'as sauvée, Athénaïs. C'est cette envie égoïste qui m'a poussée pendant ces deux ans, jusqu'à me battre contre tes hommes.
Mais toi, tu as changé. Tu as tellement grandie depuis que tu marches sous Son regard. Tes yeux voient loin devant toi, tu rayonnes ! Je ne réalisais pas quand tes parents m'ont appris où tu étais. Je ne comprend que maintenant : Tu es officier aux commandes d'un fort et de tous ses soldats ! Je suis tellement, tellement fière de toi, ma chérie... »
Elle dépose une caresse maternelle sur sa joue et lui sourit avec tendresse.
Une audible inspiration de surprise lui échappe. « Les filles ! » s'exclame-t-elle d'un souffle.
Elle rit et plonge un franc baiser sincère dans la tignasse de la copie à gauche d'Athénaïs, puis dans celle de droite.
« Vous m'avez tellement manquée. » murmure-t-elle en élargissant son étreinte pour les inclure toutes les trois.
Puis le plat de sa main glisse sur les joues des filles blotties sur ses flancs avant de venir serrer tendrement le poignet des sœurs accrochées à son dos..
Elle est embarrassée de leur apparaître ainsi, elle, leur aînée, si vulnérable et immodestement vêtue, assise sur les genoux de leur copie originelle. Mais la chaleur de l'étreinte dépasse toutes ses gênes. L'adorable magicienne dans ses bras l'agrippe avec une détresse si touchante...
Dans cet anneau serré de quatorze manches bleues, Parwan ne s'est jamais sentie aussi aimée.
A droite d'Athénaïs, elle reconnaît immédiatement le sourcil soucieux de Chrisabelle qui, même dans cette situation, semblait se tracasser de mille choses. Parwan se penche et dépose un baiser à la commissure de ses lèvres.
« Je vous aime aussi. » assure-t-elle, appuyant son front contre le sien.
La femme du désert venait de déclarer son amour à six jeunes femmes en même temps sans même que le rose lui monte aux joues.
Le confortable câlin s'estompe avec les autre sœurs, laissant seules disciple et maître dans les bras l'une de l'autre.
Puis la première se lève, et aux excuses de Parwan, répond par l'absolution.
La Sahriki veut protester en se redressant, mais le regard-témoin de son dieu la réduit au silence. La voix de sa prêtresse lui fait baisser les yeux d'instinct, hocher la tête de gratitude.
Elles quittent la cellule en silence. Parwan retrouve avec soulagement la pudeur de son voile et de son chapeau, la dignité de son pantalon, la protection de ses bottes et de sa longue cape. Ses bras meurtris doivent toujours la lancer car elle s'habille avec peine.
Elle remonte à la suite d'Athénaïs vers la surface, et une crainte soudaine descend sur elle.
Les voilà bientôt dans la cour principale. La Sahriki s'apprête à se faire discrète le temps de rejoindre ses quartiers mais Athénaïs n'emprunte pas les allées en marge de l'agitation générale, non, elle se dirige droit vers le centre, à la vue de tous !
Le souvenir de son intrusion est encore frais dans l'air. On sent encore le feu de paille qu'elle avait provoqué.
Une angoisse sourde lui tombe sur les épaules. Elle venait à peine d'être prise que, déjà, elle marchait libre à ses côtés. Allait-elle l'annoncer à tous ? Ses hommes comprendraient-ils sa bonté envers elle ?
Au grand dam de Parwan, Athénaïs ordonne le rassemblement.
Parwan n'a qu'une crainte à cet instant : Que ses actions égoïstes causent le moindre tord à l'image de sa magicienne. Et si elle provoquait l'ire de ceux qui lui devaient obéissance ?
Elle ralentit le pas pour éviter de marcher à ses côtés. Elle voudrait être en chaînes, à ce moment.
A contrecœur, elle grimpe sur l'estrade à sa suite.
Parmi la troupe elle reconnaît des visages parmi ceux qu'elle a défait, des arcades ouvertes, des lèvres tuméfiées,des bras en écharpe.
Parwan les vaincrait cent fois à nouveau si le chemin du combat menait à Athénaïs.
La Sahriki entretient l'espoir secret que le lieutenant se ravise, la fasse expier dès maintenant, sur cette scène.
Elle subirait toutes les humiliations plutôt que de salir le nom de sa disciple.
Mais Athénaïs n'a que faire qu'on sache l'intrus châtiée. Sans perdre de salive à se justifier, elle place la nomade sous la protection de son nom et les pouvoirs de son rang.
Parwan entend le sourire dans sa voix et redresse sa posture navrée. Elle doit se montrer à la hauteur son enthousiasme. Alors elle la regarde fidèlement s'adresser aux troupes pour montrer à tous qu'elle était digne de ses faveurs. Athénaïs rayonne sur le piédéstal.
Parwan la revoit prêcher dans le désert entourés de jeunes disciples d'un soir et une vague de félicité la submerge. Elle avait fait tant de chemin. Elle lui paraissait si solide, incontestable de ses hommes comme d'elle même.
La troupe se sépare sans un murmure de réprobation.
La nomade est sonnée. Et comme si elle ne s'éprenait pas assez vite de l'Athénaïs qu'elle redécouvrait sous ses yeux, celle ci l'attrape par la taille pour l'aider à redescendre.
Parwan rougit. D'être portée avec une telle facilité, de sentir la force dans ses bras la déposer sur le pavé, elle, son maître, sa guide !
Parvenue au sol plus amoureuse qu'elle ne l'avait quitté, elle se laisse prendre la main et s'entrelacer leurs doigts.
« Viens ... Nous avons beaucoup à rattraper … »
« Oui, c'est vrai. » dit-elle d'une voix bien trop basse à son goût.
C'était la fin, pense-elle en s'éloignant. Eulalie ne la laisserait jamais oublier ce moment de fragilité.
En silence, elles disparaissent dans les fortifications et pénètrent une des tour en ruine dont la position ne méritait pas d'être occupée malgré sa hauteur. Elles gravissent un escalier en colimaçon épousant l'arrondi de sa façade et débouchent au sommet, sous le toit pointu et délabré. Parwan s'installe sur une large pierre écroulée face au soleil couchant. Elle tire Athénaïs contre elle, la fait asseoir sur ses genoux en amazone.
Ensemble, elles profitent seules de la vue et de l'atmosphère sereine, habitée des sons de la caserne qui s'élevaient de la cour centrale. La nomade enlace sa taille, profitant de son poids confortable sur ses cuisses.
« Je n'ai pas changé, tu sais. » dit-elle après un instant, levant les yeux, presque désolée, coupable. « Je suis restée la même vagabonde qui t'a laissée aux portes de Taisen. Pour répondre à l'appel, partir vers l'Ouest. »
« J'y suis allée pour mourir. » avoue la nomade. « Pour me racheter. Je pensais que les dieux m'offraient une dernière chance de tomber auprès des miens, d'être guidée aux étoiles par leurs prières. Que notre histoire était qu'un bel épilogue. »
Parwan portait toujours ses vieux démons. L'intense culpabilité de n'avoir jamais donné d'hériter à son deuxième époux et la hantise de mourir seule, l'âme égarée, de se perdre en chemin vers les étoiles, faute de frères et sœurs pour la guider.
« Mais je n'ai pas réussi. A mourir. Chaque fois que la mort s'approchait, je pensais à toi. Tu étais partout. Et quand je me tenais debout au dessus de mes adversaires, tu n'étais plus là. Et tu me manquais très fort. Et je voulais te revoir.
Tu m'as sauvée, Athénaïs. C'est cette envie égoïste qui m'a poussée pendant ces deux ans, jusqu'à me battre contre tes hommes.
Mais toi, tu as changé. Tu as tellement grandie depuis que tu marches sous Son regard. Tes yeux voient loin devant toi, tu rayonnes ! Je ne réalisais pas quand tes parents m'ont appris où tu étais. Je ne comprend que maintenant : Tu es officier aux commandes d'un fort et de tous ses soldats ! Je suis tellement, tellement fière de toi, ma chérie... »
Elle dépose une caresse maternelle sur sa joue et lui sourit avec tendresse.
- Parwan parle Shierak qiya en italique et Commun en bold color=#ffcc00 -
Citoyen de La République
Athénaïs de Noirvitrail
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La magicienne, confortablement assise sur les genoux de son aimée, bascula lentement contre elle, cherchant le confort de son roc retrouvé. Face au lac de la Renaissance, alors que le soleil était haut dans le ciel, elle se sentait revivre dans les bras de Parwan. Cette dernière continuait à déballer son sac, empilant sur la tour déjà très haute les moellons de sa culpabilité. La jeune femme n’avait pas cessé de couver du regard son ainée, soutenant de ses grands yeux bleus celle qu’elle venait de retrouver. Lorsque Parwan esquissa un geste vers sa joue, Athénaïs plaça sa main contre la sienne et remonta lentement vers elle pour l’embrasser.
« Tu as fait ce qui te semblait juste et tu es revenue. Tout va bien à présent. Regarde-moi Parwan Sahriki, et ne détourne plus jamais le regard. Je suis la mélodie et tu es les paroles. Et nous avons tout le temps que nous donnent les Astres désormais. »
Elle mêla ses doigts aux siens, se blottissant contre elle de plus belle, cherchant à lui assurer son soutien et sa dévotion indéfectible. Les deux âmes sœurs étaient désormais réunies et tout était pour le mieux, dans le meilleur des mondes possibles. Athénaïs savait que le devoir de Parwan l’amènerait probablement à devoir la quitter à nouveau, de même que ses propres obligations pouvaient lui imposer de partir elle-aussi sur le front. La Façonneuse comprenait parfaitement le déchirement intérieur de la nomade car elle partageait les mêmes craintes. Mais le monde qui les entourait se fichait éperdument de leurs états d’âme, aussi fallait-il profiter de ces moments de paix autant que faire se pouvait.
Ses longues boucles flottant dans le vent, un sourire béat aux lèvres, la commandante de la Huitième Légion retrouvait son âme de fleur bleue en la présence de sa compagne. Elle frotta son nez contre le sien et la couvrit de baisers en riant comme une enfant, ses mèches rebelles se mêlant à la tresse de Parwan tandis que ses mains redécouvraient ce corps qui lui avait tant manqué et cette âme qu’elle désirait tant.
Les rires d’Athénaïs, alliés à ses mains baladeuses pénétrèrent avec attention et douceur les multiples couches de vêtements de Parwan. Redécouvrant son amante après tant d’années, elle veilla à rester la plus douce possible, offrant de la bienveillance et de la volupté à la guerrière qui venait à peine de déposer ses sacs de culpabilité. Se reconnecter, s’évaluer, s’apprécier, s’aimer … des actes qui ne pouvaient que se réaliser à deux et Athénaïs souhaitait ardemment que sa propre flamme illumine à nouveau les braises de Parwan, qui restaient encore étouffées sous le poids des horreurs qu’elle avait vécu. Doucement, simplement, mais sûrement, la jeune femme recouvrait de toute sa chaleur et de tout son bonheur la nomade, afin que plus jamais elle ne puisse douter de son amour pour elle.
« Je t’aime Parwan Sahriki ! » dit-elle, rayonnante, alors qu’elle faisait basculer Parwan vers l’arrière, l’entrainant dans sa parade amoureuse.
Le soleil commençait à peine à décliner quand les deux femmes se retrouvèrent avec seulement le silence pour compagnon. Enveloppée dans les plis de la large cape de sa compagne, la Façonneuse entortillait ses doigts dans l’immense tresse noire de Parwan, ne se lassant pas de la dévorer des yeux, son odeur d’encens froid et de sable chaud lui rappelant milles et un plaisirs. Le désert, le premier pèlerinage, …
C’est alors qu’elle se rendit compte que la jeune fille de Justice n’était plus. Si Parwan voyait en elle les expériences accumulées, elle oubliait les renoncements auxquels Athénaïs avait dû consentir. Au nom de la République, la jeune femme avait dû mettre de côté ses vœux au nom du Shierak. Un renoncement, temporaire, mais nécessaire, afin de pouvoir survivre ces trois dernières années.
« Je suis désolée Parwan … Tu vas me trouver bien indigne … Je n’ai pas pu respecter tous tes enseignements durant ces années. Beaucoup de choses ont été perdues et j’ai bien peur de ne pas avoir été aussi fidèle aux étoiles que tu l’aurais souhaité » murmura-t-elle en se remettant assise, ses longs cheveux bouclés flottant dans la brise.
« Tu as fait ce qui te semblait juste et tu es revenue. Tout va bien à présent. Regarde-moi Parwan Sahriki, et ne détourne plus jamais le regard. Je suis la mélodie et tu es les paroles. Et nous avons tout le temps que nous donnent les Astres désormais. »
Elle mêla ses doigts aux siens, se blottissant contre elle de plus belle, cherchant à lui assurer son soutien et sa dévotion indéfectible. Les deux âmes sœurs étaient désormais réunies et tout était pour le mieux, dans le meilleur des mondes possibles. Athénaïs savait que le devoir de Parwan l’amènerait probablement à devoir la quitter à nouveau, de même que ses propres obligations pouvaient lui imposer de partir elle-aussi sur le front. La Façonneuse comprenait parfaitement le déchirement intérieur de la nomade car elle partageait les mêmes craintes. Mais le monde qui les entourait se fichait éperdument de leurs états d’âme, aussi fallait-il profiter de ces moments de paix autant que faire se pouvait.
Ses longues boucles flottant dans le vent, un sourire béat aux lèvres, la commandante de la Huitième Légion retrouvait son âme de fleur bleue en la présence de sa compagne. Elle frotta son nez contre le sien et la couvrit de baisers en riant comme une enfant, ses mèches rebelles se mêlant à la tresse de Parwan tandis que ses mains redécouvraient ce corps qui lui avait tant manqué et cette âme qu’elle désirait tant.
Les rires d’Athénaïs, alliés à ses mains baladeuses pénétrèrent avec attention et douceur les multiples couches de vêtements de Parwan. Redécouvrant son amante après tant d’années, elle veilla à rester la plus douce possible, offrant de la bienveillance et de la volupté à la guerrière qui venait à peine de déposer ses sacs de culpabilité. Se reconnecter, s’évaluer, s’apprécier, s’aimer … des actes qui ne pouvaient que se réaliser à deux et Athénaïs souhaitait ardemment que sa propre flamme illumine à nouveau les braises de Parwan, qui restaient encore étouffées sous le poids des horreurs qu’elle avait vécu. Doucement, simplement, mais sûrement, la jeune femme recouvrait de toute sa chaleur et de tout son bonheur la nomade, afin que plus jamais elle ne puisse douter de son amour pour elle.
« Je t’aime Parwan Sahriki ! » dit-elle, rayonnante, alors qu’elle faisait basculer Parwan vers l’arrière, l’entrainant dans sa parade amoureuse.
Le soleil commençait à peine à décliner quand les deux femmes se retrouvèrent avec seulement le silence pour compagnon. Enveloppée dans les plis de la large cape de sa compagne, la Façonneuse entortillait ses doigts dans l’immense tresse noire de Parwan, ne se lassant pas de la dévorer des yeux, son odeur d’encens froid et de sable chaud lui rappelant milles et un plaisirs. Le désert, le premier pèlerinage, …
C’est alors qu’elle se rendit compte que la jeune fille de Justice n’était plus. Si Parwan voyait en elle les expériences accumulées, elle oubliait les renoncements auxquels Athénaïs avait dû consentir. Au nom de la République, la jeune femme avait dû mettre de côté ses vœux au nom du Shierak. Un renoncement, temporaire, mais nécessaire, afin de pouvoir survivre ces trois dernières années.
« Je suis désolée Parwan … Tu vas me trouver bien indigne … Je n’ai pas pu respecter tous tes enseignements durant ces années. Beaucoup de choses ont été perdues et j’ai bien peur de ne pas avoir été aussi fidèle aux étoiles que tu l’aurais souhaité » murmura-t-elle en se remettant assise, ses longs cheveux bouclés flottant dans la brise.
Citoyen du Reike
Parwan Sahriki
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Info personnage
Race: Humaine
Vocation: Combattant assassin
Alignement: Neutre bon
Rang: C
« Tu as fait ce qui te semblait juste et tu es revenue. Tout va bien à présent. Regarde-moi Parwan Sahriki, et ne détourne plus jamais le regard. Je suis la mélodie et tu es les paroles. Et nous avons tout le temps que nous donnent les Astres désormais. »
La poésie d'Athénaïs balaye l'expression morose du visage de Parwan pour y peindre un grand sourire. Tout le temps que nous donnent les Astres.
.
A nouveau, elle la conquit en une phrase. Une phrase bien trop puissante pour qu'elle garde contenance.
« C'est promis. Je veux chanter toute ma vie avec toi. » dit-elle en resserrant ses doigts entre les siens.
Comme toujours, les promesses de la Sahriki résonnaient, elles et leur inviolable certitude.
___
Parwan rigole sous la pluie de bisous de sa jolie métisse, tente de contre attaquer mais son visage a l'avantage de la hauteur.
Puis ses caresses viennent l'explorer, entrent dans ses vêtements, installent un silence.
La nomade plonge son regard dans celui dans la façonneuse, surprise, pour une part, prise de court. Elle pensait révolu pour elle le temps des attentions tactiles, des doigts courant sous sa tunique à l'abri des regards, soulevant à l'aveugle les différentes épaisseurs pour venir découvrir son ventre, explorer ses côtes.
C'était il y a deux décennies. Par d'autres mains aimées, nubiles mais éphémères. Des mains dont la course manquait d'une chose à laquelle la bienveillance ne palliait pas : Nul n'avait désigné celle qui se blottissait dans ses bras. Elles s'étaient trouvées toutes seules, sans l'intercession d'un père ou d'un tuteur, et le fruit de leurs étreintes ne tenait qu'à de leurs propres efforts à survivre loin de l'autre et d'enfin pouvoir se retrouver.
La nomade interroge son amoureuse avec des yeux de femme qui se pense trop vieille. L’œuvre de décennies à n'être appelée rien d'autre qu' infertile et fanée par des patriarches vénérables à qui elle portait tant de crédit. Dans son esprit, Parwan pensait son corps éteint, gris comme les pierres sous la montagne.
Les mains d'Athénaïs, comme celles d'une guérisseuse, réveillent, centimètre par centimètre, le corps de la Sahriki à lui-même, le sortant d'un sommeil engourdi long de plus de vingt ans causé par la honte et la violence.
Une caresse invisible, indépendante d'Athénaïs passe dans son bas-ventre.
Parwan veut l'imiter, glisser audacieusement ses doigts sous les vêtements d'Athénaïs. Elle se contient, pourtant.
Quelque chose de remonter les jambes pleines de vitalité de sa républicaine, qui allait toujours cuisses nues sous sa robe, lui met le feu aux oreilles. Et elle craint de ne savoir faire preuve de la même retenue que les mains qui découvrent déjà ses flancs.
Alors, la nomade ne pipe mot et son regard valide chaleureusement son âme soeur dans son exploration.
Les mains d'Athénaïs sont comme à la maison, parcourant les formes secrètes sous sa tunique. Dans ses yeux, elles deviennent propriétaires de ce qu'elles touchent. Déjà, le corps de Parwan lui appartient autant qu'à elle.
Elles passent à l'horizontale et, alors qu'elles basculent, Athénaïs lui déclare son amour.
Les mots brillants d'Athénaïs vibrent dans le corps de Parwan et se gravent à tout jamais dans sa mémoire. Elle l'embrasse avec plus de force que jamais.
« Je t'aime aussi, Athénaïs de Noirvitrail. » souffle-t-elle contre sa bouche, les mains sur ses joues. Elle l'étreint avec la même détresse, incapable de contenir le bonheur dont elle déborde.
« Je t'aime si fort... »
Parwan goûte sans se lasser aux lèvres d'Athénaïs, le bruit discret de ses baisers va et vient comme la mer sur la plage.
Pour Athénaïs, il suffit de laisser la gravité faire son œuvre. Mais la nomade en dessous préfère forcer la nature, la main posée sur sa nuque pour l'attirer vers elle.
Le temps passe, comme dans une bulle, enveloppant leur étreinte.
Les deux femmes se drappent dans sa longue cape de bédouine, comme du temps de leur pèlerinage lorsqu'elles s'endormaient dans le désert, épaule contre épaule, à l'abri du sable et du froid.
A présent, la cape de Parwan couvait la chaleur et le confort de leur étreinte.
Athénaïs peut le voir : Jouer avec ses cheveux de la sorte, sous le secret de son châle, bouleverse Parwan d'intimité. Sentir ses doigts écarter l'un après l'autre les nœuds de sa tresse, comme les perles d'un long collier de prière lui fait monter le rouge aux joues. Elle le savait. Rien n'était plus intime pour son maître que ses propres cheveux.
En réponse, des caresses naissent dans la nuque d'Athénaïs et glissent sur son dos. Elles explorent ses hanches et, après quelques détours, épousent la forme de ses fesses à travers sa robe. Puis ses doigts rebroussent chemin. A chaque passage, le geste est plus minutieux, plus appuyé, plus attentif.
Parwan cherche une réaction dans ses yeux. Elle ne veut pas prendre plus que ce qui lui est offert. En tant qu'aïnée, elle se doit de faire preuve de retenue, mais quand chaque geste va plus loin que le précédent, elle tremble de connaître jusqu'où les deux femmes pourraient aller.
Mais Athénaïs finit par se redresser au dessus d'elle, faire retomber la température. Parwan se redresse elle aussi, sentant le soucis qui provenait de son regard, de sa posture.
Elle l'écoute en silence, joignant les mains sur sa poitrine, un réflexe pieux qui la prenait lorsqu'elle était inquiète.
« Oh... » Athénaïs connait assez sa guide pour comprendre que son expression douloureuse n'est pas de la déception.
C'est une crainte sourde et grandissante quand au regard que posent les Astres sur sa disciple.
Elle s'assied avec elle à sa gauche. Son regard ne la quitte pas, comme à chaque fois qu'elle lui parle.
« Je voulais te demander. Plus tard. » Elle désigne vaguement ses propres cheveux, comme s'ils volaient aussi au vent. « Je ne savais pas si tu avais trouvé une nouvelle voie où si tu t'étais perdue, tu paraissais si confiante... »
Il y a deux ans, dans le désert, Athénaïs et ses sœurs avaient toutes trouvé la foi, chacune avec leur façon unique et précieuse de rendre hommage aux Astres. Et toutes avaient adopté la coutume de leur guide de se couvrir la tête. A leur façon. Par respect pour les Dieux.
Mais voilà, après deux ans, Athénaïs, ses sœurs aussi peut-être, allait tête nue au regard des Astres et confessait d'autres manquements.
Un silence.
« Ce n'est pas à moi qu'il faut t'excuser, tu le sais. »
Le ton de Parwan est grave, presque empêché par la crainte des puissances supérieures qu'elle convoque.
Face au carré de ciel qui s'enflamme des couleurs de fin d'après midi, Parwan est comme une jeune fille sage aux côtés de sa petite sœur qui apprend à ses géniteurs l'ampleur de sa faute mais qui partage avec elle l'angoisse de sa punition .
« Je n'ai fait que te guider jusque sous leur regard et ils ont posés leurs yeux sur toi. C'est à chaque fidèle de se montrer digne de cet honneur ; Les Astres se rappellent de tous les manquements, de chaque péché. Le Soleil Tout-Puissant voit chaque lever ou il n'est pas salué, la Lune Eternelle, chaque coucher où elle n'est pas priée. Tous voient tes fautes. »
Parwan pose sa main sur la sienne, la crainte des divins dans sa voix.
« Tu dois demander pardon, faire pénitence de tes fautes, Athénaïs.
Le Soleil est plein de miséricorde ! J'ai été faible, pourtant Il m'a pardonnée et m'a menée droit vers toi ! Shehk Tout Puissant reconnaît la valeur de chacun dans la sueur et le sang qu'il produit, tu le sais ; C'est comme ça qu'il t'as reconnue la première fois !
Dédie Lui une épreuve à la hauteur de tes fautes. Agenouille toi et prie sans relâche. La Bergère de la Nuit ne reconnaît que la dévotion. Lorsqu'Ils t'auront pardonnée, tu le sauras.»
Parwan prêche des leçons déjà données, mais la situation s'y prête. Rarement le ton du maître traduisait l'obligation de ses pratique car elle enseignait à un esprit libre. Ici, c'était pourtant le cas.
« Je ne veux pas qu'Ils détournent leur regard de toi. Qu'Ils cessent d'éclairer ton chemin, de te donner leur force. Je... »
Son regard dérive brièvement sur les longues boucles d'Athénaïs, libres du voile qu'elle portait lorsqu'elles s'étaient quittées, et Parwan se dresse debout comme un ressort, se plante face à elle droite comme un i, poings fermés, les bras le long du corps. Elle cesse de tourner autour du pot.
« Je... Je veux être la seule à te voir tête nue, Athénaïs ! A pouvoir contempler tes cheveux détachés. Que même les Dieux soient privés de ce spectacle ! » exprime Parwan, soudain très embarrassée, s’efforçant de garder bloqués dans sa gorge tous les superlatifs de beauté qu'elle aurait voulu ajouter à sa demande.
Une nouvelle confession. A la nomade, car seules les femmes préservaient leur cheveux pour les yeux de leur époux. Une demande d’exclusivité aux parfums follement conjugaux.
Le dos tourné au Soleil, Parwan va chercher la base de sa tresse et la tire devant elle, déroulant comme un long serpent ses nœuds noirs par dessus son épaule.
Athénaïs l'avait souvent vue en intérieur sans voile ni chapeau car elle abandonnait cette pudeur en la seule compagnie des femmes. Mais toute en habits ? En extérieur, comme maintenant ?
Lui reviennent sans doute en mémoire les nombreuses fois où son maître avait expliqué qu'elle réservait cette vue à son âme-soeur, celle auprès de qui elle voudrait finir sa vie.
« Je veux que tu sois la seule à voir les miens, Athénaïs. »
Elle lui tend la main.
D'un geste, elle lui propose de se lever pour redescendre, rejoindre ses quartiers, peut être.
La poésie d'Athénaïs balaye l'expression morose du visage de Parwan pour y peindre un grand sourire. Tout le temps que nous donnent les Astres.
.
A nouveau, elle la conquit en une phrase. Une phrase bien trop puissante pour qu'elle garde contenance.
« C'est promis. Je veux chanter toute ma vie avec toi. » dit-elle en resserrant ses doigts entre les siens.
Comme toujours, les promesses de la Sahriki résonnaient, elles et leur inviolable certitude.
___
Parwan rigole sous la pluie de bisous de sa jolie métisse, tente de contre attaquer mais son visage a l'avantage de la hauteur.
Puis ses caresses viennent l'explorer, entrent dans ses vêtements, installent un silence.
La nomade plonge son regard dans celui dans la façonneuse, surprise, pour une part, prise de court. Elle pensait révolu pour elle le temps des attentions tactiles, des doigts courant sous sa tunique à l'abri des regards, soulevant à l'aveugle les différentes épaisseurs pour venir découvrir son ventre, explorer ses côtes.
C'était il y a deux décennies. Par d'autres mains aimées, nubiles mais éphémères. Des mains dont la course manquait d'une chose à laquelle la bienveillance ne palliait pas : Nul n'avait désigné celle qui se blottissait dans ses bras. Elles s'étaient trouvées toutes seules, sans l'intercession d'un père ou d'un tuteur, et le fruit de leurs étreintes ne tenait qu'à de leurs propres efforts à survivre loin de l'autre et d'enfin pouvoir se retrouver.
La nomade interroge son amoureuse avec des yeux de femme qui se pense trop vieille. L’œuvre de décennies à n'être appelée rien d'autre qu' infertile et fanée par des patriarches vénérables à qui elle portait tant de crédit. Dans son esprit, Parwan pensait son corps éteint, gris comme les pierres sous la montagne.
Les mains d'Athénaïs, comme celles d'une guérisseuse, réveillent, centimètre par centimètre, le corps de la Sahriki à lui-même, le sortant d'un sommeil engourdi long de plus de vingt ans causé par la honte et la violence.
Une caresse invisible, indépendante d'Athénaïs passe dans son bas-ventre.
Parwan veut l'imiter, glisser audacieusement ses doigts sous les vêtements d'Athénaïs. Elle se contient, pourtant.
Quelque chose de remonter les jambes pleines de vitalité de sa républicaine, qui allait toujours cuisses nues sous sa robe, lui met le feu aux oreilles. Et elle craint de ne savoir faire preuve de la même retenue que les mains qui découvrent déjà ses flancs.
Alors, la nomade ne pipe mot et son regard valide chaleureusement son âme soeur dans son exploration.
Les mains d'Athénaïs sont comme à la maison, parcourant les formes secrètes sous sa tunique. Dans ses yeux, elles deviennent propriétaires de ce qu'elles touchent. Déjà, le corps de Parwan lui appartient autant qu'à elle.
Elles passent à l'horizontale et, alors qu'elles basculent, Athénaïs lui déclare son amour.
Les mots brillants d'Athénaïs vibrent dans le corps de Parwan et se gravent à tout jamais dans sa mémoire. Elle l'embrasse avec plus de force que jamais.
« Je t'aime aussi, Athénaïs de Noirvitrail. » souffle-t-elle contre sa bouche, les mains sur ses joues. Elle l'étreint avec la même détresse, incapable de contenir le bonheur dont elle déborde.
« Je t'aime si fort... »
Parwan goûte sans se lasser aux lèvres d'Athénaïs, le bruit discret de ses baisers va et vient comme la mer sur la plage.
Pour Athénaïs, il suffit de laisser la gravité faire son œuvre. Mais la nomade en dessous préfère forcer la nature, la main posée sur sa nuque pour l'attirer vers elle.
Le temps passe, comme dans une bulle, enveloppant leur étreinte.
Les deux femmes se drappent dans sa longue cape de bédouine, comme du temps de leur pèlerinage lorsqu'elles s'endormaient dans le désert, épaule contre épaule, à l'abri du sable et du froid.
A présent, la cape de Parwan couvait la chaleur et le confort de leur étreinte.
Athénaïs peut le voir : Jouer avec ses cheveux de la sorte, sous le secret de son châle, bouleverse Parwan d'intimité. Sentir ses doigts écarter l'un après l'autre les nœuds de sa tresse, comme les perles d'un long collier de prière lui fait monter le rouge aux joues. Elle le savait. Rien n'était plus intime pour son maître que ses propres cheveux.
En réponse, des caresses naissent dans la nuque d'Athénaïs et glissent sur son dos. Elles explorent ses hanches et, après quelques détours, épousent la forme de ses fesses à travers sa robe. Puis ses doigts rebroussent chemin. A chaque passage, le geste est plus minutieux, plus appuyé, plus attentif.
Parwan cherche une réaction dans ses yeux. Elle ne veut pas prendre plus que ce qui lui est offert. En tant qu'aïnée, elle se doit de faire preuve de retenue, mais quand chaque geste va plus loin que le précédent, elle tremble de connaître jusqu'où les deux femmes pourraient aller.
Mais Athénaïs finit par se redresser au dessus d'elle, faire retomber la température. Parwan se redresse elle aussi, sentant le soucis qui provenait de son regard, de sa posture.
Elle l'écoute en silence, joignant les mains sur sa poitrine, un réflexe pieux qui la prenait lorsqu'elle était inquiète.
« Oh... » Athénaïs connait assez sa guide pour comprendre que son expression douloureuse n'est pas de la déception.
C'est une crainte sourde et grandissante quand au regard que posent les Astres sur sa disciple.
Elle s'assied avec elle à sa gauche. Son regard ne la quitte pas, comme à chaque fois qu'elle lui parle.
« Je voulais te demander. Plus tard. » Elle désigne vaguement ses propres cheveux, comme s'ils volaient aussi au vent. « Je ne savais pas si tu avais trouvé une nouvelle voie où si tu t'étais perdue, tu paraissais si confiante... »
Il y a deux ans, dans le désert, Athénaïs et ses sœurs avaient toutes trouvé la foi, chacune avec leur façon unique et précieuse de rendre hommage aux Astres. Et toutes avaient adopté la coutume de leur guide de se couvrir la tête. A leur façon. Par respect pour les Dieux.
Mais voilà, après deux ans, Athénaïs, ses sœurs aussi peut-être, allait tête nue au regard des Astres et confessait d'autres manquements.
Un silence.
« Ce n'est pas à moi qu'il faut t'excuser, tu le sais. »
Le ton de Parwan est grave, presque empêché par la crainte des puissances supérieures qu'elle convoque.
Face au carré de ciel qui s'enflamme des couleurs de fin d'après midi, Parwan est comme une jeune fille sage aux côtés de sa petite sœur qui apprend à ses géniteurs l'ampleur de sa faute mais qui partage avec elle l'angoisse de sa punition .
« Je n'ai fait que te guider jusque sous leur regard et ils ont posés leurs yeux sur toi. C'est à chaque fidèle de se montrer digne de cet honneur ; Les Astres se rappellent de tous les manquements, de chaque péché. Le Soleil Tout-Puissant voit chaque lever ou il n'est pas salué, la Lune Eternelle, chaque coucher où elle n'est pas priée. Tous voient tes fautes. »
Parwan pose sa main sur la sienne, la crainte des divins dans sa voix.
« Tu dois demander pardon, faire pénitence de tes fautes, Athénaïs.
Le Soleil est plein de miséricorde ! J'ai été faible, pourtant Il m'a pardonnée et m'a menée droit vers toi ! Shehk Tout Puissant reconnaît la valeur de chacun dans la sueur et le sang qu'il produit, tu le sais ; C'est comme ça qu'il t'as reconnue la première fois !
Dédie Lui une épreuve à la hauteur de tes fautes. Agenouille toi et prie sans relâche. La Bergère de la Nuit ne reconnaît que la dévotion. Lorsqu'Ils t'auront pardonnée, tu le sauras.»
Parwan prêche des leçons déjà données, mais la situation s'y prête. Rarement le ton du maître traduisait l'obligation de ses pratique car elle enseignait à un esprit libre. Ici, c'était pourtant le cas.
« Je ne veux pas qu'Ils détournent leur regard de toi. Qu'Ils cessent d'éclairer ton chemin, de te donner leur force. Je... »
Son regard dérive brièvement sur les longues boucles d'Athénaïs, libres du voile qu'elle portait lorsqu'elles s'étaient quittées, et Parwan se dresse debout comme un ressort, se plante face à elle droite comme un i, poings fermés, les bras le long du corps. Elle cesse de tourner autour du pot.
« Je... Je veux être la seule à te voir tête nue, Athénaïs ! A pouvoir contempler tes cheveux détachés. Que même les Dieux soient privés de ce spectacle ! » exprime Parwan, soudain très embarrassée, s’efforçant de garder bloqués dans sa gorge tous les superlatifs de beauté qu'elle aurait voulu ajouter à sa demande.
Une nouvelle confession. A la nomade, car seules les femmes préservaient leur cheveux pour les yeux de leur époux. Une demande d’exclusivité aux parfums follement conjugaux.
Le dos tourné au Soleil, Parwan va chercher la base de sa tresse et la tire devant elle, déroulant comme un long serpent ses nœuds noirs par dessus son épaule.
Athénaïs l'avait souvent vue en intérieur sans voile ni chapeau car elle abandonnait cette pudeur en la seule compagnie des femmes. Mais toute en habits ? En extérieur, comme maintenant ?
Lui reviennent sans doute en mémoire les nombreuses fois où son maître avait expliqué qu'elle réservait cette vue à son âme-soeur, celle auprès de qui elle voudrait finir sa vie.
« Je veux que tu sois la seule à voir les miens, Athénaïs. »
Elle lui tend la main.
D'un geste, elle lui propose de se lever pour redescendre, rejoindre ses quartiers, peut être.
- Parwan parle Shierak qiya en italique et Commun en bold color=#ffcc00 -
Citoyen de La République
Athénaïs de Noirvitrail
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Quitter la chaleur de la cape et les délicates attentions de Parwan …
Un véritable crève-cœur, mais tout de suite compensée par un délicat baiser.
Parwan l’écoute, dans une posture qui lui sied si bien, tandis qu’Athénaïs exprime ses doutes et ses regrets, affichant l’image d’une jeune femme qui s’est égarée sur le chemin de son cheminement spirituel. Mais dans le regard de Parwan, cette expression sage du maître face à son élève n’existait plus. Il n’y avait dans son regard que celui d’une femme aimante et soucieuse de son bien-être. Lentement, la tête de la Façonneuse se pose sur l’épaule de son amante. Un geste de douceur retiré avec délicatesse tandis que Parwan lui répond avec l’honnêteté qui lui sied si bien.
Elle sent sa main sur la sienne et immédiatement, mademoiselle de Noirvitrail ressent le trouble de son amante. En réponse, elle lui rend un regard plein de douceur, cherchant à la rassurer. Athénaïs n’avait peut-être pas suivi tous les préceptes à la lettre, mais sa foi restait aussi vibrante que le feu qui brûlait en elle pour la nomade. Les signes ostentatoires du Shierak n’étaient rien face à cet amour qui la portait et la rendait plus légère qu’une plume. Des milliers de prières s’amoncelaient dans sa tête, mais ce n’était pas pour demander pardon pour ses fautes … A la place, des milliers de mots de remerciements se bousculaient en elle. Les Astres l’avaient ramené à elle. Un tel cadeau valait plus que des demandes de pardon ! Il fallait offrir quelque chose en compensation. De ceci, elle ne dit mot, laissant Parwan déclamer sa tirade. Elle aurait pu la regarder ainsi toute sa vie … Cette nomade pleine de certitudes et de dévotion, mais dont le cœur était fait d’or pur et dont les yeux étaient des océans au milieu des dunes.
Sa main serre celle de Parwan. Elle l’écoute attentivement, ses mots aux intonations sonores se glissant à ses oreilles comme du miel. Tendrement, Athénaïs sourit tandis que ses boucles brunes s’agitent sous la brise du soir. Lorsque son amante se lève, elle l’accompagne dans un mouvement, sentant la gravité de son moment. Quelle est magnifique, dans la clarté mourante du jour, le vent soulevant doucement les pans de sa cape et de sa tunique. Elle pourrait se perdre pendant des heures dans les plis de ses vêtements … et dans ses yeux … Oh, Parwan … cette femme incroyable qui ne savait pas s’aimer … Athénaïs lui donnerait tout l’amour du monde et même plus, jusqu’à ce qu’elle finisse par comprendre qu’elle l’emplissait d’un bonheur incommensurable.
C’est alors que Parwan lui fit une demande des plus atypiques. La jeune femme resta interdite quelques instants, se laissant le temps pour digérer sa requête. Cette demande, qui aurait paru incongrue à n’importe quel républicain, prenait, dans la bouche de la nomade et dans les oreilles de la pieuse Athénaïs, un sens profond, synonyme d’engagement. Elle en eut le cœur en liesse, car pour Parwan, comme pour elle, il s’agissait d’une véritable preuve d’amour.
« Parwan Sahriki … tes mots me touchent … »
Elle contempla avec des yeux brillants la tresse de Parwan. Cette dernière ne l’affichait jamais en public, préférant les recouvrir d’un voile typique des nomades du désert. Voir la tresse de Parwan était un cadeau qu’elle n’offrait qu’à de rares individus. La voir les cheveux détachés … c’était là un spectacle que seule Athénaïs pouvait contempler. Sa main caressa avec douceur la tresse de sa bien-aimée, ses ongles parcourant les entrelacs soignés qui remontaient vers la base de son crâne tandis que son corps s’approchait de celui de la nomade.
« Ma bien-aimée, mes responsabilités au sein de la République m’obligent à ne pas faire étalage de ma foi quand je suis en fonction … Je ne peux donc pas t’accorder ce que tu souhaites. Mon devoir de lieutenante s’impose à moi avant tout …»
Elle se pinça les lèvres et regarda Parwan intensément. Ses obligations au sein de la République l’obligeaient à mettre de côté sa foi lorsqu’elle était en fonction. C’était nécessaire et c’était ce que l’on attendait d’elle. Parwan comprendrait-elle ce qui se jouait ? Accepterait-elle un compromis ? D’un geste, elle attrapa sa propre chevelure, ses longues boucles stoppées dans leur envol et momentanément disciplinées.
« Mais maintenant que tu es revenue et que nous sommes à nouveau réunies, je te confie le soin de ma chevelure, en signe d’amour. L'accepteras-tu, Parwan ? »
Athénaïs continua à harponner le regard de Parwan avec résolution. La demoiselle offrait à son amante une grande part d’elle-même : sa chevelure indisciplinée. Mais en remettant à Parwan le soin de ses cheveux, Athénaïs lui confiait une partie intime d’elle-même. C’était une grande marque de respect et de confiance, une offrande faite aux Astres et à elle en particulier. C’était un don d’une très grande intimité, un de ceux qu’elle faisait avec joie pour la nomade, elle qui ne pouvait accorder à Parwan ce qu’elle souhaitait au nom de son devoir.
N'attendant pas la réponse de Parwan, ses doigts s’entremêlèrent aux siens et elle tira sa bien-aimée vers elle, l’enjoignant à la suivre dans les escaliers de la tour. D’un pas léger, la demoiselle amena Parwan jusqu’à ses appartements de fonction, une pièce simple en apparence, mais dotée d’un lit suffisamment moelleux et doux pour le couple. Son regard devint malicieux.
« Maintenant que nous avons réglé nos derniers détails … Que dirais-tu de rattraper un peu le temps perdu ? »
Un véritable crève-cœur, mais tout de suite compensée par un délicat baiser.
Parwan l’écoute, dans une posture qui lui sied si bien, tandis qu’Athénaïs exprime ses doutes et ses regrets, affichant l’image d’une jeune femme qui s’est égarée sur le chemin de son cheminement spirituel. Mais dans le regard de Parwan, cette expression sage du maître face à son élève n’existait plus. Il n’y avait dans son regard que celui d’une femme aimante et soucieuse de son bien-être. Lentement, la tête de la Façonneuse se pose sur l’épaule de son amante. Un geste de douceur retiré avec délicatesse tandis que Parwan lui répond avec l’honnêteté qui lui sied si bien.
Elle sent sa main sur la sienne et immédiatement, mademoiselle de Noirvitrail ressent le trouble de son amante. En réponse, elle lui rend un regard plein de douceur, cherchant à la rassurer. Athénaïs n’avait peut-être pas suivi tous les préceptes à la lettre, mais sa foi restait aussi vibrante que le feu qui brûlait en elle pour la nomade. Les signes ostentatoires du Shierak n’étaient rien face à cet amour qui la portait et la rendait plus légère qu’une plume. Des milliers de prières s’amoncelaient dans sa tête, mais ce n’était pas pour demander pardon pour ses fautes … A la place, des milliers de mots de remerciements se bousculaient en elle. Les Astres l’avaient ramené à elle. Un tel cadeau valait plus que des demandes de pardon ! Il fallait offrir quelque chose en compensation. De ceci, elle ne dit mot, laissant Parwan déclamer sa tirade. Elle aurait pu la regarder ainsi toute sa vie … Cette nomade pleine de certitudes et de dévotion, mais dont le cœur était fait d’or pur et dont les yeux étaient des océans au milieu des dunes.
Sa main serre celle de Parwan. Elle l’écoute attentivement, ses mots aux intonations sonores se glissant à ses oreilles comme du miel. Tendrement, Athénaïs sourit tandis que ses boucles brunes s’agitent sous la brise du soir. Lorsque son amante se lève, elle l’accompagne dans un mouvement, sentant la gravité de son moment. Quelle est magnifique, dans la clarté mourante du jour, le vent soulevant doucement les pans de sa cape et de sa tunique. Elle pourrait se perdre pendant des heures dans les plis de ses vêtements … et dans ses yeux … Oh, Parwan … cette femme incroyable qui ne savait pas s’aimer … Athénaïs lui donnerait tout l’amour du monde et même plus, jusqu’à ce qu’elle finisse par comprendre qu’elle l’emplissait d’un bonheur incommensurable.
C’est alors que Parwan lui fit une demande des plus atypiques. La jeune femme resta interdite quelques instants, se laissant le temps pour digérer sa requête. Cette demande, qui aurait paru incongrue à n’importe quel républicain, prenait, dans la bouche de la nomade et dans les oreilles de la pieuse Athénaïs, un sens profond, synonyme d’engagement. Elle en eut le cœur en liesse, car pour Parwan, comme pour elle, il s’agissait d’une véritable preuve d’amour.
« Parwan Sahriki … tes mots me touchent … »
Elle contempla avec des yeux brillants la tresse de Parwan. Cette dernière ne l’affichait jamais en public, préférant les recouvrir d’un voile typique des nomades du désert. Voir la tresse de Parwan était un cadeau qu’elle n’offrait qu’à de rares individus. La voir les cheveux détachés … c’était là un spectacle que seule Athénaïs pouvait contempler. Sa main caressa avec douceur la tresse de sa bien-aimée, ses ongles parcourant les entrelacs soignés qui remontaient vers la base de son crâne tandis que son corps s’approchait de celui de la nomade.
« Ma bien-aimée, mes responsabilités au sein de la République m’obligent à ne pas faire étalage de ma foi quand je suis en fonction … Je ne peux donc pas t’accorder ce que tu souhaites. Mon devoir de lieutenante s’impose à moi avant tout …»
Elle se pinça les lèvres et regarda Parwan intensément. Ses obligations au sein de la République l’obligeaient à mettre de côté sa foi lorsqu’elle était en fonction. C’était nécessaire et c’était ce que l’on attendait d’elle. Parwan comprendrait-elle ce qui se jouait ? Accepterait-elle un compromis ? D’un geste, elle attrapa sa propre chevelure, ses longues boucles stoppées dans leur envol et momentanément disciplinées.
« Mais maintenant que tu es revenue et que nous sommes à nouveau réunies, je te confie le soin de ma chevelure, en signe d’amour. L'accepteras-tu, Parwan ? »
Athénaïs continua à harponner le regard de Parwan avec résolution. La demoiselle offrait à son amante une grande part d’elle-même : sa chevelure indisciplinée. Mais en remettant à Parwan le soin de ses cheveux, Athénaïs lui confiait une partie intime d’elle-même. C’était une grande marque de respect et de confiance, une offrande faite aux Astres et à elle en particulier. C’était un don d’une très grande intimité, un de ceux qu’elle faisait avec joie pour la nomade, elle qui ne pouvait accorder à Parwan ce qu’elle souhaitait au nom de son devoir.
N'attendant pas la réponse de Parwan, ses doigts s’entremêlèrent aux siens et elle tira sa bien-aimée vers elle, l’enjoignant à la suivre dans les escaliers de la tour. D’un pas léger, la demoiselle amena Parwan jusqu’à ses appartements de fonction, une pièce simple en apparence, mais dotée d’un lit suffisamment moelleux et doux pour le couple. Son regard devint malicieux.
« Maintenant que nous avons réglé nos derniers détails … Que dirais-tu de rattraper un peu le temps perdu ? »
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Parwan Sahriki
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Info personnage
Race: Humaine
Vocation: Combattant assassin
Alignement: Neutre bon
Rang: C
Ses joues se fardent. Les yeux de Parwan appellent à l'aide alors qu'Athénaïs remonte avec ses doigts la tresse qu'elle venait pourtant elle-même d'exposer à la vue de tous.
« Ma bien-aimée, mes responsabilités au sein de la République m’obligent à ne pas faire étalage de ma foi quand je suis en fonction … Je ne peux donc pas t’accorder ce que tu souhaites. Mon devoir de lieutenante s’impose à moi avant tout …»
La nomade comprend tout de suite. Elle baisse un instant les yeux avec embarras, honteuse de ses propres exigences impulsives que même la passion ne justifie pas.
Mais elle s'avance en retour, prend doucement Athénaïs par la taille, comme pour s'excuser.
Ses yeux orangés reflètent doucement les siens.
« Oui pardon, je ne pense qu'à moi. A force de te vouloir, je t'emprisonne avec mes demandes, ce n'est pas bon... » Confesse-t-elle en souriant.
« Mais maintenant que tu es revenue et que nous sommes à nouveau réunies, je te confie le soin de ma chevelure, en signe d’amour. L'accepteras-tu, Parwan ? »
Les yeux de Parwan s'écarquillent de surprise, contemplant le visage intense de son amie, ceint de ses magnifiques cheveux bouclés.
« V... Vraiment ? » s'enquit-elle, dépassée par le poids du cadeau qu'Athénaïs lui faisait. Par le courage, l'abandon de cette offrande entre les mains d'autrui.
« C'est ton souhait ? Je... »
La main d'Athénaïs l'emporte sans attendre dans l'escalier en colimaçon, reprenant la direction de leur danse à deux. Parwan la suit, ses yeux perdus dans les boucles épaisses de celle qui la menait, tressautant dans les marches qui les ramenaient sur la terre ferme.
« Je l'accepte ! » Proteste presque Parwan sur un ton de il-ne-fallait-pas, prenant gare à ne pas trébucher dans sa lancée, soucieuse qu'elle était de transmettre à quel point elle mesurait l'ampleur de son cadeau. « J'en prendrais soin, je... »
Ses gages de sérieux bredouillés se perdent derrière la porte qui se ferme, laissant derrière elles le silence retrouvé de la tour en ruine.
______
Parwan rentre à la suite d'Athénaïs dans sa petite chambre d'officier, ses affaires - qu'elles étaient toutes deux parties chercher - enroulées sous son bras. Elle semble toujours déboussolée.
Entre quatre murs, un sol et un toit, enfin au calme, elle lève les yeux au plafond et comprend qu'elles s'arrêtent enfin. La nomade pose son rouleau sur la grande malle en bois et se tourne vers sa Républicaine.
« Maintenant que nous avons réglé nos derniers détails … Que dirais-tu de rattraper un peu le temps perdu ? »
« Attends. » répond Parwan sur un ton pressé en posant le rouleau sur une grande malle.
Elle s'avançe et, l'attrapant aux épaules, vient bloquer le dos d'Athénaïs contre la porte verrouillée.
Parwan porte ses lèvres à sa bouche.
Cette fois ci, ses deux mains se perdent dans les cheveux d'Athénaïs, ses doigts nagent dans les bouclettes qu'elle venait de lui confier, les tirent, les délient avec douceur. Elle presse Athénaïs de plus belle contre la porte close.
Alors, la métisse peut sentir le cœur de Parwan ralentir et se calmer à mesure que se prolonge leur baiser.
« Excuse moi. » … de t'avoir poussée à ce cadeau. peut compléter la jeune femme.
« Merci... merci. Je t'aime. » murmure-t-elle douloureusement, pleine de gratitude.
Encore quelques secondes de contact magique et l'anxiété mystérieuse et passagère de Parwan s'était envolée dans les bras d'Athénaïs.
Son sourire retrouve la même légèreté que celui de sa compagne alors qu'elle lui attrape les poignet et fait un pas en arrière.
« Rattrapons le temps perdu. » Acquiesce-t-elle.
Elle s'éloigne gaiement dans la chambre, se mettant pieds et tête nue, rangeant avec soin dans la malle son chapeau, son voile, sa cape et ses bottes.
Voyant que les braises rougeoient encore dans l'étroite cheminée, elle y fait coucher deux bûches au dessus des charbons ardents.
Son voile possédait un réel mérite : Une fois ôté, il était dur de détacher ses yeux du long pendule de ses cheveux très noirs tombant sur le dos de sa chemise brodée.
« Deux ans, c'est long ! J'ai tellement de choses à te raconter. » rigole-t-elle en s'asseyant sur le lit d'Athénaïs. Peu habituée à poser ses fesses sur des surfaces aussi molles, elle vacille très légèrement en arrière.
Comme toujours, il suffisait à Parwan de quitter sa cape pour se défaire de son aura de sagesse. De paraître sage, tout simplement, et de gagner en chaleur familière ce qu'elle perdait de modestie et de mystère.
Elle attend qu'Athénaïs s'installe à ses côtés et sourit.
« On s'est quittées à Taisen, devant les portes, tu te souviens ? Il y avait foule ! Des vieillards qui partaient en armes, tout le monde répondait à l'appel contre les Titans ! Il n'y avait que nous deux pour être tristes ! » rigole-t-elle.
« J 'ai rejoint les miens qu'on voyait s'éloigner et on a marché vers la capitale. Je ne me suis dévoilée à tous qu'une fois sur le bateau. Tu aurais vue Père, je ne l'avais jamais vue faire cette tête ! Ailah, Zali, toutes mes sœurs étaient là. Elles étaient si contentes !
Tu imagines ? Aidija avait treize ans quand je suis partie et maintenant elle en a trente-cinq! Marriée, huit enfants !
Ca n'a pas été facile d'être acceptée à nouveau. Les anciens étaient tous contre, tu sais ? Mais j'ai expliqué. Ils étaient verts d'apprendre que Qassan avait menti, que je n'étais pas morte et qu'il m'avait abandonnée ! Même moi, j'étais choquée. Un Sahriki qui ment, c'est si rare. Il était tant admiré.
C'est aussi moi qui leur ai appris la mort d'Hossein, figure toi. Vingt ans après le début de son hermitage ! Sa famille était si heureuse que je leur montre son étoile. De pouvoir le prier. Je pense que c'est ce qui a décidé Père à ne pas me répudier, dans le fond ; J'ai été une bonne épouse ! » dit-elle fièrement, les mains plantées sur les cuisses. « Et jusqu'au bout. » La Sahriki semblait s'accorder le luxe d'un compliment toutes les trois décennies.
Parwan ressasse avec enthousiasme et détails les réactions de chacun. C'est la première fois qu'elle parle à Athénaïs de sa famille et de ses défunts époux de façon si gaie.
Elle connaissait déjà l'histoire que Parwan lui avait raconté, mais pas dénuée de ce ton de culpabilité et de tristesse qui l'accablait d'ordinaire. Ici, la nomade se réjouissait, s'étonnait pour la première fois d'avoir prévalu sur son père, les autres vénérables et la volonté de Qassan, son mari brutal et terrifiant, de la condamner à l'oubli.
Rien dans son histoire ne laissait transparaître la tension et l'atmosphère accusatrice qui avait dû peser sur Parwan à cet instant. Sur le lit d'Athénaïs, la nomade triomphait. En toute modestie.
« La traversée n'a vue aucun bateau couler ! Louée soit Elle, tu sais à quel point j'ai horreur de l'eau, j'étais terrorisée. On a accostés sur les côtes de Shoumeï avec le reste de l'armée impériale. La plage tremblait sous le bruit des bottes et des sabots ! Il y en avait partout ! Des bannières, des drapeaux, des étendards de tribus. Le reflet des vagues s'enflammait de la fureur du Reike ! Quand j'ai posé mon pied dans la neige, je savais qu'à la grâce des Dieux, rien ne nous arrêterait.
La neige d'ailleurs, beaucoup de guerriers l'ont découverte en sortant du bateau. Comme je suis arrivée à Justice en hiver la première fois, je connaissais déjà mais... Comment expliquer... Il y en avait autant que de sable dans le désert et il en tombait toujours davantage.
Tu te rappelles des Tribus Tatouées ? » Demande-t-elle sur le ton de celles qui abordent un aparté. « Ceux qui marchent pieds nus dans le sable brûlant, qui portent des pagnes et des bandelettes de cuir ? Eh bien, le Soleil a abattu ses premières épreuves sur les plus braves d'entre nous ! Après moins d'une heure, les moins frileux troquaient leurs montures contre nos étoles et achetaient des bottes aux Ryssens qu'ils détestent pourtant plus que nous.
A la fin, ils étaient méconnaissables mais enfin prêts à partir. »
Difficile de se projeter sur les côtes glacées de Shoumeï quand la chambrette se remplissait de l'odeur de bois brûlée et de la chaleur du feu et que le craquement des bûches accompagnait la voix de Parwan.
« Nous avons marché sur Maël, la cité la plus proche. Elle était assiégée par des créatures des Titans et une armée de leurs serviteurs. Même moi qui ne lit pas, j'ai retenu les mots d'un chroniqueur qui a très bien décrit la bataille.
Pour la première fois sur Sekai, les crêtes qui couronnent Maël s'enflammèrent du Soleil du Reike. Et chacun de ses rayons était un guerrier. Et il inonda les pierres assiégées de Sa lumière. Et Il fit fondre dans une névasse sanglante jusqu'au dernier païen qui leva son sabre contre la volonté de ses fils
C'était un combat grandiose, je te dis ! Chaque jour à partir du premier, j'ai rêvé que tu sois venue avec moi ! On dit que nos maîtres stratèges n'ont même pas pu donner d'ordre. Partout sur la crête, on a entendu « Chargez ! » et tout le monde s'est mis a courir ! Moi aussi, je mourrais d'envie de me battre. Et ça a très bien marché ! »
Parwan rit au souvenir de cette charge aveugle et sa poitrine se gonfle d'un vieux souffle d'euphorie guerrière
« Les Sahrikis se sont détachés sur le flanc pour atteindre leurs archers. Tu nous aurais vues, moi et toutes mes sœurs, criblant leurs rangs à la fronde depuis les pentes rocailleuses. Zali riait à chaque fois que son galet touchait un casque.
On avançait bien, jusqu'à ce que leur général fasse avancer des boucliers contre nous. On s'est retrouvés au contact et quand les hommes sont parvenus à enfoncer leur ligne, on s'est toutes engouffrées dans les interstices.
J'ai eu un des plus beaux combats de ma vie ; Un paladin m'a arrêtée et son épée était si longue qu'un cercle s'est formé autour de nous.
Il était très fort, mais il abattait sa lame comme si chaque coup était le coup de grâce. Et il s'est mis à fatiguer sous sa grosse armure.
Je l'ai touché au visage et il est tombé sur le dos. Je lui ai planté mon couteau comme ça, dans la fente pour les yeux. »
Parwan illustre son histoire avec des gestes de main précis pour aider sa partenaire à imaginer l'action. Dans ses yeux brille l'excitation d'enfin pouvoir partager ces moments avec Athénaïs, mais on entend dans sa voix le soucis de faire vite afin d'en venir à l'histoire de sa républicaine.
« C'est là que j'ai reçu mes deux premières flèches, d'ailleurs. Une ici et une là. » Elle pointe son épaule et le dessous de sa clavicule. « Les médecins impériaux font des miracles, on ne voit presque plus rien. Je ne pensais pas qu'ils s'embêteraient pour quelqu'un comme moi. »
Elle sourit. « J'en ai d'autres, je te montrerais après. »
« Tu aurais vu les étendards du Reike se dresser sur les remparts... Il y avait de quoi s'envoler de fierté.
Par la suite, l'ennemi a de nouveau tenté de prendre la ville mais on l'a repoussé par deux fois.
Je te le dis. Les Astres brillaient enfin sur ce pays. Deux batailles décisives au creux d'une vallée où nous avons brisés l'armée des Titans. »
Pour la première fois, l'enthousiasme de Parwan change de ton.
« La suite a été plus longue. Pendant deux ans avec les miens, il a fallu les poursuivre, les empêcher de se rallier pendant que nos maîtres affrontaient les Titans.
C'est là que j'ai compris quelque chose :
Je n'étais plus la fille de mon Père.
J'étais devenue étrangère à ses yeux, et à travers eux, plus personne ne me considérait vraiment comme une Sahriki de sang, mais plutôt comme une Sahriki d'adoption. J'étais tolérée. Père ne parlait plus de me remarier ou de m'envoyer chez les matriarches. Rien. ll punissait mes sœurs lorsqu'elle s'adressaient à moi.
C'est drôle, j'aurais préféré qu'il continue à avoir honte de moi, honte de sa fille, tant que je l'étais encore. J'aurais pu me racheter en mourant, au moins.
Ca m'a rappelé ce que disait une aînée quand j'étais petite. « Ne meurs pas pour rien. » Et je n'avais pas compris ce qu'elle voulait dire. Parce que ce n'est pas à nous d'en décider. Mais brusquement, je ne voulais plus mourir pour mon père si je n'étais plus sa fille, tu vois ?
J'étais perdue, désespérée. Je voulais me battre pour quelqu'un qui compte pour moi.
...Et c'est quand j'ai compris que j'étais amoureuse de toi. »
Parwan éclate de rire.
« Tu étais partout. Dans mes traces quand je marchais, par dessus mon épaule au feu de camp, je t'entendais crier dans la mêlée, respirer la nuit sous ma tente. Je sentais ton odeur dans le linge de mes sœurs. Toujours hors de vue, à peine, un fantôme qui s'évanouissait quand je me tournais vers lui.
Je ne rêvais plus que de te revoir. Et c'est ça qui m'a sauvée ! Je serais morte dix fois sans ce rêve. De froid, de fatigue, de mes blessures. Les combats me mettaient toujours en colère parce qu'ils auraient pu me priver de toi. Et tu m'as rarement vue en colère, pas vrai ?
Finalement, la vérité du Reike a triomphé sur les Titans et nous sommes rentrés à Maël... pour faire régner l'ordre, figure toi. Parce que beaucoup étaient heureux de nous voir venir sans comprendre qu'ils accueillaient leurs nouveaux maîtres. »
Parwan marque une pause, comme pénétrée de toutes les oppositions qu'elle avait eu avec des Shoumeïens après la fin du conflit.
« Je sais que tu as eu de la compassion pour tous les réfugiés que tu as aidés. Tu sais aimer les faibles mieux que moi, c'est ce que j'admire chez toi. »
Elle repousse une bouclette frisée sur la tempe de son amie.
« Nous ne sommes pas restés longtemps. L'Impératrice a changé des lois sur l'esclavage ancestral qui ont beaucoup fâché les patriarches, puis elle a commis un blasphème terrible : Elle a autorisé l'emploi de serviteurs morts-vivants. »
Parwan écarquille les yeux et lève ses paumes au ciel pour exprimer sa confusion. Elle savait que leurs vues sur l'esclavage s'opposaient, mais elle entretenait l'espoir qu'Athénaïs partage son dégoût pour les pratiques nécromanciennes.
« Nous qui au Reike prêchons tous la pureté des corps, nous voilà revenus de guerre avec des cadavres pour serviteurs. Un affront au don du Soleil que de laisser pourrir sa création, une insulte à la Lune que de garder une âme prisonnière.
Nous sommes rentrés et je suis restée seule à Taisen.
Pour être sûre que les Astres me préféraient en vie, j'ai pris le chemin le plus long jusqu'à toi. Par la toundra au nord en passant par les sommets de ma montagne natale. C'était dur mais maintenant je sais que ma place est ici, assise avec toi sur ton lit. »
Soulagée d'avoir achevé son histoire, Parwan soupire et savoure un instant la justesse de son affirmation, le plaisir de leurs présences solitaires.
« Et toi ? Raconte moi ton temps perdu loin de moi. »
La nomade contient son impatience.
« Ma bien-aimée, mes responsabilités au sein de la République m’obligent à ne pas faire étalage de ma foi quand je suis en fonction … Je ne peux donc pas t’accorder ce que tu souhaites. Mon devoir de lieutenante s’impose à moi avant tout …»
La nomade comprend tout de suite. Elle baisse un instant les yeux avec embarras, honteuse de ses propres exigences impulsives que même la passion ne justifie pas.
Mais elle s'avance en retour, prend doucement Athénaïs par la taille, comme pour s'excuser.
Ses yeux orangés reflètent doucement les siens.
« Oui pardon, je ne pense qu'à moi. A force de te vouloir, je t'emprisonne avec mes demandes, ce n'est pas bon... » Confesse-t-elle en souriant.
« Mais maintenant que tu es revenue et que nous sommes à nouveau réunies, je te confie le soin de ma chevelure, en signe d’amour. L'accepteras-tu, Parwan ? »
Les yeux de Parwan s'écarquillent de surprise, contemplant le visage intense de son amie, ceint de ses magnifiques cheveux bouclés.
« V... Vraiment ? » s'enquit-elle, dépassée par le poids du cadeau qu'Athénaïs lui faisait. Par le courage, l'abandon de cette offrande entre les mains d'autrui.
« C'est ton souhait ? Je... »
La main d'Athénaïs l'emporte sans attendre dans l'escalier en colimaçon, reprenant la direction de leur danse à deux. Parwan la suit, ses yeux perdus dans les boucles épaisses de celle qui la menait, tressautant dans les marches qui les ramenaient sur la terre ferme.
« Je l'accepte ! » Proteste presque Parwan sur un ton de il-ne-fallait-pas, prenant gare à ne pas trébucher dans sa lancée, soucieuse qu'elle était de transmettre à quel point elle mesurait l'ampleur de son cadeau. « J'en prendrais soin, je... »
Ses gages de sérieux bredouillés se perdent derrière la porte qui se ferme, laissant derrière elles le silence retrouvé de la tour en ruine.
______
Parwan rentre à la suite d'Athénaïs dans sa petite chambre d'officier, ses affaires - qu'elles étaient toutes deux parties chercher - enroulées sous son bras. Elle semble toujours déboussolée.
Entre quatre murs, un sol et un toit, enfin au calme, elle lève les yeux au plafond et comprend qu'elles s'arrêtent enfin. La nomade pose son rouleau sur la grande malle en bois et se tourne vers sa Républicaine.
« Maintenant que nous avons réglé nos derniers détails … Que dirais-tu de rattraper un peu le temps perdu ? »
« Attends. » répond Parwan sur un ton pressé en posant le rouleau sur une grande malle.
Elle s'avançe et, l'attrapant aux épaules, vient bloquer le dos d'Athénaïs contre la porte verrouillée.
Parwan porte ses lèvres à sa bouche.
Cette fois ci, ses deux mains se perdent dans les cheveux d'Athénaïs, ses doigts nagent dans les bouclettes qu'elle venait de lui confier, les tirent, les délient avec douceur. Elle presse Athénaïs de plus belle contre la porte close.
Alors, la métisse peut sentir le cœur de Parwan ralentir et se calmer à mesure que se prolonge leur baiser.
« Excuse moi. » … de t'avoir poussée à ce cadeau. peut compléter la jeune femme.
« Merci... merci. Je t'aime. » murmure-t-elle douloureusement, pleine de gratitude.
Encore quelques secondes de contact magique et l'anxiété mystérieuse et passagère de Parwan s'était envolée dans les bras d'Athénaïs.
Son sourire retrouve la même légèreté que celui de sa compagne alors qu'elle lui attrape les poignet et fait un pas en arrière.
« Rattrapons le temps perdu. » Acquiesce-t-elle.
Elle s'éloigne gaiement dans la chambre, se mettant pieds et tête nue, rangeant avec soin dans la malle son chapeau, son voile, sa cape et ses bottes.
Voyant que les braises rougeoient encore dans l'étroite cheminée, elle y fait coucher deux bûches au dessus des charbons ardents.
Son voile possédait un réel mérite : Une fois ôté, il était dur de détacher ses yeux du long pendule de ses cheveux très noirs tombant sur le dos de sa chemise brodée.
« Deux ans, c'est long ! J'ai tellement de choses à te raconter. » rigole-t-elle en s'asseyant sur le lit d'Athénaïs. Peu habituée à poser ses fesses sur des surfaces aussi molles, elle vacille très légèrement en arrière.
Comme toujours, il suffisait à Parwan de quitter sa cape pour se défaire de son aura de sagesse. De paraître sage, tout simplement, et de gagner en chaleur familière ce qu'elle perdait de modestie et de mystère.
Elle attend qu'Athénaïs s'installe à ses côtés et sourit.
« On s'est quittées à Taisen, devant les portes, tu te souviens ? Il y avait foule ! Des vieillards qui partaient en armes, tout le monde répondait à l'appel contre les Titans ! Il n'y avait que nous deux pour être tristes ! » rigole-t-elle.
« J 'ai rejoint les miens qu'on voyait s'éloigner et on a marché vers la capitale. Je ne me suis dévoilée à tous qu'une fois sur le bateau. Tu aurais vue Père, je ne l'avais jamais vue faire cette tête ! Ailah, Zali, toutes mes sœurs étaient là. Elles étaient si contentes !
Tu imagines ? Aidija avait treize ans quand je suis partie et maintenant elle en a trente-cinq! Marriée, huit enfants !
Ca n'a pas été facile d'être acceptée à nouveau. Les anciens étaient tous contre, tu sais ? Mais j'ai expliqué. Ils étaient verts d'apprendre que Qassan avait menti, que je n'étais pas morte et qu'il m'avait abandonnée ! Même moi, j'étais choquée. Un Sahriki qui ment, c'est si rare. Il était tant admiré.
C'est aussi moi qui leur ai appris la mort d'Hossein, figure toi. Vingt ans après le début de son hermitage ! Sa famille était si heureuse que je leur montre son étoile. De pouvoir le prier. Je pense que c'est ce qui a décidé Père à ne pas me répudier, dans le fond ; J'ai été une bonne épouse ! » dit-elle fièrement, les mains plantées sur les cuisses. « Et jusqu'au bout. » La Sahriki semblait s'accorder le luxe d'un compliment toutes les trois décennies.
Parwan ressasse avec enthousiasme et détails les réactions de chacun. C'est la première fois qu'elle parle à Athénaïs de sa famille et de ses défunts époux de façon si gaie.
Elle connaissait déjà l'histoire que Parwan lui avait raconté, mais pas dénuée de ce ton de culpabilité et de tristesse qui l'accablait d'ordinaire. Ici, la nomade se réjouissait, s'étonnait pour la première fois d'avoir prévalu sur son père, les autres vénérables et la volonté de Qassan, son mari brutal et terrifiant, de la condamner à l'oubli.
Rien dans son histoire ne laissait transparaître la tension et l'atmosphère accusatrice qui avait dû peser sur Parwan à cet instant. Sur le lit d'Athénaïs, la nomade triomphait. En toute modestie.
« La traversée n'a vue aucun bateau couler ! Louée soit Elle, tu sais à quel point j'ai horreur de l'eau, j'étais terrorisée. On a accostés sur les côtes de Shoumeï avec le reste de l'armée impériale. La plage tremblait sous le bruit des bottes et des sabots ! Il y en avait partout ! Des bannières, des drapeaux, des étendards de tribus. Le reflet des vagues s'enflammait de la fureur du Reike ! Quand j'ai posé mon pied dans la neige, je savais qu'à la grâce des Dieux, rien ne nous arrêterait.
La neige d'ailleurs, beaucoup de guerriers l'ont découverte en sortant du bateau. Comme je suis arrivée à Justice en hiver la première fois, je connaissais déjà mais... Comment expliquer... Il y en avait autant que de sable dans le désert et il en tombait toujours davantage.
Tu te rappelles des Tribus Tatouées ? » Demande-t-elle sur le ton de celles qui abordent un aparté. « Ceux qui marchent pieds nus dans le sable brûlant, qui portent des pagnes et des bandelettes de cuir ? Eh bien, le Soleil a abattu ses premières épreuves sur les plus braves d'entre nous ! Après moins d'une heure, les moins frileux troquaient leurs montures contre nos étoles et achetaient des bottes aux Ryssens qu'ils détestent pourtant plus que nous.
A la fin, ils étaient méconnaissables mais enfin prêts à partir. »
Difficile de se projeter sur les côtes glacées de Shoumeï quand la chambrette se remplissait de l'odeur de bois brûlée et de la chaleur du feu et que le craquement des bûches accompagnait la voix de Parwan.
« Nous avons marché sur Maël, la cité la plus proche. Elle était assiégée par des créatures des Titans et une armée de leurs serviteurs. Même moi qui ne lit pas, j'ai retenu les mots d'un chroniqueur qui a très bien décrit la bataille.
Pour la première fois sur Sekai, les crêtes qui couronnent Maël s'enflammèrent du Soleil du Reike. Et chacun de ses rayons était un guerrier. Et il inonda les pierres assiégées de Sa lumière. Et Il fit fondre dans une névasse sanglante jusqu'au dernier païen qui leva son sabre contre la volonté de ses fils
C'était un combat grandiose, je te dis ! Chaque jour à partir du premier, j'ai rêvé que tu sois venue avec moi ! On dit que nos maîtres stratèges n'ont même pas pu donner d'ordre. Partout sur la crête, on a entendu « Chargez ! » et tout le monde s'est mis a courir ! Moi aussi, je mourrais d'envie de me battre. Et ça a très bien marché ! »
Parwan rit au souvenir de cette charge aveugle et sa poitrine se gonfle d'un vieux souffle d'euphorie guerrière
« Les Sahrikis se sont détachés sur le flanc pour atteindre leurs archers. Tu nous aurais vues, moi et toutes mes sœurs, criblant leurs rangs à la fronde depuis les pentes rocailleuses. Zali riait à chaque fois que son galet touchait un casque.
On avançait bien, jusqu'à ce que leur général fasse avancer des boucliers contre nous. On s'est retrouvés au contact et quand les hommes sont parvenus à enfoncer leur ligne, on s'est toutes engouffrées dans les interstices.
J'ai eu un des plus beaux combats de ma vie ; Un paladin m'a arrêtée et son épée était si longue qu'un cercle s'est formé autour de nous.
Il était très fort, mais il abattait sa lame comme si chaque coup était le coup de grâce. Et il s'est mis à fatiguer sous sa grosse armure.
Je l'ai touché au visage et il est tombé sur le dos. Je lui ai planté mon couteau comme ça, dans la fente pour les yeux. »
Parwan illustre son histoire avec des gestes de main précis pour aider sa partenaire à imaginer l'action. Dans ses yeux brille l'excitation d'enfin pouvoir partager ces moments avec Athénaïs, mais on entend dans sa voix le soucis de faire vite afin d'en venir à l'histoire de sa républicaine.
« C'est là que j'ai reçu mes deux premières flèches, d'ailleurs. Une ici et une là. » Elle pointe son épaule et le dessous de sa clavicule. « Les médecins impériaux font des miracles, on ne voit presque plus rien. Je ne pensais pas qu'ils s'embêteraient pour quelqu'un comme moi. »
Elle sourit. « J'en ai d'autres, je te montrerais après. »
« Tu aurais vu les étendards du Reike se dresser sur les remparts... Il y avait de quoi s'envoler de fierté.
Par la suite, l'ennemi a de nouveau tenté de prendre la ville mais on l'a repoussé par deux fois.
Je te le dis. Les Astres brillaient enfin sur ce pays. Deux batailles décisives au creux d'une vallée où nous avons brisés l'armée des Titans. »
Pour la première fois, l'enthousiasme de Parwan change de ton.
« La suite a été plus longue. Pendant deux ans avec les miens, il a fallu les poursuivre, les empêcher de se rallier pendant que nos maîtres affrontaient les Titans.
C'est là que j'ai compris quelque chose :
Je n'étais plus la fille de mon Père.
J'étais devenue étrangère à ses yeux, et à travers eux, plus personne ne me considérait vraiment comme une Sahriki de sang, mais plutôt comme une Sahriki d'adoption. J'étais tolérée. Père ne parlait plus de me remarier ou de m'envoyer chez les matriarches. Rien. ll punissait mes sœurs lorsqu'elle s'adressaient à moi.
C'est drôle, j'aurais préféré qu'il continue à avoir honte de moi, honte de sa fille, tant que je l'étais encore. J'aurais pu me racheter en mourant, au moins.
Ca m'a rappelé ce que disait une aînée quand j'étais petite. « Ne meurs pas pour rien. » Et je n'avais pas compris ce qu'elle voulait dire. Parce que ce n'est pas à nous d'en décider. Mais brusquement, je ne voulais plus mourir pour mon père si je n'étais plus sa fille, tu vois ?
J'étais perdue, désespérée. Je voulais me battre pour quelqu'un qui compte pour moi.
...Et c'est quand j'ai compris que j'étais amoureuse de toi. »
Parwan éclate de rire.
« Tu étais partout. Dans mes traces quand je marchais, par dessus mon épaule au feu de camp, je t'entendais crier dans la mêlée, respirer la nuit sous ma tente. Je sentais ton odeur dans le linge de mes sœurs. Toujours hors de vue, à peine, un fantôme qui s'évanouissait quand je me tournais vers lui.
Je ne rêvais plus que de te revoir. Et c'est ça qui m'a sauvée ! Je serais morte dix fois sans ce rêve. De froid, de fatigue, de mes blessures. Les combats me mettaient toujours en colère parce qu'ils auraient pu me priver de toi. Et tu m'as rarement vue en colère, pas vrai ?
Finalement, la vérité du Reike a triomphé sur les Titans et nous sommes rentrés à Maël... pour faire régner l'ordre, figure toi. Parce que beaucoup étaient heureux de nous voir venir sans comprendre qu'ils accueillaient leurs nouveaux maîtres. »
Parwan marque une pause, comme pénétrée de toutes les oppositions qu'elle avait eu avec des Shoumeïens après la fin du conflit.
« Je sais que tu as eu de la compassion pour tous les réfugiés que tu as aidés. Tu sais aimer les faibles mieux que moi, c'est ce que j'admire chez toi. »
Elle repousse une bouclette frisée sur la tempe de son amie.
« Nous ne sommes pas restés longtemps. L'Impératrice a changé des lois sur l'esclavage ancestral qui ont beaucoup fâché les patriarches, puis elle a commis un blasphème terrible : Elle a autorisé l'emploi de serviteurs morts-vivants. »
Parwan écarquille les yeux et lève ses paumes au ciel pour exprimer sa confusion. Elle savait que leurs vues sur l'esclavage s'opposaient, mais elle entretenait l'espoir qu'Athénaïs partage son dégoût pour les pratiques nécromanciennes.
« Nous qui au Reike prêchons tous la pureté des corps, nous voilà revenus de guerre avec des cadavres pour serviteurs. Un affront au don du Soleil que de laisser pourrir sa création, une insulte à la Lune que de garder une âme prisonnière.
Nous sommes rentrés et je suis restée seule à Taisen.
Pour être sûre que les Astres me préféraient en vie, j'ai pris le chemin le plus long jusqu'à toi. Par la toundra au nord en passant par les sommets de ma montagne natale. C'était dur mais maintenant je sais que ma place est ici, assise avec toi sur ton lit. »
Soulagée d'avoir achevé son histoire, Parwan soupire et savoure un instant la justesse de son affirmation, le plaisir de leurs présences solitaires.
« Et toi ? Raconte moi ton temps perdu loin de moi. »
La nomade contient son impatience.
- Parwan parle Shierak qiya en italique et Commun en bold color=#ffcc00 -
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