Mon séjour dans la République était des plus surprenants. J'étais venue sans réellement savoir à quoi m'attendre, quelles opportunités s'offriraient à moi, les rencontres que j'allais pouvoir faire, les alliances que je pourrais éventuellement initier, tout cela était flou et pourtant... Je découvrais un pays accueillant, des gens ouverts en apparence au moins et soucieux de tisser des liens si ils pouvaient en tirer quelque chose. Oui je suis fondamentalement gentille et profondément naïve, voire avec une vision biaisée des habitants du Sekaï et pourtant, j'avais fini par apprendre... Les beaux sourires, surtout ici, s'intéressaient aux opportunités que l'on pouvait représenter, il s'agissait donc de prouver qu'on était utile. Et j'avais l'impression que je pourrais tirer mon épingle de ce jeu même en étant débutante.

Des entrevues, des entretiens, des conversations, des perches lancées, c'était mon activité depuis mon arrivée en Republique au début du mois. J'avais l'impression pourtant d'y être depuis des semaines, comme quoi. Et je comprenais sans peine ce que mes compatriotes de Shoumei avaient pu voir ici, avoir pu apprécier aussi et il serai tellement facile de céder à la tentation de devenir Républicaine, faire ma vie ici, dans ce pays ou les audacieux voient les portes s'ouvrir.

J'étais en pleine réflexion sur l'avenir, mon avenir, celui de mes gens quand Wan me proposa d'aller assister à une courses hippique qui aurait lieu ce jour. Il faisait extrêmement chaud ce jour, l'air était lourd, j'aimais la fraicheur de Mael mais je ne pouvais l'avoir alors faute de grive on mange des merles dit-on !

Tenue du jour:

Vêtue d'une jolie robe légère composée d'une chemisier de soie blanche et d'une jupe taille haute en satin vert, je me sentais à l'aise. Au bras de Wan, nous sommes donc arrivés sur le champ de course. Les chevaux n'étaient pas encore prêts à courir, ils étaient dans les paddocks attenants la piste, broutant les vestiges d'herbe et s'abreuvant comme il fallait. Les invités et curieux étaient nombreux et le départ serait donné dans une petite heure.

Nous déambulions donc et apprécions ces instants calmes.



CENDRES

Nous sommes en train de déambuler tranquillement avec Wan quand je vois un couple qui se dirige vers nous. Je n’ai nul mal à reconnaître le jeune homme, c’est mon ami Tagar qui arrive. Je suis ravie de le croiser en ce lieu et surprise en un même temps mais les circonstances du hasard sont parfois agréables non? Accrochée au bras de Wan je lui murmure quelques mots quand Tagar et la jeune femme nous abordent.

J’ai accroché mon meilleur sourire, je suis forcément ravie de revoir mon ami en ce lieu et en ce jour tout simplement. Par contre, l'arrivée de Tagar me surprend, pas sa politesse ou son ton courtois mais plutôt sa révérence et son salut très protocolaire. Je remarque aussi de suite qu’il me vouvoie, forcément je me demande qui est la jolie jeune femme à son bras? Sa promise? Peut-être est-elle du genre à souffrir de jalousie maladive qu’il ne souhaite pas me saluer d’une accolade chaleureuse, mais soit je ne vais pas le mettre dans l’embarras il ne manquerait que cela surtout.

- Le plaisir est partagé mon très cher Sieur Reys. Je me souviens parfaitement de vous n’ayez crainte, nul défaut de mémoire ne me frappe.

Il me présente ensuite son amie et je la salue d’un signe de tête respectueux.

- Ravie de faire votre connaissance Dame Leviathan. Je salue votre bon goût les courses hippiques sont un moment agréable, la course des chevaux a quelque chose de fascinant, ils ont cette faculté d’être élégants, racés, rapides et beaux en même temps. Mais veuillez m’excuser je manque à la plus élémentaire des politesses.

J’avoue ne pas reconnaître mon ami pour le coup, il est tellement poli, courtois, ancré dans le protocole en temps normal et le voilà qu’il omet de saluer mon compagnon? Quelle mouche l’aurait donc piqué? Ce n’est cependant rien et Wan n’a cure de tout cela par chance. Il sourit aimablement et s’incline à son tour devant le couple de collaborateurs.

- Je vous présente mon ami et mentor Maître Wan Jin. Maitre Wan voici Sieur Reys dont je vous ai déjà parlé, un de mes rares amis.

Autant voir si j’ai le droit de l’appeler ainsi quand nous ne sommes pas seuls en fin de compte. Est-ce le monde alentour qui l’empêche de me tutoyer et de me parler avec sa chaleur coutumière? Wan salue les deux jeunes gens et souris avant de faire un baise main léger à Dame Leviathan.

- C’est un honneur que de faire enfin votre rencontre Sieur Reys, Dame Leviathan, il en va de même.

Reposant mon regard sur Tagar je réponds en souriant.

- Je me porte à merveille dans tous les cas, la République semble une terre chaleureuse et pleine d’opportunités pour les habitants de Shoumei, plus que je n’aurais pu l’imaginer en réalité. Et puis j’avais la même envie que Dame Leviathan, assister à une course de chevaux. On dit que le duel sera rude en Prunelle Rayonnante du Désert et Faran Sabot D’Airain d’Elenie.

Oui les chevaux ont des noms ridicules, il en a toujours été ainsi pour quelle raison, je ne saurais dire.



CENDRES

Je reste parfaitement impassible, sereine, dans mon rôle tout simplement de jeune noble qui assiste à de banales représentations pour passer le temps. La jeune femme aux côtés de Tagar, semble sous le charme de Wan, mais je ne saurais la blâmer, j’ai moi même cru qu’il pourrait être mon grand amour, cela ne dura pas longtemps car rapidement mais avec tact et délicatesse il m’avait fait comprendre qu’il n’était pas celui que j’attendais, qu’il n’avait été l’homme que d’une femme, une communion spirituelle il y a plusieurs générations, et elle était mon ancêtre, pas moi. Mon ego en avait grandement souffert sur le coup mais finalement j’avais un ami, un mentor, une sorte de figure paternelle compatissante à mes côtés, et c’était cela dont j’avais vraiment besoin avec ce monde qui ne tournait plus rond depuis l’éveil des titans et la guerre.

Tagar perçoit l’ennui de Charlotte et il n’a pas le temps de rajouter quoi que ce soit qu’elle prend la décision de s’éloigner pour nous chercher à boire, soit, je ne dis rien mais en mon fort intérieur j’espère qu’elle ne nous rapportera pas d’alcool car ni Wan ni moi n’en buvons sauf en de rares occasions.

Tagar en profite pour me parler, sur le ton de la connivence et de la confidence, je ne peux que sourire, retrouvant la mon fier ami, j’avais eu peur un instant que quelque chose ne l’eut changé, mais non.

- Je comprends parfaitement, n’aie aucune crainte mon ami. Nous passerons cette rencontre à nous vouvoyer. Et ta collaboratrice peut entendre que ma famille a longuement commercé avec la tienne, mon nom n’est pas signe de honte et ma compagnie marchande était réputée.

Elle avait même attiré l’attention de la SSG pour dire avant que ne débute cette maudite guerre. J’ai cependant bien noté le mot “intime” appuyé d’un long regard vers mon ami Wan, comme si il voulait le défier, autant renoncer, il ne trouverait aucun affrontement, Wan était un adepte du pacifisme et avait une philosophie de la vie sereine et zen qui parfois me dépassait tout en m’apaisant.

Amusée, je vis son oeil qui brillait, il répondit en souriant avec douceur à Tagar.

- Je vous remercie de l’amitié indéfectible que vous entretenez avec Myriem, vous êtes un homme bon et de grand soutien pour elle, vous êtes à l'image de ce que pourraient être les Reikois si ils songeaient plus à entraîner leur esprit au lieu de leur corps. Merci pour tout ce que vous faites et avez fait, et c’est un honneur que de pouvoir vous rencontrer.


Nul mensonge ou moquerie en lui, il parlait ainsi et parlait avec sincérité. Il savait que grâce à Tagar, Ruyven avait été racheté et envoyé aux arènes de Zaïn à Ikusa, et nous savions maintenant qu’il allait bien vu que j’avais pu parler avec Zaïn. Toujours au bras de mon mentor je demandais avant que ne revienne Dame Leviathan.

- Et toi es-tu ici pour affaires, travail? Ou as-tu réussi à trouver un peu de temps libre tout simplement? En tout cas, tu me sembles aller à merveille, tu as bonne mine mon ami. En tout cas, merci encore pour ce que tu as fait pour moi et Ruyven, je sais qu'il va bien, j'ai croisé Zaïn il y a quelques jours à peine ici à Liberty.


CENDRES

Pour tout vous avouer, je ne me sens pas vexée, concernée ou blessée par les attentions que Wan adresse à Charlotte. Je sais qu’il agit ainsi car il estime qu’elle est celle qui a besoin d’aide, il m’a formé, il connait mes capacités, même si je répugne à les utiliser autrement que pour soigner la majeure partie du temps. Mais si il a confiance en moi alors je peux m’accorder aussi un soupçon de confiance non?

J’aurais pu rire de la répartie de Dame Leviathan concernant la chambre d'hôtel à payer, elle ne perdait pas le nord pour le coup cette collègue. Me concentrant sur ce que me répond mon ami Tagar je hoche la tête, mon plan n’est pas idiot et cela lui semble possible. Si nous combinons habilement nos magies et talents je suis pratiquement certaine que rien ne pourrait nous arrêter dans le fond. Tagar comme moi n’est pas un guerrier, il n’agresse pas les autres, il ne se sert de ses capacités que pour le bien commun et notre sécurité à tous.

- Je peux contenir ma magie un long moment crois moi, l’eau est devenu mon élément dans tous les sens du terme.

Débout à ses côtés, je lève les bras en un mouvement ascendant et mes mains partent des jets d’eau d’une puissance inouïe en réalité. L’eau coule en serpents autour de mes bras et l’air s’emplit d’une odeur marine et mes yeux changent de couleur pour devenir d’un violet intense. Je fais rarement appel à la puissance de mon don, mais je sais que la demi mesure ne servira à rien. Alors je laisse l’eau recouvrir le champ de course et les animaux affolés.

- J’espère qu’ils ne se jetteront pas tête baissée sur le bouclier et qu’ils ne se blesseront pas plus qu’ils ne peuvent déjà l’être.


J'étends mon bouclier avec une célérité qui me dépasse en réalité, ma magie coule vive comme l'eau d'un fleuve et puissante, le bouclier s'étend au dessus de nous et sa solidité est bonne. Les insectes pris au dépourvu et sans compréhension réelle de ce qu'il peut bien se passer, se fracassent en grand nombre sur le bouclier d'eau.


CENDRES

Je me sens forcément flattée par la réponse de mon ami mais cela ne doit pas me déconcentrer pour autant, nous avons une lourde tâche à accomplir en cet instant. Mon dôme s’étend tout au dessus du champ de course, j’ai réussi sa construction et il est parfaitement en place, je suis fière de mon oeuvre vraiment, je sais avoir les capacités mais avouons qu’on ne s’entraine que rarement à utiliser ses dons à leur pleine puissance ce qui est stupide en un sens, comment connaître nos limites sans les éprouver régulièrement et hors des moments de grand stress du coup?

Je n’ai cependant pas le temps de répondre quoi que ce soit à Tagar, concentrée déjà, cela ne me laisse que peu d’autres activités possibles soyons honnêtes. Il envoie je le vois les groupes d’insectes s’écraser sur le mur d’eau, ce plan fonctionne c’est indéniable.


Je me sens forcément flattée par la réponse de mon ami mais cela ne doit pas me déconcentrer pour autant, nous avons une lourde tâche à accomplir en cet instant. Mon dôme s’étend tout au dessus du champ de course, j’ai réussi sa construction et il est parfaitement en place, je suis fière de mon oeuvre vraiment, je sais avoir les capacités mais avouons qu’on ne s’entraine que rarement à utiliser ses dons à leur pleine puissance ce qui est stupide en un sens, comment connaître nos limites sans les éprouver régulièrement et hors des moments de grand stress du coup?

Je n’ai cependant pas le temps de répondre quoi que ce soit à Tagar, concentrée déjà, cela ne me laisse que peu d’autres activités possibles soyons honnêtes. Il envoie je le vois les groupes d’insectes s’écraser sur le mur d’eau, ce plan fonctionne c’est indéniable. Je suis totalement focalisée sur cette tâche quand je perçois le mouvement de mon ami, que fait-il? Pourquoi change-t-il de position? Nous étions bien placés et nos angles d'attaques parfaitement synchronisés, comme si nous avions déjà combattus ensembles par le passé, ou que cela ne soit le fruit de notre entrainement...

Je ne comprends pas vraiment ce qu'il se passe alors que je le vois voler plusieurs mètres en arrière plus loin recevant dans le ventre un coup de sabot violent d'un cheval en panique alors qu'il tentait de le soigner. Je suis stupéfaite mais je ne peux relâcher la pression de mon don, le dôme doit perdurer c'est une obligation.

Les nuages d'insectes sont encore autour de nous même si leur densité et leur nombre commence à diminuer. Tagar est au sol mais comme si cela ne suffisait, voilà qu'il se fait assaillir par les insectes qui commencent à le piquer de partout, en soit ce n'est pas mortel sauf à très haute dose et quantité de piqures, les réactions du corps peuvent devenir dramatiques et mettre la vie en péril.

Je n'ai donc pas d'autre solution tout en maintenant le dôme protecteur, j'entreprends d'en réaliser un second pour protéger Tagar et laisser couler ma magie de soin pour le ramener parmi nous afin qu'il termine son oeuvre.

Voilà donc que je me concentre comme jamais pour laisser passer une partie de ma magie vers lui.
Le réussis ce mélange complexe de sorts, mon dôme est maintenu, Tagar a un bouclier autour de lui et il est en train d'être soigné. Par contre je sens du sang couler de mon nez... Je suis au bord de l'épuisement




CENDRES