Année 3 le premier avril

Je dépose, très agacé, la lettre de ma mère. D’habitude, j’aime beaucoup lui écrire, lui raconter mes anecdotes et elle me donne des nouvelles de la famille Reys. Mais là, c’est complètement différent, une de ses connaissances, un noble très riche, lui a demandé un service. Récupéré des esclaves qui lui appartiennent et qui sont dans un petit village du Shoumei, proche de Maël, récemment libéré. Normalement, c’est interdit d’en posséder dans cette nation, mais les gens de la Haute société ont toujours tendance à se croire au-dessus des lois.

Je ne peux pas compter sur l’aide de l’armé pour cette mission, car cela risquera de mettre le proche de celle qui m’a mise au monde dans l’embarras. Je vais devoir faire profil bas et après m’être habillé, je vais voir une de mes vieilles connaissances, un soldat de fortune qui a connu bien des champs de bataille et je lui demande :

J’ai besoin d’une escorte, une seule personne devrait être suffisante. Le départ est prévu demain à l'aube, je fournis les montures et le but est de ramener discrètement de la marchandise à Maël. La durée de cette mission est d’une journée, le rendez-vous est à la porte de la Gloire.

Je le vois hocher la tête et m’indiquer :

C’est bien noté, je vais faire jouer mes contacts dans le milieu des mercenaires et je m’assurerai de vous trouver une personne fiable. Au niveau tarif, combien vous payer ?

Pour toute réponse, je lui tends deux bourses, une pour sa commission et l’autre pour le contrat à durée déterminée. La paye est plutôt bonne et je maximise ainsi mes chances de trouver un candidat. Je n’ai plus qu’à poser un jour de congé et je suis à l’heure le jour d'après, avec deux chevaux, au lieu indiqué. J’ai également une mule contenant des provisions au cas où, car même si les esclaves sont en mauvaise forme, il va falloir qu’ils marchent d’un bon pas.

"Combien tu m'payes ?"

Il me tendait une bourse d'or, à moitié rempli. C'était bien assez, peut-être même, trop, pour une simple escorte de transport de marchandise. Mais je ne posais pas plus de question. La paye m'allait, je n'avais pas vraiment les moyens de refuser, si je voulais pouvoir me nourrir et survivre à cette nouvelle vie de mercenaire. Il m'était étrange que la plupart des autres avaient refusé, et on m'avait prévenu : Ce boulot trop bien payé, ça sentait l'entourloupe. Tellement que je finissais par croiser les bras avant de répondre, d'un air défensif, d'une voix qui se veut calme et posée, un air grave sur mon visage.

"Tu sais que ton boulot pue les emmerdes. Paye moi plus que ça et j'accepte."

J'observe son visage. Ses réactions, sa réflexion intense. Est-ce que ça valait le coût de me prendre à ce prix-là ? S'il accepte de me payer plus, je ne serais que plus méfiante, s'il refuse, j'aurai peut-être loupé une opportunité. Cependant, il se mit après avoir murement réfléchi à fouiller dans une autre bourse pour rajouter des pièces. Gagné, ce boulot cachait quelque chose, mais j'avais la politesse de ne pas poser la question. La discrétion d'un mercenaire pouvait s'avérer utile, tout autant qu'avoir une bonne réputation. L'argent ne faisait clairement pas tout, mais je n'allais pas cracher sur ce qui allait me permettre de m'enrichir. J'acceptais alors, non sans une légère réticence, ce boulot probablement risqué. Il m'indiquait que j'allais devoir accompagner quelqu'un et il m'emmenait le voir pour me présenter à lui. J'espérais intérieurement que ça ne serait pas un boulet à mon pied. Une fois devant l'inconnu, qui avait visiblement commandité le travail, l'intermédiaire se retire et nous laisse seuls pour discuter.

"Bonjour. Je me présente, Irisa. Alors. Que dois-je faire exactement ?"

Et je le toisais, observant cet homme aux cheveux blancs devant moi. Je m'en foutais de son nom. Je m'en foutais de qui ça pouvait bien être. Tout ce qui importait, là, c'était le travail à accomplir. Le danger à venir et à anticiper.[/b]

Je vois arrivée une jeune femme rousse aussi grande que moi, une vétérante vu ses cicatrices, dont la plus impressionnante est sur le côté droit de son visage. Pour moi, le plus choquant reste sa coupe de cheveux. Je ne sais pas qui est son coiffeur, mais il devrait être brûlé sur la place publique pour ce qu’il a osé lui faire ! Malgré tout cela, elle n’est pas moche, ce qui est un exploit et je lui souris quand elle approche. Elle commence par dire son nom, ce qui est un bon point et je me présente en retour :

Enchanté, vous pouvez m’appeler Fab.

Je viens de créer le nom à l’instant et j’aime bien, c’est court, inoffensif, cela correspond parfaitement à ce que je veux créer comme ambiance. Comme nous sommes à la limite de la légalité, je préfère ne pas donner mon vrai nom. Elle demande ensuite ce qu’elle doit faire, et cela lui fait un second bon point, j’aime les gens qui vont droit au but et je m’efforce d’en faire de même :

Nous devons aller à un village situé à quelques heures d’ici, prendre une marchandise et la ramener à une adresse sur le port. Nous devons être discrets et ne pas attirer l’attention.

C’est toute l’ambiguïté de la chose, au Shoumei, il est illégal de posséder des esclaves, mais pas au Reike. Ce qui fait, qu’une fois à Maël, nous sommes dans la légalité. En, plus, le Shoumei en tant qu’entité n’existe plus, mais les habitants peuvent toujours créer des problèmes. Je lui montre ensuite les chevaux en lui demandant :

Vous êtes prête ? Nous pouvons y aller ?

Autant ne pas perdre de temps, plus vite nous serons parti, plus vite nous serons revenus. Cette mission ne me plaît guère, mais Mère me l’a demandé alors je m’exécute.