Usalka est une jeune élémentaire d’eau à la peau blanche et pâle, aux yeux d’un rouge vibrant, rappelant les lueurs de certaines créatures des profondeurs. Ses cheveux sont d’une fluidité sans pareil, imitant parfois le remous des vagues ou bien écumant lorsque ses émotions sont en émoi.

Plus observatrice pendant son enfance que participante aux joies du monde, la patience est la qualité la plus présente chez la demoiselle. Avec celle-ci, une timidité contrôlée et une maîtrise d’elle-même font d’elle un bon élément pour une conversation constructive, même en situation houleuse. Elle possède le pied marin, bien qu’elle ne soit pas particulièrement entichée des grandes étendues océaniques.

La mer lui a donné ses habitudes vestimentaires guerrières. Combinaison coûteuse en peau de requin, cuissardes en monstre marin et un manteau ample de capitaine font d’ordinaire sa tenue d’apparat en combat.
Elle est plus tournée vers la magie que les arts du combat physique plus traditionnel, et c’est pourquoi elle se contente de tenues confortables dans ce cadre.

Dans d’autres occasions, la belle préfère les tenues plus estivales et ouvertes. De robes au dos nu aux vêtements de grand couturiers, elle aime les porter autant que les recevoir en cadeau. Les maîtres du tissus en général apprécient le défi que représente sa grande taille et ses formes.
La demoiselle n’utilise pas de maquillage pour le moment, mais raffole de bijoux.

Usalka est une Reikoise noble, mais tout de même consciente des faiblesses de son sexe et de la position moindre dans la société d’homme. Elle aime parfois en jouer, surtout lorsqu’elle a le dessus, mais sait également apprécier les spécimens de virilité qu’une telle politique engendre. Elle révère en quelque sorte la force, mais plus encore la puissance quelque soit sa forme.

Elle est bonne perdante mais pas stupide, sa rancoeur face à un odieux personnage qui l’humilierait la ferait probablement sortir de ses humeurs habituellement calme.
Ses colères sont habituellement sèches, brutales et sans interruption. Une certaine marque d’un intellect destructeur laisse poindre son nez lorsque ce genre de moment vient, et le sadisme engendré par ses actions tient presque de l’ordre du diabolique.

Ce diabolisme se retrouve souvent dans son indifférence face aux problèmes ou aux souffrances des autres, autrement que pour s’engorger du désespoir qu’elle cause. Elle sait bien qu’il lui faut rester dans les limites du raisonnable de la société dans laquelle elle vit, mais cela ne l'empêche pas d’être intérieurement une personne de peu de considération pour autrui.

Fille d’un élémentaire presque fossilisé désormais, Usalka n’a pas eu la chance de connaître sa mère. Celle-ci était tombée malade à cause de la vulnérabilité dans laquelle l’avait placée sa grossesse, et l’air marin ainsi que le roulis du navire n’avaient pas aidé.

Les mers n’étaient pas un endroit pour une petite fille, ainsi donc l’héritière des Laliatine se retrouvait isolée près d’un phare sur la côte ouest des terres du nord de l’empire. Isolée avec des servants, bien entendu, mais également des précepteurs dans tout et chaque domaine qu’une future dame de sa qualité se devait d’avoir.
Son père, vieux machin au pied marin, faisait comme son père avant lui et servait l’empire avec sa flotte en aidant le peuple des tritons à reconstruire l’antique Aquaria.
Une tâche difficile que d’acheminer des pierres, du bois, des lingots extraites des montagnes du nord, de faire descendre le tout dans les abysses depuis un pont de navire croulant sous le poids des matériaux. Usalka apprenait également toutes les ficelles de cet engagement que ses aïeuls avaient pris envers ce peuple. Sans parler de légende, la famille croyait à la presque fable selon laquelle celle-ci s’était faite aider par le passé, et que la reconstruction tout comme l’aide militaire qu’elle avait apportée n’était que le juste retour des choses.
Dans les faits, a moins d’avoir une mémoire colossale et une longévité à toute épreuve, cela relevait simplement du mythe.

Les mythes, la belle aux cheveux blancs n’en avait cure. Esseulée par son père, avec aucune personne d’une race à sa longévité ni même de sa catégorie d’âge, Usalka vécut son enfance et une grande partie de son adolescence comme une prison temporelle aux proportions séculaires.

Et puis un jour pluvieux, son père revint, cette fois-ci pour demeurer chez lui jusqu’à sa fin. Il était devenu trop faible physiquement. Son mental, en revanche, n’avait pas pris une ride. Il était toujours aussi méthodique et calculateur que lorsqu’il l’avait abandonnée. Et c’est à peine rentré qu’il décida d’envoyer sa fille au service militaire.

Une simple formalité, la noblesse de son père lui assurant une certaine mainmise sur son affectation. L’élémentaire fût renvoyée depuis Taisen jusqu’au village aux capacités militaires le plus proche du manoir qu’elle avait connu, Sable-d’or. On la faisait monter sur un navire et les expéditions de sa famille vers Aquaria reprennaient. Elle eut à se battre, et pour la première fois de sa vie la belle put comprendre ce que signifiait vivre en expérimentant par elle-même.
Chaque chose était aussi exaltant pour elle, du fait de gagner l’avantage en combat à celui tout simple de se sentir faible face à un autre adversaire. D’éprouver la douleur de la vie pour ce qu’elle est, une souffrance nécessaire pour goûter aux plus savoureux fruits de l’existence.
Elle se sentait naître enfin, s’épanouir, grandir, ce que son corps comprit très bien. Elle devint grande pour une jeune femme, et ses atouts de charme prirent de l’ampleur aussi.
Elle était magnifique, douée pour la magie, aventureuse mais nébuleuse, taciturne malgré la joie qu’elle pouvait ressentir parfois, la demoiselle avait développé cette tendance à observer plus qu’à agir lors de ses nombreux déplacements. Ses sourires étaient rares, mais extrêmement sincères, et quand elle revint de son service ainsi que quelques années d’études à Drakstrang, son père put revoir les charmes qui l’avaient envoûtés chez sa mère à travers elle.

Ce fut sa dernière vision avant que la cécité ne le frappe, puis la surdité l'empêcha d’entendre le rire de sa fille bien aimée. Il perdit le sens du toucher. Finalement, il mourut de chagrin au bout de quelques dizaines d’années passées dans ce qui devait, pour lui, ressembler aux abysses.

Ses obsèques furent brèves. Il n’avait jamais aimé les grandes cérémonies, il préférait l’efficience, l'absence de fioritures ou de broderies. Usalka avait fait son deuil des années avant cela, dès qu’elle avait senti qu’il ne vivrait pas plus de cinq ans de plus. Elle était presque apaisée de le voir partir, même si cela voulait dire qu’elle était seule aux commandes et que le temps d’explorer le monde n’était plus.
En rentrant au manoir après la cérémonie, un de ses capitaines de navire vint lui donner une clé, celle du secrétaire de son père. Elle découvrit dans son bureau les projets qu’il avait pour elle et pour sa flotte. Cette dernière continuerait son travail pour le compte de la famille Laliatine. A cet effet, un des capitaines devait être anoblis par Usalka, et deviendrait son vassal chargé des opérations de ce côté là du Reike.

Cela permettait à son père de renforcer la position de la famille commençant à prendre suffisamment d’ampleur pour sous-traiter ses affaires. D’un autre tentacule, la pieuvre qu’était le cerveau de son défunt père l’envoyait en cadeau à la cour impériale.
Il savait qu’Usalka aimait revêtir de beaux atours plus que combattre et que les relations sociales ainsi que les jeux d’esprits étaient plus du ressort de sa fille que du sien. C’était son cadeau pour la future entrée à l’âge adulte de son héritière, et dans ses mots, celle-ci pu y voir l’importance de ne pas rater une occasion pareille.


La belle se chargea donc d’anoblir Sieur Kilmakek, un Drakyn ayant déjà une descendance de trois fiers marins tous sous ses ordres. Puis elle fit apprêter une voiture ainsi que quelques gardes en vue de descendre sur la capitale avec quelques sujets (de son fief et de ceux qu’elle visitait en passant) à offrir à Taisen en prime. La procession fut longue et laborieuse, et elle ne manqua pas de rencontrer son lot de problèmes.
Une première attaque de bandit séparait le convoi de quelques jeunes femmes, emportées pour servir à des fins sordides. C’était en partie du peuple de son fief, alors par égard pour celui-ci, Usalka consentit à sortir avec un détachement de soldat pour poursuivre les hirsutes des montagnes jusque dans leurs grottes de barbares pour ramener les femmes.
L’expédition pour les retrouver dura trois jours pleins, et bien entendu pas une seule n’était intact. L’on pu en dire autant des barbares après le passage des soldats, même si en vérité quelques-uns avaient dû y réchapper, tout comme certaines femmes n’étaient jamais revenues.

Cet obstacle avait quelque peu miné le moral du convoi, et l’élémentaire aux cheveux d’écume n’était pas dans sa meilleure humeur non plus. Le second assaut eut lieu bien plus au sud, et par une tribus de sauvages des sables. Malheureusement pour eux, ils attaquèrent par le milieu du flanc cette fois-ci. Ce n’est pas une horde de femmes apeurées qui sortirent du wagon, mais Usalka qui demanda au cocher de dételer les chevaux.
Les archers sauvages tuèrent les bêtes alors même que celui-ci terminait, et les idiots ne comprirent la raison pour laquelle la belle eut un sourire que lorsqu’ils virent le véhicule se soulever dans les airs avant de les pourchasser pour les écraser cinq par cinq sous le regard épouvanté de ses sujets.

Son cocher vint la voir pour lui dire que son carrosse n’était plus utilisable désormais et la belle dû avouer qu’elle avait eu la main lourde, ou l’esprit plutôt.
-Soit, je me contenterais de rejoindre les autres femmes, fit-elle d’un ton ordinaire.

Le capitaine de sa garde arriva au trot et elle leva la tête.
-Pas de signes de forces supplémentaires, signala t-il avant de regarder les taches de sang éparses dans le sable, connectées ici et là par des membres arrachés.
-Ils n’étaient pas de taille, mais nous avons eu de la chance qu’ils ne soient pas mieux préparés, avoua humblement l’élémentaire. L’air se rafraîchit, mettont le convoi à l’arrêt un peu à l’écart de ce charnier. Si vous pouvez envoyer quelques hommes récupérer ce qu’il reste d’utile sur eux et sur ma voiture, je vous en saurais gré.
-Comme vous désirez, répondit le capitaine avant de talonner sa monture pour aller chercher deux soldats infortunés à qui donner cette tâche ingrate.

L’élémentaire fit usage de ses dons pour convoquer de l’eau à destination de ses protégés, puis la procession reprenait le lendemain à la fraîche.

Cet exode n’avait pas duré si longtemps, quelques semaines au plus, mais tout le monde fut très heureux de voir la capitale se dresser devant eux. Une partie était presque désespérée de devoir maintenant traverser une partie du désert pour se rendre à Taisen. Usalka était quant à elle plutôt satisfaite de la tournure des événements, compte tenu du peu de pertes. Elle était déjà venue à Ikusa, mais jamais en tant que représentante de sa famille, simplement en tant qu’apprentie à Drakstrang.

Cette fois-ci c’était différent, et alors qu’elle se détachait d’une grande partie des soldats qui continueraient leur chemin jusqu’à Taisen, elle contempla à quel point elle allait se retrouver sans “forces” dans le monde cruel et politique. La belle avait bien retenu ses cours, et cruel n’était pas nécessairement le terme à employer compte tenu de la stabilité du pouvoir actuel et du peu de résistance qu’opposaient les rebelles ou la république. L’un semblait se ridiculiser de par son inaptitude à contourner la vigilance de l’empire, et l’autre d’être un concurrent plutôt passif hors du plan économique qu’ils avaient entreprit avant de se faire corriger.
Pas de meilleur moment pour entrer dans la cour impériale qu’un moment de calme.

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La belle se présenta donc à la grande porte d’Ikusa, sa garde passa les sécurités puis elle présenta elle-même à l’agent de vérifications.
-Bon retour dans la grande ville qu’est Ikusa, Mademoiselle Laliatine.

La belle présenta son sceau de noblesse puis tendit l’autre main pour attraper celle du détecteur et l’approcher de son bas ventre.
-Ce n’est pas en qualité d’étudiante que je franchis les portes aujourd’hui, mais en tant que maîtresse de la famille Laliatine, indiqua calmement Usalka.

L’homme chargé de sentir le tatouage impérial détecta effectivement le sceau à travers les vêtements de la mage à un endroit situé juste sous son nombril, puis se retira.
-J’en prend note, indiqua le soldat. Bienvenue.. hésita-t-il.

La famille n’était pas exceptionnellement connue, il était donc compréhensible que le soldat n’ait que peu entendu parler de celle-ci. Tout au plus, c’était une des familles qui commandait une flotte de navire dans le nord, qui n’avait pas été impliquée dans des conflits entres mortels et dont le soutiens contre les titans n’avait été que moindre, leur guerriers n’ayant jamais été d’une qualité à confronter le divin. On pouvait leur reconnaître un certain sens des affaires, une propension à savoir se débrouiller pour acheminer de la logistique, et c’est en général ces petites mains que l’on remarque le moins à la guerre. Ces petites mains avaient été suffisamment actives pour se voir procurer un titre et des terres, ainsi donc, le soldat pouvait simplement l'appeler:
-Seigneur au Harpon.
-Évidemment, mille pardons, Seigneur, s’excusa le militaire avant de s’écarter de son chemin.

Le harpon était le symbole de sa famille, un mythe, comme pour son devoir envers Aquaria et les tritons. Semblait-il, sa famille avait jadis possédé un harpon magique, une sorte de crosse de mage aux proportions et aux formes grotesques, ainsi qu’aux pouvoirs tout aussi ridicules que d’aligner les étoiles, calmer les eaux et faire tourner le vent pour écourter la navigation de dizaines de semaines en un mouvement. En remontant la lignée, l’on pouvait voir que sa famille possédait son origine proche des Oasis du sud de l’empire, ainsi donc la légende n’avait aucun fondement solide, et qui plus est la famille Laliatine n’avait pas toujours eu le pied marin.

La belle se dirigea donc vers le palais avant de se dire que prendre le temps de s'apprêter serait des plus judicieux avant une quelconque entrée dans la cour. Elle fît donc escale dans divers boutiques pour se refaire une garde robe, vu qu’elle avait saccagé la sienne en même temps qu’elle avait massacré les bandits. Puis elle se rendit dans un établissement de grand renom pour y demeurer le temps de prendre ses marques dans la ville et de se présenter décemment à la cour. Elle permit à ses servant de l’aider à se laver, puis enfila atours et bijoux avant de se présenter à la porte du palais avec son escorte. On l’a désarma, ses gardes durent rester sur place puis elle entra. Aucune description n’aurait su refléter l’exactitude de la somptuosité des lieux, même si le calme y régnant laissait comme une note sobre, presque mélancolique.
Elle n’était pas la seule à se produire ce jour-là apparemment, d’autres seigneurs et nobles, autant que de personnes venant raporter leurs actes à la cour en vue d’obtenir un quelconque titre. En revanche elle détonait de par son sexe, qui vint apporter son lot de remarques dures et sèches. Le pouvoir de sa famille lui était tombé dans les mains de part la mort de son père, sans héritier mâle, c’était quelque peu inadéquat, à vrai dire tellement inadéquat qu’elle n’eut pas le droit d’entrer dans la cour. A la place, elle fut reléguée dans une chambre d’attente, et un sous-fifre au grade d’importance moindre vint la voir pour discuter en lieu et place des portes paroles habituels du couple royal. Dans un pourpoint violet n’ayant rien de pratique, il ne portait ni armes ni bijoux. Son parfum était des plus incommodant, une fragrance tirée d’un arbre à sève des environs et probablement destiné à masquer son odeur corporelle. Même avec l’air rafraîchi du palais, il suait assez pour trahir son inconfort. Son visage était souple et lisse, rasé à la serpe et oint. Cela donnait à ce quarantenaire un certain côté “juvénile” et gracile, pas tellement des qualités de ce côté-ci du Sekai.
-Seigneur au Harpon.
-Maître Arwin, répondit la belle du même ton supérieur qui lui avait été adressé.
-Nous regrettons d’apprendre la mort de feu votre père. Son aide fut précieuse, l’empire le gardera en mémoire.

“L’empire qui se rappelle de notre famille, peut-être”, pensa Usalka sans répondre.
-Que nous vaut l’honneur de votre visite ? continua-t-il.

L’élémentaire eut presque envie d’essuyer un rire ainsi qu’un rictus. “Un test pour voir si je me conforme à l'étiquette ? Bien, si l’on doit en passer par là.”, rumina-t-elle.
-Il est du devoir de chaque Seigneur de se produire devant le couple impérial après une passation de pouvoir, récita simplement la belle.
-Seigneur.. fit l’homme en serrant les dents.

“A l’évidence, mon sexe est un problème, évacuons le tout de suite.”, pensa-t-elle. “Même si je sens que je vais devoir me répéter.”.
-Le fief du Harpon à remplit ses obligations envers la couronne, comme lors des années passées aux commandes de mon père. L’impôt dû a été prélevé, plus une plus value en prévision de l’hiver rude à venir dans les terres plus au nord. Les afflux de marchandises vers Aquaria et les échanges avec le peuple de la mer opère comme à son habitude, avec les meilleures dispositions que la flotte du Harpon puisse permettre, sous la férule d’un vassal, Sieur Kilmakek.

“L'hameçon est lancé. Mord, prévisible créature.” pensa la belle avant d’entendre son interlocuteur rétorquer.
-Seigneur depuis un jour, et vous déléguez déjà vos tâches les plus primordiales à des gens du commun, en plus d’anoblir des gueux ? s'offusquait il. Et qui vous a demandé de faire du zèle sur l’imposition ? Folie de femme que tout cela.

Le visage d’Usalka se fit légèrement souriant l’espace d’un instant avant de prendre un ton plus formel et distancé.
-Déléguer la tâche du Harpon était la volonté de mon défunt père, tout comme la décision de nommer Sieur Kilmakek, un Drakyn d’une lignée fidèle à mon père depuis maint générations et dont le nom, comme les volontés de mon prédécesseur, ne saurait être salit par vos paroles.
-J..Hmm..
-Quant au "zèle" sur l’imposition, il s’agit bien là d’une initiative personnelle. Elle s’est faite en accord avec la volonté des habitants que ma famille administre, ainsi que des préceptes même de l’Empire.

La belle prit une courte pause pour boire un peu d’une des boissons mises à sa disposition, puis reprit.
-Notre position est bien plus en retrait que Sable-d’or, et leurs remparts assurent au fief de l’empire de quoi prospérer. Ainsi donc, comme la richesse doit être équitablement répartie pour que l’Empire fonctionne sous son modèle de manière pérenne, il est important que le trop plein tiré d’un lieu comble le déficit nécessaire d’un autre. Mais je suis sûre que je ne vous apprends rien, veuillez m'excuser d’avoir tout de même voulu clarifier la situation.

Le regard de l’élémentaire se planta dans celui de l’homme, son excitation faisant écumer légèrement ses cheveux alors qu’elle le voyait se déconfire légèrement. “Ils n’ont pas envoyé le plus malin de la bande.”, constata-t-elle dans ses pensées. “Sans doute qu’ils ont crû que mon éducation en matière de politique était comme celle de mon père. Tout dans la logistique et rien en matière de jeu d’esprits ou de méfiance.”.
Son père avait bien été bête sur certains points de sa carrière, notamment du fait qu’il n’avait pas comprit à quel point faire confiance en chaque homme sous la couronne était une erreur qui lui avait coûté ça et là.
En faisant de même, elle se serait sans doute retrouvée dépossédée de son fief (Sous prétexte qu’une femme idiote ne pourrait gérer une telle position), de son titre (aucun mérite dans le sang pour une femme sans héritier) et potentiellement même de sa flotte. Quant à Kilmakek, il aurait été désanoblit, voire potentiellement traité comme un traître comme tous les capitaines de navires.
D’un côté purement pratique, la flotte des Laliatine était financée par la famille, donc hors des comptes de l'empire, bien qu’à leur disposition par corrélation avec la féodalité. Ainsi donc, avec un tour de passe passe inventif, réquisitionner la flotte sous peine de se voir dénoncée comme traître à la couronne pour détenir un pouvoir si important était chose aisée.

Somme toute, en voyant l’homme devant elle chercher frénétiquement des yeux une solution dans son cerveau pour reprendre la main autrement qu’en haussant le ton et en tentant de l’intimider, Usalka se dit qu’elle était hors de danger pour le moment et qu’elle avait eu pas mal de chance de tomber sur lui. Le plaisir que commençait à ressentir la belle en le voyant fouiller ses cheveux d’une main tout en allant prendre une tasse pour cacher son besoin de réfléchir était exaltant. Il but une gorgée, puis une autre, et finalement, se leva, racla sa gorge avant d’ouvrir la bouche.
-N’OU..
-bliez pas votre place, maître Arwin, compléta Usalka en posant sa tasse. Vous venez d’insulter les volontés d’un Seigneur et de bafouer le nom de son vassal, rappela la mage.

“Tant occupé à trouver moyen de me faire plier qu’il en a oublié ses obligations. Un homme aurait pu demander sa tête sur un affront pareil.” pensait-elle, presque désireuse de porter une main à son visage d’exaspération. Arwin prit quelques secondes pour se rendre compte de son erreur et finit par demander pardon timidement avant de se retirer.
La belle patienta seule dans la salle quelques minutes avant qu’un autre homme entre. Lui était armé, ou du moins avait une arme d’apparat. Une épée droite dans un fourreau en fourrure ayant l’air d’une douceur infinie et dont le motif rappelait certains grands félins du désert. Il s’approcha de la table, s’inclina devant elle puis déposa une petite bourse.
-Maître Arwin tient à se faire pardonner, expliqua-t-il sommairement avant de se retourner et de partir.

Usalka ne dit mot et attendit un peu plus, puis finalement quelqu’un vint pour rester. Un vieux Drakyn, ce qui voulait dire qu’il approchait peu ou prou le même âge qu’elle au final. barbe blanche, un bâton pour se tenir droit. il boitait et d’après sa démarche, il n’avait jamais été dans la même ligue que ses homologues tous plus musclés et parfaits les uns que les autres, mais peut être était-ce le biais de l’élémentaire de n’avoir connu que des grands travailleurs physiques de cette race. Il n’avait pas été présenté par une servante comme l’homme qui s’était ridiculisé, et la belle ne sut comment l’appeler. Elle patienta donc qu’il se rapprochait d’elle. Il tendit la main, elle posa la sienne et il souffla un baiser sur celle-ci avant de se diriger vers un fauteuil. Il s'affaissa comme un bienheureux et grogna de délectation à la gratification de ne plus avoir à supporter son poids. Son visage se tourna avec un sourire vers la jeune femme.
-C’est possiblement le meilleur endroit de ce foutu palais, plaisanta-t-il.

Les cheveux d’écume de l’élémentaire redevinrent solides, elle était perplexe face au semi-dragon souriant. Voyant son incompréhension, il ouvrit la bouche.
-Je ne fais pas partie des innombrables “voix de l’empereur”, je suis comme vous, un rebut.

“Oh..” comprit la belle.
-Alors.. C’est quoi votre défaut ? demanda la vieille chose décrépie.

Usalka baissa juste les yeux vers sa poitrine, puis la remonta avec un air entendu.
-Et vous êtes seule, je présume ?
-Je n’ai guère eu le loisir de fréquenter des hommes de mon rang, à part celui qui m’a élevée.
-Toutes mes pensées. Le Harpon était d’une aide capitale pendant les guerres.
-Vous connaissez ma famille ?
-J’ai une passion pour les seigneurs de moindre importance. Toutes ces petites maisons et leurs petites histoires, leurs emblèmes et leurs significations. Je trouve ça fascinant.
-Et vous êtes ? demanda curieusement l’élémentaire, plus intéressée par ça que par son passe-temps.
-Agrand Mulmebarbe, percepteur de l’empire depuis… depuis.. quelque chose comme cent quatre-vingt-dix ans.
-Comment un percepteur peut-il être considéré comme un rebut ? s’étonna la belle.
-Je me pose la même question à propos des femmes, figurez vous, blagua-t-il avant de rire puis de tousser.

Il se pencha pour se servir du thé et but longuement.
-Quand vous êtes en fonction, vous êtes une personne extra ordinaire, expliquait-il. Une fois à la retraite, vous êtes juste un peu pénible à supporter. Mais quand vous êtes à la retraite, et que vous venez tous les mois faire une réclamation parce qu’il y a une erreur de calcul sur vos pensions, vous êtes vraiment enquiquinant.
-Tous les mois ?
-Tous les mois, répéta le vieux Drakyn avec un sourire. Tous les mois je sors de ma retraite dans les Oasis, je me fais escorter jusqu’à Taisen, puis à Ikusa, et je viens réclamer quelque chose comme une pièce d’or alors que le voyage m’en coûte deux. Peut-être qu’ils finiront par remplacer CE COMPTABLE SI EXÉCRABLE !!! termina-t-il en hurlant.

Il eut un petit rire, et la belle se joignit à lui. Il avait un petit côté fou mais plaisant.
-Il EST.. DEFINITIVEMENT… LA HONTE DE L’EMPIRE !!! gueulait-il, prenant une respiration complète entre chaque tronçon de sa phrase.

Les portes s’ouvrirent à la volée et des soldats entrèrent. Un plus gradé entra avant de baisser la tête de désespoir.
-Encore vous ?
-Encore moi, ricana le Drakyn.
-Escortez-le jusqu'au trésor, je ne veux plus de lui ici, lâcha le chef à ses sous-fifres.

Il commençait à faire demi-tour puis il s'arrêta.
-Seigneur au Harpon, se désigna elle-même l’élémentaire avant que le garde ne lui pose la question.
-Je dois vous accompagner jusqu'au magistrat, veuillez me suivre, je vous prie.

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Le magistrat en question était un homme un peu bedonnant, plutôt sûr de lui et n’ayant pas particulièrement beaucoup de temps à lui accorder. Il Y en avait d’autres comme lui dans la pièce ou ils se trouvaient, mais tous étaient très occupés. Ainsi il alla droit au but, elle était un Seigneur mineur, l’empire reconnaissait son droit, mais juste parce qu’il le fallait. Ainsi donc, il lui faudrait faire ses preuves, comme d’autres avant elle, mais également s’occuper d’autres tâches pour prouver sa valeur. L’homme ventripotent exhala un soupir quand il apprit qu’elle n’avait pas particulièrement de talents martiaux. Il savait à quel point l’empereur et son clan reverrait la force plus que l’usage de la magie. Elle avait néanmoins du savoir pour commander, ce qu’il essuya un peu d’un revers en lui rétorquant qu’elle n’aurait probablement pas tant d’appuis militaires que cela si jamais ils décidaient de l’envoyer se battre.

Il fouilla ses rouleaux puis en sélectionna un qu’il jugeait dans les cordes de la jeune noble. Un litige entre deux peuplades du désert sous la jurisdiction de l’empire. Il l’enverrait elle, ainsi qu’un de ses propres hommes pour surveiller ses dires et ses actions. Elle pourrait prendre tout homme qu’elle pourrait engager avec ses propres moyens.

Sur le papier ça n’avait pas l’air bien dur, ça n'était qu’un test. Elle sortit du grand palais, puis alla dormir sereinement avant de repartir le lendemain à la fraîche avec sa garde et Hunli Origar, un homme-lion aux compétences martiales se lisant sur ses muscles. Il était très fermé, ne s’adressant à elle que pour lui expliquer sa position d'observateur et lui donner un grand sabre, symbole de sa fonction temporaire.
Ils arrivèrent aux abords de caravanes arrêtées en plein désert depuis quelques jours. Deux familles se présentèrent à elle en laissant les enfants s’approcher sans peur des inconnus. Elle reconnut le tatouage de l’empire, ainsi que les marques différenciant une tribu d’une autre.
Les chefs de chaque famille se rapprochèrent ensuite, se fusillant du regard à chaque instant ou ils ne s'adressaient pas à elle.
-Z’êtes le gus de l’empire ? demanda l’un des deux.

C’était bien la première fois qu’on la prenait pour un homme. Usalka tourna un instant la tête vers Hunli, elle crut voir passer un sourire amusé avant qu’il ne pointe du menton l’affaire en cours.
-Je suis bien la représentante de l’empire pour cette affaire.
-Affair.. fit le second d’un air dépité avant de cracher par terre à côté de lui. C’mon fils qu’est mort, s’savez ?
-Quelles circonstances l’ont fait trépasser ? demanda l’élémentaire sans prendre de détour pour exprimer de l’empathie.
-...
-E’te d’mande pourquoi qu’est mort ? traduisit l’homme-lion.

Les cheveux de la belle écumèrent légèrement devant ce beau geste de la part de l’observateur et nota dans sa tête d’utiliser un vocabulaire plus simple à l’avenir.
-Pourquoi qu’est mort ? J’voudrais ben savoir, répondit-il agacé. P’t’etre ben qu’c’est parce qu’l’aut bazar y a mis un coup de hache.

Le visage d’Usalka suivit du regard l’accusation, pointant vers un jeune de l’autre clan.
-L’y a touché sa belle, s’juste retour des choses, commença le père de l'autre famille avant de s'adresser à l'autre. T’y aime pas quand on touche tes lézards, touche pas nos femmes, répondit le chef responsable du jeune en question.
-Donc un de vos fils à vous, faisait-elle en accentuant le fait qu’elle s’adressait bien à une personne plutôt qu' à l’autre. S’est approché d’une de vos filles, destiné à ce jeune homme au fond, qui donc lui a mis un coup de hache. C’est bien ça ?
-C’ça, répondirent les deux.
-Quel âge il a ?
-Vingt-deux, j’crois ben.
-Elle ?
-Vingt.
-Mariés ?
-Non, pas.

La mage tourna la tête vers l’homme-lion avec une expression pour le moins curieuse. “La tâche est aussi simple que ça ? qu’est ce que c’est que cette idiotie ?” se demanda-t-elle. Hunli croisa les bras d’un air désintéressé et pointa du nouveau les deux chefs du menton pour qu’elle se remette au travail. La belle tendit une main vers le jeune homme et lui fit signe de venir. Il se leva et prit son temps pour arriver d’un pas lent et l’air presque amusé.
-Son nom ? s’enquit Usalka.
-Edrengel, Cahin… répondit son père avant de mettre une main sur son visage et de se mettre à pleurer.

Il se retourna pour aller poser un poing sur l’épaule de son fils et le traiter d’idiot. il rejoignit le reste de sa famille alors que le jeune arrivait.
-Edrengel ?
-Ouai.
-Vous êtes reconnu coupable de meurtre par votre père et celui de la victime. Est-ce que vous voulez établir… Est-ce que tu veux te défendre, Edrengel ? simplifia la jeune femme.
-Ouai, j’crois ben, répondit l’autre avant de prendre une posture de combat et un pas de recul.

Pendant un instant Usalka parut étonnée, puis Hulin lui signala qu’il allait attaquer. La dague d’Edrengel heurta un bouclier d’eau convoquée.
-Te défendre verbalement, jeune homme.. rectifia l’élémentaire avant de pousser son bouclier vers l’avant pour renverser puis asperger l’idiot en face d’elle.
-Aaaah.. fallait l’dir, s’exclamait le garçon avant de s’affaler sur le sable humide. Nan.. Nan, j’l’ai bien ouvert en deux.

La belle décrocha le fourreau du sabre pour le donner à un de ses gardes, puis tira sur le manche pour libérer la lame avant de la planter dans le sol.
-En tant qu’arbitre de l’empire, moi, Usalka Laliatine, Seigneur au Harpon..
-S’pas un harpon ça m’dame, fit un enfant à côté d’elle.
-..Seigneur au Harpon, reprit la jeune femme, condamne le meurtre de..?
-Isatid, fit le père de celui-ci en se mettant à pleurer.
-..d’Isatid. Pour cet odieux acte, vous vous placerez au service de sa famille jusqu’à réparation des torts.
-Mais.. j’l’ai tué.. fit remarquer le jeune homme.

La mage leva tout juste assez la lame pour que son escorte arrive à replacer le fourreau, puis regarda l’homme-lion qui ferma les yeux un instant en hochant la tête.
-Jusqu’à quand ? demanda le père du défunt.
-Selon votre bon vouloir, de tout de suite au jour de sa mort.
-HEIN !? fit le jeune homme en se redressant, soudainement intéressé par son sort.

Elle commençait à se retourner pour repartir tout comme Hunli et sa garde quand Edrengel se remit debout pour pester. La mage et l’observateur s’entre regardèrent, puis un bruit brutalement équivoque les mirent sur leurs gardes. Leur vision chercha Edrengel, qui se trouvait au sol, une lance dans la gorge. D’après la trajectoire le jet était.. de son propre père.
-Plutôt crever qu’voir mon fils servir c’ui là.

L’élémentaire baissa la tête et s’essuya le visage devant cette scène stupide. Le père du premier était maintenant en colère contre celui de l’autre et l’insultait sans détours.
-On est d’accord qu’il s’agit en quelque sorte d’un crime d’honneur ? demanda-t-elle à l’homme-lion.
-Ca m’en a tout l’air.
-Donc on s’en va ?
-Hum, réfléchit Hunli avant d’apporter sa réponse. Restons pour la nuit, s’ils en viennent aux mains il faudra sévir.
-C’est toujours comme ça ?
-Entre ce genre de famille ? Plutôt oui.

Le groupe sépara les deux caravanes, puis profitèrent de l’hospitalité de celle du père d’Isatid. Le lendemain ils rentrèrent à Ikusa pour faire leur rapport. Le magistrat n’était pas particulièrement impressionné. Elle avait agit conformément au code, elle pouvait donc continuer sur cette lancée. Il avait un autre travail à lui faire faire, et sans doute un autre après celui-ci, et un autre.
La belle prendrait son temps, mais finirait sans doute par se lasser si cela devenait une épreuve infinie.

Diplomates/Ambassadeurs: De part son passé loin de toutes les intrigues politiques la demoiselle a développé un goût pour celles-ci. Son père la destinait à cette fin et son intellect est en adéquation avec ce genre de fonction.

La cour impériale: La cour impériale est un élément important quoique secondaire comparé à des éléments tels que la Main de l’empereur ou son conseil restreint. Néanmoins les nobles de cour et leurs intrigues peuvent dévoiler certains atouts dont il est bon de s’emparer ou de manipuler en faveur de l’empire. La belle inspire à entrer dans la cour impériale afin de se rapprocher du noyaux du pouvoir de l’empire, une position de choix pour tout noble.