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Parfois, lorsque quelque chose poussait à bout la Majra, elle avait tendance à s'emporter, comme tout humain elle succombait parfois à la colère. Car oui, c'était une humaine, bien que le doute fut permis sur ce dernier point, tant les atrocités qu'elle pouvait commettre pour son bon plaisir pouvait laisser planer quelque doute sur son humanité. Erwin avait peut-être lui-même douté sur la question, à tel point il avait pu constater comme sa cousine pouvait se montrer quelque peu différente des autre humains, bien qu'elle ne doit pas une exception isolée.

Pour ce qui était de son accès de rage envers le cadavre du Consul N, il fallait reconnaitre qu'il l'avait quelque peu poussé à bout en ne se laissant pas abattre si facilement, leur donnant même du fil à retordre. De surcroit, elle n'avait guère aimé sa manière de parler, quant à son regard, elle ne pouvait le supporter. Et puis Erwin était le seul éphèbe qu'elle pouvait tolérer, les autres lui rappelant par trop les prétendants qui se pressaient au portail du domaine Leezen alors qu'elle n'était qu'une fillette. Peut-être le regard masculin en général l'incommodait, la plongeant dans ces sombres réminiscences où elle n'était considérée que comme un simple objet faisant l'objet d'odieuses simonies.

Toutefois, nous nous devons d'arrêter là cette psychanalyse, tant le profil psychologique de la Majra Leezen était infiniment plus complexe que cela, il ne faudrait pas voir à s'égarer en fatrouillages superficiels. Pour en revenir aux faits, Lyra s'empara du médaillon tendu par son cousin et le glissa dans une petite poche de son ceinturon. La caverne était totalement silencieuse à présent, seuls les crépitements des incendies déclenchés par Erwin perturbaient ce calme perturbant. Le feu avait toutefois du mal à se répandre à toutes les habitations, tant le climat y était humide. Il allait falloir lui donner un petit coup de pouce. Peut-être que l'escouade laissée en faction à l'entrée de la caverne pourrait venir leur donner une coup de main pour en finir avec Vermeille.

- Je le ferai, une fois le problème des Titans réglé. As-tu accompli ici tout ce que tu voulais ? Son regard balaya les environs. Et pour ce qui est de ce village... Vermeille. Il semble évident qu'il est de notre devoir de le démanteler, pour éviter que ce fameux "maitre" ne transmette ses pouvoirs à un autre trimardeur. Il ne faudrait pas voir à ce que d'autres Consuls ne voient le jour, n'est-ce pas ? Elle posa ses deux orbes noires sur son cousin.

Si sa question sonnait comme une question rhétorique, ce n'en était pas une. Elle était bien au fait de la sensibilité et l'empathie latente d'Erwin, elle avait bien perçu son regard de dégout alors qu'elle broyait le crâne de Clayron Stonewell, c'était toujours une petite fiotte dans le fond. Elle se doutait donc qu'il rechignerait à massacrer cette Ogygie souterraine.

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- J'aime mieux ça. Commenta Lyra en le regardant partir vers son destin.

Il était bien agréable de voir qu'Erwin et Lyra étaient sur la même longueur d'onde, malgré leurs différences flagrantes de tempérament. Et pour une fois, même si la présence de Carnage était manifeste, Lyra voyait bien que c'était son cousin qui parlait. La vie de quelques anachorètes troglodytes ne valait guère à côté de leurs desseins, ils pouvaient en balayer autant qu'ils le voulaient, juste pour s'assurer que l'emprise des Consuls ne s'étende pas au delà de cette caverne. Vermeille avait déjà commencé à brûler et serait bientôt réduite en cendres avant la fin de la journée, Lyra s'assurerait que la faille souterraine s'effondre après leur départ.

Le Reike ne pourrait pas occuper ces terres tout de suite après avoir vaincu les Titans, or, tout ce que l'Empire ne pouvait contrôler devait être détruit. Et lorsqu'on interrogerait la Majra sur ce qu'ils avaient trouvé dans ces souterrains, elle n'aurait qu'à rapporter la présence d'une cache des pro-titans, et alors Vermeille serait rayé de l'histoire à jamais. Qu'est-ce qu'il était étonnement aisé de commettre les pires atrocités lorsqu'on se battait pour une cause ! C'était bien de cet aspect de sa profession dont Lyra tirait toute la satisfaction de son œuvre. Elle avait été faite pour commander des hommes, pour marcher sur des terres impies et pour perpétrer des massacres au nom du Reike.

Il n'en fallut pas plus pour qu'elle aussi se charge des quelques récalcitrants qui n'avaient pas déjà péris dans les incendies. La cavité n'avait jamais dû être aussi lumineuse qu'aujourd'hui car les habitants quelle trouva dans l'une des cahutes cliquaient des yeux, aveuglés par les foyers et leur luminosité inhabituelle pour leurs rétines. Il ne lui fallut pas bien longtemps pour découper, broyer et réduire en cendres les familles apeurées. Elle remarqua alors un bâtiment plus haut et plus large que les autres, l'identifiant comme une salle commune, elle devina qu'il devait s'y cacher des proies.

Elle avait vu juste car dedans, après avoir passé les maigres barricades de l'entrée, elle posa un regard plus froid encore que le plus froid des hivers sur une comitiva de plusieurs familles fermières implorant la pitié. Le sommet de la caverne s'emplissait de fumée, formant comme une épaisse nappe nuageuse noire comme la nuit, uniquement éclairée par les quelques lueurs du village ignescent plus bas. Une paire de minutes s'écoula avant que la Majra n'émerge de nouveau du bâtiment, une fois les dernières clameurs étouffées. Elle était couverte de sang et arborait un sourire qui aurait fait frissonner Lothab lui-même.

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Lyra était passablement satisfaite de leur action du jour. Il fallait reconnaitre que le duel avec le béhémoth était distrayant à souhait avec jusque ce qu'il fallait de difficulté pour donner une combat mémorable. Et s'il avait été interrompu par ce trouble fête de Consul, Lyra avait pu achever la bête plus tard. Dommage qu'elle ait été sous l'emprise de ce hâbleur de Clayron Stonewell, car ça aurait fait une excellente addition aux forces du RSAF. Quant au duel avec le Consul, il n'avait pas été particulièrement attrayant, tout au plus une épine dans le pied de la Majra. Au moins Erwin était parvenu à retracer un pair du Consul N, sans pour autant en tirer grand chose si ce n'était ce talisman qu'il avait arraché à son cadavre. Lyra se rendrait un jour au Bureau du Renseignement Central pour délivrer un rapport sur cette organisation dont les services de l'Oreille devaient déjà être au courant, ceci-dit.

Pour l'heure, une fois avoir massacré les villageois cachés dans la salle commune, que ce soit hommes, femmes, enfants ou vieux, elle descendit la ruelle principale pour rallier Erwin qui avait lui aussi parachevé son œuvre. La Majra haussa un sourcil en s'approchant de lui, observant d'un œil le massacre perpétré par son cousin. Il fallait reconnaitre que c'était dans ces situations qu'elle l'aimait le plus. Toutefois, elle n'était pas du genre à manifester son amour pour autant.

- Beau travail. Commenta-t-elle sobrement. Une bonne chose de faite. Allons-y.

Sur ces mots, Lyra s'en retourna vers la cavité d'où ils étaient venus, ayant bien pris soin de retenir le chemin parcouru pour mieux revenir sur leurs pas, suivis de près par Erwin, étrangement silencieux, au plus grand plaisir de la Majra qui appréciait le silence. Ils laissèrent l'incendie dévorer les dernières maisons, et pour être sûr, Lyra projeta un éclair contre le pinacle de la caverne de Vermeille, celle ci s'effondrant derrière eux, refermant à jamais ce repère des Consuls. À ce propos, Lyra pensa pour la première fois qu'ils ne connaissaient toujours pas les motivations de cette organisation, peut-être étaient-ils pacifistes, voir mieux : pro-Reike ? Lyra haussa les épaules à cette pensée. Peu importait en fait. Le Consul N avait bien attaqué la Sénéchale à Östergrund l'an passé, ce qui suffisait à Lyra pour s'accorder avec Erwin dans sa quête.

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Ah ! Comme si la journée n'avait pas été assez chargée, une dernière péripétie se présenta à nos héros. À l'instar de la caverne, un massacre avait été perpétré simultanément à la surface. Il semblerait, qu'attirés par les grondements de l'éboulement ainsi que l'affaissement de l'éminence rocheuse, la troupe de cavalerie légère se soit rendue à l'entrée de la grotte. Le Nylsark avait en effet pour ordre d'escorter la Khashis et le grabuge qu'ils avaient déclenchés là-dessous sonnait comme un signal de départ. Or, il était manifeste qu'ils avaient été intercepté par une connaissance des deux cousins.

Le Consul N, engoncé dans son armure d'acier luisant, se dressait au milieu des cadavres de soldats et de chevaux, se désignant volontairement comme responsable de la tuerie. Et s'il n'avait pas tenté de tuer Lyra lors de leur dernière rencontre, elle lui aurait bien proposé de se joindre à eux, tant ses talents de combattant auraient été bienvenus dans les rangs de l'armée. Si l'Oni était capable de décimer une troupe à lui seul, il aurait été un atout redoutable dans la lutte contre les Titans. Mais, sans conteste, ils ne pouvaient faire partie du même camp, tant son aversion pour Erwin le rendait peu conciliant envers Lyra et ses soldats. De surcroit, il semblerai que le Consul N nourrissait de tout autres desseins bien incompatibles avec ceux de la Sénéchale.

Et si un combat se révélait inéluctable, Lyra était bien lasse. Elle s'était bien assez battu comme cela, et son endurance, à l'instar de son mana, commençait à lui faire défaut. Le heaume du Consul reflétait la lumière de la lune, les rayons de cette dernière filtrant à travers les épines de sapins. Les cimes flottaient au vent, ondulant leurs ombres sur le sol tâché de sang et de chair, déformé par les sabots des destriers et des cadavres décharnés. Lyra pris le temps d'attacher ses cheveux maculé d'hémoglobine et de poussière, afin de mieux voir leur ultime adversaire. Elle renifla de mépris.

Ils n'allaient certainement pas lui délivrer le fruit de cette opération déjà peu gratifiante. Ils n'avaient tirés de cette satanée expédition qu'un ridicule médaillon et pas le moindre renseignement alors que Lyra avait perdu une vingtaine d'hommes. Ceci-dit, la présence du Consul N prouvait qu'ils avaient mis un coup de pied dans la fourmilière en mettant la main sur cet artefact qui, selon leur adversaire, renfermait un certain pouvoir. Au moins une bonne nouvelle, parce que la mauvaise était qu'ils ne partiraient pas sans en découdre avec lui. Sans crier gare, le Consul se jeta sur eux tel le loup sur sa proie.

Et si Lyra dressa son bâton par réflexe, Erwin la projeta sur le côté. Profitant de cette ouverture, le sabre dans une main et son bâton dans l'autre, la Khashis glissa sur le sol pour mieux se relever et sauta par dessus un volis et se laissa choir dans une combe creusée par un petit torrent. Elle dérata sur le sol, éclaboussant son visage de vase et bondit par dessus le ruisseau et passa par dessous les branches d'un aulne penché avant de jeter un regard en arrière, cherchant Erwin du regard. Elle détourna cependant le regard de ses arrières, ayant entendu les renâclements d'un cheval.

Elle aperçu dans l'ombre sa monture qu'elle avait attaché à une tronc. Les mors de celle d'Erwin avaient été arrachés et son cheval avait dû s'enfuir. Mais ils n'avaient besoin que d'un seul destrier pour mettre les voiles. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, elle fut sur sa selle et talonna le moreau pour revenir en arrière, espérant attraper son cousin au vol pour partir avant que le Consul ne puisse récupérer le médaillon. Et si sa conscience lui criait de galoper à bride abattue jusqu'à la base sans se retourner, quelque chose en elle la força à revenir pour Erwin.

Allez savoir quoi.

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Lyra attrapa Erwin au vol, agrippant fermement sa main pour le faire glisser sur la croupe de son cheval. Son cousin l'attrapa par la taille pour se maintenir en selle alors qu'elle éperonnait derechef sa monture qui partit au triple gallots entre les troncs de sapins et d'aulnes. Les épines leur fouettait le visage, le vent leur glaçait les doigts et le terrain accidenté malmenait leurs séants. Mais la Khashis talonna d'avantage le destrier pour le faire sauter par dessus un volis et atteindre un sentier sillonnant vers la plaine.

Un éclair fendit la nuit, fondant droit sur eux, avant de se dissiper en une myriade d'arcs électriques qui frappèrent le sol et fendirent bien des troncs. L'éclat lumineux et la détonation du sort ne fit qu'exciter d'avantage le cheval qui accéléra sa cadence. La magie élémentaire du Consul avait, par chance, été dissipée par le joyau d'adamantine luisant sur le bâton de mithril fixé à la selle de leur monture, sans quoi ils auraient été pulvérisés. Les voilà qui fendaient la forêt de sapins, glissant entre leurs silhouettes rectilignes. A part les renâclements du cheval, leurs souffles éreintés et le hululement d'une chouette effraie, la nuit ne fut plus perturbée par la moindre clameur. Seuls les ombres de la lune s'étiraient sur l'humus forestier.

Semblerait-il que leur poursuivant n'en était pas réellement un car par le moindre son de sabots de leur parvenait de derrière. Le Consul N, capable de se téléporter à des endroits très précis, avait dû arriver sans monture, l'empêchant de se jeter à leur poursuite. De plus, Lyra n'avait vu ni entendu le moindre cheval, en tuant toute la troupe de reikois, il avait fait fuir tous les chevaux qu'il n'avait pas tué. Une présomption qui se retournait à présent contre lui, à l'avantage de Lyra et Erwin.

Les cheveux de la Sénéchale fouettaient le visage de son cousin, ce qui ne semblait pas déranger ce dernier, ou tout du moins était-il capable de le supporter au vu de l'urgence. Elle avait bien fait de revenir pour lui, alors qu'elle aurait pu fuir à bride abattue, elle avait fait demi-tour. Elle se rendait compte, en sentant la joue d'Erwin plaquée contre son épaule, qu'elle avait fait le bon choix en cette nuit décisive. Dans l'élan de l'adrénaline, elle ne put s'empêcher de le lui signifier.

- La prochaine fois, on fera plus attention. Je ne voudrais pas te perdre. Elle éperonna leur monture.

Il filèrent vers le Levant.

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