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« À l’aide ! Au voleur ! Seigneur, aidez-moi ! »
Au fin fond d’une ruelle sombre de la capitale républicaine, une noble hurlait son désespoir, effondrée à genoux sur les pavés froids, des larmes coulant sur ses joues rosies. Complètement désemparée, la jeune femme cherchait une main tendue qu’elle pourrait saisir, un officier qui passerait lors de sa ronde, un preux chevalier prêt à lui venir en aide, mais elle n’eut que le silence, la solitude. Elle passa ses doigts sur sa nuque, y sentant encore la présence du collier qui venait de lui être arraché, se remémorant avec douleur tous les souvenirs qui y étaient associés. Un bijou précieux, un trésor familial qui se transmettait de générations en générations, perdu dans les mains d’un brigand. Elle ne se souvenait même pas avoir fait preuve d’inattention, simplement que d’un instant à l’autre, une ombre s’était faufilée dans son dos pour s’emparer de ses biens les plus chers. Pestant contre les agents de l’ordre qui étaient aux abonnés absents et contre son mari l’ayant abandonnée pour s’engouffrer dans une boutique non loin, la jeune femme finit par se relever dans un râle plaintif, se rendant au poste le plus proche pour qu’on retrouve ses affaires.
Un peu plus loin, le raton-laveur avançait paisiblement, faisant sauter la joaillerie fraîchement dérobée entre ses pattes, sifflotant un air bien connu, une chanson d’une barde de passage, une certaine Tess Paath. Après tout, s’il devait rester en vie pour s’occuper de sa mère, autant profiter des minuscules plaisirs que le monde pouvait lui offrir. Il ne se posa pas même la question d’une possible course poursuite, d’un énième avis de recherche placardé dans les rues de la capitale. Plus d’une dizaine d’années de vol, et pas une seule fois, il n’était passé par la case prison. Au-delà du talent, la chance souriait indéniablement à l’hybride qui se pavanait, enchanté par sa prise de la journée, se rendant directement à son acheteur. Changeant de direction fréquemment pour brouiller les pistes, il s’engagea enfin dans un dédale de quartiers résidentiels et termina sa promenade par une bicoque située juste à côté de l’auberge dans laquelle il créchait. Sans prendre la peine de toquer, Crocus passa l’embrasure de la porte, secouant son butin sous le nez de son commanditaire. « Tu vois, c’était pas si compliqué. T’en as fait tout un plat de ta gonzesse, de sa vigilance, de ses gardes du corps. C’était de la pisse de chat. ».
Déposant les bijoux sur la table, il vint croiser les bras devant son torse tandis que le jeune homme en face de lui s’émerveillait. « C’est dingue, c’est… c’était donc vrai ce qu’ils disaient sur vous ! ». Levant un sourcil, passablement gonflé de devoir faire la conversation à un abruti de bas étage ayant voulu se venger de son ex-femme, il leva les deux pattes en l’air, haussant les épaules. « J’sais pas qui t’a dit quoi, et pour être honnête je m’en fous. Si on pouvait passer à la partie du plan qui m’intéresse vois-tu je serais pas contre. C’est plus qu’une question de temps avant qu’elle capte que ça vient de toi, j’te recommanderais de pas trop t’attarder. La protection c’est pas mon truc et tu pourrais me payer aussi grassement que tu le veux, ce sera jamais mon dada. Alors balance. ». Au fond qu’est-ce qu’il en avait bien à faire de si son commanditaire se faisait prendre la main dans le sac ? Rien, absolument rien. Seulement le raton avait appris avec les années qu’il était bien plus aisé de maintenir une réputation en gardant de bonnes relations avec ses clients. Probablement la partie de son travail qui le rebutait le plus.
« Oui, oui bien sûr. Tenez Monsieur Crocus, et surtout merci, du fond du coeur. ». Un rire gras s’échappa de sa gueule alors qu’il tournait les talons, cachant la bourse dans la sacoche à sa ceinture. « Oh putain Monsieur Crocus, oh la tronche. La vie mérite d'être vécue pour entendre des conneries pareilles. Allez à jamais, que j'revois pas ta tête sur mon chemin. ». Continuant de rire aux éclats, le soleil se couchant sur ses épaules qui se soulevaient à un rythme effréné, il s’empressa de retourner dans la chambre qui lui était réservée. Les bas-fonds de Liberty l’attendaient, sa mère également, mais il avait une autre mission dans le coin dans la matinée. Autant ne pas perdre de temps et d’énergie. Après s’être rassasié aux frais du client précédent, il s’enroula dans la couette, s’endormant comme une masse en une dizaine de secondes, ses armes rangées sur la table de nuit à l’exception d’une dague qu’il gardait sous son oreiller. Ronflant bruyamment, le raton laveur profitait d’un repos bien mérité, qu’il espérait n’être sous aucun prétexte interrompu. Autant dire que l’espoir fait vivre…
Au fin fond d’une ruelle sombre de la capitale républicaine, une noble hurlait son désespoir, effondrée à genoux sur les pavés froids, des larmes coulant sur ses joues rosies. Complètement désemparée, la jeune femme cherchait une main tendue qu’elle pourrait saisir, un officier qui passerait lors de sa ronde, un preux chevalier prêt à lui venir en aide, mais elle n’eut que le silence, la solitude. Elle passa ses doigts sur sa nuque, y sentant encore la présence du collier qui venait de lui être arraché, se remémorant avec douleur tous les souvenirs qui y étaient associés. Un bijou précieux, un trésor familial qui se transmettait de générations en générations, perdu dans les mains d’un brigand. Elle ne se souvenait même pas avoir fait preuve d’inattention, simplement que d’un instant à l’autre, une ombre s’était faufilée dans son dos pour s’emparer de ses biens les plus chers. Pestant contre les agents de l’ordre qui étaient aux abonnés absents et contre son mari l’ayant abandonnée pour s’engouffrer dans une boutique non loin, la jeune femme finit par se relever dans un râle plaintif, se rendant au poste le plus proche pour qu’on retrouve ses affaires.
Un peu plus loin, le raton-laveur avançait paisiblement, faisant sauter la joaillerie fraîchement dérobée entre ses pattes, sifflotant un air bien connu, une chanson d’une barde de passage, une certaine Tess Paath. Après tout, s’il devait rester en vie pour s’occuper de sa mère, autant profiter des minuscules plaisirs que le monde pouvait lui offrir. Il ne se posa pas même la question d’une possible course poursuite, d’un énième avis de recherche placardé dans les rues de la capitale. Plus d’une dizaine d’années de vol, et pas une seule fois, il n’était passé par la case prison. Au-delà du talent, la chance souriait indéniablement à l’hybride qui se pavanait, enchanté par sa prise de la journée, se rendant directement à son acheteur. Changeant de direction fréquemment pour brouiller les pistes, il s’engagea enfin dans un dédale de quartiers résidentiels et termina sa promenade par une bicoque située juste à côté de l’auberge dans laquelle il créchait. Sans prendre la peine de toquer, Crocus passa l’embrasure de la porte, secouant son butin sous le nez de son commanditaire. « Tu vois, c’était pas si compliqué. T’en as fait tout un plat de ta gonzesse, de sa vigilance, de ses gardes du corps. C’était de la pisse de chat. ».
Déposant les bijoux sur la table, il vint croiser les bras devant son torse tandis que le jeune homme en face de lui s’émerveillait. « C’est dingue, c’est… c’était donc vrai ce qu’ils disaient sur vous ! ». Levant un sourcil, passablement gonflé de devoir faire la conversation à un abruti de bas étage ayant voulu se venger de son ex-femme, il leva les deux pattes en l’air, haussant les épaules. « J’sais pas qui t’a dit quoi, et pour être honnête je m’en fous. Si on pouvait passer à la partie du plan qui m’intéresse vois-tu je serais pas contre. C’est plus qu’une question de temps avant qu’elle capte que ça vient de toi, j’te recommanderais de pas trop t’attarder. La protection c’est pas mon truc et tu pourrais me payer aussi grassement que tu le veux, ce sera jamais mon dada. Alors balance. ». Au fond qu’est-ce qu’il en avait bien à faire de si son commanditaire se faisait prendre la main dans le sac ? Rien, absolument rien. Seulement le raton avait appris avec les années qu’il était bien plus aisé de maintenir une réputation en gardant de bonnes relations avec ses clients. Probablement la partie de son travail qui le rebutait le plus.
« Oui, oui bien sûr. Tenez Monsieur Crocus, et surtout merci, du fond du coeur. ». Un rire gras s’échappa de sa gueule alors qu’il tournait les talons, cachant la bourse dans la sacoche à sa ceinture. « Oh putain Monsieur Crocus, oh la tronche. La vie mérite d'être vécue pour entendre des conneries pareilles. Allez à jamais, que j'revois pas ta tête sur mon chemin. ». Continuant de rire aux éclats, le soleil se couchant sur ses épaules qui se soulevaient à un rythme effréné, il s’empressa de retourner dans la chambre qui lui était réservée. Les bas-fonds de Liberty l’attendaient, sa mère également, mais il avait une autre mission dans le coin dans la matinée. Autant ne pas perdre de temps et d’énergie. Après s’être rassasié aux frais du client précédent, il s’enroula dans la couette, s’endormant comme une masse en une dizaine de secondes, ses armes rangées sur la table de nuit à l’exception d’une dague qu’il gardait sous son oreiller. Ronflant bruyamment, le raton laveur profitait d’un repos bien mérité, qu’il espérait n’être sous aucun prétexte interrompu. Autant dire que l’espoir fait vivre…
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Un nom à coucher dehors
Février 04
Suite de C'est pas du voyeurisme
Serpent me manque. Il avait toujours de bonnes idées pour s'amuser dans les longues journées du froid hiver, du moment que je lui offrais ma chaleur. Je dors pour fuir les cris et les envies d'une ville humaine en ébullition. Je dors pour passer le temps. parce que trop d'yeux ouverts me guettent. Jusqu'à ce que la Lune ouvre le sien.
La douleur s'estompe peu à peu. Maintenant je sais de quels toits ne pas m'approcher pour ne pas les entendre à nouveau vivre trop fort pour moi.Souplement, je sors de sous le lit et grimpe sur le rebord de la fenêtre. Un battement de paupière et un corbeau pâle aux ailes rosées s'élève dans le ciel nocturne. Le froid de cette nuit d'hiver ne me gêne pas. Comme les nuits précédentes je m'égare, mais cette fois, en sachant quels recoins je ne veux pas voir. Ces humains m'intriguent encore et toujours. Des souvenirs qui remontent me les montrent sous un nouveau jour... Et pourtant ils ne sont pour moi que d'étranges créatures. Coupée entre deux mondes, deux moi, je me pose ça et là pour les observer discrètement.
Un fatigué qui rentre chez lui. Un fou qui délire en riant très fort. Un dévêtu qui caracole si bien pour attirer un partenaire qu'il aurait tout aussi bien pu faire la roue comme un paon. Ici un petit d'humain qui dort dans un lit solitaire. Là toute une meute entassée sur un même matelas. Et là-bas un cadavre oublié sous la neige.
Je plane et me perche sur l'humain qui n'ouvrira plus jamais les yeux, dans l'ombre d'une ruelle. Une écuelle en fer est posé près de lui et je fais attention à ne pas m'approcher de trop de cette chose repoussante malgré les deux pièces jolies qui y brillent, couvertes de gel. ... Mais elles sont quand même jolies ces bouts de cuivre. Je saute sur le pavé et en prend une dans une serre avant de prendre mon envole.
Sur le rebord d'une fenêtre, je pose le petit morceau et le tapote du bout du bec... Héhé... Un coup de bec de plus et un mouvement sur le côté attire mon attention... Et je penche la tête sur le côté.
Un raton laveur !!!
Dans un lit.
Du bec, je donne de petits coups sur la fenêtres mal fermée qui fini par céder, et saute à l'intérieur. Un battement de cil et la forme aviaire à donner naissance à un long reptile qui s'infiltre en silence dans la chambre et rampe jusqu'au lit. Je glisse sur le matelas, goûtant l'odeur de l'humain-raton du bout de la langue. Il ronfle... Et semble dormir de son meilleur sommeil.
A genou sur le bord du matelas, mon corps flou reprend doucement la forme d'une petite elfe de moins d'un mètre soixante. Mes longues oreilles pointues dressées vers l'avant par la curiosité qu'il m'inspire. Mes grand yeux fuchsia aux pupilles de serpent le fixent avec intérêt. Il n'y a que peu d'animaux ici. Enfin il y a les rats mais ils ne sont pas très sympathiques. Je crois qu'ils ont l'habitude d'être malade et agressifs. ça fait plaisir de voir quelqu'un d'aussi familier dans cette immense termitière.
Sans un bruit, sans un mouvement, mes longs cheveux rose vif coulant sur ma peau rose dragée, je l'observe. Je ne respire même pas. Pas besoin. Les mains posées sur mes genoux, ma queue terminée par une pointe en tête de flèche enroulée autour de ma taille, seules mes cornes cristallines reflètent sans que je ne le remarque, un léger rayon de lune.
Serpent me manque... Et la famille de raton laveurs qui habitait non loin de la rivière aussi. Un hiver j'étais resté longtemps avec eux. Et lui alors ? Plutôt humain ou bête ? Peut-être un peu les deux, comme Lézard et Crocodile.
Je penche la tête sur le côté, mes doigts se torturant un peu les uns les autres, résistant à l'envie de lui caresser la tête.
CENDRES
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Sous sa couette, tel un petit rouleau de printemps, le raton-laveur dormait la gueule ouverte, ses ronflements faisant probablement jaser ses voisins de chambre qui tentaient de trouver le sommeil. Lui l’avait plutôt bien trouvé et il ne comptait pas le quitter de sitôt. La journée avait été longue, éreintante, comme chaque jour depuis sa naissance. Chaque seconde était une lutte sans relâche, autant envers sa propre personne que vers le monde hostile avec lequel il cohabitait. Avec les années, Crocus avait appris à se défaire de l’avis des autres, de leurs regards emplis de dégoût qui se posaient sur son pelage rayé. Après tout, il ressentait la même chose lorsqu’il se croisait dans un miroir, alors pouvait-il réellement les blâmer ? La panse bien remplie, l’esprit léger, l’hybride se délectait de cette nuit agréable qui ne faisait que commencer. Roulant sur le côté, étirant ses pattes tout en glissant un bras sous son oreiller en décalant légèrement la dague qui y trônait, il se laissa même aller à quelques marmonnements sortant tout droit de ses rêves. « Non… tu ne manges pas ça… putain mais Ciboulette… t’es conne… ». Sa mère, encore et toujours. Qui d’autre pouvait bien hanter les songes d’un éternel solitaire, d’une âme vouée à l’exil ?
Sa patte vint toucher une peau douce par mégarde tandis qu’il se retournait dans tous les sens et elle s’y arrêta par instinct, son sommeil devenant de plus en plus agité. Ce contact le déstabilisait plus que de raison, cet épiderme froid créant une confusion certaine dans son esprit exténué. Le doute commença à l’assaillir, réalisant sans doute que cette sensation était bien trop réaliste pour être le fruit de son imagination. D’autant plus que Crocus connaissait ses songes, son subconscient et jamais ô grand jamais n’avait-il rêvé de toucher un humain ? Peut-être pour lui arracher les yeux à la limite, mais certainement pas pour lui caresser délicatement la peau. Il grogna doucement, refusant de se réveiller, grimaçant les yeux fermés tandis que la sensation dérangeante ne faisait que gagner du terrain dans sa tête. Finalement, il céda à la tentation, se retournant une énième fois, tendant le bras vers la lanterne éteinte sur sa table de chevet pour la rallumer sans remarquer la présence de la jeune demoiselle dans son dos. Se laissant retomber dans le lit dans un râle plaintif, il poussa un long soupir, s’apprêtant à nouveau à subir une insomnie qui lui cassait les noix.
Il tourna la tête vers l’Elfe et la salua d’un geste de tête peu prononcé, repliant ses pattes sous ses aisselles avec ennui. Une dizaine de secondes passèrent sans qu’il n’ait la moindre réaction, comme si l’arrivée de l’inconnue était parfaitement normale, voire même attendue. Puis il reposa les yeux sur elle, toujours dans un silence complet, penchant la tête sur le côté, les oreilles en arrière. Le raton se redressa, approchant un doigt d’une patte de la chevelure rosée qui pendait sur ses draps, venant la saisir avec curiosité. Son autre main vint pincer son propre bras, la douleur se frayant un chemin dans ses nerfs avant d’arriver à son cerveau qui réalisa soudainement que toute cette situation était complètement absurde. « Mais… MAIS QU’EST-CE QUE TU FOUS DANS MA CHAMBRE TOI ?! ». Se redressant à la vitesse de la lumière, attrapant au passage la dague qui gisait sous son oreiller, il alla se plaquer dans un recoin de la pièce, haletant. « T’es totalement timbrée, tu t’es trompé de piaule ou quoi ? Et qu’est-ce que tu regardais comme ça, t’as jamais vu un animal de ta vie, tu t’es dit que ça pouvait être marrant de matter un pauvre gars qui dort ? T’as pas la lumière à tous les étages ! ».
Ils étaient tous profondément dégénérés dans cette capitale pourrie, il en avait à présent le cœur net. Agitant son arme avec vigueur et tremblements incontrôlables, conséquences autant de la surprise que de la fatigue, il se mit à grogner de plus belle. « T’as intérêt à me dire ce que tu fous ici et ce que tu me veux, la donzelle. ». Son regard se mit à défiler de la racine de ses cheveux rosés à sa queue soigneusement enroulée autour de sa taille, tentant de comprendre ce qui était en train de lui arriver. Rien ne faisait sens, et pourtant il était habitué à l’absurde. Une seule conclusion. « Putain je suis en train de devenir barge. Ça y est, mon cerveau a cramé. C’était destiné à arriver mais bordel, maintenant ?! Si t'es venue me buter, fais-le avant que je change d'avis, parce que je change d'avis très vite. ».
Sa patte vint toucher une peau douce par mégarde tandis qu’il se retournait dans tous les sens et elle s’y arrêta par instinct, son sommeil devenant de plus en plus agité. Ce contact le déstabilisait plus que de raison, cet épiderme froid créant une confusion certaine dans son esprit exténué. Le doute commença à l’assaillir, réalisant sans doute que cette sensation était bien trop réaliste pour être le fruit de son imagination. D’autant plus que Crocus connaissait ses songes, son subconscient et jamais ô grand jamais n’avait-il rêvé de toucher un humain ? Peut-être pour lui arracher les yeux à la limite, mais certainement pas pour lui caresser délicatement la peau. Il grogna doucement, refusant de se réveiller, grimaçant les yeux fermés tandis que la sensation dérangeante ne faisait que gagner du terrain dans sa tête. Finalement, il céda à la tentation, se retournant une énième fois, tendant le bras vers la lanterne éteinte sur sa table de chevet pour la rallumer sans remarquer la présence de la jeune demoiselle dans son dos. Se laissant retomber dans le lit dans un râle plaintif, il poussa un long soupir, s’apprêtant à nouveau à subir une insomnie qui lui cassait les noix.
Il tourna la tête vers l’Elfe et la salua d’un geste de tête peu prononcé, repliant ses pattes sous ses aisselles avec ennui. Une dizaine de secondes passèrent sans qu’il n’ait la moindre réaction, comme si l’arrivée de l’inconnue était parfaitement normale, voire même attendue. Puis il reposa les yeux sur elle, toujours dans un silence complet, penchant la tête sur le côté, les oreilles en arrière. Le raton se redressa, approchant un doigt d’une patte de la chevelure rosée qui pendait sur ses draps, venant la saisir avec curiosité. Son autre main vint pincer son propre bras, la douleur se frayant un chemin dans ses nerfs avant d’arriver à son cerveau qui réalisa soudainement que toute cette situation était complètement absurde. « Mais… MAIS QU’EST-CE QUE TU FOUS DANS MA CHAMBRE TOI ?! ». Se redressant à la vitesse de la lumière, attrapant au passage la dague qui gisait sous son oreiller, il alla se plaquer dans un recoin de la pièce, haletant. « T’es totalement timbrée, tu t’es trompé de piaule ou quoi ? Et qu’est-ce que tu regardais comme ça, t’as jamais vu un animal de ta vie, tu t’es dit que ça pouvait être marrant de matter un pauvre gars qui dort ? T’as pas la lumière à tous les étages ! ».
Ils étaient tous profondément dégénérés dans cette capitale pourrie, il en avait à présent le cœur net. Agitant son arme avec vigueur et tremblements incontrôlables, conséquences autant de la surprise que de la fatigue, il se mit à grogner de plus belle. « T’as intérêt à me dire ce que tu fous ici et ce que tu me veux, la donzelle. ». Son regard se mit à défiler de la racine de ses cheveux rosés à sa queue soigneusement enroulée autour de sa taille, tentant de comprendre ce qui était en train de lui arriver. Rien ne faisait sens, et pourtant il était habitué à l’absurde. Une seule conclusion. « Putain je suis en train de devenir barge. Ça y est, mon cerveau a cramé. C’était destiné à arriver mais bordel, maintenant ?! Si t'es venue me buter, fais-le avant que je change d'avis, parce que je change d'avis très vite. ».
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Un nom à coucher dehors
Février 04
Suite de C'est pas du voyeurisme
Il tourne et se retourne, vivant son plus beau rêve. Je souris et me bâillonne d'une main pour ne pas rire. Il se tortille comme le chien de prairie qui rêvait d'attraper les papillons avec sa gueule. Il est tout beau comme ça... Et même si ses mots ne sont pas très gentils, il a l'air heureux. Le légère satisfaction qui me réchauffe doucement le cœur est douce. Aussi douce que semble l'être sa tête.
Assise sur les talons, les bras posés sur mes cuisses, je me laisse aller à la contemplation de ce petit cocon de tissus prêt à laisser échapper un étrange papillon de fourrure. Sa petite patte vient se poser sur ma cuisse et y reste un moment, la caressant d'une drôle de manière. Il fronce le museau, dérangé, mais je ne recule pas, trop heureuse de le regarder, à deux doigts de me métamorphoser pour me lover contre lui, cherchant un peu de cette sécurité des grandes forêts de chez moi et de mes gardiens de griffes et d'instinct avec lesquels je m'entendaient si bien.
J'eus un couinement triste lorsqu'il ralluma la lanterne à son chevet, mes yeux de reptile mettant de longues seconde à s'habituer, à demi cachés par mes mains. Il me salut de la tête et je lui rend son salut d'un sourire. C'est drôle de voir si humain un animal si familier ! C'est perturbant et en même temps apaisant. Je me remets en position pour l'observé, un sourire curieux sur les lèvres, et lorsqu'il se tourne à nouveau vers moi, je le reflète sans y penser. Il penche la tête sur le côté, je la penche également. Ses oreilles en arrières, incrédules, les miennes se pointent en avant, intéressées. Il tend la patte pour caresser les pointe de mes cheveux. Je tends la main pour caresser la fourrure de son bras avec un sourire. Elle n'est pas aussi douce que ce que je pensais. Son odeur musquée de raton me parviens, sans magie, sans faux visage. Il est comme ça et...
... Son hurlement ne me déchire les tympans. Je bondis par réflexes, m’éloignant, oreilles plaquées contre le crâne. Je tombe sur le dos, à bas de son lit et roule sur le flanc dans un chaos souple pour me retrouver à quatre pattes, sur mes pieds et mes mains légèrement griffues, le ventre touchant presque le plancher, la queue rabattue sous le ventre. Il continuait à me crier dessus et je restait cachée derrière le lit par rapport à lui. ... Et comme les mots rapides continuent, sa crainte, sa surprise et son incompréhension s'intensifient. Je repassent la tête au-dessus du matelas, les mains posé sur le bord du lit, pour le regarder, les oreilles indécises.
Il... Me menace mais il n'est pas menaçant...
Enfin, il me propose de le mettre à mort et je ne peux retenir un refus clair et net.
- Non ! Je ne suis pas dangereuse ! " Toujours à croupetons, je quitte mon repère pour m'approcher de lui rapidement, gardant un pas de distance avec sa dague, à genoux sur le sol, l'air chagriné de lui avoir fait peur. " Je voulais pas... "
Je penche la tête et glisse sur la hanche, puis finalement sur le dos, le regardant pas en dessous mon ventre exposé en une posture de soumission passablement universelle qu'un raton comprendrait bien.
- Pardon... " soufflais-je avec un petit sourire d'excuse avant que ma curiosité ne reprenne un peu du poil de la bête. " Tu es qui ? "
CENDRES
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Les poils hérissés autant au niveau du dos que de sa queue rayée, l’hybride haletait, une patte posée sur son cœur qui tambourinait contre sa poitrine. L’adrénaline qui parcourait ses veines à toute vitesse le rendait complètement fou, ses yeux s’agitant sur chaque rebord de la pièce pour comprendre comment la demoiselle avait pu pénétrer dans la chambre. Son regard se posa un instant sur la porte où trônait encore la clef enclenchée dans la serrure ainsi que la fenêtre légèrement ouverte, rien de surprenant à cette période de l’année, mais ça n’expliquait toujours pas comment un humanoïde de cette taille avait pu pointer le bout de son nez sans que cela ne le réveille. Doutant de ses instincts, Crocus peinait à se calmer, entre la folie et l’incompréhension la plus totale. S’il ne rêvait pas, alors qu’est-ce qu’elle venait faire dans sa chambre ? Si son but était de le tuer, elle l’aurait fait avant qu’il n’ouvre les yeux. De plus, il se souvenait vaguement de sa main qui parcourait tendrement son pelage. Enfin, des tueurs en série détraqués, ça existait après tout. La méfiance restait de mise face à cette rencontre improbable.
Recroquevillée derrière le matelas, la jeune fille semblait terrorisée par le raton-laveur qui tremblotait encore sous la fatigue et la surprise. De son côté, il n’en menait pas large non plus. Son arme pointée vers cette inconnue qui refusait de répondre à ses questions, il voulut sauter en arrière lorsqu’elle se rapprocha à une vitesse ahurissante mais sentit le mur dans son dos bloquer son mouvement. Quel abruti, il s’était acculé tout seul, comme un grand. La gueule ouverte, évacuant sa frustration par des respirations saccadées, il s’arrêta net en la voyant se jeter sur le sol à ses pieds. « Hein ? Qu’est… Qu’est-ce que tu fous par terre ? ». Elle n’avait pas l’air maline comme ça, et effectivement, encore moins dangereuse. Le dos contre le sol, le ventre exposé, l’Elfe le perturbait énormément, au point qu’il vint encore pincer son bras pour être sûr qu’il était bien réveillé. « Aïe. ». Soit c’était un rêve lucide très réaliste, soit… Soit rien en fait, parce qu’il ne voulait pas imaginer qu’il puisse se trouver dans une chambre avec une demoiselle inconnue qui le regardait pioncer. Il préférait ne pas y croire. C’était sans doute mieux comme ça, oui.
Venant s’accroupir pour se pencher au-dessus de sa tête, il la fixait d’un air profondément confus, une oreille rabattue en arrière, un sourcil relevé. Posant sa dague sur le côté, à une distance raisonnable, il s’installa à genoux pour l’observer de plus près. « T’es pas nette. ». Un constat simple, mais criant de vérité. « J’suis déjà mort en fait, c’est ça le délire ? T’es venue m’emmener au… je sais pas pourquoi j’hésite, en enfer, évidemment. ». Approchant à nouveau sa patte de cette chevelure dont la couleur l’intriguait, son museau s’agita dans tous les sens, captant les odeurs que la demoiselle dégageait. Le pire c’est qu’elle souriait, en position de faiblesse, là où il aurait pu l’égorger sans qu’elle ne puisse réagir. Hochant la tête pour valider ses propres pensées, il ne put en conclure qu’une chose : elle avait effectivement un pet au casque, et heureusement pour elle, Crocus aussi.
Qui il était ? Elle en avait d’autres des questions du genre ? Et surtout qu’elle ne s’embête pas à répondre aux siennes, c’était lui l’anomalie dans cette situation, assurément. Perturbé par son apparition soudaine et n’ayant aucune idée de la réaction appropriée à ce genre d’intrusion, le raton se gratta la tête avant de soupirer longuement. « Euh… Tu peux m’appeler Crocus, si ça t’amuse. Mais c’est plutôt à moi de poser la question, toi, t’es qui ? ». La colère commença à se dissiper, remplacée par l’incohérence qui régnait en maître sur les lieux. « Et t’es quoi, en fait ? Le prend pas mal mais euh… Bon t’as pas l’air humaine, t'as des oreilles d'Elfe mais une queue et t’as pas l’air hybride non plus, sinon crois-moi que j’serais pas si clément avec toi. ». A vrai dire, elle commençait presque à lui faire de la peine à se comporter ainsi. À croire qu’il était un monstre prêt à la dévorer… Elle n’était pas loin de la vérité, mais Crocus ne tuait jamais sans une bonne raison et pour l’heure, il n’en avait pas.
Recroquevillée derrière le matelas, la jeune fille semblait terrorisée par le raton-laveur qui tremblotait encore sous la fatigue et la surprise. De son côté, il n’en menait pas large non plus. Son arme pointée vers cette inconnue qui refusait de répondre à ses questions, il voulut sauter en arrière lorsqu’elle se rapprocha à une vitesse ahurissante mais sentit le mur dans son dos bloquer son mouvement. Quel abruti, il s’était acculé tout seul, comme un grand. La gueule ouverte, évacuant sa frustration par des respirations saccadées, il s’arrêta net en la voyant se jeter sur le sol à ses pieds. « Hein ? Qu’est… Qu’est-ce que tu fous par terre ? ». Elle n’avait pas l’air maline comme ça, et effectivement, encore moins dangereuse. Le dos contre le sol, le ventre exposé, l’Elfe le perturbait énormément, au point qu’il vint encore pincer son bras pour être sûr qu’il était bien réveillé. « Aïe. ». Soit c’était un rêve lucide très réaliste, soit… Soit rien en fait, parce qu’il ne voulait pas imaginer qu’il puisse se trouver dans une chambre avec une demoiselle inconnue qui le regardait pioncer. Il préférait ne pas y croire. C’était sans doute mieux comme ça, oui.
Venant s’accroupir pour se pencher au-dessus de sa tête, il la fixait d’un air profondément confus, une oreille rabattue en arrière, un sourcil relevé. Posant sa dague sur le côté, à une distance raisonnable, il s’installa à genoux pour l’observer de plus près. « T’es pas nette. ». Un constat simple, mais criant de vérité. « J’suis déjà mort en fait, c’est ça le délire ? T’es venue m’emmener au… je sais pas pourquoi j’hésite, en enfer, évidemment. ». Approchant à nouveau sa patte de cette chevelure dont la couleur l’intriguait, son museau s’agita dans tous les sens, captant les odeurs que la demoiselle dégageait. Le pire c’est qu’elle souriait, en position de faiblesse, là où il aurait pu l’égorger sans qu’elle ne puisse réagir. Hochant la tête pour valider ses propres pensées, il ne put en conclure qu’une chose : elle avait effectivement un pet au casque, et heureusement pour elle, Crocus aussi.
Qui il était ? Elle en avait d’autres des questions du genre ? Et surtout qu’elle ne s’embête pas à répondre aux siennes, c’était lui l’anomalie dans cette situation, assurément. Perturbé par son apparition soudaine et n’ayant aucune idée de la réaction appropriée à ce genre d’intrusion, le raton se gratta la tête avant de soupirer longuement. « Euh… Tu peux m’appeler Crocus, si ça t’amuse. Mais c’est plutôt à moi de poser la question, toi, t’es qui ? ». La colère commença à se dissiper, remplacée par l’incohérence qui régnait en maître sur les lieux. « Et t’es quoi, en fait ? Le prend pas mal mais euh… Bon t’as pas l’air humaine, t'as des oreilles d'Elfe mais une queue et t’as pas l’air hybride non plus, sinon crois-moi que j’serais pas si clément avec toi. ». A vrai dire, elle commençait presque à lui faire de la peine à se comporter ainsi. À croire qu’il était un monstre prêt à la dévorer… Elle n’était pas loin de la vérité, mais Crocus ne tuait jamais sans une bonne raison et pour l’heure, il n’en avait pas.
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Un nom à coucher dehors
Février 04
- Enfers ? " Je roule la tête sur le côté, ne faisant absolument rien pour m'arracher au regard du raton qui, debout m'arrive sans doute à peine à la poitrine. Je n'avais pas conscience que mon odeur était différente pour chaque être vivant, faite pour rappeler un souvenir heureux, un parfum particulièrement plaisant. Je n'avais pas non plus conscience que ma couleur avait de quoi choquer. Après tout des humains cornus à la peau bariolée, j'en avait vu plus d'un et ils étaient tous bien plus grands et plus impressionnants que moi.
Je me laisse faire, le regardant s'approcher à son rythme, humer et se questionner. Une suspicion toute humaine darde au fond de ses yeux sombres. C'est amusant de lire des émotions aussi franches et tranchées. Il ne vit pas dans le marasme de la plupart des humains. Son cœur bondit et rugit, grondant d'un instinct délectable qui m'attendrit et me donne envie de jouer avec lui pour le faire penser à autre chose.
- Crocus... " Je roule sur le ventre et replie les jambes comme une adolescente sur son lit, le regardant à présent à l'endroit. Mes petites cornes cristallines scintillent sous la lumière de la lampe. Crocus le Raton Armé. Il est un peu à l'opposé de Colibri Blanc si fragile avec son énorme arme bien trop grande pour un être fait de légèreté et de lumière. Il est petit, plein de crocs, de griffes et de curiosité. Raton Armé. Ça lui va bien. Je souris, satisfaite de trouver ce joli nom en adéquation avec sa nature. Crocus... Aryan. Lyu. Halewyn. Lunar. Crocus.
Finalement... Quand ils sont pas méchant, j'aime bien parler avec des humains. Ils sont intéressants. Mon Grand Duc serait content... Peut-être. Maintenant que je comprends mieux je n'en suis pas tout à fait sûre, mais ce n'est pas le moment d'y penser. L'incompréhension de Raton est si forte qu'elle magnétise mon regard dans le sien.
- Je suis Rouma, Mignone, Rose, Cornue, Lilith, Louve, Succube, Asmodée. Je suis qui tu veux. Nomme-Moi. " Je souris encore plus, ma queue ondulant en rythme lent et satisfait. Mon regard scintille d'un jeu malicieux, contente de cette comptine que je possède mais qui ne me possède plus. " Ce que je suis...
Je suis l'ombre voilée, de peur de te haïr,
Le chemin embrumé qui mène à ton plaisir.
Je motive tes pas ou élève tes peurs.
Je suis le creux au ventre et la faim en ton cœur.
Libère-toi, je m'éteins.
Etreins-moi, je te mange.
Pulsions et émotions me font un lit étrange.
Bien heureux celui qui de moi se nourri
Bien fade devient la vie pour celui qui m'oublie.
Sauras-tu qui je suis ?
Tendant la main je tente de m'emparer de la sienne pour entremêler mes doigts avec ses griffes, m'amusant de leur flexion et du contact de la fourrure douce sur son revers.
CENDRES
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Inspirer… Expirer…
Rien à faire, cela ne fonctionnait pas. Devant son inaptitude à retrouver son calme en face de l’inconnue qui le toisait avidement, le raton ne savait plus sur quelle patte danser. L’envie de mettre un terme définitif à leur échange le titillait, après tout, elle venait malgré elle d’interrompre un sommeil doux et reposant, un des rares moments de quiétude dont il disposait. Un des seuls instants où il ne se détestait pas des poils de ses oreilles jusqu’au bout de ses griffes. À chaque réveil, il oubliait cette douce sensation, ce sentiment grisant de ne pas vouloir… partir, loin, très loin. Le regard de l’hybride quitta un instant celui de son interlocutrice pour se diriger vers le miroir qui trônait au fond de la pièce, observant autant son propre reflet que la queue de la demoiselle qui dansait inlassablement devant lui. Sa truffe se mit à remuer à nouveau, une fragrance surprenante faisant son chemin jusqu’à ses narines, le prenant de court. Dans un petit sursaut, les souvenirs se mirent à affluer dans son cerveau fatigué. Sa mère, encore et toujours, épicentre de son univers. Le jour où ils étaient partis, après que le raton ait enfin eu le courage d’assassiner son père. Ses petits roucoulements, l’odeur du… du… du fer, âcre, immonde. L’odeur du sang. Les yeux écarquillés, revenant soudainement à la réalité, Crocus secoua la tête.
Était-ce la nuit qui rendait cet échange si poétique ou la simple présence de l’inconnue qui voulait le faire tourner en rond, lui provoquer une crise d’urticaire à force de réfléchir ? L’hybride ne se posait que très rarement, il ne prenait jamais le temps. Alors dans cette nuit froide, au beau milieu de Liberty, sa colère s’apaisa momentanément, laissant place à l’incompréhension, la peur et la curiosité. « Je ne sais pas qui tu es, petite chose. ». Elle lui rappelait sa mère. Cette candeur, cette pureté. Ce regard avide de connaissances. Il ignorait son identité, mais il savait une chose : elle était perdue. Pourquoi se serait-elle aventurée dans sa chambre, si ce n’était pas le cas ? Personne n’aurait pu faire croire à Crocus qu’elle le cherchait. Personne ne le cherchait. Éternel solitaire au cœur tendre face aux faiblesses les plus simples, il n’osait plus bouger une patte, paralysé devant l’inconnue qui lui paraissait si fragile, tant qu’il craignait de la toucher de peur qu’elle ne se brise. « Tu as forcément un nom. ». Avec douleur, il en vint à se souvenir qu’il avait dû lui-même se trouver le sien. Le sobriquet donné par son géniteur lui donnait envie de vomir, quant à sa mère, elle ne parlait tout simplement pas la même langue. Face à sa devinette, il fronça les sourcils. « Écoute je… j’ai pas de temps à perdre à jouer à ce genre de choses. T’as pas l’air dangereuse, et j’ai, étrangement, pas envie de te faire du mal. Pour l’instant. ». Son regard vint errer sur ses cornes qu’il approcha du bout de la griffe, les faisant tinter d’un contact léger, comme s’il désirait s’assurer encore une fois qu’il ne rêvait pas. « Putain mais pourquoi ça tombe toujours sur moi ce genre de conneries… Tu partiras pas tant que j’aurais pas répondu, c’est ça ? ».
Prenant sa main dans sa patte sans plus négocier, il vint s’installer assis sur le lit à ses côtés, posant sa gueule dans sa main, dans une intense réflexion. Fort heureusement pour lui, ce genre de devinettes, ce n’était pas la première fois qu’il en croisait. Nombreux étaient ceux qui se pensaient intelligents en bloquant l’accès à leur coffre-fort par des petites poésies dans le même genre. Les riches pompeux qui se pensaient meilleurs que les autres, parce que « moooii je suis pas comme les autres heeennh j’écris des belles phrases qui veulent rien diiiireeee ». Oh que ça le gonflait. Grognant doucement pour exprimer son mécontentement, se grattant la tête de sa main libre sans réaliser qu’il n’avait toujours pas lâché celle de la petite rose qui l’accompagnait, il resta à râler pendant bien une minute, se triturant le cerveau. Il s’agissait forcément d’un concept, la comptine s’orientait à la fois vers l’abstrait comme vers le concret. Une purge pour cette tête de raton-laveur encore endormie et grincheuse, une bénédiction pour son mental qui manquait cruellement de stimulation.
« Faudra quand même que tu reconsidères le plan de rentrer chez des inconnus pour leur taper la discute et leur filer une énigme. Tu réalises pas à quel point c’est dangereux tes conneries, tu pourrais te faire buter. ». L’hôpital qui se fout de la charité. Tapant des pieds sur le plancher sous l’impatience qui le gagnait, sous la frustration de ne pas trouver la réponse qui le narguait, Crocus ferma les yeux, comme si se retrouver dans le noir allait l’aider. « De toute façon je suis probablement déjà mort alors tu pourras pas me faire grand-chose, que je trouve ou pas. J’espère seulement que l’enfer, c’est autre chose que répondre à des questions pourries toute la journée. Du coup, ton nom… ». L’odeur du sang, encore. Elle était proche, trop proche. Son cœur se mit à tambouriner encore plus fort contre sa cage thoracique. Il avait peur. Il était terrorisé. Elle était… elle était… Tout ce qu’il ne ressentait plus. Tout ce qu’il n’avait jamais ressenti. Tout ce qui lui manquait, au plus profond de son être.
Rien à faire, cela ne fonctionnait pas. Devant son inaptitude à retrouver son calme en face de l’inconnue qui le toisait avidement, le raton ne savait plus sur quelle patte danser. L’envie de mettre un terme définitif à leur échange le titillait, après tout, elle venait malgré elle d’interrompre un sommeil doux et reposant, un des rares moments de quiétude dont il disposait. Un des seuls instants où il ne se détestait pas des poils de ses oreilles jusqu’au bout de ses griffes. À chaque réveil, il oubliait cette douce sensation, ce sentiment grisant de ne pas vouloir… partir, loin, très loin. Le regard de l’hybride quitta un instant celui de son interlocutrice pour se diriger vers le miroir qui trônait au fond de la pièce, observant autant son propre reflet que la queue de la demoiselle qui dansait inlassablement devant lui. Sa truffe se mit à remuer à nouveau, une fragrance surprenante faisant son chemin jusqu’à ses narines, le prenant de court. Dans un petit sursaut, les souvenirs se mirent à affluer dans son cerveau fatigué. Sa mère, encore et toujours, épicentre de son univers. Le jour où ils étaient partis, après que le raton ait enfin eu le courage d’assassiner son père. Ses petits roucoulements, l’odeur du… du… du fer, âcre, immonde. L’odeur du sang. Les yeux écarquillés, revenant soudainement à la réalité, Crocus secoua la tête.
Était-ce la nuit qui rendait cet échange si poétique ou la simple présence de l’inconnue qui voulait le faire tourner en rond, lui provoquer une crise d’urticaire à force de réfléchir ? L’hybride ne se posait que très rarement, il ne prenait jamais le temps. Alors dans cette nuit froide, au beau milieu de Liberty, sa colère s’apaisa momentanément, laissant place à l’incompréhension, la peur et la curiosité. « Je ne sais pas qui tu es, petite chose. ». Elle lui rappelait sa mère. Cette candeur, cette pureté. Ce regard avide de connaissances. Il ignorait son identité, mais il savait une chose : elle était perdue. Pourquoi se serait-elle aventurée dans sa chambre, si ce n’était pas le cas ? Personne n’aurait pu faire croire à Crocus qu’elle le cherchait. Personne ne le cherchait. Éternel solitaire au cœur tendre face aux faiblesses les plus simples, il n’osait plus bouger une patte, paralysé devant l’inconnue qui lui paraissait si fragile, tant qu’il craignait de la toucher de peur qu’elle ne se brise. « Tu as forcément un nom. ». Avec douleur, il en vint à se souvenir qu’il avait dû lui-même se trouver le sien. Le sobriquet donné par son géniteur lui donnait envie de vomir, quant à sa mère, elle ne parlait tout simplement pas la même langue. Face à sa devinette, il fronça les sourcils. « Écoute je… j’ai pas de temps à perdre à jouer à ce genre de choses. T’as pas l’air dangereuse, et j’ai, étrangement, pas envie de te faire du mal. Pour l’instant. ». Son regard vint errer sur ses cornes qu’il approcha du bout de la griffe, les faisant tinter d’un contact léger, comme s’il désirait s’assurer encore une fois qu’il ne rêvait pas. « Putain mais pourquoi ça tombe toujours sur moi ce genre de conneries… Tu partiras pas tant que j’aurais pas répondu, c’est ça ? ».
Prenant sa main dans sa patte sans plus négocier, il vint s’installer assis sur le lit à ses côtés, posant sa gueule dans sa main, dans une intense réflexion. Fort heureusement pour lui, ce genre de devinettes, ce n’était pas la première fois qu’il en croisait. Nombreux étaient ceux qui se pensaient intelligents en bloquant l’accès à leur coffre-fort par des petites poésies dans le même genre. Les riches pompeux qui se pensaient meilleurs que les autres, parce que « moooii je suis pas comme les autres heeennh j’écris des belles phrases qui veulent rien diiiireeee ». Oh que ça le gonflait. Grognant doucement pour exprimer son mécontentement, se grattant la tête de sa main libre sans réaliser qu’il n’avait toujours pas lâché celle de la petite rose qui l’accompagnait, il resta à râler pendant bien une minute, se triturant le cerveau. Il s’agissait forcément d’un concept, la comptine s’orientait à la fois vers l’abstrait comme vers le concret. Une purge pour cette tête de raton-laveur encore endormie et grincheuse, une bénédiction pour son mental qui manquait cruellement de stimulation.
« Faudra quand même que tu reconsidères le plan de rentrer chez des inconnus pour leur taper la discute et leur filer une énigme. Tu réalises pas à quel point c’est dangereux tes conneries, tu pourrais te faire buter. ». L’hôpital qui se fout de la charité. Tapant des pieds sur le plancher sous l’impatience qui le gagnait, sous la frustration de ne pas trouver la réponse qui le narguait, Crocus ferma les yeux, comme si se retrouver dans le noir allait l’aider. « De toute façon je suis probablement déjà mort alors tu pourras pas me faire grand-chose, que je trouve ou pas. J’espère seulement que l’enfer, c’est autre chose que répondre à des questions pourries toute la journée. Du coup, ton nom… ». L’odeur du sang, encore. Elle était proche, trop proche. Son cœur se mit à tambouriner encore plus fort contre sa cage thoracique. Il avait peur. Il était terrorisé. Elle était… elle était… Tout ce qu’il ne ressentait plus. Tout ce qu’il n’avait jamais ressenti. Tout ce qui lui manquait, au plus profond de son être.
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Un nom à coucher dehors
Février 04
- Je ne sais pas qui tu es, petite chose.
- Tu n'as pas à savoir. Tu peux dire et je serai.
C'était si simple. Pourquoi ne me nomme-t-il pas ? Les humains ont un tel scrupule avec les noms, comme s'ils craignaient de me blesser, de me marquer à vie. Comme si le nom dont ils me faisaient cadeau risquait de me ronger de l'intérieur jusqu'à remplacer ce que je suis. Comme si nommer revenait à donner une forme qui ne dépendait que d'eux et à y abandonner une étincelle de leur propre cœur dans le processus. Pour l'étincelle, je ne peux leur en vouloir, mais je ne comprends toujours pas pourquoi ils ont si peur d'un aussi beau cadeau que celui d'un nom.
Ses griffes s'approchent et tinte contre mes cornes de diamant, j'en tirant pas plus qu'un son plein, froid, mais laissant à leur surface d'une marque rosée, la lumière semblant s'être accumulée à son contact. Un frisson était remonté tout le long de mon dos et plusieurs secondes s'écoulèrent avant que la teinte ne disparaisse. Il sentait l'animal, le corps robuste, mais pas l'éther.
Et plus beau que tout, il ne veux pas me faire de mal ! Me redressant en tirant sur mon dos arqué, décollant la poitrine du sol en une posture souple qui rappelait celle d'un serpent, je rayonne littéralement. Mes yeux reptiliens luisent d'une lueur d'un rose soutenue que mon sourire fait scintiller de plus belle. Il ne veux pas me faire de mal et moi non plus je ne veux pas lui faire de mal. Pour Aryan, cela conditionnait l'amour et même si je savais maintenant que ce que les humains appelaient amour était bien plus complexe et mariable que ça, cette définition me tenait toujours à cœur. De toute façon, les humains galvaudaient ce mot à longueur de temps, nommant amour tant de choses qui n'en étaient pas. Si ces derniers temps, c'était ainsi que les humains définissaient l'amour alors soit.
- Je t'aime ! " m'exclamais-je avec conviction.
Il n'avait pas l'air très convaincu et lorsqu'il demanda si je partirais avant qu'il réponde, je secouais la tête. Il n'a pas pas l'air d'avoir envie que je parte, même s'il râle beaucoup et utilise des mots que Mort utilisait souvent. Des mots que les prêtres réprouvent et dont les hommes s'emplissent les sens jusqu'à s'alléger de leurs plus lourds fardeaux. Alors je le suis jusqu'au lit et lorsqu'il s'y assoit, je me pose sur le sol à ses pieds, main dans la main. Appuyée contre le montant, à un souffle de lui, j'observe les détails de ses griffes. Je glousse à l'image de ces grands riches drapés dans leurs fausses ruses, puis je lève la tête pour le regarder par en-dessous. Depuis mon entrée dans la pièce, j'ai déjà perdu quelques centimètres sans m'en rendre vraiment compte. Je suis bien plus amusée par le reflet de son dos, de sa queue qui marque la mesure pour les rouages qui sont dans sa tête. Ses réflexions deviennent si intense que ses oreilles se tendent un peu et son museau remue. Mais il est vif. A travers le touché de sa main, le fil de ses réflexions est simple et clair... Ce qui ne suffit pas à garder mon attention intacte plus de quelques secondes.
Je fredonne sans paroles une vieille comptine qui me revient aux lèvres, revenue de je ne sais trop où. Ma voix chaude, presque trop riche pour l'apparence ronde et douce que j'arbore. Juste pour passer le temps, suffisamment bas pour ne pas briser sa concentration. Je ne m'ennuie pas, mais je me sens suffisamment bien pour avoir envie de poser quelques notes.
- Je peux pas mourir. " lâchais-je sur le ton le plus banal qui soit à sa remarque en interrompant abruptement la mélodie. Je ne risque pas ce genre de chose en entrant dans la tanière des gens. Mais il avait raison, bien des gens pourraient me faire du mal. Beaucoup l'ont déjà fait. Et c'est vrai que depuis que je suis parti d'avec Lyu, les humains me semblent à la fois plus terrifiants et moins terrifiants. Mort m'a rappelé ce qu'ils ont de plus horribles. Lyu m'a fait de si beaux cadeaux malgré le ciel de pierre et les hommes armés de fer. Je déteste le fer.
L'air frissonne soudainement. Une onde d'une agréable chaleur glisse de ma main à la sienne lorsque deux douces syllabes coulent de sa gueule bestiale. Moi qui regardait un insecte voleté près de la lampe, je tourne lentement le visage vers lui, le laissant découvrir centimètre par centimètre, un sourire étrange qui adoucissait ses traits mais n'avait rien à voir avec l'air purement joyeux d'un peu plus tôt. Les pupilles qui se posent sur lui ne sont plus que deux fins traits verticaux desquels transpirent de distantes flammes violacées. Captivée par son regard, je capture le sien.
Un trou béant. Encore plus grand que celui de son Grand Duc. Encore plus alléchant. Un manque abyssal. Un rejet aussi vif et violent que ceux des repentants qui se fouettaient au sang dans les chambres de meurtrissure dont ne parlait jamais les prêtres. Mon sourire craquela la commissure de mes lèvres, la même lueur qui scintille dans mes yeux s'échappant des lézardes sur ma peau sans que je ne lâche sa main, fermement tenue dans la mienne. Si peur... Il a si peur de lui... De ce qu'il est... De regarder dans l'abyme.
Si peur que l'abyme ne le regarde en retour et ne l'attire sans retour.
- Mon nom sonne comme le clairon de guerre et le hurlement des soldats à l'agonie lorsqu'il nait sur ta langue... " constatais-je avec étonnement, dans un murmure complice, toute proche de son visage.
Ma main libre s'approche. Lorsque le contact se fait entre ma peau et sa joue, de la lanterne s'éteint, soufflée d'un seul coup.
Mes doigts se retirent de sa peau mise à nue, ma main se défait de la sienne. L'odeur de fer reste présente dans l'atmosphère alors que la lanterne se rallume d'elle-même, doucement, baignant la pièce de sa lumière rassurante. Une pièce identique à ceci près qu'elle semble plus petite à l'homme assit sur le lit. La créature rose est debout à quelques pas de lui, son joli minois de nouveau intact et son sourire joyeux parfaitement normal. Elle est debout à côté du miroir.
Ce miroir en pied dans lequel Raton se voit entièrement. Ce reflet qui lui montre un humain d'âge mûr. Le visage large, virile, mangé par une barbe de trois jours poivre et sels rappelant les tons bruns de ses courts cheveux taillés en brosse. Deux oreilles rondes, de chaque côté du crâne. Pas de queue. Quelques cicatrices que sa fourrure cachait habilement. Des quenottes droites, sans crocs. Des mains à cinq doigts, sans griffe. Ses yeux, par contre, ont bien le même éclat sombre.
CENDRES
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Le regard embrumé par la souffrance qui rythmait chacun de ses pas, embrouillant sa réflexion alors qu’il se tuait à trouver la réponse à cette devinette poétique, Crocus ne put retenir un léger sursaut en entendant les douces paroles de l’inconnue qui semblait sonder son âme de ses yeux de reptiles. Un rire nerveux s’échappa de sa gueule entre-ouverte, entre l’incrédulité et le surréalisme de la situation qui le surpassait complètement. Je t’aime, trois mots qu’il n’avait tout bonnement jamais entendu. Oh il savait reconnaître la tendresse entre les pattes chaleureuses de sa mère qui le choyait affectueusement lorsque la solitude se faisait trop présente. Rien ne pouvait défaire l’instinct maternel, l’instinct animal qui s’emparait de son minuscule corps de raton-laveur. Mais au-delà de cette unique personne qui partageait sa vie, l’hybride ne connaissait ni amitié ni amour. Sa vie se résumait à sauter de contrats en contrats, s’infiltrant dans les bicoques des plus fortunés de chaque pays pour y dérober leur bien le plus précieux. Et s’il venait à s’associer à autrui, cela ne durait jamais bien longtemps. Il avait fermé son coeur à ce type d’émotions il y a bien longtemps, n’y laissant qu’une colère noire, qu’une rage insatiable qui détruisait tout sur son passage. Dans un sens, il était heureux de ne pouvoir communiquer avec sa génitrice. Sans doute que si elle avait compris la moitié de ce qu’il déblatérait, elle l’aurait abandonné.
« Tu ne m’aimes pas, petite chose. Et si tu venais à m’aimer, ce serait une grossière erreur. ». Que ferait-il de cette affection, de ses mains qui parcouraient son pelage avec curiosité ? Crocus ne savait guère construire, il ne savait que briser. Si le petit bonbon qui le toisait finissait par s’accrocher à lui, elle souffrirait inévitablement. Il la blesserait encore et encore, jusqu’à ce que la douleur devienne insoutenable. Le coeur meurtri, l’âme en peine, il resserra sa prise sur les poils de sa tête, tirant doucement dessus pour en extirper la réponse qui lui brûlait les babines tandis que le petit air que chantonnait l’inconnue s’immisçait dans son esprit. « Tout le monde peut mourir. ». Il haussa les épaules, comme si son propre constat le surprenait. « Tout le monde doit mourir. ». Les hybrides qui jonchaient le Sekai en premier, un par un, jusqu’à ce que le dernier d’entre eux le supplie de l’épargner. Puis il prendrait sa propre vie quand sa mère s’en irait, le laissant sans but, sans objectif, sans raison de vivre. Sa destinée était toute tracée depuis sa maudite naissance et le raton la suivait sans rechigner, le museau baissé, ne profitant que de rares moments d’accalmie dans la tempête qui malmenait son cerveau. « Tu n’aurais pas dû venir ici. ».
Ce qui sonnait comme une menace dans sa gueule en d’autres circonstances se trouvait être un simple avertissement, une porte ouverte si elle voulait se défaire de sa présence nauséabonde. Il était encore temps de faire machine arrière, de le faire retomber dans les bras de Morphée qui l’attendait avec impatience, de retourner dans le monde des songes qui réclamait sa présence. Et pourtant, quand la résolution franchit enfin ses lèvres, il fut le premier à vouloir prendre ses jambes à son cou. Pétrifié devant cette présence, ce sourire carnassier qui s’illuminait, perforant les pores de sa peau alors qu’elle le tenait fermement contre elle, Crocus tremblait de plus en plus. Il ne craignait pas la mort, encore moins le courroux de la petite chose qui avait interrompu sa nuit. Non, il avait peur de ce qu’elle incarnait. De ce sentiment dévorant qu’il ne ressentait plus, qu’il s’interdisait formellement. « L… laisse-moi tranquille. S’il te plaît. ». Son coeur frappait de plus en plus fort contre sa poitrine, au point qu’il l’entendait résonner à l’intérieur de son crâne, ses yeux noirs s’écarquillant devant cette apparition surnaturelle qui lui glaçait le sang. Quand l’obscurité fut, son souffle se coupa instantanément. Allait-il mourir ainsi ? Il n’aurait pas même le temps de dire au revoir à sa mère. Qu’allait-elle faire ? Se demanderait-elle pourquoi son fils ne revient pas ? Se sentirait-elle abandonnée à son triste sort ? Où l’oublierait-elle, comme chacune de ses rencontres, comme tous ceux qui posaient les yeux sur sa frimousse de peluche ambulante ? Une grimace s’empara de son visage animal et il serra les poings, priant tel l’athé qu’il était à un dieu imaginaire. « Pas comme ça... ».
Paralysé par la peur, il put déceler la lumière qui revenait lentement dans la pièce à travers ses paupières closes. Peut-être… Peut-être qu’il avait bel et bien rêvé. Que tout ceci n’était jamais arrivé. Il allait pouvoir rentrer chez lui. La voir. La serrer dans ses bras. L’entendre roucouler dans son étreinte. Tout était bien qui finit bien. Poussant un long soupir, apaisant sa respiration haletante, il s’autorisa enfin à ouvrir les yeux. Toujours dans sa chambre. Toujours auprès de la petite chose, qui se tenait droite à côté du miroir en pied. Ainsi, le cauchemar ne touchait pas encore à sa fin. Il devrait supporter ce calvaire encore quelques instants. « Bon écoute, c’était… quelque chose… de te rencontrer mais… Je dois vraiment dormir. J’entends des voix, c’est pas bon signe. ». Se redressant sur ses pieds nus, s’étirant longuement en faisant craquer les os de sa colonne vertébrale, il s’apprêtait à rassembler ses affaires quand son propre reflet vint le saisir. Terrifiant. Ses doigts tremblants vinrent se poser sur son visage, sentant sa peau parcourue de poils drus, son épiderme chaud recouvert de cicatrices, sa chevelure chocolat ébouriffée. Sans dire un mot, ses jambes cessèrent de le porter et il tomba à genoux sur le plancher dur et froid, sa respiration s’accélérant de plus belle, la crise d’angoisse le guettant comme un prédateur devant sa proie affaiblie. « Qu’est-ce que... ». Il ne connaissait pas la reconnaissance. « Qu’est-ce que tu... ». Ni la gentillesse. « Pourquoi... ». Encore moins le désir. « C’est... ». Juste la colère.
Sans lui laisser le temps de réagir, il lui attrapa la gorge pour la claquer contre le mur, ses yeux noirs injectés de rage, faisant tomber le miroir qui se brisa en plusieurs morceaux gisant sur le sol. Ses doigts se serrèrent autour de son cou et sa voix se fit de plus en plus forte. Il la détestait. Il la haïssait. Si seulement elle pouvait… Si elle pouvait...
« POURQUOI ? COMMENT ? JE NE SUIS PAS HUMAIN, ESPÈCE D’ABRUTIE. JE T’AVAIS DIT DE TE CASSER ! CA T'AMUSE ? TU PENSES QUE C'EST UN JEU ? »
Tel un animal sauvage acculé, pris au piège dans son propre jeu, Crocus se déchaînait contre l’incarnation du désir qui le malmenait. Toutes ses émotions se mélangeaient, ses pensées créant un véritable capharnaüm dans son esprit malade, et quand il croisa son propre regard dans un des bouts de glace à ses pieds, il lâcha prise et s’effondra à nouveau, sa nouvelle peau déjà ensanglantée par les bouts de verre qui s’y incrustaient sous son poids. « C’est tout ce que je mérite, pas vrai ?... ». De connaître enfin l’espoir, juste pour qu’il soit brisé la seconde d’après. « Qui t’envoie ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant... ». Un sanglot s’échappa de son corps recroquevillé dans son cocon de souffrance qui lui siait à merveilles. « Pourquoi ?... ».
« Tu ne m’aimes pas, petite chose. Et si tu venais à m’aimer, ce serait une grossière erreur. ». Que ferait-il de cette affection, de ses mains qui parcouraient son pelage avec curiosité ? Crocus ne savait guère construire, il ne savait que briser. Si le petit bonbon qui le toisait finissait par s’accrocher à lui, elle souffrirait inévitablement. Il la blesserait encore et encore, jusqu’à ce que la douleur devienne insoutenable. Le coeur meurtri, l’âme en peine, il resserra sa prise sur les poils de sa tête, tirant doucement dessus pour en extirper la réponse qui lui brûlait les babines tandis que le petit air que chantonnait l’inconnue s’immisçait dans son esprit. « Tout le monde peut mourir. ». Il haussa les épaules, comme si son propre constat le surprenait. « Tout le monde doit mourir. ». Les hybrides qui jonchaient le Sekai en premier, un par un, jusqu’à ce que le dernier d’entre eux le supplie de l’épargner. Puis il prendrait sa propre vie quand sa mère s’en irait, le laissant sans but, sans objectif, sans raison de vivre. Sa destinée était toute tracée depuis sa maudite naissance et le raton la suivait sans rechigner, le museau baissé, ne profitant que de rares moments d’accalmie dans la tempête qui malmenait son cerveau. « Tu n’aurais pas dû venir ici. ».
Ce qui sonnait comme une menace dans sa gueule en d’autres circonstances se trouvait être un simple avertissement, une porte ouverte si elle voulait se défaire de sa présence nauséabonde. Il était encore temps de faire machine arrière, de le faire retomber dans les bras de Morphée qui l’attendait avec impatience, de retourner dans le monde des songes qui réclamait sa présence. Et pourtant, quand la résolution franchit enfin ses lèvres, il fut le premier à vouloir prendre ses jambes à son cou. Pétrifié devant cette présence, ce sourire carnassier qui s’illuminait, perforant les pores de sa peau alors qu’elle le tenait fermement contre elle, Crocus tremblait de plus en plus. Il ne craignait pas la mort, encore moins le courroux de la petite chose qui avait interrompu sa nuit. Non, il avait peur de ce qu’elle incarnait. De ce sentiment dévorant qu’il ne ressentait plus, qu’il s’interdisait formellement. « L… laisse-moi tranquille. S’il te plaît. ». Son coeur frappait de plus en plus fort contre sa poitrine, au point qu’il l’entendait résonner à l’intérieur de son crâne, ses yeux noirs s’écarquillant devant cette apparition surnaturelle qui lui glaçait le sang. Quand l’obscurité fut, son souffle se coupa instantanément. Allait-il mourir ainsi ? Il n’aurait pas même le temps de dire au revoir à sa mère. Qu’allait-elle faire ? Se demanderait-elle pourquoi son fils ne revient pas ? Se sentirait-elle abandonnée à son triste sort ? Où l’oublierait-elle, comme chacune de ses rencontres, comme tous ceux qui posaient les yeux sur sa frimousse de peluche ambulante ? Une grimace s’empara de son visage animal et il serra les poings, priant tel l’athé qu’il était à un dieu imaginaire. « Pas comme ça... ».
Paralysé par la peur, il put déceler la lumière qui revenait lentement dans la pièce à travers ses paupières closes. Peut-être… Peut-être qu’il avait bel et bien rêvé. Que tout ceci n’était jamais arrivé. Il allait pouvoir rentrer chez lui. La voir. La serrer dans ses bras. L’entendre roucouler dans son étreinte. Tout était bien qui finit bien. Poussant un long soupir, apaisant sa respiration haletante, il s’autorisa enfin à ouvrir les yeux. Toujours dans sa chambre. Toujours auprès de la petite chose, qui se tenait droite à côté du miroir en pied. Ainsi, le cauchemar ne touchait pas encore à sa fin. Il devrait supporter ce calvaire encore quelques instants. « Bon écoute, c’était… quelque chose… de te rencontrer mais… Je dois vraiment dormir. J’entends des voix, c’est pas bon signe. ». Se redressant sur ses pieds nus, s’étirant longuement en faisant craquer les os de sa colonne vertébrale, il s’apprêtait à rassembler ses affaires quand son propre reflet vint le saisir. Terrifiant. Ses doigts tremblants vinrent se poser sur son visage, sentant sa peau parcourue de poils drus, son épiderme chaud recouvert de cicatrices, sa chevelure chocolat ébouriffée. Sans dire un mot, ses jambes cessèrent de le porter et il tomba à genoux sur le plancher dur et froid, sa respiration s’accélérant de plus belle, la crise d’angoisse le guettant comme un prédateur devant sa proie affaiblie. « Qu’est-ce que... ». Il ne connaissait pas la reconnaissance. « Qu’est-ce que tu... ». Ni la gentillesse. « Pourquoi... ». Encore moins le désir. « C’est... ». Juste la colère.
« QU’EST-CE QUE TU M’AS FAIT ?! »
Sans lui laisser le temps de réagir, il lui attrapa la gorge pour la claquer contre le mur, ses yeux noirs injectés de rage, faisant tomber le miroir qui se brisa en plusieurs morceaux gisant sur le sol. Ses doigts se serrèrent autour de son cou et sa voix se fit de plus en plus forte. Il la détestait. Il la haïssait. Si seulement elle pouvait… Si elle pouvait...
« POURQUOI ? COMMENT ? JE NE SUIS PAS HUMAIN, ESPÈCE D’ABRUTIE. JE T’AVAIS DIT DE TE CASSER ! CA T'AMUSE ? TU PENSES QUE C'EST UN JEU ? »
Tel un animal sauvage acculé, pris au piège dans son propre jeu, Crocus se déchaînait contre l’incarnation du désir qui le malmenait. Toutes ses émotions se mélangeaient, ses pensées créant un véritable capharnaüm dans son esprit malade, et quand il croisa son propre regard dans un des bouts de glace à ses pieds, il lâcha prise et s’effondra à nouveau, sa nouvelle peau déjà ensanglantée par les bouts de verre qui s’y incrustaient sous son poids. « C’est tout ce que je mérite, pas vrai ?... ». De connaître enfin l’espoir, juste pour qu’il soit brisé la seconde d’après. « Qui t’envoie ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant... ». Un sanglot s’échappa de son corps recroquevillé dans son cocon de souffrance qui lui siait à merveilles. « Pourquoi ?... ».
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Un nom à coucher dehors
Février 04
Mon cœur se serre. Ma peau se hérisse.
Une vague titanesque d'émotions brutes couronnées d'un rejet et d'une incompréhension totale me prennent à la gorge un battement de cil avant qu'une main puissante ne m'écrase la trachée. Je tente de glapir en me sentant coller contre le mur, la respiration coupée net mais surtout le cou encore plus douloureux que lorsque Mort m'avait passé le collier ! Non !! Je ne veux pas ! Il va... Il va... !!
Dans un geste de panique, la vision troublée et les yeux exorbités, j'attrape ses poignets, sans le moindre effet. Les oreilles collées contre le crâne, une expression de pure terreur sur mon visage, je m'appuie d'un pied contre le mur, sorte de réflexe chaotique pour me dégager. Aucune force. Les griffes qui terminent mes mains labourent le revers de la main de Raton en petits coups rapides et inconscients, sans qu'il ne me lâche. Le fait de ne pas pouvoir respirer n'est pas gênant en soit, mais la poigne ! Cette poigne ! Et il hurle, la terreur m'emplissant un peu plus à chaque syllabe.
Des coups retentissent contre le mur. Un voisin mécontent est réveillé. Par les cris ou par le bruit du miroir ? Difficile à dire. Je me recroqueville en moi-même, incapable de soutenir le visage écumant de rage. Mon corps gondole, flasque puis fluide sous les doigts qui s'enfoncent dans ma chair dépourvue de forme. Une matière rose qui ondule et se ratatine pour prendre la forme d'un serpent aux écailles blanches quadrillées de violet. Mes écailles lisses glissent entre ses doigts et je tombe au sol, massif, sur les morceaux de verre tranchants qui entament ma peau par endroit, me faisant lâcher un sifflement sec alors que je m'enroule sur moi-même pour ne former qu'une boule d'anneaux reptiliens, la tête cachée à l'intérieur.
ça faisait mal !!! Tellement mal !!! Qu ça s'arrête !!! Qu'il arrête !!! Par pitié !!!
Instinctivement, ma magie continue à nourrir le sort qui l'entoure pour tirer toujours plus de substance de ce gouffre qui le taraude. Les serpents ne peuvent trembler, que ce soit de peur ou de froid, mais je presse mon corps en une boule si compagne que je manque de m'étouffer moi-même. Je n'entend plus rien. je ne vois plus rien. Je ne sens que ma propre existence... Et ces émotions qui me vrillent de part en part. Dans la langue des reptiles, j'appelle pitoyablement Aryan et Halewyn. J'implore pour que quelqu'un me vienne en aide, sans résultat.
Le typhon tombe en mousson avant que mon cœur ne lâche. Une seule. massive. Les nerfs qui craquent et laissent couler toute l'incompréhension d'un cœur brisé. Pendant un moment, ses sanglots sont le seul bruit qui résonne dans la pièce. Les serpents ne pleurent pas. Ils ne hurlent pas. Ils ne griffent pas. Mais mon cœur, lui, déverse des flots de larmes, encore sonnée des vents contraires. Anesthésié par un calvaire brutal et fou. Je suis dévastée sans même savoir pourquoi. Sans comprendre vraiment pourquoi il se met dans un état pareil. Il le voulait. Je l'ai fait. J'en ai assez ! Pourquoi tous les humains sont ainsi faits ?! Pourquoi aucun n'est heureux d'avoir ce qu'il veut ?!! Pourquoi tous ont peur de ce qu'ils sont au fond et se haïssent plus que n'importe quelle autre créature ?!!!
Je veux partir. Retrouver ma forêt. Retrouver Serpent et les nuées de corbeaux. Retrouver les nuits de lune paisible et les chants qu'aimaient tant les loups. Tant pis pour le passer. Tant pis pour la Faim. Tant pis pour mes souvenirs, ils ne mènent à rien. Rien d'autre que cette atroce douleur, ce danger sans cesse renouveler. J'oublie la douceur de Colibri, la Protection d'Aryan, la candeur de Lyu, la chaleur de Panthère. Plus rien ne vient contrebalancer ce coup de sang alors que mes nerfs cris de la terreur d'être moi-même.
Je ne suis pas cette chose nouvelle parée de pouvoirs ! Pourquoi m'y obstiner ?!! ça n'a pas de sens ! Pas de sens !!
Doucement, le cœur battant à tout rompre et une tâche tuméfiée juste sous la tête, le serpent que je suis se déroule pour glisser silencieusement entre les débris de verres, droit vers la fenêtre.
CENDRES
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Crocus pleurait. Inlassablement, aussi fort que son nouveau corps lui permettait, il sanglotait à grosses larmes sans se préoccuper des plaintes des autres voyageurs qui désiraient retrouver Morphée. Il ne les entendait plus, rendu sourd par l'ultrason qui lui brisait les tympans, transperçant ses oreilles qu'il tenait entre ses doigts infiniment plus courts que ses griffes de raton-laveur. Le cœur meurtri, l'hybride pensait ne jamais retrouver le semblant de paix qui lui permettait de se lever chaque jour. Comment pouvait-il en être autrement ? Il ne pouvait pas rentrer auprès de sa mère dans cet état. Elle le regarderait, ses yeux noirs remplis d'incompréhension. Il l'imaginait déjà le fuir en roucoulant, craignant cette forme humanoïde qui ne demandait qu'à s'emparer d'elle pour en faire une écharpe. Il allait la terroriser, briser son âme déjà si fragile. Et dans ces instants de souffrance intense, il ne pensait pas même à lui. À ce que sa vie deviendrait, à ce qu'il ferait. À quoi bon y penser, lui qui n'avait jamais voulu autre chose que la douce délivrance de la mort ? S'il ne détestait plus, alors il n'était plus rien. Sa haine et sa rage constituaient son identité, aussi atroce soit-elle.
Aussi fragile qu'une fleur, il se flagellait de plus belle, hurlant à la mort qu'on lui vienne en aide. Se pinçant régulièrement, priant pour sortir de ce cauchemar ignoble, il se retrouvait impuissant face aux pouvoirs de cette inconnue qui s'était faufilée dans sa chambre. Pourquoi lut, pourquoi ici, pourquoi aujourd'hui ? Tant de questions qui resteraient sans réponse, sa gorge serrée par ses pleurs qui s'intensifiaient, incapable d'articuler le moindre mot pour exprimer sa peine autrement. Mais plus que la rage, plus que la tristesse, plus que les pensées qui malmenaient son corps et son esprit, Crocus ne voulait pas être seul. Rouvrant les yeux après avoir retiré ses mains de ses paupières rougies et cernées par la fatigue, il se mit à chercher frénétiquement la présence de la petite chose qu'il avait étranglé quelques instants auparavant. Incapable de se souvenir de sa liquéfaction, aussi surnaturelle était-elle, l’humain se sentait démuni face à ses émotions qui prenaient le pas sur sa raison, sur ses capacités logiques, son seul refuge contre ce monde qui le tourmentait.
Sa voix s’éleva à nouveau, tremblante, chaude. « Pe… Petite chose ?... ». S’il connaissait son nom, il préférait ne pas en faire l’usage. Puis le déroulé des événements lui revint en tête comme un flash. L’obscurité. La lumière. Ce reflet dans ce miroir qui le dévisageait. Le sourire innocent de la demoiselle. Ses doigts qui se posaient sur sa gorge et qui serraient. Cette haine qui le parcourait, faisant vibrer chaque pore de sa peau. Et à présent la panique. « Je… je suis désolé. Je ne voulais pas… Je ne voulais pas te faire de mal. Je te l’ai dit et pourtant… Putain... ». Avait-il menti ? Il ne le savait pas lui-même. Il ne savait plus. Complètement perdu, Crocus se redressa sur ses jambes pour retrouver la forme serpentine de la magicienne, la mélancolie marquant ses traits murs et ses rides naissantes. Si sa forme raton lui permettait d’apparaître assez jeune, sa forme humaine ne lui octroyait pas ce plaisir. La fatigue se lisait sur son visage déformé par la haine, marqué par la souffrance.
Dans sa vision brouillée de larmes, il l’aperçut enfin, se faufilant dans les bouts de verre en s’y écorchant au passage, fuyant vers la fenêtre. Durant une fraction de seconde, il sembla hésiter à la rattraper, avalant sa salive sous l’appréhension qui le gagnait. Puis dans un mouvement brusque, trébuchant sur ses propres pieds, Crocus vint saisir le serpent au milieu de son corps, avec une tendresse dont il ne se pensait guère capable. « Je... ». Les excuses suffiraient-elles ? Il en doutait, mais il n’avait rien d’autre à offrir que ses mots, que sa voix tremblante et sa respiration haletante. « Je suis désolé petite chose. Tu... ». La réalisation le frappa enfin. Tout était sa faute, depuis le début. « Tu voulais seulement m’aider... ». Venant serrer le reptile contre son épiderme chaud, la recouvrant de la couette qui gisait sur le sol en s’y emmitouflant également, il lui créa un petit cocon de chaleur et de douceur. Caressant sa petite tête de serpent tendrement, il prit le temps d’inspirer et d’expirer longuement pour retrouver un semblant de calme. « Je te demande pardon d’avoir été si odieux, d’avoir été un monstre, d’avoir été…moi…. Et… Si tu ne veux pas me l’accorder, je te laisserais partir. ». Son départ le détruirait, mais elle n’était pas responsable de son malheur. Il n’oserait jamais lui faire porter ce poids, car il était seul, infiniment seul, jusqu’à la fin de ses jours. « J’ai été un abruti fini, je ne me suis pas contrôlé. Je... ». Il serra les dents, des larmes s’échappant à nouveau de ses yeux noirs. « Je t’avais dit que tu ne devais pas m’aimer, petite chose... ».
Aussi fragile qu'une fleur, il se flagellait de plus belle, hurlant à la mort qu'on lui vienne en aide. Se pinçant régulièrement, priant pour sortir de ce cauchemar ignoble, il se retrouvait impuissant face aux pouvoirs de cette inconnue qui s'était faufilée dans sa chambre. Pourquoi lut, pourquoi ici, pourquoi aujourd'hui ? Tant de questions qui resteraient sans réponse, sa gorge serrée par ses pleurs qui s'intensifiaient, incapable d'articuler le moindre mot pour exprimer sa peine autrement. Mais plus que la rage, plus que la tristesse, plus que les pensées qui malmenaient son corps et son esprit, Crocus ne voulait pas être seul. Rouvrant les yeux après avoir retiré ses mains de ses paupières rougies et cernées par la fatigue, il se mit à chercher frénétiquement la présence de la petite chose qu'il avait étranglé quelques instants auparavant. Incapable de se souvenir de sa liquéfaction, aussi surnaturelle était-elle, l’humain se sentait démuni face à ses émotions qui prenaient le pas sur sa raison, sur ses capacités logiques, son seul refuge contre ce monde qui le tourmentait.
Sa voix s’éleva à nouveau, tremblante, chaude. « Pe… Petite chose ?... ». S’il connaissait son nom, il préférait ne pas en faire l’usage. Puis le déroulé des événements lui revint en tête comme un flash. L’obscurité. La lumière. Ce reflet dans ce miroir qui le dévisageait. Le sourire innocent de la demoiselle. Ses doigts qui se posaient sur sa gorge et qui serraient. Cette haine qui le parcourait, faisant vibrer chaque pore de sa peau. Et à présent la panique. « Je… je suis désolé. Je ne voulais pas… Je ne voulais pas te faire de mal. Je te l’ai dit et pourtant… Putain... ». Avait-il menti ? Il ne le savait pas lui-même. Il ne savait plus. Complètement perdu, Crocus se redressa sur ses jambes pour retrouver la forme serpentine de la magicienne, la mélancolie marquant ses traits murs et ses rides naissantes. Si sa forme raton lui permettait d’apparaître assez jeune, sa forme humaine ne lui octroyait pas ce plaisir. La fatigue se lisait sur son visage déformé par la haine, marqué par la souffrance.
Dans sa vision brouillée de larmes, il l’aperçut enfin, se faufilant dans les bouts de verre en s’y écorchant au passage, fuyant vers la fenêtre. Durant une fraction de seconde, il sembla hésiter à la rattraper, avalant sa salive sous l’appréhension qui le gagnait. Puis dans un mouvement brusque, trébuchant sur ses propres pieds, Crocus vint saisir le serpent au milieu de son corps, avec une tendresse dont il ne se pensait guère capable. « Je... ». Les excuses suffiraient-elles ? Il en doutait, mais il n’avait rien d’autre à offrir que ses mots, que sa voix tremblante et sa respiration haletante. « Je suis désolé petite chose. Tu... ». La réalisation le frappa enfin. Tout était sa faute, depuis le début. « Tu voulais seulement m’aider... ». Venant serrer le reptile contre son épiderme chaud, la recouvrant de la couette qui gisait sur le sol en s’y emmitouflant également, il lui créa un petit cocon de chaleur et de douceur. Caressant sa petite tête de serpent tendrement, il prit le temps d’inspirer et d’expirer longuement pour retrouver un semblant de calme. « Je te demande pardon d’avoir été si odieux, d’avoir été un monstre, d’avoir été…moi…. Et… Si tu ne veux pas me l’accorder, je te laisserais partir. ». Son départ le détruirait, mais elle n’était pas responsable de son malheur. Il n’oserait jamais lui faire porter ce poids, car il était seul, infiniment seul, jusqu’à la fin de ses jours. « J’ai été un abruti fini, je ne me suis pas contrôlé. Je... ». Il serra les dents, des larmes s’échappant à nouveau de ses yeux noirs. « Je t’avais dit que tu ne devais pas m’aimer, petite chose... ».
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Un nom à coucher dehors
Février 04
Il m'attrape, me soulève loin au-dessus du sol et d'instinct, je me contorsionne pour me remettre en boule. Il ne voulait pas me faire de mal, mais il est humain. Qu'il le sache ou non, qu'il en ait l'apparence ou non, il est humain. Je le sais maintenant. Je l'ai appris à mes dépend. Les humains-animaux n'ont finalement rien d'animaux. Ils sont tous menteurs, dangereux et exigeants comme tous les autres humains. Je dois partir. Partir loin. Loin de cet abyme qui va m’engloutir et me scie en minuscules éclats. Je me sens mal. Les serpents ne peuvent avoir la nausée et pourtant je jurerais sentir mon estomac en train de se tordre.
J'ai mal. Il a mal. Je ne comprends pas... Je donne ! Je suis utile !!
La douceur rêche d'une couverture de tissus racle mes écailles et m'entoure bientôt d'une chaleur nouvelle. La boule que je suis s'y loge parfaitement, irradiée par la chaleur corporelle de Raton et baignée par la façon dont cette même chaleur se répand au sein de la couverture. ... Son être change... Je me sens moins mal... Moins en colère. Moins nauséeuse. J'arrive à prendre une petite gorgée d'air, mille odeurs se mêlant sur ma langue. Petite chose... Aider... Je voulais ce qu'il voulait... C'est comme ça que ça marche... Et cette fois je n'avais pas à choisir entre ce que je voulait et ce qu'il voulait lui. ... Je pensais que ça irait. Je ne m'étais pas méfier. A chaque fois j'oublie ne me méfier...
J'ai le droit de partir...
Ma petite tête sort de dessous les anneaux écailleux, laissant émerger un bout de nez aplati et deux yeux roses aux pupilles fendues.
Il ne veut pas que je parte...
Doucement, je glisse du nid qu'il me fait avec ses bras et longe son flanc en me dépliant, pour passer dans son dos, sous son bras et m'enrouler autour de lui en escaladant son torse pour arriver jusqu'à son épaule. Il ne veut pas être seul...
Mon corps ondule et s'étend. La balance des poids change et je retrouve ma forme humaine, accrochée à lui comme un koala, les bras autour de ses épaules, les jambes entourant sa taille. Bien trop légère pour être faite de chair. Bien trop lourde pour n'être qu'un serpent. Mes yeux débordent de larme. Seul... Si seul... Si brisé... Mais si j'ai repris cette forme, ce n'est pas pour pleurer. C'est pour parler. Employer des mots qui sont hors de porté d'un serpent.
- Contrôler est inutile. ... " blottie dans son cou, je ne murmure qu'à peine, la gorge rauque et douloureuse d'avoir été serrer à m'en écraser la trachée. " Tu... " Un toussotement m'interrompt et je dois attendre pour pouvoir m'éclaircir la gorge. " Tu es pas... tout seul. "
Il y avait tant d'humains comme lui. Tant de personnes prêtes à le connaitre et qui l'auraient apprécié. Il n'est pas comme moi, hors de ce monde et de ce temps. Hors de moi-même la plupart du temps. Façonnée par ce que sont les autres. Une seulement dans la solitude.
- Pourquoi... vous vous pensez responsables de ce que d'autres font ? Les humains... sont... bizarres. " a la fin de ma phrase, ma voix avait déraillé et je me suis tue. Incapable de comprendre encore le pouvoir mortel de mes mots et de mes actes, je le serrai dans mes bras. Bientôt je disparaitrai sans penser à mal et sans doute ne lui adresserais-je plus une pensée avant longtemps. Comme pour ce forestier dont je m'étais inquiété un jour pour me rendre compte qu'il était mort de vieillesse, que son fils également et que de parfaits étrangers venaient occuper sa cabane. Mais pour l'heure, je le serrai, tout simplement. Parce qu'il ne voulait pas être seul. Et parce qu'il ne voulait pas que je m'en aille.
CENDRES
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« Je suis un imbécile… ». Caressant tendrement la peau reptilienne de celle qu’il venait d’agresser, celle qui avait tenté par tous les moyens de lui apporter la plénitude qu’il ne méritait guère, Crocus se renfermait dans la culpabilité qui l’assaillait de toutes parts. Incapable de contenir ses émotions, de les comprendre et encore moins de les maîtriser, le raton savait que les dégâts étaient à présent irréparables. Il ne pouvait pas remonter le temps, et les gens n’oubliaient pas. Ils n’oubliaient jamais. Les humains étaient rancuniers, odieux, égoïstes, de véritables monstres prêts à tout pour atteindre leurs objectifs, et si durant toutes ces années, il s’était plaint de n’être qu’un animal, il voyait aujourd’hui qu’il partageait pourtant tous les mauvais traits de son père. Un constat qui ne faisait qu’attiser la flamme de rage qui dansait dans sa poitrine, sur laquelle il soufflait inlassablement, craignant d’exploser à nouveau alors que le petit être se réfugiait sur ses épaules. La laissant glisser sur son épiderme chaud, sur sa peau blanchâtre, il fixait le plancher sur lequel il discernait des petites taches de sang. Le sien, celui de la petite chose. Probablement les deux. Serrant les dents sous la frustration qui le gagnait progressivement, il poussa un long soupir d’exaspération.
Sans se retourner vers la magicienne qui venait de reprendre sa forme humanoïde dans son dos, il ferma les yeux et versa encore quelques larmes. Il voulait la supplier de mettre un terme à son existence, de lui accorder enfin la douce délivrance de la mort. Avant de la rencontrer, il s’était entêté à se dire que sans ses attributs de raton-laveur la vie serait plus douce, à penser qu’il se pardonnerait enfin d’être né, d'avoir existé et d’exister encore aujourd’hui. La plaie était bien trop profonde, impossible à panser. Sans-Nom tentait de sauver une âme en perdition, une cause perdue. Et au fond de lui, Crocus savait déjà qu’elle finirait par l’abandonner, par l’oublier. Tel était son destin, et lui aussi tirerait une croix sur cette relation qui n’en était pas une. L’histoire d’une nuit, un rêve qu’il avait transformé en cauchemar en suivant ses instincts, sa stupidité humaine, sa haine qui le poussait à rejeter tous ceux qui voulaient l’aimer. Il sentait son cœur se serrer, comme saisi de ronces qui le lacéraient un peu plus à chaque mot qui sortait de la gorge abimée de la petite rose qui se blottissait dans son cou. « Je ne suis pas humain, petite chose… ». Venant écarter les bouts de verre de ses doigts maladroits, s’y écorchant de plus belle, il attrapa de sa main libre une mèche de cheveux qui retombait sur son torse pour la sentir glisser dans les interstices de ses doigts. « Et je ne veux pas l’être… Je ne veux plus l’être. Je ne veux plus rien être. ». Un soubresaut le secoua tout entier et sa peau se mit à frissonner, son corps répondait malgré lui à la surcharge de sensations qui le parcouraient inlassablement. La peur, la colère, l’appréhension, l’a… l’amour. L’amour ?
« Je sais pas pourquoi t’es venue ici. Au début je pensais que c’était une mauvaise blague, qu’on me jouait encore des tours. Les humains se sont toujours amusés à se foutre de la gueule du pauvre raton-laveur sans défense. ». Il décida d’omettre la partie dans laquelle il leur arrachait le visage, craignant de l’effrayer à nouveau. « Tu sais ce qu’est un hybride, petite chose ? Sais-tu comment nous sommes conçus ? ». Il plissa ses petits yeux noirs, ramenant lentement la jeune femme devant lui, la portant affectueusement dans ses bras, une main dans son dos, l’autre sous ses genoux. Elle était belle, fragile, innocente. Son sourire aurait pu illuminer la République entière. Tout son contraire. Tout ce qu'il ne serait jamais. « Sais-tu par quelles horreurs passent les animaux qui nous font naître ? ». Ses doigts tremblaient, ses pensées se dirigeaient instinctivement vers sa mère. Malgré lui, malgré les œillères qu’il s’acharnait à porter pour s’empêcher de commettre l’irréparable, il ne pouvait s’empêcher d’imaginer sa souffrance, son regard terrifié. Et son père qui se targuait d’avoir trouvé l’âme sœur dans une pauvre âme égarée, d’avoir profité de la faiblesse d’une autre espèce plutôt que gagner le cœur d’une autre humaine. Un gros dégénéré, une pourriture.
« Putain… Je sais même pas pourquoi je te parle de tout ça. Je ne sais même pas qui tu es. J’ai ton nom, et rien d’autre, et j’ai failli te buter. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Qu’est-ce qui cloche ? Je les hais, tous autant qu’ils sont. Ceux qui vivent sereinement, ceux qui s’épanouissent. Ceux qui s’aiment, je… je déteste l’amour, toutes ces conneries, cette manie de s’inquiéter pour quelqu’un d’autre, de vouloir son putain de bien même quand ça va finir par te revenir en pleine gueule comme un boomerang, et le pire c’est que tu l’as demandé, et que t’en redemandes ! Ca n’a aucun sens, c’est à chier, toute cette vie est à chier et la prochaine le sera tout autant, l’amour ça craint et ça n’apporte que des emmerdes, c’est pour ça que je n’aime personne, tout le monde finit par se casser alors … alors à quoi bon… ». Mais ? « Mais même si c'est bizarre et que ça ne vaut rien après ce que je t'ai fait subir, je t’aime aussi, petite chose, alors que je ne pourrais jamais t'avoir… Alors si tu pensais vraiment ce que tu disais plus tôt… Rends-moi ma véritable forme je… je ne peux plus me voir ainsi… ».
Sans se retourner vers la magicienne qui venait de reprendre sa forme humanoïde dans son dos, il ferma les yeux et versa encore quelques larmes. Il voulait la supplier de mettre un terme à son existence, de lui accorder enfin la douce délivrance de la mort. Avant de la rencontrer, il s’était entêté à se dire que sans ses attributs de raton-laveur la vie serait plus douce, à penser qu’il se pardonnerait enfin d’être né, d'avoir existé et d’exister encore aujourd’hui. La plaie était bien trop profonde, impossible à panser. Sans-Nom tentait de sauver une âme en perdition, une cause perdue. Et au fond de lui, Crocus savait déjà qu’elle finirait par l’abandonner, par l’oublier. Tel était son destin, et lui aussi tirerait une croix sur cette relation qui n’en était pas une. L’histoire d’une nuit, un rêve qu’il avait transformé en cauchemar en suivant ses instincts, sa stupidité humaine, sa haine qui le poussait à rejeter tous ceux qui voulaient l’aimer. Il sentait son cœur se serrer, comme saisi de ronces qui le lacéraient un peu plus à chaque mot qui sortait de la gorge abimée de la petite rose qui se blottissait dans son cou. « Je ne suis pas humain, petite chose… ». Venant écarter les bouts de verre de ses doigts maladroits, s’y écorchant de plus belle, il attrapa de sa main libre une mèche de cheveux qui retombait sur son torse pour la sentir glisser dans les interstices de ses doigts. « Et je ne veux pas l’être… Je ne veux plus l’être. Je ne veux plus rien être. ». Un soubresaut le secoua tout entier et sa peau se mit à frissonner, son corps répondait malgré lui à la surcharge de sensations qui le parcouraient inlassablement. La peur, la colère, l’appréhension, l’a… l’amour. L’amour ?
« Je sais pas pourquoi t’es venue ici. Au début je pensais que c’était une mauvaise blague, qu’on me jouait encore des tours. Les humains se sont toujours amusés à se foutre de la gueule du pauvre raton-laveur sans défense. ». Il décida d’omettre la partie dans laquelle il leur arrachait le visage, craignant de l’effrayer à nouveau. « Tu sais ce qu’est un hybride, petite chose ? Sais-tu comment nous sommes conçus ? ». Il plissa ses petits yeux noirs, ramenant lentement la jeune femme devant lui, la portant affectueusement dans ses bras, une main dans son dos, l’autre sous ses genoux. Elle était belle, fragile, innocente. Son sourire aurait pu illuminer la République entière. Tout son contraire. Tout ce qu'il ne serait jamais. « Sais-tu par quelles horreurs passent les animaux qui nous font naître ? ». Ses doigts tremblaient, ses pensées se dirigeaient instinctivement vers sa mère. Malgré lui, malgré les œillères qu’il s’acharnait à porter pour s’empêcher de commettre l’irréparable, il ne pouvait s’empêcher d’imaginer sa souffrance, son regard terrifié. Et son père qui se targuait d’avoir trouvé l’âme sœur dans une pauvre âme égarée, d’avoir profité de la faiblesse d’une autre espèce plutôt que gagner le cœur d’une autre humaine. Un gros dégénéré, une pourriture.
« Putain… Je sais même pas pourquoi je te parle de tout ça. Je ne sais même pas qui tu es. J’ai ton nom, et rien d’autre, et j’ai failli te buter. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Qu’est-ce qui cloche ? Je les hais, tous autant qu’ils sont. Ceux qui vivent sereinement, ceux qui s’épanouissent. Ceux qui s’aiment, je… je déteste l’amour, toutes ces conneries, cette manie de s’inquiéter pour quelqu’un d’autre, de vouloir son putain de bien même quand ça va finir par te revenir en pleine gueule comme un boomerang, et le pire c’est que tu l’as demandé, et que t’en redemandes ! Ca n’a aucun sens, c’est à chier, toute cette vie est à chier et la prochaine le sera tout autant, l’amour ça craint et ça n’apporte que des emmerdes, c’est pour ça que je n’aime personne, tout le monde finit par se casser alors … alors à quoi bon… ». Mais ? « Mais même si c'est bizarre et que ça ne vaut rien après ce que je t'ai fait subir, je t’aime aussi, petite chose, alors que je ne pourrais jamais t'avoir… Alors si tu pensais vraiment ce que tu disais plus tôt… Rends-moi ma véritable forme je… je ne peux plus me voir ainsi… ».
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Un nom à coucher dehors
Février 04
Mes oreilles s'abaissent doucement et mon étreinte se fait plus forte alors que je sens le gouffre en lui s'agrandir... Encore... Encore... Je le serre comme si ça avait pu l'empêcher de tomber dedans. Il vit, à cet instant, avec une telle intensité qu j'ai du mal à me souvenir de mon propre nom. Son être tout entier est roulé par une vague d'émotions libérées par cette si grande faim que j'ai senti et exhaussée. Un barrage qui cède. Incontrôlable. Inexplicable. Mettant à jour le paysage ravagé de ce qui était sous l'eau jusque là. La vase. La putréfaction de souvenirs honnis. Et dessous, le gouffre monstrueux qui hurlait plus fort que ce qu pourrait faire le plus grand des dragons, pour implorer une délivrance qui ne venait pas. Et autour du gouffre, l'eau et la terre qui brulent de cette rage de vivre qui vacille. Cet homme fendu en deux entre le raton et l'humain à oreille plates.
Jamais je n'ai senti un gouffre si profond. Si... Irréversible... Si... Délectable. Le bouquet morbide de son parfum méphitique, je ne l'ai jamais sentis et pourtant il me semble qu'il est toujours présent, faisant revenir une foule de souvenir. Les croyant à genoux, le front contre la pierre froide. Le moine et sa discipline qui hurlait un prénom à chaque coup pour essayer de l'extirper de lui au point de souhaiter que tout s'arrête.
Un frisson me remonte le long du dos. Il caresse mes cheveux, sur le point de basculer. L'eau à la bouche, contre mes lèvres, le rythme de son sang qui se propage avec force jusqu'à sa tête happe toute mon attention. Mes pupilles s'étrécissent malgré moi, m'éloignant d'un souffle, juste pour pouvoir regarder la peau de son cou. Il le veut... Il l'appel si fort... Si... Je déglutis, mais ma langue se couvre instantanément de salive. Ma queue se resserre autour de sa cuisse. J'ouvre légèrement les lèvres, découvrant plusieurs rangées de crocs tranchant comme des rasoirs, d'une blancheur de neige couverte de bave qui scintille sous la lumière de la lanterne. Toujours au creux de son cou, il ne peut me voir. La chaleur de mon souffle caresse sa peau.
Pour certain je suis l'Amour, la Gloire, le Bonheur. Pour d'autre, je suis la Mort.
Un coup. Que je ferme la mâchoire et nous aurions tous les deux ce que nous...
... un sursaut le parcours. Un feu. Le regard d'une mère. La haine viscérale pour un père, plus fort encore que la haine pour lui. Un autre barage. Une autre muraille qui s'effondre, ses débris comblant le gouffre pour un moment. Surprise, je referme la bouche. Mes lèvres fines aux teintes de dragées font disparaitre les armes de sa propre destiné.
Il parle.
Je reste sur ma Faim.
Je ne répond pas. J'ai encore mal à la gorge et ce n'est pas ce qui est important pour lui de toute façon. Je secoue à peine la tête pour lui dire que je ne sais pas ce qu'est un hybride. Ce mot en lui-même m'est étranger. Il me décolle de son flanc pour me ramener face à lui, me portant sans effort apparent. De nouveau adoucie, je bois ses paroles, un sourire affectueux aux lèvres. Il ne s'en rend pas compte mais il m'apprend tellement de choses. Sur lui. Sur ce qu'il est. Ce que les humains sont. Sur ce que je suis d'eux. Le pire et le meilleur. Le premier, le plus désespéré, est finalement aussi simple. Chaque humain cherche avant tout à éviter de souffrir... Et après à s'accomplir.
Les humains peuvent donc se mêlé aux animaux... Cela me semble étrange, mais dans ce monde fait de possible, cela ne m'étonne pas non plus. La naissance, que ce soit la vivre ou la donner, est déjà un concept étrange. La souffrance de la contrainte me parle bien plus et lorsque les images le traversent, mon expression change, révulsée autant qu'il l'est en son fort intérieur. L'un de mes bras restant attaché à sa nuque, l'autre main vient caresser sa joue, ses mains tremblant contre moi. Il n'a pas envie de se rappeler de ça, mais il y revient...
Puis il parle encore plus... Et il ment cette fois-ci. Il ment en disant la vérité comme seuls les humains savent le faire.
- Tu es une terre sèche et gelée... " soufflais-je, comprenant enfin. Ma voix est parfaitement normale. Durant son monologue, mon corps a retrouvé son intégrité. Plus de plaie. Plus de bleu. Seulement moi. " Ce n'est pas qu'il n'y a pas d'eau pour toi. C'est que rien ne traverse en profondeur. " Une remarque plus pour moi que pour lui... Pour moi et pour ceux que je ne comprends pas. Ceux qui résistent. Ceux qui refusent. " Tu aimes. " lui lançais-je plutôt, catégorique sur ce point. Pas besoin d'expliquer, si ?
Mon pouce souligne sa lèvre inférieur et la flamme de la lanterne s'éteint. Seuls restent la très légère lueur de l'extérieur et mes yeux qui brulent d'un feu fuchsia et qui l'observent, les pupilles dilatées par l'obscurité. Mon regard qui ne change pas le moins du monde. Sous ma main, sa joue est couverte d'une fourrure qui aurait pu être bien plus douce et ses mains griffues me soutiennent toujours.
La lanterne ne se rallume pas.
- Tu es seul sous la glace... Ta colère, ta haine, elles te tiennent chaud, elles te protègent et elles t'étranglent. Elles te vident de tout ce qui n'est pas elles. Elles te remplissent. Il n'y a plus de place pour rien d'autre. Pour personne d'autre. " et par un saut dans mes pensées ou des siennes, j'ajoute. " Vous finissez tous par partir. Par mourir. C'est ce que vous faites. L'avenir est incertain et il ne contient rien. Là, maintenant, c'est tout ce que tu peux sentir. Tout ce que tu peux saisir. Pourquoi tu leur en veux de pas être là demain alors que tu ne veux pas d'eux aujourd'h...?
Un bâillement me remonte du fond du ventre et j'ouvre grand la bouche en fauve repus. Je le serre plus fort. Délicieux petit être.
- Toi, qu'est-ce que tu feras demain ?
J’enfouis de nouveau ma tête dans son cou, visiblement décidée à restée cramponnée à lui. Il peut bouger je m'en fiche. Je dormirais bien là.
CENDRES
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Les yeux fermés, l’âme errante, Crocus se perdait dans les méandres de sa propre conscience, laissant ses pensées se mélanger sans chercher à y faire le moindre tri. Pourquoi tenter d’arranger ce qui ne pouvait l’être ? À l’instant où le raton-laveur était né, il sut qu’il devait mourir. Il ne s’agissait pas d’une fatalité, encore moins d’une fin qu’il craignait. Une simple délivrance qui lui accorderait enfin la liberté qu’il désirait tant. En attendant cet instant inévitable, cette providence qui lui tendait majestueusement les bras, il vaguait d’un bout à l’autre du monde, sa queue rayée traînant sur les pavés de la capitale républicaine, ramassant le sable d’Ikusa entre ses poils rêches. Assis sur le plancher froid, la demoiselle qui hantait ses songes entre ses bras chauds et parsemés de blessures et de cicatrices, il se sentait malgré tout plus seul que jamais. Il avala sa salive, passant une main distraite dans la chevelure rosée de la petite chose qui l’accompagnait, s’accrochant à son cou dans une étreinte qu’il aurait voulu affectueuse. Loin de se douter de ce qui s’était tramé dans son dos, peut-être aurait-il mieux fallu qu’elle abrège ses souffrances ici et maintenant, qu’elle ôte la vie d’un être qui n’aurait jamais dû l’avoir ? Sans le savoir, Sans-Nom venait de lui accorder un répit dont il ne voulait pas. Où le voulait-il ? Une grimace s’empara de ses traits beaucoup trop humains à son goût, déformés par la colère et la confusion. Profondément tourmenté, l’hybride ignorait sur quel pied danser, s’il fallait même danser.
Son regard empli de tristesse se dirigea vers quelques fragments de miroir qui gisaient au sol, sa main libre s’emparant de l’un d’eux pour observer son reflet. La gorge serrée, les yeux plissés, Crocus ignorait s’il aimait cette partie de lui. Cela serait revenu à dire que tout n’était pas à jeter dans son âme débauchée, dans cette vie atroce qu’il menait depuis une vingtaine d’années. Une affirmation qu’il ne pouvait émettre, les mots restant bloqués à ses cordes vocales qui refusaient d’émettre le moindre son. Crocus avait l’impression de se noyer sous les injonctions de la démone, de perdre le contrôle qu’il désirait tant. Le désir… À croire que sous ce tas de poils se cachait un cœur qui bat. Sans-Nom était probablement la première à le penser, et elle serait également la dernière. La voix de la petite rose le sortit de son propre subconscient et il tourna instinctivement la tête vers elle, captant son regard reptilien dans lequel il se perdait, ses reflets pêche qui le captivaient. Les larmes bordaient ses yeux tandis que la haine se frayait un chemin à son tour dans son organisme, venant faire bouillir ses veines sous l’adrénaline. Ce n’était pas elle qu’il détestait. Comment aurait-il pu ? Douce, tendre, inattendue, elle était un rayon de soleil dans le cachot sombre où il tournait en rond. Peu importe qu’elle soit un rêve, le fruit de son imagination, une hallucination due à une drogue glissée dans son verre. Elle était là, indéniablement, blottie dans cette étreinte qui lui réchauffait le cœur. Elle était là, comme une évidence.
Ainsi, il aimait. Un petit rire le secoua sous l’absurdité de ce qu’il venait d’entendre, encore plus, car il y croyait. « Quelle horreur. ». L’amertume s’immisça dans le maigre sourire qu’il affichait, cadavre de la joie qu’il affichait chaque jour, de ce jem’enfoutisme qui lui permettait de garder la tête haute. Toutes les barrières qu’il érigeait venaient de céder, les unes après les autres, sous le toucher agile de cette créature qui le flattait de ses mots et de sa présence rayonnante. S’il avait su. Si seulement il avait su qu’il tendait la main vers le précipice alors qu’elle n’attendait que de l’y pousser. Le désespoir rend les gens fous, mais après tout, fou, il l’était déjà. Sa voix résonnait dans son esprit, rebondissait contre les murs de sa chambre vide, douce mélopée qu’il savourait tant qu’il le pouvait. Car elle partirait, elle le fuirait. Comme tous les autres. Personne ne restait. Lui non plus ne restait pas. Alors que la lumière partait à son tour, il se sentit redevenir lui-même. Une sensation bien étrange qui l’apaisait. Le confort de ce corps qu’il abhorrait, de ses pattes griffues qui caressaient lentement l’épiderme de la petite rose. L’habitude de cette enveloppe charnelle qui lui rappelait chaque jour pourquoi il vivait encore. Pour sa mère qui l’attendait. Pour ses yeux remplis de vide, pour la manière qu’elle avait de fouiller les poubelles. Pour ses roucoulements qui le faisaient rire. Tant de futilités qui ensemble soutenaient les débris de son âme brisée.
« Tu as raison. ». Un constat difficile, après tout n’était-ce pas la vérité qui blesse ? « Mais je ne sais pas vivre autrement, petite chose. Il est trop tard pour changer. Je ne sais rien être d’autre. ». Dans l’obscurité, il ne voyait qu’elle, un phare qui éclairait son chemin. Il marqua une pause de quelques secondes, la serrant un peu plus contre lui alors que sa dernière question se répétait inlassablement dans sa tête. Crocus ne pensait pas à l’avenir, il vivait dans le passé, dans la peur. Dans l’expectative d’une mort certaine, probablement douloureuse. Autant que celle de son défunt père, car sans doute ne méritait-il pas mieux. Le souffle court, passant sa langue sur ses babines pour les humidifier, l’homme redevenu raton réfléchissait. À une réponse qui puisse la satisfaire, toutefois il n'y parviendrait pas. Il ne pouvait que lui donner ce dont il disposait, les pauvres restes de son âme en peine. « Je penserais aux autres. À toi. ». Une réponse simple pour une question complexe. « Parce que je n’ai rien à faire d’autre. Parce que le monde n’a rien à m’offrir, car je refuse de recevoir. ». Il se mit à rire dans un chuchotement. « Parce que je ne sais même pas si tu es réelle, mais je ne veux pas oublier. ».
Il s’accrochait à sa présence telle une sangsue, drogué à cette voix fluette qui pansait toutes ses blessures malgré elle. Les effets vicieux d’un démon qui ne souhaitait qu’être rassasié et qui ne trouvait qu’une coquille vide dont il ne pouvait se repaître. « J’aimerais te dire que tout va changer. Que ma vie va changer. Ce serait te mentir, et je ne veux pas…. ». Il s’arrêta pour déglutir avant de reprendre, pesant ses mots précautionneusement. « Je ne veux plus mentir. ». Ni à elle, ni à lui-même. Il la souleva délicatement et vint la déposer dans le lit, la bordant dans le noir avec toute la maladresse qu’il possédait avant de s’installer à ses côtés, au-dessus de la couette. Dans la noirceur la plus totale, il se perdit à nouveau dans son regard et sa truffe froide et humide vint se déposer contre le bout de son nez tandis que ses yeux se fermaient, la fatigue le gagnant progressivement. L'odeur de la pièce se modifia doucement, passant du fer si caractéristique du sang à une fragrance particulière, une odeur de plante, de fleur.... de rose. D’une voix à moitié endormie, il ne put que murmurer faiblement. « On se reverra… je te le promets. ».
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