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Invité
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Un tapis d'incarnat visqueux pour matelas, il sommeillait, bordé de ces constellations inconnues. Et seul avec sa folie, la barque aventureuse du repos à la voile enflée, commandait l'orc loin des rivages de la réalité. C'était cela, dormir. Point de phare dans les tréfonds du néant. Arrière, côte suspecte. Arrière, raison. Encore une fois, arrière. Car Nargulg ne demandait qu'égarement et noyade, lavé de ces flots empourprés. Songes ! Ô Gardiens ! Pourquoi rêvait-il encore de massacre ? Le nocher silencieux tint une mystérieuse lanterne. Au centre de rien, la dernière flamme psalmodiait de maussades louanges. Il n'entendait rien. Gloire ! Fortune ! Rien de tout cela. Comme la déraison le contaminait ! Elle se nourrit incessamment de celui qui fonça droit vers la mort. Les images projetées en reflet sur cet océan vermeil travestissaient le divinisme. Un tourbillon d'aberration l'emportait alors, hors des vœux de rédemption. Purgé du lierre invasif de la sensiblerie, dépouillé de l'affliction nommée repentance. Le grand numéro de dame démence tendait vers un divinisme fait de force pure. Un divinisme qui massacrerait le Reike et sa population. Un divinisme qui massacrerait la République et sa population. Un divinisme tout entier dirigé contre le Sekai. S'il fallut démolir l'édifice du monde pour restaurer la suprématie des Très-Haut Souverains, alors soit. Il était si doux de se laisser aller à tant de rêvasserie. La gloire ? Nargulg n'en avait plus cure, car la gloire en pareil Sekai était amère et creuse. Cette âme hardie s'enflammait de ces griefs sans bout. La déraison lui coûtera la vie, c'était acté quand il épousa cette cause tant impossible qu'immonde. Et le déversoir d'anachronisme coulait en lui de jour comme de nuit. Quel que fut l'idéal à avancer, celui de sa race comme celui des dieux, le problème demeurait et il portait le doux nom de folie.
Les rivages du réveil imparable approchaient bien malgré lui. L'embrassade du délabrement mental s'évapora quand échoua l'embarcation du rêveur infortuné. Dante extirpa le fou du sommeil réparateur, puissent les divins lui rendre grâce, à cet oni là. Le dément de la nuit, le caché des dissimulés, dans la cabane vétuste d'une âme pourrie, ce Nargulg là oui. Il passa le relai au dément du jour. Le même en tout, pur dans l'abject. Le tombeau de la wyverne était alors éclairé de la divine lumière. Pure, elle était pure. Les Huit Monarques commandèrent en silence et leurs ordres étaient purs. Il fallait se relever, et Nargulg se releva. Il fallait encore massacrer et déjà, Nargulg songeait à tuer. L'estomac clamait sa faim à grand bruit. Il fallait manger. Les victimes oubliées, dont on ignorait le sort depuis des heures. Il fallait les retrouver. Urzupha avait la peau dure, elle survécut au courroux de l'orc, et à la nuit. Elle était pure elle aussi. Purement destructrice. Sublime et pure dans l'acte malfaisant. Dans ce monde où la seule vraie foi ne luisait plus que chez les massacreurs, il fallait être pur. Imperméable aux cris d'orfraie du Sekai pour le saigner de part en part. La mécréante était de la race des massacreurs, pure et noble. Désormais, elle tuerait, pour le compte des divins Monarques. Nargulg l'enchaînera au féal des Huit Tyrans, qu'il fut. Elle était capable de se targuer de tout connaître de lui. L'inverse était tout aussi vrai. Les ancres du nuisible destin, tenaces aujourd'hui, envers et contre tous, et enfanté jadis. Elles lieront définitivement Urzupha au vœu d'anéantissement. Parce que, le divinisme de la brutalité s'opposait au monde entier et au bon sens. Urzupha y trouverait son compte. Dans la destruction. Sourde aux voix du Royaume Divin, les Huit ne lui feraient jamais savoir combien ils savouraient les tourments du Sekai. Lui, le fanatique, et elle la mécréante, ces tueurs de cet acabit. Ils déploieraient l'inévitable fureur, en champions de la macabre besogne qu'il fallait dispenser au monde. Point d'enseignements pour elle. Car elle n'en ferait rien. Détruire, purement et simplement. Alors adviendra la suprême tyrannie, sur les ruines d'un Sekai purifié de tout ce qui déplut un jour, aux Très-Haut.
Allons, "que faire d'elle ?", Interrogea le curieux cornu. Mais enfin. Après tout ce qui fut couché sur le papier, l'intention inaltérable de Nargulg n'était-elle pas évidente ? Non, sale meurtrier. N'était pas donné à tous que de farfouiller en son cerveau désaxé, d'où prévalaient les Grands Maîtres de l'horreur. Alors il avança. Nargulg, le piètre et revigoré, approcha de la non-moins folle que lui. Urzupha, l'incroyante immobile. Qui, pour retrouver la liberté devait répondre favorablement. Une épée bavarde pour compagnie nocturne, au grand jour elle défiait Nargulg, les traits moins gonflés qu'hier. Elle, l'aplatie ventre contre terre, attendait le trépas, impuissante et farouche malgré tout. À quoi bon hausser le ton ? À quoi bon injurier ? Elle n'avait plus que cela. Minable. Et tous deux - elle comme lui - étaient fort pitoyables, car, de ce nouveau trio, Dante était bien le seul type respectable. Il était pur lui aussi. Véritablement pur malgré les maux qui l'accablaient alors. Un bon fond pour un massacreur. Un brave gars que cet oni, et c'était la vérité. Allons. Avançons un peu, voulez-vous ?
- HEEEEIIIN ?! Ha ! Elle est bien bonne celle - là ! Plutôt crever que d'vous suivre ! Chiens !!
- Et qu'est-ce que t'as foutu jusque-là, pouffiasse ?! Tu sors du nid et pars en expédition à l'autre bout du monde...
L'agitée avait dans l'idée d'user jusqu'au bout de l'affreuse capacité à tordre ses membres. Et ce, afin de le faire taire. Imbécile d'orc qu'elle était. Certes, hier soir Dante et Nargulg étaient diminués. Aujourd'hui, c'était une autre paire de manches que de parvenir à les démolir. Ho bien sûr, ce n'était pas encore la grande forme chez les fanatiques. Et l'on ajouterait volontiers, qu'ils furent sacréments cons de ne pas laisser leur récupération opérer plus longtemps. Cependant, la connerie d'Urzupha dépassait l'entendement, et Nargulg de lui faire comprendre - en l'écrasant de tout son poids - combien il était vain de protester. Le cul du mâle sur le dos de la femelle - nul besoin de plus - et l'aplatie fut condamnée à l'inaction, criarde mais enfin, on commence à la connaître. La situation avait de quoi ébaudir le verdâtre, étrangement volubile.
- ... Pour me tuer, hein ? Belle réussite. Urzupha.
Vous le trouvez sarcastique ? Bien vu l'artiste. Et ceci, tandis qu'il jouait de provocation avec l'infâme créature, la dextre de Nargulg rôda immodérément le long du popotin de l'enragée, et inoffensive Urzupha. Quand, d'autre part, sa gauche esquintée s'enroula en plein la tignasse de l'autre dingue, c'était soudainement, un sursaut de bestialité qui grondait en lui. Allons droit au but : Nargulg avait les patates au fond du sac. Et contrairement à celle-là, il n'allait pas chercher chaleur auprès d'esclaves sexuelles, non orc de surcroît, et ramassées çà et là. Désormais, il possédait une orc sous la main, aussi monsieur songeait à la culbuter sans ménagement. Dans la crasse. En ce jour de retrouvailles, tous trois étaient... Répugnants. Du sang, de la sueur, des bleus et les restes d'un dragon putrescent. Un onctueux mélange, n'est-ce pas ?
Puisque ces orcs là ne connurent que la sauvagerie pour cadre de vie, force et agressivité influaient extrêmement sur les interactions quotidiennes. Jusque dans l'intimité. Sans surprise, l'on n'y faisait point grand cas du consentement, et des actes tout à fait immoraux pour le commun des mortels étaient alors d'une affligeante banalité. Réduire la barbarie à de gratuites effusions de sang, c'est ne rien y comprendre, en plus de passer à côté de l'essentiel. Aussi, je vous invite, Cher Lecteur, à laisser cela aux professionnels d'inhumanité, car vous êtes sain d'esprit, contrairement à ces immondes personnages.
Obéissant à la poigne de Nargulg, la tête d'Urzupha pointa vers le firmament dégagé pour que roule vers lui son regard blanc fascinateur, lequel oscillait perpétuellement entre divers états dérangeants. Admiration, haine, envie, dédain et dégoût, etc. La liste serait trop longue, on fait bien de l'arrêter là, ce panorama de l'absurde instabilité. Tout de même, le rachis de la mauvaise fit un trône fort confortable, et le cul du vilain avait grand mal à s'en défaire. À tel point qu'il délivra un soupir des plus audibles avant de redresser le menton en direction de Dante.
- Tu t'es déjà tapé une orc ?
- Lui ?! Ha ha ha ! J'suis sûre qu'il en a une courte ! Courte-tige que j'l'appelle ! Bahahaha !
- C'est quoi le rapport ? Ferme ta gueule !
Une calotte pour qu'elle se taise, ce n'était pas dit que ça suffirait, mais enfin, ça le démangeait assez pour dégainer. Et puis quelle idée que d'attaquer un mâle sur sa virilité ! Dans l'immédiat, qui plus est ! Décidé à se remuer plus qu'à niquer, finalement, notre orc au masculin délivra Urzupha de sa lourde masse de muscle. Le silence fut de courte durée, parce que l'autre grande gueule couchée par terre, tenait à taper la discut.
- Tu sais Nargulg. En retournant au pays, on pourra tout recommencer, comme avant et cette fois...
L'agitation et l'outrance propre à la dérangée fourmillaient de plus belle. Pourtant clouée sur place, ce sont de terrifiants coups de genou qu'elle distribua au sol, craquelé en conséquence.
-... On les TUERA TOUS ! LES TUER ! LES TUUUEEEER !! Y A QUE COMME ÇA QU'ON LES TIENDRA CES SALOPES !! RHAAAA !! Rentre avec MWAA !!
Sa voix perçait par-delà les cimes, et à hurler sa rage ainsi, l'on était en droit de craindre l'apparition d'un autre bestiau de l'envergure d'une wyverne. Après la tempête de verbiage, un semblant de calme reprit ses droits dans la gorge d'Urzupha, laquelle fusilla l'oni du regard.
- Ton pote n'a qu'à venir avec nous ! Lui qui adore se battre, il s'rait servit ! On zigouillera tous les gêneurs ! Merde ! Même Kar'ath ça lui f'rait du bien ! Alors ?! On y va tous les quatre, on défonce tout le monde, on s'fait une armée, puis on fout le feu à la surface !!
- Les armées sont constituées de minables sans talents particuliers pour le combat...
Le colosse de vert et de pourpre s'accroupit devant la ravagée, le plat d'une main en appui sur le sol frais, l'autre enroulée autour du cou de la guerrière, il soutint un interminable échange de regards.
- ...Et je n'aime pas m'entourer de minables...
- Qu'est-ce que tu rac..
Nargulg resserra son étreinte, comme pour la sanctionner de cette interruption.
- Vas-y, coupe-moi encore la parole pour voir.
Quelques borborygmes plus loin, la poigne du mâle devint plus détendu. Une occasion inattendue de renouer avec l'oxygène, pour elle.
- M'est avis qu'il est plus enviable d'avoir un puissant guerrier à ses côtés, qu'un millier de peigne-cul, bons qu'à tremper leurs asticots dans des lupanars. Un jour. Peut-être. Je m'en retournerai vers les nôtres. Quand les millions d'ennemis de mes divins Maîtres boufferont les pissenlits par la racine. Quand les derniers habitants de ce monde auront perdu tout espoir. Quand la soumission sera leur seule issue. Alors, je penserai à revenir.
"Un jour. Peut-être" le discours extrêmement caricatural du méchant Nargulg aurait pu s'estomper ici, tant la femme libérée de la main étrangleuse n'en serait pas moins conquise. Non pas à la cause, mais à Nargulg. Il eut beau vanter les mérites des dieux, étaler la laideur de son âme en long, en large et en travers. Ce qu'elle retint fut que, au fond, son con de bonhomme n'avait pas changé d'un iota. Quoiqu'il puisse affirmer, Nargulg ne faisait pas autre chose que ce pour quoi on l'avait dressé : trucider. Autrefois, sous la montagne, l'impatience l'eut à l'usure, et aujourd'hui, on le retrouva au fin fond des rocheuses, tripatouillant le divinisme, sans remords d'aucune sorte. Afin de piétiner sans peine le Sekai, tels les divins tant adorés. Pourquoi les aduler pour autre chose ? Ils avaient tout comprit.
Assez bavassé. Le Soleil poursuivait sa course et ils jactaient toujours ces abrutis. Le temps était venu de bouger de là, à charge de Dante de récupérer son démon de compagnie, et ce, faisant, libérer Urzupha. Ensuite, elle emboîta le pas des deux gus, agaçant l'un, cassant les couilles de l'autre.
- Bouh !
Elle ne chargea pas autrement l'oni qu'avec le désir de le surprendre ou mieux, de le voir sursauter. Le pauvre cornu était assez occupé à guider le trio dans ce dédale montagneux, dès lors, il eut à supporter une Urzupha prodiguant de brusques tapes dans le dos.
- Hé ! Pète un coup mon pote ! T'es toujours en vie c'est pas beau ça ?! J'ai été... Comment vous dîtes déjà ?... Clémente ! Hahaha ! Clémente, ouais.
Elle mentait comme un arracheur de dents la saloperie qui, d'un coup d'œil en biais dévorait la garde de l'épée noire. Yeux blancs, épée noire. Sacré contraste ! Bordel qu'elle l'aimait bien le démon, ça changeait de l'autre verdâtre ronchon tient.
- Kar'ath ! Y reste des types à dépecer dans ce pays désert ?! Va aussi falloir que tu m'dises à quoi tu ressembles en vrai ! Que j'puisse te reconnaître quand tu sortiras de là-dedans.
De son côté, Nargulg ne reconnut jamais les sentiers empruntés par le guide à cornes. Pourtant identiques à ceux d'hier. L'explication à cela tint en deux mots : faim aveuglante. Les hurlements déplaisants émit depuis son bide remplaçaient les remontrances qu'il devrait balancer à Urzupha l'emmerdeuse. Les hauteurs ombrageuses masquaient les rayons du grand jour, qui cardaient jusqu'alors les loques de nos immondes vagabonds. Serviles au dessein d'enténèbrement, les murailles de pierres s'illuminaient seulement pour dévoiler une planque. Vide de vie, vide de vivres. Les protégées malheureuses s'en étaient allé. Il poursuivait en vain la faim, conséquence de quoi, son animosité naturelle s'en trouva aiguisée. La complainte du ventre vide résonnait de plus belle, et cet orc d'en devenir plus renfermé que jamais. Sur le trajet, il descendit entièrement son outre d'eau, comme pour tromper la faim, et avant de courir après elles, lui fallait - il soulager sa vessie.
Les rivages du réveil imparable approchaient bien malgré lui. L'embrassade du délabrement mental s'évapora quand échoua l'embarcation du rêveur infortuné. Dante extirpa le fou du sommeil réparateur, puissent les divins lui rendre grâce, à cet oni là. Le dément de la nuit, le caché des dissimulés, dans la cabane vétuste d'une âme pourrie, ce Nargulg là oui. Il passa le relai au dément du jour. Le même en tout, pur dans l'abject. Le tombeau de la wyverne était alors éclairé de la divine lumière. Pure, elle était pure. Les Huit Monarques commandèrent en silence et leurs ordres étaient purs. Il fallait se relever, et Nargulg se releva. Il fallait encore massacrer et déjà, Nargulg songeait à tuer. L'estomac clamait sa faim à grand bruit. Il fallait manger. Les victimes oubliées, dont on ignorait le sort depuis des heures. Il fallait les retrouver. Urzupha avait la peau dure, elle survécut au courroux de l'orc, et à la nuit. Elle était pure elle aussi. Purement destructrice. Sublime et pure dans l'acte malfaisant. Dans ce monde où la seule vraie foi ne luisait plus que chez les massacreurs, il fallait être pur. Imperméable aux cris d'orfraie du Sekai pour le saigner de part en part. La mécréante était de la race des massacreurs, pure et noble. Désormais, elle tuerait, pour le compte des divins Monarques. Nargulg l'enchaînera au féal des Huit Tyrans, qu'il fut. Elle était capable de se targuer de tout connaître de lui. L'inverse était tout aussi vrai. Les ancres du nuisible destin, tenaces aujourd'hui, envers et contre tous, et enfanté jadis. Elles lieront définitivement Urzupha au vœu d'anéantissement. Parce que, le divinisme de la brutalité s'opposait au monde entier et au bon sens. Urzupha y trouverait son compte. Dans la destruction. Sourde aux voix du Royaume Divin, les Huit ne lui feraient jamais savoir combien ils savouraient les tourments du Sekai. Lui, le fanatique, et elle la mécréante, ces tueurs de cet acabit. Ils déploieraient l'inévitable fureur, en champions de la macabre besogne qu'il fallait dispenser au monde. Point d'enseignements pour elle. Car elle n'en ferait rien. Détruire, purement et simplement. Alors adviendra la suprême tyrannie, sur les ruines d'un Sekai purifié de tout ce qui déplut un jour, aux Très-Haut.
Allons, "que faire d'elle ?", Interrogea le curieux cornu. Mais enfin. Après tout ce qui fut couché sur le papier, l'intention inaltérable de Nargulg n'était-elle pas évidente ? Non, sale meurtrier. N'était pas donné à tous que de farfouiller en son cerveau désaxé, d'où prévalaient les Grands Maîtres de l'horreur. Alors il avança. Nargulg, le piètre et revigoré, approcha de la non-moins folle que lui. Urzupha, l'incroyante immobile. Qui, pour retrouver la liberté devait répondre favorablement. Une épée bavarde pour compagnie nocturne, au grand jour elle défiait Nargulg, les traits moins gonflés qu'hier. Elle, l'aplatie ventre contre terre, attendait le trépas, impuissante et farouche malgré tout. À quoi bon hausser le ton ? À quoi bon injurier ? Elle n'avait plus que cela. Minable. Et tous deux - elle comme lui - étaient fort pitoyables, car, de ce nouveau trio, Dante était bien le seul type respectable. Il était pur lui aussi. Véritablement pur malgré les maux qui l'accablaient alors. Un bon fond pour un massacreur. Un brave gars que cet oni, et c'était la vérité. Allons. Avançons un peu, voulez-vous ?
- HEEEEIIIN ?! Ha ! Elle est bien bonne celle - là ! Plutôt crever que d'vous suivre ! Chiens !!
- Et qu'est-ce que t'as foutu jusque-là, pouffiasse ?! Tu sors du nid et pars en expédition à l'autre bout du monde...
L'agitée avait dans l'idée d'user jusqu'au bout de l'affreuse capacité à tordre ses membres. Et ce, afin de le faire taire. Imbécile d'orc qu'elle était. Certes, hier soir Dante et Nargulg étaient diminués. Aujourd'hui, c'était une autre paire de manches que de parvenir à les démolir. Ho bien sûr, ce n'était pas encore la grande forme chez les fanatiques. Et l'on ajouterait volontiers, qu'ils furent sacréments cons de ne pas laisser leur récupération opérer plus longtemps. Cependant, la connerie d'Urzupha dépassait l'entendement, et Nargulg de lui faire comprendre - en l'écrasant de tout son poids - combien il était vain de protester. Le cul du mâle sur le dos de la femelle - nul besoin de plus - et l'aplatie fut condamnée à l'inaction, criarde mais enfin, on commence à la connaître. La situation avait de quoi ébaudir le verdâtre, étrangement volubile.
- ... Pour me tuer, hein ? Belle réussite. Urzupha.
Vous le trouvez sarcastique ? Bien vu l'artiste. Et ceci, tandis qu'il jouait de provocation avec l'infâme créature, la dextre de Nargulg rôda immodérément le long du popotin de l'enragée, et inoffensive Urzupha. Quand, d'autre part, sa gauche esquintée s'enroula en plein la tignasse de l'autre dingue, c'était soudainement, un sursaut de bestialité qui grondait en lui. Allons droit au but : Nargulg avait les patates au fond du sac. Et contrairement à celle-là, il n'allait pas chercher chaleur auprès d'esclaves sexuelles, non orc de surcroît, et ramassées çà et là. Désormais, il possédait une orc sous la main, aussi monsieur songeait à la culbuter sans ménagement. Dans la crasse. En ce jour de retrouvailles, tous trois étaient... Répugnants. Du sang, de la sueur, des bleus et les restes d'un dragon putrescent. Un onctueux mélange, n'est-ce pas ?
Puisque ces orcs là ne connurent que la sauvagerie pour cadre de vie, force et agressivité influaient extrêmement sur les interactions quotidiennes. Jusque dans l'intimité. Sans surprise, l'on n'y faisait point grand cas du consentement, et des actes tout à fait immoraux pour le commun des mortels étaient alors d'une affligeante banalité. Réduire la barbarie à de gratuites effusions de sang, c'est ne rien y comprendre, en plus de passer à côté de l'essentiel. Aussi, je vous invite, Cher Lecteur, à laisser cela aux professionnels d'inhumanité, car vous êtes sain d'esprit, contrairement à ces immondes personnages.
Obéissant à la poigne de Nargulg, la tête d'Urzupha pointa vers le firmament dégagé pour que roule vers lui son regard blanc fascinateur, lequel oscillait perpétuellement entre divers états dérangeants. Admiration, haine, envie, dédain et dégoût, etc. La liste serait trop longue, on fait bien de l'arrêter là, ce panorama de l'absurde instabilité. Tout de même, le rachis de la mauvaise fit un trône fort confortable, et le cul du vilain avait grand mal à s'en défaire. À tel point qu'il délivra un soupir des plus audibles avant de redresser le menton en direction de Dante.
- Tu t'es déjà tapé une orc ?
- Lui ?! Ha ha ha ! J'suis sûre qu'il en a une courte ! Courte-tige que j'l'appelle ! Bahahaha !
- C'est quoi le rapport ? Ferme ta gueule !
Une calotte pour qu'elle se taise, ce n'était pas dit que ça suffirait, mais enfin, ça le démangeait assez pour dégainer. Et puis quelle idée que d'attaquer un mâle sur sa virilité ! Dans l'immédiat, qui plus est ! Décidé à se remuer plus qu'à niquer, finalement, notre orc au masculin délivra Urzupha de sa lourde masse de muscle. Le silence fut de courte durée, parce que l'autre grande gueule couchée par terre, tenait à taper la discut.
- Tu sais Nargulg. En retournant au pays, on pourra tout recommencer, comme avant et cette fois...
L'agitation et l'outrance propre à la dérangée fourmillaient de plus belle. Pourtant clouée sur place, ce sont de terrifiants coups de genou qu'elle distribua au sol, craquelé en conséquence.
-... On les TUERA TOUS ! LES TUER ! LES TUUUEEEER !! Y A QUE COMME ÇA QU'ON LES TIENDRA CES SALOPES !! RHAAAA !! Rentre avec MWAA !!
Sa voix perçait par-delà les cimes, et à hurler sa rage ainsi, l'on était en droit de craindre l'apparition d'un autre bestiau de l'envergure d'une wyverne. Après la tempête de verbiage, un semblant de calme reprit ses droits dans la gorge d'Urzupha, laquelle fusilla l'oni du regard.
- Ton pote n'a qu'à venir avec nous ! Lui qui adore se battre, il s'rait servit ! On zigouillera tous les gêneurs ! Merde ! Même Kar'ath ça lui f'rait du bien ! Alors ?! On y va tous les quatre, on défonce tout le monde, on s'fait une armée, puis on fout le feu à la surface !!
- Les armées sont constituées de minables sans talents particuliers pour le combat...
Le colosse de vert et de pourpre s'accroupit devant la ravagée, le plat d'une main en appui sur le sol frais, l'autre enroulée autour du cou de la guerrière, il soutint un interminable échange de regards.
- ...Et je n'aime pas m'entourer de minables...
- Qu'est-ce que tu rac..
Nargulg resserra son étreinte, comme pour la sanctionner de cette interruption.
- Vas-y, coupe-moi encore la parole pour voir.
Quelques borborygmes plus loin, la poigne du mâle devint plus détendu. Une occasion inattendue de renouer avec l'oxygène, pour elle.
- M'est avis qu'il est plus enviable d'avoir un puissant guerrier à ses côtés, qu'un millier de peigne-cul, bons qu'à tremper leurs asticots dans des lupanars. Un jour. Peut-être. Je m'en retournerai vers les nôtres. Quand les millions d'ennemis de mes divins Maîtres boufferont les pissenlits par la racine. Quand les derniers habitants de ce monde auront perdu tout espoir. Quand la soumission sera leur seule issue. Alors, je penserai à revenir.
"Un jour. Peut-être" le discours extrêmement caricatural du méchant Nargulg aurait pu s'estomper ici, tant la femme libérée de la main étrangleuse n'en serait pas moins conquise. Non pas à la cause, mais à Nargulg. Il eut beau vanter les mérites des dieux, étaler la laideur de son âme en long, en large et en travers. Ce qu'elle retint fut que, au fond, son con de bonhomme n'avait pas changé d'un iota. Quoiqu'il puisse affirmer, Nargulg ne faisait pas autre chose que ce pour quoi on l'avait dressé : trucider. Autrefois, sous la montagne, l'impatience l'eut à l'usure, et aujourd'hui, on le retrouva au fin fond des rocheuses, tripatouillant le divinisme, sans remords d'aucune sorte. Afin de piétiner sans peine le Sekai, tels les divins tant adorés. Pourquoi les aduler pour autre chose ? Ils avaient tout comprit.
Assez bavassé. Le Soleil poursuivait sa course et ils jactaient toujours ces abrutis. Le temps était venu de bouger de là, à charge de Dante de récupérer son démon de compagnie, et ce, faisant, libérer Urzupha. Ensuite, elle emboîta le pas des deux gus, agaçant l'un, cassant les couilles de l'autre.
- Bouh !
Elle ne chargea pas autrement l'oni qu'avec le désir de le surprendre ou mieux, de le voir sursauter. Le pauvre cornu était assez occupé à guider le trio dans ce dédale montagneux, dès lors, il eut à supporter une Urzupha prodiguant de brusques tapes dans le dos.
- Hé ! Pète un coup mon pote ! T'es toujours en vie c'est pas beau ça ?! J'ai été... Comment vous dîtes déjà ?... Clémente ! Hahaha ! Clémente, ouais.
Elle mentait comme un arracheur de dents la saloperie qui, d'un coup d'œil en biais dévorait la garde de l'épée noire. Yeux blancs, épée noire. Sacré contraste ! Bordel qu'elle l'aimait bien le démon, ça changeait de l'autre verdâtre ronchon tient.
- Kar'ath ! Y reste des types à dépecer dans ce pays désert ?! Va aussi falloir que tu m'dises à quoi tu ressembles en vrai ! Que j'puisse te reconnaître quand tu sortiras de là-dedans.
De son côté, Nargulg ne reconnut jamais les sentiers empruntés par le guide à cornes. Pourtant identiques à ceux d'hier. L'explication à cela tint en deux mots : faim aveuglante. Les hurlements déplaisants émit depuis son bide remplaçaient les remontrances qu'il devrait balancer à Urzupha l'emmerdeuse. Les hauteurs ombrageuses masquaient les rayons du grand jour, qui cardaient jusqu'alors les loques de nos immondes vagabonds. Serviles au dessein d'enténèbrement, les murailles de pierres s'illuminaient seulement pour dévoiler une planque. Vide de vie, vide de vivres. Les protégées malheureuses s'en étaient allé. Il poursuivait en vain la faim, conséquence de quoi, son animosité naturelle s'en trouva aiguisée. La complainte du ventre vide résonnait de plus belle, et cet orc d'en devenir plus renfermé que jamais. Sur le trajet, il descendit entièrement son outre d'eau, comme pour tromper la faim, et avant de courir après elles, lui fallait - il soulager sa vessie.
Invité
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Dévotion
Dévotion
Emergeant à peine de son sommeil, Dante ressentait pourtant toujours la fatigue comme s'il n'avait pas dormi de la nuit. Son imposante musculature crie qu'on la laisse un peu se reposer, subissant courbatures et peut-être même quelques déchirures musculaires à certains endroits. La régénération aurait du faire son oeuvre, si tant est que son estomac n'était pas complètement vide. Conséquence directe de l'agitation de la journée précédente, son maigre repas qu'il a commencé à vomir suite au balayage de la Wyverne et qu'il a fini de dégueuler après l'uppercut salvateur de l'autre folle. Son estomac creuse et le fait terriblement souffrir, couplé à la fatigue toujours bien présente, voilà bien longtemps que le chevalier errant n'avait pas été dans une situation aussi précaire. Et pourtant, nul complainte ou gémissement ne s'échappera de sa bouche. Car Dante n'est pas de ceux qui qui se plaignent d'un sort aussi funeste soit-il. Il aurait toutes les raisons nécessaires de pousser une gueulante. Mieux encore, il pourrait simplement se venger.
Il y pense un moment, les yeux rivés sur une Urzupha réduite à l'impuissance. Une proie facile, contrairement à hier soir où elle était la prédatrice. Il suffit d'un coup du sort, d'un peu de chance mine de rien et d'une bonne nuit de sommeil pour que les rôles s'inversent subitement. Pas grand-chose en somme. Une cible trop simple à son goût, même. D'autant plus que Dante a bien conscience que sa vie ne lui appartient pas, et il ne se permettrait pas de se mettre entre les deux amants. Ne jamais foutre son nez dans les histoires de deux personnes qui se sont déjà vues nu. C'est ce qu'on dit en tout cas. Dès lors, comme à son habitude, Dante se fait silencieux. Attendant que Nargulg, émergeant à son tour de sa torpeur, vienne répondre à sa question d'une manière ou d'une autre. L'Oni redoute déjà de devoir se trimballer l'autre casse-couilles pendant une partie du voyage, un juste retour des choses alors qu'hier encore il imposait à Nargulg de devoir s'occuper des victimes de quelques bandits.
Faisant quelques pas de son côté de la corniche, histoire de récupérer petit à petit le contrôle de ses jambes engourdies. Elles aussi, ses deux guiboles, lui font un mal de chien. Pendant que Nargulg pense à rattraper le temps perdu avec son alter ego féminin, grand bien lui fasse si vraiment ça ne peut pas attendre mais c'est un spectacle dont il n'a aucune envie d'être témoin. Dante en profite pour réfléchir à un plan. À ce qu'ils vont faire à présent et comment ils vont pouvoir rattraper le petit cortège composé uniquement de femmes, qui déambulent sans défenses dans les cimes mortelles des Rocheuses. En partant maintenant, même dans leurs états pitoyables, ils devraient pouvoir réduire rapidement la distance entre eux et le cortège. À la vitesse à laquelle elles se traînent, elles n'ont pas pu aller bien loin. Avec un peu de chance, il est possible qu'elles n'aient même pas bougé de la grotte où les deux tueurs les ont laissé pour la nuit. Encore maintenant, Dante est plus inquiet pour ces femmes dont il a pris la responsabilité, que pour son sort à lui. Néanmoins, c'est un fait qu'il n'avouera jamais.
Il dévie son attention en direction des deux barbares quand le mâle s'adresse à lui. Interrompu par l'autre dégénéré avant même qu'il n'ouvre la bouche pour répondre. Ces deux-là font vraiment la paire, il n'y a pas à dire. Et puisqu'il n'arrive pas à en placer une, faute à une Urzupha qui ne se fatigue jamais de ses propres bourdonnements incessants, l'Oni se contente d'hausser les épaules et d'un simple :
« Non. »
Les Orcs sont suffisamment rares à la surface pour qu'il n'en ait presque jamais croisé dans ses montagnes Shoumeiennes, pas avant Nargulg en tout cas. Et que les Huits soient bénis d'ailleurs. Il en a que deux avec lui et c'est déjà éreintant. Quoi que Nargulg n'est pas le problème dans l'équation. Mais Urzupha est la chieuse originelle, elle s'en sort très bien toute seule pour lui faire passer l'envie de côtoyer plus de ses congénères. Il pose à nouveau ses yeux sombres sur la folle dingue, encore subjugué par l'énergie qu'elle perd à crier toujours plus fort. Tout ça pour raconter des inepties et des conneries plus grosses qu'elle. Croisant les bras devant son buste, il penche légèrement la tête sur le côté. Malgré que la présence de l'Orc au féminin lui est particulièrement désagréable pour le moment, l'Oni ne cache pas son intérêt pour leur société barbare au sein des montagnes de la République. Même si Nargulg n'a visiblement aucune intention d'y retourner.
Il souffle bruyamment du nez, comme pour montrer son approbation aux prochaines paroles de son compagnon de route. Ainsi la décision est prise et les deux bourreaux continueront de massacrer les ennemis des Dieux pour satisfaire les Huits et mais aussi leurs pulsions sanguinaires. D'ailleurs, leur prochaine cible est déjà toute trouvée. Mais d'abord, il faut reprendre la route. Il tend le bras vers sa lame noire qui revient vers lui en voltigeant dans les airs, libérant Urzupha au passage. La configuration n'a pas changé, Dante ouvre la marche et Nargulg reste en arrière notamment pour surveiller sa folle de femme. Sait-on jamais, si elle tente encore une bêtise. Comme il s'en doutait, le trajet est terriblement long avec l'autre pénible qui lui casse les oreilles en continu. D'une surprise ou d'un sursaut, Urzupha n'aura ni l'un ni l'autre de la part du fanatique à cornes. Affamé, fatigué, assoiffé et passablement irrité. Dante n'est pas d'humeur à rire ou à s'amuser. En fait, il ne l'est jamais. Il se complait très bien dans son rôle d'aigri introverti. Grognant dans son coin, il tente simplement d'ignorer Urzupha pendant qu'il en a encore la patience. Et de toute évidence, puisqu'elle ne peut pas avoir une conversation avec Dante, elle se tourne vers le plus loquace des quatre compagnons de fortune. Pourtant, c'est bien Dante qui répondra le premier.
« Il ne sortira pas. »
C'est une affirmation. Dans leur intérêt à tous, même celui d'Urzupha, Kar'ath est très bien dans sa prison millénaire. Qu'il y reste pour l'éternité, juste châtiment pour avoir provoqué les Dieux. Le Démon se met à rire avant de faire résonner sa voix rauque pour formuler une réponse.
« Des tas, ma jolie Urzupha. Des tas de connards à massacrer. Mais pourquoi s'arrêter à cette région alors qu'on peut faire couler le sang partout où l'on passe ? Tu dois être plus ambitieuse ! Et crois-moi, quand tu me verras, tu me reconnaîtras. Imagine seulement. Je suis absolument tout ce que tu désires. »
« La ferme. »
Répugnant. Absolument abject. Urzupha lorgne sur son épée mais n'est pas capable de poser la main dessus. Dans le doute, il fera en sorte qu'elle s'approche le moins possible de Kar'ath. Cette connasse serait assez conne pour pactiser avec un Démon, quoi que Dante est mal placé pour parler. Et Kar'ath, est assez vicieux et malfaisant pour se servir du moindre prétexte qui lui permettrait d'enfin retrouver sa liberté. Dante n'a aucune idée de la portée des pouvoirs du Démon alors il s'en méfie comme la peste. Urzupha ne serait qu'un outil parmi tant d'autres et Kar'ath n'aura aucun scrupule à s'en servir dans son propre intérêt. Les voilà de retour à la planque, complètement vide. Et rien à se mettre sous la dent non plus, c'est sûrement ce qui va devenir le plus problématique dans les heures qui suivent. Pendant que Nargulg se soulage dans un coin, Dante commence à faire du repérage. Les yeux rivés sur le sol, à la recherche d'une trace de leur passage même si honnêtement, les chemins praticables sont peu nombreux et si elles ont suivi ses indications dans le cas où les deux tueurs ne survivraient pas à cette nuit, alors elles se dirigent tout droit vers Maël.
« Trouvons de quoi manger. »
Sur ces mots, l'Oni guide à nouveau le pas. Retrouver le cortège est une chose, mais ils n'ont plus d'eau et ils n'ont rien à se mettre sous la dent. Il va falloir se mettre en chasse, quitte à faire un léger détour. En descendant un peu en altitude, plus près des forêts environantes, ils devraient trouver du gibier. Dante est un chasseur né, bien qu'il n'ait pas l'odorat aussi développé que l'Orc, il n'en a pas besoin. Il sait reconnaître les traces d'un passage plus ou moins récent et peut reconnaître le type d'animal en question avec quelques indices. Alors tout le monde aura sa tâche à accomplir pour survivre. Dante s'occupe de trouver de quoi manger, Nargulg se démerdera pour trouver de l'eau potable et remplir les gourdes. Et Urzupha... ira faire chier quelqu'un d'autre, tant que c'est pas lui. Nargulg est chargé de surveiller sa dégénéré de partenaire Orc. L'Oni consacre donc toute sa matinée à cette petite partie de chasse. Revenant avec quelques prises appétissantes. Un Champa et deux Kokots. Un genre de poule mutante, bien plus grosse et bien plus agressive aussi. Il y a donc beaucoup plus à manger dessus. Comment est-ce qu'il a fait sans arc et flèches ? Secret professionnel. Je vous laisse imaginer Dante jeter le pommeau de son épée dans le crâne d'une poule pour l'assommer. Vous êtes pas loin de la vérité.
Il jette le maigre Champa à Urzupha, elle se démerdera pour préparer son repas. Les deux gros morceaux sont pour les tueurs de dragon. Passons les détails inutiles mais disons qu'après avoir sectionné la tête des deux grosses poules d'un bon coup de lame, il a fallu retirer péniblement les plumes et vider tout ce qui est à l'intérieur avant de foutre tout ça sur le feu pour enfin, pouvoir reprendre des forces. Enfin, peut-être que les Orcs ne sont pas du genre à s'arrêter pour quelques plumes et quelques boyaux.
« Tu comptes nous suivre encore longtemps ? Hier, tu voulais nous tuer. T’as déjà changé d’avis ? »
CENDRES
Il y pense un moment, les yeux rivés sur une Urzupha réduite à l'impuissance. Une proie facile, contrairement à hier soir où elle était la prédatrice. Il suffit d'un coup du sort, d'un peu de chance mine de rien et d'une bonne nuit de sommeil pour que les rôles s'inversent subitement. Pas grand-chose en somme. Une cible trop simple à son goût, même. D'autant plus que Dante a bien conscience que sa vie ne lui appartient pas, et il ne se permettrait pas de se mettre entre les deux amants. Ne jamais foutre son nez dans les histoires de deux personnes qui se sont déjà vues nu. C'est ce qu'on dit en tout cas. Dès lors, comme à son habitude, Dante se fait silencieux. Attendant que Nargulg, émergeant à son tour de sa torpeur, vienne répondre à sa question d'une manière ou d'une autre. L'Oni redoute déjà de devoir se trimballer l'autre casse-couilles pendant une partie du voyage, un juste retour des choses alors qu'hier encore il imposait à Nargulg de devoir s'occuper des victimes de quelques bandits.
Faisant quelques pas de son côté de la corniche, histoire de récupérer petit à petit le contrôle de ses jambes engourdies. Elles aussi, ses deux guiboles, lui font un mal de chien. Pendant que Nargulg pense à rattraper le temps perdu avec son alter ego féminin, grand bien lui fasse si vraiment ça ne peut pas attendre mais c'est un spectacle dont il n'a aucune envie d'être témoin. Dante en profite pour réfléchir à un plan. À ce qu'ils vont faire à présent et comment ils vont pouvoir rattraper le petit cortège composé uniquement de femmes, qui déambulent sans défenses dans les cimes mortelles des Rocheuses. En partant maintenant, même dans leurs états pitoyables, ils devraient pouvoir réduire rapidement la distance entre eux et le cortège. À la vitesse à laquelle elles se traînent, elles n'ont pas pu aller bien loin. Avec un peu de chance, il est possible qu'elles n'aient même pas bougé de la grotte où les deux tueurs les ont laissé pour la nuit. Encore maintenant, Dante est plus inquiet pour ces femmes dont il a pris la responsabilité, que pour son sort à lui. Néanmoins, c'est un fait qu'il n'avouera jamais.
Il dévie son attention en direction des deux barbares quand le mâle s'adresse à lui. Interrompu par l'autre dégénéré avant même qu'il n'ouvre la bouche pour répondre. Ces deux-là font vraiment la paire, il n'y a pas à dire. Et puisqu'il n'arrive pas à en placer une, faute à une Urzupha qui ne se fatigue jamais de ses propres bourdonnements incessants, l'Oni se contente d'hausser les épaules et d'un simple :
« Non. »
Les Orcs sont suffisamment rares à la surface pour qu'il n'en ait presque jamais croisé dans ses montagnes Shoumeiennes, pas avant Nargulg en tout cas. Et que les Huits soient bénis d'ailleurs. Il en a que deux avec lui et c'est déjà éreintant. Quoi que Nargulg n'est pas le problème dans l'équation. Mais Urzupha est la chieuse originelle, elle s'en sort très bien toute seule pour lui faire passer l'envie de côtoyer plus de ses congénères. Il pose à nouveau ses yeux sombres sur la folle dingue, encore subjugué par l'énergie qu'elle perd à crier toujours plus fort. Tout ça pour raconter des inepties et des conneries plus grosses qu'elle. Croisant les bras devant son buste, il penche légèrement la tête sur le côté. Malgré que la présence de l'Orc au féminin lui est particulièrement désagréable pour le moment, l'Oni ne cache pas son intérêt pour leur société barbare au sein des montagnes de la République. Même si Nargulg n'a visiblement aucune intention d'y retourner.
Il souffle bruyamment du nez, comme pour montrer son approbation aux prochaines paroles de son compagnon de route. Ainsi la décision est prise et les deux bourreaux continueront de massacrer les ennemis des Dieux pour satisfaire les Huits et mais aussi leurs pulsions sanguinaires. D'ailleurs, leur prochaine cible est déjà toute trouvée. Mais d'abord, il faut reprendre la route. Il tend le bras vers sa lame noire qui revient vers lui en voltigeant dans les airs, libérant Urzupha au passage. La configuration n'a pas changé, Dante ouvre la marche et Nargulg reste en arrière notamment pour surveiller sa folle de femme. Sait-on jamais, si elle tente encore une bêtise. Comme il s'en doutait, le trajet est terriblement long avec l'autre pénible qui lui casse les oreilles en continu. D'une surprise ou d'un sursaut, Urzupha n'aura ni l'un ni l'autre de la part du fanatique à cornes. Affamé, fatigué, assoiffé et passablement irrité. Dante n'est pas d'humeur à rire ou à s'amuser. En fait, il ne l'est jamais. Il se complait très bien dans son rôle d'aigri introverti. Grognant dans son coin, il tente simplement d'ignorer Urzupha pendant qu'il en a encore la patience. Et de toute évidence, puisqu'elle ne peut pas avoir une conversation avec Dante, elle se tourne vers le plus loquace des quatre compagnons de fortune. Pourtant, c'est bien Dante qui répondra le premier.
« Il ne sortira pas. »
C'est une affirmation. Dans leur intérêt à tous, même celui d'Urzupha, Kar'ath est très bien dans sa prison millénaire. Qu'il y reste pour l'éternité, juste châtiment pour avoir provoqué les Dieux. Le Démon se met à rire avant de faire résonner sa voix rauque pour formuler une réponse.
« Des tas, ma jolie Urzupha. Des tas de connards à massacrer. Mais pourquoi s'arrêter à cette région alors qu'on peut faire couler le sang partout où l'on passe ? Tu dois être plus ambitieuse ! Et crois-moi, quand tu me verras, tu me reconnaîtras. Imagine seulement. Je suis absolument tout ce que tu désires. »
« La ferme. »
Répugnant. Absolument abject. Urzupha lorgne sur son épée mais n'est pas capable de poser la main dessus. Dans le doute, il fera en sorte qu'elle s'approche le moins possible de Kar'ath. Cette connasse serait assez conne pour pactiser avec un Démon, quoi que Dante est mal placé pour parler. Et Kar'ath, est assez vicieux et malfaisant pour se servir du moindre prétexte qui lui permettrait d'enfin retrouver sa liberté. Dante n'a aucune idée de la portée des pouvoirs du Démon alors il s'en méfie comme la peste. Urzupha ne serait qu'un outil parmi tant d'autres et Kar'ath n'aura aucun scrupule à s'en servir dans son propre intérêt. Les voilà de retour à la planque, complètement vide. Et rien à se mettre sous la dent non plus, c'est sûrement ce qui va devenir le plus problématique dans les heures qui suivent. Pendant que Nargulg se soulage dans un coin, Dante commence à faire du repérage. Les yeux rivés sur le sol, à la recherche d'une trace de leur passage même si honnêtement, les chemins praticables sont peu nombreux et si elles ont suivi ses indications dans le cas où les deux tueurs ne survivraient pas à cette nuit, alors elles se dirigent tout droit vers Maël.
« Trouvons de quoi manger. »
Sur ces mots, l'Oni guide à nouveau le pas. Retrouver le cortège est une chose, mais ils n'ont plus d'eau et ils n'ont rien à se mettre sous la dent. Il va falloir se mettre en chasse, quitte à faire un léger détour. En descendant un peu en altitude, plus près des forêts environantes, ils devraient trouver du gibier. Dante est un chasseur né, bien qu'il n'ait pas l'odorat aussi développé que l'Orc, il n'en a pas besoin. Il sait reconnaître les traces d'un passage plus ou moins récent et peut reconnaître le type d'animal en question avec quelques indices. Alors tout le monde aura sa tâche à accomplir pour survivre. Dante s'occupe de trouver de quoi manger, Nargulg se démerdera pour trouver de l'eau potable et remplir les gourdes. Et Urzupha... ira faire chier quelqu'un d'autre, tant que c'est pas lui. Nargulg est chargé de surveiller sa dégénéré de partenaire Orc. L'Oni consacre donc toute sa matinée à cette petite partie de chasse. Revenant avec quelques prises appétissantes. Un Champa et deux Kokots. Un genre de poule mutante, bien plus grosse et bien plus agressive aussi. Il y a donc beaucoup plus à manger dessus. Comment est-ce qu'il a fait sans arc et flèches ? Secret professionnel. Je vous laisse imaginer Dante jeter le pommeau de son épée dans le crâne d'une poule pour l'assommer. Vous êtes pas loin de la vérité.
Il jette le maigre Champa à Urzupha, elle se démerdera pour préparer son repas. Les deux gros morceaux sont pour les tueurs de dragon. Passons les détails inutiles mais disons qu'après avoir sectionné la tête des deux grosses poules d'un bon coup de lame, il a fallu retirer péniblement les plumes et vider tout ce qui est à l'intérieur avant de foutre tout ça sur le feu pour enfin, pouvoir reprendre des forces. Enfin, peut-être que les Orcs ne sont pas du genre à s'arrêter pour quelques plumes et quelques boyaux.
« Tu comptes nous suivre encore longtemps ? Hier, tu voulais nous tuer. T’as déjà changé d’avis ? »
CENDRES
Invité
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Nargulg avait bien fait de se dégotter un Dante sauvage. Sans l'oni, sa course à l'ascension des monts aussi impitoyables qu'indomptables aurait tourné court. Le combat contre la wyverne en était la preuve, le Shoumei dévasté regorgeait de dangers et c'était pour le mieux, en un sens. En somme, l'orc était dans son élément. Malheureusement pour lui, les combats ça épuise et ça creuse l'appétit. Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, tous deux battaient de l'aile et si, au point du jour, il eut été difficile pour Nargulg de constater l'ampleur de l'usure intérieure. Ce ne fut qu'au regain d'activité d'une marche soutenue, que la douloureuse vérité éclata au grand jour : la fatigue pesait sur chacun de ses pas. À première vue, les soucis d'hier n'étaient plus que souvenirs inoubliables. Son bras gauche était restauré. Son nez disgracieux était de retour à sa place, et fonctionnel. Les multiples plaies, grandes effacées de ce jour, ne gâtaient plus sa chair cradingue. Néanmoins, il y avait un contrecoup et il devait le payer comptant. Ainsi, l'épuisement, sournois et indolore, l'assommait sans relâche. Mais, Nargulg - comme Dante soit dit en passant - n'était pas homme à se répandre en gémissements, et de toute façon, de telles lamentations ne trouveraient nulles oreilles où s'immiscer. Pourquoi cela ? Urzupha. Elle bavardait, ou braillait, allez demander son avis à l'oni parce que des deux guerriers, c'étaient bien ses tympans qui durent encaisser les insanités de cette femme-là, pour le plus grand bonheur du démoniaque Kar'ath. Néanmoins, il est à préciser que, si la sauvagesse n'était pas insensible aux dires de la "charmante" et maudite épée, elle n'oublierait pas de sitôt l'insuccès de la veille. La foucade d'Urzupha la dégénérée, eut raison d'une victoire qu'elle croyait naïvement acquise. Cette déconvenue étouffait, pour l'instant, et naturellement, toutes velléités d'acquérir la sombre lame. Cela étant, le démon et la dinde avaient les atomes suffisamment crochus, qu'elle considérait alors le prisonnier comme un compagnon de route. À l'adresse de l'épée, la demi-grise rétorqua du tac au tac, et avec entrain.
- Hé ! C'est pas à moi qu'il faut dire ça mon chou !
Elle pouffa gentiment, comme s'il était évident pour tous qu'elle s'adonnait aux boucheries et aux pillages, dans une dimension internationale. Pour être honnête... C'était flagrant. Ca clignotait en gros sur son front que, oui, Urzupha n'était pas net.
- J'devais passer par la République et le Reike avant d'te rencontrer. J'peux t'dire que j'en ai dessoudé une chiée en passant. Mais ici, c'est différent. Y a un peu de soldats, des bestioles aussi. Eeeeet, c'est tout. Rien de fou quoi.
Elle imposa une halte dans la conversation douteuse. À la recherche des bons mots selon toute vraisemblance. Elle était comme ça parfois. Dorénavant derrière l'oni, et devant l'autre orc, elle arpentait les rocheuses entre les deux géants, les paluches dissimulées derrière sa tête, les coudes grands écartés.
- Pisse - froid ! C'est ça je l'ai ! J'crois qu'il existe encore des pisse - froid sur une montagne, ché pas où. Mon p'tit doigt m'dis qu'c'est là que vous vous rendez, hein ? J'sais pas c'que vous allez y foutre, mais ça change rien qu'Shoumei est dans les choux pour perpète. Héhé.
Un cinglant "Ta gueule." Que Nargulg, dit" le renfrogné", désirait cracher à la timbrée enjouée. Celle - là n'obtint pour réponse, que le souffle d'une brise sans arôme. Un immense vent de solitude d'abord et, éventuellement, une réplique de Kar'ath. Il n'y avait plus que lui pour tenir compagnie à Urzupha. Jusqu'à ce que soudainement, ces futiles jacasseries flottantes tantôt entre grivoiserie et éloge du macabre, se turent. Merci Dante, de rappeler à tous que la graille importait plus que tout. La graille résoudrait les deux tiers des soucis de la journée. Quoi ? Retrouver les demoiselles en détresse ? Attendez, vous ne croyez tout de même pas que ce sera difficile ? Qu'est-ce qui pourrait l'être après l'épisode du lézard volant ? Chuuut, ils n'étaient pas au bout de leur peine, promis.
Dante s'en alla pister et chasser le gibier à l'ombre des perchis de la région, et d'un coup de flair éclair, notre Nargulg distingua une multitude de proies alléchantes. Il en avait l'eau à la bouche. Parfait ! L'eau ! C'était sa nouvelle priorité, tant on ne survit pas sans l'or bleu. Kahl ne vous dirait pas autre chose. Quoique. Il était davantage porté sur la glace cet ogre-ci. Ouais. Urzupha avait tout intérêt à éclairer la lanterne de Nargulg à propos du grand bleu, et compère de crime de sang. Plus tard, quand il sera disposé à parler. C'est-à-dire, pendant le repas.
L'altitude étant moindre qu'au réveil, l'impératif de la survie le guidait entre roches et broussailles clairsemées. Les conifères typiques de la région faisaient leur habituelle démonstration de grandeur, et les deux orcs franchirent les arceaux ombrageux de ces arbres, qui tenaient la dragée haute au défi du froid. La présence de l'hiver n'était pas encore assurée, qu'il pressentait tous les risques encouru à déambuler dans les parages par temps de grand froid. Quant à elle, ouais, celle-là. Urzupha. Elle jongla avec deux, puis trois pommes de pin, fauchées ici ou là. Temporairement pour sûr. Sans Dante et Kar'ath à emmerder, il appartenait à Nargulg d'endurer la tempête de la pipelette. Elle jactait, pas lui. Pour tout dire, il était à deux doigts de la tabasser tant, il était tendu par la faim. Quand on sait qu'il l'était de base, je vous laisse imaginer la gueule qu'il tirait. Bien consciente de l'orthorexie qui gangrénait à merveille, et continuellement le mâle, elle exploita cette faille pour laisser libre cours à son hyperactivité. À deux doigts de l'exécuter la grognasse, et pourtant, que pouic. Le monomaniaque, et mauvais personnage, n'était plus qu'un pantin de la faim. Quand, il ouït l'écoulement d'un cours d'eau battant la roche, son avancée gagnait à accélérer la course au répit. Ce n'était que cela, un répit. Un fin mirage pour tromper la faim. Les genoux raclant la berge, il plongea son outre dans l'eau, la remplit afin de la siffler aussitôt. Une fois. Deux fois. Non, trois fois. Saturé de flotte, Nargulg enfonça une fois de plus le récipient, sous les railleries d'une Urzupha aux anges.
- Eh bé ! Tu vas pisser toutes les cinq minutes mon gros. Burguk t'a vraiment pourri la cervelle avec ces conneries.
- Silence...
- J'veux dire ! Nous les orcs on n'a pas besoin d'se faire un sang d'encre dans ce domaine. On est balèze. C'tout. Faut laisser ça aux surfaciens. Pas dit que ça les sauve m'enfin.
On ne saurait donner tort à la méchante. La quête de l'excellence guerrière, ce jusqu'au-boutisme particulier ne laissant rien au hasard en la matière, il y avait fort à parier que sans cette troublante discipline, le meurtrier n'en serait pas faible pour autant. La race des orcs portait bien des défauts, et la puissance physique, certainement, était sa seule qualité. Urzupha affirmait cela, en sachant pertinemment que Nargulg n'entendrait pas raison.
Ensuite, l'un comme l'autre s'empressèrent de gorger les gourdes et les outres du précieux or bleu, duquel était renvoyé leur sale portrait respectif. Trop de sang séché et autre salissures, enjoignaient les deux monstres à nettoyer tout ça. N'ayant pas une éternité devant eux, cette toilette minimaliste débarbouillait leurs faces, décrassait les mains et avant - bras dans le plus grand des calmes, étrangement. Dès lors que la petite tâche était accomplie, ils pensaient retrouver Dante séance tenante. Ou pas. Zieutant par-dessus le courant cristallin, qui zigzaguait, bordé de verdure peu aventureuse, c'était tout le paysage environnant qu'ils passèrent au peigne fin. Pourquoi ? Parce qu'il y avait plus à récolter que de la flotte. Lui était en quête de champignons, et elle de baies. Pas n'importe quelles baies, des prunelles. Le hic, c'était qu'en l'état, on ne saurait en faire grand-chose. C'est mangeable, bien sûr, pas terrible tel quel, certes. Cependant, les prunelles se révèlent véritablement au palais quand vient le moment d'en faire quelque chose. Urzupha pensait à de la liqueur, chose infaisable actuellement. Mais, héhé, madame tint en sa possession,et à l'abri des regards, une pleine bouteille de liqueur... De prunelle ! Nargulg ne l'interrogea pas sur l'(in) utilité d'une telle initiative. Il avait la réponse. "On sait jamais, si j'tombe sur un type qui peut en faire !" On sait jamais. Ouais. Après les "J'vais t'buter !" C'étaient les "On sait jamais" qu'on entendait fréquemment sortir de sa gueule.
Alors elle conserva ses petites baies dans un bocal prévu à cet effet, tandis que monsieur rafla des chanterelles à l'instar d'un dératé. Quelques pleurotes et... Bon on va pas tous les faire non plus. Ça se déguste bien cuit et c'est le principal. Le géant ramolli planqua le tout dans un sac dédié à l'usage, et ni une ni deux, ils filèrent pour trouver Dante. En voilà une saine façon d'éclipser la matinée. Place à la suite.
Deux kokots et un champa donc. Nargulg se fendit d'un petit commentaire.
- Ça y est, le Reike introduit ces bestioles en Shoumei. La fin est proche.
Il rendit une des gourdes remplies à ras bord, à son propriétaire légitime, à savoir : Dante. Ah ce bon Dante avait déjà tout préparé. Les kokots étaient déjà étripées, et sur le feu, qu'instantanément l'orc farfouilla dans son bazar. Mince, il n'y avait plus tellement d'assaisonnement en réserve. Urzupha en possédait, hélas, elle fixait le champa crevé, le truc avait la peau sur les os, ou presque.
- C'est quoi cette merde ?! J'suis là, cool et tout tu vois. On s'vanne un peu pour la blague, ça déconne bien avec Kar'ath. J'allais te proposer de boire autre chose que d'l'eau, tranquille, peinard quoi.
Elle releva les yeux sur l'oni, contrariée à en hausser la voix. Une gestuelle agressive agrémentait son discours véhément.
- J'suis pas là pour tes beaux yeux, monsieur le coincé du cul va ! Et commence pas à faire genre "Heu.. Oui t'as essayé de nous tuer c'est pas bien nananinanana..." T'étais pas le dernier à aimer ça ! Va te faire foutre Dante ! VA TE FAIRE FOUTRE !! J't'emmerde toi et tes questions ! T'es qui HEIN ?! T'es quoi HEIN ?! Surfachien de-
- Ta gueule ! Si ce n'est pas lui qui t'en colle une, c'est moi qui te fais sauter les dents.
- Tsss... C'est bon... J'arrête.
Un coup de semonce de la part du cuistot verdâtre, et la furie changea de ton, tournant la page du coup de sang. Le plus con dans cette anecdote, était qu'elle ne crevait pas la dalle, - contrairement aux deux autres - et je vous assure que ce champa maigrichon comblerait son petit creux. En plus des champignons. Passons sur le fait que Nargulg fixait la bouffe, sans cligner des yeux. Passons aussi l'instant dégustation de liqueur par Urzupha, succédant à l'étripage du petit cadeau de Dante. Et non, on n'avalait pas le pelage et les boyaux chez ces orcs là. Pas plus qu'on ne dévorait la viande crue, c'était un coup à choper des vers, s'il vous plaît, un peu de tenue.
Vint le moment fatidique, de passer à table et bon sang, ça faisait un bien fou. Un modeste régal de chair tendre et de végétaux s'enquillaient dans les tréfonds de Nargulg, pour en atteindre l'estomac-sanctuaire. Enfin ! Le cul par terre, au milieu de nul part comme d'habitude, il observa le feu qui persistait à accompagner la petite troupe dans cette pause repas des plus exquises. Exquise parce qu'invoquée à cor et à cri, cela va sans dire. Le mâle, repu, détacha ses mirettes des flammes et cibla en toute neutralité Urzupha.
- Kahl. Qu'est-ce qu'il branle au Reike ? Et d'où tu le connais ?
- Hmm ?
La femme mastiquait un os du champa, extrêmement dépouillé de sa substance. D'un mouvement de bras fluide, le reste de l'animal voltigea jusqu'aux profondes racines d'un pin argenté.
- C'est comme j'ai dit à Kar'ath plus tôt, j'suis passé par le Reike avant d'arriver là. Je l'ai croisé dans une taverne. On peut pas le louper et il connaissait déjà mon nom haha ! J'sais pas c'que tu lui as raconté sur moi-
- Abrège !
- Ça va, j'y viens ! Il s'est engagé dans l'armée impériale au service de chépaqui Fictilem. Ça te dit quelque chose ?
- J'ai une gueule à connaître les huiles de l'Empire ? Pesta-t-il.
- Bahahaha ! Tu devrais faire un effort sérieux.
Relevée, elle s'essaya à l'imitation de Nargulg et mima un étranglement fait au vent, faussement sévère.
- Je dois tuer tous les ennemis des Titans. Moi, Nargulg, je suis impitoyaaableuh !
L'esclaffement attrapa Urzupha à la gorge, après coup. Elle avait bien résumé le bonhomme faut dire. Au tour de l'orc au masculin de se lever, et d'approcher paisiblement celle qui s'adressait désormais à l'oni.
- Je l'ai bien fait nan ?
Soudain, un rictus assombrissait la mine du mâle gavé, lequel apposa une paume à même l'épaule de l'ahurie.
- On part pour Célestia, avec Dante. Si j'apprends, ou vois, que tu emmerdes, tortures et massacres les gens de ce pays. Je te tuerai. Dante, te tuera. Le Nouvel Ordre te tuera. Compris ?
Elle acquiesça sous la menace, et Nargulg de poursuivre.
- Tant que nous sommes dans la région, tu oublies le Bas - parlé. À Célestia, tu seras muette comme une tombe. Pas un bruit, pas un mot, et plus important, pas d'écarts. Compris ?
Même chose, elle hocha de la tête en signe d'approbation. De soumission plus que d'approbation en vérité. L'atmosphère était volontairement plus lourde, car Urzupha ne comprenait que deux langages, la force puis la menace. Dans cet ordre.
- Nous allons partir à la recherche de femmes, qu'on escortait hier. On va s'assurer que rien de mal ne leur soit arrivée. Quand on les retrouvera, qu'est-ce que tu leur diras ?
- Rien.
- Qu'est-ce que tu leur feras ?
- Rien. Répéta-t'elle, dépitée.
- Bien. On va peut - être pouvoir faire quelque chose de toi. Nous avons des tas de cibles à abattre aujourd'hui, tu pourras te défouler.
Un zeste de joie élargissait les lèvres de la folle. Tant la promesse d'une boucherie contrebalançait les obscurs avertissements du bonhomme. Ce dernier dirigea finalement son attention sur l'oni.
- On y va ?
Après tout, plus rien ne les retenait ici. Et sans le cornu pour avancer, ils n'iraient pas bien loin. Quelques nuages assombrirent le jour azuré, quand sonna l'heure du départ express. L'ordre de marche ? Identique depuis le premier jour. La progression ? Soutenue. Sans menace pour atténuer la course au sauvetage, ils croisèrent en moins d'une heure un corps inanimé, assit et adossé au tronc d'un arbre. La troupe féminine abandonna celle qu'il transportait hier encore. "Abandonner" est un bien grand mot. Elle passa de vie à trépas durant le trajet, autrement elles ne l'auraient pas dérobé à la dernière cachette de l'oni. Elles firent tout leur possible, les esquintées, on n'allait pas leur en vouloir. À moins que Dante, fût du genre à livrer quelques prières pour accompagner la défunte, ils brusquèrent le pas. Le scénario entra dans une boucle d'autant plus sombre que c'était pas moins de deux cadavres féminins qu'ils dévisageaient, couchés en bordure du sentier de mère nature. Toujours la même rengaine, la fatigue comme crépuscule de l'existence. La mort pour délivrance. Puis au beau milieu de l'après-midi, dessous une voûte céleste radicalement noirçie sous les coup de boutoir d'une météo changeante. Se dégageait la vision de créatures tantôt épeurées, tantôt silencieuses, avançant avec toute la difficulté du monde. C'était elles, les rescapées de l'horreur. C'était elles, les geignardes presque fantomatiques. Courage, Mael n'était plus très loin. Parce qu'elles n'oseraient pas pousser l'effort jusqu'à Célestia, ce serait trop leur demander, que d'être aussi fortes qu'eux trois. Les malheureuses, la résilience était leur unique porte de sortie dans ce monde de dégénérés finit à la pisse.
Des cris d'effroi, d'abord. Dante, Urzupha et Nargulg empestaient la mort, rien de nouveau sous le Soleil couvert me direz-vous. Parce qu'ils étaient répugnants à en crever, la confiance ne régnait pas, ça non. Qui oserait leur reprocher cela, à ces femmes ? Ces sauveurs-là étaient des monstres, que la bonne moralité ne parviendrait jamais à dissimuler. De jour comme de nuit, la puanteur propre aux sauvages souillait ces têtes brûlées.
À présent cher lecteur, je laisse la suite du programme à un autre. À la prochaine !
- Hé ! C'est pas à moi qu'il faut dire ça mon chou !
Elle pouffa gentiment, comme s'il était évident pour tous qu'elle s'adonnait aux boucheries et aux pillages, dans une dimension internationale. Pour être honnête... C'était flagrant. Ca clignotait en gros sur son front que, oui, Urzupha n'était pas net.
- J'devais passer par la République et le Reike avant d'te rencontrer. J'peux t'dire que j'en ai dessoudé une chiée en passant. Mais ici, c'est différent. Y a un peu de soldats, des bestioles aussi. Eeeeet, c'est tout. Rien de fou quoi.
Elle imposa une halte dans la conversation douteuse. À la recherche des bons mots selon toute vraisemblance. Elle était comme ça parfois. Dorénavant derrière l'oni, et devant l'autre orc, elle arpentait les rocheuses entre les deux géants, les paluches dissimulées derrière sa tête, les coudes grands écartés.
- Pisse - froid ! C'est ça je l'ai ! J'crois qu'il existe encore des pisse - froid sur une montagne, ché pas où. Mon p'tit doigt m'dis qu'c'est là que vous vous rendez, hein ? J'sais pas c'que vous allez y foutre, mais ça change rien qu'Shoumei est dans les choux pour perpète. Héhé.
Un cinglant "Ta gueule." Que Nargulg, dit" le renfrogné", désirait cracher à la timbrée enjouée. Celle - là n'obtint pour réponse, que le souffle d'une brise sans arôme. Un immense vent de solitude d'abord et, éventuellement, une réplique de Kar'ath. Il n'y avait plus que lui pour tenir compagnie à Urzupha. Jusqu'à ce que soudainement, ces futiles jacasseries flottantes tantôt entre grivoiserie et éloge du macabre, se turent. Merci Dante, de rappeler à tous que la graille importait plus que tout. La graille résoudrait les deux tiers des soucis de la journée. Quoi ? Retrouver les demoiselles en détresse ? Attendez, vous ne croyez tout de même pas que ce sera difficile ? Qu'est-ce qui pourrait l'être après l'épisode du lézard volant ? Chuuut, ils n'étaient pas au bout de leur peine, promis.
Dante s'en alla pister et chasser le gibier à l'ombre des perchis de la région, et d'un coup de flair éclair, notre Nargulg distingua une multitude de proies alléchantes. Il en avait l'eau à la bouche. Parfait ! L'eau ! C'était sa nouvelle priorité, tant on ne survit pas sans l'or bleu. Kahl ne vous dirait pas autre chose. Quoique. Il était davantage porté sur la glace cet ogre-ci. Ouais. Urzupha avait tout intérêt à éclairer la lanterne de Nargulg à propos du grand bleu, et compère de crime de sang. Plus tard, quand il sera disposé à parler. C'est-à-dire, pendant le repas.
L'altitude étant moindre qu'au réveil, l'impératif de la survie le guidait entre roches et broussailles clairsemées. Les conifères typiques de la région faisaient leur habituelle démonstration de grandeur, et les deux orcs franchirent les arceaux ombrageux de ces arbres, qui tenaient la dragée haute au défi du froid. La présence de l'hiver n'était pas encore assurée, qu'il pressentait tous les risques encouru à déambuler dans les parages par temps de grand froid. Quant à elle, ouais, celle-là. Urzupha. Elle jongla avec deux, puis trois pommes de pin, fauchées ici ou là. Temporairement pour sûr. Sans Dante et Kar'ath à emmerder, il appartenait à Nargulg d'endurer la tempête de la pipelette. Elle jactait, pas lui. Pour tout dire, il était à deux doigts de la tabasser tant, il était tendu par la faim. Quand on sait qu'il l'était de base, je vous laisse imaginer la gueule qu'il tirait. Bien consciente de l'orthorexie qui gangrénait à merveille, et continuellement le mâle, elle exploita cette faille pour laisser libre cours à son hyperactivité. À deux doigts de l'exécuter la grognasse, et pourtant, que pouic. Le monomaniaque, et mauvais personnage, n'était plus qu'un pantin de la faim. Quand, il ouït l'écoulement d'un cours d'eau battant la roche, son avancée gagnait à accélérer la course au répit. Ce n'était que cela, un répit. Un fin mirage pour tromper la faim. Les genoux raclant la berge, il plongea son outre dans l'eau, la remplit afin de la siffler aussitôt. Une fois. Deux fois. Non, trois fois. Saturé de flotte, Nargulg enfonça une fois de plus le récipient, sous les railleries d'une Urzupha aux anges.
- Eh bé ! Tu vas pisser toutes les cinq minutes mon gros. Burguk t'a vraiment pourri la cervelle avec ces conneries.
- Silence...
- J'veux dire ! Nous les orcs on n'a pas besoin d'se faire un sang d'encre dans ce domaine. On est balèze. C'tout. Faut laisser ça aux surfaciens. Pas dit que ça les sauve m'enfin.
On ne saurait donner tort à la méchante. La quête de l'excellence guerrière, ce jusqu'au-boutisme particulier ne laissant rien au hasard en la matière, il y avait fort à parier que sans cette troublante discipline, le meurtrier n'en serait pas faible pour autant. La race des orcs portait bien des défauts, et la puissance physique, certainement, était sa seule qualité. Urzupha affirmait cela, en sachant pertinemment que Nargulg n'entendrait pas raison.
Ensuite, l'un comme l'autre s'empressèrent de gorger les gourdes et les outres du précieux or bleu, duquel était renvoyé leur sale portrait respectif. Trop de sang séché et autre salissures, enjoignaient les deux monstres à nettoyer tout ça. N'ayant pas une éternité devant eux, cette toilette minimaliste débarbouillait leurs faces, décrassait les mains et avant - bras dans le plus grand des calmes, étrangement. Dès lors que la petite tâche était accomplie, ils pensaient retrouver Dante séance tenante. Ou pas. Zieutant par-dessus le courant cristallin, qui zigzaguait, bordé de verdure peu aventureuse, c'était tout le paysage environnant qu'ils passèrent au peigne fin. Pourquoi ? Parce qu'il y avait plus à récolter que de la flotte. Lui était en quête de champignons, et elle de baies. Pas n'importe quelles baies, des prunelles. Le hic, c'était qu'en l'état, on ne saurait en faire grand-chose. C'est mangeable, bien sûr, pas terrible tel quel, certes. Cependant, les prunelles se révèlent véritablement au palais quand vient le moment d'en faire quelque chose. Urzupha pensait à de la liqueur, chose infaisable actuellement. Mais, héhé, madame tint en sa possession,et à l'abri des regards, une pleine bouteille de liqueur... De prunelle ! Nargulg ne l'interrogea pas sur l'(in) utilité d'une telle initiative. Il avait la réponse. "On sait jamais, si j'tombe sur un type qui peut en faire !" On sait jamais. Ouais. Après les "J'vais t'buter !" C'étaient les "On sait jamais" qu'on entendait fréquemment sortir de sa gueule.
Alors elle conserva ses petites baies dans un bocal prévu à cet effet, tandis que monsieur rafla des chanterelles à l'instar d'un dératé. Quelques pleurotes et... Bon on va pas tous les faire non plus. Ça se déguste bien cuit et c'est le principal. Le géant ramolli planqua le tout dans un sac dédié à l'usage, et ni une ni deux, ils filèrent pour trouver Dante. En voilà une saine façon d'éclipser la matinée. Place à la suite.
Deux kokots et un champa donc. Nargulg se fendit d'un petit commentaire.
- Ça y est, le Reike introduit ces bestioles en Shoumei. La fin est proche.
Il rendit une des gourdes remplies à ras bord, à son propriétaire légitime, à savoir : Dante. Ah ce bon Dante avait déjà tout préparé. Les kokots étaient déjà étripées, et sur le feu, qu'instantanément l'orc farfouilla dans son bazar. Mince, il n'y avait plus tellement d'assaisonnement en réserve. Urzupha en possédait, hélas, elle fixait le champa crevé, le truc avait la peau sur les os, ou presque.
- C'est quoi cette merde ?! J'suis là, cool et tout tu vois. On s'vanne un peu pour la blague, ça déconne bien avec Kar'ath. J'allais te proposer de boire autre chose que d'l'eau, tranquille, peinard quoi.
Elle releva les yeux sur l'oni, contrariée à en hausser la voix. Une gestuelle agressive agrémentait son discours véhément.
- J'suis pas là pour tes beaux yeux, monsieur le coincé du cul va ! Et commence pas à faire genre "Heu.. Oui t'as essayé de nous tuer c'est pas bien nananinanana..." T'étais pas le dernier à aimer ça ! Va te faire foutre Dante ! VA TE FAIRE FOUTRE !! J't'emmerde toi et tes questions ! T'es qui HEIN ?! T'es quoi HEIN ?! Surfachien de-
- Ta gueule ! Si ce n'est pas lui qui t'en colle une, c'est moi qui te fais sauter les dents.
- Tsss... C'est bon... J'arrête.
Un coup de semonce de la part du cuistot verdâtre, et la furie changea de ton, tournant la page du coup de sang. Le plus con dans cette anecdote, était qu'elle ne crevait pas la dalle, - contrairement aux deux autres - et je vous assure que ce champa maigrichon comblerait son petit creux. En plus des champignons. Passons sur le fait que Nargulg fixait la bouffe, sans cligner des yeux. Passons aussi l'instant dégustation de liqueur par Urzupha, succédant à l'étripage du petit cadeau de Dante. Et non, on n'avalait pas le pelage et les boyaux chez ces orcs là. Pas plus qu'on ne dévorait la viande crue, c'était un coup à choper des vers, s'il vous plaît, un peu de tenue.
Vint le moment fatidique, de passer à table et bon sang, ça faisait un bien fou. Un modeste régal de chair tendre et de végétaux s'enquillaient dans les tréfonds de Nargulg, pour en atteindre l'estomac-sanctuaire. Enfin ! Le cul par terre, au milieu de nul part comme d'habitude, il observa le feu qui persistait à accompagner la petite troupe dans cette pause repas des plus exquises. Exquise parce qu'invoquée à cor et à cri, cela va sans dire. Le mâle, repu, détacha ses mirettes des flammes et cibla en toute neutralité Urzupha.
- Kahl. Qu'est-ce qu'il branle au Reike ? Et d'où tu le connais ?
- Hmm ?
La femme mastiquait un os du champa, extrêmement dépouillé de sa substance. D'un mouvement de bras fluide, le reste de l'animal voltigea jusqu'aux profondes racines d'un pin argenté.
- C'est comme j'ai dit à Kar'ath plus tôt, j'suis passé par le Reike avant d'arriver là. Je l'ai croisé dans une taverne. On peut pas le louper et il connaissait déjà mon nom haha ! J'sais pas c'que tu lui as raconté sur moi-
- Abrège !
- Ça va, j'y viens ! Il s'est engagé dans l'armée impériale au service de chépaqui Fictilem. Ça te dit quelque chose ?
- J'ai une gueule à connaître les huiles de l'Empire ? Pesta-t-il.
- Bahahaha ! Tu devrais faire un effort sérieux.
Relevée, elle s'essaya à l'imitation de Nargulg et mima un étranglement fait au vent, faussement sévère.
- Je dois tuer tous les ennemis des Titans. Moi, Nargulg, je suis impitoyaaableuh !
L'esclaffement attrapa Urzupha à la gorge, après coup. Elle avait bien résumé le bonhomme faut dire. Au tour de l'orc au masculin de se lever, et d'approcher paisiblement celle qui s'adressait désormais à l'oni.
- Je l'ai bien fait nan ?
Soudain, un rictus assombrissait la mine du mâle gavé, lequel apposa une paume à même l'épaule de l'ahurie.
- On part pour Célestia, avec Dante. Si j'apprends, ou vois, que tu emmerdes, tortures et massacres les gens de ce pays. Je te tuerai. Dante, te tuera. Le Nouvel Ordre te tuera. Compris ?
Elle acquiesça sous la menace, et Nargulg de poursuivre.
- Tant que nous sommes dans la région, tu oublies le Bas - parlé. À Célestia, tu seras muette comme une tombe. Pas un bruit, pas un mot, et plus important, pas d'écarts. Compris ?
Même chose, elle hocha de la tête en signe d'approbation. De soumission plus que d'approbation en vérité. L'atmosphère était volontairement plus lourde, car Urzupha ne comprenait que deux langages, la force puis la menace. Dans cet ordre.
- Nous allons partir à la recherche de femmes, qu'on escortait hier. On va s'assurer que rien de mal ne leur soit arrivée. Quand on les retrouvera, qu'est-ce que tu leur diras ?
- Rien.
- Qu'est-ce que tu leur feras ?
- Rien. Répéta-t'elle, dépitée.
- Bien. On va peut - être pouvoir faire quelque chose de toi. Nous avons des tas de cibles à abattre aujourd'hui, tu pourras te défouler.
Un zeste de joie élargissait les lèvres de la folle. Tant la promesse d'une boucherie contrebalançait les obscurs avertissements du bonhomme. Ce dernier dirigea finalement son attention sur l'oni.
- On y va ?
Après tout, plus rien ne les retenait ici. Et sans le cornu pour avancer, ils n'iraient pas bien loin. Quelques nuages assombrirent le jour azuré, quand sonna l'heure du départ express. L'ordre de marche ? Identique depuis le premier jour. La progression ? Soutenue. Sans menace pour atténuer la course au sauvetage, ils croisèrent en moins d'une heure un corps inanimé, assit et adossé au tronc d'un arbre. La troupe féminine abandonna celle qu'il transportait hier encore. "Abandonner" est un bien grand mot. Elle passa de vie à trépas durant le trajet, autrement elles ne l'auraient pas dérobé à la dernière cachette de l'oni. Elles firent tout leur possible, les esquintées, on n'allait pas leur en vouloir. À moins que Dante, fût du genre à livrer quelques prières pour accompagner la défunte, ils brusquèrent le pas. Le scénario entra dans une boucle d'autant plus sombre que c'était pas moins de deux cadavres féminins qu'ils dévisageaient, couchés en bordure du sentier de mère nature. Toujours la même rengaine, la fatigue comme crépuscule de l'existence. La mort pour délivrance. Puis au beau milieu de l'après-midi, dessous une voûte céleste radicalement noirçie sous les coup de boutoir d'une météo changeante. Se dégageait la vision de créatures tantôt épeurées, tantôt silencieuses, avançant avec toute la difficulté du monde. C'était elles, les rescapées de l'horreur. C'était elles, les geignardes presque fantomatiques. Courage, Mael n'était plus très loin. Parce qu'elles n'oseraient pas pousser l'effort jusqu'à Célestia, ce serait trop leur demander, que d'être aussi fortes qu'eux trois. Les malheureuses, la résilience était leur unique porte de sortie dans ce monde de dégénérés finit à la pisse.
Des cris d'effroi, d'abord. Dante, Urzupha et Nargulg empestaient la mort, rien de nouveau sous le Soleil couvert me direz-vous. Parce qu'ils étaient répugnants à en crever, la confiance ne régnait pas, ça non. Qui oserait leur reprocher cela, à ces femmes ? Ces sauveurs-là étaient des monstres, que la bonne moralité ne parviendrait jamais à dissimuler. De jour comme de nuit, la puanteur propre aux sauvages souillait ces têtes brûlées.
À présent cher lecteur, je laisse la suite du programme à un autre. À la prochaine !
Invité
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Dévotion
Dévotion
Effectivement, faut croire que le Reike a déjà commencé à s'installer confortablement dans la région comme on peut en juger par la présence de certaines espèces qui habituellement sont assez rares dans cette région du Sekai. À moins que ce soit une conséquence directe de l'explosion d'énergie qui a ravagé Bénédictus sur des kilomètres en faisant paniquer la faune environnante. Les deux théories sont sûrement assez vraies mais au final, les deux bourreaux s'en cognent complètement de savoir pourquoi il y a ce genre de gibier dans le secteur. Ou pourquoi ils sont tombés sur une Wyverne particulièrement agressive. Les premiers leur permettent de se remplir une panse bien vide qui cri famine et la gros lézard leur a offert un défi à la hauteur de leurs espérances. Plus encore même. C'est quand même dommage de ne pas avoir eu le temps de s'en occuper pour le dépecer et récupérer un trophée plus important qu'une simple corne ou une dent. Pas que Dante ait beaucoup de monde à qui s'en vanter mais exposer une tête de dragon dans son armoire à trophée, faut bien avouer que ça claque. Tant pis, ils auront d'autres occasions à n'en point douter.
Impassible, l'Oni ne réagit pas tant que ça à l'excès de colère de Urzupha qui pourtant, devrait le remercier d'avoir ramené un Champa pour sa gueule de dégénérée. Il aurait pu simplement l'ignorer et la laisser se démerder pour trouver son repas. Honnêtement, il aurait dû. Trop bon, trop con cet Oni là. N'allons pas jusqu'à dire que c'est une marque d'attention envers sa nouvelle compagne de route, mais il respecte sa force et le combat qu'elle lui a offert hier. C'est d'ailleurs le point commun de tous les protagonistes réunis ici présent, que ce soit du duo d'Orc ou du duo à cornes, tous respectent la force comme psychologie absolue. Car pour sûr, les faibles n'ont pas leur place au sein de cette joyeuse troupe de tueurs sanguinaires. Bref, elle cogne fort et en plus elle a réussi à le coucher alors que ce n'était pas arrivé depuis longtemps. Depuis... Seagan. Merde, pas depuis si longtemps finalement. Il se ramollit le bougre.
Bref, le repas se passe étonnament bien. Peut-être parce que Urzupha est trop occupé à grignoter son lapin maigrichon plutôt qu'à casser les couilles à son auditoire. Dante ne va pas s'en plaindre, le silence est une vertu pour lui qui malheureusement, va se faire de plus en plus rare. Il ne laisse pas une miette de son repas, jusqu'à faire craqueler le cartilage sous la dent. Honnêtement, il pourrait en avaler encore deux au moins aussi gros pour être complètement rassasié. Faut voir la corpulence de la bête, faut le nourrir ce bonhomme. Mais ça sera suffisant pour reprendre des forces et continuer d'arpenter les chemins escarpés des Rôcheuses jusqu'à ce soir. Kahl. C'est un nom qu'il a cru entendre, hier en plein milieu de l'agitation provoquée par Urzupha. Il y a aussi "chépaqui Fictilem". Drôle de prénom, pense Dante, mais qui est-il pour juger ? Quelques Reikois sans importance pour lui, ces chiens de l'Empire sont partout décidément et tant qu'ils ne se mettent pas en travers de sa route alors il n'a aucune raison de s'y intéresser plus que ça. Il expulse brusquement un petit filament d'air de ses deux grosses narines. Presque synonyme d'un rire, pour ce cornu introverti. Passablement amusé par l'imitation de Nargulg proposé par Urzupha. Putain, si même lui commence à rigoler de ses conneries c'est le début de la fin.
Naturellement, ça amuse beaucoup moins le principal concerné qui en profite pour passer un savon à sa femme. Ex-femme ? Aucune putain d'idée de comment ça se passe chez les Orcs. Mais le tueur verdâtre fait bien de clarifier la situation, il est hors de question que Urzupha devienne incontrôlable sur la terre sainte des Dieux pendant ce pèlerinage qu'ils entreprennent. Si ça devait arriver, Dante sera impitoyable avec elle et cette fois il ne sera pas diminué par un précédent affrontement. Il ne sera plus aussi aisé pour elle de se débarrasser du colosse au bras difforme. Maintenant qu'Urzupha est bien docile, les tueurs peuvent reprendre la route dans de bonnes conditions. Acquiesçant à la remarque de Nargulg, il reprend la tête de la petite équipe.
« Allons-y. »
L'objectif est très clair, retrouver le convoi dont ils avaient la charge hier encore, mettre en sécurité tout ce beau monde avant d'aller faire un énième massacre chez quelques bandits à la con. La journée va être longue et mouvementée, comme la précédente et celle encore avant. On s'habitue vite à ce train de vie déroutant.
Dante s'arrête quelques secondes devant le premier cadavre qui apparaît sur leur route. C'était prévisible mais le chevalier errant préférait faire preuve d'optimisme quant à leurs chances de toutes s'en sortir. Quelle naïveté. D'autant plus que les deux colosses ne sont plus là pour assurer leur protection. Alors Dante reprend la marche, à contrecœur de devoir laisser un corps sans sépulture décente comme le voudrait sa religion. Les Dieux lui pardonneront certainement cet écart, Dante souhaite miser sur les vivants plutôt que sur les morts alors il presse le pas en espérant qu'il ne soit pas encore trop tard. Malheureusement, elle n'est que la première d'une petite série. Le chemin est trop éprouvant pour ces âmes damnées mais Dante garde espoir. S'il peut en sauver ne serait-ce que quelques-unes, alors sa tâche sera accomplie. Réduisant définitivement l'écart qui sépare les tueurs de ces femmes apeurées en les voyant arriver. Dante ne se formalise pas pour si peu, une réaction parfaitement logique. Suffit de voir la gueule des deux colosses sans parler de l'autre dégénérée qui se rajoute à l'équation. Ils n'ont pas la tête des sauveurs comme on les décrit dans les romans, ça non. Ils ne sont ni beaux, ni sympathiques. Grands et forts, ça oui à la limite mais les points communs s'arrêtent là.
« Vous êtes encore en vie, tant mieux. Tout va bien ? »
Putain la question à la con. Bien sûr que non que ça ne va pas bien, aveugle et bouché cet imbécile de cornu. Des loques humaines, voilà tout ce qu'il reste d'une poignée de femmes qui, au départ, étaient déjà les moins amochées du lot. Malgré tout, Dante affiche une mine rassurée. Maël n'est plus très loin et si elles sont capables de supporter la fin du voyage alors... en voilà une qui s'effondre juste devant lui. De peur ou de fatigue. Un peu des deux. Dante pose un genou au sol pour constater lui-même de son état, la cause est plutôt évidente. Outre les quelques contusions ici et là. La cheville gauche est rouge et enflée, c'est à se demander comment elle a fait pour continuer aussi longtemps d'ailleurs. Foi et détermination soulèvent des montagnes. Son chemin se serait sûrement arrêté là mais Dante n'est pas de cet avis. Il pivote sur ses talons en venant se saisir du fourreau de son épée accroché en bandoulière dans son dos, faisant de la place pour pouvoir transporter la malheureuse.
« Montre sur mon dos. »
D'une voix rauque et autoritaire, dégageant le peu de douceur dont il est capable. Disons que c'est l'intention qui compte, il fait de son mieux. C'est avec hésitation que la jeune femme finit par s'exécuter. Être transporté comme un paquet est un sort bien plus enviable que de rester là pour attendre une mort certaine. S'accrochant comme elle peut au colosse, Dante se redresse d'un seul coup de toute sa taille. La chanceuse a une vue imprenable de là-haut. Tournant son regard vers le reste des victimes, les autres devraient être capables de marcher toutes seules sous bonne escorte.
« Vous pouvez marcher ? On y va. »
Impérieux, ils n'ont que trop perdu de temps avec tous ces imprévus. Avec un peu de chance et un rythme un peu plus soutenu, ils arriveront aux abords de la dernière grande ville des terres Shoumeiennes juste avant la tombée de la nuit. Alors voilà la petite troupe qui s'occupe de guider le convoi de femmes. Dante à l'avant pour ne pas changer et les deux Orcs à l'arrière, ils continuent d'emprunter quelques chemins escarpés leur permettant de gagner un peu de temps sur le trajet initial. Vérifiant régulièrement l'état du convoi dans son dos, les femmes ont naturellement du mal à suivre et ils n'avancent pas aussi bien qu'il le voudrait. Fort heureusement, la journée est un peu plus calme qu'hier. Rien ne vient leur barrer le chemin et si quelques prédateurs guettent peut-être une chance de se faire un repas gratuit, ils sont vite dissuadés par l'allure des trois tueurs qui protègent les proies les plus fragiles. Quelques heures plus tard, le convoi quitte enfin les Rôcheuses. Miracle et il n'y a pas eu de perte entre temps. Un point surélevé permet même d'apercevoir la blanche Maël un peu plus loin à l'horizon. Plus que quelques heures de marche et elles seront enfin en sécurité. C'est sans ralentir le rythme, que tout ce beau monde se dirige vers ce nouveau bastion de l'Empire. Dante n'a aucune envie d'aller foutre un pied dans la ville qu'on soit bien d'accord et pour être honnête, son dernier passage dans la ville il y a quelques semaines n'est clairement pas passé inaperçu. S'il n'y a pas des avis de recherches à son effigie placardés sur les murs, il aurait de la chance. Quoi que les témoins encore en vie sont peu nombreux mais un grand cornu de plus de deux mètres, on en croise pas tous les jours soyons honnête.
Alors voilà, la nuit est tombée depuis un moment mais le convoi arrive enfin à destination, non loin des portes et des remparts de la ville. Malheureusement, Dante ne peut pas aller plus loin. Alors il dépose la jeune femme blessée sur le sol pour qu'une autre vienne l'aider à marcher et à se réfugier dans la ville. Si tant est qu'elles arrivent encore à entrer, ce serait le comble après tant d'efforts pour venir jusqu'ici. Avant de les laisser repartir, l'Oni en profite pour poser quelques questions. Parce que la quête des trois tueurs ne s'arrête pas là et Dante ne perd pas le nord.
« Edrir. La bande d'Edrir. Où est-ce qu'on peut les trouver ? »
La question est simple et explicite. Sincèrement, ils pourraient simplement passer leur chemin et continuer vers Célestia sans faire de détour mais ce n'est pas une possibilité pour Dante. Il est revanchard et n'a pas oublié ce que ses hommes ont fait. La perspective de supprimer quelques sacs à merde pour son objectif de faire du Sekai un monde meilleur, le rend particulièrement joyeux. Le monde sera toujours aussi merdique quand il aura terminé, juste un tout petit peu moins. Et ça lui suffit amplement.
CENDRES
Impassible, l'Oni ne réagit pas tant que ça à l'excès de colère de Urzupha qui pourtant, devrait le remercier d'avoir ramené un Champa pour sa gueule de dégénérée. Il aurait pu simplement l'ignorer et la laisser se démerder pour trouver son repas. Honnêtement, il aurait dû. Trop bon, trop con cet Oni là. N'allons pas jusqu'à dire que c'est une marque d'attention envers sa nouvelle compagne de route, mais il respecte sa force et le combat qu'elle lui a offert hier. C'est d'ailleurs le point commun de tous les protagonistes réunis ici présent, que ce soit du duo d'Orc ou du duo à cornes, tous respectent la force comme psychologie absolue. Car pour sûr, les faibles n'ont pas leur place au sein de cette joyeuse troupe de tueurs sanguinaires. Bref, elle cogne fort et en plus elle a réussi à le coucher alors que ce n'était pas arrivé depuis longtemps. Depuis... Seagan. Merde, pas depuis si longtemps finalement. Il se ramollit le bougre.
Bref, le repas se passe étonnament bien. Peut-être parce que Urzupha est trop occupé à grignoter son lapin maigrichon plutôt qu'à casser les couilles à son auditoire. Dante ne va pas s'en plaindre, le silence est une vertu pour lui qui malheureusement, va se faire de plus en plus rare. Il ne laisse pas une miette de son repas, jusqu'à faire craqueler le cartilage sous la dent. Honnêtement, il pourrait en avaler encore deux au moins aussi gros pour être complètement rassasié. Faut voir la corpulence de la bête, faut le nourrir ce bonhomme. Mais ça sera suffisant pour reprendre des forces et continuer d'arpenter les chemins escarpés des Rôcheuses jusqu'à ce soir. Kahl. C'est un nom qu'il a cru entendre, hier en plein milieu de l'agitation provoquée par Urzupha. Il y a aussi "chépaqui Fictilem". Drôle de prénom, pense Dante, mais qui est-il pour juger ? Quelques Reikois sans importance pour lui, ces chiens de l'Empire sont partout décidément et tant qu'ils ne se mettent pas en travers de sa route alors il n'a aucune raison de s'y intéresser plus que ça. Il expulse brusquement un petit filament d'air de ses deux grosses narines. Presque synonyme d'un rire, pour ce cornu introverti. Passablement amusé par l'imitation de Nargulg proposé par Urzupha. Putain, si même lui commence à rigoler de ses conneries c'est le début de la fin.
Naturellement, ça amuse beaucoup moins le principal concerné qui en profite pour passer un savon à sa femme. Ex-femme ? Aucune putain d'idée de comment ça se passe chez les Orcs. Mais le tueur verdâtre fait bien de clarifier la situation, il est hors de question que Urzupha devienne incontrôlable sur la terre sainte des Dieux pendant ce pèlerinage qu'ils entreprennent. Si ça devait arriver, Dante sera impitoyable avec elle et cette fois il ne sera pas diminué par un précédent affrontement. Il ne sera plus aussi aisé pour elle de se débarrasser du colosse au bras difforme. Maintenant qu'Urzupha est bien docile, les tueurs peuvent reprendre la route dans de bonnes conditions. Acquiesçant à la remarque de Nargulg, il reprend la tête de la petite équipe.
« Allons-y. »
L'objectif est très clair, retrouver le convoi dont ils avaient la charge hier encore, mettre en sécurité tout ce beau monde avant d'aller faire un énième massacre chez quelques bandits à la con. La journée va être longue et mouvementée, comme la précédente et celle encore avant. On s'habitue vite à ce train de vie déroutant.
Dante s'arrête quelques secondes devant le premier cadavre qui apparaît sur leur route. C'était prévisible mais le chevalier errant préférait faire preuve d'optimisme quant à leurs chances de toutes s'en sortir. Quelle naïveté. D'autant plus que les deux colosses ne sont plus là pour assurer leur protection. Alors Dante reprend la marche, à contrecœur de devoir laisser un corps sans sépulture décente comme le voudrait sa religion. Les Dieux lui pardonneront certainement cet écart, Dante souhaite miser sur les vivants plutôt que sur les morts alors il presse le pas en espérant qu'il ne soit pas encore trop tard. Malheureusement, elle n'est que la première d'une petite série. Le chemin est trop éprouvant pour ces âmes damnées mais Dante garde espoir. S'il peut en sauver ne serait-ce que quelques-unes, alors sa tâche sera accomplie. Réduisant définitivement l'écart qui sépare les tueurs de ces femmes apeurées en les voyant arriver. Dante ne se formalise pas pour si peu, une réaction parfaitement logique. Suffit de voir la gueule des deux colosses sans parler de l'autre dégénérée qui se rajoute à l'équation. Ils n'ont pas la tête des sauveurs comme on les décrit dans les romans, ça non. Ils ne sont ni beaux, ni sympathiques. Grands et forts, ça oui à la limite mais les points communs s'arrêtent là.
« Vous êtes encore en vie, tant mieux. Tout va bien ? »
Putain la question à la con. Bien sûr que non que ça ne va pas bien, aveugle et bouché cet imbécile de cornu. Des loques humaines, voilà tout ce qu'il reste d'une poignée de femmes qui, au départ, étaient déjà les moins amochées du lot. Malgré tout, Dante affiche une mine rassurée. Maël n'est plus très loin et si elles sont capables de supporter la fin du voyage alors... en voilà une qui s'effondre juste devant lui. De peur ou de fatigue. Un peu des deux. Dante pose un genou au sol pour constater lui-même de son état, la cause est plutôt évidente. Outre les quelques contusions ici et là. La cheville gauche est rouge et enflée, c'est à se demander comment elle a fait pour continuer aussi longtemps d'ailleurs. Foi et détermination soulèvent des montagnes. Son chemin se serait sûrement arrêté là mais Dante n'est pas de cet avis. Il pivote sur ses talons en venant se saisir du fourreau de son épée accroché en bandoulière dans son dos, faisant de la place pour pouvoir transporter la malheureuse.
« Montre sur mon dos. »
D'une voix rauque et autoritaire, dégageant le peu de douceur dont il est capable. Disons que c'est l'intention qui compte, il fait de son mieux. C'est avec hésitation que la jeune femme finit par s'exécuter. Être transporté comme un paquet est un sort bien plus enviable que de rester là pour attendre une mort certaine. S'accrochant comme elle peut au colosse, Dante se redresse d'un seul coup de toute sa taille. La chanceuse a une vue imprenable de là-haut. Tournant son regard vers le reste des victimes, les autres devraient être capables de marcher toutes seules sous bonne escorte.
« Vous pouvez marcher ? On y va. »
Impérieux, ils n'ont que trop perdu de temps avec tous ces imprévus. Avec un peu de chance et un rythme un peu plus soutenu, ils arriveront aux abords de la dernière grande ville des terres Shoumeiennes juste avant la tombée de la nuit. Alors voilà la petite troupe qui s'occupe de guider le convoi de femmes. Dante à l'avant pour ne pas changer et les deux Orcs à l'arrière, ils continuent d'emprunter quelques chemins escarpés leur permettant de gagner un peu de temps sur le trajet initial. Vérifiant régulièrement l'état du convoi dans son dos, les femmes ont naturellement du mal à suivre et ils n'avancent pas aussi bien qu'il le voudrait. Fort heureusement, la journée est un peu plus calme qu'hier. Rien ne vient leur barrer le chemin et si quelques prédateurs guettent peut-être une chance de se faire un repas gratuit, ils sont vite dissuadés par l'allure des trois tueurs qui protègent les proies les plus fragiles. Quelques heures plus tard, le convoi quitte enfin les Rôcheuses. Miracle et il n'y a pas eu de perte entre temps. Un point surélevé permet même d'apercevoir la blanche Maël un peu plus loin à l'horizon. Plus que quelques heures de marche et elles seront enfin en sécurité. C'est sans ralentir le rythme, que tout ce beau monde se dirige vers ce nouveau bastion de l'Empire. Dante n'a aucune envie d'aller foutre un pied dans la ville qu'on soit bien d'accord et pour être honnête, son dernier passage dans la ville il y a quelques semaines n'est clairement pas passé inaperçu. S'il n'y a pas des avis de recherches à son effigie placardés sur les murs, il aurait de la chance. Quoi que les témoins encore en vie sont peu nombreux mais un grand cornu de plus de deux mètres, on en croise pas tous les jours soyons honnête.
Alors voilà, la nuit est tombée depuis un moment mais le convoi arrive enfin à destination, non loin des portes et des remparts de la ville. Malheureusement, Dante ne peut pas aller plus loin. Alors il dépose la jeune femme blessée sur le sol pour qu'une autre vienne l'aider à marcher et à se réfugier dans la ville. Si tant est qu'elles arrivent encore à entrer, ce serait le comble après tant d'efforts pour venir jusqu'ici. Avant de les laisser repartir, l'Oni en profite pour poser quelques questions. Parce que la quête des trois tueurs ne s'arrête pas là et Dante ne perd pas le nord.
« Edrir. La bande d'Edrir. Où est-ce qu'on peut les trouver ? »
La question est simple et explicite. Sincèrement, ils pourraient simplement passer leur chemin et continuer vers Célestia sans faire de détour mais ce n'est pas une possibilité pour Dante. Il est revanchard et n'a pas oublié ce que ses hommes ont fait. La perspective de supprimer quelques sacs à merde pour son objectif de faire du Sekai un monde meilleur, le rend particulièrement joyeux. Le monde sera toujours aussi merdique quand il aura terminé, juste un tout petit peu moins. Et ça lui suffit amplement.
CENDRES
Invité
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Observe bien ce qu'il suit lecteur, car, contrairement aux acteurs de cette sombre historiette, tu es bien le seul à même d'analyser, et saisir la pleine et insondable laideur, noyautant l'essence de ce tandem d'orcs irrécupérables.
Lorsqu'ils songèrent au funeste destin qu'ils jugeaient bon d'infliger, aux insectes tourmentés - qui se tortillèrent de trouille d'ici jusqu'aux abords de la cité reikoise - sous bonne garde. Une lugubre toile émaillée des vœux esclavageant les foules, parasitait l'imagination d'un Nargulg à la sale gueule équivoque. Ensuite, une ode aux accents destructeurs se déclamait sourdement dans les méandres cérébraux du verdâtre, néanmoins flegmatique. L'abjecte et musculeuse créature ne laissa rien transparaître, ce détritus-là avait bien compris qu'il était nécessaire de mettre de côté toutes ces insanités, en Shoumeï. Les choses étaient un poil différentes du côté d'Urzupha. Incontrôlable par nature, l'appétence aux vices de la mauvaise, fardait son visage de spasmes louches. Des secousses dessous les paupières, d'intempestifs sursauts de sourcils rythmés par les tourments du troupeau de sangloteuses, et finalement, la trombine de la malveillante fut lardée d'innombrables grimaces, couronnées de pupilles blanches à l'éclat pourrit par le vice. À défaut de pouvoir fouetter ces dames, plutôt que de broyer leurs membres un à un, Urzupha devint une spectatrice anormalement discrète, et savoura l'ambroisie que leur chagrin sécrétait. Clairement, l'extase rougissait ses pommettes à la perverse d'orc. Qu'est-ce qu'il se serait passé, si Dante n'eut jamais croisé Nargulg ? La même chose qu'au Reike et en République. L'orc n'aurait été guère différent des malfrats qu'il côtoyait habituellement. Peut-être même, qu'il aurait joint ses forces à celles d'Edrir et sa troupe d'enculés. Après tout, il y avait toujours du sale boulot pour un mercenaire nuisible de sa trempe. Quoique, des scrupules, il en avait bel et bien désormais. Grâce à Dante. Ha décidément, cet oni là tenait le bon rôle parmi la foule apeurée.
Prends place parmi les nuages, lecteur, les cieux sont ton domaine et ceux-ci étaient des plus noirs pour fêter la fin d'une escorte. Parce qu'ils n'iraient pas à Maël, tant ces trois massacreurs n'y étaient pas en odeur de sainteté. Pourtant, Nargulg sentait déjà la piétaille grouillante derrière les hautes remparts de la Cité Blanche, et ce seraient salades que de nier l'aura extrêmement meurtrière qui l'emmitouflait alors. Voyant là une opportunité, Urzupha poussa la chansonnette à coups de murmures aux relents sinistres, au creux de son oreille défilait alors quantité d'appels à la tuerie de masse. Cependant, d'appel, il ne retint que celui du devoir. Tout à fait, la tuerie allait de pair avec le devoir. Puis, les mirettes du mâle se détournèrent des murs d'enceintes de la ville, afin de dévisager la plus courageuse des victimes qui déballa tout à l'oni. Premier détail, et pas des moindres, "la bande d'Edrir", la femme insista lourdement sur le caractère trompeur du nom de la troupe. Peut-être bien qu'Edrir fût un nostalgique dans l'âme, du genre à se remémorer avec une larmiche au coin, ses modestes débuts dans le brigandage, d'où la persistance de ce nom "la bande d'Edrir". En attendant de vérifier cette théorie nargulgesque, on avait confirmation que c'était toute une armée de malfrats, tenue par un puissant esprit de camaraderie, qui sévissait à l'Ouest des rocheuses. Trop vague, trop peu d'informations, encore un effort petite. La brindille ajouta avec émotion, qu'elles furent prisonnières des murs d'une place-forte, plantée à l'extrême Ouest des rocheuses et taillée à même la montagne. Peut - être un ouvrage nain, qui sait ? Les lieux étaient abandonnés depuis des lustres, pour qu'Edrir et ses laquais eurent tôt fait d'y poser bagage. Cette grande forteresse culminait donc, à la fois au sommet et au bord du monde. Oui oui, tu as bien lu lecteur. Car, que trouvait-on plus à l'Ouest des rocheuses ? De l'eau à perte de vue. Les flots de l'océan sans bout feraient un bon cercueil pour sûr, et après une chute de plusieurs centaines de mètres, l'armée d'Edrir serait à la merci du plus noble Maître des océans, Kaiyo. Ainsi lui rendraient-ils honneur, à ce divin Seigneur, en abreuvant son inestimable domaine de l'abondante vermine. Nargulg veillerait personnellement à ce qu'aucun n'en réchappe.
Pour l'heure, tout ceci n'était que chimères définitivement troublées par les cafouillages de la survivante. De cette dernière, ils dérobèrent tout ce qu'elle savait de la horde crapuleuse. En fin de compte, on avait vite fait le tour de l'échange. Traumatisées, elles étaient incapables de quantifier précisément les ennemis. Aussi retint-il seulement qu'ils furent trop nombreux. Outre cela, elle confirma l'exercice régulier du contrôle des ponts aux abords de leur quartier-général. C'était une façon comme une autre d'affirmer son autorité sur toute une portion de la région. Car c'était bien de cela qu'il fut question : de domination. Quiconque tombait dans leurs filets devait prier pour une mort rapide, trop préférable à la douloureuse condamnation à la servitude. Les autochtones étaient pris pour cible, les reikois aventureux étaient pris pour cible. Décapitées, les gueules d'impériaux empalés délimitaient les ambitieuses frontières du roitelet Edrir. Tant mieux, ces fous furieux n'en seront que facilement repérables.
Mises bout à bout, ces bribes de renseignements dévoilaient un puzzle terriblement incomplet. Jusque-là, les bourrins agirent telles des buses et l'addition commençait à se faire sentir. De plus, durant leur pénible séjour, les esclaves virent uniquement ce qu'Edrir daigna leur montrer, c'est-à-dire pas grand-chose. Le fonctionnement de la dite bande, la disposition des pièges, car forcément, il y en avait. Les tours de garde, en bref, leur rythme de vie. Néant, rien à se mettre sous la dent à ce propos. Pour faciliter l'éradication, c'était un bandit qu'il leur incombait d'interroger. Malheureusement, de bandits à cuisiner, il n'y en eut plus aucun dans les parages. Voilà maintenant une nouvelle journée d'écoulée depuis la boucherie d'hier, précédant la libération de ces dames. Ce temps perdu à jouer les sauveurs, ne fut pas autre chose, qu'un don très précieux fait aux ennemis, et les mastodontes en avaient pleinement conscience. Edrir attendait, ses hommes s'impatientaient. Sur la défensive, sur leur terrain de jeu, à leur avantage donc. L'inaudible vengeance grognait, embusquée dans les confins des rocheuses, au détour des ponts suspendus, derrière des barricades en bois pointu, par-dessus les murs de la forteresse délabrée. La horde d'ennemis désirait ardemment cueillir nos tueurs, qui disons-le tout de suite, iraient obligatoirement se jeter dans la gueule du loup.
Les frêles créatures quittèrent le trio à la faveur de la nuit, Mael leur tendait les bras quand soudain, l'une d'elles jeta une ultime supplique à leur intention, avant de chercher refuge sous la férule des mécréants.
- Je vous en conjure, sauvez les autres !
Tout ce temps durant, Nargulg et Urzupha s'abstinrent de toute remarque, l'envie y était, mais voilà... En toute franchise, rien de bon ne serait sorti de leurs gueules. C'était très bien comme cela. Tout au plus, les narines du mâle expulsèrent l'agacement, forcément qu'il l'était le con d'orc. Et puis, des trois bouchers, le cornu était bien le seul doté d'assez d'empathie pour l'entendre, cette dame-là.
Nouvellement libérés des poids morts, les meurtriers arpentèrent le Shoumeï dévasté, à peine éclairés par l'éclat d'une Lune timorée devant la nuit conquérante. Les premières gouttes de pluie arrosaient gentiment les guerriers, quand ils fauchèrent des sangliers passant tout près. Sous peu, elle n'aura plus à se plaindre de crever la dalle, la méchante et vulgaire Urzupha, laquelle bavait devant le gibier inerte. Hop hop hop ! Pas le temps de niaiser, et avec l'appui de Dante, ils ne rencontrèrent point d'emmerdes au cœur de ces bois lorgnant sur les rocheuses. Quoi ? Tu croyais qu'ils resteraient dans le périmètre de Mael plus longtemps ? C'est mal les connaître, ami lecteur. Les rocheuses était le but, ou plutôt, Edrir était le but. Ce n'est pas en restant planté à cent pas des planctons du Reike, qu'on fera avancer le scénario, saperlotte !
Retour à la case départ pour ceux qui n'avait pas foutu grand-chose de la journée. Au moins, avaient ils une idée davantage nette du danger qui les guettait à l'autre bout de la région. Les voici donc à trouver refuge dans une de ces impressionnantes anfractuosités peu profondes, lesquelles tapissaient par endroit les murs montagneux. À l'intérieur, noirceur. Brusquement, sans crier gare, Urzupha tira de sa besace un orbe plus gros que sa main, imprégnée d'un surprenant glyphe et de runes incompréhensibles. D'un vert péridot, la sphère délivrait une lueur assez blême pour ne jamais rivaliser avec une authentique torche. Stupéfait, les lèvres de Nargulg s'entrouvrirent, car l'espace d'une seconde, il fut bouleversé.
- Liriha ?... Questionna-t-il au terme d'un soupir.
- Ouais, j'allais pas la laisser avec les autres. Ils la détestent.
- Elle dort toujours ?
- Ouais. Dit-elle, sans plus de détails à fournir.
Liriha Dalorrane, la sphère à demi brillante possédait un prénom et un nom de famille. Pas comme certains, héhé. L'humble narrateur que je suis, peux vous conter l'histoire de cette boule de cristal peu banale, sauf que je n'en ai pas envie, curieux lecteur. Ce récit peut attendre, crois-moi.
L'abri-sous-roche qu'ils envahirent pour passer la nuit, festonnait d'une triplée de feu de camp, d'où les épaisses émanations gazeuses furent aspirées par le ciel nocturne. D'ici, ils traitèrent la viande à la routinière, avant de la rôtir. Les champignons n'échappaient pas à la cuisson non plus, quitte à bouffer, autant y aller à fond et passer une bonne nuit la panse rebondie. Les ustensiles de cuisine éprouvèrent durement l'appétit des géants, présentement "affairés" à digérer près des feux. Par la suite, en scrutant les braises, la souriante Urzupha fut frappée d'un énième désir. Là encore, elle fouilla dans sa besace, la paume heurta un étui boisé et longiligne, duquel pendouillait une pochette. Bingo. Sachant combien Nargulg était insensible aux attraits du tabac, la folle lança des appels du pied à l'oni. Une invitation à goûter la pipe kiseru de Liriha, longue de pas moins vingt-cinq centimètres. Dans le petit bol en laiton de l'outil de détente, étaient compactées deux pincées de ce fin tabac, au délicat parfum. Au moment d'allumer la bouffarde atypique, Urzupha mettait Nargulg face à son mensonge de midi.
- On n'a buté personne aujourd'hui.
La surface du tabac bourré dans le micro-foyer s'embrasa aussitôt, et le bec laitonné de l'élégante pipe de prendre place entre les lèvres d'Urzupha. Lentement, mais sûrement, la fumée aussi douce que savoureuse chatouillait le palais de l'orc au féminin, confortablement assise à l'entrée de la cavité.
- Demain. Dante nous conduira au fort Normonlir.
Il affirmait cela, les pupilles jaunes rivées sur la boule de cristal logée entre ses pognes. Concrètement, il n'en savait rien, du temps nécessaire pour atteindre la forteresse, son attente parlait plus qu'autre chose. Sereine, Urzupha expulsa une première bouffée face à la saucée déchaînée au-dehors. Pas de doute, c'était un bon abri qu'ils avaient là.
Une main enroulée autour du bambou foncé de la bouffarde, son bec ne la quittait plus que pour bavarder innocemment. Avec le démon des rocheuses cette fois-ci.
- C'est vrai ce mensonge ?
Passé une poignée de minutes de dégustation, elle consuma le dernier brin de tabac en place. Par conséquent, elle retourna le tuyau pour en chasser les résidus du fourneau, et réitérer un soigneux remplissage. À présent, Urzupha tendit le kiseru chargé à destination de Dante. La blague à tabac en toile - aux divers motifs cousus de bleu, d'or et de noir - ayant de la réserve, on n'allait pas en voir le bout de sitôt. De plus, si le cornu n'en voulait pas, ça en ferait plus pour elle.
- Dis Kar'ath, j'me demandais. Tu sens quelque chose quand on te touche ? L'autre soir par exemple, j't'ai gratté. T'as rien ressenti ?
Sacré mystère, la vie d'un démon emprisonné dans une épée. Ça ne devait pas être facile à vivre ; remarque, Nargulg n'allait pas le plaindre pour autant. Mais enfin, elle était curieuse l'orc grisée.
Savez-vous ce qui n'avait rien de mystérieux entre Urzupha et Nargulg ? L'absence totale d'intérêt, ou encore d'attachement, jamais porté à leurs progénitures, encore là-bas, au pays. Jamais ils n'en parlèrent, des chiards. Jamais ils n'évoquèrent le sort des autres femmes, parce que faire vibrer la corde sensible à ce propos, était chose impossible. Inconcevable. Fait du même bois, la seule marge de manœuvre d'Urzupha était de parier sur la brutalité du mâle. Pour le résultat qu'on connaît trop bien, lecteur. Dès lors, elle restait bien tranquille, et dans l'attente d'une nouvelle opportunité, elle le suivrait à la trace. Ce soir, elle ne chercherait pas à convaincre, c'était peine perdue. En lieu et place de cela, elle fumait paisiblement et le moment venu, cette nuit, elle grimperait sur l'orc. D'ailleurs, elle tenterait d'embarquer Dante avec elle dans cette partie de jambes en l'air. Parce que figures - toi, lecteur, que ces orcs, sauvages jusqu'au trognon, n'avait que foutre de la fidélité conjugale et qu'ils en avaient vu d'autres, des plans à trois.
Lorsqu'ils songèrent au funeste destin qu'ils jugeaient bon d'infliger, aux insectes tourmentés - qui se tortillèrent de trouille d'ici jusqu'aux abords de la cité reikoise - sous bonne garde. Une lugubre toile émaillée des vœux esclavageant les foules, parasitait l'imagination d'un Nargulg à la sale gueule équivoque. Ensuite, une ode aux accents destructeurs se déclamait sourdement dans les méandres cérébraux du verdâtre, néanmoins flegmatique. L'abjecte et musculeuse créature ne laissa rien transparaître, ce détritus-là avait bien compris qu'il était nécessaire de mettre de côté toutes ces insanités, en Shoumeï. Les choses étaient un poil différentes du côté d'Urzupha. Incontrôlable par nature, l'appétence aux vices de la mauvaise, fardait son visage de spasmes louches. Des secousses dessous les paupières, d'intempestifs sursauts de sourcils rythmés par les tourments du troupeau de sangloteuses, et finalement, la trombine de la malveillante fut lardée d'innombrables grimaces, couronnées de pupilles blanches à l'éclat pourrit par le vice. À défaut de pouvoir fouetter ces dames, plutôt que de broyer leurs membres un à un, Urzupha devint une spectatrice anormalement discrète, et savoura l'ambroisie que leur chagrin sécrétait. Clairement, l'extase rougissait ses pommettes à la perverse d'orc. Qu'est-ce qu'il se serait passé, si Dante n'eut jamais croisé Nargulg ? La même chose qu'au Reike et en République. L'orc n'aurait été guère différent des malfrats qu'il côtoyait habituellement. Peut-être même, qu'il aurait joint ses forces à celles d'Edrir et sa troupe d'enculés. Après tout, il y avait toujours du sale boulot pour un mercenaire nuisible de sa trempe. Quoique, des scrupules, il en avait bel et bien désormais. Grâce à Dante. Ha décidément, cet oni là tenait le bon rôle parmi la foule apeurée.
Prends place parmi les nuages, lecteur, les cieux sont ton domaine et ceux-ci étaient des plus noirs pour fêter la fin d'une escorte. Parce qu'ils n'iraient pas à Maël, tant ces trois massacreurs n'y étaient pas en odeur de sainteté. Pourtant, Nargulg sentait déjà la piétaille grouillante derrière les hautes remparts de la Cité Blanche, et ce seraient salades que de nier l'aura extrêmement meurtrière qui l'emmitouflait alors. Voyant là une opportunité, Urzupha poussa la chansonnette à coups de murmures aux relents sinistres, au creux de son oreille défilait alors quantité d'appels à la tuerie de masse. Cependant, d'appel, il ne retint que celui du devoir. Tout à fait, la tuerie allait de pair avec le devoir. Puis, les mirettes du mâle se détournèrent des murs d'enceintes de la ville, afin de dévisager la plus courageuse des victimes qui déballa tout à l'oni. Premier détail, et pas des moindres, "la bande d'Edrir", la femme insista lourdement sur le caractère trompeur du nom de la troupe. Peut-être bien qu'Edrir fût un nostalgique dans l'âme, du genre à se remémorer avec une larmiche au coin, ses modestes débuts dans le brigandage, d'où la persistance de ce nom "la bande d'Edrir". En attendant de vérifier cette théorie nargulgesque, on avait confirmation que c'était toute une armée de malfrats, tenue par un puissant esprit de camaraderie, qui sévissait à l'Ouest des rocheuses. Trop vague, trop peu d'informations, encore un effort petite. La brindille ajouta avec émotion, qu'elles furent prisonnières des murs d'une place-forte, plantée à l'extrême Ouest des rocheuses et taillée à même la montagne. Peut - être un ouvrage nain, qui sait ? Les lieux étaient abandonnés depuis des lustres, pour qu'Edrir et ses laquais eurent tôt fait d'y poser bagage. Cette grande forteresse culminait donc, à la fois au sommet et au bord du monde. Oui oui, tu as bien lu lecteur. Car, que trouvait-on plus à l'Ouest des rocheuses ? De l'eau à perte de vue. Les flots de l'océan sans bout feraient un bon cercueil pour sûr, et après une chute de plusieurs centaines de mètres, l'armée d'Edrir serait à la merci du plus noble Maître des océans, Kaiyo. Ainsi lui rendraient-ils honneur, à ce divin Seigneur, en abreuvant son inestimable domaine de l'abondante vermine. Nargulg veillerait personnellement à ce qu'aucun n'en réchappe.
Pour l'heure, tout ceci n'était que chimères définitivement troublées par les cafouillages de la survivante. De cette dernière, ils dérobèrent tout ce qu'elle savait de la horde crapuleuse. En fin de compte, on avait vite fait le tour de l'échange. Traumatisées, elles étaient incapables de quantifier précisément les ennemis. Aussi retint-il seulement qu'ils furent trop nombreux. Outre cela, elle confirma l'exercice régulier du contrôle des ponts aux abords de leur quartier-général. C'était une façon comme une autre d'affirmer son autorité sur toute une portion de la région. Car c'était bien de cela qu'il fut question : de domination. Quiconque tombait dans leurs filets devait prier pour une mort rapide, trop préférable à la douloureuse condamnation à la servitude. Les autochtones étaient pris pour cible, les reikois aventureux étaient pris pour cible. Décapitées, les gueules d'impériaux empalés délimitaient les ambitieuses frontières du roitelet Edrir. Tant mieux, ces fous furieux n'en seront que facilement repérables.
Mises bout à bout, ces bribes de renseignements dévoilaient un puzzle terriblement incomplet. Jusque-là, les bourrins agirent telles des buses et l'addition commençait à se faire sentir. De plus, durant leur pénible séjour, les esclaves virent uniquement ce qu'Edrir daigna leur montrer, c'est-à-dire pas grand-chose. Le fonctionnement de la dite bande, la disposition des pièges, car forcément, il y en avait. Les tours de garde, en bref, leur rythme de vie. Néant, rien à se mettre sous la dent à ce propos. Pour faciliter l'éradication, c'était un bandit qu'il leur incombait d'interroger. Malheureusement, de bandits à cuisiner, il n'y en eut plus aucun dans les parages. Voilà maintenant une nouvelle journée d'écoulée depuis la boucherie d'hier, précédant la libération de ces dames. Ce temps perdu à jouer les sauveurs, ne fut pas autre chose, qu'un don très précieux fait aux ennemis, et les mastodontes en avaient pleinement conscience. Edrir attendait, ses hommes s'impatientaient. Sur la défensive, sur leur terrain de jeu, à leur avantage donc. L'inaudible vengeance grognait, embusquée dans les confins des rocheuses, au détour des ponts suspendus, derrière des barricades en bois pointu, par-dessus les murs de la forteresse délabrée. La horde d'ennemis désirait ardemment cueillir nos tueurs, qui disons-le tout de suite, iraient obligatoirement se jeter dans la gueule du loup.
Les frêles créatures quittèrent le trio à la faveur de la nuit, Mael leur tendait les bras quand soudain, l'une d'elles jeta une ultime supplique à leur intention, avant de chercher refuge sous la férule des mécréants.
- Je vous en conjure, sauvez les autres !
Tout ce temps durant, Nargulg et Urzupha s'abstinrent de toute remarque, l'envie y était, mais voilà... En toute franchise, rien de bon ne serait sorti de leurs gueules. C'était très bien comme cela. Tout au plus, les narines du mâle expulsèrent l'agacement, forcément qu'il l'était le con d'orc. Et puis, des trois bouchers, le cornu était bien le seul doté d'assez d'empathie pour l'entendre, cette dame-là.
Nouvellement libérés des poids morts, les meurtriers arpentèrent le Shoumeï dévasté, à peine éclairés par l'éclat d'une Lune timorée devant la nuit conquérante. Les premières gouttes de pluie arrosaient gentiment les guerriers, quand ils fauchèrent des sangliers passant tout près. Sous peu, elle n'aura plus à se plaindre de crever la dalle, la méchante et vulgaire Urzupha, laquelle bavait devant le gibier inerte. Hop hop hop ! Pas le temps de niaiser, et avec l'appui de Dante, ils ne rencontrèrent point d'emmerdes au cœur de ces bois lorgnant sur les rocheuses. Quoi ? Tu croyais qu'ils resteraient dans le périmètre de Mael plus longtemps ? C'est mal les connaître, ami lecteur. Les rocheuses était le but, ou plutôt, Edrir était le but. Ce n'est pas en restant planté à cent pas des planctons du Reike, qu'on fera avancer le scénario, saperlotte !
Retour à la case départ pour ceux qui n'avait pas foutu grand-chose de la journée. Au moins, avaient ils une idée davantage nette du danger qui les guettait à l'autre bout de la région. Les voici donc à trouver refuge dans une de ces impressionnantes anfractuosités peu profondes, lesquelles tapissaient par endroit les murs montagneux. À l'intérieur, noirceur. Brusquement, sans crier gare, Urzupha tira de sa besace un orbe plus gros que sa main, imprégnée d'un surprenant glyphe et de runes incompréhensibles. D'un vert péridot, la sphère délivrait une lueur assez blême pour ne jamais rivaliser avec une authentique torche. Stupéfait, les lèvres de Nargulg s'entrouvrirent, car l'espace d'une seconde, il fut bouleversé.
- Liriha ?... Questionna-t-il au terme d'un soupir.
- Ouais, j'allais pas la laisser avec les autres. Ils la détestent.
- Elle dort toujours ?
- Ouais. Dit-elle, sans plus de détails à fournir.
Liriha Dalorrane, la sphère à demi brillante possédait un prénom et un nom de famille. Pas comme certains, héhé. L'humble narrateur que je suis, peux vous conter l'histoire de cette boule de cristal peu banale, sauf que je n'en ai pas envie, curieux lecteur. Ce récit peut attendre, crois-moi.
L'abri-sous-roche qu'ils envahirent pour passer la nuit, festonnait d'une triplée de feu de camp, d'où les épaisses émanations gazeuses furent aspirées par le ciel nocturne. D'ici, ils traitèrent la viande à la routinière, avant de la rôtir. Les champignons n'échappaient pas à la cuisson non plus, quitte à bouffer, autant y aller à fond et passer une bonne nuit la panse rebondie. Les ustensiles de cuisine éprouvèrent durement l'appétit des géants, présentement "affairés" à digérer près des feux. Par la suite, en scrutant les braises, la souriante Urzupha fut frappée d'un énième désir. Là encore, elle fouilla dans sa besace, la paume heurta un étui boisé et longiligne, duquel pendouillait une pochette. Bingo. Sachant combien Nargulg était insensible aux attraits du tabac, la folle lança des appels du pied à l'oni. Une invitation à goûter la pipe kiseru de Liriha, longue de pas moins vingt-cinq centimètres. Dans le petit bol en laiton de l'outil de détente, étaient compactées deux pincées de ce fin tabac, au délicat parfum. Au moment d'allumer la bouffarde atypique, Urzupha mettait Nargulg face à son mensonge de midi.
- On n'a buté personne aujourd'hui.
La surface du tabac bourré dans le micro-foyer s'embrasa aussitôt, et le bec laitonné de l'élégante pipe de prendre place entre les lèvres d'Urzupha. Lentement, mais sûrement, la fumée aussi douce que savoureuse chatouillait le palais de l'orc au féminin, confortablement assise à l'entrée de la cavité.
- Demain. Dante nous conduira au fort Normonlir.
Il affirmait cela, les pupilles jaunes rivées sur la boule de cristal logée entre ses pognes. Concrètement, il n'en savait rien, du temps nécessaire pour atteindre la forteresse, son attente parlait plus qu'autre chose. Sereine, Urzupha expulsa une première bouffée face à la saucée déchaînée au-dehors. Pas de doute, c'était un bon abri qu'ils avaient là.
Une main enroulée autour du bambou foncé de la bouffarde, son bec ne la quittait plus que pour bavarder innocemment. Avec le démon des rocheuses cette fois-ci.
- C'est vrai ce mensonge ?
Passé une poignée de minutes de dégustation, elle consuma le dernier brin de tabac en place. Par conséquent, elle retourna le tuyau pour en chasser les résidus du fourneau, et réitérer un soigneux remplissage. À présent, Urzupha tendit le kiseru chargé à destination de Dante. La blague à tabac en toile - aux divers motifs cousus de bleu, d'or et de noir - ayant de la réserve, on n'allait pas en voir le bout de sitôt. De plus, si le cornu n'en voulait pas, ça en ferait plus pour elle.
- Dis Kar'ath, j'me demandais. Tu sens quelque chose quand on te touche ? L'autre soir par exemple, j't'ai gratté. T'as rien ressenti ?
Sacré mystère, la vie d'un démon emprisonné dans une épée. Ça ne devait pas être facile à vivre ; remarque, Nargulg n'allait pas le plaindre pour autant. Mais enfin, elle était curieuse l'orc grisée.
Savez-vous ce qui n'avait rien de mystérieux entre Urzupha et Nargulg ? L'absence totale d'intérêt, ou encore d'attachement, jamais porté à leurs progénitures, encore là-bas, au pays. Jamais ils n'en parlèrent, des chiards. Jamais ils n'évoquèrent le sort des autres femmes, parce que faire vibrer la corde sensible à ce propos, était chose impossible. Inconcevable. Fait du même bois, la seule marge de manœuvre d'Urzupha était de parier sur la brutalité du mâle. Pour le résultat qu'on connaît trop bien, lecteur. Dès lors, elle restait bien tranquille, et dans l'attente d'une nouvelle opportunité, elle le suivrait à la trace. Ce soir, elle ne chercherait pas à convaincre, c'était peine perdue. En lieu et place de cela, elle fumait paisiblement et le moment venu, cette nuit, elle grimperait sur l'orc. D'ailleurs, elle tenterait d'embarquer Dante avec elle dans cette partie de jambes en l'air. Parce que figures - toi, lecteur, que ces orcs, sauvages jusqu'au trognon, n'avait que foutre de la fidélité conjugale et qu'ils en avaient vu d'autres, des plans à trois.
Invité
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Dévotion
Dévotion
Le chevalier errant se met à bruyamment souffler du nez, les bras croisés devant son buste et affichant une mine froide et assez intimidante. C'est sa gueule au naturel, faut le savoir. Le matin c'est encore pire et point de maquillage pour cacher les traits sévères de cette brute là. La courageuse jeune femme se met à déballer toute l'histoire, la bande à Edrir n'en est plus vraiment une depuis longtemps. L'effectif est bien trop important pour être simplement une "bande", c'est une milice complète et armée jusqu'aux dents qui attend les trois tueurs loin dans les montagnes de l'ancienne Shoumei. Alors Dante comprend assez rapidement que cette quête vengeresse va être un peu plus compliquée que prévu, d'autant plus que les informations qu'ils récupérent sont assez maigres. Une place forte abandonnée et réquisitionnée par des bandits comme base d'opération pour leurs méfaits, bah voyons. Mais dans quel monde on vit, que fait la police ? Je vous le demande. Que fait le Reike ? Certainement trop occupé à saccager les edifices religieux de la Cité Blanche et à persécuter les derniers Divinistes. Envoyez un régiment pacifier la région c'est beaucoup trop en demander aux héros du Sekai, faut croire.
Encore une fois, il ne s'agit pas là d'un petit campement construit avec les moyens du bord en quelques heures. Non, les tueurs s'apprêtent à assiéger une forteresse entière et à massacrer tous les déchets humains qui y ont élu domicile. Bien, à défaut d'avoir une idée concrète du nombre de bandits qu'ils vont croiser là-bas et des quelques pièges qu'ils ont pu mettre en place dans le secteur environnant la forteresse, ils savent au moins où aller. Et ils n'auront certainement pas de mal à trouver sur le chemin les piques sur lesquelles reposent les têtes des voyageurs un peu trop arrogants, certains étant Reikois évidemment. L'Oni affiche un petit rictus sur son visage, voilà une activité qu'il connaît bien et qu'il a longtemps pratiquée pendant la guerre. Un bon Reikois, est un Reikois mort, tout le monde le sait. C'est dommage, dans un contexte différent les bandits et les trois tueurs auraient pu s'entendre à merveille. Dommage que ce ne soient que des sacs à merde qui ne méritent aucunement leur sympathie. Tout ceci ressemble franchement à une mission suicide qu'on se le dise, un frisson parcourt son épiderme grisâtre dans la perspective d'avoir un défi digne de ce nom. La peur serait une réaction parfaitement naturelle et pourtant elle est totalement absente de son esprit. Car Dante n'est pas de ceux qui craignent la mort, le Démon des Rôcheuses est bien celui qui apporte la mort dans son sillage. Alors si la fuite semble être la plus viable des solutions, c'est bien mal connaître ce nouveau petit trio.
Malgré tout, Dante n'a aucune intention de venir toquer à la grande porte pour annoncer sa présence. Il est téméraire c'est un fait, mais pas stupide. Conséquence directe et malheureuse du dernier bandit du campement qu'ils auraient pu interroger si l'Oni ne l'avait pas exécuté pour sauver la vie d'une des otages. Il ne regrette en rien son geste mais il faut avouer que ça les met dans une situation assez précaire. Pas le temps d'avoir des remords car ce qui est fait, est fait. Alors en se détournant des épaisses remparts de Maël, Dante s'arrêta pour adresser un dernier regard à la courageuse femme qui, en plus d'avoir survécu à ses tortionnaires, a survécu au trajet difficile que l'Oni lui a imposé jusqu'à maintenant. Sauvez les autres donc, Dante n'a pourtant rien d'un sauveur encore moins d'un héros. L'Oni se questionne donc logiquement face à cette soudaine sollicitation. Pour qui fait-il vraiment ça ? Pourquoi est-ce qu'il entreprend ce chemin de violence qui s'offre encore et toujours à lui ? Il pourrait simplement tracer son chemin jusqu'à Célestia sans chercher les problèmes. Pourtant Dante peine à mettre des mots sur cette soudaine volonté qui le guide à travers les routes sinueuses de la très dévastée Shoumei. Que cherche t-il à faire exactement ? Est-ce la justice ou bien la vengeance qui dirige la main qui va bientôt s'abattre sur ses ennemis, dans ce cycle éternel de violence dont il est totalement prisonnier ? Il serait bien incapable de faire la différence tant la limite est fine. Fait-il vraiment ça par empathie pour ceux qui ne peuvent pas se défendre eux-mêmes ou fait-il ça seulement pour contenter cette soif de sang insatiable, cet instinct animal qui se réjouit allègrement à chaque fois qu'il prend une vie ?
Quelle troublante rencontre, une simple femme sans intérêt et qu'il ne recroisera sûrement jamais de toute sa vie. Voilà que Dante se met à cogiter très fortement à ses paroles pourtant anodines. Ça va lui trotter dans la tête pendant encore quelques heures, au moins. Cet imbécile ne sait même pas quoi lui répondre alors à défaut de trouver les mots adéquats, il acquiesce simplement de la tête avant de s'éloigner pour de bon de la Cité Blanche. Les bourreaux reprennent donc leur route, ils ont une cible à abattre et celle-ci est de taille. Ils n'ont que trop perdu de temps, en partie par sa faute d'ailleurs. La journée a été longue et la nuit sera courte car le triumvirat de la brutalité doit de nouveau rejoindre les dangereuses montagnes de Shoumei en se dirigeant vers l'Ouest. La pluie pointe le bout de son nez, décidément la météo capricieuse de Shoumei n'est vraiment pas de leur côté. Heureusement, ils trouvent assez facile leur repas du soir avant d'aller s'abriter dans une grotte quelconque mais assez confortable pour y passer le reste de la nuit. L'Oni entreprend de s'assurer qu'il n'y a pas de mauvaise surprise à l'intérieur puis son regard se pose sur la faible lumière qui apparaît dans son dos, cette petite orbe que détient Urzupha dans ses mains. D'une oreille attentive, il écoute l'échange des deux Orcs sans y prêter plus d'attention que ça pour le moment.
Ils finissent enfin par s'installer, posant leurs maigres affaires et allumant quelques feux pour enfin se mettre à table car son humble repas de ce midi n'a pas totalement contenté son estomac il faut dire. Que les Dieux soient bénis d'avoir mis ce juteux gibier sur leur chemin. Ce soir, Dante se couchera le ventre bien rempli. Digérant près du feu, sa lame juste à côté de lui debout contre la paroi de la grotte. Dante n'est pas un grand bavard, pas plus que ne l'est Nargulg en réalité. Profitant du calme et du crépitement des flammes jusqu'à ce qu'Urzupha vienne attirer son attention du bout du pied. Curieux, il pose les yeux sur l'étui en bois qu'elle dégaine de sa besace. Voilà qui est original, pas spécialement déplaisant. Il se tâte quelques instants, le temps qu'Urzupha allume l'ustensile à tabac. Stoïque de son côté de la grotte, les yeux sombres de l'Oni se déplacent assez sommairement dans la pièce. Passant de temps à autres d'Urzupha à Nargulg pendant leurs échanges. Fort Normonlir donc. Les trois tueurs avancent bien et vite maintenant qu'ils sont déchargés des poids morts. La vérité c'est que Dante ne sait pas avec certitude où se trouve la forteresse, vous conviendrez qu'avec ce "à l'Ouest" comme seul indication, il n'est pas vraiment aidé dans ses recherches. Ils finiront bien par tomber dessus c'est une certitude, ils ne sont pas bien discret ces bandits là. Demain ? Oui, peut-être avec un peu de chance.
« On verra. On va dans la bonne direction. »
C'est déjà un bon début. Il tend le bras pour se saisir de la longue pipe boisée, hochant discrètement la tête en direction de sa propriétaire. Pour sûr qu'il n'est pas un grand fumeur mais une fois de temps en temps, ça ne peut pas faire de mal n'est-ce pas ? Tirant dessus pour venir s'embrumer de ce doux nuage opaque pendant que la voix rauque du Démon se mit à résonner autour d'eux, venant répondre à la curiosité de l'Orc.
« Rien de rien, ma belle. Ça fait des milliers d'années que je suis enfermé dans cette putain d'épée à la con. T'imagines un peu ce que ça fait de pas pouvoir tirer son coup pendant aussi longtemps ? Crois-moi, tu n'imagines pas. J'ai les baloches pleines et ça me démangent constamment... »
« On a compris. »
L'autre détraqué était parti pour faire durer son monologue plus que nécessaire. Tout le monde a à peu près saisit l'idée normalement, pas besoin d'en rajouter. Reprenant une grande bouffée de ce nuage odorant, l'Oni éloigne un moment le bec de l'ustensile de ses lèvres. Car là tout de suite, c'est plutôt la curiosité qui vient lui brûler les lèvres. Ce n'est pas vraiment son genre de se montrer indiscret mais, quitte à faire un peu la conversation alors.
« C'est qui Liriha ? »
Avec toute la subtilité dont il est capable. Très direct le Dante, il va droit au but comme d'habitude. Pas qu'il se formaliserait s'il n'a pas la réponse à sa question mais... tout comme Urzupha un peu plus tôt, lui aussi est simplement curieux. Pourquoi avoir donné un prénom à une pierre qui brille ? Quelle idée à la con, franchement. Enfin, il n'a jamais caché son intérêt pour les sociétés Orcs et leurs coutumes barbares. Avec un peu de chance, Urzupha sera plus bavarde que son bonhomme.
CENDRES
Encore une fois, il ne s'agit pas là d'un petit campement construit avec les moyens du bord en quelques heures. Non, les tueurs s'apprêtent à assiéger une forteresse entière et à massacrer tous les déchets humains qui y ont élu domicile. Bien, à défaut d'avoir une idée concrète du nombre de bandits qu'ils vont croiser là-bas et des quelques pièges qu'ils ont pu mettre en place dans le secteur environnant la forteresse, ils savent au moins où aller. Et ils n'auront certainement pas de mal à trouver sur le chemin les piques sur lesquelles reposent les têtes des voyageurs un peu trop arrogants, certains étant Reikois évidemment. L'Oni affiche un petit rictus sur son visage, voilà une activité qu'il connaît bien et qu'il a longtemps pratiquée pendant la guerre. Un bon Reikois, est un Reikois mort, tout le monde le sait. C'est dommage, dans un contexte différent les bandits et les trois tueurs auraient pu s'entendre à merveille. Dommage que ce ne soient que des sacs à merde qui ne méritent aucunement leur sympathie. Tout ceci ressemble franchement à une mission suicide qu'on se le dise, un frisson parcourt son épiderme grisâtre dans la perspective d'avoir un défi digne de ce nom. La peur serait une réaction parfaitement naturelle et pourtant elle est totalement absente de son esprit. Car Dante n'est pas de ceux qui craignent la mort, le Démon des Rôcheuses est bien celui qui apporte la mort dans son sillage. Alors si la fuite semble être la plus viable des solutions, c'est bien mal connaître ce nouveau petit trio.
Malgré tout, Dante n'a aucune intention de venir toquer à la grande porte pour annoncer sa présence. Il est téméraire c'est un fait, mais pas stupide. Conséquence directe et malheureuse du dernier bandit du campement qu'ils auraient pu interroger si l'Oni ne l'avait pas exécuté pour sauver la vie d'une des otages. Il ne regrette en rien son geste mais il faut avouer que ça les met dans une situation assez précaire. Pas le temps d'avoir des remords car ce qui est fait, est fait. Alors en se détournant des épaisses remparts de Maël, Dante s'arrêta pour adresser un dernier regard à la courageuse femme qui, en plus d'avoir survécu à ses tortionnaires, a survécu au trajet difficile que l'Oni lui a imposé jusqu'à maintenant. Sauvez les autres donc, Dante n'a pourtant rien d'un sauveur encore moins d'un héros. L'Oni se questionne donc logiquement face à cette soudaine sollicitation. Pour qui fait-il vraiment ça ? Pourquoi est-ce qu'il entreprend ce chemin de violence qui s'offre encore et toujours à lui ? Il pourrait simplement tracer son chemin jusqu'à Célestia sans chercher les problèmes. Pourtant Dante peine à mettre des mots sur cette soudaine volonté qui le guide à travers les routes sinueuses de la très dévastée Shoumei. Que cherche t-il à faire exactement ? Est-ce la justice ou bien la vengeance qui dirige la main qui va bientôt s'abattre sur ses ennemis, dans ce cycle éternel de violence dont il est totalement prisonnier ? Il serait bien incapable de faire la différence tant la limite est fine. Fait-il vraiment ça par empathie pour ceux qui ne peuvent pas se défendre eux-mêmes ou fait-il ça seulement pour contenter cette soif de sang insatiable, cet instinct animal qui se réjouit allègrement à chaque fois qu'il prend une vie ?
Quelle troublante rencontre, une simple femme sans intérêt et qu'il ne recroisera sûrement jamais de toute sa vie. Voilà que Dante se met à cogiter très fortement à ses paroles pourtant anodines. Ça va lui trotter dans la tête pendant encore quelques heures, au moins. Cet imbécile ne sait même pas quoi lui répondre alors à défaut de trouver les mots adéquats, il acquiesce simplement de la tête avant de s'éloigner pour de bon de la Cité Blanche. Les bourreaux reprennent donc leur route, ils ont une cible à abattre et celle-ci est de taille. Ils n'ont que trop perdu de temps, en partie par sa faute d'ailleurs. La journée a été longue et la nuit sera courte car le triumvirat de la brutalité doit de nouveau rejoindre les dangereuses montagnes de Shoumei en se dirigeant vers l'Ouest. La pluie pointe le bout de son nez, décidément la météo capricieuse de Shoumei n'est vraiment pas de leur côté. Heureusement, ils trouvent assez facile leur repas du soir avant d'aller s'abriter dans une grotte quelconque mais assez confortable pour y passer le reste de la nuit. L'Oni entreprend de s'assurer qu'il n'y a pas de mauvaise surprise à l'intérieur puis son regard se pose sur la faible lumière qui apparaît dans son dos, cette petite orbe que détient Urzupha dans ses mains. D'une oreille attentive, il écoute l'échange des deux Orcs sans y prêter plus d'attention que ça pour le moment.
Ils finissent enfin par s'installer, posant leurs maigres affaires et allumant quelques feux pour enfin se mettre à table car son humble repas de ce midi n'a pas totalement contenté son estomac il faut dire. Que les Dieux soient bénis d'avoir mis ce juteux gibier sur leur chemin. Ce soir, Dante se couchera le ventre bien rempli. Digérant près du feu, sa lame juste à côté de lui debout contre la paroi de la grotte. Dante n'est pas un grand bavard, pas plus que ne l'est Nargulg en réalité. Profitant du calme et du crépitement des flammes jusqu'à ce qu'Urzupha vienne attirer son attention du bout du pied. Curieux, il pose les yeux sur l'étui en bois qu'elle dégaine de sa besace. Voilà qui est original, pas spécialement déplaisant. Il se tâte quelques instants, le temps qu'Urzupha allume l'ustensile à tabac. Stoïque de son côté de la grotte, les yeux sombres de l'Oni se déplacent assez sommairement dans la pièce. Passant de temps à autres d'Urzupha à Nargulg pendant leurs échanges. Fort Normonlir donc. Les trois tueurs avancent bien et vite maintenant qu'ils sont déchargés des poids morts. La vérité c'est que Dante ne sait pas avec certitude où se trouve la forteresse, vous conviendrez qu'avec ce "à l'Ouest" comme seul indication, il n'est pas vraiment aidé dans ses recherches. Ils finiront bien par tomber dessus c'est une certitude, ils ne sont pas bien discret ces bandits là. Demain ? Oui, peut-être avec un peu de chance.
« On verra. On va dans la bonne direction. »
C'est déjà un bon début. Il tend le bras pour se saisir de la longue pipe boisée, hochant discrètement la tête en direction de sa propriétaire. Pour sûr qu'il n'est pas un grand fumeur mais une fois de temps en temps, ça ne peut pas faire de mal n'est-ce pas ? Tirant dessus pour venir s'embrumer de ce doux nuage opaque pendant que la voix rauque du Démon se mit à résonner autour d'eux, venant répondre à la curiosité de l'Orc.
« Rien de rien, ma belle. Ça fait des milliers d'années que je suis enfermé dans cette putain d'épée à la con. T'imagines un peu ce que ça fait de pas pouvoir tirer son coup pendant aussi longtemps ? Crois-moi, tu n'imagines pas. J'ai les baloches pleines et ça me démangent constamment... »
« On a compris. »
L'autre détraqué était parti pour faire durer son monologue plus que nécessaire. Tout le monde a à peu près saisit l'idée normalement, pas besoin d'en rajouter. Reprenant une grande bouffée de ce nuage odorant, l'Oni éloigne un moment le bec de l'ustensile de ses lèvres. Car là tout de suite, c'est plutôt la curiosité qui vient lui brûler les lèvres. Ce n'est pas vraiment son genre de se montrer indiscret mais, quitte à faire un peu la conversation alors.
« C'est qui Liriha ? »
Avec toute la subtilité dont il est capable. Très direct le Dante, il va droit au but comme d'habitude. Pas qu'il se formaliserait s'il n'a pas la réponse à sa question mais... tout comme Urzupha un peu plus tôt, lui aussi est simplement curieux. Pourquoi avoir donné un prénom à une pierre qui brille ? Quelle idée à la con, franchement. Enfin, il n'a jamais caché son intérêt pour les sociétés Orcs et leurs coutumes barbares. Avec un peu de chance, Urzupha sera plus bavarde que son bonhomme.
CENDRES
Invité
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Au-dehors, le déluge fit son office sous d'orageuses acclamations. Au-dedans, la tabagie exhalait de fragrance parfumée, aux délectables notes fruitées. Elle, l'orc, et lui, l'oni, réjouirent leurs palais respectifs de saveurs veloutées. Les jambes étendues sur le sol rugueux, la balafrée se prélassa à loisir, observant le démon des rocheuses fumer agréablement. L'opacité des fumerolles éphémères, ne saurait dissimuler le tabac rougeoyant aux passages des inspirations de Dante.
- L'Ouest hein ? C'est un peu chiche comme info. Répondit-elle aux premiers dires de l'oni.
Oui. Merci de rappeler l'évidence chère Urzupha. Ce n'est pas comme si c'était le nœud du problème. La glissade oculaire de cette orc fit route sur l'épée bavarde, laquelle confirma un isolement complet, ainsi le démon piégé fut un taulard loquace et contaminateur. C'est tout. Aucun petit plaisir physique pour lui ! Autant vous dire qu'elle eut de quoi être bouche bée, après la causerie de la chose démoniaque.
- Des milliers d'années ?! La vache ! Comment tu veux qu'j'imagine ça p'tain ? Hé, l'abstinence ça rend barge, j'te l'dis. Perso j'pense pas tenir deux semaines sans niquer.
Elle souffla, comme si la perspective d'une vie faite d'astreintes était aussi impensable que désespérante. Et cette pensée s'accompagnait d'un geste de la tête pointant un Nargulg en retrait, actuel contemplateur d'une boule de cristal plus verte que lui. À l'attention de l'épée noire, Urzupha ajouta non sans sourire.
- J'te parie ce que tu veux qu'il n'a pas touché une femme depuis qu'il s'est tiré comme un voleur.
-Pas d'orcs, pas de coucheries. Répliqua le mâle, sans l'once d'une hésitation.
L'intervention du Nargulg réfractaire à la concupiscence entre lui et les femmes d'autres races, blasait temporairement Urzupha la décontractée qui ne s'emmerdait pas à trier dans ce domaine. Bon. Au moins, n'était-il nullement devenu un de ces chastes, et fiers collectionneurs de pollutions nocturnes. "Tu passeras à la casserole", la réponse du géant ne voulait pas dire autre chose que cela, he oui. Entre eux, il n'y avait pas tellement de mystère, l'inverse aurait été surprenant par ailleurs. Dorénavant, un jeu d'ombres informes et indéfinissables décorait les frontières murales de la grotte, assujetties au bon vouloir des feux dansants. Tandis que le démon des rocheuses goûta la bouffarde à l'en vider la portion de tabac, la sauvagesse exhiba la fameuse bouteille de liqueur de prunelle. Légèrement sucrées, les premières gorgées du succulent breuvage irriguaient alors l'œsophage de l'orc, toute conquise aux délices de la nuit. Cette bonne vivante partagea immanquablement la boisson avec le cornu, en conséquence, elle regagna la pipe. Rebelote. Comblé de tabac, le délicat appareil endurait continuellement la fumeuse quête de jouissance. Entre deux bouffées, Urzupha l'apaisée intervint de nouveau.
- Hé les gars, j'en ai une bonne à vous raconter ! J'étais encore en République à t'chercher Nargulg. Alors je me balade, rien de suspect ou quoi. J'déboule dans une taverne, j'bois des coups au comptoir tu vois...
Un début de sourire illumina sa tronche.
- Et putain d'un coup, t'as la flicaille qui s'pointe, cette merde-là. J'suis tranquillement posée et ce couillon part bille en tête m'alpaguer. "Bah alors, tu fous quoi l'orc ?!" Qu'il fait, j'dis "ça s'voit pas ? J'picole, j'ai pas le droit ?!" Y m'embarque et m'interroge, blablabla.
Enjouée, Urzupha agrémenta l'anecdote de gestes secondaires, comme pour donner plus de vie au discours.
- "Tu vas pas faire long feu ici la clando" Y fait "Je te pisse au cul" J'lui dis. Y m'en colle une t'vois, j'suis un peu sonnée, mais j'tiens le coup, y a ses couilles molles de larbins pas loin et tout. Puis y m'dit "Alors, tu vas causer la truie ? Y sont où tes copains bandits ?"
Elle tenta d'imiter la voix du républicain en question, plus grave que la sienne.
- "Ouais ouais, d'accord. J'vais tout t'dire tient : va baiser ta mère !" Que j'lui fais. Et là ! Paf ! Bim ! Bam ! Trou noir pour ma pomme. Fallait voir ma tronche putain ouais, y m'ont pas loupés. KAAHAHAHA !
Soudain, c'était à son rire de retentir et la petite histoire déroba un sourire à Nargulg. Pourtant, le dernier morceau ne tomba qu'après-coup.
- Finalement, j'me réveille tu sais, et putain qui je vois en premier ? La même tête de bite. "C'est bon t'as finit de faire la mariole ?" Y dit. J'le regarde droit dans les yeux, j'dis pu rien pendant genre deux secondes tu vois, puis je balance "Merde qu'est-ce que tu fous là ? J't'ai dit d'aller baiser ta mère !" Rhoo putain, il voyait rouge le mec, c'était aussi énorme que ma tête qu'avait doublé de volume. HAHAHA !
Urzupha esclaffa à sa propre histoire, elle en pleura de rire et d'un doigt était éjectée une larme du coin de l'œil. Les gloussades de la barbare retombèrent en même temps que la singerie du tabassage vécu, à laquelle elle s'adonna, concluant ainsi l'anecdote qui amusait le discret et rude Nargulg. Les flammes resplendissantes, épargnèrent nos guerriers des primes gelées égratignant l'extérieur. Des babils de la psychopathe, l'on oublia les fatals désirs d'anéantissement. Des douceurs alcoolisées naquirent la légèreté. Derrière les volutes d'encens vaporeux, l'on barricada les cœurs viciés. Oubliées, les pulsions sanglantes. Les rescapés du quotidien malsain ; bêtes parmi les bêtes, pouvaient bien apprécier cette parenthèse, jusqu'au petit matin. Pourtant, l'émergence du jour était grandement lointaine, pour la nuitée absolue. Ici, un îlot luminescent, tint bon dans l'obscurité revancharde. Sans brouhaha batailleur, la tranquille caverne embrumée fit un somptueux abri.
Lorsque Dante désira en savoir plus à propos de Liriha la boule de cristal, Urzupha commanda un bras élastique de l'enlever des griffes de Nargulg. Désormais la sphère péridot siégeait sous le nez de l'oni, entre Urzupha et lui. L'incandescence environnante ravivait l'étrange glyphe, teintant l'orbe inerte et mystérieux. La fumeuse dégusta le tabac restant en bordure de la bouffarde, avant d'apporter une réponse au cornu.
- Une humaine. Une esclave de Nargulg.
Le dit Nargulg était déjà debout à se planter droit comme un I, à l'entrée de l'abri-sous-roche. Les bras croisés, son regard se porta sur le dehors trempé.
- Et une sorcière. Jugea-t-il opportun de préciser.
- Elle préfère qu'on dise mage ou magicienne, tu le sais en plus.
- C'est la même merde.
- Ha ! J'espère qu'elle t'entend la dormeuse. Répliqua l'enjouée balafrée, qui ne souhaitait pas pousser plus avant, le débat à la con sur la distinction entre sorcier et mage.
L'un des soupirs qu'on ne comptait plus, fuyait les lèvres du mâle qui s'en retourna coller son derche dans un coin de la caverne. Avec de la chance, ses "délicats" poumons n'auraient plus à supporter les senteurs. Ce n'était pas dit, mais soit.
Sans l'autre rabat-joie dans les pattes, Urzupha soutint le regard de l'oni, un index glissant à la surface de l'orbe. Des paroles expurgées de vices et de vulgarités, sortirent alors de sa bouche.
- Forte, à sa façon, et intelligente. Il refusait de la laisser moisir avec les autres serviteurs. C'était il y dix ans déjà, bien avant que l'on domine la horde. À l'origine, elle appartenait à un frère.
Elle ne précisa aucunement le funeste destin de ce frère, puisqu'il fut parfaitement compris par le cornu. Disons que ça coulait de source.
- Un maléfice l'affligeait avant qu'on la rencontre. Nous n'avons jamais réussi à lui tirer les vers du nez, sur son ancienne vie. Mais nous sommes sûrs, que c'est l'œuvre de quelqu'un. Elle parlait bien. Jamais un mot plus haut que l'autre. Mais personne ne l'aimait, au pays, normal pour une non-orc. Et même moi, je la détestais, les premières années.
La tête d'Urzupha pivota lentement en direction de Nargulg l'éloigné.
- Il y avait que lui pour entretenir et protéger certains de ses esclaves. Et puis un jour. Il y a quatre ans. Le sortilège a... Je sais pas, j'y connais rien à ces choses-là. Mais depuis quatre ans qu'elle est enfermée dans cette boule de cristal. Et depuis quatre ans, le brillant de la boule de cristal ne fait que diminuer.
La femme souleva délicatement l'orbe à l'éclat timide, hissant ce dernier jusqu'au menton du maudit cornu. Ses yeux blanchâtres flottant au-dessus de la sphère maléficière.
- Liriha n'a pas des milliers d'années devant elle, contrairement à Kar'ath. Elle est mourante. J'ai besoin d'elle, pour tenir les clans orcs il faut-
- Tu te gourres si tu crois qu'elle, l'humaine, va s'investir dans tes projets. Revoici Nargulg, monsieur le coupeur de parole, placide et chiant comme les caillasses.
- HEIN ?! Elle l'a déjà fait j'te signale. Suffit de recommencer ! Elle déposa doucement l'orbe sur le sol caverneux. Bravant Nargulg en se tenant debout.
- "Elle l'a déjà fait" parce que c'était une esclave, entourée par des milliers d'orcs.
- On sait jamais, c'est une amie, elle pourrait me rendre ce petit service.
"Petit service", "amie", ça amusait proprement Nargulg, d'entendre Urzupha la tout aussi ignare que lui, parler ainsi de Liriha. Au moins, la guerrière ne foutait pas la merde dans le campement de fortune, préférant la détente enfumée - ou alcoolisée, au choix - aux côtés de Dante. D'ailleurs, était venu le tour, pour le cornu, d'être questionné par nulle autre qu'Urzupha.
- Et toi alors ça fait combien de temps que t'es avec Kar'ath ? Y a d'autres épées du même style ? Et tu t'fais pas trop chier dans ce pays mort ? J'sais que y a l'autre et son armée à descendre dans les montagnes, mais tu feras quoi après ? Rien que de l'alpinisme ?
La boule de cristal rangée dans sa besace, peu après, ce furent les lèvres noires de la balafrée maléfique d'approcher une esgourde de l'oni, pour lui partager l'appétit pulsionnel qui infiltrait son être au fil du temps.
- Dis, tu comptes quand même pas dormir sur la béquille cette nuit ? Une orc comme moi, ça te changera des pisseuses-chouineuses avec la peau sur les os, et qui savent que faire l'étoile de mer.
Elle dévora Dante du regard, le sommet de sa langue se balada grossièrement entre ses deux crocs externes. La débauche. Une autre caractéristique d'Urzupha. Quand les mirettes de cette dernière atterrirent sur le mâle orc, l'envie de la luxurieuse créature allait croissante, et celle-ci de poursuivre sous peu, l'opération rentre dedans. La lourdeur pour mode d'emploi, on envoyait paître le raffinement et la courtoisie, ces machins d'hypocrites finit à la pisse, ou de bonnes gens civilisées. Sérieusement, regardez ces trois barbares. Vous les voyez dragouiller à coups de verve sentimentale ? Allez, ça dégage, pas de manières sophistiquées près des feux. Sur cette base bien compris, Urzupha l'impatiente ajouta en direction de Dante, pendant qu'elle se dénuda sans la moindre gêne devant lui.
- Quand t'auras marre de boire et fumer, rejoins-nous ! Et laisse Kar'ath regarder, ça lui f'ra le plus grand bien, héhé.
Un clin d'œil complice offert à l'épée - démon qui se rinça l'oeil. La nuit promettait d'être excellente pour Urzupha et Nargulg, sous les divines auspices.
Plus tôt dans la journée, loin, très loin à l'Ouest. Le fort Normonlir essuyait déjà la pluvieuse colère des cieux charbonneux. Les boueuses tranchées montagneuses, sillonnant par rangées gigantesques les avant de la place-forte. Indubitablement, le fort était une forteresse. La "bande" d'Edrir ; une armée de plusieurs centaines de crapules - soldats. Sous le fort, une véritable cité souterraine infestée de serviteurs exploités jusqu'à l'extinction, semblait ne jamais dormir. Jamais, les couches inférieures inféodées aux troupes d'Edrir ne virent le Soleil se lever, ni les étoiles défiler. Jour et nuit, les esclaves travaillèrent, organisés en multiples équipes alternantes, les fouets de la cruauté leur rappelaient constamment qu'ils n'étaient pas ici pour lambiner, mais crever pour le bien-être de leurs supérieurs en armes. Ces mêmes soldats, ne furent que les serviteurs d'Edrir, dont l'ambition conquérante trouva un terreau fertile en le Shoumeï dévasté. Edrir fut plus qu'une petite crapule vivotant de délits oubliables, c'était un géant dans la force de l'âge. Un guerrier qui en vit des vertes et des pas mûres toute sa vie. Un criminel que l'on ne referait pas de sitôt. Il voulait dominer, et il le fit.
Possédant la puissance physique pour meilleur argument, ses hommes placèrent en cet homme une foi aveugle, car son succès fit leurs beaux jours. Aujourd'hui, la gronde à l'égard de l'oni et de l'orc fulmina, derrière les murs du fort. Des dizaines d'hommes d'Edrir n'étaient pas revenus de leur expédition. Plus grave encore, la découverte du charnier, l'œuvre macabre de Dante et Nargulg, aiguisa l'implacable instinct de domination ruisselant du surhomme nommé Edrir. Ce dernier ne toléra point que l'on marche sur ses plates-bandes.
Trois dizaines de soldats en armure de plates intégrales, posèrent genoux à terre devant leur terrifiant seigneur, installé sur un trône veiné d'or. Le gigantisme de la salle, supportée par de superbes colonnes sculptées à la perfection, couvertes de tentures rouges et dorées.
À sa gauche, debout, un être encapuchonné, grand quoique chétif, le visage couvert d'un masque sinistre impossible à définir. À sa droite, un gobelin à la laideur manifeste, debout également, néanmoins trop petit pour que sa tête ne dépassa l'accoudoir du trône. Ainsi, nous avions en ces lieux, Edrir pour dirigeant absolu, et deux lieutenants attentifs, statiques et muets. Le silence fut rompu par le tas de muscle et maître de l'assemblée, Edrir, dont les cordes vocales dévoilèrent une voix aussi grave qu'âpre.
- Ivasaar Urira.
L'être longiligne et masqué, drapé de tissus enténébrés, s'avança de quelques pas et fit désormais face à son seigneur, l'être mystérieux ploya naturellement le genou, la face dissimulée pointant le sol dallé de marbre, à présent, il attendait les ordres.
- Commence par retirer et détruire ton masque ! Avec ta garde personnelle et cent soldats, tu iras traquer et tuer ceux qui ont été assez fous pour me défier.
La capuche tomba, et les doigts fins de l'obscur serviteur, délièrent le masque de bois dégoulinant de magie douteuse. À la première fissure, l'artefact devint poussière et les grains disparurent dans le néant. Soudain, un horrifique cri strident venant de toutes parts et de nulle part à la fois, déversa la terreur dans toute la forteresse. Esclaves et soldats, brusquement apeurés, bouchèrent leurs oreilles. Cependant, Edrir ne trembla pas, le gobelin au large sourire ne trembla pas. Des trente hommes lourdements armurés ici présents, dix ne tressaillirent point : les fidèles d'Ivasaar.
Par-dessus la toiture du fort, les nuages sombres s'agglomérèrent en un tout cotonneux, transit d'éclairs et de tonnerres, fêtant le retour de l'apôtre de l'effroi : Ivasaar Urira. Pour cet elfe malfaisant, les vivats du ciel, et les craintes des mortels furent autant de signes de l'extrême dangerosité de la créature agenouillée. Enfin, en ultime touche sur cette toile de grandiloquence irréaliste, pléthore de flux agités de mana violacé, parfaitement visible à l'œil nu, pénétrèrent l'elfe à la puissance restaurée.
- Va, Ivasaar ! Que leurs têtes rejoignent les autres aux frontières de mes terres.
L'être aux oreilles pointues, et à la longue chevelure grisonnante, redressa son visage tant pâlot que creusé. En serviteur dévoué du mal, le dialecte du Faucheur et de la Chuchoteuse fut le seul langage qu'il daignait prononcer en toute circonstance. Ainsi, sûr de lui, il prononça ces mots en Bas-Parlé.
- Oui, Maître.
- L'Ouest hein ? C'est un peu chiche comme info. Répondit-elle aux premiers dires de l'oni.
Oui. Merci de rappeler l'évidence chère Urzupha. Ce n'est pas comme si c'était le nœud du problème. La glissade oculaire de cette orc fit route sur l'épée bavarde, laquelle confirma un isolement complet, ainsi le démon piégé fut un taulard loquace et contaminateur. C'est tout. Aucun petit plaisir physique pour lui ! Autant vous dire qu'elle eut de quoi être bouche bée, après la causerie de la chose démoniaque.
- Des milliers d'années ?! La vache ! Comment tu veux qu'j'imagine ça p'tain ? Hé, l'abstinence ça rend barge, j'te l'dis. Perso j'pense pas tenir deux semaines sans niquer.
Elle souffla, comme si la perspective d'une vie faite d'astreintes était aussi impensable que désespérante. Et cette pensée s'accompagnait d'un geste de la tête pointant un Nargulg en retrait, actuel contemplateur d'une boule de cristal plus verte que lui. À l'attention de l'épée noire, Urzupha ajouta non sans sourire.
- J'te parie ce que tu veux qu'il n'a pas touché une femme depuis qu'il s'est tiré comme un voleur.
-Pas d'orcs, pas de coucheries. Répliqua le mâle, sans l'once d'une hésitation.
L'intervention du Nargulg réfractaire à la concupiscence entre lui et les femmes d'autres races, blasait temporairement Urzupha la décontractée qui ne s'emmerdait pas à trier dans ce domaine. Bon. Au moins, n'était-il nullement devenu un de ces chastes, et fiers collectionneurs de pollutions nocturnes. "Tu passeras à la casserole", la réponse du géant ne voulait pas dire autre chose que cela, he oui. Entre eux, il n'y avait pas tellement de mystère, l'inverse aurait été surprenant par ailleurs. Dorénavant, un jeu d'ombres informes et indéfinissables décorait les frontières murales de la grotte, assujetties au bon vouloir des feux dansants. Tandis que le démon des rocheuses goûta la bouffarde à l'en vider la portion de tabac, la sauvagesse exhiba la fameuse bouteille de liqueur de prunelle. Légèrement sucrées, les premières gorgées du succulent breuvage irriguaient alors l'œsophage de l'orc, toute conquise aux délices de la nuit. Cette bonne vivante partagea immanquablement la boisson avec le cornu, en conséquence, elle regagna la pipe. Rebelote. Comblé de tabac, le délicat appareil endurait continuellement la fumeuse quête de jouissance. Entre deux bouffées, Urzupha l'apaisée intervint de nouveau.
- Hé les gars, j'en ai une bonne à vous raconter ! J'étais encore en République à t'chercher Nargulg. Alors je me balade, rien de suspect ou quoi. J'déboule dans une taverne, j'bois des coups au comptoir tu vois...
Un début de sourire illumina sa tronche.
- Et putain d'un coup, t'as la flicaille qui s'pointe, cette merde-là. J'suis tranquillement posée et ce couillon part bille en tête m'alpaguer. "Bah alors, tu fous quoi l'orc ?!" Qu'il fait, j'dis "ça s'voit pas ? J'picole, j'ai pas le droit ?!" Y m'embarque et m'interroge, blablabla.
Enjouée, Urzupha agrémenta l'anecdote de gestes secondaires, comme pour donner plus de vie au discours.
- "Tu vas pas faire long feu ici la clando" Y fait "Je te pisse au cul" J'lui dis. Y m'en colle une t'vois, j'suis un peu sonnée, mais j'tiens le coup, y a ses couilles molles de larbins pas loin et tout. Puis y m'dit "Alors, tu vas causer la truie ? Y sont où tes copains bandits ?"
Elle tenta d'imiter la voix du républicain en question, plus grave que la sienne.
- "Ouais ouais, d'accord. J'vais tout t'dire tient : va baiser ta mère !" Que j'lui fais. Et là ! Paf ! Bim ! Bam ! Trou noir pour ma pomme. Fallait voir ma tronche putain ouais, y m'ont pas loupés. KAAHAHAHA !
Soudain, c'était à son rire de retentir et la petite histoire déroba un sourire à Nargulg. Pourtant, le dernier morceau ne tomba qu'après-coup.
- Finalement, j'me réveille tu sais, et putain qui je vois en premier ? La même tête de bite. "C'est bon t'as finit de faire la mariole ?" Y dit. J'le regarde droit dans les yeux, j'dis pu rien pendant genre deux secondes tu vois, puis je balance "Merde qu'est-ce que tu fous là ? J't'ai dit d'aller baiser ta mère !" Rhoo putain, il voyait rouge le mec, c'était aussi énorme que ma tête qu'avait doublé de volume. HAHAHA !
Urzupha esclaffa à sa propre histoire, elle en pleura de rire et d'un doigt était éjectée une larme du coin de l'œil. Les gloussades de la barbare retombèrent en même temps que la singerie du tabassage vécu, à laquelle elle s'adonna, concluant ainsi l'anecdote qui amusait le discret et rude Nargulg. Les flammes resplendissantes, épargnèrent nos guerriers des primes gelées égratignant l'extérieur. Des babils de la psychopathe, l'on oublia les fatals désirs d'anéantissement. Des douceurs alcoolisées naquirent la légèreté. Derrière les volutes d'encens vaporeux, l'on barricada les cœurs viciés. Oubliées, les pulsions sanglantes. Les rescapés du quotidien malsain ; bêtes parmi les bêtes, pouvaient bien apprécier cette parenthèse, jusqu'au petit matin. Pourtant, l'émergence du jour était grandement lointaine, pour la nuitée absolue. Ici, un îlot luminescent, tint bon dans l'obscurité revancharde. Sans brouhaha batailleur, la tranquille caverne embrumée fit un somptueux abri.
Lorsque Dante désira en savoir plus à propos de Liriha la boule de cristal, Urzupha commanda un bras élastique de l'enlever des griffes de Nargulg. Désormais la sphère péridot siégeait sous le nez de l'oni, entre Urzupha et lui. L'incandescence environnante ravivait l'étrange glyphe, teintant l'orbe inerte et mystérieux. La fumeuse dégusta le tabac restant en bordure de la bouffarde, avant d'apporter une réponse au cornu.
- Une humaine. Une esclave de Nargulg.
Le dit Nargulg était déjà debout à se planter droit comme un I, à l'entrée de l'abri-sous-roche. Les bras croisés, son regard se porta sur le dehors trempé.
- Et une sorcière. Jugea-t-il opportun de préciser.
- Elle préfère qu'on dise mage ou magicienne, tu le sais en plus.
- C'est la même merde.
- Ha ! J'espère qu'elle t'entend la dormeuse. Répliqua l'enjouée balafrée, qui ne souhaitait pas pousser plus avant, le débat à la con sur la distinction entre sorcier et mage.
L'un des soupirs qu'on ne comptait plus, fuyait les lèvres du mâle qui s'en retourna coller son derche dans un coin de la caverne. Avec de la chance, ses "délicats" poumons n'auraient plus à supporter les senteurs. Ce n'était pas dit, mais soit.
Sans l'autre rabat-joie dans les pattes, Urzupha soutint le regard de l'oni, un index glissant à la surface de l'orbe. Des paroles expurgées de vices et de vulgarités, sortirent alors de sa bouche.
- Forte, à sa façon, et intelligente. Il refusait de la laisser moisir avec les autres serviteurs. C'était il y dix ans déjà, bien avant que l'on domine la horde. À l'origine, elle appartenait à un frère.
Elle ne précisa aucunement le funeste destin de ce frère, puisqu'il fut parfaitement compris par le cornu. Disons que ça coulait de source.
- Un maléfice l'affligeait avant qu'on la rencontre. Nous n'avons jamais réussi à lui tirer les vers du nez, sur son ancienne vie. Mais nous sommes sûrs, que c'est l'œuvre de quelqu'un. Elle parlait bien. Jamais un mot plus haut que l'autre. Mais personne ne l'aimait, au pays, normal pour une non-orc. Et même moi, je la détestais, les premières années.
La tête d'Urzupha pivota lentement en direction de Nargulg l'éloigné.
- Il y avait que lui pour entretenir et protéger certains de ses esclaves. Et puis un jour. Il y a quatre ans. Le sortilège a... Je sais pas, j'y connais rien à ces choses-là. Mais depuis quatre ans qu'elle est enfermée dans cette boule de cristal. Et depuis quatre ans, le brillant de la boule de cristal ne fait que diminuer.
La femme souleva délicatement l'orbe à l'éclat timide, hissant ce dernier jusqu'au menton du maudit cornu. Ses yeux blanchâtres flottant au-dessus de la sphère maléficière.
- Liriha n'a pas des milliers d'années devant elle, contrairement à Kar'ath. Elle est mourante. J'ai besoin d'elle, pour tenir les clans orcs il faut-
- Tu te gourres si tu crois qu'elle, l'humaine, va s'investir dans tes projets. Revoici Nargulg, monsieur le coupeur de parole, placide et chiant comme les caillasses.
- HEIN ?! Elle l'a déjà fait j'te signale. Suffit de recommencer ! Elle déposa doucement l'orbe sur le sol caverneux. Bravant Nargulg en se tenant debout.
- "Elle l'a déjà fait" parce que c'était une esclave, entourée par des milliers d'orcs.
- On sait jamais, c'est une amie, elle pourrait me rendre ce petit service.
"Petit service", "amie", ça amusait proprement Nargulg, d'entendre Urzupha la tout aussi ignare que lui, parler ainsi de Liriha. Au moins, la guerrière ne foutait pas la merde dans le campement de fortune, préférant la détente enfumée - ou alcoolisée, au choix - aux côtés de Dante. D'ailleurs, était venu le tour, pour le cornu, d'être questionné par nulle autre qu'Urzupha.
- Et toi alors ça fait combien de temps que t'es avec Kar'ath ? Y a d'autres épées du même style ? Et tu t'fais pas trop chier dans ce pays mort ? J'sais que y a l'autre et son armée à descendre dans les montagnes, mais tu feras quoi après ? Rien que de l'alpinisme ?
La boule de cristal rangée dans sa besace, peu après, ce furent les lèvres noires de la balafrée maléfique d'approcher une esgourde de l'oni, pour lui partager l'appétit pulsionnel qui infiltrait son être au fil du temps.
- Dis, tu comptes quand même pas dormir sur la béquille cette nuit ? Une orc comme moi, ça te changera des pisseuses-chouineuses avec la peau sur les os, et qui savent que faire l'étoile de mer.
Elle dévora Dante du regard, le sommet de sa langue se balada grossièrement entre ses deux crocs externes. La débauche. Une autre caractéristique d'Urzupha. Quand les mirettes de cette dernière atterrirent sur le mâle orc, l'envie de la luxurieuse créature allait croissante, et celle-ci de poursuivre sous peu, l'opération rentre dedans. La lourdeur pour mode d'emploi, on envoyait paître le raffinement et la courtoisie, ces machins d'hypocrites finit à la pisse, ou de bonnes gens civilisées. Sérieusement, regardez ces trois barbares. Vous les voyez dragouiller à coups de verve sentimentale ? Allez, ça dégage, pas de manières sophistiquées près des feux. Sur cette base bien compris, Urzupha l'impatiente ajouta en direction de Dante, pendant qu'elle se dénuda sans la moindre gêne devant lui.
- Quand t'auras marre de boire et fumer, rejoins-nous ! Et laisse Kar'ath regarder, ça lui f'ra le plus grand bien, héhé.
Un clin d'œil complice offert à l'épée - démon qui se rinça l'oeil. La nuit promettait d'être excellente pour Urzupha et Nargulg, sous les divines auspices.
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Plus tôt dans la journée, loin, très loin à l'Ouest. Le fort Normonlir essuyait déjà la pluvieuse colère des cieux charbonneux. Les boueuses tranchées montagneuses, sillonnant par rangées gigantesques les avant de la place-forte. Indubitablement, le fort était une forteresse. La "bande" d'Edrir ; une armée de plusieurs centaines de crapules - soldats. Sous le fort, une véritable cité souterraine infestée de serviteurs exploités jusqu'à l'extinction, semblait ne jamais dormir. Jamais, les couches inférieures inféodées aux troupes d'Edrir ne virent le Soleil se lever, ni les étoiles défiler. Jour et nuit, les esclaves travaillèrent, organisés en multiples équipes alternantes, les fouets de la cruauté leur rappelaient constamment qu'ils n'étaient pas ici pour lambiner, mais crever pour le bien-être de leurs supérieurs en armes. Ces mêmes soldats, ne furent que les serviteurs d'Edrir, dont l'ambition conquérante trouva un terreau fertile en le Shoumeï dévasté. Edrir fut plus qu'une petite crapule vivotant de délits oubliables, c'était un géant dans la force de l'âge. Un guerrier qui en vit des vertes et des pas mûres toute sa vie. Un criminel que l'on ne referait pas de sitôt. Il voulait dominer, et il le fit.
Possédant la puissance physique pour meilleur argument, ses hommes placèrent en cet homme une foi aveugle, car son succès fit leurs beaux jours. Aujourd'hui, la gronde à l'égard de l'oni et de l'orc fulmina, derrière les murs du fort. Des dizaines d'hommes d'Edrir n'étaient pas revenus de leur expédition. Plus grave encore, la découverte du charnier, l'œuvre macabre de Dante et Nargulg, aiguisa l'implacable instinct de domination ruisselant du surhomme nommé Edrir. Ce dernier ne toléra point que l'on marche sur ses plates-bandes.
Trois dizaines de soldats en armure de plates intégrales, posèrent genoux à terre devant leur terrifiant seigneur, installé sur un trône veiné d'or. Le gigantisme de la salle, supportée par de superbes colonnes sculptées à la perfection, couvertes de tentures rouges et dorées.
À sa gauche, debout, un être encapuchonné, grand quoique chétif, le visage couvert d'un masque sinistre impossible à définir. À sa droite, un gobelin à la laideur manifeste, debout également, néanmoins trop petit pour que sa tête ne dépassa l'accoudoir du trône. Ainsi, nous avions en ces lieux, Edrir pour dirigeant absolu, et deux lieutenants attentifs, statiques et muets. Le silence fut rompu par le tas de muscle et maître de l'assemblée, Edrir, dont les cordes vocales dévoilèrent une voix aussi grave qu'âpre.
- Edrir Galitheos:
L'être longiligne et masqué, drapé de tissus enténébrés, s'avança de quelques pas et fit désormais face à son seigneur, l'être mystérieux ploya naturellement le genou, la face dissimulée pointant le sol dallé de marbre, à présent, il attendait les ordres.
- Commence par retirer et détruire ton masque ! Avec ta garde personnelle et cent soldats, tu iras traquer et tuer ceux qui ont été assez fous pour me défier.
La capuche tomba, et les doigts fins de l'obscur serviteur, délièrent le masque de bois dégoulinant de magie douteuse. À la première fissure, l'artefact devint poussière et les grains disparurent dans le néant. Soudain, un horrifique cri strident venant de toutes parts et de nulle part à la fois, déversa la terreur dans toute la forteresse. Esclaves et soldats, brusquement apeurés, bouchèrent leurs oreilles. Cependant, Edrir ne trembla pas, le gobelin au large sourire ne trembla pas. Des trente hommes lourdements armurés ici présents, dix ne tressaillirent point : les fidèles d'Ivasaar.
Par-dessus la toiture du fort, les nuages sombres s'agglomérèrent en un tout cotonneux, transit d'éclairs et de tonnerres, fêtant le retour de l'apôtre de l'effroi : Ivasaar Urira. Pour cet elfe malfaisant, les vivats du ciel, et les craintes des mortels furent autant de signes de l'extrême dangerosité de la créature agenouillée. Enfin, en ultime touche sur cette toile de grandiloquence irréaliste, pléthore de flux agités de mana violacé, parfaitement visible à l'œil nu, pénétrèrent l'elfe à la puissance restaurée.
- Va, Ivasaar ! Que leurs têtes rejoignent les autres aux frontières de mes terres.
L'être aux oreilles pointues, et à la longue chevelure grisonnante, redressa son visage tant pâlot que creusé. En serviteur dévoué du mal, le dialecte du Faucheur et de la Chuchoteuse fut le seul langage qu'il daignait prononcer en toute circonstance. Ainsi, sûr de lui, il prononça ces mots en Bas-Parlé.
- Oui, Maître.
- Ivasaar Urira:
Invité
Invité
Dévotion
Dévotion
Dans la quiétude de leur humble habitat contrastant sensiblement du vacarme qui s'abat avec violence sur les Rôcheuses. Le terrain n'est pas assez dangereux comme ça, il faut en plus qu'il soit trempé. Une météo merdique qui ne va pas arranger les tueurs si tant est que la pluie cesse pendant la nuit. Dans le cas contraire, la traque risque d'être encore plus compliquée que prévu. Mais pour le moment, c'est une soirée au chaud rythmée par les senteurs du tabac et le goût légèrement sucré d'une liqueur de basse qualité. Aucune différence pour Dante. Enfin si, il est largement capable de la faire mais il n'est pas du genre à chipoter pour si peu. Echangeant la pipe pour la bouteille, l'Oni n'a aucune intention de se mettre minable quoi qu'il n'y aurait sûrement pas assez d'alcool pour ça dans toute la bouteille entière, mais il peut bien profiter de quelques gorgées pour rassasier sa gorge sèche. L'eau c'est pas mal mais on s'en lasse vite. D'ailleurs, Dante se fait la réflexion que Urzupha est un peu plus agréable à vivre avec du tabac et de l'alcool. C'est bon à savoir.
Puisque les deux croyants ne sont pas de grands bavards, c'est encore à Urzupha de détendre l'atmosphère avec quelques histoires cette fois. L'Oni pose ses yeux sombres sur l'Orc et l'écoute attentivement. Ce n'est pas comme s'il y avait quelque chose de plus intéressant à faire de toute façon. Un humour tout à fait particulier que celui de ces Orcs là. Urzupha réussit à arracher bref sourire à l'Oni ce qui est déjà une sacrée victoire, pendant que Kar'ath s'esclaffe à gorge déployée pour accompagner la barbare dans son récit. Pour rire et s'amuser de l'injustice, il n'y avait bien que cette petite troupe d'enfoirés. Des passages à tabac, Urzupha devait y être accoutumée de toute façon. Elle a le chic pour emmerder le monde et pour provoquer les autres alors lui taper sur la gueule pour qu'elle se la ferme, ça doit être assez courant.
« J'en ai une, j'en ai une ! Dante, raconte-leur ! »
« Quoi ? »
« Pendant la guerre, la patrouille Reikoise avec l'autre dinde qui faisait que de geindre ! Tu te souviens pas ?! Mais si ! Rhaa, t'es nul. Je vous la raconte ! »
Des patrouilles Reikoises pendant la guerre, il y en a eu plus d'une alors ça ne l'aide pas trop. Et les soldats apeurés, il y en avait tout le temps. Puis les Reikois, ils se ressemblent tous, non ? Des connards en armure, Dante n'a jamais fait de différence et encore moins sur un champ de bataille.
« C'était pendant la guerre, la dernière là il y a quelques mois. On dirait pas comme ça mais Dante c'était une vraie terreur ! Le Démon des Rôcheuses, qu'on l'appelait ! On avait élu domicile dans un village abandonné un peu plus loin au sud dans les Rôcheuses, il y avait un grand escalier de pierre pour l'atteindre. Retenez bien cette information c'est important ! Les montagnes étaient un point stratégique, alors il y avait régulièrement du passage ! Des petites patrouilles, quelques escortes de reconnaissance voyez le genre. Difficile de faire passer un bataillon entier sans une route sûre. Des fois des morts-vivants, d'autres fois des Reikois... Souvent des Reikois ! »
« C'est long. Abrège. »
« Laisse-moi finir ! Le contexte est important. Alors donc, cet Oni là il est pas du genre bavard et il aime pas beaucoup l'Empire du coup pour faire chier les Reikois, il bloquait certaines routes pour forcer les convois à emprunter des chemins plus escarpées dont certains qui menaient vers le village dont je vous ai parlé au début. L'embuscade parfaite ! Donc un jour il y a quoi, une dizaine de soldats ? Ouais une dizaine est tombée dans le piège. Putain quel spectacle, fallait être là je vous jure ! »
L'Oni reste impassible pendant le récit, pas du genre à se vanter de ses excès de colère et de violence immodérés. C'était un autre homme à cette époque. Il préfère noyer sa peine au goulot de sa liqueur.
« Du sang partout ! PARTOUT j'vous dit ! Sur le sol, sur les murs. Et voilà qu'un bras s'envole, puis que je t'arrache la tête pour la balancer sur ton collègue. Un sacré bordel, c'était sympa quand j'y repense. On savait s'amuser à l'époque hein mon pote ? »
« On est pas pote. »
« Ahaha ! Il m'adore. Donc je disais, on cogne dans le tas, ça pisse le sang et tout. Enfin surtout lui, moi je gueulais tout du long pour me foutre de la gueule de ces faiblards. Les mortels savaient se battre au moins du temps de ma grandeur. Et c'est à ce moment-là qu'on se rend compte qu'il reste plus que deux connards encore debout ! Enfin debout, tout est relatif. Il y avait une donzelle qui a perdu sa jambe dans l'affrontement et qui faisait que pleurer en rampant sur le sol et un ptit gars, beaucoup trop jeune pour être là d'ailleurs. Il bougeait plus, terrifié ! Il s'était pissé dessus je crois, ça gouttait sous son armure. C'était trop marrant. Vous savez ce que Dante a fait ? »
Le Démon ricanne avant même de raconter la fin de l'histoire.
« Il a jeté une épée entre les deux soldats et il leur a dit : "Le dernier encore en vie gagne le droit de rentrer vivant." POUAHAHA ! Alors du coup le p'tit jeunot il s'est jeté sur l'épée et il a poignardé sa collègue sans poser de question ! AHAHA ! Attendez, attendez. Le plus drôle c'est qu'en repartant, il est tombé dans les escaliers et il est MORT ! BAHAHAHAHA »
Le rire du Démon s'entend à des kilomètres à la ronde, un pouffement à en réveiller tout le quartier. Il s'en cognerait le crâne sur le sol s'il pouvait. Il mettra bien une bonne minute à arrêter de casser les oreilles des tueurs. Le calme pu enfin reprendre et l'Oni après avoir siphonné une partie de la bouteille, rendra ce qu'il reste à la femme de Nargulg. Satisfait de ses quelques senteurs et saveurs dont il ne profite que trop rarement. Il n'en raffole pas vraiment mais de temps à autres, c'est agréable. Bref, une histoire cette fois qui intéresse beaucoup plus le chevalier errant. Celle de la petite sphère verte. Alors il hausse d'abord un sourcil quand il apprend qu'on parle d'une humaine et même d'une magicienne. Certainement une prise malheureuse qui est tombée aux mains de quelques Orcs barbares. Il écoute la suite l'air perplexe face à cette histoire de sortilège et d'esclave. Dante n'y connait pas beaucoup plus en magie, c'est pas son rayon alors il ne sera d'aucune utilité à ce niveau. Il proposerait bien de taper dessus pour voir si ça fait sortir l'humaine de sa cage mais ce n'est sûrement pas une bonne idée après réflexion avec lui-même.
Il n'intervient pas pendant la scène de ménage, les yeux rivés sur la petite sphère posée sur le sol. La magie peut prendre des facettes bien curieuses, parfois. C'est alors qu'il se fait harceler de question par l'autre Orc et elle ne lui laisse même pas le temps de répondre avant d'en poser une autre. La chieuse de service est de retour. Alors en haussant les épaules, l'Oni formule une réponse très simple pour répondre à toutes ses interrogations en même temps.
« Quelques mois. Et je sais pas. Je verrais le moment venu. »
C'est qu'elle sait se montrer insistante cette saloperie d'Orc. Il peut lire l'envie sur son visage et sentir le désir grandissant dans sa voix. L'Oni ne montre clairement pas autant de volonté. Le cornu n'est pas non plus du genre à s'embêter avec des jeux de séduction alors il n'est pas tant dérangé que ça par ses commentaires déplacés et ses tentatives de faire naître un brin de lubricité chez Dante. La vérité c'est qu'il n'a pas l'habitude de coucher avec des femmes qui ont essayé de le tuer juste avant. Peut-être que son uppercut ravageur est toujours gravé dans son esprit, il doit l'avoir encore en travers de la gorge. Alors Dante reste là à bouder dans son coin de la grotte pendant que les deux Orcs vont batifoler un peu plus loin, bien que la grotte n'est pas si grande que ça.
« Putain, t'es un veinard. Qu'est-ce que je donnerais pas pour être à ta place. Attends, tu vas pas rester là quand même ? »
« Qu'est-ce que ça peut te foutre ? »
« Tu te fous de ma gueule. T'as pas touché une femme depuis que je te connais. Bon. Il y en avait pas beaucoup de potentiellement consentante mais... on s'en cogne de ça. Moi quand j'avais envie, je prenais tout ce qui me passait sous la main. Me dis pas que tu manges pas de ce pain là ? »
« Je t'emmerde. »
« Pas de jugement entre nous, mon pote ! Moi je m'en fous, tu sais. Comme on disait de mon temps, un trou c'est un trou ! »
Le cornu, celui qui est en liberté, se met à doucement grogner dans son coin. Piqué dans son égo ? C'est pas impossible. Ne jamais remettre la virilité d'un guerrier en question, c'est bien connu. Le regard tourné vers l'extérieur de la grotte, le déluge ne faiblit pas un seul instant. L'idée d'aller faire un tour lui traverse l'esprit mais ce n'est visiblement pas possible. Alors à défaut d'être le témoin des couinements incessants de ses compagnons de route, autant faire un effort pour se décoincer un coup et participer à la fête. Ça lui fera le plus grand bien et qui sait, c'est peut-être sa dernière occasion de profiter des petits plaisirs de la vie pendant une nuit agitée.
Départ aux premières lueurs de la journée. Il pleut encore mais moins intensément. Le ciel est gris et toujours très menaçant mais pour le moment ils peuvent reprendre la route. Alors autant en profiter. Dante récupère ses maigres affaires, enfile une fourrure à capuche et guide à nouveau le pas. Vers l'Ouest, comme c'est la seule indication qu'ils ont. Toujours plus loin vers l'Ouest jusqu'à apercevoir les rivages de Shoumei et la grande étendue d'eau salée juste derrière. Il a fallu une demi-journée pour tomber sur les premiers signes annonciateurs. Quelques têtes sur des piques, la fameuse et très reconnaissable façon de faire de Edrir. Ils ont bien tourné en rond pendant quelques heures mais maintenant, ils sont sur la bonne voie. Et ils n'ont aucun mal à trouver fort Normonlir croulant sous la pluie, prenant un peu de hauteur à bonne distance pour éviter de se faire repérer par les guetteurs. Un imposant fort taillé à même la roche dont les abords ont été solidement fortifié par un solide camp de base et quelques baraquements. Il y a pas mal d'activités à l'extérieur et les tueurs ne suspectent même pas encore qu'il y a encore plus de monde sous leurs pieds.
Cette quête est un bourbier monstre. Il y a des gardes absolument partout, aucun moyen de se glisser par là dans le campement sans se faire voir. Pas sans une bonne diversion en tout cas. Les trois tueurs manquent cruellement d'information, peut-être qu'il y a une autre entrée plus discrète qu'ils pourraient emprunter mais une chose est sûre, c'est qu'ils sont obligés de revoir leurs atteintes à la baisse. Ce serait du suicide de se jeter tête baissée là-dedans. L'Oni reste silencieux pendant un moment, contemplant la forteresse et cherchant une solution.
« Il nous faut un prisonnier. Quelqu'un à interroger et qui pourra nous donner des informations sur leurs effectifs et sur les différents moyens d'entrer. On va attendre une bonne occasion pour tendre une embuscade. »
Dante a déjà mis de côté l'idée de massacrer tout le monde. Par contre, peut-être qu'ils peuvent se frayer un chemin vers les prisons de la forteresse pour libérer les esclaves tout en faisant un petit carnage sur la route. Parce qu'après tout, les deux Orcs et l'Oni ne font pas dans la demi-mesure.
CENDRES
Puisque les deux croyants ne sont pas de grands bavards, c'est encore à Urzupha de détendre l'atmosphère avec quelques histoires cette fois. L'Oni pose ses yeux sombres sur l'Orc et l'écoute attentivement. Ce n'est pas comme s'il y avait quelque chose de plus intéressant à faire de toute façon. Un humour tout à fait particulier que celui de ces Orcs là. Urzupha réussit à arracher bref sourire à l'Oni ce qui est déjà une sacrée victoire, pendant que Kar'ath s'esclaffe à gorge déployée pour accompagner la barbare dans son récit. Pour rire et s'amuser de l'injustice, il n'y avait bien que cette petite troupe d'enfoirés. Des passages à tabac, Urzupha devait y être accoutumée de toute façon. Elle a le chic pour emmerder le monde et pour provoquer les autres alors lui taper sur la gueule pour qu'elle se la ferme, ça doit être assez courant.
« J'en ai une, j'en ai une ! Dante, raconte-leur ! »
« Quoi ? »
« Pendant la guerre, la patrouille Reikoise avec l'autre dinde qui faisait que de geindre ! Tu te souviens pas ?! Mais si ! Rhaa, t'es nul. Je vous la raconte ! »
Des patrouilles Reikoises pendant la guerre, il y en a eu plus d'une alors ça ne l'aide pas trop. Et les soldats apeurés, il y en avait tout le temps. Puis les Reikois, ils se ressemblent tous, non ? Des connards en armure, Dante n'a jamais fait de différence et encore moins sur un champ de bataille.
« C'était pendant la guerre, la dernière là il y a quelques mois. On dirait pas comme ça mais Dante c'était une vraie terreur ! Le Démon des Rôcheuses, qu'on l'appelait ! On avait élu domicile dans un village abandonné un peu plus loin au sud dans les Rôcheuses, il y avait un grand escalier de pierre pour l'atteindre. Retenez bien cette information c'est important ! Les montagnes étaient un point stratégique, alors il y avait régulièrement du passage ! Des petites patrouilles, quelques escortes de reconnaissance voyez le genre. Difficile de faire passer un bataillon entier sans une route sûre. Des fois des morts-vivants, d'autres fois des Reikois... Souvent des Reikois ! »
« C'est long. Abrège. »
« Laisse-moi finir ! Le contexte est important. Alors donc, cet Oni là il est pas du genre bavard et il aime pas beaucoup l'Empire du coup pour faire chier les Reikois, il bloquait certaines routes pour forcer les convois à emprunter des chemins plus escarpées dont certains qui menaient vers le village dont je vous ai parlé au début. L'embuscade parfaite ! Donc un jour il y a quoi, une dizaine de soldats ? Ouais une dizaine est tombée dans le piège. Putain quel spectacle, fallait être là je vous jure ! »
L'Oni reste impassible pendant le récit, pas du genre à se vanter de ses excès de colère et de violence immodérés. C'était un autre homme à cette époque. Il préfère noyer sa peine au goulot de sa liqueur.
« Du sang partout ! PARTOUT j'vous dit ! Sur le sol, sur les murs. Et voilà qu'un bras s'envole, puis que je t'arrache la tête pour la balancer sur ton collègue. Un sacré bordel, c'était sympa quand j'y repense. On savait s'amuser à l'époque hein mon pote ? »
« On est pas pote. »
« Ahaha ! Il m'adore. Donc je disais, on cogne dans le tas, ça pisse le sang et tout. Enfin surtout lui, moi je gueulais tout du long pour me foutre de la gueule de ces faiblards. Les mortels savaient se battre au moins du temps de ma grandeur. Et c'est à ce moment-là qu'on se rend compte qu'il reste plus que deux connards encore debout ! Enfin debout, tout est relatif. Il y avait une donzelle qui a perdu sa jambe dans l'affrontement et qui faisait que pleurer en rampant sur le sol et un ptit gars, beaucoup trop jeune pour être là d'ailleurs. Il bougeait plus, terrifié ! Il s'était pissé dessus je crois, ça gouttait sous son armure. C'était trop marrant. Vous savez ce que Dante a fait ? »
Le Démon ricanne avant même de raconter la fin de l'histoire.
« Il a jeté une épée entre les deux soldats et il leur a dit : "Le dernier encore en vie gagne le droit de rentrer vivant." POUAHAHA ! Alors du coup le p'tit jeunot il s'est jeté sur l'épée et il a poignardé sa collègue sans poser de question ! AHAHA ! Attendez, attendez. Le plus drôle c'est qu'en repartant, il est tombé dans les escaliers et il est MORT ! BAHAHAHAHA »
Le rire du Démon s'entend à des kilomètres à la ronde, un pouffement à en réveiller tout le quartier. Il s'en cognerait le crâne sur le sol s'il pouvait. Il mettra bien une bonne minute à arrêter de casser les oreilles des tueurs. Le calme pu enfin reprendre et l'Oni après avoir siphonné une partie de la bouteille, rendra ce qu'il reste à la femme de Nargulg. Satisfait de ses quelques senteurs et saveurs dont il ne profite que trop rarement. Il n'en raffole pas vraiment mais de temps à autres, c'est agréable. Bref, une histoire cette fois qui intéresse beaucoup plus le chevalier errant. Celle de la petite sphère verte. Alors il hausse d'abord un sourcil quand il apprend qu'on parle d'une humaine et même d'une magicienne. Certainement une prise malheureuse qui est tombée aux mains de quelques Orcs barbares. Il écoute la suite l'air perplexe face à cette histoire de sortilège et d'esclave. Dante n'y connait pas beaucoup plus en magie, c'est pas son rayon alors il ne sera d'aucune utilité à ce niveau. Il proposerait bien de taper dessus pour voir si ça fait sortir l'humaine de sa cage mais ce n'est sûrement pas une bonne idée après réflexion avec lui-même.
Il n'intervient pas pendant la scène de ménage, les yeux rivés sur la petite sphère posée sur le sol. La magie peut prendre des facettes bien curieuses, parfois. C'est alors qu'il se fait harceler de question par l'autre Orc et elle ne lui laisse même pas le temps de répondre avant d'en poser une autre. La chieuse de service est de retour. Alors en haussant les épaules, l'Oni formule une réponse très simple pour répondre à toutes ses interrogations en même temps.
« Quelques mois. Et je sais pas. Je verrais le moment venu. »
C'est qu'elle sait se montrer insistante cette saloperie d'Orc. Il peut lire l'envie sur son visage et sentir le désir grandissant dans sa voix. L'Oni ne montre clairement pas autant de volonté. Le cornu n'est pas non plus du genre à s'embêter avec des jeux de séduction alors il n'est pas tant dérangé que ça par ses commentaires déplacés et ses tentatives de faire naître un brin de lubricité chez Dante. La vérité c'est qu'il n'a pas l'habitude de coucher avec des femmes qui ont essayé de le tuer juste avant. Peut-être que son uppercut ravageur est toujours gravé dans son esprit, il doit l'avoir encore en travers de la gorge. Alors Dante reste là à bouder dans son coin de la grotte pendant que les deux Orcs vont batifoler un peu plus loin, bien que la grotte n'est pas si grande que ça.
« Putain, t'es un veinard. Qu'est-ce que je donnerais pas pour être à ta place. Attends, tu vas pas rester là quand même ? »
« Qu'est-ce que ça peut te foutre ? »
« Tu te fous de ma gueule. T'as pas touché une femme depuis que je te connais. Bon. Il y en avait pas beaucoup de potentiellement consentante mais... on s'en cogne de ça. Moi quand j'avais envie, je prenais tout ce qui me passait sous la main. Me dis pas que tu manges pas de ce pain là ? »
« Je t'emmerde. »
« Pas de jugement entre nous, mon pote ! Moi je m'en fous, tu sais. Comme on disait de mon temps, un trou c'est un trou ! »
Le cornu, celui qui est en liberté, se met à doucement grogner dans son coin. Piqué dans son égo ? C'est pas impossible. Ne jamais remettre la virilité d'un guerrier en question, c'est bien connu. Le regard tourné vers l'extérieur de la grotte, le déluge ne faiblit pas un seul instant. L'idée d'aller faire un tour lui traverse l'esprit mais ce n'est visiblement pas possible. Alors à défaut d'être le témoin des couinements incessants de ses compagnons de route, autant faire un effort pour se décoincer un coup et participer à la fête. Ça lui fera le plus grand bien et qui sait, c'est peut-être sa dernière occasion de profiter des petits plaisirs de la vie pendant une nuit agitée.
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Départ aux premières lueurs de la journée. Il pleut encore mais moins intensément. Le ciel est gris et toujours très menaçant mais pour le moment ils peuvent reprendre la route. Alors autant en profiter. Dante récupère ses maigres affaires, enfile une fourrure à capuche et guide à nouveau le pas. Vers l'Ouest, comme c'est la seule indication qu'ils ont. Toujours plus loin vers l'Ouest jusqu'à apercevoir les rivages de Shoumei et la grande étendue d'eau salée juste derrière. Il a fallu une demi-journée pour tomber sur les premiers signes annonciateurs. Quelques têtes sur des piques, la fameuse et très reconnaissable façon de faire de Edrir. Ils ont bien tourné en rond pendant quelques heures mais maintenant, ils sont sur la bonne voie. Et ils n'ont aucun mal à trouver fort Normonlir croulant sous la pluie, prenant un peu de hauteur à bonne distance pour éviter de se faire repérer par les guetteurs. Un imposant fort taillé à même la roche dont les abords ont été solidement fortifié par un solide camp de base et quelques baraquements. Il y a pas mal d'activités à l'extérieur et les tueurs ne suspectent même pas encore qu'il y a encore plus de monde sous leurs pieds.
Cette quête est un bourbier monstre. Il y a des gardes absolument partout, aucun moyen de se glisser par là dans le campement sans se faire voir. Pas sans une bonne diversion en tout cas. Les trois tueurs manquent cruellement d'information, peut-être qu'il y a une autre entrée plus discrète qu'ils pourraient emprunter mais une chose est sûre, c'est qu'ils sont obligés de revoir leurs atteintes à la baisse. Ce serait du suicide de se jeter tête baissée là-dedans. L'Oni reste silencieux pendant un moment, contemplant la forteresse et cherchant une solution.
« Il nous faut un prisonnier. Quelqu'un à interroger et qui pourra nous donner des informations sur leurs effectifs et sur les différents moyens d'entrer. On va attendre une bonne occasion pour tendre une embuscade. »
Dante a déjà mis de côté l'idée de massacrer tout le monde. Par contre, peut-être qu'ils peuvent se frayer un chemin vers les prisons de la forteresse pour libérer les esclaves tout en faisant un petit carnage sur la route. Parce qu'après tout, les deux Orcs et l'Oni ne font pas dans la demi-mesure.
CENDRES
Invité
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Ils s'adonnèrent aux plaisirs de la chair. Cette nuit-là. Les fous rires de Kar'ath précédèrent l'élan de lubricité, les commentaires lubriques d'Urzupha, également, pourvoyaient de quelques bienfaits, les esprits de nos deux mastodontes taciturnes. Pour cette nuit, laissons les divinistes tordre les règles de la vie religieuse, car ces chaînes de l'abstinence n'eurent jamais d'emprise sur ces trois sauvages. Sur bien des aspects, Dante et Nargulg furent de piètres divinistes. Mais enfin, cela avait-il encore une quelconque importance, par ces temps de déchéance de la noble foi ? Ridicule. Jamais de telles considérations éthiques n'envenimèrent notre orc. Ainsi vécurent-ils l'obscurité, et au lever du jour, ils étaient d'aplomb pour affronter l'inimitié nuageuse. La météo fut une ennemie tenace, néanmoins, elle n'arrêterait nullement les meurtriers, en quête de toujours plus de dopamine. Ils troquèrent donc les joies orgasmiques, pour le sanglant désir de mort. Supérieur en tout pour ces âmes en perdition...
Folie ! C'est folie que de s'aventurer sur le territoire d'Edrir Galitheos. Vous ! Qui avez défiés bandits et wyverne, comment osez-vous, aujourd'hui encore, arpenter le Shoumeï apocalyptique, et les terrifiantes rocheuses ? La douleur des jours passés ne fut-elle point une leçon pour vous ? Moi, conteur de ce chapitre, je n'arrive plus à contenir l'exécration à votre encontre ! Tous les trois, Dante, Nargulg et Urzupha... Je vous hais. Trop stupides que vous êtes, pour ne pas apercevoir le guêpier qui vous attend de pieds fermes. Alors allez-y ! Astiquez-vous la nouille sur vos Titans chéris, et embrassez votre propre destruction. Lecteur, suis-moi, je m'en vais de ce pas, piloter un personnage Ô combien plus intéressant que ces péquenauds en mal de sensations fortes.
Ainsi ai-je décidé de briser les règles du récit, au diable le passé simple et l'imparfait, tu t'y feras lecteur, car je te fais le serment, à toi et toi seul, de couvrir de malheur ces pitoyables personnages.
L'apôtre de l'effroi, me surnomme-t-on. Le thuriféraire de la désolation, disent-ils que je suis. Urira est mon nom. Ivasaar, mon prénom. Par sept fois centenaire, boursouflé en sus d'une géminée de décennies. Cette enveloppe corporelle, qui me porte est elfique, comme la précédente avant elle. Car cette vie n'est que la seconde. Ivasaar Urira, je l'ai été toute ma première vie durant, ce nom mille fois maudit, je n'hésite pas à le porter pour la seconde existence. Je me tiens devant la statue d'un démon égratigné par les âges, prisonnière des broussailles et feuillages, céans, je demeure dans l'attente du signal d'alerte des fourmis. Les fourmis ? Comment saurais-je nommer ces brigands et soldats autrement ? Ils n'ont de valeur qu'en nombre, et encore, c'est trop d'honneur que de les estimer par quantité. Le seul homme sur cette terre, en droit d'obtenir mon respect, m'a ordonné, le jour de mon sept-cent-vingt-et-unième anniversaire, d'abattre et d'étêter les moins-que-rien qui s'en prennent aux insectes, l'armée de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Je dévisage la statue de mes orbites illuminées d'un bleu indigo, en proie aux cernes. Encapuchonné de soieries uniformément noires, je résiste aux averses du jour et j'attends. D'un naturel patient, en effet, cela fait sept ans que je vis sous le masque de la rétention occulte ; jusqu'à hier, mes pouvoirs ont été contenus, parce que je suis trop pourri pour le Sekai et ses millions d'habitants. Mon âme est un sanctuaire érigé en l'honneur de la malfaisance, et du chaos. Tandis que je scrute la figure de pierre qui rivalise d'envergure avec les pins argentés, je me remémore ma longue existence.
À l'origine, ma mère est la première de mes victimes. Ma seule naissance en a déchiré ses entrailles, et sur l'autel de vie, je l'ai tué. C'est ainsi que je suis né, sous l'étoile du malheur et de la dégradation morale. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été un fidèle serviteur de la ruine généralisée. Sur mon frère, j'ai expérimenté bien des tortures psychologique, soumis son cerveau au plus terrifiant de mes outils : la scolopendre mentale. Invisible et fruit de mes affreux penchants, la scolopendre dévore magiquement l'encéphale de ma victime. Brisé, incapable de me résister, j'ai souillé l'esprit de mon aîné à tel point, qu'il en a violé notre sœur. Oui, je le reconnais, j'ai adoré transformer notre maison familiale en une gigantesque benne à ordure, enduite des tripes de ma race, par mes soins. Aujourd'hui encore, Melorn abrite le palais Urira, je le sais. Je l'ai revu il y a trois siècles de ça. Tout a changé, car le nom des Urira est couvert d'opprobre, ce palais n'appartient plus à ce sang disparu. Avec moi, c'est toute une lignée d'elfes consanguins qui s'est éteinte. Pourtant me voici, dans un corps qui n'est pas de mon sang, par mes actes, j'ai scrupuleusement entretenu le spectre des Urira, et l'infamie qui en découle. Car d'Urira, il n'y en a besoin que d'un seul. Moi.
J'attends toujours, je ne fais que ça. Ma garde rapprochée, muette, se tient debout derrière moi, elle forme un arc de cercle protecteur des plus communs. Ces dix soldats pourvu d'épées et de boucliers, je les ai dressé à ne pas me craindre, c'est donc sans caqueter qu'ils endurent la terreur, suppurée par l'aura du grand mal qui oint l'entité nuisible que je suis. Quant aux autres, les cent crapules - soldats. Je les ai organisés en dix petits groupes de combat, tous réparti à équidistance de ma position, ils quadrillent des pans entiers du secteur, avec la mobilité pour atout. S'ils tombent sur un os, je le saurai. S'ils meurent, je le saurai. Car chaque capitaine de ces petites unités, possède un cristal. Les cristaux sont la clé de voûte de ce grand coup de filet. Ainsi ai-je agi, sur ordre de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Des multitudes d'hameçons attendent d'être pincés par Dante, Nargulg et Urzupha. Oh oui. Je les connais. Un de mes devoirs est de me tenir informé de tout ce qui se trame en Shoumeï, dans les rocheuses, puis dans une moindre mesure, dans le monde entier. Les branches de notre organisation dépassent à elles seules ce territoire dévasté. Il me coûte de l'admettre, hélas, sans ce minuscule Iegmulb, cet exaspérant gobelin facétieux, nous n'en serions pas là. Puisse-t-il cesser de se mettre entre notre chef et moi, car, depuis si longtemps que je n'ai pas goûté à l'ivresse de la puissance, je me sens aujourd'hui capable de découper sa cervelle en fines tranches. À lui aussi, j'inculquerai la terreur. Un jour.
Le ciel souffre d'aucune éclaircie, c'est déjà l'après-midi et aucun Soleil à l'horizon. Excellent. Le criminel que je suis, hautement recherché dans toutes les contrées civilisées, va bientôt entrer en scène. Puisque, en ce moment même, les trois guerriers agressent mes troupes. Abrutis arrogants, massacrer des sous-êtres n'a rien d'un haut-fait. Quand je vous tomberai dessus, vous en regretterez la wyverne. Ils trucident, donc. Tous trois se déchaînent sur la petite équipe prise entre les murs d'un corridor larvikite, comme les rocheuses en abritent tant. Cherchent-ils vraiment à libérer fort Normonlir ? La manœuvre de ce trio l'indique en tout cas, dorénavant affairé à interroger le capitaine de l'unité, ce dernier souille son froc d'excréments et vide ses intestins en conséquence. Adorable. Il aura vécu ses dernières vingt-quatre heures dans la peur et c'est très bien ainsi. Dès lors, tous trois tentent de le soumettre à un interrogatoire musclé, Urzupha hausse la voix comme elle sait si bien le faire, empêchée de justesse par Nargulg tant il ne souhaite pas attirer trop d'attention sur eux. Il a bien raison. Néanmoins, tout cela est d'une odieuse futilité. Par conséquent, on assiste à un numéro grotesque, voyant le dernier survivant fondre en larmes, ou se répandre en imploration. La crainte de périr pour sûr. Cependant, son visage est grimé par la terreur depuis plus de temps qu'il n'en faut, ceci, tous trois le comprennent. Car ce trio d'imbéciles n'a que trop connu les dangers mortels, l'atmosphère d'une menace imminente, ils l'ont vécu maintes et maintes fois. Le sixième sens. L'instinct. La même intuition qui a frappé Dante et Nargulg avant-hier, lorsque Urzupha s'est risquée à les tuer. À leurs caboches creuses, la révélation se fait en un éclair. Le vermisseau qu'ils tiennent entre leurs mains n'a peur que de moi. Ivasaar Urira. Je ne suis point en leur compagnie et déjà, je terrorise. Tel est le résultat de leur embuscade, à ce trio-là. Leur dernier adversaire épeuré, baignant dans ses déjections n'a plus qu'une chose à faire. Derrière ses dents qui claquent à répétition, sa réponse délivre mon identité aux oreilles des tueurs.
- Ivasaar... URIRAAA !!!
Conscient d'être condamné, le chefaillon préfère invoquer son pire cauchemar : moi ; à l'idée de trahir mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié. Soudain, le sortilège s'empare de mon cristal, il se dérobe ensuite à la poche de la victime afin de planer à moins d'un mètre de hauteur du misérable cloporte. Urzupha, folle comme tout, essaie d'empoigner l'étrange artefact fascinateur, luisant autant de magie noire qu'il est peinturé de couleur groseille. En vain. La pierre imbibée de maléfices éblouit temporairement l'assemblée et plonge dans la chair du survivant. Des hurlements sans précédent torturent les cordes vocales de mon petit soldat, quand le cristal poursuit son office de démolition des organes internes. Inconscient, son corps n'a plus que des spasmes inquiétants à prodiguer à la vue de mes ennemis, tel un spectacle des plus morbide. La carcasse du défunt capitaine lévite alors, puis quand vient l'impulsion occulte, le cristal ayant sifflé la dernière goutte de vie de ma victime, secoue cette dernière dans tous les sens. Le cadavre, brisé contre les murs avoisinants achève sa course à l'auto-destruction haut, très haut dans le ciel, bien au-dessus des géants. C'est alors que mon joyau de nuisance perfore la trachée du macchabée, il se libère finalement de l'étreinte corporelle, laquelle n'a plus qu'à finir en bouillie, entre roches et fientes. Ainsi trône mon bijou, dessous les cumulonimbus. Pas effrayée pour un sou, Urzupha interroge nerveusement une situation qu'elle pense, à juste titre, aussi inexplicable que préoccupante.
- Mais putain, c'est quoi ce bordel ?!
Nargulg ne réplique pas, car il n'en sait rien, des mystères de la magie noire. Il ne sait rien sur rien, c'est un dégénéré enfanté par l'ignorance crasse. Actuellement, sa seule préoccupation est de fixer l'étrangeté qui se veut être une étoile à la place des étoiles. Effectivement, mon cristal brille désormais de mille feux, il alerte mes hommes éparpillés, fatalement attirés tels des papillons de nuit, sur la position des ennemis de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié. Placide, je me tiens à des kilomètres du trio destructeur, le signal, je l'ai reçu ; seulement pour ces ennemis-là, l'engin cristallin produit le plus désagréable des sons, un cri strident similaire en toutes notes au précédent, ayant récemment affligé les planqués de la lointaine forteresse. Malgré ma faible constitution, malingre de naissance, ma voix porte un message aussi lugubre que rauque, et ce, depuis les cieux brumeux. C'est là une des capacités de mon artefact stationnaire, transmettre mes sombres palabres à mes adversaires, les premiers depuis des années. À présent, le Bas-Parlé retentit car je me dois de leur annoncer le malheur qui s'en vient les accabler par monts et par vaux.
- Vous ne pouvez pas vous cacher. Il n'y a ni espoir, ni dérobade pour vous. Que X'o-rath vous étouffe !
Mon cristal se tait, désormais sa fonction se réduit à luire telle une fusée éclairante. Inexorablement, les soldats à ma botte avancent dans la seule direction possible, en quête des tueurs à liquider. Sur les cent, dix ont d'ores et déjà périt, c'était le but. Piéger les indésirables était le but. Pour les mettre à mort, je suis prêt à retourner ciel et terre, en plus de piétiner des centaines de vies. Détails insignifiants que tout cela. La victoire au prix d'une centaine de morts est peu de chose, pour le nécromant que je suis, car la désolation est le but. La désolation est le but. Je transmets un dernier ordre à ma garde rapprochée, elle me retrouvera sur place, parce que je n'escompte pas m'attarder devant l'effigie d'une antiquité. Par conséquent, en adepte de la sorcellerie, je me détache de la croute terrestre et prends mon envole. Point de formule abracadabrantesque ne sort de ma bouche. Point de geste de la main désuet. La magie, je l'exerce seulement par le pouvoir de ma volonté et ce que je désire, c'est de les voir endurer bataille sur bataille, perché à bien cinquante mètres au-dessus de la mêlée. Car je leur suis infiniment supérieur. J'arrive.
- On se casse. On est dans une impasse ici, on bouge.
Bonne idée Nargulg. Allez, bougez. Quittez cette voie sans issue joliment décorée de corps inertes, ensuite voyez combien une quarantaine de mes soldats sont déjà parés à en découdre. Accoutumés à jouer de provocations plus abjectes les unes que les autres, aujourd'hui la troupe de bandits fait preuve d'un effroyable sérieux. Ils ne se moquent pas, ils foncent vous saigner. Conscients de mon imminente entrée en scène, ils forcent le destin pour satisfaire mes ordres aussi clairs que concis : vous abattre. Leurs rangées s'étendent pour tenter de cerner les trois. L'initiative du couple d'orcs n'attend pas, ils chargent la petite armée pour en percer la formation. Malgré les lances et les claymores, les épées et les targes faisant bloc. Les orcs foncent dans la mêlée, à l'instar d'une force incoercible désireuse d'assouvir un besoin tant primaire que répugnant, le meurtre. La bestialité pour cri de guerre, Nargulg et Urzupha font preuve d'une synergie hors du commun. C'est ainsi que débute réellement les hostilités. Un terrain abrupt pour arène, la fange par endroit similaire à un marécage, est étroitement surveillés par les cimes boisées redoutant d'être emportés par les excès du trio destructeur.
C'est cela. Battez-vous. Souffrez. Épuisez-vous. Ce n'est que la première vague de mes troupes. D'autres accourent en renfort, la dérisoire quantité cherche à vous submerger et moi, Ivasaar Urira, j'approche. Ainsi ai-je commandé, sur ordre de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Folie ! C'est folie que de s'aventurer sur le territoire d'Edrir Galitheos. Vous ! Qui avez défiés bandits et wyverne, comment osez-vous, aujourd'hui encore, arpenter le Shoumeï apocalyptique, et les terrifiantes rocheuses ? La douleur des jours passés ne fut-elle point une leçon pour vous ? Moi, conteur de ce chapitre, je n'arrive plus à contenir l'exécration à votre encontre ! Tous les trois, Dante, Nargulg et Urzupha... Je vous hais. Trop stupides que vous êtes, pour ne pas apercevoir le guêpier qui vous attend de pieds fermes. Alors allez-y ! Astiquez-vous la nouille sur vos Titans chéris, et embrassez votre propre destruction. Lecteur, suis-moi, je m'en vais de ce pas, piloter un personnage Ô combien plus intéressant que ces péquenauds en mal de sensations fortes.
Ainsi ai-je décidé de briser les règles du récit, au diable le passé simple et l'imparfait, tu t'y feras lecteur, car je te fais le serment, à toi et toi seul, de couvrir de malheur ces pitoyables personnages.
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L'apôtre de l'effroi, me surnomme-t-on. Le thuriféraire de la désolation, disent-ils que je suis. Urira est mon nom. Ivasaar, mon prénom. Par sept fois centenaire, boursouflé en sus d'une géminée de décennies. Cette enveloppe corporelle, qui me porte est elfique, comme la précédente avant elle. Car cette vie n'est que la seconde. Ivasaar Urira, je l'ai été toute ma première vie durant, ce nom mille fois maudit, je n'hésite pas à le porter pour la seconde existence. Je me tiens devant la statue d'un démon égratigné par les âges, prisonnière des broussailles et feuillages, céans, je demeure dans l'attente du signal d'alerte des fourmis. Les fourmis ? Comment saurais-je nommer ces brigands et soldats autrement ? Ils n'ont de valeur qu'en nombre, et encore, c'est trop d'honneur que de les estimer par quantité. Le seul homme sur cette terre, en droit d'obtenir mon respect, m'a ordonné, le jour de mon sept-cent-vingt-et-unième anniversaire, d'abattre et d'étêter les moins-que-rien qui s'en prennent aux insectes, l'armée de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Je dévisage la statue de mes orbites illuminées d'un bleu indigo, en proie aux cernes. Encapuchonné de soieries uniformément noires, je résiste aux averses du jour et j'attends. D'un naturel patient, en effet, cela fait sept ans que je vis sous le masque de la rétention occulte ; jusqu'à hier, mes pouvoirs ont été contenus, parce que je suis trop pourri pour le Sekai et ses millions d'habitants. Mon âme est un sanctuaire érigé en l'honneur de la malfaisance, et du chaos. Tandis que je scrute la figure de pierre qui rivalise d'envergure avec les pins argentés, je me remémore ma longue existence.
À l'origine, ma mère est la première de mes victimes. Ma seule naissance en a déchiré ses entrailles, et sur l'autel de vie, je l'ai tué. C'est ainsi que je suis né, sous l'étoile du malheur et de la dégradation morale. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été un fidèle serviteur de la ruine généralisée. Sur mon frère, j'ai expérimenté bien des tortures psychologique, soumis son cerveau au plus terrifiant de mes outils : la scolopendre mentale. Invisible et fruit de mes affreux penchants, la scolopendre dévore magiquement l'encéphale de ma victime. Brisé, incapable de me résister, j'ai souillé l'esprit de mon aîné à tel point, qu'il en a violé notre sœur. Oui, je le reconnais, j'ai adoré transformer notre maison familiale en une gigantesque benne à ordure, enduite des tripes de ma race, par mes soins. Aujourd'hui encore, Melorn abrite le palais Urira, je le sais. Je l'ai revu il y a trois siècles de ça. Tout a changé, car le nom des Urira est couvert d'opprobre, ce palais n'appartient plus à ce sang disparu. Avec moi, c'est toute une lignée d'elfes consanguins qui s'est éteinte. Pourtant me voici, dans un corps qui n'est pas de mon sang, par mes actes, j'ai scrupuleusement entretenu le spectre des Urira, et l'infamie qui en découle. Car d'Urira, il n'y en a besoin que d'un seul. Moi.
J'attends toujours, je ne fais que ça. Ma garde rapprochée, muette, se tient debout derrière moi, elle forme un arc de cercle protecteur des plus communs. Ces dix soldats pourvu d'épées et de boucliers, je les ai dressé à ne pas me craindre, c'est donc sans caqueter qu'ils endurent la terreur, suppurée par l'aura du grand mal qui oint l'entité nuisible que je suis. Quant aux autres, les cent crapules - soldats. Je les ai organisés en dix petits groupes de combat, tous réparti à équidistance de ma position, ils quadrillent des pans entiers du secteur, avec la mobilité pour atout. S'ils tombent sur un os, je le saurai. S'ils meurent, je le saurai. Car chaque capitaine de ces petites unités, possède un cristal. Les cristaux sont la clé de voûte de ce grand coup de filet. Ainsi ai-je agi, sur ordre de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Des multitudes d'hameçons attendent d'être pincés par Dante, Nargulg et Urzupha. Oh oui. Je les connais. Un de mes devoirs est de me tenir informé de tout ce qui se trame en Shoumeï, dans les rocheuses, puis dans une moindre mesure, dans le monde entier. Les branches de notre organisation dépassent à elles seules ce territoire dévasté. Il me coûte de l'admettre, hélas, sans ce minuscule Iegmulb, cet exaspérant gobelin facétieux, nous n'en serions pas là. Puisse-t-il cesser de se mettre entre notre chef et moi, car, depuis si longtemps que je n'ai pas goûté à l'ivresse de la puissance, je me sens aujourd'hui capable de découper sa cervelle en fines tranches. À lui aussi, j'inculquerai la terreur. Un jour.
Le ciel souffre d'aucune éclaircie, c'est déjà l'après-midi et aucun Soleil à l'horizon. Excellent. Le criminel que je suis, hautement recherché dans toutes les contrées civilisées, va bientôt entrer en scène. Puisque, en ce moment même, les trois guerriers agressent mes troupes. Abrutis arrogants, massacrer des sous-êtres n'a rien d'un haut-fait. Quand je vous tomberai dessus, vous en regretterez la wyverne. Ils trucident, donc. Tous trois se déchaînent sur la petite équipe prise entre les murs d'un corridor larvikite, comme les rocheuses en abritent tant. Cherchent-ils vraiment à libérer fort Normonlir ? La manœuvre de ce trio l'indique en tout cas, dorénavant affairé à interroger le capitaine de l'unité, ce dernier souille son froc d'excréments et vide ses intestins en conséquence. Adorable. Il aura vécu ses dernières vingt-quatre heures dans la peur et c'est très bien ainsi. Dès lors, tous trois tentent de le soumettre à un interrogatoire musclé, Urzupha hausse la voix comme elle sait si bien le faire, empêchée de justesse par Nargulg tant il ne souhaite pas attirer trop d'attention sur eux. Il a bien raison. Néanmoins, tout cela est d'une odieuse futilité. Par conséquent, on assiste à un numéro grotesque, voyant le dernier survivant fondre en larmes, ou se répandre en imploration. La crainte de périr pour sûr. Cependant, son visage est grimé par la terreur depuis plus de temps qu'il n'en faut, ceci, tous trois le comprennent. Car ce trio d'imbéciles n'a que trop connu les dangers mortels, l'atmosphère d'une menace imminente, ils l'ont vécu maintes et maintes fois. Le sixième sens. L'instinct. La même intuition qui a frappé Dante et Nargulg avant-hier, lorsque Urzupha s'est risquée à les tuer. À leurs caboches creuses, la révélation se fait en un éclair. Le vermisseau qu'ils tiennent entre leurs mains n'a peur que de moi. Ivasaar Urira. Je ne suis point en leur compagnie et déjà, je terrorise. Tel est le résultat de leur embuscade, à ce trio-là. Leur dernier adversaire épeuré, baignant dans ses déjections n'a plus qu'une chose à faire. Derrière ses dents qui claquent à répétition, sa réponse délivre mon identité aux oreilles des tueurs.
- Ivasaar... URIRAAA !!!
Conscient d'être condamné, le chefaillon préfère invoquer son pire cauchemar : moi ; à l'idée de trahir mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié. Soudain, le sortilège s'empare de mon cristal, il se dérobe ensuite à la poche de la victime afin de planer à moins d'un mètre de hauteur du misérable cloporte. Urzupha, folle comme tout, essaie d'empoigner l'étrange artefact fascinateur, luisant autant de magie noire qu'il est peinturé de couleur groseille. En vain. La pierre imbibée de maléfices éblouit temporairement l'assemblée et plonge dans la chair du survivant. Des hurlements sans précédent torturent les cordes vocales de mon petit soldat, quand le cristal poursuit son office de démolition des organes internes. Inconscient, son corps n'a plus que des spasmes inquiétants à prodiguer à la vue de mes ennemis, tel un spectacle des plus morbide. La carcasse du défunt capitaine lévite alors, puis quand vient l'impulsion occulte, le cristal ayant sifflé la dernière goutte de vie de ma victime, secoue cette dernière dans tous les sens. Le cadavre, brisé contre les murs avoisinants achève sa course à l'auto-destruction haut, très haut dans le ciel, bien au-dessus des géants. C'est alors que mon joyau de nuisance perfore la trachée du macchabée, il se libère finalement de l'étreinte corporelle, laquelle n'a plus qu'à finir en bouillie, entre roches et fientes. Ainsi trône mon bijou, dessous les cumulonimbus. Pas effrayée pour un sou, Urzupha interroge nerveusement une situation qu'elle pense, à juste titre, aussi inexplicable que préoccupante.
- Mais putain, c'est quoi ce bordel ?!
Nargulg ne réplique pas, car il n'en sait rien, des mystères de la magie noire. Il ne sait rien sur rien, c'est un dégénéré enfanté par l'ignorance crasse. Actuellement, sa seule préoccupation est de fixer l'étrangeté qui se veut être une étoile à la place des étoiles. Effectivement, mon cristal brille désormais de mille feux, il alerte mes hommes éparpillés, fatalement attirés tels des papillons de nuit, sur la position des ennemis de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié. Placide, je me tiens à des kilomètres du trio destructeur, le signal, je l'ai reçu ; seulement pour ces ennemis-là, l'engin cristallin produit le plus désagréable des sons, un cri strident similaire en toutes notes au précédent, ayant récemment affligé les planqués de la lointaine forteresse. Malgré ma faible constitution, malingre de naissance, ma voix porte un message aussi lugubre que rauque, et ce, depuis les cieux brumeux. C'est là une des capacités de mon artefact stationnaire, transmettre mes sombres palabres à mes adversaires, les premiers depuis des années. À présent, le Bas-Parlé retentit car je me dois de leur annoncer le malheur qui s'en vient les accabler par monts et par vaux.
- Vous ne pouvez pas vous cacher. Il n'y a ni espoir, ni dérobade pour vous. Que X'o-rath vous étouffe !
Mon cristal se tait, désormais sa fonction se réduit à luire telle une fusée éclairante. Inexorablement, les soldats à ma botte avancent dans la seule direction possible, en quête des tueurs à liquider. Sur les cent, dix ont d'ores et déjà périt, c'était le but. Piéger les indésirables était le but. Pour les mettre à mort, je suis prêt à retourner ciel et terre, en plus de piétiner des centaines de vies. Détails insignifiants que tout cela. La victoire au prix d'une centaine de morts est peu de chose, pour le nécromant que je suis, car la désolation est le but. La désolation est le but. Je transmets un dernier ordre à ma garde rapprochée, elle me retrouvera sur place, parce que je n'escompte pas m'attarder devant l'effigie d'une antiquité. Par conséquent, en adepte de la sorcellerie, je me détache de la croute terrestre et prends mon envole. Point de formule abracadabrantesque ne sort de ma bouche. Point de geste de la main désuet. La magie, je l'exerce seulement par le pouvoir de ma volonté et ce que je désire, c'est de les voir endurer bataille sur bataille, perché à bien cinquante mètres au-dessus de la mêlée. Car je leur suis infiniment supérieur. J'arrive.
- On se casse. On est dans une impasse ici, on bouge.
Bonne idée Nargulg. Allez, bougez. Quittez cette voie sans issue joliment décorée de corps inertes, ensuite voyez combien une quarantaine de mes soldats sont déjà parés à en découdre. Accoutumés à jouer de provocations plus abjectes les unes que les autres, aujourd'hui la troupe de bandits fait preuve d'un effroyable sérieux. Ils ne se moquent pas, ils foncent vous saigner. Conscients de mon imminente entrée en scène, ils forcent le destin pour satisfaire mes ordres aussi clairs que concis : vous abattre. Leurs rangées s'étendent pour tenter de cerner les trois. L'initiative du couple d'orcs n'attend pas, ils chargent la petite armée pour en percer la formation. Malgré les lances et les claymores, les épées et les targes faisant bloc. Les orcs foncent dans la mêlée, à l'instar d'une force incoercible désireuse d'assouvir un besoin tant primaire que répugnant, le meurtre. La bestialité pour cri de guerre, Nargulg et Urzupha font preuve d'une synergie hors du commun. C'est ainsi que débute réellement les hostilités. Un terrain abrupt pour arène, la fange par endroit similaire à un marécage, est étroitement surveillés par les cimes boisées redoutant d'être emportés par les excès du trio destructeur.
C'est cela. Battez-vous. Souffrez. Épuisez-vous. Ce n'est que la première vague de mes troupes. D'autres accourent en renfort, la dérisoire quantité cherche à vous submerger et moi, Ivasaar Urira, j'approche. Ainsi ai-je commandé, sur ordre de mon Seigneur et Maître, Edrir Galitheos, que son nom soit sanctifié.
Invité
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Dévotion
Dévotion
Une embuscade rondement menée. Un piège soigneusement orchestré en réalité. Une équipe d'une dizaine de bandit a été envoyé là, comme par hasard et il n'a pas fallu très longtemps aux tueurs pour faire le ménage. C'était même d'une facilité déconcertante, l'Oni n'a même pas eu besoin de baigner sa lame noire du liquide écarlate qui s'échappe de leurs vils carcasses. Ces bandits-là n'ont rien de vrais soldats équipés et entraînés à l'art de la guerre alors pour des sauvages comme eux qui ont passés leur vie à se battre, l'écart de puissance est considérable malgré qu'ils sont bien inférieurs en nombre. Ils ont laissé un survivant comme c'était prévu à la base car le triumvirat de la brutalité a besoin d'information sur cette forteresse. Ils veulent entrer malgré le constat saisissant qu'ils ne sont clairement pas de taille face à une telle armée. Ils veulent quand même entrer pour se défouler et si possible, trouver un moyen d'atteindre les prisons pour faire sortir les esclaves et les prisonniers. Un objectif annexe qui sera pour le moment amplement suffisamment si tant est qu'ils y arrivent, rien n'est moins sûr pour le moment.
C'est le duo d'Orc qui s'occupe de l'interrogatoire, pour la simple et bonne raison que Dante est incapable d'en placer une avec Urzupha qui gueule et postillonne au visage du bandit terrifié. Compréhensible, il faudrait être complètement fou pour rester de marbre face à ces Orcs-là qui prennent un malin plaisir à le passer à tabac. L'Oni pendant ce temps-là, préfère fouiller ce qui reste des cadavres dans le doute mais sans grand succès alors il se contente plutôt de surveiller les environs. Juste au cas où il y aurait des renforts non loin, ils sont assez exposés dans cette crevasse et la prudence est de mise. L'interrogatoire en lui-même ne donnera pas grand-chose, malheureusement et Dante soupçonne déjà qu'il y a anguille sous roche. L'embuscade s'est bien passée, peut-être même un peu trop bien. Et avant même qu'il ne capte la supercherie, le plan d'Ivasaar est déjà en train de s'abattre sur eux. Le prisonnier avait un cristal autour du cou, un pendentif quelconque pour Dante mais en réalité il s'agit là d'un moyen de prévenir le mage noir de la présence des tueurs et ils sont tombés dans le panneau la tête la première. Les bandits les attendaient déjà depuis que Nargulg et Dante ont brutalement nettoyé un avant-poste hier, la faute à l'Oni d'avoir priorisé le sauvetage des victimes plutôt que l'annihilation complètement et sans délai de la véritable menace. Alors, le cristal se met à taillader le bandit de l'intérieur en envoyant des morceaux de chairs voltiger un peu partout sur le théâtre de guerre dans une scène complètement morbide.
Rien de traumatisant pour les trois compagnons qui en ont vu d'autres, soyons honnêtes mais tout de même c'était un spectacle particulier. Dante n'est pas plus avancé que les deux Orcs d'ailleurs, il n'a aucune putain d'idée de comment ça fonctionne la magie noire. La magie tout court, d'ailleurs. Et il n'est pas non plus capable de comprendre les échos lugubres qui s'échappent du cristal dans cette langue malfaisante qu'est le Bas-Parlé. Pour la première fois, ils entendent la voix d'Ivasaar mais Dante ne peut en saisir le contenu même s'il se doute qu'il ne s'agit pas là d'une invitation à prendre le thé. En réalité, ça ne l'intéresse pas vraiment et ce qu'il comprend néanmoins c'est que le cristal agit maintenant comme une alarme qui attire le reste de l'armée sur leur position. Dégainant son épée de son fourreau pour s'en saisir comme d'une lance, il balance la lame noire qui se met à fendre l'air pour faucher le cristal bruyant et lumineux en plein dans les airs. La paume de main tendue en direction de l'épée, elle se fige d'elle-même dans le ciel avant de revenir vers son porteur sous sa silencieuse volonté.
Les hostilités vont bientôt commencer et Nargulg a parfaitement raison, le trio est pris au piège dans un endroit aussi escarpé. Récupérant sa lame, le chevalier errant pivote sur ses talons pour emboîter un pas rapide derrière Urzupha et Nargulg. Cherchant à s'extirper du piège qui s'est déjà refermé sur eux, plusieurs dizaines de salopards barrent la route aux trois tueurs et puisque rebrousser chemin en direction de fort Normonlir serait du suicide, ils n'ont pas le choix que de foncer dans le tas. C'est loin d'être un problème pour ces trois brutes, ils excellent dans l'art de la violence et de la brutalité. Les deux Orcs forment un bélier violent qui percute de plein fouet le mur de bandits, de la piètre main d'oeuvre pas assez forte pour maintenir convenablement un mur de boucliers face aux tueurs néanmoins ils ne peuvent pas se permettre de les sous-estimer pour autant car les bandits sont bien supérieurs en nombre et l'étau se referme déjà sur les barbares. En plein dans la mêlée, cernés de toute part par leurs adversaires qui cherchent à les étouffer. En réalité, c'est bien le plan d'Ivasaar. Forcez les guerriers à s'épuiser avant d'entrer en scène et finir soigneusement le travail. Dante ne pense pas à ça pour le moment, bien trop occupé à trancher dans le tas et à faire voler les têtes. Les rôles s'échangent le temps d'un affrontement, Dante qui est d'habitude à l'avant-garde s'occupe cette fois d'assurer les arrières des deux Orcs et la tâche est loin d'être simple.
Pourtant, il y a quelque chose de bizarre. Les tueurs tuent encore et encore sans jamais s'arrêter, encaissant le contre-coup et les balafres laissées par des adversaires qui ne semblent même pas effrayés par les trois barbares. Car de peur, ils n'en ont qu'envers leur maître Ivasaar Urira. Envers les trois sauvages, il n'y a que de la colère et de la haine. Les bandits tombent à la pelle néanmoins leur nombre ne faiblit pas. Comment est-ce possible ? Ils devraient déjà pouvoir se dégager et se frayer un chemin au milieu des cadavres qui jonchent le sol. Des cadavres ? Où ça ? Les corps mutilés des bandits tombent et se relèvent aussitôt comme si leurs nombreuses blessures n'étaient en rien un frein à leur détermination. Impossible, Dante vient tout juste de voir un cadavre sans tête se relever en se saisissant de son épée pour repartir au combat. Comment est-ce possible ?
Magie noire !
Qui ? Lequel d'entre eux est un Nécromancien ? Il faut absolument le trouver et l'abattre car le temps ne joue pas en leur faveur contre des adversaires qui se refusent à la mort. La situation frôle bientôt la catastrophe et Dante a beau tourner la tête dans tous les sens, il ne trouve pas la trace du Nécromancien. C'est pourtant évident. Il n'est évidemment pas présent dans la mêlée, il se cache quelque part à bonne distance là où il a une vue imprenable sur l'affrontement. Une vue imprenable ? L'Oni découpe le corps d'un bandit en deux d'un coup d'épée horizontale au niveau des hanches puis il lève les yeux vers le ciel. Il y a une ombre au-dessus de leur tête, à peine dissimulée par le ciel gris et pluvieux des Rôcheuses. Le voilà, le lâche. La cible à abattre en priorité.
« Là-haut ! »
C'est bien la seule indication que donnera Dante à ses camarades Orcs pour attirer leur attention sur le véritable antagoniste de cette scène. Mais comment atteindre cet enfoiré qui voltige littéralement dans les airs en restant soigneusement hors de portée des tueurs ? Là aussi, c'est pourtant évident. Dante a besoin d'une ouverture, aussi courte soit-elle. Une seconde suffira. Mais d'abord, il va devoir se créer lui-même cette fenêtre de tir et ça commence par se débarrasser de quelques gêneurs. Alors avec la brutalité qui lui est propre, celle d'un animal assoiffé de sang, l'Oni massacre à bout de bras. Il frappe, écrase et tranche absolument tout ce qui ne ressemble pas à un Orc. Il esquive les quelques coups de lances qui tentent d'approcher de ses angles morts, avec plus ou moins de succès en réalité, mais l'important est qu'il se libère petit à petit un champ libre. Et comme si Urzupha avait compris son intention, elle vient lui prêter main forte dans son effort. La sauvage en fauche deux d'un coup de sa lourde hache et offre cette seconde tant attendue sur un plateau en argent.
Une seconde. L'Oni se redresse de toute sa longueur, un pied frotte le sol pour se placer en appuie dans son dos. Il lève le bras et d'un simple moulinet, il change sa prise sur la poignée de son épée. C'est exactement ce qu'il a fait quelques minutes plus tôt pour détruire le cristal alors voilà d'où lui vient l'idée. Il arme sa frappe comme s'il tenait une lance dans la main, se penche légèrement en arrière avant d'envoyer tout son corps vers l'avant et tend brutalement le bras vers Ivasaar en relâchant l'épée qui s'élance pour fendre les cieux en deux. La lame noire traverse les intempéries comme un boulet de canon qui file tout droit vers l'arrogant mage noir qui se pensait sûrement en sécurité. Grave erreur que d'avoir sous-estimé les compétences de Dante. L'initiative de l'Oni surprend l'antagoniste qui n'a pas le temps de réagir quand l'épée vient littéralement faucher son épaule en séparant son bras et le reste de son corps d'une frappe tranchante et chirurgicale. Néanmoins, Dante n'est pas satisfait. C'est un échec cuisant pour lui. Ce n'est pas son bras qu'il voulait lui prendre, mais bien la vie.
C'est un râle d'agonie ténébreux qui fait trembler les montagnes environnantes alors que l'Elfe s'écrase un peu plus loin sur le sol. Ivasaar est toujours en vie mais pour sûr que ça va lui laisser une trace.
« CHIEN ! JE VAIS VOUS SAIGNER COMME LES PORCS QUE VOUS ÊTES ! »
Il faut l'achever avant qu'il ne se relève, Dante le sait pourtant maintenant qu'il est désarmé, il peine à se frayer un chemin dans la mêlée. Les bandits se lancent sur l'Oni et l'assaille de tous les côtés tant qu'il n'a même pas l'occasion de rappeler son arme jusqu'à lui. Une lance se plante dans l'arrière de sa jambe gauche ce qui l'immobilise un moment en le forçant à poser le genoux au sol, ensuite c'est un coup d'épée qui lui aurait salement tranché la gorge s'il n'avait pas mis son bras en opposition. Une large entaille jusqu'à l'os vient compléter sa collection alors que le cornu se débat de toutes ses forces. Dante voit la mort de très près dans cette mêlée sanglante mais c'était un sacrifice nécessaire, l'avantage de tout ceci est qu'Ivasaar est bien trop occupé pour redonner vie à ses hommes qui tombent comme des mouches sous les coups des deux Orcs. Pas de seconde chance pour ceux-là.
Alors Dante tourne la tête vers Nargulg en se redressant péniblement sur ses deux jambes.
« Nargulg ! Le mage ! Tue-le ! »
Plus facile à dire qu'à faire, n'est-ce pas ? Ce n'est pas dit qu'Ivasaar va se laisser faire mais il faut tenter d'en finir avant que l'Elfe ne revienne à la charge car sa contre-attaque risque d'être absolument terrible pour les trois bourreaux. Alors dans cette optique, Dante offre son corps à la science. Il attrape le crâne d'un bandit dans sa large paume de main qu'il vient broyer d'un seul coup et il se sert du cadavre pour le balancer sur quelques troufions qui bloquent le chemin de Nargulg. Il brise une lance en deux pour s'en saisir de la pointe qu'il plante dans la gorge d'un deuxième bandit, se jetant la tête la première sur ses adversaires pour se frayer un chemin dans la ligne ennemie dans l'espoir d'offrir une occasion à Nargulg pour en finir avec Ivasaar. Difficile de dire si c'est suffisant mais il va bien falloir trouver une solution et rapidement.
CENDRES
C'est le duo d'Orc qui s'occupe de l'interrogatoire, pour la simple et bonne raison que Dante est incapable d'en placer une avec Urzupha qui gueule et postillonne au visage du bandit terrifié. Compréhensible, il faudrait être complètement fou pour rester de marbre face à ces Orcs-là qui prennent un malin plaisir à le passer à tabac. L'Oni pendant ce temps-là, préfère fouiller ce qui reste des cadavres dans le doute mais sans grand succès alors il se contente plutôt de surveiller les environs. Juste au cas où il y aurait des renforts non loin, ils sont assez exposés dans cette crevasse et la prudence est de mise. L'interrogatoire en lui-même ne donnera pas grand-chose, malheureusement et Dante soupçonne déjà qu'il y a anguille sous roche. L'embuscade s'est bien passée, peut-être même un peu trop bien. Et avant même qu'il ne capte la supercherie, le plan d'Ivasaar est déjà en train de s'abattre sur eux. Le prisonnier avait un cristal autour du cou, un pendentif quelconque pour Dante mais en réalité il s'agit là d'un moyen de prévenir le mage noir de la présence des tueurs et ils sont tombés dans le panneau la tête la première. Les bandits les attendaient déjà depuis que Nargulg et Dante ont brutalement nettoyé un avant-poste hier, la faute à l'Oni d'avoir priorisé le sauvetage des victimes plutôt que l'annihilation complètement et sans délai de la véritable menace. Alors, le cristal se met à taillader le bandit de l'intérieur en envoyant des morceaux de chairs voltiger un peu partout sur le théâtre de guerre dans une scène complètement morbide.
Rien de traumatisant pour les trois compagnons qui en ont vu d'autres, soyons honnêtes mais tout de même c'était un spectacle particulier. Dante n'est pas plus avancé que les deux Orcs d'ailleurs, il n'a aucune putain d'idée de comment ça fonctionne la magie noire. La magie tout court, d'ailleurs. Et il n'est pas non plus capable de comprendre les échos lugubres qui s'échappent du cristal dans cette langue malfaisante qu'est le Bas-Parlé. Pour la première fois, ils entendent la voix d'Ivasaar mais Dante ne peut en saisir le contenu même s'il se doute qu'il ne s'agit pas là d'une invitation à prendre le thé. En réalité, ça ne l'intéresse pas vraiment et ce qu'il comprend néanmoins c'est que le cristal agit maintenant comme une alarme qui attire le reste de l'armée sur leur position. Dégainant son épée de son fourreau pour s'en saisir comme d'une lance, il balance la lame noire qui se met à fendre l'air pour faucher le cristal bruyant et lumineux en plein dans les airs. La paume de main tendue en direction de l'épée, elle se fige d'elle-même dans le ciel avant de revenir vers son porteur sous sa silencieuse volonté.
Les hostilités vont bientôt commencer et Nargulg a parfaitement raison, le trio est pris au piège dans un endroit aussi escarpé. Récupérant sa lame, le chevalier errant pivote sur ses talons pour emboîter un pas rapide derrière Urzupha et Nargulg. Cherchant à s'extirper du piège qui s'est déjà refermé sur eux, plusieurs dizaines de salopards barrent la route aux trois tueurs et puisque rebrousser chemin en direction de fort Normonlir serait du suicide, ils n'ont pas le choix que de foncer dans le tas. C'est loin d'être un problème pour ces trois brutes, ils excellent dans l'art de la violence et de la brutalité. Les deux Orcs forment un bélier violent qui percute de plein fouet le mur de bandits, de la piètre main d'oeuvre pas assez forte pour maintenir convenablement un mur de boucliers face aux tueurs néanmoins ils ne peuvent pas se permettre de les sous-estimer pour autant car les bandits sont bien supérieurs en nombre et l'étau se referme déjà sur les barbares. En plein dans la mêlée, cernés de toute part par leurs adversaires qui cherchent à les étouffer. En réalité, c'est bien le plan d'Ivasaar. Forcez les guerriers à s'épuiser avant d'entrer en scène et finir soigneusement le travail. Dante ne pense pas à ça pour le moment, bien trop occupé à trancher dans le tas et à faire voler les têtes. Les rôles s'échangent le temps d'un affrontement, Dante qui est d'habitude à l'avant-garde s'occupe cette fois d'assurer les arrières des deux Orcs et la tâche est loin d'être simple.
Pourtant, il y a quelque chose de bizarre. Les tueurs tuent encore et encore sans jamais s'arrêter, encaissant le contre-coup et les balafres laissées par des adversaires qui ne semblent même pas effrayés par les trois barbares. Car de peur, ils n'en ont qu'envers leur maître Ivasaar Urira. Envers les trois sauvages, il n'y a que de la colère et de la haine. Les bandits tombent à la pelle néanmoins leur nombre ne faiblit pas. Comment est-ce possible ? Ils devraient déjà pouvoir se dégager et se frayer un chemin au milieu des cadavres qui jonchent le sol. Des cadavres ? Où ça ? Les corps mutilés des bandits tombent et se relèvent aussitôt comme si leurs nombreuses blessures n'étaient en rien un frein à leur détermination. Impossible, Dante vient tout juste de voir un cadavre sans tête se relever en se saisissant de son épée pour repartir au combat. Comment est-ce possible ?
Magie noire !
Qui ? Lequel d'entre eux est un Nécromancien ? Il faut absolument le trouver et l'abattre car le temps ne joue pas en leur faveur contre des adversaires qui se refusent à la mort. La situation frôle bientôt la catastrophe et Dante a beau tourner la tête dans tous les sens, il ne trouve pas la trace du Nécromancien. C'est pourtant évident. Il n'est évidemment pas présent dans la mêlée, il se cache quelque part à bonne distance là où il a une vue imprenable sur l'affrontement. Une vue imprenable ? L'Oni découpe le corps d'un bandit en deux d'un coup d'épée horizontale au niveau des hanches puis il lève les yeux vers le ciel. Il y a une ombre au-dessus de leur tête, à peine dissimulée par le ciel gris et pluvieux des Rôcheuses. Le voilà, le lâche. La cible à abattre en priorité.
« Là-haut ! »
C'est bien la seule indication que donnera Dante à ses camarades Orcs pour attirer leur attention sur le véritable antagoniste de cette scène. Mais comment atteindre cet enfoiré qui voltige littéralement dans les airs en restant soigneusement hors de portée des tueurs ? Là aussi, c'est pourtant évident. Dante a besoin d'une ouverture, aussi courte soit-elle. Une seconde suffira. Mais d'abord, il va devoir se créer lui-même cette fenêtre de tir et ça commence par se débarrasser de quelques gêneurs. Alors avec la brutalité qui lui est propre, celle d'un animal assoiffé de sang, l'Oni massacre à bout de bras. Il frappe, écrase et tranche absolument tout ce qui ne ressemble pas à un Orc. Il esquive les quelques coups de lances qui tentent d'approcher de ses angles morts, avec plus ou moins de succès en réalité, mais l'important est qu'il se libère petit à petit un champ libre. Et comme si Urzupha avait compris son intention, elle vient lui prêter main forte dans son effort. La sauvage en fauche deux d'un coup de sa lourde hache et offre cette seconde tant attendue sur un plateau en argent.
Une seconde. L'Oni se redresse de toute sa longueur, un pied frotte le sol pour se placer en appuie dans son dos. Il lève le bras et d'un simple moulinet, il change sa prise sur la poignée de son épée. C'est exactement ce qu'il a fait quelques minutes plus tôt pour détruire le cristal alors voilà d'où lui vient l'idée. Il arme sa frappe comme s'il tenait une lance dans la main, se penche légèrement en arrière avant d'envoyer tout son corps vers l'avant et tend brutalement le bras vers Ivasaar en relâchant l'épée qui s'élance pour fendre les cieux en deux. La lame noire traverse les intempéries comme un boulet de canon qui file tout droit vers l'arrogant mage noir qui se pensait sûrement en sécurité. Grave erreur que d'avoir sous-estimé les compétences de Dante. L'initiative de l'Oni surprend l'antagoniste qui n'a pas le temps de réagir quand l'épée vient littéralement faucher son épaule en séparant son bras et le reste de son corps d'une frappe tranchante et chirurgicale. Néanmoins, Dante n'est pas satisfait. C'est un échec cuisant pour lui. Ce n'est pas son bras qu'il voulait lui prendre, mais bien la vie.
C'est un râle d'agonie ténébreux qui fait trembler les montagnes environnantes alors que l'Elfe s'écrase un peu plus loin sur le sol. Ivasaar est toujours en vie mais pour sûr que ça va lui laisser une trace.
« CHIEN ! JE VAIS VOUS SAIGNER COMME LES PORCS QUE VOUS ÊTES ! »
Il faut l'achever avant qu'il ne se relève, Dante le sait pourtant maintenant qu'il est désarmé, il peine à se frayer un chemin dans la mêlée. Les bandits se lancent sur l'Oni et l'assaille de tous les côtés tant qu'il n'a même pas l'occasion de rappeler son arme jusqu'à lui. Une lance se plante dans l'arrière de sa jambe gauche ce qui l'immobilise un moment en le forçant à poser le genoux au sol, ensuite c'est un coup d'épée qui lui aurait salement tranché la gorge s'il n'avait pas mis son bras en opposition. Une large entaille jusqu'à l'os vient compléter sa collection alors que le cornu se débat de toutes ses forces. Dante voit la mort de très près dans cette mêlée sanglante mais c'était un sacrifice nécessaire, l'avantage de tout ceci est qu'Ivasaar est bien trop occupé pour redonner vie à ses hommes qui tombent comme des mouches sous les coups des deux Orcs. Pas de seconde chance pour ceux-là.
Alors Dante tourne la tête vers Nargulg en se redressant péniblement sur ses deux jambes.
« Nargulg ! Le mage ! Tue-le ! »
Plus facile à dire qu'à faire, n'est-ce pas ? Ce n'est pas dit qu'Ivasaar va se laisser faire mais il faut tenter d'en finir avant que l'Elfe ne revienne à la charge car sa contre-attaque risque d'être absolument terrible pour les trois bourreaux. Alors dans cette optique, Dante offre son corps à la science. Il attrape le crâne d'un bandit dans sa large paume de main qu'il vient broyer d'un seul coup et il se sert du cadavre pour le balancer sur quelques troufions qui bloquent le chemin de Nargulg. Il brise une lance en deux pour s'en saisir de la pointe qu'il plante dans la gorge d'un deuxième bandit, se jetant la tête la première sur ses adversaires pour se frayer un chemin dans la ligne ennemie dans l'espoir d'offrir une occasion à Nargulg pour en finir avec Ivasaar. Difficile de dire si c'est suffisant mais il va bien falloir trouver une solution et rapidement.
CENDRES
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Bien des gens confondent soldats et guerriers. Les premiers répondent d'abord et avant tout au devoir fait à leur chef, Etat ou nation, et ce, le plus souvent à des fins bassement matérielles. Plus commun encore, les seconds, c'est-à-dire les guerriers, côtoient les premiers cités, partagent des repas, des anecdotes et plus encore. La camaraderie se fait bonne mère cajoleuse pour eux, toutefois, sont-ils séparés par l'appétence du conflit, qu'une hiérarchie aussi invisible que palpable tend à distinguer la noble race guerrière, des rejetons qu'elle engendre. Cette drôle de réflexion, ne se partage pas en écrits, ou en discours pompeux. Il faut la vivre. Les atrocités qui en résultent, doivent être acceptées pour ce qu'elles sont : une bénédiction divine. Les obligations du soldat sont alors le but du guerrier, un cri du cœur clamant dans le tumulte, le besoin de triompher, ou périr. Tuer puis crever, en homme qui se bat et aime se battre, est le plus bel accomplissement qui soit. Pour Eux.
Ils furent moins guerriers que soldats, moins soldats que brigands, tous ceux qui jurèrent mort et anéantissement à nos mastodontes ensevelit dessous ces marées humaines. Ils vomirent des beuglements incompréhensibles, les effrayés de la horde qui se voulait armée. La peur comme discipline, la quantité pour force, jamais ils ne faiblirent puisque le maléfique sorcier elfe, à l'instar d'une épée de damoclès, attendit son heure pour clore ces puantes festivités. Les vagues de malfrats, en affreux sbires du Seigneur Ivasaar, redoublèrent d'efforts quand il envahit le ciel. Trop haut perché, des dizaines de mètres le séparaient de la multitude d'acteurs terrestres. Et pourtant, l'atmosphère écrasa les épaules du tas de bandits. Cette horreur-ci, n'était ni une démonstration grotesque d'étalage de puissance, ni le fait d'apparitions tentaculaires, soudainement vouées à hanter les champs de visions de ce grand tout bâtard. Urira fut un excellent propagateur du cauchemar, cette engeance naturelle de l'immonde. Qu'était le cauchemar ? Des sueurs froides, un rythme cardiaque soutenu, la paranoïa des derniers instants. Irrespirable. Cet architecte du malheur tordait l'ambiance depuis son trône céleste, sans la moindre incantation. Tout bonnement inracontable en l'état... Les mines des laquais - brigands se creusèrent brusquement, à croire qu'ils vieillirent à vue d'œil, soumis avec peine aux dilatations de cœur, l'on devina aisément des tifs grisonnantes en réaction au stress engendré. Ils tombèrent malgré tout, les soldats. Ils périrent par dizaine non sans alourdir nos braves de plaies, comme quoi même en quantité, les médiocres avaient un potentiel de nuisance à ne pas sous-estimer. Le conflit s'éternisa quand les morts se relevèrent, enfin ! L'insidieuse besogne du nécromant profanait ses propres hommes, au bénéfice de la ruine de tous.
Les éléments déchaînèrent leur fureur sur la région, un déluge de flotte lustral en prélude au devenir putrescent. Dans un geste désespéré, Nargulg l'imprudent fit tournoyer Urzupha, plus hilare qu'ensanglantée par la situation. Au passage de la femme virevoltant, les plus proches ennemis furent balayés, et un tour plus tard, elle voltigea quelques mètres au-dessus d'eux. La voix de la furie grinça pour que ses moqueries s'entendirent d'ici aux pins argentés.
- Minables ! Minables ! MINAAABLES !! WRAAAAAAAH MOURREEEEZ !! DYAAHAHAHAHA !
Le faiseur de malheur, dont l'obscur habillage flottant là-haut, ne dissimulait plus le visage maladif étoffé d'oreilles pointues. Celui-là oui, gratifia sa face d'un sourire malsain, aussi parut-il sensible aux sombres desseins d'Urzupha. Chose banale en ce bas-monde, que d'éprouver une forme de sympathie, pour certains adversaires. Entre fous furieux au sadisme assumé, vous savez... Mais enfin, ici s'opposèrent deux camps bien distincts, celui d'Edrir et sa clique, face au trio exterminateur. L'entente était donc impossible, encore moins envisageable. Valsant dans les airs, la guerrière étira, tordit, puis craqua ses bras. À l'ambiance pesante, elle décida de l'agrémenter d'un visuel oppressant, celui d'une horreur étendant ses membres tels des fouets tempétueux. Une gestuelle imprévisible faucha les moucherons, vivants ou non, qui tentèrent d'entraver l'oni dans sa course anti-Ivasaar. Il avait tout comprit lui, la solution pour en finir avec l'étouffante boucherie se tenait là, surplombant fièrement l'assemblée. Indubitablement, Ivasaar était l'homme à abattre. Sa mort signerait la fin de la bataille, effectivement, sans sorcier pour entretenir la nuée cadavérique, cette sanguinolente affaire eut déjà été réglée, péniblement certes.
Sans aller jusqu'à dire que l'assaut de Dante fit mouche, les rocheuses se délectèrent tout de même de la chute du séraphin de pourriture, un hurlement sinistre d'accompagner l'écrasement funeste. Faible de constitution, mage noir point guerrier, les jambes et rotules de l'elfe cédèrent bruyamment lors de l'atterrissage, sa douleur émaillée d'un cocktail de voix distinguables, d'éructer tout le mal l'accablant alors. Le partisan du chaos dut endurer un sacré tourment, que son supplice fut une délivrance pour Nargulg. Ce dernier, intégralement engloutit par les masses exsangues, profita in extremis du répit pour en réchapper. Puisque le terrifiant nécromant n'exerça plus aucun contrôle occulte, les morts retournèrent enrichir la terre. Quant aux plus vivants des malandrins, estomaqués par la bruyante dégringolade d'Ivasaar, ils furent frappés d'un doute immédiatement balayé par les vociférations de leur détestable supérieur. Immobile de fait, dans l'incapacité totale de se mouvoir physiquement, le mage noir braillait à en faire frémir pierres et bois, lierres et racines. Ce n'était pas la fin. La terrible détermination d'Ivasaar se confondait avec la colère, l'un des meilleurs carburants pour l'esprit, et sous peu, il se déchaînerait.
D'innombrables blessures fragilisaient Nargulg qui, au sortir de la kyrielle de morts, eut pour automatisme de saisir une claymore abandonnée, c'était toujours mieux que son glaive de merde. Tout un morceau de son oreille droite fut dévorée par les affamés sans vie, en outre, çà et là, l'écorce détériorée de l'orc était dénuée de chair, le vert s'emmitoufla de rouge. Au-delà des blessures, Nargulg souffrit de fatigue, car ils bataillèrent depuis trop longtemps ; sur le moment, ce fardeau semblait être une menace foutrement plus grave qu'Ivasaar. La créature elfique enracinée dans la mélasse, vit ses fluides écarlate s'écouler avec persistance. Urira le mutilé, définitivement privé d'un bras et, plus grave encore, dans l'incapacité totale d'appliquer des soins, n'avait plus que l'absolue résolution et des réserves de mana entamés, pour force. La nécromancie, pour impressionnant que soit cet art, était pour le moins... énergivore. Quand la sombre magie n'opéra plus, les sauvages purent observer combien les rangs ennemis étaient clairsemés. Des bandits debout, il y en avait toujours que le carnage en cours épargna, la force de nombre une fois de plus... Absurde. Comment des individus qu'on ne prenait jamais la peine de nommer, pouvaient-ils représenter une telle menace ?! Essoufflé bien que déterminé, Nargulg le malmené s'essaya au trot à défaut de mieux. "Tue le mage !" S'écria Dante. Brandissant tout en silence la nouvelle épée en direction de l'elfe, c'était un énième rempart d'unités qui menaça l'orc fanatique. Tous, oui TOUS ! À l'unisson, les sbires d'Ivasaar firent bloc, entre le trio et leur chef ravagé.
- Ivasaaaaar... Hihihi...
Urzupha chantonna à moitié, sa tête barbouillée basculant en rythme de gauche à droite tandis qu'elle accéléra le pas, se faisant plus intimidante à l'approche des soldats.
- Montre-moi, comment ça clamse un mage de ton genre. Parce que j'en croise pas tous les jours !
C'est qu'elle gardait le sourire la saleté, sûrement parce qu'elle voyait la fin du sorcier arriver. En général, c'était ici que ça foirait avec Urzupha, elle criait victoire toujours trop tôt, contrairement à Nargulg le boiteux. Le gars avait une jambe dans un sale état bordel, le mollet profondément tailladé, la cuisse passablement trouée, ça n'aidait pas à atteindre le méchant Ivasaar. En même temps, il faut avoir une case de vide pour continuer à décapiter, bousculer, heurter et trancher les passants armés. Mais bon, il n'était pas tout seul dans cette tâche, à trois, ils pouvaient nettoyer dans les coins, ou se risquer à essayer. Finalement, la garde rapprochée du terrifiant serviteur fit une apparition remarquée. Ces dix combattants détonnaient dans ce décor infect. Complètement couverts d'armures de plates parfaitement identiques, les sbires restants ne tinrent pas la comparaison. Ouais, ceux-là étaient d'un autre calibre. De larges écus pour boucliers, ces géants de métal prirent place tout autour de leur maître endolori, en position pour encaisser. La défense était leur priorité, au point que dans l'indifférence absolue, ils regardèrent leurs confrères tomber sous les coups de boutoir de nos abominables colosses.
Les trois grands abîmés du tableau travaillèrent de concert, l'objectif demeura le même, fracasser les faiblards jusqu'à forcer l'opportunité pour boucler le massacre. De la piétaille fut renversée, grâce à l'intervention du cornu qui... La vache eh, il n'était pas loin d'y passer le Dante. Dure la vie de cogneur, sauf que ça fonctionnait du tonnerre sa manœuvre. Du trio, Urzupha fut bien la seule en bon état, plus ou moins, et pour cause ! Elle rétrécissait aussi bien qu'elle modelait son corps en fonction des coups qu'on tentait de lui porter. Ce n'était pas folichon à voir, toutefois, ce fut d'une redoutable efficacité. Puis, quand sa hache découpa à la volée, une salve de pleurs se succédèrent et firent le bonheur de la barbare. Agonie pour les uns, éclats de rire pour elle, pas de toute, cette orc possédait un diaphragme en béton. En revanche, Nargulg ne se fendait pas la poire ça non, le sommet d'une lance ripa à même le tranchant de la claymore, seulement maniée d'une main, le tout en vue d'embrocher la sale gueule du verdâtre. Belle tentative qui réussit presque à lui crever un œil, s'il n'eut pas dégagé l'arme d'un geste sec, son cuir chevelu d'être alors sévèrement entaillé en conséquence. De la sénestre, libre comme l'air, il s'appliqua à empoigner tout pégu passant par-là, improvisant au bout du compte une protection humaine qu'il ballotta à l'instar d'un bouclier. Risible, du grand art.
- Incapables... Baragouina l'elfe.
Mâchoire serrée, Ivasaar le spectateur statique - dont les tibias émiettés s'étaient frayés un chemin hors des guibolles difformes - grinça des dents, car le constat fut sans appel. Ses soldats perdaient. Eux non plus, ne furent nullement exemptés d'épuisements et peu à peu, la tendance s'inversait. À ce moment, le contemplateur vexé en bordure de la plage de dépouilles visqueuse, fit un choix aussi gravissime que révélateur de l'avilissement l'ayant corrompu dès la naissance. Sans plus attendre, des vibrations naquirent sous terre, des tremblements sans précédent renversèrent combattants et pinèdes dans un fracas assourdissant, c'était un avant-goût, puisque de cette perte d'équilibre générale, l'immonde Ivasaar exploita ce temps mort dans l'affrontement, afin de manipuler des dizaines d'armes inutilisées. Impressionnant. Sur un simple coup de tête de l'apôtre coléreux, un ensemble composite d'armes blanches conglomérèrent en un consistant nuage de ferraille, d'inquiétants cliquetis dérivaient alors de l'assemblage confus. Cette nuée suspendue, Nargulg craignit justement d'être en incapacité de l'esquiver, chose compréhensible tant il avait perdu de son éclat à force de lutter vaille que vaille. Le poids des blessures, forcément hein.
- Elle a raison... Vous n'êtes que des minables. Dans ce cas... JE VOUS TUERAI TOUS !!
Ni une ni deux, le couple d'orc employa des cadavres en guise d'abri contre l'avalanche mortelle. L'heure n'était ni à la réflexion ni aux communications élaborées, ainsi soulevèrent-ils une paire de corps meurtri à bout de bras, improvisant un parapluie de chairs et d'ossements nauséabond.
- Hé Dante ! Te fais pas descendre hein !
La descente fut pour leurs gueules. Epées, lances et targes retapèrent les lieux avec plus d'efficacité que la grêle. Une sinistre mélopée entonnée depuis les voix criardes des tristes sires, - au service du sieur Urira - tambourinait les esgourdes de nos tueurs. Dans sa folie, l'elfe accabla le champ de bataille de sa vilenie, ne survécurent que ses dix gorilles impassibles, pour le défendre, maintenant qu'étaient embrochés tous les autres. Monstrueux personnage, pareille démonstration resterait dans les mémoires d'Urzupha et Nargulg, pour sûr. Plus que jamais terrifiant en animal blessé, l'elfe grava ipso facto un souvenir impérissable de brutalité par la sorcellerie. Excellent, excellent. C'était une expérience merveilleuse, pour ceux-là qui eurent à cœur de tomber sur de redoutables adversaires. L'ondée du malfaiteur et nécromant, courte par nature quoique extrêmement intense, retourna la totalité du champ de bataille. Quel champ de bataille ? Un gargantuesque cimetière enrichit le terrain creux de visqueuses répugnances. Au terme de l'épreuve télékinétique, c'était tout un horizon démesuré de corps dépouillés de substance - partiellement embellit de la ribambelle de ferraille morcelée - qui s'étendait à perte de vue.
Ils respirèrent encore malgré tout, le duo d'orcs. Les carapaces humaines privèrent les mastodontes d'insurmontables sévices, cependant, la situation était outrageusement critique. Ces méconnaissables protections de fortune, n'empêchèrent aucunement certains dégâts... Que l'on savait considérables. Nargulg, grandement diminué plus tôt, vit son potentiel offensif proche du néant. Lacéré de toutes parts, la musculature du fanatique le supportait difficilement debout, et c'était un exploit. Outre l'avant-bras gauche pratiquement sectionné au passage d'une lame surprise, la perte continue de sang depuis trop de minutes écrasait toute possibilité d'achever l'ignoble sorcier de ses mains. Lequel, agonisait toujours plus qu'il n'enragea de son incapacité à liquider le trio. Définitivement, les deux camps vacillaient, et pour ce cher Ivasaar, ce fut un drame d'autant plus grand, car, sans mana, il n'était rien de plus qu'un chouineur étalé dans la gadoue, une puce qu'on écraserait aisément, s'il n'y avait pas sa garde rapprochée.
Un dilemme cloisonnait les sombres pensées du mage noir en lambeau. Dut-il commander à ses protecteurs de finir le boulot, et risquer sa peau ? Ou bien jouer d'automutilation, restaurer un tant soit peu ses réserves de magies, et... Risquer sa peau ? Ha, Dante ne l'avait pas loupé l'enculé de sorcier. En tout cas, cette "pause" dans l'affrontement, l'inoffensif Nargulg en abusa immodérément pour jouir autant que possible de la divine régénération. De son côté, l'infernale Urzupha piétina un tapis de macchabées, ouais, elle avait encore du jus dans le moteur, tant mieux. Aux convulsions faciales d'Ivasaar, elle répliqua de la meilleure des façons qui soit : par des grossièretés. Particulièrement agitée, elle remua le manche de sa labrys engluée par-dessus l'épaule encrassée, après quoi sa tête pivota dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, un tour complet faisant craqueter la nuque dans d'écœurantes proportions.
- Aaaaaaah... Je vous remercie les mecs... Dante, Kar'ath, Nargulg...
Immobilisée dans la déformation du faciès, sa langue se déroba aux badigoinces, l'entreprise de léchouille repassant par-dessus des joues maculées de fluides, la crapulerie revigorait de scintillation ses orbites, semblables à des fanaux révélateur d'une santé mentale branlante depuis toujours. Urzupha toucha l'acmé de la dégénérescence, lorsqu'elle fusilla du regard le seul ennemi qui valait la peine d'être reconnu. Le type en noir avec des oreilles pointues, l'elfe quoi.
- Je me demande comment je vais te buter, Ivasaar ! Je commence par t'émasculer ?!... L'interrogation fut soutenue de grattement contre la tempe, les griffes cisaillant sa peau frénétiquement.
- ... Et après ? Je coupe tes petits bras pour t'les enfoncer ?! PAARLE !! Tes petits tours de passe-passe te seront d'aucun secours, IVASAAAR ! TON NOM DE CRABE POURRAVE LÀ ! Moi, UUURZUUPHAA !! J'VAIS TE BUTER ! C'EST TA TÊTE QUE J'VEUX T'ENTENDS HEEEIN ?!
- Qu'est-ce que vous attendez ?! Tuez-les !! Ordonna finalement le concerné, haineux à en crever.
Elle jeta sa hache, laissant l'arme s'abreuver des tripes d'un cadavre qu'elle savata pendant la provocation. Tendant les deux bras devant, direction l'apôtre affaiblit et ses gardiens, la femelle altéra ses dix doigts sur des mètres et des mètres. Tantôt ficelle, tantôt cordage, elle dirigea ses membres disproportionnés contre la petite troupe parfaitement coordonnée. Organisée certes, mais lente et ce fut un jeu d'enfant de piéger une de ces grosses armures dans ses filets. Aussitôt, une prise fut faite, que celle-ci s'envola, saucissonnée en deux temps trois mouvements, Urzupha joua d'un doigté hors pair pour bringuebaler le pauvre type. Des lianes pour phalanges, l'agression de l'orc fut de perturber la progression des armures, à sa façon.
Ils furent moins guerriers que soldats, moins soldats que brigands, tous ceux qui jurèrent mort et anéantissement à nos mastodontes ensevelit dessous ces marées humaines. Ils vomirent des beuglements incompréhensibles, les effrayés de la horde qui se voulait armée. La peur comme discipline, la quantité pour force, jamais ils ne faiblirent puisque le maléfique sorcier elfe, à l'instar d'une épée de damoclès, attendit son heure pour clore ces puantes festivités. Les vagues de malfrats, en affreux sbires du Seigneur Ivasaar, redoublèrent d'efforts quand il envahit le ciel. Trop haut perché, des dizaines de mètres le séparaient de la multitude d'acteurs terrestres. Et pourtant, l'atmosphère écrasa les épaules du tas de bandits. Cette horreur-ci, n'était ni une démonstration grotesque d'étalage de puissance, ni le fait d'apparitions tentaculaires, soudainement vouées à hanter les champs de visions de ce grand tout bâtard. Urira fut un excellent propagateur du cauchemar, cette engeance naturelle de l'immonde. Qu'était le cauchemar ? Des sueurs froides, un rythme cardiaque soutenu, la paranoïa des derniers instants. Irrespirable. Cet architecte du malheur tordait l'ambiance depuis son trône céleste, sans la moindre incantation. Tout bonnement inracontable en l'état... Les mines des laquais - brigands se creusèrent brusquement, à croire qu'ils vieillirent à vue d'œil, soumis avec peine aux dilatations de cœur, l'on devina aisément des tifs grisonnantes en réaction au stress engendré. Ils tombèrent malgré tout, les soldats. Ils périrent par dizaine non sans alourdir nos braves de plaies, comme quoi même en quantité, les médiocres avaient un potentiel de nuisance à ne pas sous-estimer. Le conflit s'éternisa quand les morts se relevèrent, enfin ! L'insidieuse besogne du nécromant profanait ses propres hommes, au bénéfice de la ruine de tous.
Les éléments déchaînèrent leur fureur sur la région, un déluge de flotte lustral en prélude au devenir putrescent. Dans un geste désespéré, Nargulg l'imprudent fit tournoyer Urzupha, plus hilare qu'ensanglantée par la situation. Au passage de la femme virevoltant, les plus proches ennemis furent balayés, et un tour plus tard, elle voltigea quelques mètres au-dessus d'eux. La voix de la furie grinça pour que ses moqueries s'entendirent d'ici aux pins argentés.
- Minables ! Minables ! MINAAABLES !! WRAAAAAAAH MOURREEEEZ !! DYAAHAHAHAHA !
Le faiseur de malheur, dont l'obscur habillage flottant là-haut, ne dissimulait plus le visage maladif étoffé d'oreilles pointues. Celui-là oui, gratifia sa face d'un sourire malsain, aussi parut-il sensible aux sombres desseins d'Urzupha. Chose banale en ce bas-monde, que d'éprouver une forme de sympathie, pour certains adversaires. Entre fous furieux au sadisme assumé, vous savez... Mais enfin, ici s'opposèrent deux camps bien distincts, celui d'Edrir et sa clique, face au trio exterminateur. L'entente était donc impossible, encore moins envisageable. Valsant dans les airs, la guerrière étira, tordit, puis craqua ses bras. À l'ambiance pesante, elle décida de l'agrémenter d'un visuel oppressant, celui d'une horreur étendant ses membres tels des fouets tempétueux. Une gestuelle imprévisible faucha les moucherons, vivants ou non, qui tentèrent d'entraver l'oni dans sa course anti-Ivasaar. Il avait tout comprit lui, la solution pour en finir avec l'étouffante boucherie se tenait là, surplombant fièrement l'assemblée. Indubitablement, Ivasaar était l'homme à abattre. Sa mort signerait la fin de la bataille, effectivement, sans sorcier pour entretenir la nuée cadavérique, cette sanguinolente affaire eut déjà été réglée, péniblement certes.
Sans aller jusqu'à dire que l'assaut de Dante fit mouche, les rocheuses se délectèrent tout de même de la chute du séraphin de pourriture, un hurlement sinistre d'accompagner l'écrasement funeste. Faible de constitution, mage noir point guerrier, les jambes et rotules de l'elfe cédèrent bruyamment lors de l'atterrissage, sa douleur émaillée d'un cocktail de voix distinguables, d'éructer tout le mal l'accablant alors. Le partisan du chaos dut endurer un sacré tourment, que son supplice fut une délivrance pour Nargulg. Ce dernier, intégralement engloutit par les masses exsangues, profita in extremis du répit pour en réchapper. Puisque le terrifiant nécromant n'exerça plus aucun contrôle occulte, les morts retournèrent enrichir la terre. Quant aux plus vivants des malandrins, estomaqués par la bruyante dégringolade d'Ivasaar, ils furent frappés d'un doute immédiatement balayé par les vociférations de leur détestable supérieur. Immobile de fait, dans l'incapacité totale de se mouvoir physiquement, le mage noir braillait à en faire frémir pierres et bois, lierres et racines. Ce n'était pas la fin. La terrible détermination d'Ivasaar se confondait avec la colère, l'un des meilleurs carburants pour l'esprit, et sous peu, il se déchaînerait.
D'innombrables blessures fragilisaient Nargulg qui, au sortir de la kyrielle de morts, eut pour automatisme de saisir une claymore abandonnée, c'était toujours mieux que son glaive de merde. Tout un morceau de son oreille droite fut dévorée par les affamés sans vie, en outre, çà et là, l'écorce détériorée de l'orc était dénuée de chair, le vert s'emmitoufla de rouge. Au-delà des blessures, Nargulg souffrit de fatigue, car ils bataillèrent depuis trop longtemps ; sur le moment, ce fardeau semblait être une menace foutrement plus grave qu'Ivasaar. La créature elfique enracinée dans la mélasse, vit ses fluides écarlate s'écouler avec persistance. Urira le mutilé, définitivement privé d'un bras et, plus grave encore, dans l'incapacité totale d'appliquer des soins, n'avait plus que l'absolue résolution et des réserves de mana entamés, pour force. La nécromancie, pour impressionnant que soit cet art, était pour le moins... énergivore. Quand la sombre magie n'opéra plus, les sauvages purent observer combien les rangs ennemis étaient clairsemés. Des bandits debout, il y en avait toujours que le carnage en cours épargna, la force de nombre une fois de plus... Absurde. Comment des individus qu'on ne prenait jamais la peine de nommer, pouvaient-ils représenter une telle menace ?! Essoufflé bien que déterminé, Nargulg le malmené s'essaya au trot à défaut de mieux. "Tue le mage !" S'écria Dante. Brandissant tout en silence la nouvelle épée en direction de l'elfe, c'était un énième rempart d'unités qui menaça l'orc fanatique. Tous, oui TOUS ! À l'unisson, les sbires d'Ivasaar firent bloc, entre le trio et leur chef ravagé.
- Ivasaaaaar... Hihihi...
Urzupha chantonna à moitié, sa tête barbouillée basculant en rythme de gauche à droite tandis qu'elle accéléra le pas, se faisant plus intimidante à l'approche des soldats.
- Montre-moi, comment ça clamse un mage de ton genre. Parce que j'en croise pas tous les jours !
C'est qu'elle gardait le sourire la saleté, sûrement parce qu'elle voyait la fin du sorcier arriver. En général, c'était ici que ça foirait avec Urzupha, elle criait victoire toujours trop tôt, contrairement à Nargulg le boiteux. Le gars avait une jambe dans un sale état bordel, le mollet profondément tailladé, la cuisse passablement trouée, ça n'aidait pas à atteindre le méchant Ivasaar. En même temps, il faut avoir une case de vide pour continuer à décapiter, bousculer, heurter et trancher les passants armés. Mais bon, il n'était pas tout seul dans cette tâche, à trois, ils pouvaient nettoyer dans les coins, ou se risquer à essayer. Finalement, la garde rapprochée du terrifiant serviteur fit une apparition remarquée. Ces dix combattants détonnaient dans ce décor infect. Complètement couverts d'armures de plates parfaitement identiques, les sbires restants ne tinrent pas la comparaison. Ouais, ceux-là étaient d'un autre calibre. De larges écus pour boucliers, ces géants de métal prirent place tout autour de leur maître endolori, en position pour encaisser. La défense était leur priorité, au point que dans l'indifférence absolue, ils regardèrent leurs confrères tomber sous les coups de boutoir de nos abominables colosses.
Les trois grands abîmés du tableau travaillèrent de concert, l'objectif demeura le même, fracasser les faiblards jusqu'à forcer l'opportunité pour boucler le massacre. De la piétaille fut renversée, grâce à l'intervention du cornu qui... La vache eh, il n'était pas loin d'y passer le Dante. Dure la vie de cogneur, sauf que ça fonctionnait du tonnerre sa manœuvre. Du trio, Urzupha fut bien la seule en bon état, plus ou moins, et pour cause ! Elle rétrécissait aussi bien qu'elle modelait son corps en fonction des coups qu'on tentait de lui porter. Ce n'était pas folichon à voir, toutefois, ce fut d'une redoutable efficacité. Puis, quand sa hache découpa à la volée, une salve de pleurs se succédèrent et firent le bonheur de la barbare. Agonie pour les uns, éclats de rire pour elle, pas de toute, cette orc possédait un diaphragme en béton. En revanche, Nargulg ne se fendait pas la poire ça non, le sommet d'une lance ripa à même le tranchant de la claymore, seulement maniée d'une main, le tout en vue d'embrocher la sale gueule du verdâtre. Belle tentative qui réussit presque à lui crever un œil, s'il n'eut pas dégagé l'arme d'un geste sec, son cuir chevelu d'être alors sévèrement entaillé en conséquence. De la sénestre, libre comme l'air, il s'appliqua à empoigner tout pégu passant par-là, improvisant au bout du compte une protection humaine qu'il ballotta à l'instar d'un bouclier. Risible, du grand art.
- Incapables... Baragouina l'elfe.
Mâchoire serrée, Ivasaar le spectateur statique - dont les tibias émiettés s'étaient frayés un chemin hors des guibolles difformes - grinça des dents, car le constat fut sans appel. Ses soldats perdaient. Eux non plus, ne furent nullement exemptés d'épuisements et peu à peu, la tendance s'inversait. À ce moment, le contemplateur vexé en bordure de la plage de dépouilles visqueuse, fit un choix aussi gravissime que révélateur de l'avilissement l'ayant corrompu dès la naissance. Sans plus attendre, des vibrations naquirent sous terre, des tremblements sans précédent renversèrent combattants et pinèdes dans un fracas assourdissant, c'était un avant-goût, puisque de cette perte d'équilibre générale, l'immonde Ivasaar exploita ce temps mort dans l'affrontement, afin de manipuler des dizaines d'armes inutilisées. Impressionnant. Sur un simple coup de tête de l'apôtre coléreux, un ensemble composite d'armes blanches conglomérèrent en un consistant nuage de ferraille, d'inquiétants cliquetis dérivaient alors de l'assemblage confus. Cette nuée suspendue, Nargulg craignit justement d'être en incapacité de l'esquiver, chose compréhensible tant il avait perdu de son éclat à force de lutter vaille que vaille. Le poids des blessures, forcément hein.
- Elle a raison... Vous n'êtes que des minables. Dans ce cas... JE VOUS TUERAI TOUS !!
Ni une ni deux, le couple d'orc employa des cadavres en guise d'abri contre l'avalanche mortelle. L'heure n'était ni à la réflexion ni aux communications élaborées, ainsi soulevèrent-ils une paire de corps meurtri à bout de bras, improvisant un parapluie de chairs et d'ossements nauséabond.
- Hé Dante ! Te fais pas descendre hein !
La descente fut pour leurs gueules. Epées, lances et targes retapèrent les lieux avec plus d'efficacité que la grêle. Une sinistre mélopée entonnée depuis les voix criardes des tristes sires, - au service du sieur Urira - tambourinait les esgourdes de nos tueurs. Dans sa folie, l'elfe accabla le champ de bataille de sa vilenie, ne survécurent que ses dix gorilles impassibles, pour le défendre, maintenant qu'étaient embrochés tous les autres. Monstrueux personnage, pareille démonstration resterait dans les mémoires d'Urzupha et Nargulg, pour sûr. Plus que jamais terrifiant en animal blessé, l'elfe grava ipso facto un souvenir impérissable de brutalité par la sorcellerie. Excellent, excellent. C'était une expérience merveilleuse, pour ceux-là qui eurent à cœur de tomber sur de redoutables adversaires. L'ondée du malfaiteur et nécromant, courte par nature quoique extrêmement intense, retourna la totalité du champ de bataille. Quel champ de bataille ? Un gargantuesque cimetière enrichit le terrain creux de visqueuses répugnances. Au terme de l'épreuve télékinétique, c'était tout un horizon démesuré de corps dépouillés de substance - partiellement embellit de la ribambelle de ferraille morcelée - qui s'étendait à perte de vue.
Ils respirèrent encore malgré tout, le duo d'orcs. Les carapaces humaines privèrent les mastodontes d'insurmontables sévices, cependant, la situation était outrageusement critique. Ces méconnaissables protections de fortune, n'empêchèrent aucunement certains dégâts... Que l'on savait considérables. Nargulg, grandement diminué plus tôt, vit son potentiel offensif proche du néant. Lacéré de toutes parts, la musculature du fanatique le supportait difficilement debout, et c'était un exploit. Outre l'avant-bras gauche pratiquement sectionné au passage d'une lame surprise, la perte continue de sang depuis trop de minutes écrasait toute possibilité d'achever l'ignoble sorcier de ses mains. Lequel, agonisait toujours plus qu'il n'enragea de son incapacité à liquider le trio. Définitivement, les deux camps vacillaient, et pour ce cher Ivasaar, ce fut un drame d'autant plus grand, car, sans mana, il n'était rien de plus qu'un chouineur étalé dans la gadoue, une puce qu'on écraserait aisément, s'il n'y avait pas sa garde rapprochée.
Un dilemme cloisonnait les sombres pensées du mage noir en lambeau. Dut-il commander à ses protecteurs de finir le boulot, et risquer sa peau ? Ou bien jouer d'automutilation, restaurer un tant soit peu ses réserves de magies, et... Risquer sa peau ? Ha, Dante ne l'avait pas loupé l'enculé de sorcier. En tout cas, cette "pause" dans l'affrontement, l'inoffensif Nargulg en abusa immodérément pour jouir autant que possible de la divine régénération. De son côté, l'infernale Urzupha piétina un tapis de macchabées, ouais, elle avait encore du jus dans le moteur, tant mieux. Aux convulsions faciales d'Ivasaar, elle répliqua de la meilleure des façons qui soit : par des grossièretés. Particulièrement agitée, elle remua le manche de sa labrys engluée par-dessus l'épaule encrassée, après quoi sa tête pivota dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, un tour complet faisant craqueter la nuque dans d'écœurantes proportions.
- Aaaaaaah... Je vous remercie les mecs... Dante, Kar'ath, Nargulg...
Immobilisée dans la déformation du faciès, sa langue se déroba aux badigoinces, l'entreprise de léchouille repassant par-dessus des joues maculées de fluides, la crapulerie revigorait de scintillation ses orbites, semblables à des fanaux révélateur d'une santé mentale branlante depuis toujours. Urzupha toucha l'acmé de la dégénérescence, lorsqu'elle fusilla du regard le seul ennemi qui valait la peine d'être reconnu. Le type en noir avec des oreilles pointues, l'elfe quoi.
- Je me demande comment je vais te buter, Ivasaar ! Je commence par t'émasculer ?!... L'interrogation fut soutenue de grattement contre la tempe, les griffes cisaillant sa peau frénétiquement.
- ... Et après ? Je coupe tes petits bras pour t'les enfoncer ?! PAARLE !! Tes petits tours de passe-passe te seront d'aucun secours, IVASAAAR ! TON NOM DE CRABE POURRAVE LÀ ! Moi, UUURZUUPHAA !! J'VAIS TE BUTER ! C'EST TA TÊTE QUE J'VEUX T'ENTENDS HEEEIN ?!
- Qu'est-ce que vous attendez ?! Tuez-les !! Ordonna finalement le concerné, haineux à en crever.
Elle jeta sa hache, laissant l'arme s'abreuver des tripes d'un cadavre qu'elle savata pendant la provocation. Tendant les deux bras devant, direction l'apôtre affaiblit et ses gardiens, la femelle altéra ses dix doigts sur des mètres et des mètres. Tantôt ficelle, tantôt cordage, elle dirigea ses membres disproportionnés contre la petite troupe parfaitement coordonnée. Organisée certes, mais lente et ce fut un jeu d'enfant de piéger une de ces grosses armures dans ses filets. Aussitôt, une prise fut faite, que celle-ci s'envola, saucissonnée en deux temps trois mouvements, Urzupha joua d'un doigté hors pair pour bringuebaler le pauvre type. Des lianes pour phalanges, l'agression de l'orc fut de perturber la progression des armures, à sa façon.
Invité
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Dévotion
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Il faut se rendre à l'évidence, si on peut qualifier son lancé d'épée à longue distance comme une fulgurance qu'il ne pourra sûrement pas faire deux fois maintenant qu'Ivasaar sait à quoi s'attendre, s'approcher du Nécromancien ne sera pas aussi simple que ça. Pour la simple et bonne raison que la masse de cadavres en sursis entre eux et le mage noir est particulièrement conséquente. Et à celle-ci se rajoute la garde personnelle de l'autre psychopathe. Pas Urzupha, voyons. L'autre, celui qui a de grandes oreilles. Alors malgré sa tentative pour aider Nargulg à se frayer un chemin, passer le dernier mur de troufions en armure n'allait pas être de tout repos. Surtout que les autres faiblards, chair à canon de vocation ne lui laisse pas une seule seconde de répit. Ils y ont vu une opportunité quand Dante sacrifia son épée pour tenter d'abattre Ivasaar dans les airs. Sa lame noire en Rathonite étant ce qu'elle est, le piètre équipement de la milice armée ne faisait clairement pas le poids face à un tranchant aussi spécial. Dante fauchait tout ce qui passait devant lui et rien ne semblait capable de l'arrêter. Les corps se fendaient en deux, les boucliers se disloquaient et l'acier des bandits pourtant de bonne manufacture, sûrement Reikoise, ne pouvait que se soumettre face à la brutalité du cornu et de son épée maudite.
Un artefact dont il s'est privé et il est hors de question pour les soldats d'Ivasaar de laisser l'Oni récupérer son arme fétiche. Car s'il est capable de rappeler l'épée à lui à distance, il faut qu'il ait le temps de se concentrer. La magie ce n'est pas vraiment son domaine et cela résume très bien ses capacités en la matière. Alors le voilà dans une mêlée aussi violente que macabre, encaissant les écorchures et les déchirures un peu partout sur son corps grisâtre tacheté d'un rouge écarlate par endroit pendant que l'Oni se démène comme comme une bête sauvage pour se défaire de ses adversaires. Quand il est dans cet état, difficile de faire un parallèle avec un être humain car il n'y a plus une once de modération dans son comportement. Ivasaar ne risque plus de ramener ses hommes à la vie et cette fois, la mort est définitive pour la misérable piétaille que l'Oni massacre sans même prendre le temps de souffler. Rien ne semblait pouvoir l'arrêter dans sa soif de sang si ce n'est peut-être les terribles tremblements de terre qui se manifestent par la volonté d'Ivasaar. Qui d'autre, si ce n'est lui ? Les jambes de l'Oni s'en retrouvent déstabilisées, déjà bien fragilisées par les affrontements précédents.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir apparaître une nuée d'acier tranchant au-dessus de sa tête. Ivasaar en mage émérite, nécromancien mais aussi adepte de la télékinésie fait tout l'étalage de sa sinistre puissance et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est sur le point de faire le ménage de la plus belle des façons. Dante sait déjà qu'il est incapable d'éviter ce qui va suivre et en réaction au petite commentaire d'Urzupha à son attention, le cornu tire un corps inerte en se jetant sous la montagne de cadavre qu'il a laissé dans son sillage. S'enfonçant sous les corps démembrés et empilés dont le sang coule encore abondamment sur le sol et dont l'odeur putride n'a vraiment rien de ragoûtant. Tel est le prix de sa survie et le fracas des armes tomba avec violence sur le théâtre des affrontements. Un massacre tout simplement, une exécution en règle de tout ce qui n'a pas su trouver refuge entre les cadavres et les rochers environnants. Principalement ses propres serviteurs en réalité et malgré sa cachette, une lance perfora l'épaule d'un bandit en venant s'arrêter à quelque centimètre de son visage sans le toucher. C'est pas passé loin. Bien. Il peut maintenir profiter d'une petite accalmie car les blessures du colosse à cornes sont nombreuses, il a perdu beaucoup de sang et il continue d'en perdre. Sainte régénération, divine solution à absolument tous ses problèmes en réalité. Comment font les gens lambdas pour soigner leurs plaies ? Quoi, ils mettent un pansement ? C'est risible.
Finalement, l'Oni s'extirpe de l'amas de chair qui l'a protégé il y a quelques secondes. Dégageant un cadavre qui déstabilise le reste des corps empilés qui se cassent la gueule tout autour du cornu. Sacré journée hein ? Un peu de nerf, c'est bientôt le week-end. Il reprend une bouffée d'air pure, chose qui lui manquait pendant qu'Ivasaar essayait de tuer le triumvirat de la violence personnifiée. Il fait rapidement un tour sur lui-même pour constater que les Rôcheuses se sont transformées en un gigantesque cimetière. Heureusement, les deux Orcs sont encore en vie. Nargulg est dans le même état que lui et Urzupha comme à son habitude, pète la forme. Il envie sincèrement son agilité et son aisance pour esquiver les coups. Difficile de faire pareil quand on fait plus de deux mètres et qu'on se traîne une musculature aussi imposante. Le pauvre Dante a toutes les peines du monde à contorsionner son corps mais heureusement, il encaisse plutôt bien. Il reporte son attention sur les derniers survivants du côté d'Ivasaar. Le Nécromancien en personne bien sûr mais aussi sa garde rapprochée qui n'a pas bougé d'un poil, complètement impassible face à la marée de cadavres.
Toujours fidèle à elle-même, la terrible Urzupha joue de provocations et d'insultes bien senties à l'attention de l'Elfe manchot. Tiens, ça doit lui faire tout drôle à cet enfoiré de se retrouver dans une position aussi fâcheuse. Il l'avait pas vu venir ce lancé de javelot, faut dire qu'il faut être le dernier des connards pour jeter son épée en se retrouvant volontairement sans défenses ou presque. Qui est assez con pour faire ça sérieux ? Je vous présente Dante, enchanté. "Tuez-les." Ce fut l'ordre de l'elfe démoniaque à l'attention de sa garde rapprochée qui aussitôt se mirent à s'élancer en direction des trois tueurs. La pause n'a pas duré longtemps mais ce fut suffisant pour que Dante puisse refermer certaines de ses plaies en arrêtant les saignements les plus importants. Cette fois, Urzupha est à l'initiative et ... bordel mais comment décrire la scène sous les yeux ébahis du cornu. Il y a littéralement un connard en armure qui valdingue dans tous les sens en bousculant ses collègues. Urzupha est une attraction à elle seule et la vérité c'est qu'elle s'amuse comme une folle à tourmenter ses adversaires. Affronter cette Orc est un calvaire et Dante en sait quelque chose. D'ailleurs l'Oni ne met pas longtemps à réagir car si Urzupha est capable de retenir l'attention d'une partie des soldats d'élites, elle ne peut pas tout faire toute seule. Il lève donc son bras gauche vers le ciel, paume de main ouverte et attend quelques longues secondes qui donnent l'impression d'une attente interminable. Il ne se passe toujours rien et pendant ce temps, un chevalier fonce sur l'Oni le bouclier levé devant lui et prêt à percuter Dante comme un bélier.
Enfin, la lame noire traverse les cieux à toute vitesse pour répondre à son appel. Elle a du se planter et se bloquer quelque part après avoir arraché le bras du nécromancien mais la voilà de retour quand le chevalier tombe soudainement sa garde pour armer son bras mais l'Oni récupère son épée in extrémis et il est le premier à abattre sa colère sur le crâne du guerrier. La violence du coup et le tranchant de son épée lui permettent de fendre son casque en acier et le crâne qu'il protégeait juste en dessous. Ce fut un duel relativement court mais pas moins intense. Ajoutant un énième cadavre au cimetière sous ses pieds, le bourreau des Dieux se jette à nouveau dans la mêlée en venant prêter main forte à Urzupha cette fois-ci. Se glissant dans l'angle mort d'un autre adversaire qui s'apprêtait à porter un coup à Urzupha, il l'empale violemment sous l'aisselle là où sa lourde armure ne le protège pas. L'Orc était venue lui prêter main forte un peu plus tôt pour qu'il puisse se concentrer sur son fameux lancé à l'attention d'Ivasaar. Dante vient simplement lui rendre la pareille. Putain, qui l'eut cru que Dante vienne en aide à Urzupha. D'abord des ennemis mortels puis compagnons de route en passant par être amants d'une nuit. C'est une relation très changeante entre ces deux-là. N'allons pas jusqu'à dire qu'il commence à l'apprécier mais... disons que c'est en bonne voie.
Dante vient d'en abattre deux mais les autres une fois qu'ils ont pris Dante en considération, viennent lui proposer une adversité mémorable. Le cornu se retrouve constamment entre deux voire trois adversaires, le but étant évidemment de ne pas lui laisser de répit pour jouer de sa lame maudite. Un coup d'épée à gauche à la verticale qu'il évite, puis un autre sur sa droite qu'il bloque. Il finit par se prendre un violent coup de bouclier dans les dents qui manque de peu de le faire tomber à la renverse. Quelle galère, il aurait préféré en finir avec l'autre enfoiré aux grandes oreilles. C'est une perte de temps et surtout du temps que le nécromancien utilise pour se remettre d'aplomb. Ivasaar est peut-être adepte de soin élémentaire, qu'est-ce qu'il en sait le Dante ? Il est peut-être sur le point de faire repousser son bras et c'est bien pour ça que dans le doute, il viendra pour sa tête la prochaine fois. Bam ! Un autre coup de bouclier dans l'épaule suivi un coup d'épée qui lui rajoute une belle cicatrice au niveau de la hanche gauche. Une de plus dans sa collection. Cela sonne comme un avertissement : reste concentré ou tu vas passer l'arme à gauche une bonne fois pour toute. Ils commencent vraiment à être ennuyant ceux-là et Dante s'agace très rapidement de la situation.
D'un puissant coup du talon, il repousse un de ses adversaires qui va s'écraser sur le sol un peu plus loin pendant qu'un autre en profite pour planter sa lame dans le ventre de l'Oni et par chance, il ne touche aucun organe interne. Mais dans la manoeuvre, le soldat en question a baissé sa garde et surtout il se retrouve piégé avec un Dante très en colère qui se saisit de son casque d'une main en le repoussant en arrière jusqu'à le faire tomber à la renverse. Une épée toujours plantée dans le bide, l'Oni à califourchon sur sa proie se met à cogner à répétition sur le solide casque du chevalier. Encore et encore jusqu'à commencer à faire plier le métal sous sa fureur et sa pauvre tête se retrouve bientôt prise au piège dans ce casque qui était censé le protéger et qui s'enfonce petit à petit dans sa peau. Un dernier coup d'une brutalité sans nom vient écraser le crâne d'un troisième garde qu'il éclabousse de son propre sang d'un vomissement inattendu. Décidément, il morfle le Dante et entreprend aussitôt de retirant l'épée plantée dans son ventre d'un bon coup sec.
Autant dire que ça va laisser une marque. Mais pas d'inquiétude, Dante entreprend déjà d'arrêter le saignement avant que sa vue ne se trouble. Que les Divins bénissent la régénération même si cette fois, il va lui falloir un peu plus que quelques minutes pour refermer complètement la plaie. La pointe de sa lame noire plantée dans le sol, il s'appuie fermement dessus pour se remettre sur ses deux jambes. Dante fait l'erreur de tourner le regard en direction de ses deux compagnons Orcs pour savoir comment ça se passe de leur côté. Une erreur parce qu'il ne voit pas arriver ce qui lui tombe dessus depuis les airs : un gigantesque rocher que l'autre enfoiré d'Ivasaar soulève grâce à ses pouvoirs surnaturels et qu'il balance sur l'adversaire le plus proche. C'est tombé sur Dante, pas de chance.
Le choc lui fait la sensation d'être percuté de plein fouet par un camion sur l'autoroute et l'Oni traverse une partie du champ de bataille dans les airs en allant s'encastrer plus loin dans le sol complètement inerte. La lumière vient de s'éteindre pour lui et si par miracle il n'est pas mort, en tout cas il n'est pas prêt de se relever tout de suite. Faites (pas) comme Dante. Si quelqu'un a du mal à s'endormir le soir, un bon rocher dans la gueule est sûrement la solution à tous vos problèmes.
Bon après je suis pas médecin mais si je peux donner un conseil c'est comme le catch : ne reproduisez pas ça chez vous.
CENDRES
Un artefact dont il s'est privé et il est hors de question pour les soldats d'Ivasaar de laisser l'Oni récupérer son arme fétiche. Car s'il est capable de rappeler l'épée à lui à distance, il faut qu'il ait le temps de se concentrer. La magie ce n'est pas vraiment son domaine et cela résume très bien ses capacités en la matière. Alors le voilà dans une mêlée aussi violente que macabre, encaissant les écorchures et les déchirures un peu partout sur son corps grisâtre tacheté d'un rouge écarlate par endroit pendant que l'Oni se démène comme comme une bête sauvage pour se défaire de ses adversaires. Quand il est dans cet état, difficile de faire un parallèle avec un être humain car il n'y a plus une once de modération dans son comportement. Ivasaar ne risque plus de ramener ses hommes à la vie et cette fois, la mort est définitive pour la misérable piétaille que l'Oni massacre sans même prendre le temps de souffler. Rien ne semblait pouvoir l'arrêter dans sa soif de sang si ce n'est peut-être les terribles tremblements de terre qui se manifestent par la volonté d'Ivasaar. Qui d'autre, si ce n'est lui ? Les jambes de l'Oni s'en retrouvent déstabilisées, déjà bien fragilisées par les affrontements précédents.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir apparaître une nuée d'acier tranchant au-dessus de sa tête. Ivasaar en mage émérite, nécromancien mais aussi adepte de la télékinésie fait tout l'étalage de sa sinistre puissance et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est sur le point de faire le ménage de la plus belle des façons. Dante sait déjà qu'il est incapable d'éviter ce qui va suivre et en réaction au petite commentaire d'Urzupha à son attention, le cornu tire un corps inerte en se jetant sous la montagne de cadavre qu'il a laissé dans son sillage. S'enfonçant sous les corps démembrés et empilés dont le sang coule encore abondamment sur le sol et dont l'odeur putride n'a vraiment rien de ragoûtant. Tel est le prix de sa survie et le fracas des armes tomba avec violence sur le théâtre des affrontements. Un massacre tout simplement, une exécution en règle de tout ce qui n'a pas su trouver refuge entre les cadavres et les rochers environnants. Principalement ses propres serviteurs en réalité et malgré sa cachette, une lance perfora l'épaule d'un bandit en venant s'arrêter à quelque centimètre de son visage sans le toucher. C'est pas passé loin. Bien. Il peut maintenir profiter d'une petite accalmie car les blessures du colosse à cornes sont nombreuses, il a perdu beaucoup de sang et il continue d'en perdre. Sainte régénération, divine solution à absolument tous ses problèmes en réalité. Comment font les gens lambdas pour soigner leurs plaies ? Quoi, ils mettent un pansement ? C'est risible.
Finalement, l'Oni s'extirpe de l'amas de chair qui l'a protégé il y a quelques secondes. Dégageant un cadavre qui déstabilise le reste des corps empilés qui se cassent la gueule tout autour du cornu. Sacré journée hein ? Un peu de nerf, c'est bientôt le week-end. Il reprend une bouffée d'air pure, chose qui lui manquait pendant qu'Ivasaar essayait de tuer le triumvirat de la violence personnifiée. Il fait rapidement un tour sur lui-même pour constater que les Rôcheuses se sont transformées en un gigantesque cimetière. Heureusement, les deux Orcs sont encore en vie. Nargulg est dans le même état que lui et Urzupha comme à son habitude, pète la forme. Il envie sincèrement son agilité et son aisance pour esquiver les coups. Difficile de faire pareil quand on fait plus de deux mètres et qu'on se traîne une musculature aussi imposante. Le pauvre Dante a toutes les peines du monde à contorsionner son corps mais heureusement, il encaisse plutôt bien. Il reporte son attention sur les derniers survivants du côté d'Ivasaar. Le Nécromancien en personne bien sûr mais aussi sa garde rapprochée qui n'a pas bougé d'un poil, complètement impassible face à la marée de cadavres.
Toujours fidèle à elle-même, la terrible Urzupha joue de provocations et d'insultes bien senties à l'attention de l'Elfe manchot. Tiens, ça doit lui faire tout drôle à cet enfoiré de se retrouver dans une position aussi fâcheuse. Il l'avait pas vu venir ce lancé de javelot, faut dire qu'il faut être le dernier des connards pour jeter son épée en se retrouvant volontairement sans défenses ou presque. Qui est assez con pour faire ça sérieux ? Je vous présente Dante, enchanté. "Tuez-les." Ce fut l'ordre de l'elfe démoniaque à l'attention de sa garde rapprochée qui aussitôt se mirent à s'élancer en direction des trois tueurs. La pause n'a pas duré longtemps mais ce fut suffisant pour que Dante puisse refermer certaines de ses plaies en arrêtant les saignements les plus importants. Cette fois, Urzupha est à l'initiative et ... bordel mais comment décrire la scène sous les yeux ébahis du cornu. Il y a littéralement un connard en armure qui valdingue dans tous les sens en bousculant ses collègues. Urzupha est une attraction à elle seule et la vérité c'est qu'elle s'amuse comme une folle à tourmenter ses adversaires. Affronter cette Orc est un calvaire et Dante en sait quelque chose. D'ailleurs l'Oni ne met pas longtemps à réagir car si Urzupha est capable de retenir l'attention d'une partie des soldats d'élites, elle ne peut pas tout faire toute seule. Il lève donc son bras gauche vers le ciel, paume de main ouverte et attend quelques longues secondes qui donnent l'impression d'une attente interminable. Il ne se passe toujours rien et pendant ce temps, un chevalier fonce sur l'Oni le bouclier levé devant lui et prêt à percuter Dante comme un bélier.
Enfin, la lame noire traverse les cieux à toute vitesse pour répondre à son appel. Elle a du se planter et se bloquer quelque part après avoir arraché le bras du nécromancien mais la voilà de retour quand le chevalier tombe soudainement sa garde pour armer son bras mais l'Oni récupère son épée in extrémis et il est le premier à abattre sa colère sur le crâne du guerrier. La violence du coup et le tranchant de son épée lui permettent de fendre son casque en acier et le crâne qu'il protégeait juste en dessous. Ce fut un duel relativement court mais pas moins intense. Ajoutant un énième cadavre au cimetière sous ses pieds, le bourreau des Dieux se jette à nouveau dans la mêlée en venant prêter main forte à Urzupha cette fois-ci. Se glissant dans l'angle mort d'un autre adversaire qui s'apprêtait à porter un coup à Urzupha, il l'empale violemment sous l'aisselle là où sa lourde armure ne le protège pas. L'Orc était venue lui prêter main forte un peu plus tôt pour qu'il puisse se concentrer sur son fameux lancé à l'attention d'Ivasaar. Dante vient simplement lui rendre la pareille. Putain, qui l'eut cru que Dante vienne en aide à Urzupha. D'abord des ennemis mortels puis compagnons de route en passant par être amants d'une nuit. C'est une relation très changeante entre ces deux-là. N'allons pas jusqu'à dire qu'il commence à l'apprécier mais... disons que c'est en bonne voie.
Dante vient d'en abattre deux mais les autres une fois qu'ils ont pris Dante en considération, viennent lui proposer une adversité mémorable. Le cornu se retrouve constamment entre deux voire trois adversaires, le but étant évidemment de ne pas lui laisser de répit pour jouer de sa lame maudite. Un coup d'épée à gauche à la verticale qu'il évite, puis un autre sur sa droite qu'il bloque. Il finit par se prendre un violent coup de bouclier dans les dents qui manque de peu de le faire tomber à la renverse. Quelle galère, il aurait préféré en finir avec l'autre enfoiré aux grandes oreilles. C'est une perte de temps et surtout du temps que le nécromancien utilise pour se remettre d'aplomb. Ivasaar est peut-être adepte de soin élémentaire, qu'est-ce qu'il en sait le Dante ? Il est peut-être sur le point de faire repousser son bras et c'est bien pour ça que dans le doute, il viendra pour sa tête la prochaine fois. Bam ! Un autre coup de bouclier dans l'épaule suivi un coup d'épée qui lui rajoute une belle cicatrice au niveau de la hanche gauche. Une de plus dans sa collection. Cela sonne comme un avertissement : reste concentré ou tu vas passer l'arme à gauche une bonne fois pour toute. Ils commencent vraiment à être ennuyant ceux-là et Dante s'agace très rapidement de la situation.
D'un puissant coup du talon, il repousse un de ses adversaires qui va s'écraser sur le sol un peu plus loin pendant qu'un autre en profite pour planter sa lame dans le ventre de l'Oni et par chance, il ne touche aucun organe interne. Mais dans la manoeuvre, le soldat en question a baissé sa garde et surtout il se retrouve piégé avec un Dante très en colère qui se saisit de son casque d'une main en le repoussant en arrière jusqu'à le faire tomber à la renverse. Une épée toujours plantée dans le bide, l'Oni à califourchon sur sa proie se met à cogner à répétition sur le solide casque du chevalier. Encore et encore jusqu'à commencer à faire plier le métal sous sa fureur et sa pauvre tête se retrouve bientôt prise au piège dans ce casque qui était censé le protéger et qui s'enfonce petit à petit dans sa peau. Un dernier coup d'une brutalité sans nom vient écraser le crâne d'un troisième garde qu'il éclabousse de son propre sang d'un vomissement inattendu. Décidément, il morfle le Dante et entreprend aussitôt de retirant l'épée plantée dans son ventre d'un bon coup sec.
Autant dire que ça va laisser une marque. Mais pas d'inquiétude, Dante entreprend déjà d'arrêter le saignement avant que sa vue ne se trouble. Que les Divins bénissent la régénération même si cette fois, il va lui falloir un peu plus que quelques minutes pour refermer complètement la plaie. La pointe de sa lame noire plantée dans le sol, il s'appuie fermement dessus pour se remettre sur ses deux jambes. Dante fait l'erreur de tourner le regard en direction de ses deux compagnons Orcs pour savoir comment ça se passe de leur côté. Une erreur parce qu'il ne voit pas arriver ce qui lui tombe dessus depuis les airs : un gigantesque rocher que l'autre enfoiré d'Ivasaar soulève grâce à ses pouvoirs surnaturels et qu'il balance sur l'adversaire le plus proche. C'est tombé sur Dante, pas de chance.
Le choc lui fait la sensation d'être percuté de plein fouet par un camion sur l'autoroute et l'Oni traverse une partie du champ de bataille dans les airs en allant s'encastrer plus loin dans le sol complètement inerte. La lumière vient de s'éteindre pour lui et si par miracle il n'est pas mort, en tout cas il n'est pas prêt de se relever tout de suite. Faites (pas) comme Dante. Si quelqu'un a du mal à s'endormir le soir, un bon rocher dans la gueule est sûrement la solution à tous vos problèmes.
Bon après je suis pas médecin mais si je peux donner un conseil c'est comme le catch : ne reproduisez pas ça chez vous.
CENDRES
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À la saucée purificatrice, les prestigieux Maîtres d'inhumanité favorisèrent la brusque survenance du frimas. Un linceul neigeux fit une entrée magistrale, expirée par l'étendue céleste, véritable bouche des Huits idolâtrés. Guides et Suprêmes Souverains de Nargulg, invitèrent leur exécrable serviteur-exterminateur à périr, en ce premier jour d'Hiver. La saison de l'extinction débuta alors que le mâle, terriblement affaiblit, tanguait certainement. L'embrassade fantasmagorique enlaçait tendrement le fanatique aspergé d'hémoglobine, maintenu en vie par la seule régénération. La survie plus que la vie en vérité, car le temps du givre était propagateur de trépas et de libération, que l'on pouvait affirmer sans peine, qu'il venait à point pour cueillir l'orc. Jour bénit pour celui qui éprouvait la vie dans les moments de grand péril, à présent, en récompense de ses services, les Très-Hauts offrirent une scénographie mémorable à ce barbare, dont la conscience fut peu à peu broyée par l'interminable perte de sang. La primeur hiémale nimbait de somptuosité la macabre assemblée, morts ou vivants, alliés comme ennemis, puisque dorénavant, l'éternel repos fut promis à tous les acteurs de l'interminable lutte. Des trois grands abominables, deux ferraillèrent toujours, Dante et Urzupha. C'était toujours ça de gagné pour Nargulg l'effacé, dont la seule utilité fut d'être semblable à un plot écorché, condamné à la complète passivité, cerné par tout un essaim de débris inanimés, factuellement méconnaissables. Le trio destructeur, s'improvisa duo sanguinaire dans l'impasse mortifère devenue scène à l'étrangeté des plus confuses. La séance d'élasticité d'Urzupha, une bizarrerie dont elle avait le secret, franchissait un palier dans l'échelle de la monstruosité. Désormais, ses phalanges agirent en filets épouvantables, habiles puisque malléables à souhait, et entortillèrent un de ces gus.
Plutôt pas mal, l'allongement des membres, vous ne trouvez pas ? De vous à moi, lecteur, je trouve cette compétence mésestimée par mes confrères conteurs. J'y peux rien, c'est ainsi.
La victime d'Urzupha avait l'allure d'un bélier volant, c'était l'utilité de l'armure prisonnière quelque part : perturber la cohésion de la dizaine d'armoires à glace. Les renverser ou les ralentir, avec un étonnant sérieux de sa part. Tout à fait, elle se marrait moins et plutôt que des expressions faciales provocatrices, la femme afficha moult grimaces douloureuses, changeants au gré d'une situation incontrôlable. Où étaient-ils ? Aèdes et troubadours, pour élaborer des chants et des poèmes épiques ? À trop fréquenter les tavernes pour y noyer leurs chopes de bouillies sentimentales, ils oublièrent d'assister aux grands moments. Des scribouillards de pacotilles, ou gueules cracheuses de propagande écartés de tout danger, voilà ce qu'ils étaient ! Des traîne-savates professionnels, voire des secoueurs de roustons pour quelques Seigneurs glandus. Fut-ce un drame pour nos héros, que de n'avoir point d'admirable manieur du verbe, tenir d'élogieux discours en leur faveur ? Nullement. À eux le privilège de vivre l'épopée annihilatrice, à l'abri des emmerdantes civilisations. À eux d'endurer, dans l'entier secret bien gardé des Rocheuses, l'ultime péril planant au-dessus de leurs âmes pourries.
Vint le moment, où les efforts d'Urzupha ne continrent aucunement l'implacable avancée des colosses d'acier, les câbles, pour ne pas dire les doigts dénaturés, exploités au summum de sa technique torsadée, débandèrent le joujou en armure sur commande. L'assommé délivré, rejoignit définitivement la clique d'amorphes, tandis que l'indomptable balafrée harponna sa hache même plus retenue par les monticules de viandes dégueulasses. Avec le froid consubstantiel de la non-vie, les gelées hivernales s'invitèrent à la danse rythmée par d'inédites engelures. Toutefois, l'énergie de la lutte renflée de fougue contraignait le froid à la patience, non, la météo n'aurait pas raison d'eux. Alors elle s'élança, et avec fracas la furie cogna les grands rescapés, inépuisables incarnations de la servilité. Ceux-là, chiens de garde du calamiteux Ivasaar, furent partiellement bousillés par le démon des rocheuses. Quel champion cet oni, vraiment, le mec pouvait tout aussi bien manier l'épée que la balancer comme ça, à croire que l'engin était un couteau de lancer. Mais bon, le truc c'est que tant que ça marche, fallait pas hésiter. Comment ça l'elfe respirait encore ? Il s'agirait de le zyeuter d'un peu plus près, ça n'avait rien d'une ballade de printemps pour l'infirme... Je crois ?... Il brama sans discontinuer, assit sur ses rotules dilacérées, contrôlant les émotions des pions sous ses ordres. Satané marionnettiste, putasse d'Edrir ! L'enflure approvisionna en colère les cœurs de sa troupe, tant et si bien qu'ils abusèrent d'imprudence contre Urzupha. Résultat, la démente fut sujette à bien des bousculades, une charge au bouclier déséquilibra l'orc, mais bénit soit Dante, il intervint à temps et anéanti l'hostile opportuniste. Fantastiques, ils parvinrent à faire équipe, n'est-ce pas magnifique ? D'indolores taillades minaient le cuir de la grisée, trop peu profondes pour sérieusement l'affecter, la barbare repartit à l'assaut, parce qu'il n'y avait que cela à faire. Nargulg n'étant plus une menace, les projecteurs pointèrent le cornu et la furie, piliers branlants d'une lutte qui n'en finissait plus. De sa hache, la femme déforma le plastron d'un des cons guidés, sonné en conséquence, elle tourmenta le thorax métallique jusqu'à ce que mort s'ensuive. Un tel acharnement ne fut pas sans contrecoup, obnubilée qu'elle était par l'actuelle proie démolie, une autre fendit l'échine de l'enragée de bas en haut. Toute une déchirure verticale scarifiait l'infâme orc, bavant la rouge vitalité qui fuitait dorénavant en une nappe grandissante. Non, Urzupha n'échapperait pas indéfiniment à l'ébranlement.
Transportée d'un sentiment à l'autre, l'horrible guerrière contracta les joues, puis mordilla ses lèvres sous l'effet de la colère, quand elle n'exultait pas de sectionner l'arrière de la cuisse d'un vaillant ennemi, irrémédiablement écroulé dans une poisseuse nappe groseille. La folle leur accordait cela, à tous, que d'être assez atteint pour la défier, fut une haute qualité. Et puisqu'aucun ne recula, ils remportèrent son respect, pour peu qu'ils en avaient quelque chose à foutre, les grands muets. Alors certes, ils furent plus impressionnants que les troufions de base. Cela dit, être énorme et sec dessous une épaisse couche d'acier ne fit pas d'eux des soldats d'élites pour autant. Voyez l'oni, grandement blessé, il éclata des crânes, planta sa lame ici et là, tout de même ! Ça forçait le respect.
Sur les dix mastodontes, le porteur de démon en élimina trois, et Urzupha tout autant. Incroyable ! Les plaies n'entravèrent pas assez nos tueurs, quoiqu'on dise, la garde personnelle d'Ivasaar n'entretint plus le doute sur la conclusion de ce funeste chapitre. Alors pourquoi ? Pourquoi diable l'hilarité éclata des babines d'Ivasaar ?! Son rire sardonique perçait au travers les ronronnement venteux de l'aquilon persécuteur, lorsqu'il délogea l'oni à coup de parpaing rocheux dans la poire. PUTAIN ! Alors ça c'était quelque chose et moi, narrateur, je ne saurai pas encaisser un tel choc... Attendez, comment je dois gérer la suite sans Dante pour défendre mes petits monstres ? Haha. HAHAHA ! MOUHAHAHAHA ! J'ai trouvé !
Fidèle lecteur, je te dois une petite confidence. J'adore malmener mes personnages ! L'idée qu'on puisse les croire invincibles me dégoûte. C'est pour ça que je joue les vilains, les vrais de vrai ! Ceux qui sont irrécupérables, des dégénérés, racistes et meurtriers de la pire espèce, qu'on voudrait unanimement les voir crever, ouais ! Le récit va reprendre mon ami, accroche-toi, ça va swinguer.
Le méchant manchot, elfe jouisseur du malheur assurément, fut un appui considérable, eu égard au déclin de ses troupes, pour que ces dernières réduites au nombre de quatre connards, furent disposées à renouveler leurs grands efforts destructeurs. Face à eux, Urzupha, dangereusement seule. Quant à Dante, le pauvre flottait dans les airs, terrassé par l'incommensurable puissance télékinétique du sorcier en joie. Où allait atterrir le gentil, mais néanmoins pas si sympathique cornu ? Quelque part au milieu des cadavres, dans la pineraie encore peu enneigée. Il n'y avait plus rien à faire pour lui, Urzupha fut de plus aux prises avec les derniers opiniâtres que le conflit n'eut point étranglé, pour ne guère daigner s'enquérir de l'état du plus estourbi des cornus, probablement mort au demeurant. Nargulg non plus, n'était pas bien portant, auparavant debout, dès lors agenouillé, la grandiose régénération requérait un délai toujours trop considérable pour véritablement le tirer d'affaire. L'heure fut à l'urgence, le mâle était impuissant, aussi maintint-il sa propre conscience à défaut de mieux, n'espérant plus que de se redresser parmi le plat océan cadavérique, afin de triompher, mais bon, il filait un mauvais coton dans cette histoire, c'était bien joli de rêver, ce n'est pas pour autant qu'il ressortirait d'ici en vie.
- Dante est mort, vous deux ! Hâtez-vous d'achever Nargulg ! Ordonna avec empressement Ivasaar, à l'attention de ses subordonnés, cela dans un Bas-Parlé fort bien comprit de tous.
Les affreuses armures, indéfectibles serviteurs de l'engeance du Mal, détournèrent pour deux d'entre elles leur attention d'Urzupha, la sombre sentence dirigeant leurs faits et gestes. L'elfe à la notabilité manifeste manigançait quelque chose, diviser ainsi l'unité de ses quatre gorilles avait tout de la mauvaise idée, pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?! Mettre en péril ses hommes, déraisonnablement fidèles, c'était insensé. Abattre l'orc au féminin dut être LA priorité, son con de bonhomme étant à rien de claquer sur place. Fut-ce un excès de confiance, que le sieur Urira accorda une irrésistible opportunité d'en finir avec la paire de duos métallique ? La sauvagesse souffrit d'aucune réflexion de la sorte, c'était trop beau pour ne pas y croire. Prise en tenaille, feignant la retraite par trois petits pas en arrière, la furie abandonna sa hache aux répugnantes mixtures madéfiant la terre. Soudain, poings et avant-bras congestionnèrent avec exagération, que l'on vit les lanières de ses gantelets de fer céder sous la pression d'une peau caoutchouteuse. Deux mains gigantesques s'élevèrent par-dessus Urzupha, les siennes indubitablement. Véritables massues, ou marteaux improvisés, elle pilonna le duo qui la défiait sans trembler. Monstrueuse et tonitruante, sa rage retentit autant que les coups broyeurs d'acier pleuvèrent sur cette parcelle du terrain bousillé. Des quatre derniers, deux périrent en un éclair. Cependant, voici que Nargulg, grand absent de la conclusion dévastatrice, fut à présent la cible fétiche des deux armoires à glaces restantes. Sans possibilité de combattre correctement, la mobilité étant chose compliquée, avec des membres inférieurs ravagés, non je vous le dis, l'orc n'avait plus que ses piteux bras pour se débattre. Que de mollesse ! De la part de mon vagabond cultivateur zélé de la puissance pour la puissance, farouche adepte de la terreur comme programme idéal pour maintenir l'ordre des déités. Nargulg désirait se redresser, il n'en fit rien, puis quand les doubles cliquetants défièrent le moribond, sa seule défense fut de barrer sa trogne effroyable du bras gauche. Malheureusement, celui-ci fut partiellement découpé précédemment, qu'au passage du couperet le membre fut disloqué, définitivement dérobé. Le guerrier sanguinaire perdit un avant-bras, la sénestre qui allait avec, et plus important encore, il entrevit la mort. Voilà où mène la culture du conflit de ces orcs : vers l'inéluctable ruine.
Pas le temps de ruminer la lourde perte subie, les jérémiades seraient pour plus tard. Car voici venir en soutien, le second colosse d'Ivasaar, comme si le premier ne suffisait pas hein. Il bouscula le verdâtre d'un sévère coup de pied dans la poitrine, lequel n'eut plus qu'à finir étalé dans la crasse, une digne position pour l'infâme mortel qu'il fut. Et pourtant, ni répit ni repos d'aucune sorte ne vinrent alléger l'orc croulant sous les blessures, une lame pointa désormais dangereusement sa face défigurée. Afin de perdurer en ce bas-monde d'horreur qui lui seyait à merveille, Nargulg le faiblard opposa la main droite en rempart, dernière défense d'un monstre et victime d'un affrontement perdu pour lui. Le sbire du sorcier perça la paume de mon tueur, le sommet de l'épée empaleuse farfouillant ostensiblement l'ossification de la main creuse, déplorable obstacle évocateur d'un embrochement facial près à se concrétiser sous le poids du soldat. Il résista comme il put, mon orc, hélas ses forces s'amenuisèrent davantage et retenir la lame fut chose impossible, par ces temps de grands désarrois. Ainsi, des grognements infects germèrent hors de sa grosse gueule, simple réaction à la lame perforatrice de l'orbite droite. Perte supplémentaire, c'est le risque quand on cherche la bagarre, on en prend plein la tronche héhé.
Finalement, c'est Urzupha qui extirpa Nargulg de ce bourbier. L'intervention de la femme tintinnabula la fin de la torture, l'orc miraculé avait enfin le droit de souffler, bref bénéfice d'estropié pendant qu'elle dézinguait les deux salopards, sous le regard approbateur d'Ivasaar. Renversant à son arrivée les géants de fer, Urzupha défonça cuirasses et casques à coup de talons vengeurs, parce que c'était à elle que revenait de tuer Nargulg. Morts, les gus n'eurent plus que des spasmes nerveux à exprimer en guise de contestations, d'ultimes soubresauts de ces cervelles en perditions, rien de plus.
Peu prédisposée à faire montre de compassion pour qui que ce soit, l'intérêt de la furie se redirigea immédiatement sur le fier Ivasaar, un autre miraculé du conflit. Levée à bonne distance du nuisible, la chevelure tissée de ténèbres, empoissée de substances carminées, et superbement soufflée par les rafales éventées d'un froid glacial. La barbare, dernière debout, nargua monsieur oreilles pointues simplement en se dressant telle une fossoyeuse parmi les désossés du cimetière. La crue rougissante s'éclaircit depuis la tombée des flocons de neige, et les Sublimes Monarques s'impatientèrent. Celle qui s'en tamponnait complètement des croyances, ferait leur bonheur, puisque de toute évidence, le carnage fut l'unique distraction des entités célestes. La boucherie suspendue par un échange de regards suspects, Urzupha en profita pour effacer les blessures les plus oubliables, pendant que l'autre gars, euh, Ivasaar ouais, ben de la manche de son long manteau, tomba un minuscule cristal humecté de magie noire. Au cœur de sa poigne, l'engin lustré de pourpre grandit, faisant de la petite pierre un simili poignard, une inquiétante couche de moirure indéfinissable perlait de l'outil sacrificiel. Sans se faire prier, Urzupha initia une course à pied, les charognes refroidies entre elle et le sorcier étant enjambé précipitamment.
- Ha ! C'est un peu tard pour sortir ton cure-dent, Iva-
Et le cure-dent pénétra l'estomac du terrifiant Urira. Interloquée par le geste suicidaire, la furie freina sur-le-champ son avancée dans l'amas sépulcral, les râles d'agonie raclaient la gorge du psychopathe et la douleur fut telle, que des larmes s'écoulèrent hors de ses pupilles. Malgré cela, contre toute attente et tout bon sens, surpassant l'insupportable douleur, l'elfe déchiqueta épiderme et organes au passage de l'étrange dague cristalline. L'abdomen profondément éventré, le souffrant alla au bout de l'atrocité. Mue par un abominable désir jusque-là inassouvi, l'âme corrompue avançait pas à pas dans le toujours plus. Toujours plus d'abjecte. Toujours plus de sang. Toujours plus... De visions surréalistes, cauchemardesques dans les moindres détails. Et c'était bien ainsi, oui, c'était très bien comme cela.
Bienvenue dans le merveilleux monde de Dante, Nargulg et Urzupha ! Lorsque vous en aurez marre de vous la toucher à Liberty ou Kyouji, venez faire un tour dans les Rocheuses. Vous pourrez dire à votre meilleur ami "je me sens aventurier depuis que je traîne en Shoumeï, et toi ?" Interrogez-le avec le sourire, histoire qu'il retienne bien que vous appartenez à la meilleure catégorie d'individus qui soit. C'est pas bien compliqué, il y en a deux : ceux qui vivent dans un territoire super dangereux. Puis, il y a les autres. Autrement dit, si t'es burné, tu te ramènes, sinon tu la boucles et laisse les grands discuter. Capisce ?
Tout ce grandiose numéro d'exclamation douloureuse poussée à l'extrême, résulta simplement. L'autodestruction eut raison de l'elfe malfaisant, le poignard céans enfoncé dans son thorax affreusement supplicié. La frêle créature fut répandue sur le versant montagneux, face contre terre, l'apôtre de l'effroi épousa la froide étreinte. Frileuse à l'idée qu'une mauvaise surprise n'émane de l'entreprise suicidaire, la balafrée entama une prudente marche vers le dernier des macchabées, en position défensive, la hache prête à fondre sur la proie renversée.
Murmures ou succédané de borborygmes aux lugubres teneurs, hantaient les parages retournés par l'obscur rituel. Des voix aux accents fantomatiques de se répandre en lamentations çà et là, désormais, les âmes des cent défunts furent soumises au bon vouloir du cristal, et dans le chaos généralisé, l'artefact de malfaisance aspira les esprits erratiques. Ultime condamnation pour la troupe, car pareille réalisation consommera définitivement les âmes damnées. Au trépas matériel, assistait-on au trépas spirituel de la horde criminelle. Urzupha fut dans l'incapacité totale de se ruer sur l'elfe, puisque gravas, cadavres envolés et tremblements de terre ininterrompue perturbaient celle qui voulait absolument en finir. Un vacarme saisissant au cœur redessinait une portion non-négligeable de la région, l'on était en droit de se demander si l'odieux Edrir, abrité dans sa forteresse, ne fut pas atteint par le présent fléau ravageur. Pour surmonter cette épreuve et dépasser la confusion, la femme se cramponna à l'arme qu'elle traînait depuis toujours, partiellement plongée dans le sol fissuré. Concernant Nargulg, monsieur valdingua avec les dépouilles à l'instar d'un sac de patates, jusqu'à ce que le séisme le balançât contre un énorme rocher indélogeable. Miracle, l'estropié d'orc put s'y accrocher et de là, observer le prodige nécromant triompher de la mort. En effet, tout ce bordel dut mener à cette sinistre conclusion.
Oubliée, la partie de jambes en l'air de la veille, en sus de ça, l'affrontement contre la wyverne était bien peu de chose en comparaison de ce panorama fantasmagorique, jonglant tantôt avec l'indicible horreur, tantôt avec l'émerveillement sublimé par la frénésie hivernale. D'affreux grincements métalliques survinrent de la dague sacrificielle, authentique moissonneuse d'âmes liquidées à la chaîne. Enfin, un opaque cocon enténébré engouffra Ivasaar, emportant le défunt fils de la désolation sous les nuages dispersés sur ordre de la Providence. L'insondable coquille de l'elfe changea du tout au tout, rivalisant d'éclat avec le Soleil. Fantastique ! Le séraphin de la déchéance retrouva une digne place dans l'azur frigorifique, coincé entre les murs d'un cocon d'ivoire étincelant. Au terme de la spectaculaire démonstration, la mystérieuse enveloppe résurrectrice vola en éclats dans des volutes immaculées, laissant Nargulg et Urzupha contempler à loisir le grand retour de l'elfe transfiguré.
La magnificence d'Urira, dernier de sa généalogie, fut totalement restaurée. L'être aux joues creuses, aux yeux pollués par les cernes et au teint blafard, fit place à un homme resplendissant, débordant de vitalité, désormais porteur d'une peau légèrement dorée. Le manchot appartint au passé, son bras ayant repoussé pendant l'opération. Ses guibolles démolies ne furent plus qu'un vague souvenir, admirez ! Ivasaar Urira ! Splendeur elfique à la toison d'ocre balayée par le vent, purifié de toute blessure ou cicatrices. Louangez sa venue, car voici que l'apôtre de l'effroi revêtit le corps de sa première incarnation, parfaite et sublime à tout point de vue. Une paire de bottes surmontées de jambières argentées, ainsi qu'un pagne charbonneux, ornementaient la quasi-nudité du sire, et c'est tout. Un corps de rêve, garnit d'une musculature symétrique et quelque peu travaillée, descendit paisiblement du ciel, sous la houlette du grand soleil. Impossible. L'on croyait comprendre que les divins eurent choisi leur champion, tant le manteau neigeux n'osa jamais alourdir le cuir revigoré d'Ivasaar.
Terminés les cristaux, le poignard improvisé, tous ces outils subirent la désagrégation, en parachèvement de l'exploit de l'artisan-malfaiteur. Ensuite, comme pour faire comprendre aux survivants qu'il fut toujours le même, l'adonis étouffa l'atmosphère tel qu'il sut si bien le faire, un effroyable cri strident d'assaillir les créatures de ce bas-monde qu'il daigna approcher, suspendu à moins d'un mètre du sol. Séparée de quelques mètres, Urzupha dévisagea le blondin au visage sculpté sans défaut, sertit d'iris émeraude.
- TWAAH ! C'est quoi ton problème ?! Tu crèves ou tu crèves pas ?! Si je descends des types c'est pas pour les voir bouger juste après ! Fais chier, viens ici que j'te bute enculé !
Beugla-t'elle avec fougue, elle pouvait se le permettre depuis que le séisme est passé de mode. Victime de l'euphorie, Ivasaar extériorisa d'emblée le torrent de bonheur qui s'était emparé de lui.
- ENFIN ! Après toutes ces années de dur labeur !! J'ai pu récupérer mon corps, je suis immortel ! BWAHAHAHAHAHaaaaaaaa !
Expulsant moult rires diaboliques, le nécromant paru appartenir à un autre monde. Celui d'entités supérieures, n'ayant que faire de répondre aux sollicitations d'une orc débile. Des singes, il ne considérait pas autrement Nargulg, Dante et Urzupha. L'arrogance suintait d'Ivasaar, comme l'eau d'une éponge.
- C'est faux, je t'ai vu mourir ! T'étais là, en train de crier comme un cochon, par terre et tout...
Moqueur, il tira la langue pendant qu'elle résuma le récit de sa splendide résurrection, chose incompréhensible pour madame et objet de railleries diverses et variées, articulées par le sieur Urira. Si d'apparence, il changea du tout au tout, intérieurement rien ne bougea d'un iota, évidemment, ce serait moins drôle sinon. Aussitôt Urzupha accéléra le pas, que d'un simple échange de regards, l'orc dut endurer la pétrification pour sanction. Excellent ! Le magicien avait les mains libres pour torturer Nargulg, éternel coincé sur sa caillasse de merde. Ce mâle-là, vulnérable depuis trop longtemps, dut remercier la régénération de le soutenir, cependant, cette fois, il n'y eut plus personne pour le défendre. Dante était en train de roupiller, je ne sais pas trop où, Urzupha n'était qu'une statue dégueulasse, à Nargulg d'en prendre plein la tête, j'ai envie de vous dire. Oui parce que, retenez bien ceci : Ivasaar était quelqu'un d'assez cultivé, pour savoir combien les orcs furent sensibles aux dégâts psychiques. Hahaha. Tu vois où je veux en venir, ou pas ? L'elfe allait dégainer l'attaque mentale, pourrir le cerveau de mon orc, le déposséder de son identité et le transformer en légume.
En préambule, il se tint à cinq mètres de Nargulg, non pas qu'il craignait l'ire du borgne tout de vert, seulement, il était capable de ravager l'esprit des gens à distance, autant en profiter.
Reste à savoir, si Dante interviendra pour sauver les deux autres. Sinon ? Hé bien, ami lecteur, j'ai une tonne de méchants en réserve, je n'aurai qu'à repasser par la case "présentation".
Plutôt pas mal, l'allongement des membres, vous ne trouvez pas ? De vous à moi, lecteur, je trouve cette compétence mésestimée par mes confrères conteurs. J'y peux rien, c'est ainsi.
La victime d'Urzupha avait l'allure d'un bélier volant, c'était l'utilité de l'armure prisonnière quelque part : perturber la cohésion de la dizaine d'armoires à glace. Les renverser ou les ralentir, avec un étonnant sérieux de sa part. Tout à fait, elle se marrait moins et plutôt que des expressions faciales provocatrices, la femme afficha moult grimaces douloureuses, changeants au gré d'une situation incontrôlable. Où étaient-ils ? Aèdes et troubadours, pour élaborer des chants et des poèmes épiques ? À trop fréquenter les tavernes pour y noyer leurs chopes de bouillies sentimentales, ils oublièrent d'assister aux grands moments. Des scribouillards de pacotilles, ou gueules cracheuses de propagande écartés de tout danger, voilà ce qu'ils étaient ! Des traîne-savates professionnels, voire des secoueurs de roustons pour quelques Seigneurs glandus. Fut-ce un drame pour nos héros, que de n'avoir point d'admirable manieur du verbe, tenir d'élogieux discours en leur faveur ? Nullement. À eux le privilège de vivre l'épopée annihilatrice, à l'abri des emmerdantes civilisations. À eux d'endurer, dans l'entier secret bien gardé des Rocheuses, l'ultime péril planant au-dessus de leurs âmes pourries.
Vint le moment, où les efforts d'Urzupha ne continrent aucunement l'implacable avancée des colosses d'acier, les câbles, pour ne pas dire les doigts dénaturés, exploités au summum de sa technique torsadée, débandèrent le joujou en armure sur commande. L'assommé délivré, rejoignit définitivement la clique d'amorphes, tandis que l'indomptable balafrée harponna sa hache même plus retenue par les monticules de viandes dégueulasses. Avec le froid consubstantiel de la non-vie, les gelées hivernales s'invitèrent à la danse rythmée par d'inédites engelures. Toutefois, l'énergie de la lutte renflée de fougue contraignait le froid à la patience, non, la météo n'aurait pas raison d'eux. Alors elle s'élança, et avec fracas la furie cogna les grands rescapés, inépuisables incarnations de la servilité. Ceux-là, chiens de garde du calamiteux Ivasaar, furent partiellement bousillés par le démon des rocheuses. Quel champion cet oni, vraiment, le mec pouvait tout aussi bien manier l'épée que la balancer comme ça, à croire que l'engin était un couteau de lancer. Mais bon, le truc c'est que tant que ça marche, fallait pas hésiter. Comment ça l'elfe respirait encore ? Il s'agirait de le zyeuter d'un peu plus près, ça n'avait rien d'une ballade de printemps pour l'infirme... Je crois ?... Il brama sans discontinuer, assit sur ses rotules dilacérées, contrôlant les émotions des pions sous ses ordres. Satané marionnettiste, putasse d'Edrir ! L'enflure approvisionna en colère les cœurs de sa troupe, tant et si bien qu'ils abusèrent d'imprudence contre Urzupha. Résultat, la démente fut sujette à bien des bousculades, une charge au bouclier déséquilibra l'orc, mais bénit soit Dante, il intervint à temps et anéanti l'hostile opportuniste. Fantastiques, ils parvinrent à faire équipe, n'est-ce pas magnifique ? D'indolores taillades minaient le cuir de la grisée, trop peu profondes pour sérieusement l'affecter, la barbare repartit à l'assaut, parce qu'il n'y avait que cela à faire. Nargulg n'étant plus une menace, les projecteurs pointèrent le cornu et la furie, piliers branlants d'une lutte qui n'en finissait plus. De sa hache, la femme déforma le plastron d'un des cons guidés, sonné en conséquence, elle tourmenta le thorax métallique jusqu'à ce que mort s'ensuive. Un tel acharnement ne fut pas sans contrecoup, obnubilée qu'elle était par l'actuelle proie démolie, une autre fendit l'échine de l'enragée de bas en haut. Toute une déchirure verticale scarifiait l'infâme orc, bavant la rouge vitalité qui fuitait dorénavant en une nappe grandissante. Non, Urzupha n'échapperait pas indéfiniment à l'ébranlement.
Transportée d'un sentiment à l'autre, l'horrible guerrière contracta les joues, puis mordilla ses lèvres sous l'effet de la colère, quand elle n'exultait pas de sectionner l'arrière de la cuisse d'un vaillant ennemi, irrémédiablement écroulé dans une poisseuse nappe groseille. La folle leur accordait cela, à tous, que d'être assez atteint pour la défier, fut une haute qualité. Et puisqu'aucun ne recula, ils remportèrent son respect, pour peu qu'ils en avaient quelque chose à foutre, les grands muets. Alors certes, ils furent plus impressionnants que les troufions de base. Cela dit, être énorme et sec dessous une épaisse couche d'acier ne fit pas d'eux des soldats d'élites pour autant. Voyez l'oni, grandement blessé, il éclata des crânes, planta sa lame ici et là, tout de même ! Ça forçait le respect.
Sur les dix mastodontes, le porteur de démon en élimina trois, et Urzupha tout autant. Incroyable ! Les plaies n'entravèrent pas assez nos tueurs, quoiqu'on dise, la garde personnelle d'Ivasaar n'entretint plus le doute sur la conclusion de ce funeste chapitre. Alors pourquoi ? Pourquoi diable l'hilarité éclata des babines d'Ivasaar ?! Son rire sardonique perçait au travers les ronronnement venteux de l'aquilon persécuteur, lorsqu'il délogea l'oni à coup de parpaing rocheux dans la poire. PUTAIN ! Alors ça c'était quelque chose et moi, narrateur, je ne saurai pas encaisser un tel choc... Attendez, comment je dois gérer la suite sans Dante pour défendre mes petits monstres ? Haha. HAHAHA ! MOUHAHAHAHA ! J'ai trouvé !
Fidèle lecteur, je te dois une petite confidence. J'adore malmener mes personnages ! L'idée qu'on puisse les croire invincibles me dégoûte. C'est pour ça que je joue les vilains, les vrais de vrai ! Ceux qui sont irrécupérables, des dégénérés, racistes et meurtriers de la pire espèce, qu'on voudrait unanimement les voir crever, ouais ! Le récit va reprendre mon ami, accroche-toi, ça va swinguer.
Le méchant manchot, elfe jouisseur du malheur assurément, fut un appui considérable, eu égard au déclin de ses troupes, pour que ces dernières réduites au nombre de quatre connards, furent disposées à renouveler leurs grands efforts destructeurs. Face à eux, Urzupha, dangereusement seule. Quant à Dante, le pauvre flottait dans les airs, terrassé par l'incommensurable puissance télékinétique du sorcier en joie. Où allait atterrir le gentil, mais néanmoins pas si sympathique cornu ? Quelque part au milieu des cadavres, dans la pineraie encore peu enneigée. Il n'y avait plus rien à faire pour lui, Urzupha fut de plus aux prises avec les derniers opiniâtres que le conflit n'eut point étranglé, pour ne guère daigner s'enquérir de l'état du plus estourbi des cornus, probablement mort au demeurant. Nargulg non plus, n'était pas bien portant, auparavant debout, dès lors agenouillé, la grandiose régénération requérait un délai toujours trop considérable pour véritablement le tirer d'affaire. L'heure fut à l'urgence, le mâle était impuissant, aussi maintint-il sa propre conscience à défaut de mieux, n'espérant plus que de se redresser parmi le plat océan cadavérique, afin de triompher, mais bon, il filait un mauvais coton dans cette histoire, c'était bien joli de rêver, ce n'est pas pour autant qu'il ressortirait d'ici en vie.
- Dante est mort, vous deux ! Hâtez-vous d'achever Nargulg ! Ordonna avec empressement Ivasaar, à l'attention de ses subordonnés, cela dans un Bas-Parlé fort bien comprit de tous.
Les affreuses armures, indéfectibles serviteurs de l'engeance du Mal, détournèrent pour deux d'entre elles leur attention d'Urzupha, la sombre sentence dirigeant leurs faits et gestes. L'elfe à la notabilité manifeste manigançait quelque chose, diviser ainsi l'unité de ses quatre gorilles avait tout de la mauvaise idée, pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?! Mettre en péril ses hommes, déraisonnablement fidèles, c'était insensé. Abattre l'orc au féminin dut être LA priorité, son con de bonhomme étant à rien de claquer sur place. Fut-ce un excès de confiance, que le sieur Urira accorda une irrésistible opportunité d'en finir avec la paire de duos métallique ? La sauvagesse souffrit d'aucune réflexion de la sorte, c'était trop beau pour ne pas y croire. Prise en tenaille, feignant la retraite par trois petits pas en arrière, la furie abandonna sa hache aux répugnantes mixtures madéfiant la terre. Soudain, poings et avant-bras congestionnèrent avec exagération, que l'on vit les lanières de ses gantelets de fer céder sous la pression d'une peau caoutchouteuse. Deux mains gigantesques s'élevèrent par-dessus Urzupha, les siennes indubitablement. Véritables massues, ou marteaux improvisés, elle pilonna le duo qui la défiait sans trembler. Monstrueuse et tonitruante, sa rage retentit autant que les coups broyeurs d'acier pleuvèrent sur cette parcelle du terrain bousillé. Des quatre derniers, deux périrent en un éclair. Cependant, voici que Nargulg, grand absent de la conclusion dévastatrice, fut à présent la cible fétiche des deux armoires à glaces restantes. Sans possibilité de combattre correctement, la mobilité étant chose compliquée, avec des membres inférieurs ravagés, non je vous le dis, l'orc n'avait plus que ses piteux bras pour se débattre. Que de mollesse ! De la part de mon vagabond cultivateur zélé de la puissance pour la puissance, farouche adepte de la terreur comme programme idéal pour maintenir l'ordre des déités. Nargulg désirait se redresser, il n'en fit rien, puis quand les doubles cliquetants défièrent le moribond, sa seule défense fut de barrer sa trogne effroyable du bras gauche. Malheureusement, celui-ci fut partiellement découpé précédemment, qu'au passage du couperet le membre fut disloqué, définitivement dérobé. Le guerrier sanguinaire perdit un avant-bras, la sénestre qui allait avec, et plus important encore, il entrevit la mort. Voilà où mène la culture du conflit de ces orcs : vers l'inéluctable ruine.
Pas le temps de ruminer la lourde perte subie, les jérémiades seraient pour plus tard. Car voici venir en soutien, le second colosse d'Ivasaar, comme si le premier ne suffisait pas hein. Il bouscula le verdâtre d'un sévère coup de pied dans la poitrine, lequel n'eut plus qu'à finir étalé dans la crasse, une digne position pour l'infâme mortel qu'il fut. Et pourtant, ni répit ni repos d'aucune sorte ne vinrent alléger l'orc croulant sous les blessures, une lame pointa désormais dangereusement sa face défigurée. Afin de perdurer en ce bas-monde d'horreur qui lui seyait à merveille, Nargulg le faiblard opposa la main droite en rempart, dernière défense d'un monstre et victime d'un affrontement perdu pour lui. Le sbire du sorcier perça la paume de mon tueur, le sommet de l'épée empaleuse farfouillant ostensiblement l'ossification de la main creuse, déplorable obstacle évocateur d'un embrochement facial près à se concrétiser sous le poids du soldat. Il résista comme il put, mon orc, hélas ses forces s'amenuisèrent davantage et retenir la lame fut chose impossible, par ces temps de grands désarrois. Ainsi, des grognements infects germèrent hors de sa grosse gueule, simple réaction à la lame perforatrice de l'orbite droite. Perte supplémentaire, c'est le risque quand on cherche la bagarre, on en prend plein la tronche héhé.
Finalement, c'est Urzupha qui extirpa Nargulg de ce bourbier. L'intervention de la femme tintinnabula la fin de la torture, l'orc miraculé avait enfin le droit de souffler, bref bénéfice d'estropié pendant qu'elle dézinguait les deux salopards, sous le regard approbateur d'Ivasaar. Renversant à son arrivée les géants de fer, Urzupha défonça cuirasses et casques à coup de talons vengeurs, parce que c'était à elle que revenait de tuer Nargulg. Morts, les gus n'eurent plus que des spasmes nerveux à exprimer en guise de contestations, d'ultimes soubresauts de ces cervelles en perditions, rien de plus.
Peu prédisposée à faire montre de compassion pour qui que ce soit, l'intérêt de la furie se redirigea immédiatement sur le fier Ivasaar, un autre miraculé du conflit. Levée à bonne distance du nuisible, la chevelure tissée de ténèbres, empoissée de substances carminées, et superbement soufflée par les rafales éventées d'un froid glacial. La barbare, dernière debout, nargua monsieur oreilles pointues simplement en se dressant telle une fossoyeuse parmi les désossés du cimetière. La crue rougissante s'éclaircit depuis la tombée des flocons de neige, et les Sublimes Monarques s'impatientèrent. Celle qui s'en tamponnait complètement des croyances, ferait leur bonheur, puisque de toute évidence, le carnage fut l'unique distraction des entités célestes. La boucherie suspendue par un échange de regards suspects, Urzupha en profita pour effacer les blessures les plus oubliables, pendant que l'autre gars, euh, Ivasaar ouais, ben de la manche de son long manteau, tomba un minuscule cristal humecté de magie noire. Au cœur de sa poigne, l'engin lustré de pourpre grandit, faisant de la petite pierre un simili poignard, une inquiétante couche de moirure indéfinissable perlait de l'outil sacrificiel. Sans se faire prier, Urzupha initia une course à pied, les charognes refroidies entre elle et le sorcier étant enjambé précipitamment.
- Ha ! C'est un peu tard pour sortir ton cure-dent, Iva-
Et le cure-dent pénétra l'estomac du terrifiant Urira. Interloquée par le geste suicidaire, la furie freina sur-le-champ son avancée dans l'amas sépulcral, les râles d'agonie raclaient la gorge du psychopathe et la douleur fut telle, que des larmes s'écoulèrent hors de ses pupilles. Malgré cela, contre toute attente et tout bon sens, surpassant l'insupportable douleur, l'elfe déchiqueta épiderme et organes au passage de l'étrange dague cristalline. L'abdomen profondément éventré, le souffrant alla au bout de l'atrocité. Mue par un abominable désir jusque-là inassouvi, l'âme corrompue avançait pas à pas dans le toujours plus. Toujours plus d'abjecte. Toujours plus de sang. Toujours plus... De visions surréalistes, cauchemardesques dans les moindres détails. Et c'était bien ainsi, oui, c'était très bien comme cela.
Bienvenue dans le merveilleux monde de Dante, Nargulg et Urzupha ! Lorsque vous en aurez marre de vous la toucher à Liberty ou Kyouji, venez faire un tour dans les Rocheuses. Vous pourrez dire à votre meilleur ami "je me sens aventurier depuis que je traîne en Shoumeï, et toi ?" Interrogez-le avec le sourire, histoire qu'il retienne bien que vous appartenez à la meilleure catégorie d'individus qui soit. C'est pas bien compliqué, il y en a deux : ceux qui vivent dans un territoire super dangereux. Puis, il y a les autres. Autrement dit, si t'es burné, tu te ramènes, sinon tu la boucles et laisse les grands discuter. Capisce ?
Tout ce grandiose numéro d'exclamation douloureuse poussée à l'extrême, résulta simplement. L'autodestruction eut raison de l'elfe malfaisant, le poignard céans enfoncé dans son thorax affreusement supplicié. La frêle créature fut répandue sur le versant montagneux, face contre terre, l'apôtre de l'effroi épousa la froide étreinte. Frileuse à l'idée qu'une mauvaise surprise n'émane de l'entreprise suicidaire, la balafrée entama une prudente marche vers le dernier des macchabées, en position défensive, la hache prête à fondre sur la proie renversée.
Les Rocheuses trémulèrent, pénétrées d'intenses secousses déracinant pléthore d'abiétacées, des éboulis rocheux broyaient le champ de bataille.
La descente enneigée, figée en plein vol, ses délicats flocons ne se soustrayaient aucunement à l'ordre d'arrêt.
L'enveloppe d'Ivasaar Urira se redressa, mouvante dans la mort, désarticulée. Le poignard et cristal, Ô combien vicié, chatoyait de mille nuances au cœur du buste massacré.
La descente enneigée, figée en plein vol, ses délicats flocons ne se soustrayaient aucunement à l'ordre d'arrêt.
L'enveloppe d'Ivasaar Urira se redressa, mouvante dans la mort, désarticulée. Le poignard et cristal, Ô combien vicié, chatoyait de mille nuances au cœur du buste massacré.
Murmures ou succédané de borborygmes aux lugubres teneurs, hantaient les parages retournés par l'obscur rituel. Des voix aux accents fantomatiques de se répandre en lamentations çà et là, désormais, les âmes des cent défunts furent soumises au bon vouloir du cristal, et dans le chaos généralisé, l'artefact de malfaisance aspira les esprits erratiques. Ultime condamnation pour la troupe, car pareille réalisation consommera définitivement les âmes damnées. Au trépas matériel, assistait-on au trépas spirituel de la horde criminelle. Urzupha fut dans l'incapacité totale de se ruer sur l'elfe, puisque gravas, cadavres envolés et tremblements de terre ininterrompue perturbaient celle qui voulait absolument en finir. Un vacarme saisissant au cœur redessinait une portion non-négligeable de la région, l'on était en droit de se demander si l'odieux Edrir, abrité dans sa forteresse, ne fut pas atteint par le présent fléau ravageur. Pour surmonter cette épreuve et dépasser la confusion, la femme se cramponna à l'arme qu'elle traînait depuis toujours, partiellement plongée dans le sol fissuré. Concernant Nargulg, monsieur valdingua avec les dépouilles à l'instar d'un sac de patates, jusqu'à ce que le séisme le balançât contre un énorme rocher indélogeable. Miracle, l'estropié d'orc put s'y accrocher et de là, observer le prodige nécromant triompher de la mort. En effet, tout ce bordel dut mener à cette sinistre conclusion.
Oubliée, la partie de jambes en l'air de la veille, en sus de ça, l'affrontement contre la wyverne était bien peu de chose en comparaison de ce panorama fantasmagorique, jonglant tantôt avec l'indicible horreur, tantôt avec l'émerveillement sublimé par la frénésie hivernale. D'affreux grincements métalliques survinrent de la dague sacrificielle, authentique moissonneuse d'âmes liquidées à la chaîne. Enfin, un opaque cocon enténébré engouffra Ivasaar, emportant le défunt fils de la désolation sous les nuages dispersés sur ordre de la Providence. L'insondable coquille de l'elfe changea du tout au tout, rivalisant d'éclat avec le Soleil. Fantastique ! Le séraphin de la déchéance retrouva une digne place dans l'azur frigorifique, coincé entre les murs d'un cocon d'ivoire étincelant. Au terme de la spectaculaire démonstration, la mystérieuse enveloppe résurrectrice vola en éclats dans des volutes immaculées, laissant Nargulg et Urzupha contempler à loisir le grand retour de l'elfe transfiguré.
La magnificence d'Urira, dernier de sa généalogie, fut totalement restaurée. L'être aux joues creuses, aux yeux pollués par les cernes et au teint blafard, fit place à un homme resplendissant, débordant de vitalité, désormais porteur d'une peau légèrement dorée. Le manchot appartint au passé, son bras ayant repoussé pendant l'opération. Ses guibolles démolies ne furent plus qu'un vague souvenir, admirez ! Ivasaar Urira ! Splendeur elfique à la toison d'ocre balayée par le vent, purifié de toute blessure ou cicatrices. Louangez sa venue, car voici que l'apôtre de l'effroi revêtit le corps de sa première incarnation, parfaite et sublime à tout point de vue. Une paire de bottes surmontées de jambières argentées, ainsi qu'un pagne charbonneux, ornementaient la quasi-nudité du sire, et c'est tout. Un corps de rêve, garnit d'une musculature symétrique et quelque peu travaillée, descendit paisiblement du ciel, sous la houlette du grand soleil. Impossible. L'on croyait comprendre que les divins eurent choisi leur champion, tant le manteau neigeux n'osa jamais alourdir le cuir revigoré d'Ivasaar.
Terminés les cristaux, le poignard improvisé, tous ces outils subirent la désagrégation, en parachèvement de l'exploit de l'artisan-malfaiteur. Ensuite, comme pour faire comprendre aux survivants qu'il fut toujours le même, l'adonis étouffa l'atmosphère tel qu'il sut si bien le faire, un effroyable cri strident d'assaillir les créatures de ce bas-monde qu'il daigna approcher, suspendu à moins d'un mètre du sol. Séparée de quelques mètres, Urzupha dévisagea le blondin au visage sculpté sans défaut, sertit d'iris émeraude.
- TWAAH ! C'est quoi ton problème ?! Tu crèves ou tu crèves pas ?! Si je descends des types c'est pas pour les voir bouger juste après ! Fais chier, viens ici que j'te bute enculé !
Beugla-t'elle avec fougue, elle pouvait se le permettre depuis que le séisme est passé de mode. Victime de l'euphorie, Ivasaar extériorisa d'emblée le torrent de bonheur qui s'était emparé de lui.
- ENFIN ! Après toutes ces années de dur labeur !! J'ai pu récupérer mon corps, je suis immortel ! BWAHAHAHAHAHaaaaaaaa !
Expulsant moult rires diaboliques, le nécromant paru appartenir à un autre monde. Celui d'entités supérieures, n'ayant que faire de répondre aux sollicitations d'une orc débile. Des singes, il ne considérait pas autrement Nargulg, Dante et Urzupha. L'arrogance suintait d'Ivasaar, comme l'eau d'une éponge.
- C'est faux, je t'ai vu mourir ! T'étais là, en train de crier comme un cochon, par terre et tout...
Moqueur, il tira la langue pendant qu'elle résuma le récit de sa splendide résurrection, chose incompréhensible pour madame et objet de railleries diverses et variées, articulées par le sieur Urira. Si d'apparence, il changea du tout au tout, intérieurement rien ne bougea d'un iota, évidemment, ce serait moins drôle sinon. Aussitôt Urzupha accéléra le pas, que d'un simple échange de regards, l'orc dut endurer la pétrification pour sanction. Excellent ! Le magicien avait les mains libres pour torturer Nargulg, éternel coincé sur sa caillasse de merde. Ce mâle-là, vulnérable depuis trop longtemps, dut remercier la régénération de le soutenir, cependant, cette fois, il n'y eut plus personne pour le défendre. Dante était en train de roupiller, je ne sais pas trop où, Urzupha n'était qu'une statue dégueulasse, à Nargulg d'en prendre plein la tête, j'ai envie de vous dire. Oui parce que, retenez bien ceci : Ivasaar était quelqu'un d'assez cultivé, pour savoir combien les orcs furent sensibles aux dégâts psychiques. Hahaha. Tu vois où je veux en venir, ou pas ? L'elfe allait dégainer l'attaque mentale, pourrir le cerveau de mon orc, le déposséder de son identité et le transformer en légume.
En préambule, il se tint à cinq mètres de Nargulg, non pas qu'il craignait l'ire du borgne tout de vert, seulement, il était capable de ravager l'esprit des gens à distance, autant en profiter.
Reste à savoir, si Dante interviendra pour sauver les deux autres. Sinon ? Hé bien, ami lecteur, j'ai une tonne de méchants en réserve, je n'aurai qu'à repasser par la case "présentation".
Invité
Invité
Dévotion
Dévotion
Bien. Le constat est donc sans appel : c'est la merde pour les protagonistes de cette histoire. Ici point de complot politique, de romance ou de "surprenante" rencontre au coin d'une rue passante au gré du hasard. Point de belle journée ensoleillée car ce trio-là n'a le droit qu'au froid mordant de l'hiver qui approche et à une météo particulièrement déchaînée à croire que le ciel leur tombe sur la tête. De sang et de sueur est leur linceul, la fatigue d'un intense combat à mort qui pèse à chaque instant sur leurs solides épaules. Le massacre comme seul exutoire, la mort comme seule échappatoire. La leur et celle de leurs ennemis car il n'y a tout simplement pas d'autre solution. Dante s'est bien débattu, combattant comme dix hommes avec la rage d'une bête sauvage, ignorant les cris de douleurs silencieux de son corps mutilé et de ses muscles déchirés. Oh la Mort n'a jamais été très loin de Dante, constamment présente dans son sillage car cet Oni a arrêté de compter ses victimes depuis bien longtemps. Quelques dizaines d'âmes fauchées par sa lame noire viennent se rajouter à son compteur en cette journée macabre. Le ciel est teinté d'un rouge écarlate, reflet du sol rocheux complètement maculé de la sainte vitalité qui s'échappent des plaies béantes et des membres découpés des cadavres que piétinent les derniers survivants.
Dante va malheureusement rater, malgré lui, quelques scènes très intéressantes. Il ne verra pas la suite de la folie meurtrière d'Urzupha ou la déchéance de son frère d'arme, réduit à la quasi-impuissance et l'incapacité de représenter une véritable menace pour les derniers chiens de garde du vil Ivasaar. Les affrontements ont été difficiles pour tout le monde et les deux bourreaux des Dieux accusent clairement le coup, faute à leurs récentes mésaventures au sein des Rôcheuses pour sûr. Ils ont passé des jours à traverser les montagnes les plus inhospitalières du continent et bien sûr, comment oublier qu'ils ont combattu et vaincu une Wyverne en chair et en écaille. Une vraie monstruosité de la nature et un affrontement qui restera à jamais gravé dans leurs mémoires à défaut d'être gravé dans l'histoire. Pour finir, il est bon de rappeler qu'Urzupha avant d'être une alliée de poids, a essayé de tuer les deux protagonistes pendant un moment de faiblesse. Bref, pour toutes ses raisons, les deux colosses s'en retrouvent clairement affaiblis et c'était très téméraire de leur part que de se lancer dans cette nouvelle expédition sans prendre le temps de panser leurs blessures correctement. La divine régénération est une aide conséquente mais elle ne fait pas des miracles et rien ne vaut un vrai sommeil réparateur, ce qu'ils n'ont pas vraiment eu depuis le début de cette aventure.
Un simple moment d'inattention, esprit égaré et bien trop altruiste tant qu'il a baissé sa garde pendant une seconde. Une seule à peine mais largement suffisante pour qu'il en subisse les conséquences immédiates. Un choc d'une violence inouïe se résultant par un vol plané de compétition et parfaitement exécuté par l'Oni. Ses cornes lui offrent un effet d'aérodynamisme exceptionnel pendant qu'il traverse les cieux comme un carreau d'arbalète. Qu'on se le dise, un rocher de cette envergure lancée à pleine vitesse ça ne laisse pas indemne même sur quelqu'un d'aussi solide physiquement que Dante. Si encore il avait vu le coup venir, il aurait pu se préparer, se protéger un minimum. Bref, n'importe quoi mais tout sauf se le prendre dans la gueule en gros. La chute, bien que très impressionnante, n'est même pas si impactante que ça. Dante s'écrase dans le sol au milieu des cadavres mais la lumière s'est éteinte bien avant et il n'est donc plus d'aucune aide pour le duo d'orc meurtrier face aux derniers remparts de l'elfe maléfique. Le combat de Dante n'est pas tout à fait terminé et pendant qu'Urzupha faisait encore tâter de sa hache et que Nargulg se fit de plus en plus proche avec la Mort, plus qu'il ne l'a sûrement jamais été, l'Oni semble enfin apercevoir le bout du tunnel lugubre et interminable qu'il emprunte à présent.
Alors qu'il touche cette étincelante lumière du bout des doigts, elle semble réagir à la présence de Dante en l'éblouissant soudainement dans un flash aveuglant. En rouvrant les yeux, il constate que les ténèbres ont disparu et qu'il est dorénavant en plein milieu d'un vaste espace écarlate et complètement vide. Rien si ce n'est le néant, rien du tout ou presque. Il se rend compte qu'il ne respire plus et qu'il n'en a tout simplement pas besoin. Il met quelques secondes mais il finit par reconnaitre cet endroit. Il l'a déjà vu par le passé, la toute première fois qu'il a posé sa main sur le pommeau de son épée au fin fond d'un tombeau maudit. Le genre d'endroit où absolument tout est fait pour te tuer et te dissuader d'aller plus loin. Quelques trolls, des pièges évidemment, une petite armée de morts-vivants... Rien d'insurmontable pour un Oni qui cogne fort.
« Yo, gamin. Ça fait un bail. »
Cette voix qu'il a l'habitude d'entendre au quotidien est cette fois, beaucoup plus distincte mais toujours aussi désagréable. Dante pivote sur ses talons et se retourne pour chercher du regard l'origine de cette voix rauque et sinistre. Dans son dos se trouvait une ombre gigantesque et menaçante prenant une bonne partie de son champ de vision. C'était tout simplement Kar'ath ou en tout cas la forme qu'il utilise pour apparaître sous ses yeux.
« Je suis mort ? »
« On peut dire ça. Tu t'es ramolli, pendant la guerre t'en aurais fait qu'une bouchée de ces types là. Mais t'es un tenace et ça c'est quelque chose que je respecte, l'ami. C'est pour ça que je vais te faire une proposition que tu pourras pas refu...- »
« Non. »
« Comment ça "non" ? »
« Va te faire foutre, en gros. »
Le rire gras de Kar'ath se met à résonner dans l'étrange prison spirituelle puis d'un coup, l'ombre se met à se déplacer rapidement autour de l'Oni. D'abord gigantesque puis plus petite la seconde suivante.
« Je te connais. Tu t'inquiètes trop pour les autres. Pour tes compagnons de route. Tu as toujours été comme ça et c'est ta plus grande faiblesse. Les gens meurent constamment autour de toi, c'est pour ça que tu vivais isolé de la société avant la guerre. Puis quelque chose a changé. Seagan peut-être ? Non, c'était bien avant. Toi et moi on est pas si différent, tu sais. On est des tueurs, on sait faire que ça mais qu'est-ce qu'on le fait bien. »
« On a rien en commun. »
« On a plus que tu ne veux bien l'admettre mais tu t'en rendras compte, tôt ou tard. Tes collègues sont dans de beaux draps là dehors, ils vont y passer si tu fais rien. Alors, tu veux toujours pas m'écouter ? »
« Hmph. Je te laisserai pas me posséder. »
« Héhé. Pour faire le sale boulot à ta place ? Quelle idée. Je peux régénérer ton corps et te sauver la vie. En échange, je n'ai que deux petites et malheureuses conditions. C'est tout. »
Ça c'est surprenant. Dante plisse les yeux parce qu'il sait déjà qu'il y a anguille sous roche, Kar'ath ne proposerait jamais son aide sans une bonne contrepartie. Un large sourire se dessine sur le visage de l'ombre malfaisante, l'absence de commentaire de la part de Dante laisse évidemment deviner qu'il n'est pas tout à fait indifférent à la proposition du Démon et Kar'ath en profite allègrement.
« Premièrement, un jour quand je l'aurais décidé, tu me céderas le contrôle de ton corps pendant une minute. Une seule petite minute. Deuxièmement, lorsque tu auras accepté, tu oublieras tout de notre petit arrangement. »
« Qu'est-ce que t'as derrière la tête ? Tu veux simplement faire un massacre en te faisant passer pour moi. »
L'ombre se met à ricaner en s'enroulant autour du corps de l'Oni, s'approchant de son visage l'air moqueur. La vérité c'est qu'une minute est amplement suffisante pour qu'il cause des dégâts monstrueux autour de lui. Ce n'est pas pour rien qu'il est enfermé là où il ne peut plus faire de mal à personne.
« Alors rajoutons comme condition que je n'aurai pas le droit de tuer pendant cette minute. Ça te va ? Tu n'as pas besoin de me croire. C'est un accord, c'est un pacte de sang. Tu sais déjà comment ça fonctionne. »
En voilà un comportement bien curieux. Rien n'est jamais simple avec Kar'ath, il le sait parfaitement et pourtant il ne peut pas s'empêcher de réfléchir sérieusement à cette soudaine et étonnante proposition. Un accord qui ne peut pas être défait, ni par lui, ni par Kar'ath. En fait, c'est même trop beau pour être vrai. Il y a clairement quelque chose qui cloche et Kar'ath a évidemment une idée derrière la tête mais difficile de savoir quoi pour le moment.
« Fais vite... Ça chauffe là-haut. »
« J'accepte. »
Avec un pincement au cœur. Deux mots qu'il regrette presque instantanément en voyant le sourire carnassier qui apparaît sur le visage de l'odieux Kar'ath. C'est trop tard pour faire machine arrière d'autant qu'il n'a pas conscience de la situation catastrophique dans laquelle se trouvent Nargulg et Urzupha. Ils ont besoin d'un miracle pour s'en sortir. Ou d'un pacte avec le diable. Pour ce qui est des conséquences de cet accord... On verra plus tard. Gardons encore un peu la surprise. Pour le moment, l'ombre du Démon se fait bien plus grande encore que précédemment et vient submerger le colosse à la peau malade comme une vague qui emporte tout sur son passage.
Le réveil est brutal comme après une noyade, inspirant une grande bouffée d'air littéralement vitale pour ses poumons qui ont, pendant un temps, cessé de fonctionner. Dante reprend ses esprits, constatant par miracle qu'il est encore en vie après ce terrible choc qui aurait dû lui être fatal. C'est incompréhensible et plus choquant encore, la majorité de ses plaies et blessures se sont refermées. Il est comme neuf, en apparence seulement. Kar'ath a visiblement quelques compétences de soin et/ou de régénération mais les douleurs principalement musculaires sont toujours bien présentes. Concrètement, les saignements se sont arrêtés et sa vie n'est plus en danger. Pour le moment. Bien sûr, il n'y a que Dante qui est incapable d'expliquer ce qu'il vient de se passer. Il n'a absolument aucun souvenir de son entrevue avec Kar'ath, conformément à leur accord. Et alors que Dante peut enfin redresser le buste au milieu des cadavres qui recouvrent le sol ensanglanté autour de lui, la situation a bien changé. Combien de temps est-il resté inconscient ? Quelques secondes, quelques minutes peut-être. Il a raté la magistrale et très théâtrale apparition d'Ivasaar Urira, devenu divinité parmi les mortels. Il en a tous les atouts en commençant par la beauté onirique à la peau taillée de pierres précieuses scintillantes. La question la plus importante étant : qu'est-ce qu'il fout presque à poil cet enfoiré ? Une fausse divinité perverse, narcissique et exhibitionniste. Voilà ce qu'est Ivasaar aux yeux d'un guerrier comme Dante.
Pourtant, il n'a de différent que son apparence car sa présence est toujours aussi étouffante, suintant l'effroi dans sa forme la plus pure et la plus repoussante. Même Dante, aussi brave et audacieux soit-il, n'y est pas totalement insensible. Cet ennemi là est d'un tout autre calibre et comme à chaque fois que Dante croise un adversaire à sa hauteur, il s'en trouve encore plus enthousiaste à l'idée de mener un autre combat à mort. Il vit littéralement pour ces moments-là, pour le sentiment grisant que sa vie peut lui échapper à la moindre erreur. Elle a failli l'abandonner une fois aujourd'hui, disons qu'il a eu le droit à une seconde chance et elle ne se reproduira pas de si tôt. Il a intérêt à en profiter. Dante émerge de son songe quelques instants avant qu'Urzupha ne soit pétrifié par l'Elfe malfaisant. Et Nargulg... Merde alors. Il y en a un qui a sacrément pris cher, cet affrontement va laisser des séquelles profondes à l'Orc meurtrier, serviteur des vrais Divins de ce monde. Cette simple vision enrage l'Oni pour la simple et bonne raison qu'il constate que son match retour avec Nargulg n'aura décidément pas la même saveur maintenant que l'Orc est un estropié. Enfin, faut-il encore qu'il survive parce qu'Ivasaar s'est habilement infiltré dans l'esprit de l'Orc impuissant.
Le bras gauche de l'Oni, malade de par son état et criant silencieusement de douleur malgré les réparations miraculeuses de Kar'ath, se saisit du pommeau de son arme pour venir se relever en s'appuyant sur sa lame noire. Ses muscles sont encore engourdis par le choc et contrairement au magnifique Ivasaar qui est au sommet de son art, Dante lui a plutôt l'air d'un déchet recouvert d'un sang qui ne lui appartient même pas. Il prend une seconde, juste le temps de reprendre son souffle mais la présence de Dante n'échappe pas à Ivasaar qui cesse sa séance de torture pour tourner toute son attention sur l'Oni encore debout. Nargulg n'est de toute évidence plus une grande menace et l'Elfe semble particulièrement surpris de voir que le cornu a survécu à son rocher dévastateur.
« Comment es-tu encore en vie ? C'est impossible ! »
C'est dingue, à croire que tout le monde se pose la même putain de question ?
« Fais pas chier avec tes questions et va crever un coup. »
Toujours aussi fin le Dante, d'une éloquence sans pareille. Vraiment la grande classe. Les conséquences de ses provocations ne se feront pas attendre alors que le sol se met à nouveau à trembler. Quoi encore ? Ivasaar évidemment et celui-ci n'est pas content. Son égo a été touché en plein cœur alors qu'il pensait en avoir fini avec le trio exterminateur. Le sol tremble et se fissure sous sa sinistre volonté. Ce sont littéralement des blocs de roche qui se soulèvent et qui viennent planer autour de l'apôtre elfique. Un peu dans le même style que celui qu'il a pris dans la tronche un peu plus tôt. Sans plus de cérémonie, le combat final peut enfin débuter et Ivasaar est à l'initiative car c'est un premier rocher qui traverse les cieux en direction de Dante. La différence cette fois, c'est qu'il voit le coup venir et que Dante peut de nouveau se déplacer plus ou moins librement. L'Oni démarre et se met à courir sur le champ de bataille, piétinant l'arène morbide et les cadavres sous ses pieds, il est assez rapide pour éviter un rocher de justesse tout en essayant de réduire la distance qui le sépare du mage noir.
Ivasaar est terriblement puissant mais l'un comme l'autre ont bien conscience qu'au corps-à-corps, Dante est un monstre dont la fureur ne saurait être canalisée. Alors pendant que Dante se rapproche dangereusement vite, Ivasaar tente de l'abattre avant qu'il ne soit trop tard. Vu la taille de ce qu'il lui balance dans la gueule, il suffirait qu'un seul projectile touche sa cible mais Dante est un peu plus vif et réactif que lors des affrontements précédents. Dans l'incapacité de toucher le diviniste, l'Elfe change soudainement de stratégie. Les rochers qu'il soulève explose en morceaux plus petits et par conséquent plus rapides. Dante fait les gros yeux puisque le nombre de projectile à éviter vient d'augmenter d'un seul coup. Vraiment ces mages à la con, quelle saleté. C'est une pluie dévastatrice qui s'abat sur Dante qui, à défaut de pouvoir se mettre à couvert en plein milieu d'une crevasse vide, vient placer son épée en opposition au-dessus de sa tête pour limiter les dégâts avec, qu'on se le dise, une réussite toute relative. On va pas tergiverser très longtemps, il en prend plein la gueule et les projectiles viennent durement entâmer sa peau dans des giclées de sang. Néanmoins, il ne faiblit pas et ne ralentit pas un seul instant.
Il a une opportunité à saisir et il compte bien aller au bout de son effort. Il accepte d'expirer son dernier souffle s'il peut emporter la tête d'Ivasaar alors il arme sa frappe, le bras légèrement plié et la lame pointant dans son dos avant de bondir en avant pour tenter de faucher le cou de l'apôtre d'un seul coup sec. Un rocher qui tournoyait autour d'Ivasaar vient se mettre en opposition. La lame n'a aucun mal à traverser le projectile mais celui-ci dévie légèrement la trajectoire de sa lame qui se soulève assez pour permettre à Ivasaar de se baisser au dernier moment pour éviter la mort de justesse. Lui qui voulait s'emparer de sa tête, devra se contenter d'une oreille pointue qui s'envole dans les airs. Un râle d'agonie de la part du mage noir et un autre échec pour Dante bien qu'il ait réussi à acculer Ivasaar littéralement dos au mur de la crevasse. Celui-ci réagit immédiatement et en maître absolu de la télékinésie, le sol s'affaisse sous ses pieds et la totalité de ses projectiles viennent s'abattre sur le guerrier pour former une prison de pierre autour de lui. Ivasaar cherche évidemment à l'immobiliser car bien trop proche à présent. Il aurait certainement pu le tuer mais dans sa grande arrogance, Ivasaar le revanchard semble avoir décidé de prendre son temps pour faire souffrir Dante comme il l'avait entrepris avec Nargulg. Avant de se retrouver complètement impuissant, l'Oni dans une tentative désespérée tente à nouveau sa botte secrète. Balançant la lame noire comme une lance en espérant atteindre sa cible cette fois. De toute évidence, ce n'est pas son jour de chance et sa lame se plante dans la roche tout près de la tête d'Ivasaar sans réussir à lui prendre la vie.
« Chien ! Tu as encore raté, c'est fini pour toi ! »
De sa prison de pierre, il n'y a que le bras gauche de Dante qui dépasse. Celui qu'il a utilisé pour jeter son épée. C'est à se demander s'il est toujours en vie à l'intérieur car la pression doit être insoutenable en étant écrasé de la sorte. L'Elfe téméraire et victorieux s'approche pour jubiler d'une victoire durement acquise. Cela lui a coûté une centaine d'hommes tout de même, des vies sacrifiables certes mais tout de même. Pour venir à bout de "seulement" trois barbares, particulièrement fort ceux-là, le bilan est tout de même sévère. Il y a quelques secondes de flottement, une oreille manquante qui pisse le sang sur le côté de la tête du presque immortelle. Dante a légèrement amoché sa silhouette parfaite et honnêtement, il n'en est pas peu fier même s'il avait espéré un autre résultat. Puis, un rire machiavélique. Celui d'Ivasaar évidemment qui vient retirer une pierre de la prison de Dante pour pouvoir juger lui-même de l'état du dernier des combattants. Le cornu semble inconscient, ayant pris un sacré coup sur la tête puisqu'il a le visage recouvert de sang. Le sien, cette fois.
En réalité, Dante est toujours parfaitement conscient. Ce fut l'erreur d'Ivasaar de baisser sa garde et d'offrir un visuel à Dante sur sa cible. Le bras gauche toujours tendu, il n'a pas besoin de se libérer ou d'être en capacité de se mouvoir. La lame maudite répondra toujours à son appel où qu'il soit et tant qu'il sera capable de respirer. La paume de main bien ouverte, la lame se décroche subitement du mur pour revenir vers Dante sauf qu'il y a un obstacle entre lui et son épée : Ivasaar lui-même. Et autant dire que cette fois, il n'aura pas le réflexe d'échapper à l'inévitable alors que la lame maudite vient brutalement l'empaler dans le dos. Son visage victorieux se tord à présent de douleur, posant les deux genoux au sol alors que le souffle lui manque soudainement. Incapable de maintenir sa magie, la prison se brise dans un grand vacarme assourdissant en libérant un Dante mal-en-point pour ne pas changer de ses habitudes.
« Je... ne peux pas ... ! Mourir ! Je suis... Ivaasar ... Urira ! »
L'Elfe finit par s'écrouler sur le côté, expirant son dernier soupir dans la crasse et en se noyant dans son propre sang. Une fin parfaitement adaptée pour un être aussi malfaisant qui n'en méritait pas moins. Dante bien que toujours vivant, n'est pas franchement au meilleur de sa forme là tout de suite et malgré l'aide inespérée de Kar'ath, son corps se retrouve à nouveau meutri de toute part. Sa respiration est lourde et c'est tout son corps qui hurle de douleur. Il ne risque pas d'oublier cette aventure de si tôt. Il se penche en avant pour récupérer sa lame du corps sans vie d'Ivasaar qui a sûrement été l'adversaire le plus redoutable de sa vie, si on met Seagan de côté. Bordel, la mort n'est vraiment pas passé loin entre hier et aujourd'hui. Avant d'oublier, l'Oni lève sa lame au-dessus de lui et vient l'abattre sur le cou d'Ivasaar pour le décapiter d'un geste sec. Un trophée bien mérité. Il n'a pas eu sa tête de Wyverne mais il peut au moins se contenter de la tête de cet enfoiré d'Ivasaar. C'est moins bien, mais il fera avec. Ensuite, il lève la tête à la recherche de ses deux compagnons de route. Urzupha n'est plus qu'une statue de pierre. Dante n'y connait rien en magie mais ce serait étonnant que ce soit définitif alors elle devrait finir par retrouver son état normal. Pour Nargulg par contre... Cet Orc-là va avoir du mal à s'en remettre.
Il s'approche de son frère d'arme pour juger de plus près de son état déplorable. Il lui tendra la main s'il est capable de se relever car les trois tueurs ont intérêt à déguerpir avant que les renforts n'arrivent. Ils ne survivront pas à un prochain affrontement et de toute évidence, ils ne sont pas prêts pour assiéger la forteresse d'Edrir.
« Je vais devoir te porter ? »
CENDRES
Dante va malheureusement rater, malgré lui, quelques scènes très intéressantes. Il ne verra pas la suite de la folie meurtrière d'Urzupha ou la déchéance de son frère d'arme, réduit à la quasi-impuissance et l'incapacité de représenter une véritable menace pour les derniers chiens de garde du vil Ivasaar. Les affrontements ont été difficiles pour tout le monde et les deux bourreaux des Dieux accusent clairement le coup, faute à leurs récentes mésaventures au sein des Rôcheuses pour sûr. Ils ont passé des jours à traverser les montagnes les plus inhospitalières du continent et bien sûr, comment oublier qu'ils ont combattu et vaincu une Wyverne en chair et en écaille. Une vraie monstruosité de la nature et un affrontement qui restera à jamais gravé dans leurs mémoires à défaut d'être gravé dans l'histoire. Pour finir, il est bon de rappeler qu'Urzupha avant d'être une alliée de poids, a essayé de tuer les deux protagonistes pendant un moment de faiblesse. Bref, pour toutes ses raisons, les deux colosses s'en retrouvent clairement affaiblis et c'était très téméraire de leur part que de se lancer dans cette nouvelle expédition sans prendre le temps de panser leurs blessures correctement. La divine régénération est une aide conséquente mais elle ne fait pas des miracles et rien ne vaut un vrai sommeil réparateur, ce qu'ils n'ont pas vraiment eu depuis le début de cette aventure.
Un simple moment d'inattention, esprit égaré et bien trop altruiste tant qu'il a baissé sa garde pendant une seconde. Une seule à peine mais largement suffisante pour qu'il en subisse les conséquences immédiates. Un choc d'une violence inouïe se résultant par un vol plané de compétition et parfaitement exécuté par l'Oni. Ses cornes lui offrent un effet d'aérodynamisme exceptionnel pendant qu'il traverse les cieux comme un carreau d'arbalète. Qu'on se le dise, un rocher de cette envergure lancée à pleine vitesse ça ne laisse pas indemne même sur quelqu'un d'aussi solide physiquement que Dante. Si encore il avait vu le coup venir, il aurait pu se préparer, se protéger un minimum. Bref, n'importe quoi mais tout sauf se le prendre dans la gueule en gros. La chute, bien que très impressionnante, n'est même pas si impactante que ça. Dante s'écrase dans le sol au milieu des cadavres mais la lumière s'est éteinte bien avant et il n'est donc plus d'aucune aide pour le duo d'orc meurtrier face aux derniers remparts de l'elfe maléfique. Le combat de Dante n'est pas tout à fait terminé et pendant qu'Urzupha faisait encore tâter de sa hache et que Nargulg se fit de plus en plus proche avec la Mort, plus qu'il ne l'a sûrement jamais été, l'Oni semble enfin apercevoir le bout du tunnel lugubre et interminable qu'il emprunte à présent.
Alors qu'il touche cette étincelante lumière du bout des doigts, elle semble réagir à la présence de Dante en l'éblouissant soudainement dans un flash aveuglant. En rouvrant les yeux, il constate que les ténèbres ont disparu et qu'il est dorénavant en plein milieu d'un vaste espace écarlate et complètement vide. Rien si ce n'est le néant, rien du tout ou presque. Il se rend compte qu'il ne respire plus et qu'il n'en a tout simplement pas besoin. Il met quelques secondes mais il finit par reconnaitre cet endroit. Il l'a déjà vu par le passé, la toute première fois qu'il a posé sa main sur le pommeau de son épée au fin fond d'un tombeau maudit. Le genre d'endroit où absolument tout est fait pour te tuer et te dissuader d'aller plus loin. Quelques trolls, des pièges évidemment, une petite armée de morts-vivants... Rien d'insurmontable pour un Oni qui cogne fort.
« Yo, gamin. Ça fait un bail. »
Cette voix qu'il a l'habitude d'entendre au quotidien est cette fois, beaucoup plus distincte mais toujours aussi désagréable. Dante pivote sur ses talons et se retourne pour chercher du regard l'origine de cette voix rauque et sinistre. Dans son dos se trouvait une ombre gigantesque et menaçante prenant une bonne partie de son champ de vision. C'était tout simplement Kar'ath ou en tout cas la forme qu'il utilise pour apparaître sous ses yeux.
« Je suis mort ? »
« On peut dire ça. Tu t'es ramolli, pendant la guerre t'en aurais fait qu'une bouchée de ces types là. Mais t'es un tenace et ça c'est quelque chose que je respecte, l'ami. C'est pour ça que je vais te faire une proposition que tu pourras pas refu...- »
« Non. »
« Comment ça "non" ? »
« Va te faire foutre, en gros. »
Le rire gras de Kar'ath se met à résonner dans l'étrange prison spirituelle puis d'un coup, l'ombre se met à se déplacer rapidement autour de l'Oni. D'abord gigantesque puis plus petite la seconde suivante.
« Je te connais. Tu t'inquiètes trop pour les autres. Pour tes compagnons de route. Tu as toujours été comme ça et c'est ta plus grande faiblesse. Les gens meurent constamment autour de toi, c'est pour ça que tu vivais isolé de la société avant la guerre. Puis quelque chose a changé. Seagan peut-être ? Non, c'était bien avant. Toi et moi on est pas si différent, tu sais. On est des tueurs, on sait faire que ça mais qu'est-ce qu'on le fait bien. »
« On a rien en commun. »
« On a plus que tu ne veux bien l'admettre mais tu t'en rendras compte, tôt ou tard. Tes collègues sont dans de beaux draps là dehors, ils vont y passer si tu fais rien. Alors, tu veux toujours pas m'écouter ? »
« Hmph. Je te laisserai pas me posséder. »
« Héhé. Pour faire le sale boulot à ta place ? Quelle idée. Je peux régénérer ton corps et te sauver la vie. En échange, je n'ai que deux petites et malheureuses conditions. C'est tout. »
Ça c'est surprenant. Dante plisse les yeux parce qu'il sait déjà qu'il y a anguille sous roche, Kar'ath ne proposerait jamais son aide sans une bonne contrepartie. Un large sourire se dessine sur le visage de l'ombre malfaisante, l'absence de commentaire de la part de Dante laisse évidemment deviner qu'il n'est pas tout à fait indifférent à la proposition du Démon et Kar'ath en profite allègrement.
« Premièrement, un jour quand je l'aurais décidé, tu me céderas le contrôle de ton corps pendant une minute. Une seule petite minute. Deuxièmement, lorsque tu auras accepté, tu oublieras tout de notre petit arrangement. »
« Qu'est-ce que t'as derrière la tête ? Tu veux simplement faire un massacre en te faisant passer pour moi. »
L'ombre se met à ricaner en s'enroulant autour du corps de l'Oni, s'approchant de son visage l'air moqueur. La vérité c'est qu'une minute est amplement suffisante pour qu'il cause des dégâts monstrueux autour de lui. Ce n'est pas pour rien qu'il est enfermé là où il ne peut plus faire de mal à personne.
« Alors rajoutons comme condition que je n'aurai pas le droit de tuer pendant cette minute. Ça te va ? Tu n'as pas besoin de me croire. C'est un accord, c'est un pacte de sang. Tu sais déjà comment ça fonctionne. »
En voilà un comportement bien curieux. Rien n'est jamais simple avec Kar'ath, il le sait parfaitement et pourtant il ne peut pas s'empêcher de réfléchir sérieusement à cette soudaine et étonnante proposition. Un accord qui ne peut pas être défait, ni par lui, ni par Kar'ath. En fait, c'est même trop beau pour être vrai. Il y a clairement quelque chose qui cloche et Kar'ath a évidemment une idée derrière la tête mais difficile de savoir quoi pour le moment.
« Fais vite... Ça chauffe là-haut. »
« J'accepte. »
Avec un pincement au cœur. Deux mots qu'il regrette presque instantanément en voyant le sourire carnassier qui apparaît sur le visage de l'odieux Kar'ath. C'est trop tard pour faire machine arrière d'autant qu'il n'a pas conscience de la situation catastrophique dans laquelle se trouvent Nargulg et Urzupha. Ils ont besoin d'un miracle pour s'en sortir. Ou d'un pacte avec le diable. Pour ce qui est des conséquences de cet accord... On verra plus tard. Gardons encore un peu la surprise. Pour le moment, l'ombre du Démon se fait bien plus grande encore que précédemment et vient submerger le colosse à la peau malade comme une vague qui emporte tout sur son passage.
Le réveil est brutal comme après une noyade, inspirant une grande bouffée d'air littéralement vitale pour ses poumons qui ont, pendant un temps, cessé de fonctionner. Dante reprend ses esprits, constatant par miracle qu'il est encore en vie après ce terrible choc qui aurait dû lui être fatal. C'est incompréhensible et plus choquant encore, la majorité de ses plaies et blessures se sont refermées. Il est comme neuf, en apparence seulement. Kar'ath a visiblement quelques compétences de soin et/ou de régénération mais les douleurs principalement musculaires sont toujours bien présentes. Concrètement, les saignements se sont arrêtés et sa vie n'est plus en danger. Pour le moment. Bien sûr, il n'y a que Dante qui est incapable d'expliquer ce qu'il vient de se passer. Il n'a absolument aucun souvenir de son entrevue avec Kar'ath, conformément à leur accord. Et alors que Dante peut enfin redresser le buste au milieu des cadavres qui recouvrent le sol ensanglanté autour de lui, la situation a bien changé. Combien de temps est-il resté inconscient ? Quelques secondes, quelques minutes peut-être. Il a raté la magistrale et très théâtrale apparition d'Ivasaar Urira, devenu divinité parmi les mortels. Il en a tous les atouts en commençant par la beauté onirique à la peau taillée de pierres précieuses scintillantes. La question la plus importante étant : qu'est-ce qu'il fout presque à poil cet enfoiré ? Une fausse divinité perverse, narcissique et exhibitionniste. Voilà ce qu'est Ivasaar aux yeux d'un guerrier comme Dante.
Pourtant, il n'a de différent que son apparence car sa présence est toujours aussi étouffante, suintant l'effroi dans sa forme la plus pure et la plus repoussante. Même Dante, aussi brave et audacieux soit-il, n'y est pas totalement insensible. Cet ennemi là est d'un tout autre calibre et comme à chaque fois que Dante croise un adversaire à sa hauteur, il s'en trouve encore plus enthousiaste à l'idée de mener un autre combat à mort. Il vit littéralement pour ces moments-là, pour le sentiment grisant que sa vie peut lui échapper à la moindre erreur. Elle a failli l'abandonner une fois aujourd'hui, disons qu'il a eu le droit à une seconde chance et elle ne se reproduira pas de si tôt. Il a intérêt à en profiter. Dante émerge de son songe quelques instants avant qu'Urzupha ne soit pétrifié par l'Elfe malfaisant. Et Nargulg... Merde alors. Il y en a un qui a sacrément pris cher, cet affrontement va laisser des séquelles profondes à l'Orc meurtrier, serviteur des vrais Divins de ce monde. Cette simple vision enrage l'Oni pour la simple et bonne raison qu'il constate que son match retour avec Nargulg n'aura décidément pas la même saveur maintenant que l'Orc est un estropié. Enfin, faut-il encore qu'il survive parce qu'Ivasaar s'est habilement infiltré dans l'esprit de l'Orc impuissant.
Le bras gauche de l'Oni, malade de par son état et criant silencieusement de douleur malgré les réparations miraculeuses de Kar'ath, se saisit du pommeau de son arme pour venir se relever en s'appuyant sur sa lame noire. Ses muscles sont encore engourdis par le choc et contrairement au magnifique Ivasaar qui est au sommet de son art, Dante lui a plutôt l'air d'un déchet recouvert d'un sang qui ne lui appartient même pas. Il prend une seconde, juste le temps de reprendre son souffle mais la présence de Dante n'échappe pas à Ivasaar qui cesse sa séance de torture pour tourner toute son attention sur l'Oni encore debout. Nargulg n'est de toute évidence plus une grande menace et l'Elfe semble particulièrement surpris de voir que le cornu a survécu à son rocher dévastateur.
« Comment es-tu encore en vie ? C'est impossible ! »
C'est dingue, à croire que tout le monde se pose la même putain de question ?
« Fais pas chier avec tes questions et va crever un coup. »
Toujours aussi fin le Dante, d'une éloquence sans pareille. Vraiment la grande classe. Les conséquences de ses provocations ne se feront pas attendre alors que le sol se met à nouveau à trembler. Quoi encore ? Ivasaar évidemment et celui-ci n'est pas content. Son égo a été touché en plein cœur alors qu'il pensait en avoir fini avec le trio exterminateur. Le sol tremble et se fissure sous sa sinistre volonté. Ce sont littéralement des blocs de roche qui se soulèvent et qui viennent planer autour de l'apôtre elfique. Un peu dans le même style que celui qu'il a pris dans la tronche un peu plus tôt. Sans plus de cérémonie, le combat final peut enfin débuter et Ivasaar est à l'initiative car c'est un premier rocher qui traverse les cieux en direction de Dante. La différence cette fois, c'est qu'il voit le coup venir et que Dante peut de nouveau se déplacer plus ou moins librement. L'Oni démarre et se met à courir sur le champ de bataille, piétinant l'arène morbide et les cadavres sous ses pieds, il est assez rapide pour éviter un rocher de justesse tout en essayant de réduire la distance qui le sépare du mage noir.
Ivasaar est terriblement puissant mais l'un comme l'autre ont bien conscience qu'au corps-à-corps, Dante est un monstre dont la fureur ne saurait être canalisée. Alors pendant que Dante se rapproche dangereusement vite, Ivasaar tente de l'abattre avant qu'il ne soit trop tard. Vu la taille de ce qu'il lui balance dans la gueule, il suffirait qu'un seul projectile touche sa cible mais Dante est un peu plus vif et réactif que lors des affrontements précédents. Dans l'incapacité de toucher le diviniste, l'Elfe change soudainement de stratégie. Les rochers qu'il soulève explose en morceaux plus petits et par conséquent plus rapides. Dante fait les gros yeux puisque le nombre de projectile à éviter vient d'augmenter d'un seul coup. Vraiment ces mages à la con, quelle saleté. C'est une pluie dévastatrice qui s'abat sur Dante qui, à défaut de pouvoir se mettre à couvert en plein milieu d'une crevasse vide, vient placer son épée en opposition au-dessus de sa tête pour limiter les dégâts avec, qu'on se le dise, une réussite toute relative. On va pas tergiverser très longtemps, il en prend plein la gueule et les projectiles viennent durement entâmer sa peau dans des giclées de sang. Néanmoins, il ne faiblit pas et ne ralentit pas un seul instant.
Il a une opportunité à saisir et il compte bien aller au bout de son effort. Il accepte d'expirer son dernier souffle s'il peut emporter la tête d'Ivasaar alors il arme sa frappe, le bras légèrement plié et la lame pointant dans son dos avant de bondir en avant pour tenter de faucher le cou de l'apôtre d'un seul coup sec. Un rocher qui tournoyait autour d'Ivasaar vient se mettre en opposition. La lame n'a aucun mal à traverser le projectile mais celui-ci dévie légèrement la trajectoire de sa lame qui se soulève assez pour permettre à Ivasaar de se baisser au dernier moment pour éviter la mort de justesse. Lui qui voulait s'emparer de sa tête, devra se contenter d'une oreille pointue qui s'envole dans les airs. Un râle d'agonie de la part du mage noir et un autre échec pour Dante bien qu'il ait réussi à acculer Ivasaar littéralement dos au mur de la crevasse. Celui-ci réagit immédiatement et en maître absolu de la télékinésie, le sol s'affaisse sous ses pieds et la totalité de ses projectiles viennent s'abattre sur le guerrier pour former une prison de pierre autour de lui. Ivasaar cherche évidemment à l'immobiliser car bien trop proche à présent. Il aurait certainement pu le tuer mais dans sa grande arrogance, Ivasaar le revanchard semble avoir décidé de prendre son temps pour faire souffrir Dante comme il l'avait entrepris avec Nargulg. Avant de se retrouver complètement impuissant, l'Oni dans une tentative désespérée tente à nouveau sa botte secrète. Balançant la lame noire comme une lance en espérant atteindre sa cible cette fois. De toute évidence, ce n'est pas son jour de chance et sa lame se plante dans la roche tout près de la tête d'Ivasaar sans réussir à lui prendre la vie.
« Chien ! Tu as encore raté, c'est fini pour toi ! »
De sa prison de pierre, il n'y a que le bras gauche de Dante qui dépasse. Celui qu'il a utilisé pour jeter son épée. C'est à se demander s'il est toujours en vie à l'intérieur car la pression doit être insoutenable en étant écrasé de la sorte. L'Elfe téméraire et victorieux s'approche pour jubiler d'une victoire durement acquise. Cela lui a coûté une centaine d'hommes tout de même, des vies sacrifiables certes mais tout de même. Pour venir à bout de "seulement" trois barbares, particulièrement fort ceux-là, le bilan est tout de même sévère. Il y a quelques secondes de flottement, une oreille manquante qui pisse le sang sur le côté de la tête du presque immortelle. Dante a légèrement amoché sa silhouette parfaite et honnêtement, il n'en est pas peu fier même s'il avait espéré un autre résultat. Puis, un rire machiavélique. Celui d'Ivasaar évidemment qui vient retirer une pierre de la prison de Dante pour pouvoir juger lui-même de l'état du dernier des combattants. Le cornu semble inconscient, ayant pris un sacré coup sur la tête puisqu'il a le visage recouvert de sang. Le sien, cette fois.
En réalité, Dante est toujours parfaitement conscient. Ce fut l'erreur d'Ivasaar de baisser sa garde et d'offrir un visuel à Dante sur sa cible. Le bras gauche toujours tendu, il n'a pas besoin de se libérer ou d'être en capacité de se mouvoir. La lame maudite répondra toujours à son appel où qu'il soit et tant qu'il sera capable de respirer. La paume de main bien ouverte, la lame se décroche subitement du mur pour revenir vers Dante sauf qu'il y a un obstacle entre lui et son épée : Ivasaar lui-même. Et autant dire que cette fois, il n'aura pas le réflexe d'échapper à l'inévitable alors que la lame maudite vient brutalement l'empaler dans le dos. Son visage victorieux se tord à présent de douleur, posant les deux genoux au sol alors que le souffle lui manque soudainement. Incapable de maintenir sa magie, la prison se brise dans un grand vacarme assourdissant en libérant un Dante mal-en-point pour ne pas changer de ses habitudes.
« Je... ne peux pas ... ! Mourir ! Je suis... Ivaasar ... Urira ! »
L'Elfe finit par s'écrouler sur le côté, expirant son dernier soupir dans la crasse et en se noyant dans son propre sang. Une fin parfaitement adaptée pour un être aussi malfaisant qui n'en méritait pas moins. Dante bien que toujours vivant, n'est pas franchement au meilleur de sa forme là tout de suite et malgré l'aide inespérée de Kar'ath, son corps se retrouve à nouveau meutri de toute part. Sa respiration est lourde et c'est tout son corps qui hurle de douleur. Il ne risque pas d'oublier cette aventure de si tôt. Il se penche en avant pour récupérer sa lame du corps sans vie d'Ivasaar qui a sûrement été l'adversaire le plus redoutable de sa vie, si on met Seagan de côté. Bordel, la mort n'est vraiment pas passé loin entre hier et aujourd'hui. Avant d'oublier, l'Oni lève sa lame au-dessus de lui et vient l'abattre sur le cou d'Ivasaar pour le décapiter d'un geste sec. Un trophée bien mérité. Il n'a pas eu sa tête de Wyverne mais il peut au moins se contenter de la tête de cet enfoiré d'Ivasaar. C'est moins bien, mais il fera avec. Ensuite, il lève la tête à la recherche de ses deux compagnons de route. Urzupha n'est plus qu'une statue de pierre. Dante n'y connait rien en magie mais ce serait étonnant que ce soit définitif alors elle devrait finir par retrouver son état normal. Pour Nargulg par contre... Cet Orc-là va avoir du mal à s'en remettre.
Il s'approche de son frère d'arme pour juger de plus près de son état déplorable. Il lui tendra la main s'il est capable de se relever car les trois tueurs ont intérêt à déguerpir avant que les renforts n'arrivent. Ils ne survivront pas à un prochain affrontement et de toute évidence, ils ne sont pas prêts pour assiéger la forteresse d'Edrir.
« Je vais devoir te porter ? »
CENDRES
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La férocité de l'affrontement continuel, les répercussions de la bataille sur l'organisme, elles condamnaient Nargulg à pâtir plus qu'à résister. Un rocher pour support dorsal, le mâle et criminel sanguinaire, ce meurtrier dont la tête fut mise à prix tant au Reike qu'en République, n'avait absolument plus rien de l'inqualifiable menace, état de fait amplificateur d'un ego excessivement abreuvé d'innombrables tueries. Car le Sekai, ne fut que trop peuplé de faibles qu'aucune patrie n'étaient exemptées de leurs indésirables présences. Cependant, dans cet océan infini d'inférieurs - auxquels l'on enseigna que porter armes et armures en rang serrés octroyait puissance et respectabilité - jaillit occasionnellement des élus caressant la prépotence, Ivasaar Urira fut une de ces incarnations. Grand triomphateur de la mort, l'elfe était l'un des visages de la puissance, tant brute qu'envoûtante, un véritable mur indépassable griffonné de cruauté, un personnage inoubliable sans l'ombre d'un doute. Plus que le caractère mémorable de cette désastreuse rencontre, c'est un étrange rouage psychologique qui fit main-basse sur tout un trait de la personnalité de Nargulg le borgne. Ce géant obscurcit par l'insatiable désir de puissance et de force, une nouvelle hiérarchie plus impitoyable que jamais le clouait plus avant dans ce sectarisme de la sauvagerie, la différence avec hier ? Bien peu de chose, seulement, le tortionnaire Ivasaar Urira devint une norme, une échelle de mesure effroyable, condamnant quiconque n'effleurait pas le potentiel du nuisible elfique, au désintérêt du colosse vétuste. Derrière le mage noir, le spectre d'Edrir Galitheos gangrénait le mental de l'orc à la dérive, puisqu'étant décidé qu'Ivasaar détint une nette supériorité sur nos triples massacreurs, qu'en était-il d'Edrir ? Nul doute que l'elfe n'obéirait point au doigt et à l'œil de son Maître, si celui-ci ne le surpassât en aucune façon.
Ainsi, les Huits, indélogeables, siégèrent au sommet, pour qu'entre eux et le verdâtre estropié ne figuraient qu'une infinitésimalité d'individus outrageusement balèzes, authentiques élites d'un univers étouffé par la multitude de médiocres. C'est cela l'élitisme, un espace restreint et excluant, inhumain donc parfait, injuste donc supérieur ; absurde, par conséquent transcendant.
Cette ixième fulguration douteuse, n'eut plus d'importance, car voici Ivasaar le magnifique, victorieux en toute complétude, conjuguait dans son unicité perfection de corps et monstruosité d'âme, avec en plus, la fidélité aux desseins de son Seigneur et Maître, l'ensemble enrobé d'une passion dévorante pour la fin de toute chose. Certainement, l'innommable cumulait bien des qualités d'essences supérieures, pour ne pas dire... Divine. De discutaillerie, jamais ils n'en échangèrent, aussi laissèrent-ils cela aux tantouzes de la République. L'honorable courtoisie guerrière piétinée depuis l'aube du conflit, Ivasaar et Nargulg, en hérauts de la barbarie, l'abandonnèrent aux sous-hommes du Reike, dégénérés adorateurs d'étoiles.
Le nécromant, soucieux d'infliger tourment et destruction, bénéficia d'une occasion en or, et Nargulg, sa victime, endura l'emprise perverse de l'arrogant sorcier. Prit entre l'épuisement, les meurtrissures et le déferlement brumal, l'orc défait fut soumis au plus abominable de ses pouvoirs, l'attaque mentale. Jouissant d'un savoir-faire hors du commun en la matière, ce que le sieur Urira aimait à désigner comme une scolopendre s'insinua, l'encéphale comme proie, l'imperceptible centipède de mana répandit le venin sans jamais se vautrer dans le superfétatoire, parce que cette sorcellerie-ci, avait bel et bien cela de sublime. Il n'y avait rien, seulement un elfe presque à poil, planant à proximité de sa victime encrassée, pour que ceci fut amplement suffisant. La musculature assaillit de contractures ou de secousses, Nargulg n'était plus qu'un pantin spastique, un joujou fusillé du regard par Ivasaar le sadique. Autre effet second de l'expérience, la douleur, chose totalement novatrice pour cet orc puisque le mille-pattes "réorganisa" partiellement le lobe pariétal. En vérité, tout le système nerveux central fut une aire de jeux que le hideux animal déglingua avec joie, et aux convulsions du faciès de l'estropié, l'elfe ressuscité opposa un sourire carnassier, des ricaneries jalonnaient le malheur du meurtrier phagocyté par la mission corruptrice du funeste vainqueur. Cet épisode monstrueux condamna le fanatique à des grognements douloureux, instantanément bâillonnés par le sombre sortilège, les mugissements du mistral d'émettre pour lui une complainte inintelligible. Parfait. C'était parfait.
Heureusement, ou malheureusement - à vous de me dire - le grand chantier de cette géhenne ne s'éternisa pas. Hé oui ! Dante revint des songes, comme neuf ! Presque comme neuf, d'accord. Néanmoins, cette réapparition fut une aubaine pour mon tueur miraculé. Adieu l'attaque mentale, place à la seule compétence digne d'intérêt ici-bas : la régénération. Bon, plus sérieusement, il n'était pas prêt de gambader innocemment le Nargulg, cependant le risque de finir sa vie en tétraplégique à la cervelle en compote tint désormais du lointain mirage cauchemardesque. Tout le supplice durant, sa perception du temps fut drastiquement chamboulée, toutefois, ce châtiment ne dura pas plus de trente secondes, grâce à l'irruption du coléreux démon des rocheuses. Ouais, c'était à lui que revint de conclure l'affrontement, car d'un côté, nous avions une Urzupha devenue monument rocailleux, chose tout à fait inutile, n'est-ce pas ? Tandis que de l'autre Nargulg dégobilla sang et tripes comme pas possible, une désagréable sensation de grain de maïs éclatant sous sa caboche persistait. Son unique globe oculaire erra dans la confusion, scrutant de temps à autre le conflit opposant sorcier et guerrier, lorsque le germe de l'inquiétude n'épousa pas son être. En effet, son corps étant un vaste complexe dont il prenait toujours grand soin, et mamelle nourricière de sa grande fierté, ce fut toute une culture de la perfection qu'autant de pertes ébranlaient. Dans le tintamarre conflictuel, sa psyché mettait en branle la survivance d'un caractère guerrier trop ancré pour le quitter. Conflit et perte vont de pair, son devoir fut de s'en accommoder. Non. Autre chose naquit sous les décombres de Nargulg le pourrit. Tout à fait ! Perdre l'œil droit et l'avant-bras gauche, non seulement, il y survivrait, mais plus important encore, l'orc les restaurerait. Que ce soit par l'épatante régénération, ou bien depuis des soins prodigués par on ne sait quel fichu mage-rat de bibliothèque, Nargulg les retrouverait, ses putains de membres.
Pour l'heure, Monsieur le Faiblard barbouillé de salissure poireauta, observant un conflit battant son plein, merveilleusement enrichit de flocons de neige, les bourrasques de la tempête hamonisaient l'ondoiement de la futaie. Ivasaar commanda aux rochers, sa volonté faisant office d'autorité, la croûte terrestre céda à ses néfastes revendications. Sorcier démesurément puissant ça oui, et architecte également. Le gars retapa la déco plus de fois qu'on ne l'exigea pour mériter ce titre. Le cornu n'était pas homme à se laisser déborder par les excès d'un quasi-nudiste vaniteux, beau de surcroît, mais enfin, vous savez, être un beau gosse ça n'interdit pas de se faire péter la gueule. La perfection de l'elfe immaculé s'effrita sitôt qu'il perdit une oreille, braillant dans la foulée, quel plaisir de le voir ainsi perdre en éclat, l'elfe hein, pas l'oni.
Soudain, l'instant précis où tout était possible se concrétisa, le point de bascule précurseur de l'imminente fin, délivrait l'insoutenable incertitude aux Grands curieux du firmament. Dante déploya son génial lancer d'épée, sans succès, puisque plutôt que de ravager les entrailles du maléfique Urira, la lame démoniaque ne perça qu'une paroi rocheuse, loupé. Et cet échec-là avait un goût particulièrement amer, quand tonitruèrent les rires gras et narquois de l'immortel, à la fatuité graillonnée avec joie. Ensuite, la déchéance, une agonie noyée sous des gargouillis répugnants. Kar'ath, l'épée de malheur, embrocha l'apôtre de l'effroi, pour qui l'immortalité ne fut que de courte durée. Ainsi périt Ivasaar Urira, elfe de sang pur, dernier de son nom, et terrifiant sorcier notoirement connu pour les horreurs qu'il se plaisait à répandre dans tout le Sekai. Le meurtre et la torture n'étant qu'une parcelle de ses deux vies totalement dévouées à la ruine de tous. En ce jour éprouvant, il sacrifia une centaine d'existences, autant par caprice et sadisme, que pour une ambition folle. Au moins, avant de déchoir, parvint-il à résoudre la question de la mortalité, son âme maudite quittait alors ce plan de l'univers, emportant avec elle tous ses plus noirs secrets. Au grand dam de Nargulg, pour qui l'immortalité fut l'objet d'un insurmontable désir, aujourd'hui plus que jamais.
Le grandiose Dante, magnifique gagnant de ce duel à mort, examina d'un poil trop près le sauvage d'orc, lui-même zyeutant la face dévissée d'Ivasaar murée dans l'incompréhension. Évidemment, Nargulg fut doté d'assez de conscience pour observer et réagir en toute mollesse, chose terriblement insuffisante, car l'urgence commandait de déguerpir d'ici en vitesse. Sa pupille quitta la tête - trophée de feu Urira pour se planter dans celles de son frère d'armes. Tout juste soutenu par le souffle d'une vie aux frontières de l'extinction, il répliqua péniblement au cornu.
- On dirait bien. Confirma-t-il sobrement.
Toujours aussi détestable, cette situation de faiblard dépendant des autres. Ah, ça, n'allez pas croire qu'il s'y ferait le Nargulg ! Un désagrément temporaire, voilà tout. Avec du repos il s'en relèverait. Sauf que l'heure n'était aucunement au repos, car l'on pressentit la venue de renforts. Certes, ils combattirent à bonne distance de la base armée, ça n'en fit pas une raison pour s'attarder dans cette fosse à purin. En revanche, Urzupha, sortant de la léthargie pétrificatrice, se précipita au chevet de son inélégant bonhomme, pour franchement se foutre de sa gueule. Incapable de contenir les moqueries, la femelle le pointa ostensiblement du doigt, déchargeant une tétrachiée de rires tel un gosse insortable. Les yeux plissés, l'esclaffement s'estompa finalement en un soupir satisfait, les muscles de la barbare désormais décontractés, elle ne fit pas grand cas de la plaie béante saccageant son dos. À Dante, elle déclama paisiblement.
- T'inquiètes pas pour lui va. Ça repoussera. Pense à me remercier du coup de main que je vous ai filé. C'est moi qui ai tout fait dans cette foutue histoire et regarde, R'GARDE ! C'est toi qui tiens la tête de l'autre empaffé. Je trouve pas ça très correct si tu veux mon avis. Tu devrais me la donner.
Raah putain... Urzupha fanfaronna alors que l'impératif fut de survivre à la prise de l'hiver. Ils auraient l'air cons nos vainqueurs, à clamser du froid aujourd'hui.
- Hé Nargulg, ne compte pas sur moi pour te déposer à Célestia. Rentrer au bled d'accord, pour ça j'accepte généreusement de te soutenir puisque j'ai hâte de retrouver le clan, mais...
- Urzu' un de ces jours je te...
- Quoi ?! La criminelle planta la semelle de sa botte de fourrure en plein contre le roc, supportant le poids du bonhomme écorché. Tu vas faire quoi ?! Interrogea-t'elle, intimidante.
- Je te ferai bouffer tes dents. Répondit l'immonde Nargulg.
- Peuh ! Pour ça, tu vas devoir te tenir debout, t'es sûr d'y arriver mon salaud ? Hé Dentier ! Elle tourna son attention vers Dante, ou Dentier. Fière de tordre l'appellation de l'oni. Va-lui chercher une canne et dégotte nous un nid douillet tant que t'y es...
Un brusque regain de tension perturba les fréquences cardiaques de tout un chacun, symptomatique d'une menace infiniment supérieure au nécromant vaincu. Les grondements de la tempête de givre, accompagnés d'intonations sinistres annoncèrent la venue d'un grand danger. Le froid n'interdit nullement les sudations de paraître, dorénavant bien des frissons gelèrent nos triples meurtriers fixant à l'unisson, en parfaite synergie, un colosse éthéré envahir les lieux d'une écrasante présence. Edrir Galitheos, grand manitou et Seigneur absolu d'une bande devenue armée, porteur d'une ambition conquérante, se révéla aux guerriers sous forme astrale, comme une entité statique et diaphane. Un timbre de voix profond et caverneux quitta la bouche du dirigeant fantomatique.
- Ivasaar...
- On l'a détruit ton larbin, repasse plus tard ! Lança Urzupha, sa hache à double tranchant soutenu d'un bras distordu, de traverser inutilement la masse translucide.
- Il était FAIBLE ! Soyez patients, et je vous montrerai la futilité de votre résistance. En personne.
Quand Nargulg et Urzupha entendirent le commentaire de l'homme au casque à corne, rabaissant ainsi le défunt thuriféraire de la désolation, tout paru aussi clair que du cristal. Le seul acte de présence spectral d'Edrir, matérialisa une bonne fois pour toutes l'abîme inabordable séparant les deux mondes. Le monde des forts, dont le Tout-puissant Galitheos appartint selon toute vraisemblance, et celui des minables. Pour victorieux qu'ils étaient, tous trois résidèrent toutefois dans le vaste univers des faibles tant décriés. Que les choses soient bien clairs, Ivasaar Urira, Dante, Urzupha et Nargulg, au summum de leur forme face à un Edrir amputé d'un bras, ces quatre - là seraient de minuscules moucherons. Rien n'était dû au hasard, tant ce face-à-face subitement silencieux en disait plus long que d'interminables soliloques. Edrir Galitheos, terreur des rocheuses. Edrir Galitheos, guerrier sanguinaire. Edrir Galitheos... Tueur de masse à la renommée internationale. Combien de marches lui restât-il à gravir, avant de pouvoir défier sans trembler Tensai le déicide ?
Pas d'effroi, aucun cri strident agressant les tympans plus que de raison, seulement la puissance à l'état brut. Cela et uniquement cela. La projection astrale tendait peu à peu vers l'effacement, tandis qu'un duel de regards perdura. Estomaqué, l'orc mâle ne prononça qu'un mot.
- Partons.
Ainsi, les Huits, indélogeables, siégèrent au sommet, pour qu'entre eux et le verdâtre estropié ne figuraient qu'une infinitésimalité d'individus outrageusement balèzes, authentiques élites d'un univers étouffé par la multitude de médiocres. C'est cela l'élitisme, un espace restreint et excluant, inhumain donc parfait, injuste donc supérieur ; absurde, par conséquent transcendant.
Cette ixième fulguration douteuse, n'eut plus d'importance, car voici Ivasaar le magnifique, victorieux en toute complétude, conjuguait dans son unicité perfection de corps et monstruosité d'âme, avec en plus, la fidélité aux desseins de son Seigneur et Maître, l'ensemble enrobé d'une passion dévorante pour la fin de toute chose. Certainement, l'innommable cumulait bien des qualités d'essences supérieures, pour ne pas dire... Divine. De discutaillerie, jamais ils n'en échangèrent, aussi laissèrent-ils cela aux tantouzes de la République. L'honorable courtoisie guerrière piétinée depuis l'aube du conflit, Ivasaar et Nargulg, en hérauts de la barbarie, l'abandonnèrent aux sous-hommes du Reike, dégénérés adorateurs d'étoiles.
Le nécromant, soucieux d'infliger tourment et destruction, bénéficia d'une occasion en or, et Nargulg, sa victime, endura l'emprise perverse de l'arrogant sorcier. Prit entre l'épuisement, les meurtrissures et le déferlement brumal, l'orc défait fut soumis au plus abominable de ses pouvoirs, l'attaque mentale. Jouissant d'un savoir-faire hors du commun en la matière, ce que le sieur Urira aimait à désigner comme une scolopendre s'insinua, l'encéphale comme proie, l'imperceptible centipède de mana répandit le venin sans jamais se vautrer dans le superfétatoire, parce que cette sorcellerie-ci, avait bel et bien cela de sublime. Il n'y avait rien, seulement un elfe presque à poil, planant à proximité de sa victime encrassée, pour que ceci fut amplement suffisant. La musculature assaillit de contractures ou de secousses, Nargulg n'était plus qu'un pantin spastique, un joujou fusillé du regard par Ivasaar le sadique. Autre effet second de l'expérience, la douleur, chose totalement novatrice pour cet orc puisque le mille-pattes "réorganisa" partiellement le lobe pariétal. En vérité, tout le système nerveux central fut une aire de jeux que le hideux animal déglingua avec joie, et aux convulsions du faciès de l'estropié, l'elfe ressuscité opposa un sourire carnassier, des ricaneries jalonnaient le malheur du meurtrier phagocyté par la mission corruptrice du funeste vainqueur. Cet épisode monstrueux condamna le fanatique à des grognements douloureux, instantanément bâillonnés par le sombre sortilège, les mugissements du mistral d'émettre pour lui une complainte inintelligible. Parfait. C'était parfait.
Heureusement, ou malheureusement - à vous de me dire - le grand chantier de cette géhenne ne s'éternisa pas. Hé oui ! Dante revint des songes, comme neuf ! Presque comme neuf, d'accord. Néanmoins, cette réapparition fut une aubaine pour mon tueur miraculé. Adieu l'attaque mentale, place à la seule compétence digne d'intérêt ici-bas : la régénération. Bon, plus sérieusement, il n'était pas prêt de gambader innocemment le Nargulg, cependant le risque de finir sa vie en tétraplégique à la cervelle en compote tint désormais du lointain mirage cauchemardesque. Tout le supplice durant, sa perception du temps fut drastiquement chamboulée, toutefois, ce châtiment ne dura pas plus de trente secondes, grâce à l'irruption du coléreux démon des rocheuses. Ouais, c'était à lui que revint de conclure l'affrontement, car d'un côté, nous avions une Urzupha devenue monument rocailleux, chose tout à fait inutile, n'est-ce pas ? Tandis que de l'autre Nargulg dégobilla sang et tripes comme pas possible, une désagréable sensation de grain de maïs éclatant sous sa caboche persistait. Son unique globe oculaire erra dans la confusion, scrutant de temps à autre le conflit opposant sorcier et guerrier, lorsque le germe de l'inquiétude n'épousa pas son être. En effet, son corps étant un vaste complexe dont il prenait toujours grand soin, et mamelle nourricière de sa grande fierté, ce fut toute une culture de la perfection qu'autant de pertes ébranlaient. Dans le tintamarre conflictuel, sa psyché mettait en branle la survivance d'un caractère guerrier trop ancré pour le quitter. Conflit et perte vont de pair, son devoir fut de s'en accommoder. Non. Autre chose naquit sous les décombres de Nargulg le pourrit. Tout à fait ! Perdre l'œil droit et l'avant-bras gauche, non seulement, il y survivrait, mais plus important encore, l'orc les restaurerait. Que ce soit par l'épatante régénération, ou bien depuis des soins prodigués par on ne sait quel fichu mage-rat de bibliothèque, Nargulg les retrouverait, ses putains de membres.
Pour l'heure, Monsieur le Faiblard barbouillé de salissure poireauta, observant un conflit battant son plein, merveilleusement enrichit de flocons de neige, les bourrasques de la tempête hamonisaient l'ondoiement de la futaie. Ivasaar commanda aux rochers, sa volonté faisant office d'autorité, la croûte terrestre céda à ses néfastes revendications. Sorcier démesurément puissant ça oui, et architecte également. Le gars retapa la déco plus de fois qu'on ne l'exigea pour mériter ce titre. Le cornu n'était pas homme à se laisser déborder par les excès d'un quasi-nudiste vaniteux, beau de surcroît, mais enfin, vous savez, être un beau gosse ça n'interdit pas de se faire péter la gueule. La perfection de l'elfe immaculé s'effrita sitôt qu'il perdit une oreille, braillant dans la foulée, quel plaisir de le voir ainsi perdre en éclat, l'elfe hein, pas l'oni.
Soudain, l'instant précis où tout était possible se concrétisa, le point de bascule précurseur de l'imminente fin, délivrait l'insoutenable incertitude aux Grands curieux du firmament. Dante déploya son génial lancer d'épée, sans succès, puisque plutôt que de ravager les entrailles du maléfique Urira, la lame démoniaque ne perça qu'une paroi rocheuse, loupé. Et cet échec-là avait un goût particulièrement amer, quand tonitruèrent les rires gras et narquois de l'immortel, à la fatuité graillonnée avec joie. Ensuite, la déchéance, une agonie noyée sous des gargouillis répugnants. Kar'ath, l'épée de malheur, embrocha l'apôtre de l'effroi, pour qui l'immortalité ne fut que de courte durée. Ainsi périt Ivasaar Urira, elfe de sang pur, dernier de son nom, et terrifiant sorcier notoirement connu pour les horreurs qu'il se plaisait à répandre dans tout le Sekai. Le meurtre et la torture n'étant qu'une parcelle de ses deux vies totalement dévouées à la ruine de tous. En ce jour éprouvant, il sacrifia une centaine d'existences, autant par caprice et sadisme, que pour une ambition folle. Au moins, avant de déchoir, parvint-il à résoudre la question de la mortalité, son âme maudite quittait alors ce plan de l'univers, emportant avec elle tous ses plus noirs secrets. Au grand dam de Nargulg, pour qui l'immortalité fut l'objet d'un insurmontable désir, aujourd'hui plus que jamais.
Le grandiose Dante, magnifique gagnant de ce duel à mort, examina d'un poil trop près le sauvage d'orc, lui-même zyeutant la face dévissée d'Ivasaar murée dans l'incompréhension. Évidemment, Nargulg fut doté d'assez de conscience pour observer et réagir en toute mollesse, chose terriblement insuffisante, car l'urgence commandait de déguerpir d'ici en vitesse. Sa pupille quitta la tête - trophée de feu Urira pour se planter dans celles de son frère d'armes. Tout juste soutenu par le souffle d'une vie aux frontières de l'extinction, il répliqua péniblement au cornu.
- On dirait bien. Confirma-t-il sobrement.
Toujours aussi détestable, cette situation de faiblard dépendant des autres. Ah, ça, n'allez pas croire qu'il s'y ferait le Nargulg ! Un désagrément temporaire, voilà tout. Avec du repos il s'en relèverait. Sauf que l'heure n'était aucunement au repos, car l'on pressentit la venue de renforts. Certes, ils combattirent à bonne distance de la base armée, ça n'en fit pas une raison pour s'attarder dans cette fosse à purin. En revanche, Urzupha, sortant de la léthargie pétrificatrice, se précipita au chevet de son inélégant bonhomme, pour franchement se foutre de sa gueule. Incapable de contenir les moqueries, la femelle le pointa ostensiblement du doigt, déchargeant une tétrachiée de rires tel un gosse insortable. Les yeux plissés, l'esclaffement s'estompa finalement en un soupir satisfait, les muscles de la barbare désormais décontractés, elle ne fit pas grand cas de la plaie béante saccageant son dos. À Dante, elle déclama paisiblement.
- T'inquiètes pas pour lui va. Ça repoussera. Pense à me remercier du coup de main que je vous ai filé. C'est moi qui ai tout fait dans cette foutue histoire et regarde, R'GARDE ! C'est toi qui tiens la tête de l'autre empaffé. Je trouve pas ça très correct si tu veux mon avis. Tu devrais me la donner.
Raah putain... Urzupha fanfaronna alors que l'impératif fut de survivre à la prise de l'hiver. Ils auraient l'air cons nos vainqueurs, à clamser du froid aujourd'hui.
- Hé Nargulg, ne compte pas sur moi pour te déposer à Célestia. Rentrer au bled d'accord, pour ça j'accepte généreusement de te soutenir puisque j'ai hâte de retrouver le clan, mais...
- Urzu' un de ces jours je te...
- Quoi ?! La criminelle planta la semelle de sa botte de fourrure en plein contre le roc, supportant le poids du bonhomme écorché. Tu vas faire quoi ?! Interrogea-t'elle, intimidante.
- Je te ferai bouffer tes dents. Répondit l'immonde Nargulg.
- Peuh ! Pour ça, tu vas devoir te tenir debout, t'es sûr d'y arriver mon salaud ? Hé Dentier ! Elle tourna son attention vers Dante, ou Dentier. Fière de tordre l'appellation de l'oni. Va-lui chercher une canne et dégotte nous un nid douillet tant que t'y es...
Un brusque regain de tension perturba les fréquences cardiaques de tout un chacun, symptomatique d'une menace infiniment supérieure au nécromant vaincu. Les grondements de la tempête de givre, accompagnés d'intonations sinistres annoncèrent la venue d'un grand danger. Le froid n'interdit nullement les sudations de paraître, dorénavant bien des frissons gelèrent nos triples meurtriers fixant à l'unisson, en parfaite synergie, un colosse éthéré envahir les lieux d'une écrasante présence. Edrir Galitheos, grand manitou et Seigneur absolu d'une bande devenue armée, porteur d'une ambition conquérante, se révéla aux guerriers sous forme astrale, comme une entité statique et diaphane. Un timbre de voix profond et caverneux quitta la bouche du dirigeant fantomatique.
- Ivasaar...
- On l'a détruit ton larbin, repasse plus tard ! Lança Urzupha, sa hache à double tranchant soutenu d'un bras distordu, de traverser inutilement la masse translucide.
- Il était FAIBLE ! Soyez patients, et je vous montrerai la futilité de votre résistance. En personne.
Quand Nargulg et Urzupha entendirent le commentaire de l'homme au casque à corne, rabaissant ainsi le défunt thuriféraire de la désolation, tout paru aussi clair que du cristal. Le seul acte de présence spectral d'Edrir, matérialisa une bonne fois pour toutes l'abîme inabordable séparant les deux mondes. Le monde des forts, dont le Tout-puissant Galitheos appartint selon toute vraisemblance, et celui des minables. Pour victorieux qu'ils étaient, tous trois résidèrent toutefois dans le vaste univers des faibles tant décriés. Que les choses soient bien clairs, Ivasaar Urira, Dante, Urzupha et Nargulg, au summum de leur forme face à un Edrir amputé d'un bras, ces quatre - là seraient de minuscules moucherons. Rien n'était dû au hasard, tant ce face-à-face subitement silencieux en disait plus long que d'interminables soliloques. Edrir Galitheos, terreur des rocheuses. Edrir Galitheos, guerrier sanguinaire. Edrir Galitheos... Tueur de masse à la renommée internationale. Combien de marches lui restât-il à gravir, avant de pouvoir défier sans trembler Tensai le déicide ?
Pas d'effroi, aucun cri strident agressant les tympans plus que de raison, seulement la puissance à l'état brut. Cela et uniquement cela. La projection astrale tendait peu à peu vers l'effacement, tandis qu'un duel de regards perdura. Estomaqué, l'orc mâle ne prononça qu'un mot.
- Partons.
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