-Par ici ! Vite ! Des soins !

Je m'approchais du vacarme provoqué par l'attroupement de gardien dans le hall d'entrée, qui s'affairait à maintenir en vie de l'un des nôtres, devenu unijambiste . Du sang s'étalait à mesure que nous marchions dedans pour venir à son secours , convaincu que nous avions encore du temps pour intervenir, ayant déjà vu des soldats bien plus amochés arriver ici et qui après quelques heures d'intervention, n'avaient plus à craindre pour leur vie. Tout le monde s'était éparpillé, restant finalement seul à son chevet, ne pouvant rien faire de plus qu'écouter ce qu'il avait à me dire.Je reconnaissais cet individu qui nous avait bassinés depuis des mois qu'il allait se marier .Je me mis à genoux lorsqu'il me pria de me rapprocher, puis il attrapa mon bras, l'air désespéré :

-Prends cette carte...Elle te mènera à...message...lettre importante...C'est ...secret ...Je l'ai caché...près barque...frontière gigantesque...
-Une frontière ?
Il fit un geste ample comme pour représenter quelque chose de très grand en hauteur, tout en regardant le plafond.
-Tu..pas louper....Promets-moi.

Il cracha ensuite du sang , m'aspergeant le visage et toute mon armure . Ce fut à ce moment-là que tout le monde revint vers nous, moi tenant les épaules du bougre pour essayer de le maintenir éveillé. Il avait perdu connaissance et l'on me pria vivement de m'éloigner de lui,remarquant que tous les regards étaient posés sur moi maintenant.Certains murmuraient des propos à mon encontre, comme quoi j'allais un jour réussir à tuer quelqu'un rien qu'avec ma présence . Sans même jeter un œil aux autres gardiens, je me mis en marche, me répétant sans cesse les dernières paroles qu'il m'avait énoncées, tandis que les autres répétaient dans mon dos mon surnom sans presque aucune gêne.

-On ne devrait pas  laisser ce fléau écarlate approcher l'infirmerie si vous voulez mon avis.

Je fis abstraction de tout ce qui m'entourait , essayant de comprendre la totalité des instructions que l'on m'avait confiées. Je décidais de me mettre en route, prenant quelques rations et habits de rechange, ne sachant pas combien de temps mon voyage allait se prolonger. Durant ma traversée en barque de la mer intérieure pour rejoindre la berge, j'avais analysé la carte.A moitié déchirée, je compris qu'il me faudrait traverser le Désert, vu les pointillés inscrits dessus. Une monture adéquate était donc de rigueur. Je jetais mon dévolu sur l'Aazho du soldat qui m'avait demander de retrouver cette lettre. Il semblait m'attendre patiemment sur la terre ferme, accroché à un arbre à l'aide d'une simple corde dans la précipitation.Vu l'urgence qu'il me semblait avoir aperçue dans la requête qui m'a été adressé, il ne pouvait s'agir que d'information confidentielle . Convaincu de l'importance de ma mission, malgré le manque d'information , je poursuivis mon chemin.

À l'approche des dunes, j'avais enroulé ma cape autour de mon visage, car une tempête se préparait. Beaucoup de questions me restaient en tête, comme cette histoire de frontière d'une hauteur impossible à manquer. Tentant de déchiffrer un moindre indice, je rapprochais mon visage du parchemin, tandis que ma monture docile avançait paisiblement en émettant des bruits de temps à autre, semblable et des éructations. Une bourrasque de vent colla la carte sur mon visage puis elle s'envola au loin, sans que je puisse la rattraper . La chance n'était pas de mon côté. Cette impression s'accentua lorsque du sable se mit à nous fouetter et que le paysage , autrefois ensoleillé, devenait à mesure floue et sombre à la fois. J'avais réussi néanmoins à trouver un recoin rocailleurs pour nous abriter avant que la nuit nous plonge dans l'obscurité la plus totale.

Il nous fallut plusieurs jours pour traverser le Désert, sans que je ne voie aucun bâtiment, tour, ni quoi que ce soit qui dépassait des dunes, malgré que j'ai tourné en rond sans m'en rendre compte. La tempête elle, s'était déplacée plus vers l'ouest, me cachant l'exacte position ou la carte avait été détruite. Peut-être me faisait elle signe de la rejoindre ? Je décidais de suivre mon instinct, m’arrêtant plusieurs heures plus tard sur une grande route, ou j'ai pu demander à un voyageur à la tête patibulaire s'il avait vu une quelconque frontière. À mon grand soulagement, il me répondit que oui et m'indiqua de son index, un genre de promontoire rocheux, à un peu plus d'une journée de marche de là. Son sourire édenté ne m'inspira pas confiance mais je n'avais pas le choix , ne voyant personne pour me renseigner.  

Lorsque je mis pied sur cet amas rocheux, je ne vis rien , aucune délimitation un tant soit peu remarquable. Non, seulement des traces de sang un peu plus bas ainsi que des viscères qui appartenaient sans que je le sache , aux tires laines qui devaient me tendre une embuscade. Malheureusement , un Lanconda très affamé avait jeté son dévolu sur eux et avait disparu dans le Désert pour digérer. Une brume épaisse était apparue en cette matinée plus douce, certainement due à la proximité de l'humidité de la Jungle. Je descendis de ma monture, faisant les milles pas en donnant des coups de pied dans les cailloux que mes bottes rencontraient .Ne comprenant pas pourquoi je ne voyais rien, je fixais le sol en tenant mon menton de mes doigts.

-J'ai l'impression que la réponse est juste devant moi et aussi visible que le Mont Kazan vu du Berceau...Qu'est-ce qui m'échappe à la fin ?

Lorsque le soleil dissipa le brouillard, quelque chose attira mon regard. Brillant de mille feux, le Lac Rebirth s'étendait bien plus loin que je ne l'avais imaginé. En effet, c'était la première fois que j'arpentais ces contrées, connaissant cet endroit que grâce aux cartes et aux histoires que j'avais entendue. Je décidais de m'y rendre, afin que nous puisions de l'eau pour remplir nos réserves maintenant presque à sec.Puis un bain ne nous ferait pas de mal, certain que je devais sentir l'Aazho  à force d'être sur son dos poilu.Sans tarder, on avait rejoint le lac, en faisant attention à ne pas attirer l'attention. Tout point d'eau , aussi grand qu'il soit, attirait tous les êtres vivants, les moins recommandables par la même occasion.

C'est en arrivant près de l'étendue que ma monture devint incontrôlable. Assoiffé et peu enclin à écouter mes protestations qui visaient à le faire ralentir, il galopa à une allure que je n'aurais jamais soupçonné en être capable. Il freina subitement, me projetant quelque mètre plus loin. Non pas dans l'eau comme les plus chanceux, mais vers un rocher arrondi en pointe que mon buste percuta de plein fouet. Cela me coupa la respiration sur le coup, m'accrochant à lui tel un arapède pour ne pas tomber dans le lac . Sans que je comprenne pourquoi, mon espadon se décrocha de mon dos, filant dans l'eau. Heureusement pour moi, une chaine noire entourait son pommeau et par réflexe, je l'avais attrapé, l'enroulant sur le rocher afin de la coincer. De cette façon, je pouvais sortir facilement mon arme.

-Qu'est-ce qui se passe encore ?

J'avais beau tiré sur la chaine, elle ne bougeait pas. C'était comme coincé. Comprenant ce qu'il me restait à faire, je me mis debout , pour me débarrasser de mon armure que je jetais sur la berge, pas si éloignée que ça. Comme Serrcoeur mon arme au fond de l'eau. Elle était entourée d'algues et la profondeur ne devait pas dépasser les dix mètres. Cela serait un jeu d'enfant. Je n'étais pas le meilleur nageur en surface, éclaboussant tout sur mon passage. Par contre ce que j’aimais faire régulièrement, c'était de plonger dans l'eau pour méditer. Rien que de penser à cette idée , cela me fit sourire. Je retirais ma chemise cramoisie que seuls des nobles peuvent s'offrir. Lorsque je posais mes mains sur mon pantalon, je le baissais puis me ravisais. Les fesses à moitié dévoilées, mes attributs encore cachés, je me rappelais que j'étais en mission et non à la récréation. Je remontais mon habit et le serrais avec ma ceinture.

Je fis mes exercices de respiration, inspirant à de multiples reprises et expirant brièvement, pour faire le  plein d’oxygène. Au bout de quelques minutes, j'étais presque étourdi , préférant prendre ces précautions au cas où mon séjour dans l'eau serait prolongé. Qui sait quel obstacle j'allais trouver là-dessous ? Je veillais à ne garder accroché à ma ceinture que le strict nécessaire.Je gardais un couteau, une corde, une sacoche remplie de billes gravées de symbole, jetant le reste là ou mon armure attendait. Au moment où j'allais plonger, l'Aazho tapa dans l'eau avec ses pattes avant, comme pour me prévenir de quelque chose. Je détournais mon regard vers lui, grattant l'une de mes cornes avec mon index d'un air perplexe.

-Un souci barbiche ?

Une forme pisciforme filait sous la surface limpide et sereine du lac. Depuis une petite heure, elle suivait la ligne de la berge, la gardant à sa droite. De temps à autre, on perdait de vue sa silhouette, s'amusant à s'enfoncer pour suivre le mouvement des fonds, qui n'étaient pas uniformes, même pour un lac. Bien des humains pensaient que les fonds des bords de berges descendaient de manière régulière, couverte de sable fin. Que nenni. La Sirène le voyait bien depuis qu'elle s'était mise en chasse. De temps en temps, il y avait de grandes nappes mouvantes d'algues verdoyantes, de temps en temps des amas filandreux verdâtres qui ressemblaient plus à de la mousse qu'à de la vie végétale aquatique. Des rochers, des nappes de galets... il y avait de tout là-dessus. Mais à condition de se donner la peine de nager sous les flots pour le voir. Le monde des aériens préférait tellement la terre ferme. Les bipèdes ne s'aventuraient guère dans les eaux lacustres. Et pour cause, une de leurs faiblesses était leur incapacité à respirer sous l'eau, comme notre Sirène. Oh certains, par magie ou par alchimie, compensait ce défaut naturel, mais ce n'était pas pérenne. 

Pendant quelques secondes, Takhys, notre petite Sirène en quête d'une proie pour répondre à sa gourmandise de viande fraîche et juteuse, s'amusa à faire quelques tonneaux sur elle-même, pour s'amuser un peu. Elle commençait à regretter de pas avoir attendu la nuit, pour trouver une cible avec laquelle s'amuser un peu avant de la dévorer. Sur ce bord du lac Rebirth, il n'y avait pas de route, pas de voie pédestre, donc un recoin qui avait un petit potentiel pour croiser un brigand ou un assassin. Mais bon, le soleil brillait joyeusement dans les cieux. Allez, elle va encore nager quelques kilomètres et après elle trouvera autre chose pour remplir son estomac... Elle serait déçue de pas mâchouiller avec délice un bon petit morceau d'onglet humain, ou de triceps d'elfe... Ces cibles-là étaient largement plus rares. La dernière fois, c'était quand ? Y a-t-il quelques années ? Plus peut-être ? Et c'était un assassin qui avait cru bon de prendre un bain pour se laver du sang de ses crimes de la nuit. En essayant de se rappeler un peu plus de détails de ce repas-là, elle cessa d'un coup de nager, déployant ses mains palmées et sa grande nageoire pour se freiner. Elle sourit, guettant les sons se diffusant dans l'eau. Les oreilles toutes ouïes, elle guettait déjà le prochain signe sonore. Ah, un plouf... un bruit d'un objet qui touche le fond. Avec un sourire enthousiaste, elle se mit à nager vers la source de ce son. Un titillant métallique de chaînes se rajouta encore. Qui disait métal disait bipède…

Elle évolua rapidement vers l'origine et se tapit au fond, dans une petite densité algueuse. Après quoi, elle tenta de l'observer de la limpidité de l'eau malgré la surface brouillée par les vaguelettes. Ahhhh ! Un terrestre  !  Avec des cornes sur la tête. Ses sourcils se froncèrent ? Un hybride ? Elle le fit plonger à côté d'un promontoire rocheux où il s'était tenu à son arrivée. Il se baignait tout habillé ? Elle l'étudia. Ah non, il retirait sa chemise. Et ses mains posées sur son pantalon pour... Elle se retint de glousser, voyant qu'il se retenait. Dommage. En tout cas, à voir la masse musculaire de son torse et de ses bras… Et d'autres détails. Un Drakyn ? Oui, c'était un Drakyn ! C'était la première fois qu'elle en voyait d'un d'aussi prêt ! Quelle chance ! Elle avait entendu tellement de choses sur eux, mais ne savait pas si tout était vrai. Mais pourquoi venait-il dans l'eau ? Elle aperçut la chaîne noire et une arme tout au fond... un bon fond d'ailleurs. Bien, elle avait trouvé sa proie et pas n'importe laquelle visiblement. Première chose à vérifier, sa capacité d'apnée. Si jamais elle viendrait à retomber sur un autre de son espèce, autant savoir leur résistance non ? 

Elle attendit, patiemment, toujours camouflée dans ses algues. Elle n'était pas si loin que cela de lui. Après plusieurs minutes, elle le fit se parer de quelques objets à la ceinture. Soudain, un tambourinement résonna du sol de la berge. Bon sang, la lourde monture poilue pourrait tout gâcher. Elle se tapit plus sur le fond, espérant que le baigneur ne changera pas d'avis. Visiblement non, il opta pour sa plongée. Lentement, il s'enfonça, suivant la chaîne de son arme. Takhys se tenait prête, donnant l'impression d'être une lionne aquatique à l'affût, bandant ses muscles pour bondir. Encore quelques secondes et... 

Elle appela l'eau pour faire danser les algues environnant le Drakyn. Elle les brassa, les caressa, les rendant dansantes, puis doucement, elles devenaient chaotiques, guidées par le ballet que leur imposait l'eau contrôlée par la Sirène. Le but ? Qu'elles s'entortillent autour de ses jambes et de ses bras, qu'elles l'enchevêtrent pendant qu'il cherchera à retirer sa longue arme hors de la boue vaseuse et de l'environnement végétal. Là, pour le moment, c'était juste pour voir comment il réagira. S'il paniquerait ou s'il garderait son sang-froid. Les Drakyns étaient de redoutables combattants, à ce qu'elle avait entendu. Donc, en toute logique, il devrait prendre sa petite situation sans trop de stress. Elle avisera de la suite... Peut-être l'empêcher de remonter trop vite en le retenant par un tentacule d'eau ? 

Ne voyant aucun danger nulle part, malgré les avertissements de ma monture,je plongeais dans l'eau fraiche, m'aidant de la chaine pour descendre directement à l'objet de mon attention. Bien évidemment, Serrcoeur avait bien choisi là où elle s'était plantée. Un tapis d'algues lui chatouillait la lame, tandis que une boue collante et vaseuse cachait sa pointe.  À première vue, rien ne semblait réellement la retenir, si ce n'est ce genre de varech qui s'enroulait autour d'elle, mais rien d'insurmontable. Arrivé au fond, je tournais rapidement sur moi-même, scrutant les profondeurs de ma pupille verticale, espérant voir quelques poissons nager ci et là.

Étrangement, il n'y avait pas âme qui vive, hormis une écrevisse qui en voyant se mit en position d'attaque, levant ses pinces au-dessus d'elle. Je ne pus retenir un rictus en la voyant faire , approchant mon visage d'elle en l'imitant avec mes mains gigantesques pour elle . Nullement impressionnée, elle m'attaqua sans que je m'y attende. J'avais esquivé de justesse qu’elle me pince le nez, la trouvant très courageuse d'avoir essayé. À la place, elle avait réussi à attraper l'une de mes cornes, sans que je le remarque. Je haussais les épaules en ne la retrouvant pas, reprenant là où je m'étais arrêté.

Je brandissais mon couteau, coupant petit à petit ces filaments verdâtres, qui s'étaient enroulés je ne sais comment autour de mes jambes. Mais en n'arrivant pas à atteindre celles-ci, je compris que mes bras eux aussi avaient été piégés. Bloqué comme un bourdon pris dans une toile, je me dis qu'il y avait quelque chose d'anormal à la situation. Était-ce un mauvais tour de l'écrevisse ? Non, impossible. En voyant comment ces algues étaient faites, je ne le voyais nullement doté d'un mécanisme que mère nature leur avait offert qui les permettaient de m'encercler ainsi les membres.

-Glouglou..

J'expulsais quelques bulles en voulant dire ''étrange'', me demandant si je n'avais pas réussi  à me retrouver dans le seul tapis de ces trucs gluant possédé par la magie ou d'une conscience. Je les voyais bien se nommer les ''algues mangeuse d'hommes'' ou plutôt de Drakyn vu les circonstances. Qu'importe, je ne devais pas tragiverser plus car ma réserve d'oxygène contenue dans mes poumons diminuait. Sans me démonter, je penchais ma tête vers celles autour de mon bras tenant la dague m'aidant de mes cornes pour les défaire non sans effort. Je mordais les récalcitrantes qui m'empêchaient de les décoller de ma peau, afin d'éviter de me blesser dans mon entreprise. Je fis une grimace de dégout, n'aimant guère ce genre de texture ni ce goût des profondeurs .

Pouvant enfin utiliser mon couteau, je coupais sans grand effort les tentacules végétales qui semblaient de plus en plus nombreux. Je profitais de ma liberté de mouvement pour tournoyer sur moi-même rapidement, avançant vers mon espadon tel un danseur dans une ronde solitaire. Des centaines de confettis verts se dispersèrent autour de moi , l'écrevisse elle, était toujours accrochée sur ma tête. Lorsque je m’arrêtais, plus rien ne retenait visuellement de décrocher mon arme, si ce n'est mon besoin de respirer. Je posais mes pieds sur le fond puis me propulsais vers la surface. Pointant mes bras vers le ciel pour avoir une position la plus hydrodynamique possible.

La tête hors de l'eau, je repris mon souffle, levant mon pouce vers Barbichette pour le remercier  d'avoir essayé de m'avertir du danger. Je me demandais comment il avait fait pour voir cela ou le ressentir. Peut-être connaissait-il cet endroit ? Me rappelant de ma mission, je plongeais à nouveau, cette fois-ci, bien décidé à reprendre mon bien. Une fois à la hauteur de Serrcoeur, je vis quelque chose briller . Mes orbes cyans balayèrent la zone à mes pieds et non sans surprise, je reconnus mes billes. Par réflexe,je touchais l'endroit exact ou devais se trouver ma sacoche accrochée à ma ceinture. À mon grand désarroi, elle n'était plus là.

J'émis un grognement, me demandant pourquoi je n'avais pas laissé cela sur la terre ferme. Maintenant, il allait falloir que je fouille un peu partout, en espérant toutes les retrouver. Heureusement, je n'étais pas du genre frileux et sans plus d'hésitation, je cherchais ces petites sphères qui me tenaient tant à cœur et à la fois me rappeler une blessure qui resterait à jamais ouverte. Je repensais à celle qui me les avait offerte,à celle que j'avais vue mourir dans mes bras.

Elle y avait été légère sur l'emploi de sa magie. Après tout, elle avait le temps pour elle, sous les eaux. Le temps d'étudier un peu ce Drakyn. Bien sûr, un seul spécimen ne suffira pas à lui donner un ordre d'idées sur les véritables spécificités de cette espèce. Mais avec celui-là, elle ne doutait pas qu'elle aurait déjà une bonne partie des informations confirmées. Elle ne les aura pas toutes d'un coup, forcément. Elle devra pousser un peu son "jeu" d'observations, un peu à la fois. Donc, d'un regard à la gourmandise croissante, elle l'observa pendant qu'il paraissait analyser l'enchevêtrement d'algues qui le piégeait, tel un poisson farci généreusement et qui n'attendait qu'à être dévoré pour dévoiler la surprise de ses saveurs intérieures. 

Son couteau en main, le Drakyn analysait sa situation. Il ne pourrait pas vraiment se servir de sa petite lame, avec son bras coincé dans les brins végétaux gluants. Malgré cela, il demeurait serein. Premier point qu'elle avait soupçonné chez lui ; très important. Voyant la petite écrevisse qui pendouillait au bout de sa corne, se maintenant par une seule de ses pinces, la Sirène se retint de rire.  Si la faune locale s'y mettait, elle aussi… Bon, allez, un peu de sérieux. Comment allait-il s'en sortir. Après avoir lâché quelques bulles, le prisonnier des algues n'eut qu'à incliner la tête vers son bras armé pour commencer à trancher les fibres collantes. Après, ce fut avec les dents qu'il s'y attaqua. Après, se libérer en usant du tranchant de son arme fut un jeu d'enfant pour le cornu. Il tournoya sur lui-même, se rapprocha de son espadon, avant d'opter à refaire surface. Déjà ? Takhys se mordilla le coin de sa lèvre. Allez, il était capable de rester plus longtemps sous l'eau, elle en était certaine. Hum, en tout cas, il savait user de ses jambes pour remonter. À le voir rejoindre l'air si vital à ses poumons, ce n'était pas vraiment un novice en termes de plongée. 

Quelque chose de brillant attira son attention. Au début, elle hésita à quitter sa cachette végétale. Puis, par le biais de sa magie, elle créa une main liquide qui saisit l'étrange chose qui étincelait au rythme de la lumière, plus ou moins perturbée par les mouvements de la surface. Heureusement que l'eau était cristalline aujourd'hui. Quand elle saisit la curiosité, elle découvrit une petite sacoche emplie de petites billes de fer de diverses tailles. L'Aquarienne en saisit une entre son index et son pouce et l'observa. Il y avait une gravure dessus. Quel drôle d'artefact...Elle étudiait ce petit trésor atypique, comptant presque une vingtaine de ces petites sphères métalliques. Un bruit de plongeon lui fit relever la tête. Le Drakyn rejoignait son arme et… cherchait quelque chose. N'avait-il pas porté une main à sa ceinture juste avant ? Elle sourit en posant ses yeux pailletés d'ambres sur sa petite prise, avant de les relever vers le nageur. Il tournait la tête tout autour de lui, cherchant ses billes perdues parmi les algues et sur le sable. Elle disposait dans ses mains palmées d'un possible moyen de l'attirer plus longtemps sous les eaux... 

Sa proie ne mit guère de temps à remonter. Vite, elle usa de sa magie pour envoyer quelques billes non loin de l'espadon, les espaçant assez l'une de l'autre, comme pour marquer un chemin. Puis, ce fut autour de la petite sacoche, qu'elle avait bien pris soin de refermer pour éviter d'éparpiller les autres petits objets sphériques, d'être déposée magiquement. Bien entendu, elle l'avait placée de telle façon à ce que l'attention du nageur ne se concentre que sur son bien. Elle ne voudrait pas se faire repérer, même si les algues la camouflaient bien. Son but avec cette petite sacoche ? Simple... Le Drakyn en replongeant, remarquera forcément les petites billes, les suivra et remarquera son bien perdu. Quand il cherchera à le saisir, la Sirène la fera reculer par un très léger courant d'eau, pour qu'il ne l'attrape pas. Elle fera cela plusieurs fois, si cela s'avérait nécessaire, pour voir sa ténacité. Si cette petite chose avait de la valeur aux yeux du respirant, il fera tout pour la récupérer, normalement. Là, elle pourra voir s'il était capable de résister plus longtemps dans l'eau. 

Si j'avais réussi à récupérer quelques billes sans les perdre de vue, quelque chose aller inéluctablement me manquer même si je les retrouvais toutes. Comprenant que je risquais à nouveau de les perdre si je continuais ainsi, je remontais à la surface pour chercher un quelconque contenant capable de bien tenir les billes en sécurité. J'en profitais pour caresser Barbichette qui s'était allongé à côté de mes affaires , ronflant en toute tranquillité, son corps posé à moitié dans l'eau. J'attrapais ma besace qui contenait de la viande sèche, que je cachais en l'enroulant à l'intérieur de ma cape. Une fois fait, je repartis en effectuant les mêmes exercices de respiration que précédemment, ne pouvant imaginer perdre ne serait-ce une bille dans cette immensité devant moi.

Je courus puis plongeais, éclaboussant ma monture qui soupira. Il devait en avoir eu marre de me regarder barboter ainsi , m'éclipsant dans les profondeurs qui jusque-là m'avaient joué des mauvais tours. Mais ceci dit, rien d'insurmontable. Je me retrouvais rapidement à ma position initiale, là où j'avais remarqué les premières billes. À mon grand étonnement, j'en vis quelques-unes de plus, à l'endroit même où je m'étais tenu un peu plus tôt. Comment avais-je pu les louper ? Décidément, entre la frontière et ça, j'avais l'impression d'être un borgne aveugle. Je rangeais les sphères dans ma nouvelle poche, que je pris soin de bien accroché, jusqu'à ce que je voie , illuminé par une éclaircie qui traversa les flots :

-Glouglou...

Mon petit sac de billes était juste là, un peu plus loin et n'attendait que d'être attrapé. Pris d'un élan de bonheur rien qu'en le regardant, je fonçais vers lui à grande brasse. Je m'arrêtais stupéfait, quand celle-ci fut emportée par un courant qui l'amena plus loin vers le bas. Qu'importe, je devais la récupérer, quitte à prendre des risques . Je m'enfonçais plus profondément dans le lac et malgré tout, l'objet de ma convoitise s'éloignait une nouvelle fois, alors que je le frôlais presque du bout de mes doigts. Ma frustration fut vite remplacé par ce qui m'avait empêché toute ma vie d'abandonner et de me laisser abattre : Mon acharnement.

Je redoublais d'efforts, sachant pertinemment que j'allais devoir  boire la tasse si je continuais ainsi à m'obstiner. Ne cherchant pas à comprendre ce qu'il se passait, j'avais aveuglément suivi la sacoche qui comme par hasard allait toujours plus loin. C'est là que quelque chose me dérangea. Normalement dans un lac, il n'y avait pas de courant ? Hormis si un fleuve s'écoulait à l'intérieur ou je ne sais quels autres moyens de ce genre. Je croisais les bras, perplexes, grattant ensuite ma corne, pensif. C'est là que l'écrevisse me pinça le doigt, comme pour me rappeler que je n'étais pas seul dans cet environnement , plus hostile que je ne pensais. Oui, quelque chose ne tournait pas rond et soudain, je sentis comme un danger planer sur moi alors que mon milieu naturel était bien éloignée maintenant.

Ne préférant pas devenir une proie par manque de précaution et n'étant doté d'aucun pouvoir me permettant de détecter le moindre danger, qu'importe le sens en question, je me disais qu'il fallait que je fasse vite. Très vite. Sans plus attendre, je fonçais à nouveau vers la sacoche qui encore une fois semblait hors d'atteinte. J'étais sur le point d'user de l'une de mes compétences mais avant je décidais de tenter une dernière chose. Ce que j'aurai peut-être dû faire pour commencer. J'ouvrais grand l'une de mes mains, frappant sa paume en serrant mon poing de l'autre, de façon que la surface de mon index et de mon pouce touche le creux de ma main. De cette façon, cela produisait un son facile à repérer sous l'eau, que l'on soit humains ou non.

Je frappais , laissant des moments de pause pour communiquer en morse, espérant que s'il y avait bien quelqu'un ici, il comprendrait ce que je raconte. Je stoppais après avoir tapé de façon à dire : Bonjour, vous, ennemis ?Mes poumons commençaient à me bruler, mon cerveau me dictait inlassablement de partir mais mon esprit ne pouvait se résoudre à laisser cette sacoche d'une grande importance s'éloigner ainsi, ne pouvant me défaire ces images de cette jeune femme qui ne m'avait jamais laissé tombé, même mourante.

Les lèvres pincées pour ne pas rire, la main devant comme pout cacher ses lèvres étirés par l'amusement qui la prenait en observant le Drakyn, elle peinait à croire qu'il puisse être tombé aussi facilement dans sa petite farce. Était-ce un jeune Drakyn, encore dans une phase infantile ? Cela expliquerait sa naïveté. Ou alors, il avait naturellement une mauvaise vision et pourrait croire qu'il n'avait pas vu les billes qu'elle avait disposées après sa première remontée à l'air libre. Chose certaine était qu'il tenait absolument à sa sacoche. Le voir nager dans sa direction à chaque fois qu'elle faisait reculer l'objet de ses désirs. Il y tenait vraiment, au point de rester un poil plus longtemps sous l'eau. Sera-t-il capable de rester un peu plus longtemps ?

Un instant, le jeune cornu cessa ses tentatives d'approche pour récupérer son bien. Perplexe, il parut réfléchir. Remontera-t-il ? Ah non, il tenta encore de choper son objet. Il était tenace. Elle nota cela avec un étrange sourire. Ah tiens ? Qu'est-ce qu'il faisait maintenant ? Que faisait-il avec ses mains ? Au son qu'il créa, elle haussa un sourcil. On dirait un genre de message. Le souci était qu'elle ne comprenait rien à ce qu'il espérait communiquer. Avait-il fini par saisir qu'il était mené par le bout du nez depuis tantôt ? ou des cornes, cela se disait ? Peu importait ! Il attendait une réaction. Bien, et si elle sortait de sa cachette pour s'amuser d'une autre manière ? Elle attendit quelques secondes et sortit de sa cachette d'algues.

Nageant avec vivacité et grâce, elle passa d'abord pour attraper d'une main agile la petite sacoche, se tenant à bonne distance du nageur. Il ne pourrait pas ne pas la louper. Tout sourire, elle circonvolutionna une ou deux fois autour du Drakyn, repérant déjà des lieux propices à satisfaire sa gourmandise. Il y avait des écailles qui couvraient certaines choses. Un détail pour elle. Une fois qu'il sera en train de flotter, une bonne fois pour toutes, elle pourrait user de son couteau, pour voir si elle savait l'écailler comme un poisson. Au mieux, la magie l'aidera à écarter l'entrave qui interdisait l'accès à ces muscles fermes et appétissants qu'elle lorgna du regard. Qu'elle était désireuse de goûter un morceau d'onglet ! Ainsi, elle pourra savoir si un Drakyn était plus savoureux ou moins qu'un être humain.

Elle cessa de nager pour se mettre en face de lui, son visage des plus souriants. Elle lui montra la sacoche convoitée sous son nez. Puis, de son autre main, elle fit un geste avec sa main plate, la posant verticalement sur sa gorge, avant de faire un geste d'avant en arrière. Son sourire se fit alors plus large, à en dévoilant ses dents à la blancheur presque parfaite. Comprendrait-il ? Ou tentera-t-il encore d'attraper une ultime fois sa sacoche ? Dans cette action possible, elle saura, elle l'espère, s'éloigner d'un bon coup de queue.

Oui j'avais vu juste. Il m'avait fallu un certain temps pour m'en apercevoir , obnubilé par l'objet de ma convoitise. Une preuve irréfutable que les sentiments pouvaient faire converger nos pensées en un seul et unique but, sans que l'on puisse voir tout l'ensemble. Une immensité que paraissait ne pas posséder de fonds mais qui cachait bel et bien une créature ou plutôt une sirène. Je restais immobile, conscient qu'a chacun de mes gestes, j'utilisais en plus grande quantité , ce qui risquait de me manquer dans peu de temps. Oui, une denrée inexploitable car je ne possédais pas de branchis ou d'un métabolisme comme celui de la jeune femme qui ne manqua pas de récupérer la sacoche sous mon nez. Je ne bougeais toujours pas, ou presque, tournant seulement ma tête lorsqu'elle nagea autour de moi, tel un prédateur qui ne savait pas par où commencer. J'avais l'impression que nous étions comme deux espèces qui ne devaient pas se rencontrer normalement, tel un Aboleth et un Champa. Mais puisqu'elle avait réagi à mon ''dialogue'', se pourrait-il que sa simple venue réponde à ma question?

Tout sourire, et avec une aisance innée, elle évolua dans son élément sans qu'a aucun moment , je ne puisse faire quelque chose pour intercepter mon bien précieux.Ses cheveux bleutés et ses écailles grisâtres avaient déjà merveilleusement bien fonctionné à camoufler son corps jusque-là. J'étais bien désavantagé et plus je réfléchissais, plus la liste de ses avantages était longue. Mes pupilles verticales enregistré chacun des détails qui l'a composé, du bout de sa nageoire à son visage aux traits assez fins. Elle n'avait pas le gabarit d'une femme trop fluette et , malheureusement, je ne pus qu'apercevoir ses yeux sans déterminer leur couleur. Profitant de sa ''présentation'' pour analyser mes différentes possibilités, je fus interrompu lorsqu'elle me nargua, en dévoilant une nouvelle fois ses quenottes immaculée que je savais fort bien puissante d'expérience.

En effet, aimant m'entrainer dans l'eau, ,surtout par forte chaleur,  pour des exercices de respiration,  j'avais déjà aperçu des sirènes. Jamais elles ne m'avaient approché de cette façon mais la manière dont elles mangeaient certains poissons, qui avaient des écailles robustes, j'avais compris qu'il valait mieux ne pas attirer leur attention. Malheureusement , l'une d'elles était plus curieuse que les autres et elle se trouvait justement devant moi. Son signe me laissa perplexe et je fus incertain de comprendre. Ne pouvant faire un trait d'humour compte tenu des circonstances, j'allais user de la gestuelle pour répondre quelque chose qui la ferait peut-être réagir. Je n'étais pas en colère contre elle,non. Cela reviendrait à en vouloir  à une enfant qui tenait dans ses mains le dernier portrait d'une personne chère et qu'elle pouvait à out moment le faire disparaitre.  Mais puisqu'elle semblait s'amuser à me tourmenter, autant essayer de communiquer .Du moins, pour gagner du temps.

Je la pointais du doigt puis fit de même avec moi , mimant ensuite un câlin tout en levant les sourcils d'une mine amusé. Je décrivis une valse , tournoyant doucement sur moi-même, tandis que des éclairs rouges commençaient à crépiter autour de mes bras et de mes jambes. Je me dirigeais vers une zone ou je pouvais poser pied, continuant mon manège tandis qu'une aura rougeâtre émanait de mon corps et que mes yeux habituellement cyans devinrent rouges. Mon air menaçant n'était pas du tout voulu mais lorsque j'employais que ce soit ma force ou ma rapidité, elle venait inéluctablement m'entourer, pour me rappeler que j'étais maudit. Mon rythme s'accéléra soudainement, usant de ma capacité à aller plus vite pour  soulever du sable autour de moi pour ne plus être dans son champ de vision. Ne pouvant user de l'effet de surprise qu'une seule fois, je me concentrais pour concentrer ma force que je n'avais pas utilisée jusque-là. Je pliais mes jambes puis je me propulsais droit vers la canaille à écaille , espérant ainsi l'attraper pour l'encercler dans mes bras.

Pouvoirs:

À voir sa tête, pour peu qu'il arrive à voir correctement dans l'eau, le Drakyn ne parut pas comprendre la gestuelle de sa main. Au pire, ce n'était qu'un détail pour la Sirène. L'aérien ne pourra pas rester éternellement sous l'eau, alors qu'elle, oui. Clignant plusieurs fois de ses paupières, son regard toujours dardé sur le nageur à la peau écailleuse, elle affichait toujours son étrange sourire. Dans sa main, elle avait toujours l'objet convoité, et elle demeurait surtout sur le qui-vive.  À la moindre réaction de son véritable propriétaire, elle pourra garder de la distance entre lui et elle d'un coup de nageoire caudale

Voilà qu'il la pointait du doigt, avant de diriger son index vers lui. Souhaitait-il faire les présentations ? Cela s'avèrerait un peu difficile sous l'eau, non ? Ah, elle comprit mieux pourquoi, en voyant sa mimique d'un câlin dans ses bras. Elle fit mine de rire, sans émettre le moindre son. La position de ses lèvres suffira à largement faire passer ce sens-là aux yeux du Drakyn. Et maintenant, voilà qu'il s'amusa à valser, tournoyant maladroit sur lui-même pour faire semblant de danser. La Sirène croisa les bras, la sacoche dans ses doigts palmés. Elle hocha négativement de la tête, avec un sourire moqueur. Que croyait-il ? Ou alors cherchait-il à faire le pitre pour essayer de détendre leur rencontre ? S'il croyait l'amadouer pour récupérer son objet, avant d'être véritablement à cours d'air... car à remuer comme il le faisait, il brûlait ses réserves. Au moins tenait-il bon, l'animal. Pour l'instant. 

Puis, quelque chose perturba un peu la Sirène. Son sourcil arqué de perplexité, elle l'observait toujours faire son manège avec des éclairs rouges étranges... ca venait de sa peau ? Un effet d'illusion ? Ou un signe magique propre aux Drakyns ? Se perdant un peu en réflexion, elle devint un peu moins prudente. 

lancer de dés:

D'un coup, le Drakyn se précipita sur elle. Les yeux écarquillés, stupéfaite d'une réaction aussi rapide comme surprenante, tous les muscles de sa nageoire se contractèrent pour esquiver l'assaut. Le nageur était tel un requin blanc qui surgissait des profondeurs pour planter ses dents dans sa chair. La Sirène avec cette image en tête, employa l'eau comme élément défensif, invoquant quelques dards fins de glace pour couvrir sa fuite. Quand elle réalisa sa petite bourde, elle eut en tête qu'une simple et brève pensée : 

*Oups...*

Le Drakyn n'était pas un requin, et ses écailles plus épaisses devraient le protéger de sa réaction instinctive défensive. Bon, il saignera peut-être un peu ; un bon moyen de découvrir une infime partie de la saveur qu'il devait avoir sous sa peau de kératine... En attendant, elle restait à bonne distance, le fixant avec un air refroidi. avant de faire un sourire carnassier... Le temps passait, il passait toujours. Ce n'était pas elle qui sera en danger dans les prochains instants... D'ailleurs, elle avait toujours la sacoche, qu'elle agita doucement en direction du Drakyn.

*Allez petit poisson cornu à poumons, remonte à la surface... *

Pouvoirs:

Apparemment, mon mime avait fait mouche, la faisant rire, si l'on pouvait appeler ça ainsi. Elle avait même l'air de se moquer de moi pendant ma valse qui devait paraitre ridicule, je le concède. Au moins, elle devait passer un bon moment, ne pouvant  profiter autant qu'elle compte tenue de mes problèmes de survit ici sous l'eau. Sur la terre ferme, je lui aurais, si jamais nous aurions eu des présentations  amicales, demandé quelques informations concernant son espèce. Mais ce n'était loin d'être la situation actuelle. En plus de cela,mon stratagème n'allait pas porter ses fruits , comme je m'y attendais. En même temps , il aurait été surprenant que j'arrive à déjouer sa vigilance là où elle était la plus rapide, la plus puissante aussi. Mais qu'importe, j'avais plus d'une corde à mon arc. Cette attaque, qui n'en était pas vraiment une, n'avait eu comme objectif que d'attraper cette friponne. Mais pas seulement.

En cas d'échec, ma pulsion allait me permettre de regagner la surface plus rapidement, en direction de la chaine qui tenait toujours mon arme. Je n'avais pas l'intention de l'utiliser au risque de blesser l'inconnue à écaille. Si mon plan semblait sur la bonne voie, la surprise que je vis sur le visage de l'habitante des eaux allait déclencher quelque chose que je ne pouvais éviter si je voulais me focaliser sur mon objectif. Des aiguillons de glaces avaient pris forme derrière le sillage de la voleuse de billes . Arrivé à leur hauteur, je baissais ma tête pour que mes cornes me protègent en partie, sentant que certaines d'entre elles m'avaient lacéré au niveau du cou et du bassin. Rien de très grave cependant, pas assez pour grimacer. Je rangeais mon couteau à ma ceinture pour pouvoir nager le plus efficacement possible.

Je pris note que la sirène, agitant toujours ma sacoche, possédait un éventail de technique lié à la glace. Puis le fait qu'elle se soit défendu ainsi, montrait une autre facette. En effet, jusque-là, tout avait été assez'' cordial'' du moins, de mon côté. Mais sa façon de me provoquer, de sourire avait quelque peu fait monter une certaine tension. Le manque d'oxygène ne m'aidait pas à penser dans le sens contraire, sentant qu'a tout instant, alors que je nageais du plus vite que je le pouvais, le lac allait s'engouffrer dans mes poumons brulants. Même ma vue commençait à se troubler par l'absence de ce qui de base nos permettait à tous de vivre. J'essayais de calmer les battements de mon coeur qui s'était par moments affolés par l'urgence qu'il envoyait à mon cerveau. Je nageais sans même  jeter un regard par-dessus mon épaule arrivant rapidement à Serrcoeur.

Je n'avais plus qu'une seule option viable pour remonter, en écartant tout danger d'être retenu piéger par une quelconque magie liée à la glace ou aux algues. J'allais devoir presque tout donner pour cet ultime bouffé d'air qui me sauverait la vie. Puissant dans mes dernières réserves , je multipliais ma force, augmentant par la même façon les crépitements sur mes membres. Je fis signe avec l'un de mes bras de reculer au cas où cette chipie de Siréne voudrait tenter quelque chose d'audacieux puis je  sortis mon espadon sans pouvoir m'empêcher de sourire en trouvant le nom de mon arme adéquate pour ce milieu. Je le lançais devant moi puis attrapais la chaine qu'il ne m'opposa presque aucune résistance quand je tirais dessus pour l'arracher au rocher plus haut pour l'enrouler autour de mon bras. Je fis rapidement tournoyer mon arme en espérant que mon avertissement n'aurait pas été pris à la légère, puis la lançait vers le ciel. Je pris appui au même moment sur la surface ou ma lame avait été plantée plus tôt, qui ne manqua pas de se disloquer lorsque je me catapultais  pour rejoindre mon arme, qui allait elle aussi m'aider via la force centrifuge, à sortir de cette situation périlleuse.

En une fraction de seconde, je fus propulsé à quelques mètres de la surface du lac,  laissant quelques bouffées d'air s'insinuer dans mon métabolisme tout en  toussant , n'ayant pas l'impression que j'avais inspiré assez pour que mon corps entier soit satisfait. Maintenant vulnérable mais avec mon arme près de moi, j'osais espérer que tout allait s'arranger et qu'une discussion allait avoir lieu. Dans le cas contraire, j'essaierais de ne lui faire aucun mal , même si mes possibilité restées assez limité sur ce sujet-là. Je tentais, encore en l'air, d'attraper la poignée de ce qui allait, m'assurer d'être bien armé.

Pouvoir:

Dès le premier mouvement du nageur cornu, l'Aquarienne avait reculé en quelques mouvements de bras, pour mettre de la distance entre lui et elle. Qui sait ce qu'il sera capable de faire. Quand il prit la direction opposée, pour rejoindre la berge, au lieu de remonter à la surface pour respirer, elle avait haussé un sourcil circonspect. Était-il stupide ou alors ne voyait-il pas la surface. Elle leva la tête. Non, elle était bien visible pourtant. Ses sourcils se froncèrent plus encore. Bien décidé à connaître la raison d'un tel comportement, elle se lança dans son sillage, qui était très légèrement rosé. Ses pics glacés avaient dû lui percer la peau. Elle essaya d'avoir quelque chose sur sa langue quand elle goûta l'eau au sang dilué. Une grimace marqua ses traits. Il n'y avait pas assez de concentration sanguine dans l'eau pour avoir une petite idée de la saveur de sa proie. Faudra mordre directement à la source... Mais chaque chose en son temps. Elle n'avait pas fini de jouer.

Toujours avec son sourire aux lèvres, toujours en gardant une distance avec le Drakyn, elle cessa la petite poursuite quand elle comprit la raison de sa nage à l'horizontal : il avait cherché à récupérer son espadon planté dans la vase depuis tantôt. Et à voir sa violence gestuelle, en plus des crépitements rougeâtres qui marquaient ses membres. Le Drakyn se mettait donc en position offensive. Très bien, pensa-t-elle alors. Et elle le contemplait remonter soudainement à la surface. De ce qu'elle avait vu, elle pouvait en déduire qu'il usait d'une forme de surpuissance magique. Elle nota cela, sur les détails à acquérir sur son espèce. Capturer et manger sa proie s'avèrera plus difficile... Mais pas impossible. D'ailleurs, si elle cessait de bâiller aux méduses ?

Sa longue queue battit puissamment l'eau, pour rejoindre à son tour la frontière qui séparait l'eau de l'air. LE Drakyn avait pris tellement de vitesse qu'il creva la surface, projeté dans son élan dans les airs. S'il cherchait à imiter un dauphin, c'était raté. Même une baleine à bosse avait bien plus de grâce que ce terrestre. La tête sirénienne sortit de l'eau qu'il était encore en l'air. Que cela ne tienne, elle ne lui échappera pas. Le malheureux, il avait bondi si haut, il ne pourra que faire un très douloureux plat. Si elle l'aidait à se préserver ? Un sourire carnassier s'étendit sur son visage à la couleur pâle bleutée.

Elle fit surface, darda son regard sirénien sur sa cible, pendant qu'il commençait à retomber vers l'eau sereine du lac. Le Drakyn sentira de la glace monter de ses genoux vers le bassin, avant d'entourer son torse entier et de coincer ses deux bras dans une posture étrange... avant de faire un gros plouf qui donnera un magnifique geyser d'eau, avant qu'il ne refasse surface, tel un iceberg, mais sous forme d'une statue vivante congelée... Enfin pas congelée en fait. La glace entourait la tête du terrestre, mais laissait libre le visage, le nez et la bouche. Il fallait bien qu'il respire le petit poisson à poumons. Et son étrange posture ? Takhys s'était amusée à lui donner l'allure d'un soldat en charge héroïque, son bras armé levant son espadon vers les cieux et son bras libre plié à quatre vingt-dix degrés, le poing serré sur la hanche. Elle n'était pas mécontente du résultat, fait à la va-vite, elle se l'avouait. Au moins, il ne brisa pas cette gangue de glace, du moins, pas de suite.

"Magnifique !"dit-elle en s'approchant un peu de son statufié gelé. "Quel dommage que vous ne puissiez pas vous mirer, vous avez tout de la beauté d'une véritable statue, un peu brute de forme à cause de ma glace... mais regardable."

Elle sortit de l'eau la petite sacoche

"Est-ce cela que vous recherchiez ? Quelle idée de perdre ses biens dans l'eau. À voir si je vous la rends... ou pas. Mais passons ! J'ai besoin de tester personnellement quelque chose. Ne bougez pas"termina-t-elle en gloussant, avant de plonger. La sacoche était toujours dans sa main.

Son objectif ? L'un des mollets du Drakyn, qui n'était pas couvert de glace. Dès qu'elle aura trouvé un endroit pas trop couvert d'écailles, elle y mordra à pleines dents. Elle y tenait à cette découverte de saveur viandeuse !

Pouvoirs:

Cela faisait combien de temps que je n'avais pas ressenti cette sensation de légèreté? Même si cela dura que quelques secondes , je souris. Ayant toujours dû lutter dans ma vie, que ce soit pour me faire une place dans ce monde empreint à un mal qui n'était pas seulement du côté des titans ou pour m'éloigner de ma médiocrité, je me sentais  dans mon élément. L'horizon s'éloignait tandis que je m'enfonçais dans les méandres de mes pensées, plus profondes que le fond de ce lac ou la silhouette de celle qui me tenait compagnie finit par faire surface. A défaut d'avoir eu ces moments qui font cogner le coeur plus fort, je profitais de présent, qui était des caresses comparé à ce qui me déchirait mon être la nuit. Des bons souvenirs qui allaient être gravée que je m'en sors indemne ou non plus que les doigts accusateurs tendus vers moi depuis que j'étais né.

-Bonjour ! Oh ?

Fondamentalement trop optimiste voyant le meilleur dans chacun, je ne pas déroger à la règle, même en sentant de la glace m'emprisonner dans leur linceul glacial.  La canaille n'avait pas perdu de temps, profitant de ce moment de vulnérabilité pour m'attaquer à nouveau. Je n'eus que le temps d'empoigner mon arme lorsque je fus totalement bloqué ou presque.  Le poids colossal qui en résulta me fit plonger à nouveau dans l'eau, retenant ma respiration à temps. Je pus cependant dans ma chute observer les traits de la jeune femme qui semblait prendre un malin plaisir à m'infliger moult sévice avec un côté , je devais avouer, artistique. Je ne m'en rendis compte qu'en flottant, la tête à portée de mon besoin vital. Mes cheveux s'étaient plaqué sur mon visage, me cachant ma vue.

-En effet, il est assez compliqué vu dans quelle posture je suis de pouvoir en profiter de votre oeuvre. Je marquais une pause pour écoute la douce voix de la sirène et ajoutais taquin:-Arrêtez, vous allez me faire rougir.

Autant tenter de discuter un peu, coincé dans une posture tout à fait drôle. Le froid par contre à devenir douloureux à mesure que les minutes s'écoulaient.J'entendis le bruit des billes dans la sacoche, vraisemblablement secouée dans la main de la porteuse d'écailles. Elle confirma mes pensées, reprochant une certaine maladresse de ma part d'avoir plongé avec. Elle n'avait pas tort d'un certain côté, mais ne fallait-il pas commettre certaines erreurs pour ne plus jamais qu'elles ne se reproduisent? Ne sachant ce qui trottait dans la tête de miss blue, lorsqu'elle m'avoua qu'elle voulait tester quelque chose, je me suis dit qu'au moins, elle avait eu la politesse de me prévenir, même si ses intentions n'avaient pas l'air très louable.

-Faite donc, mais ne tardez de trop, sinon je vais finir par attraper froids.

Le silence était à nouveau revenu et les bruits de la nature parvinrent à mes oreilles. Barbichette ronflait au loin et le bruit d'un insecte volant qui me rasa de prés le visage me fit faire un petit mouvement, penchant mon cou. C'est alors que je sentis comme un mouvement d'eau vers ma cheville qui vraisemblablement, n'avait pas été complétement gelé par la glace. Je ne pensais pas  que c'était un hasard et instinctivement, je voulus reculer, sans succès. Mais puisqu'elle m'avait ''gentiment'' laissé la tête indemne, à l'aide de mes cornes, je tentais de briser la plaque sur mes épaules. Pendant que je grattais, je tentais de bouger en faisant des accoups, parvenant à pivoter par moments histoire d''embeter'' celle qui n'avait pas l'air de vouloir me faire des chatouilles. Mais puisque imaginer que quelqu'un allait vous faire du mal revenait à vous faire souffrir une première fois, autant éviter celle-ci et réfléchir à un moyen d'éviter la véritable douleur:

-Je ne vais pas vous faciliter la tâche petite  chipeuse de bille.

Je continuais mon manège, n'imaginant pas que parfois, à la place d'arranger la situation ,on ne faisait que l'empirer. À force de m'agiter en rythme, je sentis d'un coup mon corps basculer entièrement, inversant complétement mon sens. La tête dorénavant dans l'eau et les petons en l'air, je fixais la jeune femme sans orteils en haussant les épaules puis en souriant d'un air désolé. Je m'agitais tout de même , ne voulant pas savoir ce qu'elle était en train manigancé pendant que j'avais vue sur l'étendue du lac. J'étais plus que tout à sa merci et si elle me laissais encore un peu de temps, j'allais finir par me délivrer, la température du lac m'aidant passivement dans mon entreprise.

La Sirène entendait ses paroles, même si l'eau étouffait la moitié de leur force sonore. Il est vrai qu'elle aurait pu faire un peu la conversation, mais avec son idée fixe bien ancrée dans son crâne, elle verrait en fonction du résultat de son test de saveur... Mais à condition que sa proie se montre un tant soit peu coopérative. Pourquoi les terrestres faisait-il toujours des manières ? Donc, lorgnant déjà l'endroit sur la jambe du Drakyn où elle planterait ses dents, voilà que ce dernier se mettait à gigoter. Ça, pour ne pas lui faciliter la tâche, il y arrivait bien le bougre. Sourcillant à cette situation guère idéale, elle fut dans l'idée de rajouter de la glace en surface pour stabiliser le remuant. Quand, à force de gesticulation, il en vint à basculer. Elle ne manqua pas de rire quand la statue vivante était maintenant à l'envers. Juste pour le plaisir, elle se retourna, elle aussi, mais avec largement plus d'élégance. Croisant les bras sur sa poitrine couverte de son corset de galuchat, elle fixait le Drakyn, qui parut désolé de la situation, avec son sourire confus. Que cela tienne, il n'échappera pas à son souhait premier !

Pour être certaine de réussir à accomplir son désir carnassier, elle devait avoir sa proie immobilisée. Or, là, il remuait un peu. Encore un peu trop peut-être ? En tout cas, il était toujours aussi drôle et amusant. Grâce à son assurance, en ses capacités probablement ? Qu'il gardait confiance quant à ses chances de demeurer en vie ? Hum, ça, c'est parce qu'il ne savait pas encore qu'elle avait décision de vie ou de mort sur lui. Si jamais elle le trouvait à son goût, si elle arrivait à ses fins, elle réfléchirait à terminer de s'en repaître, ou de le laisser s'échapper. Après tout, il était drôle ce Drakyn. Et elle n'était pas encore lasse de jouer avec lui. Au contraire !

Elle finit par placer la sacoche dans sa poitrine, entre ses deux collines généreuses et l'intérieur de son corset. Ainsi, elle aura ses deux mains libres. Après quoi, elle retourna avec grande facilité cette masse vivante entourée de glace. Une fois en surface, dardant son regard brun pailleté d'ambre, elle ne put s'empêcher de glousser. Elle était proche de l'aérien, le retenait par sa taille, couverte de glace pour l'empêcher de se retourner à nouveau.

"Vous avez l'art de faire le pitre sans vraiment le vouloir. Je vais finir par croire que c'est inné chez les vôtres. Et vous êtes aussi remuant qu'un banc de sardines..."murmura-t-elle, non sans une voix douce à la limite d'être langoureuse."Mais j'ai une solution... Je vous accorde un tout petit temps pour prendre une GRANDE inspiration. Car on va plonger. La magnifique œuvre d'art que vous êtes mérite de trôner dans un lieu adéquat.

Son sourire prit un air plus amusé, en dévoilant ses dents blanches. Puis, que le Drakyn eut le temps de refaire le plein d'air ou pas, elle plongea, pendant qu'il se retourna tout seul. Le tirant doucement à elle, toujours son sourire enjôleur. Elle remarqua des fissures présentes dans la gangue de glace. S'il espérait se sauver. Elle hocha négativement de la tête, renforçant son geste de son index droit. Ce n'était pas bien de casser son œuvre. Pour la peine, elle rajouta une bonne épaisseur de glace, ce qui rendit l'aspect artistique un peu moins gracieuse. Après quoi, elle se contenta de se placer au-dessus de lui pour le tracter sans effort à bout de bras, pour s'enfoncer dans les profondeurs lacustres. Elle ne mettra pas longtemps pour atteindre le fond semi-vaseux semi-sableux, retourna sa prise à moitié congelé sur le sable, dans une sorte de clairière envahie d'algues longiformes, qui dansaient au rythme des légers courants sous-marins.

Après l'avoir ancré solidement avec quatre larges griffes de glace, Takhys ne perdit pas de temps. Elle adressa un sourire ravi à sa proie terrestre, nagea derrière lui et s'approcha de sa jambe. Après avoir réduit la glace autour du mollet, gaiement, elle se prépara à y planter ses dents, quand elle eut une bien meilleure idée. Il avait des écailles sur sa peau et elles étaient plus épaisses que celles des poissons. Autant s'épargner de casser ses si belles dents non ? Elle matérialisa sans peine une petite pointe de glace dense, qui lui servit à entailler le mollet. Bon, ça ripa un peu, mais elle réussit à le faire saigner… suffisamment pour goûter le sang et se faire une idée de base du goût possible de sa proie...

La sirène n'avait pas l'air de s'ennuyer, voyant bien que ma maladresse l'avait rire. Je ne pus m'empêcher de sourire à nouveau, tandis qu'elle s'était retournée pour que nos visages puissent se faire face. C'était vraiment étrange d'avoir l'impression d'être à l'endroit alors que l'on avait la tête à l'envers, voyant la barrière de la surface refléter de façon lointaine nos silhouettes. Puis ce silence qui m'immergé dans un monde qui n'était pas le mien, contrairement à celle aux cheveux bleutés. Étrangement, j'avais cessé de luter un instant, ressentant une certaine plénitude à ce moment empreint de légèreté., comme ces bulles qui s'échapperaient de temps à autre de ma bouche légèrement entre ouverte.

Puis voilà que cette inconnue à écaille logea la sacoche entre ses deux charmes. Au moins, elles seraient bien au chaud sans risque qu'elles ne se déversent compte tenu de leur générosité. Je l'avais regardé faire sans aucun gène, n'étant nullement embarrassé par la nudité de nature contrairement à sa proximité. Je scrutais chaque personne comme un pommier portant des fruits tous différents mais beaux à la fois. Je ne pus continuer de réfléchir plus longtemps à ces métaphores car la sirène nous retourna d'un geste simple qui traduisait la facilité avec laquelle cela demandait. De nouveau capable de respirer, j'exploitais cette alcalémie pour gonfler mes poumons tout en profitant de ses éclats de rire.

Prenant pleinement conscient qu'elle brisait ma zone de confort la tête hors de l'eau, j'eus un mouvement de recul sans que cela ne produise rien d'autre que de toutes petites vaguelettes. Puis le fait qu'elle gardait , ses mains au niveau de ma taille  heureusement  recouverte de glace ne faisait qu'accentuer le trouble qui me fit dévier à de multiples reprises ses orbes pailletés d'une couleur me rappelant ces résines que l'on trouvait habituellement sur les conifères.  Je l'avais fixé néanmoins lorsqu'elle prit la parole, comprenant pourquoi bon nombre de personnes se trouvaient charmées par ceux de son espèce:

-Habituellement,je tiens plutôt en place mais étant donné que nous venons de nous rencontrer, je ne sais à quoi m'en tenir.Puis elle m'indiqua que nous allions faire un autre plongeon, certainement plus profond encore que le précédent. Je tentais alors avant que je sois mué au silence:-Quel est votre no.....

Incapable de sortir le moindre son, je ne pus poser un nom sur la dame du lac qui me remis dans ma position initiale après m'avoir fait un large sourire.  Elle détailla son oeuvre et y décéla des fragilités qu'elle prit soin de renforcer à l'aide de sa magie, pointant avec son doigt les endroits concernés. À nouveau, je voulus reculer lorsqu'elle se rapprocha de moi , mes efforts réduits à néant par la glace qui endolorissait ma peau.  Je me contentais de tourner mon regard vers les profondeurs qui me rappelaient les abysses de mes cauchemars les plus sombres. Un tableau qui s'obscurcissait à mesure de notre avancé à la fois limpide et rapide, à la manière d'un rêve. Cela contrasté avec la grâce qu'elle faisait preuve pour se mouvoir,sans le moindre effort , que ce soit pour elle  ou pour moi. Spectateur d'une traversée sans air, je profitais malgré moi de ce spectacle qui laisserait place bientôt à la souffrance.

Du sable se projeta lentement autour de nous lorsque j'atterris dessus , combien même elle n'avait pas été brusque. Elle semblait pressée, ne prenant pas le temps de plus communiqué avec moi, qui ne savait toujours pas ce qui animé avec autant d'entrain la jeune femme aux cheveux bleutés. Emprisonné vers un avenir incertain , je ne comptais pas rester passif même si cet endroit que je n'aurais jamais pu atteindre par mes propres moyens avait certains attraits. Moins lorsqu'elle avait décidé de maintenir mon sarcophage avec des griffes du même élément. Avec  incrédulité, je sentis mes écailles se réchauffer à l'un de mes mollets , comme si la glace venait d'y disparaitre à cet endroit précis.  Puis ce fut la douleur qui le traversa, me faisant serrer les dents , ne m'attendant pas à ce que l'on m'entaille.En même temps, que pouvait-elle bien vouloir faire sur cette parcelle de peau ?

-Glouglouglou.

J'aurai bien voulu qu'elle comprenne que je lui demandais ce qu'elle comptait faire mais bien sûr, rien d'assez audible sortit de ma bouche. Je devais donc , tandis qu'elle continuait à m'écorcher, calculer l'ordre de mes priorités. Je m'étais mis en danger pour une seule raison et elle se trouvait cachée dans ses formes féminines. Quand bien même je réussissais à sortir de cette prison glacée, comment j'allais devoir m'y prendre pour récupérer mon du ? En me montrant grossier ? Je rougissais légèrement rien qu' en imaginant la scène. Non, je devais trouver un moyen qui ne me demanderait nullement d'user de  bassesse qui nous mettrait plus mal à l'aise qu'autre chose, du moins, me concernant.

-Rrrrouglou.

Grognais-je, remuant tout en cogitant rapidement à ce qu'il m'était possible de faire sans atteindre à la pudeur de la sirène qui se trouvait derrière moi. Peu de choix s'offrait à moi et en aucun cas, ne garantissait leur succès. Que ce soit pour ma survie et de récupérer ce qui me tienne tant à coeur. Je soupirais intérieurement, priant le soleil, la lune et les étoiles de me porter chance dans mon entreprise, fermant les yeux un instant. Cela allait être ma dernière tentative, ressentant la fatigue ainsi que la détresse de mon corps manquant d'oxygène et qui par conséquent, amenuisé drastiquement mes forces. Prodiguer autant d'énergie à rester immergée  me faisait perdre la notion du temps , tout en m'étourdissant au passage. Dans un dernier élan, mon aura rougeâtre brilla  sentant les crépitements parcourir mon corps qui n'arrivait plus à bouger. Hormis ma tête. Je tentais de la balancer en arrière la  bousculer sans trop la blesser, elle qui allait peut-être me mener à ma perte sans que je connaisse son nom, en espérant que la sacoche tomberait et et que je pourrais m'en emparer avec mes dents.

Pouvoir:

Elle goûta alors le sang qui se répandait dans le sang. Quand elle réussit à sentir la saveur ferrugineuse sur sa langue, malgré son mélange avec l'eau et d'autres éléments qui y traînaient en suspension, elle fut déçue. Elle s'était peut-être trop attendue à une saveur de qualité supérieure, en comparaison de celle d'un être humain. Donc, un drakyn n'avait rien d'attrayant en termes de goût... C'était... comme de mordre dans du gras de baleine. Ah si ! il y avait un semblant de quelque chose qui mériterait d'être relevé, mais pour cela, elle devrait vraiment arracher un morceau et le mâcher en se retrouvant à l'air libre. L'eau n'atténuait que trop les papilles de sa langue. Ou alors.... Elle réfléchit un peu plus.

Pendant qu'elle entreprenait cela, afin d'avoir un retour plus positif, elle ne surveilla guère ses arrières. Sa longue queue, qui se mouvait lentement au-dessus d'elle pour la maintenir, ne se trouvait pas loin de la tête cornue du plongeur forcé. Elle se préoccupait plus de chercher la bonne manière de prélever un morceau du mollet que. Donc, ce qui se passa, fut qu'elle se prit un coup de corne, qui lui arracha quelques écailles du bas de sa longue queue. Autant la surprise que la douleur que cela engendra ne fut pas à son goût. Mais pas du tout ! Sourcillant, elle s'était écartée, regardant l'étendue des dégâts. La blessure s'étalait sur quelques centimètres, rien de bien grave, mais quand même ! Elle contourna le drakyn pour se mettre en face de lui et croisa ses bras sur sa poitrine, lui offrant une mine boudeuse, avant de fixer le bas de son long corps écailleuse. La coupure était visible et heureusement, ne saignait déjà plus. D'une main agile, elle retira la sacoche qu'elle agita sous les yeux de son prisonnier, avant de le déposer à quelques mètres de lui. Puis, d'un coup, sans prévenir, elle nagea à toute vitesse vers la surface. 

Elle revint quelques instants après, se replaça à nouveau en face de sa proie. On dirait qu'elle commençait à manquer cruellement d'oxygène non ? Prudemment, elle se rapprocha encore, gardant à l'oeil son front couvert de cornes. Elle ne tenait pas à recevoir un autre coup de tête. Ah tiens, il venait de lâcher des bulles. Elle sourit et en lâcha quelques-unes, comme pour se moquer de lui. Si elle était remontée tantôt, c'était pour emplir ses poumons d'air, mais si en soi, cela ne lui servait guère, vu qu'elle était Sirène. Là, ce sera juste pour prolonger un peu le jeu du chat et de la souris avec le drakyn. Il remuait encore de trop pour qu'elle puisse apprécier ou non un bout de son mollet. 

D'un coup, sans prévenir, elle se jeta sur lui, ce qui eut pour effet de le faire choir en arrière, malgré les attaches griffues invoquées par la Sirène ; l'eau, bien plus tempérée, avait débuté leur œuvre sur chacune d'elle. Malgré ce revirement, l'Aquarienne ne perdit pas de vue son objectif : ses lèvres rencontrèrent celle de l'aérien et après avoir écarté ses lèvres avec la force de sa langue, souffla de l'air. Un peu. Pas beaucoup. Juste de quoi prolonger un peu la lente suffocation. Après quoi, elle se retira et le regarda, avec un léger sourire. Elle attendit quoi.. Quelques dizaines de secondes ? Après quoi, sans prévenir, elle contraignit la glace à comprimer le torse du terrestre cornu de telle sorte que l'air qu'il pouvait encore avoir dans les poumons n'ait pas le choix de sortir par les voies respiratoires. Elle lorgna les bulles libérées qui remontaient vers la surface. Bien... au moins, cela paiera le coup de la corne sur ses écailles ! Allez, elle allait se montrer gentille... Elle réduit la prison de glace du Drakyn en une myriade d'éclats, qui fondaient déjà. Il était libre. Maintenant, sera-t-il capable de remonter à la surface, ou se préoccupera-t-il de la sacoche toute proche qui traînait dans le sable ? 

Mon dernier geste se solda par un échec , n'ayant ni pu me délivrer mon corps ni déposséder l'inconnue à écaille de la sacoche qui me causait ces troubles. Enfin, jusqu'à ce que cette même personne en un coup de nageoire reporte son attention vers moi et non vers ma jambe, les bras croisés en signe de mécontentement. Je suivis son regard sans cacher ma surprise en comprenant que j'étais à l'origine de la petite plaie sur sa partie la moins humaine. Je relevais un sourcil, comprenant bien qu'elle n'avait pas apprécié du tout que je l'égratigne alors que depuis un moment, elle m'infligeait bien pire à mon mollet. L'expression presque convaincante sur son visage me donna envie de m'excuser mais voilà qu'elle décida de m'abandonner seul au fond du lac laissant non loin de moi ce que je voulais tenir dans mes mains.

Alors voilà comment j'allais finir par disparaitre , me dis-je sans que cela ne me déçois ou ne me plonge dans la mélancolie. Ma vue troublée continua à me remémorer le jour où l'on m'avait offert ces billes que j'avais porté sur moi comme un bien qui me raccrochait à ces promesses faites il y a des années de cela. Je ne pouvais finir ainsi sans pouvoir atteindre certains de mes objectifs, ni briser ces engagements faits car ils comptaient sur moi , même s'ils avaient rejoint les étoiles. Je me tortillais encore et encore, sentant mes poumons bruler et mes pensées devenir floues, comme cette silhouette qui se rapprocha de moi. Mes yeux ne purent distinguer ses traits de suite, mais à mesure qu'elle se rapprochait, des sphères comme les miennes remontèrent sans que je ne comprenne qu'elle se moquait de moi.

Qui étais-ce déjà? J'avais l'impression de la connaitre mais à la fois, de ne pouvoir poser un nom sur celle qui n'avait pas de pieds. Presque étonné, je me rappelais fugacement notre présence ici et les yeux mi-clos, je fus surpris par sa charge qui fit vibrer mon corps par l'impact sur la surface de la glace. Au ralentis, je basculais en arrière , mais pas assez pour mettre de la distance avec ces orbes qui se rapprochaient encore et encore sans que je ne puisse rien faire , ne devinant nullement la suite qui fut plus douce que je ne l'aurai pensé .

Ses lèvres avaient rencontré les miennes sans que je ne puisse cacher ma surprise ni opposer résistance, à la fois tiraillé par la gène et l'incompréhension. Ce contact qui fut d'une douceur nouvelle, ce baiser était à la fois agréable et embarrassant comme jamais je n'avais vécu auparavant. Je fus à la fois tenté de la repousser et de poser ma main sur sa joue pour qu'elle m'octroie plus encore l'air qu'elle diffusait par nos bouches scellée l'une à l'autre. Mais ce ne fut de courte durée, assez pour que je ne suffoque plus et que je reprenne mes esprits. Visiblement, elle me narguait de  ne pas pouvoir naviguer dans les eaux sans avoir besoin de remonter à la surface régulièrement .

Mais pas seulement. Bien plus contrarié par ce que ma corne lui avait infligé que je l'aurais imaginé, elle resserra l'étau qui n'allait pas tarder à fondre complétement, m'obligeant à expulser des bulles sans pouvoir les retenir . Je les vis rejoindre la surface qui ne ressemblait maintenant qu'à un lointain qui ne m'était plus atteignable. Résistant à la pression en contractant les muscles de mon buste, je serrais les dents , ne pouvant abandonner.Même maintenant libéré de mon entrave que la sirène avait finalement laissé pleuvoir en de millier de morceaux scintillant. Je posais l'une de mes mains sur ma bouche, pour contenir et empêcher ce qui allait inévitablement arriver. L'aquarienne était restée là à m'observer, attendant que quelque chose se produise.

Pas la peine de détenir des pouvoirs pour lire dans les pensées pour deviner qu'elle n'allait pas rester les bras ballants longtemps. Je ne pouvais prédire ses futures actions mais au vu de ce qu'elle m'avait réservé jusque-là, autant se dire que cela ne présage rien de bon. Pris d'un regain d'espoir, poussé par  un acharnement qui m'avait toujours accompagnée même face aux épreuves qui paraissaient insurmontables, je n'allais pas me laisser abattre. Je me penchais pour soulever du sable afin de me protéger visuellement des yeux qui me paraissaient bien plus prédateurs qu'avant.

Il m'avait suffi de faire quelques brasses pour rejoindre la sacoche, m'en emparant et la gardant à ma bouche pour libérer mes mains afin de nager de façon optimum. Je voulus sortir des profondeurs mais au bout de quelques mouvements j'eus atteint ma limite, levant le bras comme si quelqu'un allait le saisir et me sortir de là. Comprenant que je n'y parviendrais pas, je serrais fort le petit sac au creux de mes mains que je plaquais contre mon coeur après l'avoir regardé une dernière fois. Les yeux mis clos, J'appuyais ce paquet de billes plus fort encore , me demandant si j'aurai la force de tenter quoi que ce soit si celle qui troublait ces eaux se rapprochait de moi. En suspend, mon corps à demi recroquevillé , je priais les astres et demandais pardon d'avoir été aussi faible, laissant les eaux investir mon être qui ne pouvait plus respirer depuis j'avais l'impression, une éternité.