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    Carl Sorince
    Carl Sorince
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    Info personnage
    Race: Humain
    Vocation: Guerrier assassin
    Alignement: Neutre Mauvais
    Rang: C
    qui suis-je ?:
    https://www.rp-cendres.com/t2350-le-serpent-et-ses-sanglots-termine
  • Dim 29 Sep - 15:46
    Ce n'était pas du fiel, qui suintait des paroles de l'Ange brisée. La méprise était possible, tentante… un esprit trop enclin à s'enflammer se serait sans doute laissé berner par la sécheresse régnant dans ses impitoyables yeux gris.
    Mais celui de l'être face à elle était aussi froid que la mort.
    Cet aveu, drapé sous des faux-airs de supériorité, empestait le désespoir. Bien sûr que les mortels naissaient, vivaient et dépérissaient, de génération en génération, sans l'affecter aucunement. Mais ils subsistaient, se multipliaient, recouvraient le monde entier, conquérant chaque jours de nouvelles étendues comme si tout leur était dû -puisque rien ne les en empêchait véritablement- tandis que les premiers servant des dieux, dispersés et humiliés, en étaient réduits à se mélanger parmi eux pour ne pas simplement disparaître. Le monde des rejetons divins se faisait dévorer par un défilé perpétuel de visages remplaçables et oubliables, prompts à s'effacer dans le temps…et si inoffensifs -frêles même- en apparence seulement, aux yeux des êtres frappés d'une jeunesse éternelle.
    N'existait-il pas pire humiliation que de perdre face à l'insignifiant?

    Il n'avait jamais connu la pitié envers quoique ce soit. Son esprit retors, calculateur, était façonné autrement. Mais à l'entente de ce pénible requiem, cette ôde à la solitude éternelle, Carl se surprit à ressentir un soupçon de sympathie à l'égard de la créature d'un autre âge. C’était comme découvrir un tableau ancien à la toile dévorée par la vermine et ne pouvoir qu’imaginer la majesté ayant un jour été la sienne.
    Comme quoi, même les immortels subissaient une forme de dégénérescence, avec les âges.
    Alors, lorsque la question vint. Que l’Ange posa le gris de ses yeux sur l’éphémère qui l’escortait, Carl -en répondant- ne se laissa pas même tenter par la mesquinerie.
    Pas par pitié. Pas par sympathie.
    Mais parce qu'en cette enveloppe meurtrie, aux ailes arrachées, balafrée jusque dans sa psychée…
    Le serpent ne voyait plus rien à briser.
    “-J'étais curieux.” Avoua-t-il en faisant preuve d'une honnêteté aussi peu coutumière que l'air sérieux ancré sur son visage trop pâle. “Je voulais obtenir un aperçu de l'immortalité.” Un sourire étrangement triste se manifesta à la fin de sa phrase. Indulgent, il évita le regard gris pour épargner à sa propriétaire l'infime indice de commisération qui suintait du sien. Satisfait, le mercenaire fit volte-face pour se diriger vers la sortie. “Merci à toi, pour avoir confirmé mes soupçons.

    ***

    Les secousses de la caravane s’étaient réduites dès lors qu’ils avaient quitté les montagnes enneigées pour approcher la frontière Reikoise. Lentement, le froid avait cédé sa place à une moiteur plus que bienvenue pour les articulations de tous, qui s’était ensuite elle-même effacée face à l’irruption brutale de la plus assommante chaleur.
    Le Reike. Même le paysage s’arrangeait pour être désagréable dès les premiers instants.
    “-Un peu moins de deux jours. On traverse juste la province de Kyouji.” Déclara Darius en quittant des yeux la route pour se tourner vers l’Ange sans ailes, à l’arrière du véhicule. “Ce n’est pas vraiment un désert, même si on y crame tout aussi bien. Le lac est trop proche.
    -Ah, Kyouji.” Répéta pensivement Ferg’ en usant de ses mains comme d’un oreiller improvisé sur lequel il déposa sa tête blonde dans une attitude un peu trop détendue pour l’occasion. “On aurait pu plus mal tomber. C’est la plus républicaine de toutes les villes Reikoises.
    La caravane négocia un virage un peu serré entre deux dunes et l’air serein du négociateur de la bande se volatilisa alors que le bleu de ses yeux découvraient un barrage de contrôle, au loin, encadré par quelques brutes aux épaules trop larges. Darius jura en lâchant les rênes pour effleurer le sabre à sa ceinture.
    A l’arrière, Carl mâchonnait la dernière pomme de leur réserve en écoutant les interrogations de Siame, une fossette au coin de la joue et un rire dans le regard comme seuls témoins de son amusement. Evidemment, l’échéance approchait. L’ange brisée s’imaginait déjà ses protecteurs du moment se transformer en une nouvelle menace, sitôt arrivés à bon port.
    “-T’en fais pas cocotte.” Lâcha-t-il, une fois sa bouchée engloutie. “La seule rémunération que je souhaite, je t’en ai parlé avant qu’on ne t’embarque. Personne s’attendait à ce que tes poches débordent d’or, paumée que t’étais au milieu des moines et des lâches…Si y’a jamais eu une différence entre les deux.” Le trognon quitta sa main pour rejoindre le sable chaud et il se pencha vers le bambin dans les bras de l’Ange pour vérifier son état. Miracle ou malédiction, l’engeance inutile et bruyante respirait encore et semblait suffisamment en forme pour pousser trop souvent d’innocents et agaçants gazouillis. “Ma foi, j’imagine qu’ils ont des orphelinats en république. Ils risquent d'être foutrement bien garnis, d’ailleurs, s'ils se décident à accueillir tous mes anciens compatriotes.” Ses sourcils s’arquèrent alors que les mirettes voilées par la fatigue du gosse émergeant de sa sieste se posaient sur l’homme au-dessus de lui. Carl lui attribua un grand sourire et, sans cesser de le regarder, poursuivit : “Et si tu ne veux pas te fatiguer davantage, une fois chez les bleus…souviens-toi que je t’ai filé un couteau.
    -Patron.
    L’interruption ne souffrit d’aucune remontrance. L’attention du concerné quitta le nourrisson rescapé et sa fausse-mère pour scruter par-dessus l’épaule du conducteur de la caravane.
    Ils étaient neuf. Peut-être dix. Dont deux écuyers aux fronts plissés, occupés à nourrir les destriers de leurs maîtres. L’un d’eux coiffait un heaume richement orné, dont les dorures sur sa surface d’acier représentaient les astres vénérés de la stupide religion reikoise. L’officier, sans le moindre doute. D’un mouvement de menton à peine perceptible, il désigna le véhicule à l’arrêt et ses hommes s’approchèrent telle une meute de loup, leurs mains posées sur le pommeau de leurs trop nombreuses armes, fort heureusement encore au fourreau.
    Pour l’instant.

    “-Des voyageurs, des vivres et de quoi se défendre.” Marmonna Darius en sautant de son poste pour rejoindre le plancher des vaches, les bras levés en signe de paix. “C’est tout ce qu’on transporte.
    -On verra.
    Fergusshon imita son comparse en attribuant une petite révérence au garde s’approchant pour le fouiller. Trois autres le contournèrent pour rejoindre l’arrière du véhicule.
    “-Messieurs.” Les salua Carl en poussant la toile pour s’extirper à son tour de son refuge. “J’ai bien peur que nous soyons surtout en possession de mauvais souvenirs.
    Son manteau, roulé en boule au fond de la caravane, il l’avait retiré sitôt la frontière franchie. Ses épaules osseuses uniquement couvertes par une chemise de lin et un veston sombre de faible facture donnaient à sa silhouette une allure famélique se prêtant bien au contexte du moment.
    Si les soldats y accordèrent le moindre crédit, aucun ne le laissa transparaître.
    “-Faites attention au p’tit, les gars.” Siffla le Serpent, la voix tremblante d’une fausse inquiétude alors qu’un poing caparaçonné se refermait sur la poignée de Miséricorde pour la tirer de son fourreau.
    “-Joli cure-dent.” S’amusa la brute venant de le fouiller. “Tu comptais tuer un moineau avec ce truc?
    Carl acquiesça.
    “-C’est plus un souvenir qu’une vraie arme.
    -Je confirme.” Le rire gras de la brute dura un peu trop longtemps pour que son interlocuteur récemment délesté de sa seule arme n’éprouve pas un minimum de mépris à son égard. Mais la hachette à sa ceinture, ainsi que l’armure de de plate d’une dizaine de kilos qui le protégeaient l’encouragèrent à rester courtois jusqu’à ce qu’il ne lui rende la dague.

    “-Pas de réfugiés à Kyouji, alors?” S’apitoya Ferg’, une fois débarrassé de la corvée de fouille. “Pas même si ils sont agréables?
    L'officier au casque clinquant s'approcha sans daigner montrer son visage.
    “-Nous préférons les gens agréables et reikois. Navré.
    Malgré le fait que sa voix ait été étouffée par sa coiffe intégrale, Ferg n'avait eu aucun mal à déceler la moquerie qui accompagnait cette déclaration. Le bellâtre sourit au petit chef -qui le dépassait de facilement trois têtes- et recula d'un pas lorsque ce dernier le contourna à son tour pour rejoindre l'arrière.

    “-C'est qu'elle est pas commode, la petite dame !” Gronda le garde face à la mère et son fils. Il écarta les mains et salua cette dernière en ricanant grassement. “Ouai, même les reikois ont des manières, on ne voulait pas vous vexer !
    L'un de ses camarades sortit la tête de la caravane qu'il venait de fouiller pour se gausser à son tour.
    “-Fais gaffe, à tout moment le père débarque pour te casser la gueule.
    Court silence. Les trois imbéciles rirent méchamment.
    Avant de se redresser promptement pour présenter un garde-à-vous approximatif à l'approche de leur chef.
    Il était le parfait exemple de l’officier Reikois. Un guerrier large d’épaule, au port altier et à l’armure sombre couverte de titres honorifiques. La lame qui battait son flanc possédait un pommeau en argent représentant une tête de loup et Carl soupçonnait que ledit ornement était la raison pour laquelle il tenait son arme par la poignée plutôt que la main posée sur le pommeau, comme la plupart avait coutume de faire.
    “-Qu'y-a-t'il donc de si drôle ?
    Le plus épais du trio à l'arrière poussa sur la visière de son heaume pour présenter un visage rougeau couvert de sueur à son chef.
    “-Rien, Luteni.
    -Tant mieux.” Continua ledit Luteni d’un ton impérieux. “Sont-ils en ordre?
    -Autant que des réfugiés puissent l’être, Luteni.
    Le heaume doré passa de l’ange au chef de bande et un souffle suffisant ponctua son observation.
    “-Nous ne pouvons pas ouvrir nos portes à tous les pouilleux de Shoumeï.” Grinça l’officier en se détournant déjà. “Mais les FMR ont monté un camp pour les nécessiteux. Vous pourrez vous y reposer avant de rejoindre Liberty.
    Un ordre aux airs d’invitation auquel Carl consentit d’un hochement de tête, avant d’inviter Siame à remonter à bord de la caravane.

    A cinquante mètres de là, allongé au sommet d’une dune de sable, Alexey poussa sur ses coudes pour se laisser glisser en contrebas, où Slick, Mila et Joshua l’attendaient, leurs fronts unanimement plissés par une inquiétude n’ayant cette fois rien de feinte.
    “-Alors?” S’enquit la tueuse, sitôt le pestiféré redressé.
    “-Ils sont passés.
    Un concert de soupirs de soulagement plus tard, le groupe embusqué rengaina ses lames et déboucha ses gourdes. Ils se désaltérèrent prestement, avant de porter leurs regards sur le ciel sombre dominant le mont Kazan qui jamais ne cessait de gronder.
    “-On les suit de loin.” Ordonna Alexey. “On les rejoindra dans la nuit si tout se passe bien.

    Dans son immense mansuétude, le Reike, occupé à gagner la guerre en Shoumeï, avait donné aux fuyards du pays conquis le droit de se reposer aux pieds des remparts extérieurs de Kyouji. Le FMR y passait deux fois par semaines, pour soigner les blessés et les malades ou emmener les cadavres avant qu’ils ne déclenchent une épidémie. C’était une forêt de tentes et de caravanes dressées parcourues d’autant de silhouettes voûtées par la défaite et la tristesse que le deuil d’un pays entier avait rendu amères et promptes à la querelle. Du haut des murs, la garde reikoise observait l’héritage d’un peuple brisé réclamer nourritures et soins à leurs bourreaux en faisant preuve de la froideur coutumière de l’empire belliqueux.
    Pour Carl et ses Sanglots, il n’existait pas de tableau plus pitoyable que celui-ci. L’histoire retiendrait que ce camp ne serait que la première des centaines d’humiliations que le monde réserverait par la suite à un peuple orphelin. Et pour le Reike, ce n’était qu’une preuve supplémentaire de son évidente supériorité, puisqu’en plus d’être victorieux, il offrait asile, soin et nourritures aux défaits.
    Ils s’arrêtèrent aux abords du camp en milieu d’après-midi. Les gardes les abandonnèrent sur place, pressés de quitter ce lieu avant que la faiblesse de ses occupants ne les contamine.
    “-Je crois que je préfère encore les cannibales et les pillages.” Pesta Ferg’ en descendant d’un bond.
    Personne ne daigna le contredire.
    “-Nourris les bêtes. Laissons-les se reposer un peu.
    Darius acquiesça en se laissant glisser à son tour. Et Carl se tourna vers Siame avant de descendre.
    “-Nous partirons dans la nuit, à la fraîche.” Lui confia-t-il. “En attendant, méfies-toi de tout et tout le monde ici.
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    Siame
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    Race: Ange
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    qui suis-je ?:
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  • Mar 15 Oct - 20:24
    Depuis combien de jours voyageait-elle avec eux ? Trois, maintenant. Peut-être quatre. Elle avait oublié de compter : pour elle, ils défilaient les uns après les autres, sans fin. Les conseils de Carl continuaient de résonner dans son esprit—pas qu’il avait fallu être un génie pour se douter que faire confiance à qui que ce soit ici était une idée de con. Mais depuis son retour, depuis que sa chair était redevenue chair et non marbre, elle reprenait tout juste conscience de la réalité de sa propre fragilité. Si son statut, à l’époque, lui avait permis de manœuvrer dans ce Monde sans véritable crainte, la vénération des Hommes pour sa race s’était doucement éteinte au fil des années. Elle réalisa alors que l’absence de ses ailes fut, peut-être, une bénédiction. Mais de là à se voir renier entièrement ses origines… L’Ange en était parfaitement incapable.

    Siame était descendu à la suite du mortel, sa cape blanche ondulant dans le vent hivernal. La nuit, même dans le désert, gardait toute sa fraîcheur. Ses bras s’étaient resserrés autour de l’enfant. Elle toisait les réfugiés, tout autour d’elle—sans être capable de se sentir véritablement à sa place. Son regard gris détaillait chaque tête, jugeait la maigreur de leur visage et l’abattement sur leurs épaules. Emmitouflés dans leurs haillons, ils se serraient les uns les autres à la recherche de la moindre chaleur. Elle aurait voulu éprouver de l’empathie pour eux et leur situation, mais la chose lui échappait. Peut-être que dans le lot, certains croyaient – secrètement – être encore en vie grâce à une faveur divine. Que leur sort avait été mérité : puisque les Titans n’avaient jamais été miséricordieux. L’Ange supposait sans grande difficulté que la majorité d’entre eux leur vouaient une haine profonde—et que la plupart désiraient simplement survivre et débuter une nouvelle vie : loin de leur Shoumei, cherchant à fuir un passé dont ils ne voulaient plus.

    Elle déambulant dans les rangs, empruntant le même chemin que Carl, sans vraiment le suivre, ni vraiment s’en éloigner. Quelques regards démunis se levèrent sur son passage, et parfois, certains d’entre eux – des femmes, pour la plupart – lui offraient des sourires compatissants en voyant l’enfant dans ses bras. Siame s’était contenté de le serrer plus fort contre sa poitrine, en guise de réponse—refusant de se laisser attendrir ni par leur sympathie, ni leur misère. Parce que dans les situations les plus difficiles : lorsque la faim devenait la préoccupation principale, on ne rechignait jamais à faire couler le sang, et on préférait encore sauver sa peau que celle des autres. Les Titans pour tous, chacun pour soi. Et l'Ange n’avait jamais été différente, sur ce sujet-là…

    On l’avait vu venir s’installer à côté du mortel, tranquillement. Curieusement. Ce n’était pas réellement son genre de chercher la compagnie des autres – encore moins celle des mortels – à moins qu’elle n’ait quelque chose à y gagner. Elle ne lui faisait pas plus confiance à lui qu’à un autre, mais la vérité était que seule, parmi les Eux – maintenant qu’elle était ce qu’elle était – elle ne survivrait pas. Carl l’avait compris bien avant elle : il était né de ce Monde, à cette époque, et les Hommes avaient toujours mieux su s’adapter. Et ainsi, il avait recueilli ses Sanglots.

    Ne crois pas que je ne me méfie pas de toi. Elle s’était assise sur le banc, près du feu, les joues glacées par le froid nocturne. Je ne te fais toujours pas confiance, mais je fais confiance à ton jugement. D’une main, elle dégagea le lange le visage du bambin qui dormait profondément.

    Elle passa le bout de ses doigts lavés – car elle n’avait pas trouvé un moment seule depuis le début de son aventure pour se perdre à ses manies noires ; il y avait des choses trop intimes pour être partagées en public – sur le contour de la joue de la petite chose dans ses bras. Siame insuffla sa volonté jusqu’à que ses mains se réchauffent et qu’une forme de magie ancienne s’infiltre à travers la peau du bébé somnolent—jusqu’à percevoir une palpitation sourde. Un secret, un murmure : celui de son inconscient. Carl comprenait certainement ce qu’elle était en train de faire.

    J’aime qu’il n’y ait rien à voir, quand je cherche dans ses souvenirs. Seulement du vide, seulement le néant. Juste une page blanche. Car l’enfant mortel était encore trop jeune pour permettre à sa psyché de former un véritable récit de ses mémoires. Tout à construire.

    Et le mercenaire se trompait, s’il pensait que chez Elle, il n’y avait plus rien à briser.

    As-tu des enfants, Carl ? Elle le demande, les yeux toujours vagues, perdus sur le visage de l’enfant. Sans véritablement attendre la réponse – puisqu'il avait esquivé chacune de ses questions jusque-là – elle continue : J’en ai eu un, il y a longtemps. Mort-né.

    Siame le disait, comme on annonçait un bulletin météo. En vérité, elle n’avait rien eu du tout—pas plus d'enfant qu'elle n'avait un jour été mère. Et ses lèvres s’étaient étirées, et elle avait fini par échapper un rire, douloureusement sincère. Elle songea à Malazach. Au cadeau qui lui avait fait. Pour n’importe qui d’autre, cela aurait certainement été un présent empoisonné. Pas pour Siame. Si elle ne pouvait avoir son enfant, alors, X’o-Rath non plus. Hors de question. Peut-être que c’était pour cette raison que sa voix ne tremblait pas, lorsqu’elle le disait. Qu’on ne pouvait réellement y percevoir la moindre tristesse.

    Notre progéniture est notre seule éternité, en vérité.

    Elle ne lui avait rien confié sur l’immortalité, plus tôt dans la journée—pas vraiment.

    Mon corps ne subit pas le temps de la même façon que le vôtre, c’est vrai. Mais ça ne me rend pas plus éternelle. Et si personne n’a encore pris ma vie ; lorsque l’on découvre que la férocité de ce Monde ne connaît aucune limite, on découvre par la même occasion que notre capacité à supporter la souffrance en a bien une : limite.

    Elle en avait fait l’expérience, avait un jour essayé de se prendre la vie, tandis qu’on lui prenait ses ailes. Elle avait échoué, et passé les 5 000 années suivantes à regretter sa faiblesse. Mais alors, on se découvrait de l’espoir—on se décidait à enterrer sa vulnérabilité et à se fortifier contre ses propres sentiments. Siame n’en avait jamais parlé : n’avait jamais évoqué la moindre de ses épreuves à qui que ce soit—avait toujours refusé de s'apitoyer sur son sort.

    Jusqu’au moment où, pour survivre, on finit simplement par apprendre à rire de cette souffrance. Son regard s’attarda sur la dague pendue à la ceinture du mortel, puis à nouveau sur l’enfant. J’y ai pensé, tu sais ? Ce serait plus simple de le tuer et de lui éviter bien des épreuves. Mais… Je n’en éprouve pas réellement l’envie. Ça n’a plus beaucoup de sens, désormais. J’imagine que c’est ce qu’il se passe quand même la souffrance des autres nous amuse. Avec le temps, on se laisse aller au cynisme, puis à l’insensibilité... Et à l'ennui.

    Et il y avait, pour l’histoire de l’humanité, une forme de défaite à cette réalité. On se demandait si ça valait véritablement le coup de résister, de survivre, à ce prix, lorsqu’on les regardait, Elle ; lui ; les Sanglots. Chez Siame, cela se présentait dans sa dureté impitoyable—chez Carl, dans ses prédispositions moqueuses. Elle s’expliquait alors l’équanimité qui auréolait le mortel : l’impression qu’il lui donnait de porter en lui l’immobilité indissoluble des territoires vastes, encore inexplorés, réduisant à l’humilité quiconque prétendant les explorer. Elle redressa les épaules et se tourna en direction de Carl, pensive. Et l’Ange avait eu pour lui un regard plus incisif.

    Je connais l’histoire de chacun de tes Sanglots. C’est lui-même qui lui avait raconté, "leurs ailes arrachées"—sans le moindre égard, ni la moindre pudeur pour eux. Elle avait eu un sourire vaguement amusé, tandis qu’elle tendait la main vers lui, lentement.

    Je suis curieuse aussi. Montre-moi. N’importe quoi : peu importe le souvenir, celui que tu souhaites. Laisse-moi confirmer mes propres soupçons à ton sujet…


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