La curiosité d'Ellana jusqu'ici éteinte par le travail, s'éveilla lorsque Tagar lui raconta les péripéties lors de sa première monte d'un griffon. Elle était loin d'imaginer cet homme si soigné en pleine action. Toutes ces informations si soudaine lui en donna presque des frissons, elle était si attentive que lors de l'équipement, elle ralentit ses mouvements. Il avait donc été témoin, et même acteur, d'évènements principaux autour de ce fameux attentat il y a 4 ans.

"Tout cela est fascinant… J'ignorais que vous aviez joué un rôle dans le Temple. En tout cas, il est bon pour vous d'avoir déjà la capacité de monter un griffon. Et qui plus est, si vous avez le goût pour le vol."

Sur ces mots, ils terminèrent la mise en place de l'équipement. Avant de monter, Tagar demanda pourquoi Ellana avait rejeté son aide. Elle fut surprise qu'il posa la question, sûrement prit-il le refus à cœur pour, aujourd'hui, en parler. Soudain gênée d'avoir prit cet évènement de manière anodine, elle tint à s'expliquer.

"Ce n'est pas contre vous, nous nous connaissons à peine et je préfère m'occuper de ce qui me concerne. Mais le geste est respectable. Je suis désolé que vous l'ayez prit personnellement."

Il y eut un bref échange sur ces excuses, puis Tagar monta en selle. Il fit quelques tours au pas autour d'Ellana. Elle vérifia les réactions du griffon avant d'observer Tagar. Durant ce petit entraînement, elle revint sur le récit précédent.

"Vous aviez parlé d'un possible détournement d'argent. Qu'en est-il ? A moins que vos soupçons étaient infondés, lors de l'expédition au temple, la créature n'aurait pas pu être à l'origine d'un complot."

Maintenant rassurée au niveau du griffon, Ellana était plus concentrée sur la conversation que sur l'exercice. Finalement Tagar semblait être plus pertinent qu'un simple noble tenant à entretenir son image. Il détenait des informations intéressantes et avait l'air d'être généreux sur celles-ci.

J’ai de toute évidence impressionné la dresseuse par mes exploits, ce qui me fait très plaisir. Mon éducation m’a toujours appris à ne pas me vanter, mais je dois bien avouer que j’adore cela. En plus, il est vrai que j’ai bien aidé pour l’enquête. Elle m’explique ensuite qu’elle a refusé mon aide, car elle se le joue perso, refusant tout réconfort, elle s’excuse et je la rassure en lui souriant :

Pas de problème pour moi, j’aide tous mes compatriotes, que vous soyez jeune, jolie et elfe, n’entre pas en ligne de compte.

Je monte ensuite en selle et je réussis à me faire comprendre de Lancelot, qui semble aussi impatient que moi de voler à nouveau. Elle me pose ensuite des questions sur les événements d’il y a quatre ans et je lui indique, car c’est de l’histoire ancienne :

Il y a bien eu un détournement, une personne a profité du chaos ambiant pour voler des sacs d’or. Le coupable a été traduit en justice et est devenu janissaire. Maintenant que l’esclavage a été fortement réduit, j’avoue que j’ignore ce qu’il a pu devenir. Au Temple, nous avons découvert la personne qui était derrière l'attentat manqué, mais le couple impérial préfère que les détails de cette histoire demeurent confidentiels, je ne peux malheureusement pas vous les dévoiler.

Ce fut un sacré sac de nœuds dont je ne suis pas sorti indemne, j’ai quand même été condamné à verser une grosse amende, complètement injustifié d’ailleurs et c’est depuis cette époque que je me suis lentement détachée d’Ayshara. Je pensais que l’Impératrice était parfaite et maintenant, je sais qu’il ne s’agit que d’une personne certes superbe et très intelligente, mais aussi faisant des erreurs, comme n’importe quel être vivant sur le Sekaï. Je pense que je suis prêt à m’envoler et je demande à mon accompagnatrice :

Vous venez avec nous ?

Oui, je suis prudent, si le griffon commence à faire des siennes, je préfère avoir une personne expérimentée avec moi.

Aux compliments dissimulés de Tagar, les joues d'Ellana prirent un teint rosé et des fleurs de Mimosas Pudique poussèrent sur le côté droit de sa chevelure. Elle plaqua sa main dessus avant de les arracher en vitesse, gênée de leur apparition. Quiconque reconnaîtrait cette fleur rose, saurait que son surnom est "la Timide". L'apparition de fleurs autour de ses cheveux, pour beaucoup était un mystère, mais pour elle, elle savait qu'elles traduisaient ce qu'elle ressentait.
Elle ne fit mine de rien pour la suite.
Il était certes bel homme et avait un côté charmeur mais Ellana n'aimait pas se laisser vaquer aussi facilement aux tendresses et aux charmes comme cette infirmière de tout à l'heure avec le soldat.

Toujours en selle, Tagar répondit à la question de la jeune femme. Rien de bien nouveau si ce n'est l'obstacle de la confidentialité. La curieuse ne fit que hocher la tête sans plus insister bien qu'elle ne soit pas satisfaite. Une question lui restait en tête mais elle la garda pour plus tard.
Après les quelques tours, le cavalier arrêta sa monture pour proposer à la demoiselle de monter avec lui avant de passer au vol. A nouveau surprise, elle haussa les sourcils, ne s'attendant pas à devoir chevaucher avec lui.

"Serait-ce une proposition de balade ou bien vous n'êtes pas confiant sur la situation ?"

Dit-elle haussant un sourcil avec un sourire en coin, l'air sarcastique. Bien que toujours sympathique, Ellana restait inflexible et professionnelle. Si Tagar venait à se plaindre de l'insécurité de l'exercice, elle lui rétorquerait qu'elle contrôlerait sûrement mieux la situation depuis le sol, à condition de rester aux alentours. En l'absence d'arguments valables et solides, elle ne désirait pas forcément se coller à lui.
Entre temps Lancelot commencera à s'impatienter et à montrer des signes évident de vouloir prendre l'envol.

De toute évidence, mes observations, que certains pourraient penser être des compliments, font un effet bizarre à la jeune femme, car des plantes poussent sur sa tête ! Je ne lui fais pas de remarques dessus, car elle les arrache en vitesse. Elle me pose ensuite une question un peu bizarre, mais je ne me laisse pas démonté pour si peu :

Je suis désolé, mais je ne propose pas de balade aux personnes qui travaille. Personnellement, moi, je peux, car j’ai pris ma matinée, je ne reprends mon job qu’à partir de treize heures, sauf urgence bien évidemment. Donc, c’est un manque flagrant de confiance en mes capacités, je le confesse sans aucun problème et…

Je suis interrompu par l’envol de Lancelot, qui ayant décidé que la situation a assez duré, c’est envolé. Je me retiens de toutes mes forces à la selle, ayant complètement lâché les rênes. Je vois qu’il est rapide, très rapide, bien plus que les griffons que j’ai déjà montés et il me faut un peu de temps, avant de desserrer ma prise et de prendre timidement les rênes. Cela est loin d’être facile, car si je chute, je meurs à coup sûr.

Je vois que ma monture reste à proximité de la base et j’ai toujours la dresseuse en vue, ce qui me rassure. Je ne sais pas ce qu’ils échangent, mais au bout d’une vingtaine de minutes, je prends un peu plus confiance en moi et j’arrive finalement à le faire descendre, dans son enclos. Il soulève un nuage de poussière, mais ce n’est pas bien grave. Le pire, c’est ma coupe de cheveux, je n’ai pas eu le temps de mettre convenablement mon casque et j’ai les cheveux en pétard, ils ne ressemblent plus à rien.

Je descends prudemment de Lancelot, les jambes encore un peu tremblotantes et je dois m’appuyer sur la barrière pour ne pas tomber. Toutefois, je reste conscient et je demande à Ellana :

Est-ce que je m’en suis bien sortit ? Je n’ai pas été trop ridicule ?

Lancelot perdit patience et Ellana fut tout aussi surprise que Tagar. Elle ne tenta pas directement d'arrêter le griffon afin de pouvoir observer les capacités de Tagar. Elle avait apparemment plus confiance en ses compétences que lui même, puisque malgré la surprise et la vitesse, il se maintint assez bien et reprit le contrôle aussi vite.
Avant que Lancelot n'emporte trop loin le pauvre cavalier, Ellana lui indiqua de rester autour et de ne pas faire trop des siennes. Elle apprit par le griffon que celui-ci voulait s'amuser et tester son nouveau maître. Finalement, en plus de s'avérer têtu, Lancelot était un petit malin.

Lors de leur atterrissage,  tout en se secouant et en battant des ailes, le griffon souleva un nuage de poussière dont Ellana se protégea en levant le bras jusqu'à son visage. Se fut une arrivée théâtrale plutôt épique. En revanche Tagar descendit de manière plutôt fébrile et manqua même de tomber avant de s'appuyer sur une partie de l'enclos la plus proche.
Soucieuse de la tournure des choses, Ellana se précipita vers lui.

"Vous allez bien ? Vous n'avez rien ?"

Puis, une fois rassurée, elle se mit à rire. Même si elle ne se trouvait pas sur le griffon, elle avait prit peur et avait manqué de perdre son sang froid. C'est donc les nerfs relâché, qu'elle se laissa rire.
Elle rassura néanmoins Tagar qu'elle ne se moquait pas de lui.

"Ne vous en faites pas, si vous êtes en vie c'est que vous vous en êtes sorti. Lancelot vous a testé apparemment et il est satisfait du résultat."

D'un mouvement naturel et pour rassurer Tagar sur la crainte d'avoir été ridicule, elle frôla ses cheveux pour baisser les épis les plus évidents. Ce fut court et au contact limité, ne tenant pas à tendre vers la familiarité et l'impolitesse.

"Ça va, je pense qu'on ne peut pas faire plus prestigieux quand on est dans l'imprévu."

Elle fit signe au griffon de se rapprocher avant de le tapoter, le dépoussiérant au passage. Puis il partit de lui-même s'hydrater à l'abreuvoir. Ellana reprit donc la conversation avec Tagar.

"Et vous, Qu'en avez-vous pensé ?"

En fonction de la fébrilité du nouveau détenteur du griffon, Ellana proposera de faire une pause histoire de reprendre ses esprits ou bien pour altérer leur soif.

Ellana, au début inquiète, se moque très vite de mon état pas très assuré, il faut bien l’avouer. Elle emploie une formule très philosophique, comme quoi j’ai réussi, car je suis en vie, une vraie lapalissade. Elle m’informe ensuite qu’il s’agissait d’un test de la part de ma monture et je dois dire, que ce n’est pas très gentil. Elle me surprend ensuite en me recoiffant puis s’occupe de Lancelot, qui est pas mal couvert de poussière.

Pour ma part, je quitte l’enclos, afin de m’asseoir sur un banc fixé à une table et je sors de ma veste, une flasque d’alcool, pour en boire une gorgée, cela me détend toujours. Quand la dresseuse me rejoint, je lui tends d’abord la flasque :

Vous en voulez ? C’est de l’alcool de cerise.

Je ne rajoute pas qu’il s’agit d’une cuvée de luxe, ne voulant pas qu'elle pense que je suis une peronne vaniteuse et je réponds à sa question :

J’ai beaucoup aimé, même si j’avoue que j’ai eu peur au début. Je pense avoir bien compris sa manière de voler et la prochaine, ce sera encore mieux. Si vous avez des conseils, je suis preneur.

Je l’écoute attentivement, sortant même une tablette en argile de ma besace qui ne me quitte jamais et je crée avec ma magie un stylet pour tout noter. Une fois qu’elle a terminé, je lui indique :

Je vais enlever les équipements de vol de Lancelot, puis le brosser et faire son entretien. Je pense qu’il sera l’heure du midi quand j’aurais terminé. Que pensez-vous de déjeuner ensemble ? Je connais un petit restaurant juste à côté d’ici, qui fait des plats de la cité de Melorn et ils sont excellents.

Je ne sais pas si la jeune elfe vient de cette ville, mais je tente au cas où. Cela nous permettra de faire connaissance et je suis curieux de savoir où elle a acquis tant de connaissance sur les griffons.

Lorsque Tagar quitta l'enclos, Ellana le suivit tout en surveillant son état. Jusqu'ici tout allait bien, il prit place assez aisément à une table proche. L'elfe resta debout un court instant, pensant qu'ils allaient reprendre d'ici peu puis elle se ravisa voyant que Tagar comptait prendre le temps. Il sortit une flasque et prit une gorgée. Ellana prit place en face de lui et elle se vit proposée de cette boisson qui était apparemment de l'alcool de cerise.
Elle haussa les épaules, c'est vrai que le travail était terminé et qu'elle pouvait se détendre également. Elle le remercia et prit une petite gorgée. Fruitée, légèrement boisée et relativement sucrée, cette boisson parfumée était clairement de la qualité.
Elle fit remarquer l'excellence de cette liqueur et demanda où se l'était-il procuré.

Après ce bref échange autour de l'alcool, ils revinrent sur le sujet du griffon. Elle l'avait interrogé sur son ressenti pour cette première fois. Il fit part de ses pensées et de son optimisme avant de demander des conseils pour l'avenir. Ellana insista sur l'attention que l'on doit porter à sa monture, elle prit l'exemple de l'impatience qu'avait ressentit Lancelot, plus tôt. Puis elle énuméra des points qu'elle avait déjà évoqué auparavant tout en mettant en garde de ne pas prendre pour acquis ce qu'il pensait maîtriser.

Une fois les conseils notés, Tagar prit les devants en annonçant qu'il allait s'occuper de l'entretien du griffon. Pour Ellana, l'entretien des animaux relevait de ses fonctions, son travail à elle était terminé. Même si elle en était bien capable, elle jugea bon de laisser Tagar s'en occuper, histoire que le lien maître et familier se consolide. Elle proposa tout de même de l'aider en défaisant l'équipement.
Avant de s'y mettre, Tagar suggéra qu'après le pansage, ils pourraient déjeuner ensemble.
Ellana s'apprêtait à refuser l'invitation lorsqu'il fit notion de Melorn. Elle eut un pincement au cœur, son village était si proche de ces lieux et cela faisait quelques années déjà qu'elle n'y avait pas été. Elle lui répondit en restant vague et en oubliant presque la notion de repas.

"Melorn ? C'est... Enfin, ce n'est pas à côté. Cela fait une sacrée trotte."

Puis elle se reprit, faisant un mouvement de main effaçant cette image. Elle s’esquiva toujours. Elle se préparait à sortir une excuse comme quoi "il était une personne importante" et qu'elle "n'allait pas prendre de son précieux temps". Mais elle se ravisa et se dit que c'était une bonne occasion pour en découvrir d'avantage. Que ce soit sur lui ou des sujets confidentiels.
Elle s'accouda à la table et posa son menton sur sa paume.

"Comme vous souhaitez Sir Tagar. Au vu de votre sens du goût sur la boisson, je suis sûre que vous avez une bonne adresse en tête."

A la fin de l'échange, ils retrouvèrent le griffon afin de s'en occuper. Ellana le débarrassa de son équipement avant d'aller le ranger et Tagar se chargerait du pansage. Une fois déchargée de toutes obligations, elle irait voir auprès de ses pairs si elle n'a pas de missions pour le reste de la journée et il s'avéra qu'elle était libre.

La jeune dresseuse me demande où j’ai acquis cette boisson et je lui indique qu’elle provient d’une petite exploitation située sur les bords du lac Rebirth, juste sous la jungle. Elle me parle ensuite de Melorn et je hoche la tête, la cité elfique est à l’extrême nord et à pas mal de jour de voyage. Nous pouvons ensuite nous occuper sereinement de lancelot, je prends un soin particulier à ses plumes et à sa santé et c’est donc d’excellente d’humeur que nous le quittons. Il pourra ainsi se reposer un peu et je reviendrais le voir ce soir, comme je lui avais promis.

Nous n’avons plus qu’à partir au restaurant, je détonne un peu avec mon armure de cuir et mes cheveux en bataille, mais il ne s’agit pas d’un restaurant très sélect et la vieille elfe qui tient l’établissement, m’accueille avec le sourire :

Tagar, nous sommes ravis de vous revoir.

Je lui réponds en souriant également :

De même, Arwen, est-ce que vous avez deux tables, une pour deux et une seconde pour Robert ?

Mon garde-du-corps a arrêté de conter fleurette pour nous suivre, mais vu comment il respire souvent un mouchoir, je pense que la dame de son cœur lui a donné un beau présent. En-tout-cas, l’ainé hoche la tête et nous amène jusqu’à une table sur les toits, donnant une belle vue sur les Palais, avant de prendre notre commande. Une fois seuls, Robert étant resté au rez-de-chaussée, j’indique à mon accompagnatrice :

Inutile de m’appeler Sir, Tagar suffira. Ma famille a été anoblie il y a des siècles, mais juste parce que nous fournissons des bons fonctionnaires pour le Reike, à chaque génération, nous n'avons que peu de bien.

Je lui verse un verre d’eau, puis je lui demande :

Vous connaissez la cuisine de Melorn ? À titre personnel, je trouve que c’est une des meilleures de tout le Sekaï.

Ellana s'était méprise en pensant que Tagar voulait se rendre à Melorn. La petite correction sur le fait que c'était un restaurant à Ikusa qui faisait des plats originaires de Melorn la rassura. Elle se sentait honteuse de s'être laissé aller aux souvenirs.
Le restaurant dont parlait Tagar se trouvait relativement proche. Ce n'était pas un établissement des plus distingués mais ce n'était pas non plus une vulgaire auberge. Il y avait relativement du monde sans pour autant en être étouffant. Les différentes odeurs se mélangeaient et, à l'unisson, donnait une odeur de nostalgie. Ellana était plus absorbé par l'environnement, que ce soit par l'observation à la découverte de l'endroit et l'état des lieux, ou par l'olfactif avec toutes ces odeurs alléchantes. Pendant que l'elfe était dans sa bulle, Tagar demanda à prendre place, autant pour eux deux que pour le garde qui jusqu'ici, les suivaient de près.

Une fois installés, ils profitèrent d'autant plus de la découverte du toit donnant sur un paysage agréable sur le palais ainsi qu'une partie de la ville. Après avoir admiré la vue, Tagar reprit la conversation. Il rectifia qu'elle pouvait simplement l'appeler par son nom, expliquant que l'anoblissement était plus une formalité des services fournis pour le Reike qu'une réelle richesse de biens. Ellana prit en compte ce qu'il disait tout en hochant la tête.
Elle fit tout de même remarquer que la noblesse ne se résultait pas toujours à la quantité de biens et qu'il était bien plus honorable d'être anobli pour avoir servi depuis des siècles et des générations. Mais, comme à sa demande, elle cessa d'utiliser le titre de "Sir".

La serveuse n'allait pas tarder à prendre commande, elle déposa carafe et corbeille de pains à disposition avant de laisser des cartes de menu. Tagar en profita pour servir les verres vides tout en demandant si Ellana connaissait la cuisine de Melorn. Elle répondit toujours dans le sarcasme :

"Je pense qu'il n'y a pas d'elfe qui ne connaisse pas cette cuisine. Vous semblez vous y connaître, vous êtes-vous déjà rendu à Melorn pour y goûter les véritables recettes ? Ce n'est pas souvent qu'un humain soit amateur de ces spécialités."

Durant leur dialogue, la serveuse les interrompit un instant pour prendre leur commande avant de repartir nonchalamment. Ils reprirent tout aussi naturellement la conversation. Elle posa quelques questions autour du voyage et sur les mésaventures qu'il ait pu vivre. Ellana l'écouta attentivement, il racontait toujours d'une manière tranquille et assez aisément. En retour, elle ne parlait pas trop d'elle et rebondissait toujours au sujet de Tagar.

La discussion se passe bien avec la jeune dresseuse et elle me pose ensuite des questions sur Melorn auquel j’y réponds bien volontiers :

J’y suis allé quand j’étais adolescent, mon père, qui était contrôleur Royal, m’a pris comme apprenti et m’a appris le métier. Mon premier amour était une elfe de Melorn d’ailleurs et j’ai pu goûter pendant quelque temps ses plats, avant qu’elle ne me quitte.

Je ne veux pas penser à cette étape de ma vie et je continue :

Bref, j’y suis ensuite retourné pendant la guerre, afin de développer les relations commerciales concernant des matériaux stratégiques et j’ai y passer un bon moment. Depuis, mon poste m’interdit de quitter le Reike sans l’autorisation de l’Impératrice et c’est bien dommage.

Voilà, je pense avoir tout dit sur ce sujet et je continue, lui faisant partager mes impressions sur mes voyages et sur la population de Melorn. Nous échangeons ainsi un certain temps et si la conversation reste agréable, je me rends bien compte qu’Ellana parle peu d’elle. C’est pourquoi lorsque le dessert arrive, je décide, sans mauvais jeu de mots, de mettre les pieds dans le plat :

Vous ne parlez pas beaucoup de vous, ce qui peut, d’après mon expérience, signifier deux choses, la première, c’est que vous pensez que votre vie n’est pas suffisante pour m’intéresser et la deuxième que votre passé est tellement douloureux que vous ne voulez pas en parler. Que soit l’une ou l’autre solution, n’a pas d’importance pour le moment. Vous avez le droit de garder votre jardin secret et nous verrons bien, si, à force de nous côtoyer, nous deviendrons plus proche, ou pas.

En effet, je compte revenir souvent à la base du RSAF pour prendre Lancelot lors de mes voyages ou m’en occuper régulièrement, en lui faisant faire de l’exercice, tout simplement.

En écoutant son récit, Ellana accrocha sur cette anecdote du premier amour qui avait provoqué un saut dans le temps dans son histoire. Il ne fallait pas être une lumière pour comprendre quel effet cela lui provoquait d'en parler. Ellana n'en tint pas rigueur. Elle prit en compte également qu'il avait de bons contacts ; des relations commerciales, ainsi qu'une certaine liberté si ce n'est de sortir du Reike.

Après le repas, à la remarque de Tagar sur le silence d'Ellana, elle ne broncha pas. Elle n'avait rien à cacher mais n'avait jamais d'intérêt à se dévoiler. Se connaissant curieuse et espiègle, elle avait conscience de ce que pouvait provoquer un surplus d'informations révélés. Elle se sentait tout de même concernée par la première option qui était du manque d'intérêt de sa vie personnelle. Elle se contenta de sourire, se jouant de ses silences.

"Vous avez bien de l'expérience je vous le confirme. A votre guise si vous souhaitez réellement en savoir plus."

L'idée de se côtoyer de temps à autre n'était pas désagréable. Ellana ressentie que cet homme était une plaisante rencontre et qu'il était gratifiant de discuter avec. Une fois le dessert terminé, elle lui confirma qu'elle sera la vétérinaire attitrée de Lancelot et qu'ils se recroiseront forcément.
La serveuse repassa, demanda si tout s'était bien déroulé avant de repartir. Ellana paiera sa part, et en se levant elle tenait à faire part de son contentement d'avoir rencontré Tagar mais toujours d'une manière vague.

"En tout cas j'espère pouvoir vous être utile un de ces jours, j'ai d'autres compétences à offrir que le soin animalier."

Elle lui sourit, le remercia encore et le proposa de l'accompagner jusqu'au griffon où ils se sépareraient afin qu'elle puisse vaquer à ses occupations et lui à ses devoirs.