- Rapport physiologique du Sujet:

Grand, et paradoxalement doté d'une musculature sèche, le Docteur est un être aussi "imposant" qu'impressionnant. Se tenant toujours parfaitement droit et au port-altier, le médecin de peste ne brise son attitude d'épouvantail que lorsqu'il réalise ses différents travaux, se courbant alors tel un vautour sur une proie appétissante. Toujours engoncé dans ses habits de médecin, il est extrêmement difficile d'observer l'individu sans son masque et il est donc, naturellement, très difficile d'établir son portrait. Les rares individus ayant observé ses traits le décrivent comme un homme au visage anguleux, aux yeux bleu-vert dont les pupilles sont fendues tels des yeux de serpent et à la chevelure châtain et courte. Une fine barbe vient habiller une mâchoire relativement dessinée tout en entourant des lèvres pincées. Son nez quant à lui n'est pas spécifiquement anormal, ni trop ni trop petit. Pour le reste, son corps présente les traces de très nombreuses cicatrices et brûlures, vestiges d'expériences passées que le Docteur lui même a effectué sur sa propre enveloppe. Son attitude louche est elle renforcée par l'absence de son s'échappant de la gorge du médecin. En effet, ce dernier est muet de naissance et ne peut donc pas naturellement parler, usant de sa propre magie pour communiquer avec son entourage.

- Rapport psychologique:

Le Docteur est un grand malade. Paradoxalement. Obsessionnel vis à vis de ses travaux, le médecin parcourt le monde non pas dans le but de sauver des vies mais pour étendre ses propres connaissances et pour réaliser de nouvelles potions, expériences ou autres procédures médicales qu'il pourrait par la suite appliquer à ses potentielles victimes... Ou patients, selon comment on tourne la chose. L'homme possède malgré tout un esprit particulièrement analytique, cherchant toujours à comprendre la logique derrière chaque action, ou au moins à comprendre la nature de ce qui a eu lieu devant lui. Il ne montre généralement aucune émotion exagérée, sauf lorsqu'il se retrouve plongé dans ses œuvres ou qu'il rencontre un confrère ou une consoeur partageant sa vision des choses. Le Docteur est également une personne incroyablement respectueuse et même face au pire des malfrats ou aux plus grandes provocations, il se contentera toujours de répondre avec flegme et par un trait d'humour. L'auto-dérision n'étant chez lui qu'un moyen simple de détourner une situation sans intérêt et de ramener la chose à sa propre personne. Ou, au moins, de recentrer le débat sur ce qui l'intéresse vraiment. A savoir la médecine et le soin des maladies. Est-ce que le fait qu'il soit obsessionnel a déjà été évoqué?

Que faut-il, pour bâtir une symphonie? Il faut un patron pour un mouvement qui dictera les clés, le tempo. Un arrangement de notes qui formera une harmonie. Il faut un orchestre. Des maîtres de leur art qui œuvrent à l'unisson pour transformer des sons en mélodies. Et ces mélodies en expérience. Mais plus important encore, il faut une émotion. Un sentiment si fort, qu'il transcende les mots pour être converti en une autre forme. Une symphonie en perpétuelle mouvement dans nos cœurs.

Silencieux, j'écoute la multitude de râles et gémissements me faisant face, à l'instar des mécanismes d'une horloge hydraulique parfaitement réglée. Des cris réguliers et millimétrés qui résonnent dans leur propre mélodie. Chaque complainte, chaque larme versée est le vecteur d'une émotion propre. Une douce mélodie résonnant doucement dans l'air comme le vent portant les saveurs purificatrices de la lavande. Seulement, malgré cet arrangement musical, je sens cette émotion étrange. Une étrange impression de vide. Non pas physique, mais psychologique. Cherchant à me rappeler les événements pré-datant le début de cette symphonie, je ne parviens qu'à extraire des entrailles de mes pensées que quelques piètres éléments. Mon surnom. Ma dévotion envers mon travail. Et mon devoir de toujours pousser mes expériences plus loin. Pour le reste, seulement des échos inaudibles. Des sons venant parasiter dans un brouhaha désagréable l'harmonie cérébrale de mon être. Je n'ai que quelques souvenirs de ma propre existence. Comme si on me racontait l'histoire d'une vie que j'ai l'impression de n'avoir jamais vécu. Comme si je n'étais pas vraiment moi même.

Soudain, le bruit caractéristique de la chair se déchirant me sort de mes pensées. Devant moi, un homme se fait opérer par mes soins. La plaie parcourant son corps est grande et infectée. La sueur perlant au niveau de son front et ses tressaillements me ramènent à ce que je semble savoir faire. Soigner. Alors, je replace ses viscères au bon endroit. Je m'assure que tout soit à sa place avant de recoudre le tout au fil. Puis, posant mes mains gantées sur son corps brûlant, je sens une étrange énergie me parcourir tandis que l'infection est drainée de sa carcasse. Ah oui, je sais faire ça aussi. Fermant les yeux, je tente de replonger dans l'abîme de mon être à la recherche des échos de mon existence. Qui suis-je réellement? Pourquoi ce trou de mémoire?

J'ai alors des images qui me reviennent. Un village, perdu dans les montagnes. Une famille aimante malgré mon mutisme. Sans intérêt. Je continue mon introspection, tandis que mes mains viennent recoudre une nouvelle plaie béante. Un autre patient, ce dernier ne survivra probablement pas. Tant pis, je m'occupe de lui quand même, ça me fera la main. Je vois alors de nouveaux tableaux de mon passé. Une personne me prenant sous son aile. Tobias. Un gobelin étrange qui connait visiblement la médecine et me juge digne d'être son apprenti. Soit. Ce souvenir est intéressant. Non pas pour la nostalgie qu'il procure, mais pour ses informations. Je revois les basiques de la médecine, alors que nous voyageons de villes en villes. la naissance de quelques uns de mes pouvoirs, aussi. Il m'apprend à soigner, non pas par la magie, mais par l'alchimie et la mécanique des fluides. Par la chirurgie. Par la logique. Je revois ensuite notre séparation, des années plus tard, lorsqu'il me juge digne de poursuivre ma route seule et qu'il souhaite prendre sa retraite. Fort bien. Il m'a appris ce dont j'avais besoin et, comme un outil, je peux à présent le laisser reposer sur la table où il souhaite s'échouer.

Je passe ensuite à un nouveau patient. Ah non, une patiente. Cette dernière se tient allongée en position fœtale, comme un enfant abandonné et en pleurs. Elle se tient le ventre. Elle gémit. Je la plaque contre la table d'opération, plongeant les globes oculaires de mon masque dans son regard humide. Elle a peur. Alors je lui parle. Ma voix résonne dans son esprit. Cela l'effraie encore plus. Alors je la force à boire un peu plus de lait de pavot. Elle arrête de gémir. Elle ne bouge plus. Bien. Je peux regarder ce qu'elle a à présent. Le bébé qu'elle porte se présente mal. A vrai dire, ce dernier est déjà mort. Et l'étrange putréfaction qu'il est à présent fatigue et dérange la mère porteuse. J'étale donc mes outils sur la table, prenant le scalpel. Puis je découpe sa chair. Doucement. Méthodiquement. Avec une lenteur perverse. Le raisiné de son corps se met à couler le long de sa peau de pèche, glissant le long des gouttières prévues à cet effet sur la table. Une pince ici. Une pince là. J'écarte ses entrailles pour en extirper le bambin mort-né, le jetant par la suite sans intérêt sur le meuble prévu à cet effet. La mère survivra. Mais pas sa psyché. Tant pis, ce n'est pas mon rôle d'être psychologue. Je récupère alors d'autres outils. D'autres décoctions. L'opération n'est pas finie, je dois encore refermer le tout et m'assurer qu'elle puisse se réveiller. Dans mon esprit, cependant, l'écho de ma vie reprend son cours.

Je suis à présent à Mael. La guerre des titans a lieu. Je l'observe de loin et assiste les nombreux blessés et mourants. Je me moque de qui se bat ou non. Je veux juste que les vivants gagnent. Qu'ils me permettent de continuer mon œuvre. D'étudier les maladies et les techniques de soins. De comprendre comment fonctionnent les corps des mortels. Je ressens ma peur et mon excitation. Je ressens ma soif de connaissance. De savoir. Mon envie de parvenir à moi aussi altérer les formes et les propriétés physiques de personnes. De pouvoir manipuler à souhait le fonctionnement corporel de celles et ceux passant entre mes mains. Je me mets à rire. Au loin une explosion se fait entendre. De nouveaux blessés vont arriver. Je vais pouvoir pratiquer.

Tiens, cette fois c'est un enfant qui me fait face. Son corps est déchiré en plusieurs endroits. De nombreuses pustules s'étendent sur son corps et on peut facilement deviner les zones où le gamin s'est gratté et a arraché les bubons infectieux qui le démangeaient. Il lui reste quelques heures à vivre. Au mieux. Je lui fais boire une décoction pour au moins le faire partir sans douleur. Je pouvais soigner son infection, cela ne servait juste à rien. Le sang s'était trop écoulé en dehors de son corps. La chair en lambeaux de ses jambes et son bras droit ne laissait aucun doute sur le futur de ce petit être. Même s'il survivait, il n'aurait été qu'un poids. Un boulet pour ses parents. D'une certaine manière, je leur rend service. Et puis, je ne peux sauver tout le monde. Le corps de l'enfant cesse de trembler. Parfait. Je tranche une incision discrète au niveau de sa jugulaire. Le liquide carmin s'écoule rapidement. Sa peau se met à pâlir. Adieu, petite chose pitoyable. Pitoyable?

De nouvelles images, cette fois de mes interactions avec d'autres collègues. Des "officiels" du Reike. Des charlatans. Des imbéciles ne comprenant pas l'intérêt d'une médecine sans contrôle. De la nécessité du progrès médical et de la recherche. Pour eux, les reikois ne doivent pas subir ces expériences. Ils doivent être épargnés. Traités différemment. Balivernes. Aucun sang n'est trop précieux. Aucune personne trop importante. La maladie et la mort nous touche tous. Aussi il faut s'en débarrasser. Et c'est via des recherches que cela se fait. Pas uniquement via la magie. Tant pis pour eux, ils se ferment à un progrès imminent. Je laisse leur nation stupide et reviens alors à mon laboratoire. Ah. Mon laboratoire.

Je regarde autour de moi, revenu dans le présent de ma propre réalité. Où est-ce que je me situe, déjà? Ce laboratoire dans mes souvenirs n'existe plus. J'ai repris la route. Continuant mes études infinies. Pratiquant la médecine. Comme je le fais à présent, à recoudre ou accompagner les malades et blessés se présentant à moi. Chaque fois, je m'en souviens à présent, j'utilise mon expertise pour qu'on me donne un endroit où pratiquer. Cette fois, c'est dans une clinique républicaine. Propre. A défaut d'être bien organisée. Je me détourne alors des corps encore gémissants pour passer dans une nouvelle pièce. J'y retrouve un alambic, bouillonnant et crépitant. Un long sourire se dessine sous mon masque tandis que j'observe le liquide violet qui circule parmi les différents tuyaux. Le produit serait bientôt prêt.

Et avec lui, mes prochaines expériences.

- La pègre: Naturellement, le Docteur s'intéresse de près ou de loin à la pègre et ses réseaux tentaculaires. S'il se soucie très peu de leurs affaires lucratives, le médecin de peste n'hésite pas à interagir avec ses membres afin de se procurer des "cobayes" et autres matériaux illicites pour ses diverses expériences. De plus, il leur vend aussi quelques drogues de sa conception, afin de se financer plus "régulièrement".

- FMR: S'il n'en fait pas partie, l'humain doit reconnaître qu'il éprouve un certain respect pour les troupes médicales de l'Empire. Seulement, ces derniers sont pour lui trop liés à une nation pour pouvoir exercer leurs œuvres efficacement et il considère la soumission à un état comme des chaînes désagréables qui pourraient venir freiner ses ambitions personnelles.

- Esclavagisme: Le Docteur se moque éperdument de si un esclave a des droits ou non. Pour lui, ces derniers sont un moyen simple de mettre la main sur de nouveaux cobayes et surtout, de ne pas avoir à rendre compte par la suite à qui que ce soit. De ce fait, le médecin vit l'abolition de l'esclavagisme comme un frein à ses expériences. Même si, en vérité, il n'hésite pas à en acheter sur le marché noir pour continuer ses petites affaires.

- Lutte contre les TItans: Bien qu'il n'ait aucune religion particulière, le Docteur s'est longtemps intéressé aux titans et à leur influence sur le monde. Pour lui, les êtres divins sont une menace non pas à cause de leur volonté ambigue, mais pour leur immaturité. Il ne comprend juste pas comment des êtres "parfaits" peuvent agir de manière aussi inconsidérée pour leurs propres travaux. Son côté chercheur, sans doute. En revanche et malgré son désir d'empêcher les divins de mettre fin à son terrain de jeu, le Docteur ne peut retenir son respect et admiration pour Puantrus, sans qui il n'aurait, de facto, aucun travail.