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vale lux
Début Novembre an 3 L'aventure fut rude, nous nous sommes séparés avec Morndrizel des suites de notre mission. J'ai besoin d'être seule, de me concerter avec moi-même sur mes intentions envers le Nouvel Ordre, envers Seagan, envers le peuple. Mon corps a souffert, mon cœur peiné et mon âme altérée, je remets en question ma propre existence au sein de ce monde. Depuis que je suis partie hors des murs de Célestia, j'ai pu contempler la déchéance de l'humanité, j'ai pu admirer le Chaos sur les terres désolées de Shoumeï, le mal ronge chaque parcelle sur Sekaï. La magie des titans est imprégnée partout, surtout depuis leur récent passage. Je comprends mieux à présent pourquoi les animaux devenaient fous lorsque j'étais encore dans la forêt des Pins Argentés. Je comprends mieux, depuis que je me suis perdue dans ce petit village nommé Alfregium, ce qu'il s'est véritablement passé. Voyant par dizaine des monstres plus grands, plus forts, plus voraces a chacun de nos pas, Deydreus et sa troupe de Serres n'ont pas fléchis, désireux de détruire chacune de ses abominations. Le chaos existe bel et bien. Les titans n'ont pas seulement voulu détruire une partie de ce monde, ils ont également condamné des fervents croyants, quitte à les faire renaître de leurs cendres pour en faire des êtres abominables et malsains. Je ne sais plus quoi faire, qui dois-je croire, à qui puis-je me confier ? Il est hors de question que je parle de mes doutes, surtout envers n'importe qui du Nouvel Ordre. Ma peur est grande, mon mental faiblit, je suis seule.
Déstabilisée, je revois encore le corps de Morndrizel étendue sur le sol, sa tête éloignée de quelques pas. Je revois mes croisés donner leur vie, mourir tranchés, déchiquetés, broyés. Je revois le sang éparpillé sur le sol, j'entends ce claquement de chaînes et puis, plus rien. Nous étions de nouveau en lice pour notre mission, nous revenions sur nos pas et changions de chemins. J'entends encore le croassement des rapaces, les coups d'épées et les nombreux sacrifices dont nous avons fait preuve. Je me suis rendu compte que je suis loin d'être une guerrière comme Elisabeth, peut-être est-ce cela qu'il me manque : de la hargne, de la haine et peut-être même de la volonté.
Tandis que je vole dans les airs à une cinquantaine de mètres, je laisse mon esprit s'égarer et se poser mille et une question. Que vais-je faire en rentrant à Célestia ? Peut-être vais-je m'enfermer dans ma chambre quelques jours, quelques semaines et poser dans mon grimoire tout ce que j'ai sur le cœur. Puisque je ne peux en parler à personne, peut-être vaut-il mieux l'écrire ? Personne ne volerait un simple journal, ce serait bien là quelque chose que je ne tolérerai point. Je surplombe un long chemin sinueux en contrebas, je décide de m'arrêter près d'un vaste champ désert où seuls les corbeaux viennent récupérer de quoi se nourrir. Posant pied à terre, posant mes mains contre une barrière de bois dévoré par les mites, j'admire le paysage grisonnant et les terres arides et sèches de Shoumeï. Il me faudra encore un voir deux jours de vol avant de retrouver Sancta. J'ai préféré que mes croisés restent auprès de Morndrizel, ils seront sur un chemin sûr, d'autant que j'ai besoin de déployer mes ailes et de me laisser un temps de solitude. Cette solitude qui m'a tant manqué et que j'ai pourtant détestée lorsque j'étais au fin fond des Pins Argentés.
Je ne reverrai jamais le royaume des cieux, je suis une simple créature qui réside désormais sur Sekaï, n'ayant aucun réel pouvoir sur le monde. Qui voudrait écouter un ange, créature des Titans, ces monstres qui ont détruit l'équilibre et envahirent le monde d'une gigantesque vague de peur, de mort et de monstres. Pourtant, ils restent mes parents et je leur dois fidélité et amour. Du moins, c'est ce que je crois. Je ne sais plus trop où me placer. Tout ce que je sais, c'est que j'aime les mortels. Ils sont intuitifs, ils ont une grande capacité d'écoute, de force et d'ingéniosité. Bien qu'ils n'aient pas beaucoup d'espérance de vie, ce sont des êtres aux multiples talents. Le Nouvel Ordre est devenu ma maison, jamais je ne pourrais la quitter, je m'y sens bien et en paix. C'est d'ailleurs le seul lieu dans tout Sekaï où l'air y est respirable malgré les tempêtes de neige et le manque de nourriture. Toutefois, je remarque aussi la pauvreté dans laquelle vivent ces pauvres âmes, n'ayant parfois pas assez pour se couvrir ou pour manger. Manquant cruellement de force, les mortels ne sont pas non plus si bien loti qu'on voudrait le faire croire.
Soudain, j'entends un étrange hurlement, plutôt strident et quelques feulements. Détournant ma tête, j'aperçois une dizaine de corbeaux qui acculent un mammifère dont je n'arrive pas à distinguer la forme. Je les regarde avec chagrin, c'est ainsi qu'est fait la nature après tout, les choses doivent se faire d'elle-même. J'allais reprendre ma route jusqu'à ce que j'entende une petite voix dans mon esprit. Je m'arrête soudainement et entend un "Aidez-moi !" bien plus strident. Je vois les corbeaux se projeter sur la pauvre créature, arrachant des bouts de poils de la bête. Ni une, ni deux, je déploie une dizaine de petites lames lumineuses et les agitent en direction des corvidés qui s'élancent dans les airs, lâchant leur proie. Le pauvre animal est ensanglanté et respire avec difficulté. Je m'approche de la chose et remarque qu'il s'agit d'un petit chat noir, son pelage est couvert de sang et il lui manque quelques touffes. Sur son poitrail gît comme un symbole en forme de coeur. Je pose mes deux mains par-dessus l'animal et me met à soigner ses blessures, une lueur blanche apparaît et l'enveloppe. Le sortilège finit par soulager le chat, refermant et cautérisant ses plaies. La petite créature ouvre les yeux, se relève et s'assoit face à moi. Mon regard ambré croise le sien, d'un jaune malveillant et l'iris fendu. L'animal recule, me toise et montre ses babines. Elle crache dans un ton sec un simple :
— Je te remercie.
— Quelle politesse.
— Tu peux m'entendre ? Dit l'animal en écarquillant ses iris, s'arrêtant de pester.
— J'ai la capacité de parler aux animaux.
— Oh ! Je vois. En tout cas, merci du coup de "patte".
— Tu es seule ?
— Oui. Et toi ?
Je n'arrive pas à répondre. Je la questionne :
— Que viens faire un chat dans cet endroit reculé, au milieu des terres arides et des monstres qui rodent ?
— Je ne suis pas un simple chat. Je me nomme Fay, une grande démone venue mettre le Chaos !
— Un démon. Sous forme animal ? Uhm. Tu me rappelles une certaine démone ... une dénommée Cornue.
— Je ne vois pas de qui tu veux parler. En tout cas, je vais pouvoir repartir en quête !
— Quelle est donc ta quête ?
L'animal me fixe, laisse un étrange silence et me siffle alors ces quelques mots.
— Retrouver ma forme originelle.
— Tu n'es donc pas sous métamorphose ?
— Oui. Et non. Techniquement, j'étais vouée à mourir et puis, on n'a pas voulu de moi. Alors, me voici sous la forme d'un ... chat.
— Oh. Ta quête semble bien périlleuse.
— Oui. Et pour toi ? Quelle est la tienne ?
Un silence.
— Je n'en ai plus. Ma quête s'est terminée il y a plus de 5000 ans.
— Je vois. Ecoutes, je suis privée d'une grande partie de mes pouvoirs. Personne ne me comprenait à part... toi. Peux-tu m'emmener avec toi ?
Je réfléchis, posant ma main sous le menton en fixant le démon métamorphosé en chat. Les démons sont tout de même des personnes fourbes. J'utilise ma senseur magique et en effet, je perçois un pouvoir démoniaque mais très infime. Ce démon ne ferait pas de mal à une mouche.
— Je m'en vais à Célestia, dans les terres enneigées, par-delà les rocheuses. Là-bas s'y trouve ma maison.
— Oh ! Je vais mourir de froid.
— Je prendrais de quoi te réchauffer.
— Tu m'as l'air triste, Ange.
— Nous le sommes tous, chat. Et appelles moi Luvïel. Tu n'as pas peur des hauteurs ?
— Je suis un chat, j'aime grimper sur les arbres !
— Ce ne sont pas de ces hauteurs dont je parle.
Je prends le chat entre mes mains, le soulève et le serre contre moi. Fay vit une de ses neufs vies défiler devant ses yeux tandis que je m'envole dans le ciel, gardant précieusement l'animal. Son petit cri de stupeur me fit sourire. Je ramène donc une compagnie, seule et tout aussi perdue. N'ayant plus de réel but, je compte aider Fay dans sa quête personnelle.
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Le trajet est long jusqu'à Célestia, même par les airs. Nous faisons quelques pauses en compagnie du chat noir et évitons les endroits qui nous paraissent dangereux. Faisant profil bas en espérant rejoindre mon doux foyer, nous passons par les montagnes qui s'étendent à perte de vue. Le chemin du retour me rend nostalgique, comme si je disais au revoir à toutes les aventures que j'avais accomplis jusqu'alors, avant le retour au calme dans les hauteurs des monts enneigés. Fay n'aime pas vraiment le froid, il va falloir qu'elle s'y habitue si elle désire rester à mes côtés. Alors que je voltige à une cinquantaine de mètres du sol, le démon contemple de son regard félin, un paysage grandiose et baigné de lumière. Quelques rayons se faufilent entre les nuages gris, le vent fouette ses petites moustaches et surtout, elle est subjuguée par la beauté qu'offre Sekaï. Même s'il s'agit d'un démon métamorphosé en animal, il n'en reste pas moins que voir ces paysages donnent de l'inspiration, une émotion et s'ancrent dans nos esprits. Nous sommes libres. Je songe à tout ce que j'ai vécu depuis que j'ai quitté la ville pendant plusieurs semaines, mon moral a connu des hauts et des bas, j'ai pu découvrir la peine et la fatigue. Les nombreuses rencontres sur le chemin m'ont également fait prendre du plomb dans la tête. Je repense à Galadriel, aux croyants que l'on a croisé sur notre route. Mais aussi aux reikois à Sancta, au combat contre l'élémentaire de foudre puis les événements des souterrains. Tout comme avec Deydreus, j'ai rencontré la peur avec les morts, la scierie, le manoir et la crypte. Ersa et les nombreuses geomis, sans parler de la mort du frère de Vilkas. Nous avons tant donné, tant subit, je me sens plus forte que jamais et plus déterminée.
Toutefois, ma loyauté envers les Divins vacille et je desserre les chaînes invisibles de mon passé. J'ai compris que je ne pourrais jamais offrir au monde la lumière dont il a besoin, que tout le monde ne pourra être sauvé et qu'il est impossible que la paix règne dans le cœur des Hommes. Tout simplement que je n'avais pas compris le raisonnement des mortels, ces êtres incapables de tenir plusieurs millénaires, sachant pertinemment qu'un jour ou l'autre, leur corps retournera à la poussière et leur âme retrouvera les cieux. J'ai été aveuglé par la seule main qui m'a été tendue, cette main qui m'a enlacé pour me grandir au sein d'un monde dont je n'avais pas les connaissances suffisantes. Un seul homme : Seagan. Je suis meurtrie par ses mensonges, ne comprenant pas que l'être se disant le plus pieux d'entre nous choisisse de pactiser avec le malin. Un Lumina pour qui je me suis dévouée m'a peut-être menti, manipulé et blessé. Ne suis-je qu'une arme ? Qu'une créature ailée au simple service de la foi ? Je compte me faire entendre et cette fois-ci, je veux que l'on m'écoute. J'ai besoin de lui parler, de comprendre ses gestes et qu'enfin, il se livre. Peut-être qu'un lien se brisera. Peut-être qu'il se renforcera. Dans tous les cas, vivre auprès des reikois et pouvoir entendre leur volonté, leur pensée et connaître une partie de leur passé m'a permis de constater que nous ne sommes ni bons, ni mauvais. Le Nouvel Ordre est un regroupement d'hommes et de femmes ayant été bafoués, massacrés, humiliés. Ce sont aussi des hommes et des femmes dévoués à une cause, car la peur les as tenaillés. Il faut mettre tout cela au clair. Pour ma part, je ne désire nullement vivre dans un fanatisme extrême et espère entendre raison à ceux qui souhaitent éradiquer les impies. Nous sommes tous ici sur Sekaï, car nous avons fauté, nous ne sommes ni de blanc, ni de noir. En chacun de nous gît une part d'ombre et de lumière, moi-même, j'ai succombé.
J'ai tué une consœur ressuscitée, j'ai asséné des coups mortels à en faire gicler le sang et à écouter l'agonie de mes ennemis, dilapidé des fanatiques de X'O-rath, détruit des êtres vivants qui protégeaient leur maison, bien que nous ne savions pas que nous étions sur leur territoire. Malheureusement pour moi, nous ne pouvons raisonner les morts, ou les bêtes, par les paroles. Je comprends qu'il faille tuer ou être tué, comme m'a expliqué le guerrier aux sombres armoiries. J'ai peur de revenir. Vivre en dehors des murs fut une révélation et il est désormais impossible de me retirer tout ce que j'ai vécu. Ma confrontation avec Seagan me terrifie, seulement je dois rester forte et fière et ne pas lâcher prise. Tenant fermement le chat dans mes bras, nous apercevons enfin les grandes portes de Célestia.
— Bienvenue à la maison.
Toutefois, ma loyauté envers les Divins vacille et je desserre les chaînes invisibles de mon passé. J'ai compris que je ne pourrais jamais offrir au monde la lumière dont il a besoin, que tout le monde ne pourra être sauvé et qu'il est impossible que la paix règne dans le cœur des Hommes. Tout simplement que je n'avais pas compris le raisonnement des mortels, ces êtres incapables de tenir plusieurs millénaires, sachant pertinemment qu'un jour ou l'autre, leur corps retournera à la poussière et leur âme retrouvera les cieux. J'ai été aveuglé par la seule main qui m'a été tendue, cette main qui m'a enlacé pour me grandir au sein d'un monde dont je n'avais pas les connaissances suffisantes. Un seul homme : Seagan. Je suis meurtrie par ses mensonges, ne comprenant pas que l'être se disant le plus pieux d'entre nous choisisse de pactiser avec le malin. Un Lumina pour qui je me suis dévouée m'a peut-être menti, manipulé et blessé. Ne suis-je qu'une arme ? Qu'une créature ailée au simple service de la foi ? Je compte me faire entendre et cette fois-ci, je veux que l'on m'écoute. J'ai besoin de lui parler, de comprendre ses gestes et qu'enfin, il se livre. Peut-être qu'un lien se brisera. Peut-être qu'il se renforcera. Dans tous les cas, vivre auprès des reikois et pouvoir entendre leur volonté, leur pensée et connaître une partie de leur passé m'a permis de constater que nous ne sommes ni bons, ni mauvais. Le Nouvel Ordre est un regroupement d'hommes et de femmes ayant été bafoués, massacrés, humiliés. Ce sont aussi des hommes et des femmes dévoués à une cause, car la peur les as tenaillés. Il faut mettre tout cela au clair. Pour ma part, je ne désire nullement vivre dans un fanatisme extrême et espère entendre raison à ceux qui souhaitent éradiquer les impies. Nous sommes tous ici sur Sekaï, car nous avons fauté, nous ne sommes ni de blanc, ni de noir. En chacun de nous gît une part d'ombre et de lumière, moi-même, j'ai succombé.
J'ai tué une consœur ressuscitée, j'ai asséné des coups mortels à en faire gicler le sang et à écouter l'agonie de mes ennemis, dilapidé des fanatiques de X'O-rath, détruit des êtres vivants qui protégeaient leur maison, bien que nous ne savions pas que nous étions sur leur territoire. Malheureusement pour moi, nous ne pouvons raisonner les morts, ou les bêtes, par les paroles. Je comprends qu'il faille tuer ou être tué, comme m'a expliqué le guerrier aux sombres armoiries. J'ai peur de revenir. Vivre en dehors des murs fut une révélation et il est désormais impossible de me retirer tout ce que j'ai vécu. Ma confrontation avec Seagan me terrifie, seulement je dois rester forte et fière et ne pas lâcher prise. Tenant fermement le chat dans mes bras, nous apercevons enfin les grandes portes de Célestia.
— Bienvenue à la maison.
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